RESOLUTION
sur la proposition de directive du Conseil modifiant la directive 77/388/CEE en ce qui concerne le régime de taxe sur la valeur ajoutée applicable aux services de télécommunications (n° E 785).
Le Sénat a adopté la résolution dont la teneur suit :
Voir les numéros :
Sénat : 265 (1996-1997), 37 et 46 (1997-1998).
Le Sénat,
Vu l'article 88-4 de la Constitution,
Vu la proposition de directive du Conseil modifiant la directive 77/388/CEE en ce qui concerne le régime de taxe sur la valeur ajoutée applicable aux services de télécommunications (n° E 785),
Vu le document présenté par la Commission au Conseil le 22 juillet 1996 (COM [96] 328 final) "un système commun de TVA, un programme pour le Marché unique",
Considérant que la proposition d'acte communautaire n° E 785 vise à modifier les règles de TVA applicables aux services de télécommunications; que les règles en vigueur ne prennent en effet pas en considération les progrès technologiques qui permettent de fournir des services de télécommunications à l'intérieur de l'Union à partir de pays tiers (système dit du " call back ");
Considérant que la proposition n° E 785 prévoit qu'à partir du 1er janvier 1999 le lieu des prestations de services de télécommunications sera l'endroit où le client est installé et non plus le lieu où est établi le prestataire de services lorsque ce prestataire est situé en dehors de la Communauté; qu'elle dispose en outre que si un prestataire établi en dehors de la Communauté est identifié à la TVA dans un Etat membre pour y avoir rendu un service de télécommunications, il sera considéré comme établi dans cet Etat membre;
Considérant qu'au sein même de l'Union européenne,
les différences de taux de TVA entre Etats membres peuvent conduire,
dans le secteur des télécommunications, à d'importants
détournements de trafic du fait de la libéralisation et des
progrès technologiques précédemment évoqués;
que la proposition de directive n° E 785 n'apporte pas de solution
à ce problème en maintenant la règle de l'imposition
des prestations de télécommunications au lieu
d'établissement
du prestataire lorsque celui-ci est établi au sein de la
Communauté;
qu'elle est à cet égard moins satisfaisante que le régime
dérogatoire autorisé par la décision du Conseil 97/205/CE
en date du 17 mars 1997;Considérant que la proposition de directive
n° E 785 tend à appliquer d'ores et déjà la solution
esquissée pour le régime futur de TVA, à savoir le
principe d'une seule identification à la TVA à l'intérieur
de l'Union européenne pour toutes les prestations de services de
télécommunications;
Considérant que le "système commun de TVA" proposé par la Commission européenne relève bien des dispositions de l'article 99 du traité de Rome qui lui ont fait l'obligation de présenter au Conseil des mesures d'harmonisation des législations relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires, et qu'il va bien dans le sens de la construction européenne;
Considérant que ce système, qui est conforme, dans son ambition, à l'intérêt du marché unique, pose néanmoins un problème d'une tout autre ampleur que la simple harmonisation de la TVA en Europe dans la mesure où il exige un rapprochement substantiel des taux et un bon fonctionnement du système de compensation entre les Etats;
Considérant que les propositions de la Commission sur un lieu unique de taxation pourraient être à l'origine de nouvelles fraudes contre lesquelles il serait difficile aux Etats membres de lutter efficacement; que ce mécanisme du lieu unique de taxation est par ailleurs de nature à encourager les détournements de trafic commercial et les délocalisations de sièges d'entreprises; qu'il apparaît contradictoire avec le souci de réduction de la concurrence fiscale dommageable affiché par la Commission;
Considérant que le rapprochement substantiel des
taux, nécessaire pour éviter une concurrence fiscale dommageable,
reviendrait à limiter la marge de manœuvre fiscale des Etats membres
à un moment où ceux-ci sont engagés dans des efforts
budgétaires liés à la mise en place de la monnaie
unique; qu'un rapprochement des taux de TVA ne peut donc être
envisagé
dans un avenir proche;
Considérant en outre que le bon fonctionnement du système de compensation entre les Etats membres reste plein d'incertitudes compte tenu des faiblesses des moyens statistiques révélées par la Cour des comptes des Communautés européennes;
Considérant que le mécanisme de compensation envisagé par la Commission pourrait avoir pour contrepartie une perte de recettes publiques dont l'ampleur ne peut être appréciée à ce stade;
1. Sur la proposition de directive concernant la TVA applicable aux services de télécommunications :
Approuve les règles de territorialité de la taxe proposées par la Commission pour les services rendus par les prestataires communautaires à des clients établis en dehors de la Communauté;
Demande au Gouvernement qu'il sollicite l'extension de
ces règles aux services rendus par les prestataires communautaires
à des clients établis au sein de la Communauté.
2. Sur le régime commun de TVA en Europe :
Estime que la seule voie de progrès reste, aujourd'hui, dans l'amélioration du régime dit transitoire ;
Demande par conséquent au Gouvernement :
- qu'il sollicite l'adoption et la mise en œuvre des mesures nécessaires à l'élimination des lacunes et fraudes qui ont pu apparaître lors des premières années d'application du régime actuel de TVA en Europe;
- qu'il sollicite l'adoption de mesures d'harmonisation portant, notamment, sur le statut de la représentation fiscale, sur les droits à déduction et sur les seuils d'exonération;
- qu'il sollicite la redéfinition du champ d'application de la TVA en fonction de la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes;
- qu'il ne retienne pas, au stade actuel, les propositions de la Commission sur le système commun tant que les conditions pour le passage au régime définitif ne seront pas réunies.
Délibéré, en séance publique, à Paris, le 6 novembre 1997.