Étude d'impact au format PDF (22 Koctets)
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
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Ministère des affaires étrangères
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PROJET DE LOI
autorisant la ratification de l'accord entre le Gouvernement de la République française
et l'Organisation internationale pour les migrations portant sur l'exonération
fiscale des agents de cette organisation qui résident en France
NOR : MAEJ1113524L/Bleue-1
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ÉTUDE D'IMPACT
I. - SITUATION DE RÉFÉRENCE ET OBJECTIFS DE L'ACCORD OU CONVENTION
L'application de la convention fiscale franco-suisse signée le 9 septembre 1966 (Convention entre la République française et la Confédération suisse en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune) telle que modifiée par un avenant du 22 juillet 1997 1 ( * ) , conduit à soumettre les fonctionnaires de l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) 2 ( * ) , organisation internationale située à Genève, qui résident en France (frontaliers), à l'impôt sur le revenu en France.
Cet avenant a en effet modifié la situation des personnels frontaliers de l'OIM. Avant son entrée en vigueur, la convention fiscale franco-suisse attribuait le pouvoir d'imposer leurs revenus à la Confédération suisse, où ils étaient exonérés d'impôt du fait de l'accord de siège liant cet Etat à l'OIM. Depuis l'entrée en vigueur de l'avenant de 1997, la convention amendée soumet les frontaliers travaillant en Suisse et résidant en France à la juridiction fiscale française. Les frontaliers de l'OIM ont donc vu leur situation fiscale modifiée, notamment du fait de l'absence d'accord entre l'OIM et la France permettant, comme c'était le cas lorsque le lieu d'imposition se situait en Suisse, d'exonérer d'impôt sur le revenu les rémunérations versées par l'organisation à ses personnels.
L'imposition des revenus en France depuis le 1er août 1998 conduit de surcroît à une double imposition des rémunérations des revenus concernés qui sont également soumis à un impôt interne perçu par l'OIM, comme c'est d'ailleurs le cas dans la plupart des organisations internationales.
Pour pallier ce problème, des mesures ponctuelles ont été prises : suspension des procédures de recouvrement, remise gracieuse de l'impôt, remboursement par l'OIM de l'impôt français à certains agents n'ayant pas pu bénéficier des deux autres mesures...Ces solutions ponctuelles ne satisfont plus à un besoin de clarification juridique à l'égard de la direction de l'OIM et de ses personnels. De surcroît, l'OIM se réservait la possibilité, si la situation devait perdurer, d'augmenter la contribution de la France au budget de l'organisation du montant de l'impôt sur le revenu perçu au titre des rémunérations versées par l'organisation aux frontaliers résidents de France.
Il est précisé que la ratification par la France en 2000 de la convention du 21 novembre 1947 sur les privilèges et immunités des institutions spécialisées des Nations Unies n'a eu aucune incidence sur la situation fiscale des collaborateurs de l'OIM, cette dernière ne pouvant bénéficier de l'exonération d'impôt sur le revenu prévue par cette convention dès lors que l'organisation n'est pas, au sens strict du terme, une institution spécialisée des Nations unies.
Au total, une soixantaine de fonctionnaires travaillant au siège de l'OIM à Genève résident en France et sont soumis à la juridiction fiscale française. En 2010, moins d'une dizaine de fonctionnaires de l'OIM se sont vus notifier un rehaussement d'impôt sur le revenu en France, et ont formulé un recours gracieux contre les procédures en cours, lesquelles ont effectivement été suspendues sur décision du ministre du budget.
II. - CONSÉQUENCES ESTIMÉES DE LA MISE EN oeUVRE DE L'ACCORD OU CONVENTION
Conséquences économiques et financières
L'accord a pour objet d'instituer, pour l'avenir, une mesure d'exonération d'impôt sur le revenu en France des fonctionnaires de l'OIM en poste à Genève et résidant en France à raison des traitements et rémunérations qu'ils perçoivent de cette organisation. Cette mesure concernerait une soixantaine de personnes. Sont également visés les fonctionnaires n'ayant pas la nationalité française mais résidents de France, en poste dans l'un des bureaux de l'OIM en France.
Il faut noter que le système appliqué par l'OIM pour l'élaboration du salaire de ses personnels est différent de celui appliqué par les Nations Unies à Genève et New-York ; ce dernier prend en effet en compte les salaires bruts pour établir le budget avant de consentir une réduction de contribution aux Etats membres en fonction du nombre de leurs ressortissants ayant la qualité de fonctionnaires. L'OIM au contraire établit son budget sur la base du salaire net (déduction faite de l'impôt interne, charges de sécurité sociale et pension de retraite) ; les contributions des Etats membres sont donc déjà réduites en proportion. Si l'OIM devait rembourser l'impôt national dont s'acquittent les agents, la contribution de la France augmenterait en conséquence.
L'impact financier précis de la mesure d'exonération prévue par le projet de loi ne peut être établi avec précision dans la mesure où la situation personnelle des 60 agents concernés n'est pas connue. Une telle information ne pourrait être obtenue qu'auprès de l'organisation elle-même et devrait ensuite être affinée au regard de la situation personnelle de chacun des agents concernés pour la fiabiliser. Toutefois, il est probable que, sans cette exonération, l'OIM sera amenée à rembourser aux agents concernés l'impôt dont ils s'acquittent en France et augmentera en conséquence la contribution demandée à la France.
Le maintien d'une telle situation conduira à terme, à défavoriser le recrutement au sein de l'OIM de fonctionnaires de nationalité française ou qui résident en France.
Conséquences juridiques
L'accord visé par le projet de loi ne nécessite pas de modification de notre droit interne ou l'adoption de dispositions législatives ou réglementaires nouvelles.
L'accord clarifie la situation actuelle qui n'est satisfaisante ni pour les personnels de l'OIM, ni pour les services fiscaux à qui il est demandé de procéder à des remises gracieuses.
L'accord conclu avec l'OIM, dans la mesure où un impôt interne sur les traitements et émoluments est prélevé par celle-ci et reversé au budget général de l'organisation, prévoit une exonération d'impôt sur le revenu pour deux catégories de fonctionnaires :
- ceux qui résident en France et travaillent au siège de Genève (frontaliers) ;
- ceux qui résident en France sans avoir la nationalité française et travaillent dans l'un des bureaux en France.
Les fonctionnaires français travaillant dans l'un des bureaux de l'OIM en France, autrement dit les nationaux recrutés localement par l'organisation, sont donc exclus du nouveau dispositif afin de rendre celui-ci cohérent avec les dispositions contenues dans la plupart des accords internationaux signés par la France.
Les autres catégories de personnels restent exclues de ce dispositif et sont soumis à l'impôt dans les conditions de droit commun.
L'accord prévoit également l'application du taux effectif. Ce dispositif permet de maintenir la pleine progressivité de l'impôt sur le revenu en permettant de tenir compte non seulement des revenus effectivement assujettis à l'impôt sur le revenu en France mais également des revenus exonérés sur le fondement du présent accord.
Les stipulations de cet accord permettent, en définitive, de replacer les fonctionnaires français de l'OIM dans la situation qui était la leur avant la modification de la convention fiscale franco-suisse du 9 septembre 1966, modifiée par avenant du 22 juillet 1997.
Conséquences administratives
L'accord permettra une relation de confiance renforcée entre la France et l'OIM ; les relations entre la représentation permanente de la France à Genève et l'OIM ont pu être parfois entamées par cette question fiscale alors que l'OIM est une institution majeure pour la gouvernance internationale des migrations et un partenaire essentiel dans le cadre des activités humanitaires des Nations unies.
III. - HISTORIQUE DES NÉGOCIATIONS
L'OIM a alerté plusieurs fois la France via la représentation permanente à Genève sur le sort de ses agents soumis à l'impôt en France. Une lettre du ministre en charge du budget, M. Eric Woerth du 26 février 2008 soulignait la volonté de trouver une issue aux difficultés posées par cette situation.
Une réunion de travail, organisée le 11 février 2009 au siège de l'OIM à Genève a réuni :
- des responsables de cette organisation : M. Richard Perruchoud, directeur du département du droit international de la migration et des affaires juridiques et M. Ovais Sarmad, directeur du département de la gestion des ressources ;
- une délégation de la direction de la législation fiscale (DLF) du ministère du budget français ;
- des agents du ministère des affaires étrangères français.
Une lettre du directeur de cabinet du ministre de budget, M. Jean-Luc Tavernier, du 27 mai 2009 à son homologue du ministère des affaires étrangères, M. Philippe Errera, confirmait son accord de principe pour qu'un accord international institue « une exonération d'impôt sur le revenu sur les traitements et émoluments versés par l'OIM à ses fonctionnaires résidant en France qui travaillent au siège à Genève ainsi qu'à ses fonctionnaires résidant en France qui, sans avoir la nationalité française travaillent dans l'un de ses bureaux en France ».
Les services des deux ministères ont élaboré conjointement un projet d'accord reprenant ces termes, accord qui a été formalisé par échange de lettres entre l'Ambassadeur, représentant permanent de la France auprès des Nations Unies à Genève, M. Jean Baptiste Mattéi et le directeur générale de l'OIM, M. William Lacy Swing.
IV. - ETAT DES SIGNATURES ET RATIFICATIONS
L'accord a été signé à Genève le 15 octobre 2010 par l'ambassadeur, représentant permanent de la France auprès des Nations unies à Genève, M. Jean Baptiste Mattéi, et le directeur général de l'OIM M. William Lacy Swing. A ce jour l'OIM n'a pas encore notifié l'accomplissement des procédures internes relatives à l'entrée en vigueur de l'accord.
* 1 Convention fiscale franco-suisse modifiée : http://www.impots.gouv.fr/portal/deploiement/p1/fichedescriptive_2125/fichedescriptive_2125.pdf
* 2 L'OIM est régie par un acte constitutif qui a été adopté à Venise le 19 octobre 1953 et amendé le 20 mai 1987. Cet acte constitutif est entré en vigueur le 14 novembre 1989 et pour la France le 5 décembre 1994, après promulgation de la loi 94-401 du 20 mai 1994 : http://www.iom.int/france/Constitution/index.html