Mesdames, Messieurs,
Le présent projet de loi a pour objet d'autoriser la ratification de l'Accord de partenariat et de coopération, signé le 22 avril 1996 à Luxembourg, entre les Communautés et leurs Etats membres, d'une part, et la République d'Azerbaïdjan, d'autre part.
Cet accord, fondé notamment sur les articles 113 et 235 du Traité de Rome et 101 du traité Euratom, comporte également des dispositions de compétence nationale et doit, à ce titre, être ratifié par chaque Etat membre de l'Union européenne. Il est conclu pour une durée initiale de dix ans. A la date de son entrée en vigueur, il remplacera " l'Accord sur le commerce et la coopération commerciale et économique " entre la Communauté économique européenne, la Communauté européenne de l'énergie atomique et l'URSS, signé le 18 décembre 1989.
L' article 104 de l'Accord précise que la date d'entrée en vigueur sera le premier jour du deuxième mois suivant la date à laquelle toutes les parties contractantes auront notifié au Secrétaire général du Conseil de l'Union européenne l'accomplissement de leurs procédures d'approbation. Toutefois, les dispositions relevant de la compétence communautaire (essentiellement commerciales) entreront en vigueur par anticipation, dans le cadre d'un accord intérimaire.
1. - Historique de l'Accord
Après la reconnaissance des Etats issus de l'Union Soviétique à la fin de l'année 1991, la Commission a pu engager des contacts exploratoires avec les gouvernements des nouvelles républiques indépendantes, afin de renégocier l'Accord de commerce de 1989. L'Union européenne a adopté, le 5 octobre 1992, des directives de négociations relatives aux accords devant être conclus avec les Républiques de la Communauté des Etats indépendants (CEI).
Ces accords de partenariat et de coopération constituent une " nouvelle génération " d'instruments juridiques au service des relations extérieures de la Communauté ; dépassant le champ de compétences des simples " accords de commerce et de coopération ", ils ne vont toutefois pas jusqu'à prévoir, comme le font les " accords d'association ", la possibilité d'une adhésion future à l'Union. A ce jour, des accords de partenariat et de coopération ont été signés avec la quasi-totalité des Etats de la CEI ; la France a d'ores et déjà ratifié les accords signés avec la Russie, l'Ukraine, la Moldavie, le Kazakhstan et le Kirghizstan.
L'Accord avec l'Azerbaïdjan, négocié au long de l'année 1995, a été paraphé le 19 décembre 1995, puis signé à Luxembourg le 22 avril 1996, de même que les Accords signés avec l'Arménie et la Géorgie.
2. - Contenu de l'Accord
Le texte de l'Accord (105 articles) est très proche de celui des autres accords signés avec les Etats de la CEI. Son article premier en décrit les objectifs :
- fournir un cadre approprié au dialogue politique entre les parties, afin de permettre le développement de relations politiques étroites entre elles ;
- soutenir les efforts accomplis par la République d'Azerbaïdjan pour consolider la démocratie, développer son économie et mener à son terme son processus de transition vers une économie de marché ;
- promouvoir les échanges et les investissements, ainsi que les relations économiques harmonieuses entre les parties, afin de favoriser leur développement économique durable ;
- jeter les bases d'une coopération dans les domaines législatif, économique, social, financier, scientifique civil et de la coopération culturelle.
Préambule et principes généraux
Le préambule souligne en particulier la volonté de l'Azerbaïdjan de coopérer étroitement avec les institutions européennes : " reconnaissant et soutenant la volonté de la République d'Azerbaïdjan d'établir une coopération étroite avec les institutions européennes ". Il met également l'accent sur les libertés politiques et économiques qui " constituent la base même du partenariat " et considère que " le soutien de l'indépendance, de la souveraineté et de l'intégrité territoriale de la République d'Azerbaïdjan contribue à sauvegarder la paix et la stabilité en Europe ".
Un lien est établi entre le respect des principes démocratiques, des droits de l'Homme et des principes de l'économie de marché ( titre I art. 2 ) qui " constituent les éléments essentiels du partenariat " et la pleine mise en oeuvre du traité. En cas de violation de ces éléments, la Communauté pourra, en vertu de l' article 98 et de la déclaration commune relative à cet article, prendre les mesures appropriées sans consultation préalable " en cas d'urgence spéciale ", pouvant aller jusqu'à la suspension de l'Accord.
L'accent est également mis sur la nécessité de maintenir et développer la coopération régionale entre Etats issus de l'ex-URSS ainsi que des relations de bon voisinage. Enfin, les parties examineront, le cas échéant, l'évolution des réformes économiques en Azerbaïdjan.
Dialogue politique (titre II)
Les objectifs du dialogue politique sont les suivants :
- renforcer les liens de l'Azerbaïdjan avec l'Union et avec la communauté des nations démocratiques ;
- accroître la convergence des positions sur les problèmes internationaux ;
- augmenter la sécurité et la stabilité dans la région.
Les modalités d'exercice de ce dialogue politique sont prévues dans les dispositions institutionnelles, générales et finales ( Titre XI, article 81 et suivants ) :
- au niveau ministériel, le dialogue se déroulera dans le cadre d'un conseil de coopération, assisté d'un comité de coopération au niveau des hauts fonctionnaires ;
- une commission parlementaire de coopération se réunira également, associant membres du Parlement azerbaïdjanais et membres du Parlement européen.
Echanges de marchandises (titre III)
Il s'agit d'un accord non préférentiel, sans clause évolutive vers la création d'une zone de libre-échange.
Les parties s'octroient mutuellement le statut de la nation la plus favorisée ; pendant une période transitoire allant jusqu'au 31 décembre 1998, l'Azerbaïdjan peut accorder un traitement plus avantageux aux autres Etats de la CEI. L'Accord prévoit la liberté de transit et interdit toute restriction quantitative aux échanges, sauf pour les produits CECA (Communauté européenne du charbon et de l'acier).
Une clause de sauvegarde analogue à celle du GATT permet aux parties de se consulter et de prendre des mesures appropriées lorsque les importations augmentent dans des conditions et des quantités telles qu'elles sont de nature à porter préjudice aux producteurs nationaux. Des mesures anti-dumping peuvent également être prises.
Des accords sectoriels pourront, en tant que de besoin, être conclus en ce qui concerne le commerce des matières nucléaires ; des accords spécifiques sur le commerce des textiles ont été paraphés avec les trois Etats du Caucase et sont appliqués provisoirement depuis le 1er janvier 1993.
Commerce et investissements (titre IV)
Emploi (chapitre I) : l'objectif de l'Accord est d'éviter toute discrimination d'une des parties à l'égard des ressortissants de l'autre partie légalement employés sur son territoire.
Etablissement
et activités des sociétés (chapitre II): l'Azerbaïdjan
accorde le traitement national ou le statut de la nation la plus
favorisée
(le régime retenu étant le plus favorable) ; la communauté
accorde le traitement de la nation la plus favorisée pour
l'établissement
de sociétés azerbaïdjanaises et le traitement national
pour leurs activités.
Services (chapitre III) : l'Accord encourage la libéralisation progressive des prestations de services transfrontalières ; des dispositions particulières régissent le transport maritime international.
Paiements courants et capitaux (chapitre V) : les parties s'engagent à autoriser entre leurs résidents, dans une monnaie librement convertible, tous les paiements courants liés à la circulation de marchandises, de services et de personnes. Le transfert de paiement et de capitaux lié à des investissements directs est libre.
Propriété intellectuelle, industrielle et commerciale (chapitre VI) : l'Azerbaïdjan s'engage à améliorer la protection des droits de propriété intellectuelle, industrielle et commerciale et d'atteindre, cinq ans après l'entrée en vigueur de l'Accord, un niveau de protection similaire à celui de la Communauté.
Domaines de coopération (titres V à X)
- législative (titre V) : les parties reconnaissent que la coopération législative constitue une condition importante du renforcement des liens économiques entre elles ; le rapprochement des législations, avec l'assistance technique de l'Union, doit concerner plus particulièrement les secteurs douanier, bancaire, comptable et fiscal, la protection des travailleurs, la propriété intellectuelle, les services financiers, les marchés publics, la vie des personnes, la protection des animaux et végétaux, les normes, les transports et les matières nucléaires.
- économique (titre VI) : la coopération en ce domaine vise à favoriser la réforme économique, la reconstruction et le développement durable en Azerbaïdjan, à travers notamment le programme communautaire TACIS (Technical Assistance to the Commonwealth of Independent States) ; elle concerne de nombreux secteurs : échanges de biens et services, promotion des investissements, coopération industrielle, marchés publics, matières premières, science et techniques, éducation et formation, agriculture, énergie, environnement, transports, services postaux et télécommunications, services financiers, développement régional, secteur social, tourisme, petites et moyennes entreprises, information, protection des consommateurs, douanes (un protocole d'assistance mutuelle est joint à l'Accord), statistique et sciences économiques, politique monétaire, restructuration et privatisation des entreprises.
- démocratie et droits de l'Homme (titre VII) : la coopération concerne toute question afférente à l'établissement et au renforcement des institutions démocratiques.
- prévention des activités illégales et contrôle de l'immigration clandestine (titre VIII) : la coopération vise ici à prévenir les activités illégales dans le domaine économique, y compris la corruption, les transactions illégales portant sur des marchandises (déchets industriels, contrefaçon). Elle porte également sur le blanchiment d'argent, le trafic de drogue et l'immigration clandestine.
- culturelle (titre IX) : les parties s'engagent à promouvoir la coopération culturelle : protection et conservation du patrimoine, échanges entre institutions et artistes.
- financière en matière d'assistance technique (titre X) : L'Azerbaïdjan bénéficie d'une assistance technique de la Communauté sous forme de dons, à travers le programme TACIS (Technical Assistance to the Commonwealth of Independent States).
Dispositions institutionnelles, générales et finales (titre XI)
L'Accord comprend, outre la mise en place d'un conseil, d'un comité et d'une commission de coopération, des dispositions finales traditionnelles : clause de dénonciation, de protection des intérêts essentiels de sécurité, clause territoriale, de non-discrimination et d'arbitrage.
Le Gouvernement français par une déclaration unilatérale annexée au présent accord de coopération et de partenariat a exclu les Territoires d'Outre-mer et les collectivités territoriales de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Mayotte de son champ d'application.
Telles sont les principales observations qu'appelle l'accord de partenariat et de coopération entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et la République d'Azerbaïdjan, d'autre part, qui est soumis au Parlement en vertu de l'article 53 de la Constitution.
Le Premier ministre,
Sur le rapport du ministre des affaires étrangères,
Vu l'article 39 de la Constitution,
Décrète :
Le présent projet de loi autorisant la ratification de l'accord de partenariat et de coopération entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et la République d'Azerbaïdjan, d'autre part, délibéré en Conseil des ministres après avis du Conseil d'Etat, sera présenté au Sénat par le ministre des affaires étrangères, qui sera chargé d'en exposer les motifs et d'en soutenir la discussion.
Est autorisée la ratification de l'accord de partenariat et de coopération entre les Commmunautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et la République d'Azerbaïdjan, d'autre part, fait à Luxembourg le 22 avril 1996, et dont le texte est annexé à la présente loi.
Fait à Paris, le 2 septembre 1998
Signé : LIONEL JOSPIN
Par le Premier ministre :
Le ministre des affaires étrangères,
Signé : HUBERT VÉDRINE