PAYS-BAS

Comme le rappelle l'introduction de l'accord conclu entre les différents acteurs de la politique de l'eau néerlandais, « Nederlands is waterland », les Pays-Bas sont le pays de l'eau. L'eau revêt, en effet, une importance capitale : 60 % des activités économiques sont situées en zone inondable, qu'elles soient au-dessous du niveau de la mer (26 % du territoire) ou purement et simplement inondables (29 % du territoire), sans compter le fait que 100 000 personnes, sur les 17 millions qui composent la population totale, vivent dans des zones situées hors du périmètre protégé contre les inondations 26 ( * ) .

À la demande du président des agences de l'eau des Pays-Bas, l'OCDE a publié en 2014 un rapport sur les perspectives de la politique de l'eau, intitulé Water Governance in the Netherlands. Fit for the future? Cette étude a été menée durant un an au cours duquel plus d'une centaine de personnes a été auditionnée. L'essentiel des informations figurant dans la présente note sont issues de document.

On examinera successivement :

- les acteurs, les instruments et les moyens de la politique de l'eau ;

- les grands traits de la politique de sécurité et la qualité des eaux ;

- enfin, les recommandations formulées par l'OCDE.

1. Les acteurs, les instruments et les moyens de la politique de l'eau

• Les acteurs

Six types d'entités publiques contribuent, à des degrés divers, à la mise en oeuvre de la politique de l'eau.

Le ministère des Infrastructures et de l'Environnement assure la coordination et la planification de la politique de l'eau et sa coordination avec les autres politiques (environnement, infrastructures...).

Rijkswaterstaat est l'agence publique qui, dotée de neuf mille collaborateurs, réalise sous le contrôle de ce ministère les travaux d'infrastructures (écluses, entretien des digues et des canaux...) que nécessitent la politique de l'eau et celle des transports routiers (autoroutes...).

Les douze provinces néerlandaises sont chargées de la planification de l'espace, de la gestion des eaux souterraines, de la création et du contrôle des agences de l'eau (voir infra ), auxquelles elles peuvent adresser des instructions par voie réglementaire (article 3.11 de la loi sur l'eau), ainsi que de la surveillance des dispositifs de protection contre les crues et de la délivrance d'autorisations de pompage des eaux souterraines.

Les vingt-trois agences de l'eau 27 ( * ) (waterschappen) gèrent les systèmes aquatiques et assurent la défense contre les inondations, ainsi que l'approvisionnement en eau et la préservation de sa qualité, outre le transport et le traitement des eaux usées. Le statut de ces entités de droit public est fixé par la loi, en vertu de l'article 133 de la Constitution du royaume, qui prévoit aussi que la création et la suppression de ces agences résultent de décisions des provinces qui en assurent le contrôle. Les agences de l'eau entretiennent 3 400 kilomètres de digues principales (primaire waterkeringen) et 14 000 kilomètres d'autres digues. Les organes de ces institutions, dont l'origine remonte au Moyen-Âge, sont composés de représentants des habitants et des parties prenantes concernées par la politique de l'eau, désignés pour quatre ans. Leur président est nommé par le roi pour six ans.

Les trois-cent-quatre-vingt-dix communes des Pays-Bas 28 ( * ) sont chargées de la planification spatiale sur leur territoire, de la collecte des eaux usées et de leur transport, de l'assainissement urbain et de la collecte des eaux pluviales.

Le « commissaire du Delta » (deltacommissaris) , nommé par le roi pour sept ans renouvelables une fois 29 ( * ) , est chargé, sous l'autorité directe du ministre, en vertu de la loi sur l'eau qui détermine son statut, d'une mission stratégique tenant au suivi de l'ensemble de la politique de mise en valeur du delta (deltaprogramma) que constituent les Pays-Bas. La seconde phase de ce programme, en cours de réalisation, tend notamment à améliorer la sécurité, à mettre en place une stratégie soutenable pour la fourniture d'eau douce, à améliorer la gestion de la zone de l'Ijsselmeer, à protéger le delta Rhin-Meuse et à mettre au point un cadre pour la (ré)allocation des zones construites, eu égard au risque d'inondations.

Outre les lois et règlements en vigueur, les relations des pouvoirs publics font l'objet d'un accord administratif sur l'eau (bestuurs akkoord water) qui précise leurs engagements respectifs dans la mise en oeuvre et le financement de la politique de l'eau aux Pays-Bas. La plus récente version de ce document, mis à jour de façon périodique, date d'avril 2011.

• Les instruments

Le principal texte en la matière est la loi sur l'eau (waterwet) dans la rédaction qui résulte de modifications opérées en 2011, lesquelles ont été adoptées afin de réduire le nombre de législations spécifiques. Ce texte poursuit trois objectifs :

- prévenir et, si nécessaire, limiter les inondations, les dommages qu'elles occasionnent et la pénurie d'eau ;

- protéger et améliorer la qualité chimique et écologique des systèmes aquatiques ;

- et contribuer à l'accomplissement des fonctions sociales de ces systèmes 30 ( * ) .

Bien qu'elle considère qu'il est « aisé de travailler » grâce à la loi néerlandaise sur l'eau, l'OCDE estime que quelques incohérences subsistent, et notamment le fait que :

- les agences de l'eau ne peuvent plus contrôler les rejets d'eaux usées (égouts) alors même qu'elles sont responsables du traitement et de la qualité des eaux de surface ;

- « bien que le mantra soit la coopération entre les communes et les agences de l'eau pour réduire les coûts, on ne sait pas clairement qui est responsable de l'exécution et du financement des programmes conjoints » 31 ( * ) ;

- les agences de l'eau ont peu de prise sur la qualité et le volume des effluents, biens qu'elles aient des contacts avec les ménages et les entreprises qui les produisent ;

- faute d'un « oeil extérieur », l'application des normes relève de l'autorégulation.

La préparation d'une loi sur la planification environnementale, susceptible d'être votée en 2018, pourrait offrir, selon l'OCDE, l'occasion de parachever les progrès accomplis au cours de ces dernières années, afin de mieux prendre en compte la relation existant entre la gestion de l'eau et la planification spatiale.

Outre cet instrument législatif, plusieurs documents de planification sont actuellement élaborés périodiquement.

Au niveau national, tout d'abord, le ministère des Infrastructures et de l'Environnement, en vertu de l'article 4.1 de la loi sur l'eau, établit pour six ans un plan national de l'eau qui détermine les objectifs généraux à mettre en oeuvre pour une période donnée.

Les douze provinces établissent également leur propre document de planification en matière de politique de l'eau et participent, de même que les agences de l'eau, à la préparation des plans municipaux applicables aux eaux usées.

Selon l'OCDE, « La loi sur la planification écologique devrait remplacer tous ces plans stratégiques par un seul plan intégré, élaboré par le Gouvernement et les provinces, lequel inclurait les questions d'aménagement spatial, d'environnement, d'eau, de paysage, de culture, d'énergie et d'infrastructures » 32 ( * ) .

• Les moyens

Selon l'accord administratif sur l'eau d'avril 2011 33 ( * ) , le coût total annuel de la politique de l'eau, qui s'élevait à 7 milliards d'euros en 2010, pourrait atteindre, si aucune mesure de correction n'était prise, un montant compris entre 8 et 9 milliards d'euros en 2020. L'accord tend de ce fait à économiser environ 750 millions d'euros par an à cette date.

La loi sur l'eau a prévu la création d'un fonds particulier, le « fonds delta » (deltafond) , afin d'identifier les ressources affectées à la politique concernant l'ensemble du pays. Les moyens initialement prévus, soit 1 milliard d'euros par an de 2013 à 2028, ont été réduits à 600 millions d'euros par an 34 ( * ) .

Observant que les Pays-Bas disposent d'un « solide système de gestion des eaux doté d'un haut degré de protection contre les risques d'inondation » 35 ( * ) , l'OCDE estime cependant que, dans un contexte de croissance atone et de hausse du risque climatique, le coût du financement de ce dispositif suscite des interrogations.

Le coût total de la politique de l'eau aux Pays-Bas s'élevait, en 2012, à 6,67 milliards d'euros, répartis entre les agences de l'eau (42 %), les compagnies de distribution d'eau potable (21 %), les communes (20 %), l'État (15 %) et les provinces (2 %), comme le montre le tableau suivant.

RÉPARTITION DES DÉPENSES TOTALES RELATIVES À LA GESTION DE L'EAU
AUX PAYS-BAS EN 2012

(en millions d'euros)

Organismes de gestion de l'eau

Répartition des coûts

Coûts totaux
par institution

% des coûts
totaux

Ministère des Infrastructures et de l'Environnement

1 010

15 %

Provinces

136

2 %

Agences de l'eau (watershappen)

2 790

42 %

Communes

1 360

20 %

Compagnies de distribution d'eau potable

1 370

21 %

Total

6 670

100 %

Source : OCDE, Water Governance in the Netherlands. Fit for the future? , 2014, p. 206

Le maintien de la qualité de l'eau absorbait les deux-tiers des dépenses totales et reposait sur les agences de l'eau, les communes, les sociétés de distribution, tandis que la gestion de la qualité et du risque d'inondations ne représentait que 17 % et 14 % du total.

La répartition des dépenses par type et par institution pour 2012 figure dans le tableau ci-dessous.

RÉPARTITION DES DÉPENSES TOTALES PAR OBJECTIF ET PAR INSTITUTION
AUX PAYS-BAS EN 2012

(en millions d'euros)

Qualité
de l'eau

Gestion
du risque d'inondation

Gestion
de la qualité
et de la quantité d'eau

Autres

Total

Ministère des Infrastructures
et de l'environnement

273

650

50

37

1 010

Provinces

X

20

64

52

136

Agences de l'eau (watershappen)

1 467

270

992

62

2 790

Communes

1 360

X

X

X

1 360

Compagnies de distribution d'eau potable

1 370

X

X

X

1 370

Total

4 470

(67 %)

940

(14 %)

1 106

(17 %)

151

(2 %)

6 670

(100 %)

Source : OCDE, Water Governance in the Netherlands. Fit for the future? 2014, p. 207

Au vu de ces éléments, l'OCDE considère que la complexité du mode de gestion néerlandais de l'eau rend difficile de savoir « qui paie combien pour quel service » 36 ( * ) . Cependant, il s'avère, selon ses estimations, que 94 % des dépenses relatives à la qualité de l'eau et à la lutte contre la pénurie (gestion des quantités) seraient payées par les consommateurs, tandis que l'essentiel du coût de la protection contre les inondations est financé par l'État.

Le financement des agences de l'eau repose sur un système de taxation destiné à faire face :

- au coût du traitement de eaux usées, en fonction d'un « équivalent de la pollution » égal au volume moyen des polluants émis par les ménages et par les entreprises ;

- au coût du « maintien des pieds au sec » et de l'approvisionnement en eaux de surface acquitté par les propriétaires de biens fonciers (ménages et autres) ;

- et au coût des rejets des ménages et des entreprises dans les eaux de surface par biais d'une taxe.

Les agences de l'eau bénéficient aussi du concours d'une banque ad hoc , que l'OCDE qualifie de « modèle unique qui pourrait être intéressant pour d'autres pays désireux d'assurer un financement stable, prévisible et peu onéreux des investissements liés à l'eau » 37 ( * ) .

Pour ce qui concerne le coût de la fourniture d'eau potable, les prix variaient, en 2012, entre 1,09 et 2,07 euros par mètre cube.

Notamment du fait des changements climatiques, l'OCDE observe que, selon diverses études, plusieurs types de charges supplémentaires pourraient alourdir le coût de la politique de l'eau au cours des années à venir, comme le montre le tableau suivant.

ESTIMATION DES COÛTS FUTURS POSSIBLES DES RESSOURCES EN EAU

(en euros)

Coûts futurs:

Estimations

Eau potable

+ 66 millions entre 2010 et 2020

Qualité de l'eau

+ 7,1 milliards au total entre 2007 et 2027

Gestion locale des crues

+ 2,5 milliards au total entre 2015 et 2050 au titre du climat

+ 800 millions par an d'ici 2027 pour le traitement des eaux usées

Défense contre les inondations

+ 1,2 à 1,6 milliard d'euros au titre du Deltaprogramma

+ 100 à 300 millions par an pour l'usage récréatif des espaces côtiers

+ 1,1 à 1,2 milliard par an jusqu'en 2025 pour maintenir le risque d'inondation au niveau actuel

+ 0,9 à 1,2 milliard par an pour faire face à la montée du niveau de la mer (contre 700 millions en 2009)

Source : OCDE, Water Governance in the Netherlands. Fit for the future? , 2014, p. 230

Bien qu'elles n'aient qu'un caractère estimatif, ces données posent, d'après la même source, la question du financement des dépenses futures, de sorte que, selon l'OCDE, il convient notamment d'ores et déjà de :

- limiter les charges (notamment l'impact négatif du développement spatial sur la gestion de l'eau) ;

- appliquer le principe pollueur-payeur de façon systématique ;

- faire peser le coût de la gestion des eaux sur ses bénéficiaires ;

- accroître la transparence dans la répartition des coûts ;

- assurer des financements stables et non soumis aux fluctuations politiques pour les infrastructures nécessaires à la préservation de la sécurité ;

- et de poursuivre les économies d'échelle dans le traitement des eaux usées.

L'Organisation recommande aussi la mise en place de mécanismes d'évaluation indépendants des institutions chargées de la gestion des eaux.

2. La politique de sécurité et la qualité des eaux

On évoquera successivement la gestion des volumes d'eau (inondations et sécheresse) et la qualité des masses aquatiques.

• Inondations et sécheresses

La protection contre les inondations constitue une question majeure dans ce que les pouvoirs publics néerlandais qualifient de « delta le plus sûr du monde » (de best beveiligde delta ter wereld) 38 ( * ) .

Le risque encouru varie, selon les données de l'OCDE, entre une inondation tous les dix mille ans dans la Randstad , conurbation qui réunit Utrecht, Amsterdam, La Haye et Rotterdam - soit plus de sept millions d'habitants sur le quart du territoire - et une inondation tous les deux cent cinquante ans dans certaines parties du Limbourg.

Les mesures de mise en sécurité prises depuis la catastrophe de 1953, au cours de laquelle plus de 1 800 personnes avaient péri du fait d'une inondation, ont fait en sorte que, désormais, la population « ressent le risque d'inondation comme relativement faible » 39 ( * ) .

À côté du risque d'inondation, l'OCDE estime que le risque de manque d'eau pourrait se faire sentir « de façon significative » dans les années à venir à cause des changements climatiques (accroissement de la salinité due à l'entrée d'eau de mer, hausse des précipitations en hiver, sécheresse en été...) pouvant occasionner un manque à gagner de 700 millions d'euros à la fréquence d'une fois tous les dix ans, voire de 1,8 milliard d'euros une fois par siècle, en cas d'extrême sécheresse 40 ( * ) .

Dans le domaine de la gestion des risques, l'OCDE recommande d'accroître la conscience du risque d'inondation dans l'opinion publique, notamment pour influer sur certaines décisions, afin de limiter la vulnérabilité. À ce titre, elle estime qu'il conviendrait que, lors des transactions immobilières, les acheteurs soient informés des dangers afin que les prix de vente soient, entre autres, calculés d'après ce paramètre.

Constatant qu'un tiers des équipements de lutte contre les inondations ne sont pas conformes aux normes et que les gros consommateurs d'eau ne sont pas au courant des risques de pénurie, l'Organisation recommande d'informer la population de ces questions afin de la rendre consciente des enjeux. Dans le même esprit, elle suggère d'améliorer la perception collective de la valeur économique d'un écosystème de gestion des eaux douces « en bon état de marche » et, par conséquent, une évaluation économique du coût de l'absence de mesures destinées à améliorer la qualité de l'eau.

• Qualité des eaux

Selon l'OCDE, les objectifs fixés par la DCE du 23 octobre 2000 établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l'eau, qui a certes été transposée par les Pays-Bas, n'ont pas été atteints en 2015, même si la qualité des eaux de surface est suffisante, exception faite de celles de la Meuse. De surcroît, même après la mise en oeuvre des mesures prévues par cette directive, on estime qu'au plus 40 % des systèmes aquatiques atteindront les objectifs fixés par ce texte.

Exception faite de la Meuse, si la qualité des eaux des rivières qui traversent le pays est suffisante, celle des surfaces gérées au niveau régional est insuffisante, plusieurs indicateurs tels que ceux issus de l'observation de la diversité des oiseaux (en voie de réduction) ou de la quantité de nitrates constituent des motifs de préoccupation. L'OCDE met cette situation en relation avec le fait que, bien que dotés d'une surface agricole de 19 100 km 2 , les Pays-Bas sont parmi les premiers exportateurs mondiaux de légumes, fruits, fleurs et viande, ce qui a une conséquence sur les quantités de nitrates et de phosphore 41 ( * ) dans l'eau.

De fait, seuls 3 % des 723 masses d'eau identifiées aux Pays-Bas sont considérées comme « naturelles » tandis que 55 % sont « artificielles » et 42 % « fortement modifiées ». Dans ces deux derniers cas, la DCE fixe respectivement pour objectif le rétablissement d'un « bon potentiel écologique » et d'un « bon état écologique ».

Il s'ensuit que, selon l'OCDE, « on ne peut ignorer le relativement faible niveau d'ambition pour atteindre les objectifs de bon état des eaux prévus par la directive, dans la mesure où 86 % des masses d'eau font l'objet de dérogations actuellement. Dans le futur, ceci pourrait être contesté par la Commission européenne. La justification des dérogations (en particulier dans le bassin du Rhin) a trait à la faisabilité technique, aux coûts disproportionnés que les mesures nécessaires entraîneraient et aux conditions naturelles (pollution historique), ainsi qu'au long délai nécessaire pour l'environnement résultant de l'anthropocène. C'est pourquoi le Gouvernement a fixé la date limite pour améliorer la qualité de l'eau à 2027 » 42 ( * ) .

Au total, l'Organisation estime que l'on assiste à une stagnation de l'amélioration de la qualité des eaux tant en ce qui concerne les quantités de nitrate, de phosphore et de pesticide que pour ce qui est du rétablissement des dynamiques naturelles.

Par contraste, il convient de relever qu'en ce qui concerne la transposition de la directive du Conseil du 21 mai 1991 relative au traitement des eaux urbaines résiduaires (91/271/CEE), les Pays-Bas font figure d'exemple en Europe, d'autant que l'application des dispositions de ce texte est, selon l'OCDE, un « prérequis » pour l'application de la DCE.

3. Les recommandations de l'OCDE

Au terme de son étude, l'OCDE estime que les Pays-Bas ont un « excellent palmarès » 43 ( * ) en matière de politique de l'eau dans plusieurs domaines.

• Efficacité et responsabilité

L'OCDE s'interroge sur la mesure dans laquelle les progrès réalisés en vertu de la loi sur l'eau pour affermir le contrôle des provinces sur les agences de l'eau sont de nature à garantir l'efficacité et la responsabilité (accountability) de la gestion de l'eau dans le pays 44 ( * ) .

Elle recommande également de limiter l'écart qui apparaît du fait que l'étendue d'un bassin hydrologique (les Pays-Bas en comptent quatre, eux-mêmes divisés en sept sous-bassins) ne correspond pas aux frontières administratives qui s'y rapportent, afin de résoudre deux sujets d'actualité :

- la fragmentation de la gestion des eaux usées entre les municipalités (pour la collecte) et les agences de l'eau (pour le traitement), d'une part ;

- et le degré d'intégration entre la fourniture d'eau potable (par des sociétés privées) et la gestion des eaux usées (par les communes et les agences de l'eau), d'autre part.

Tout en observant que ni la réduction ni l'accroissement du nombre de structures associées à la gestion de l'eau ne constituent un objectif en eux-mêmes, l'OCDE estime que toute réforme en la matière devrait reposer sur une évaluation pragmatique des réponses apportées à quatre questions 45 ( * ) :

- les municipalités exploitent-elles réellement les synergies potentielles entre la planification urbaine, le drainage et la collecte des eaux usées afin de fournir le meilleur service au meilleur prix ?

- les agences de l'eau gèrent-elles les services de traitement des eaux usées à la bonne échelle ?

- quelle est la valeur ajoutée du mode de gouvernance des agences de l'eau pour la gestion des services de traitement des eaux usées ?

- et quelle est la performance relative du modèle des agences de l'eau en ce qui concerne le traitement des eaux usées ?

Sur le plan financier, le même rapport s'interroge sur la gouvernance des agences de l'eau, observant que « le fait que les agences de l'eau soient des organismes démocratiques [...] dotés d'un pouvoir fiscal et de revenus affectés dérive de leur objectif initial de défense contre les inondations. Une telle gouvernance et un tel mode de financement sont moins appropriés pour investir dans des opérations de gestion des eaux usées » 46 ( * ) .

• Équité dans le paiement des coûts

En outre, le rapport souligne la question d'équité que soulève le fait que les bénéficiaires de certaines activités qui ont une incidence sur la gestion des eaux tels que les promoteurs de constructions en zone inondables ou les activités qui polluent l'eau douce n'assument pas les coûts correspondants, qu'il s'agisse des coûts de traitement des eaux ou de dépollution. Il conviendrait, indique-t-il, que des incitations économiques permettent de gérer de façon efficace aussi bien l'excès que la pénurie d'eau et la pollution.

Au vu de ces éléments, l'OCDE recommande :

- d'instituer un organisme de contrôle indépendant des coûts (observatoire national ou régulateur) afin de connaître les coûts de substitution (opportunity cost) et d'évaluer les performances financières ;

- de faciliter l'accès des parties prenantes à une information indépendante sur les coûts, les risques et les performances ;

- et de fournir une présentation harmonisée des dépenses de gestion de l'eau compte tenu des différents usages de celle-ci.

Dans le même esprit, l'Organisation estime souhaitable :

- d'instituer un dispositif de taxation des prélèvements d'eau afin de gérer les prélèvements, voire de conclure des accords de partage de l'utilisation de l'eau dans les zones soumises à un risque de pénurie ;

- et de réaliser une étude globale du coût économique de la pollution aquatique, afin d'adopter un équilibre cohérent entre agriculture et nature et de définir les instruments de lutte contre la pollution diffuse (impôts, échange de quotas...).

Dans une lettre du 17 mars 2014 à l'intention du Président de la Seconde Chambre des États généraux, homologue de l'Assemblée nationale française, le ministre des Infrastructures et de l'Environnement des Pays-Bas a formulé les réactions du Gouvernement néerlandais au rapport de l'OCDE. Estimant que ce document était « bon et utilisable » (goed en bruikbaar) , il considérait nécessaire de faire prendre conscience aux habitants du fait que, faute d'équipements de protection, 60 % du pays seraient immergés alors qu'y vivent neuf millions de personnes et qu'y sont produits 70 % du produit national brut. Il annonçait également que des efforts seraient faits en la matière aussi bien dans le cadre du « plan delta » qu'avec les signataires de l'accord administratif sur l'eau.

Relevant que l'OCDE avait noté la stabilité du financement de la politique de l'eau aux Pays-Bas, il annonçait son intention d'engager des discussions, avec les entités concernées, sur le financement de long terme du dispositif et la saisine du Conseil consultatif sur les relations financières, un organisme public d'évaluation indépendant.

Le ministre se déclarait également soucieux d'améliorer l'équilibre entre eau, construction et aménagement de l'espace, dans le cadre des procédures de planification nationales, régionales et locales.

Soulignant les progrès réalisés en matière de pollution aquatique, il indiquait sa volonté de limiter la pollution diffuse, tout en annonçant la publication d'indicateurs qui présenteraient une image moins pessimiste de la situation en la matière.

S'agissant de la possibilité d'introduire davantage de transparence au sujet du financement, le ministre renvoyait enfin aux travaux de la commission d'information sur la chaîne de l'eau.


* 26 OCDE, Water Governance in the Netherlands. Fit for the future? , 2014, p. 53.

* 27 Depuis le 1 er janvier 2014, cf. Vater in beeld , p. 16.

* 28 Au 1 er janvier 2016.

* 29 Article 3.6a de la loi sur l'eau.

* 30 Article 2.1 de la loi sur l'eau.

* 31 OCDE, rapport précité, p. 102.

* 32 OCDE, rapport précité, p. 107.

* 33 Bestuurs akkoord water , April 2011, p. 5.

* 34 OCDE, rapport précité, p. 85.

* 35 OCDE, rapport précité, p. 143.

* 36 OCDE, rapport précité, p. 207.

* 37 OCDE, rapport précité, p. 211.

* 38 Bestuurs akkoord water , april 2011, p. 18.

* 39 OCDE, rapport précité, p. 55.

* 40 OCDE, rapport précité, p. 57.

* 41 OCDE, rapport précité, p. 64-65.

* 42 OCDE, rapport précité, p. 93.

* 43 OCDE, rapport précité, p. 19.

* 44 OCDE, rapport précité, p. 33.

* 45 OCDE, rapport précité, p. 120.

* 46 OCDE, rapport précité, p. 22.

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