Le 14 février 2022, le groupe d’amitié France-Vanuatu-Iles du Pacifique, présidé par Mme Catherine Procaccia (Les Républicains-Val-de-Marne), a entendu, en visioconférence, Mme Michèle Boccoz, ambassadeur de France aux Philippines, accréditée auprès de trois Etats insulaires du Pacifique : la Micronésie, les Palaos et les Iles Marshall. Mme Michèle Boccoz était accompagnée de MM. Fabrice Fize, premier conseiller, Thomas Rollet, premier secrétaire, et Marc Piton, conseiller de coopération et d’action culturelle.
Mme Martine Berthet (Les Républicains-Savoie), vice-présidente, MM. Jean-Jacques Lozach (Socialiste, Écologiste et Républicain-Creuse) et Gérard Poadja (Union centriste-Nouvelle-Calédonie), vice-présidents, Mme Joëlle Garriaud-Maylam (Les Républicains-Français établis hors de France), MM. Jean-François Longeot (Union centriste-Doubs) et Didier Marie (Socialiste, Écologiste et Républicain-Seine-Maritime) ont participé à l’entretien.
Mme Catherine Procaccia a d’abord rappelé que Mme Boccoz occupe les fonctions d’ambassadeur à Manille depuis 2020, après avoir été ambassadeur en Belgique et en Croatie et avoir été directrice-adjointe du cabinet du ministre des affaires étrangères et sous-directrice générale à l’Organisation mondiale de la Santé (OMS). Elle l’a invitée à faire un état des lieux de la situation en Micronésie, aux Palaos et aux Iles Marshall et à évoquer les relations que ces trois États entretiennent avec la France.
Mme Michèle Boccoz a indiqué qu’elle avait eu l’occasion de visiter les Palaos, au terme d’un voyage de vingt-six heures depuis Manille, mais qu’elle n’avait en revanche pas encore eu la possibilité de se rendre en Micronésie ou aux Iles Marshall, qui demeurent fermés aux voyageurs, y compris à leurs propres ressortissants, en raison de la pandémie de covid-19.
Ces trois États sont isolés et vulnérables au changement climatique. La présence française y est réduite : deux ressortissants français – un père jésuite et un binational franco-espagnol travaillant dans une entreprise d’aquaculture – sont recensés aux Palaos, un seul en Micronésie et un autre aux Iles Marshall. La France a nommé un consul honoraire dans chacun de ces trois pays.
À l’écart du commerce international, bénéficiant de peu de dessertes aériennes, ils demeurent largement dépendants de l’aide extérieure. La France souhaite développer la coopération dans le domaine de la protection de l’environnement, des énergies renouvelables ou encore du tourisme. Des opportunités existent pour les entreprises françaises dans ces différents secteurs.
Une reprise de la coopération dans le domaine de la recherche serait également bienvenue. Les autorités des Palaos ont exprimé un intérêt pour des échanges dans le domaine de l’enseignement supérieur. L’Alliance française à Manille a développé un enseignement à distance qui permet de dispenser des cours de français dans la région. La France a soutenu l’inscription sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco des sites de Rock Islands aux Palaos et de Nan Madol en Micronésie.
Ces États sont membres du Forum des îles du Pacifique (FIP), qui a traversé une crise l’an dernier au moment de la désignation de son nouveau secrétaire général : leur candidat n’ayant pas été retenu, les États de l’aire micronésienne ont annoncé leur intention de quitter le Forum. À la suite de la visite dans la région du secrétaire d’État américain Anthony Blinken, ces États ont cependant décidé de suspendre leur retrait, ce qui devrait contribuer à préserver la cohésion du Forum.
Ces États sont liés aux États-Unis par un accord de libre-association, en cours de renégociation, qui leur permet de bénéficier d’une dispense de visas, d’accéder à des services aux États-Unis et de recevoir des financements, essentiels dans le contexte actuel de crise économique consécutif à la pandémie de covid-19. Leurs sociétés sont traversées par des tensions entre l’attachement à la tradition et l’attrait d’un mode de vie plus moderne, influencé par les États-Unis.
Ils présentent un intérêt géostratégique pour les États-Unis, dans un contexte de rivalité avec la Chine, dans la mesure où ils permettent de maintenir un lien avec Guam, où se trouve une importante base militaire américaine. Les Palaos et les Iles Marshall continuent d’entretenir des relations diplomatiques avec Taiwan, qui leur apporte une aide dans le domaine des infrastructures, de l’agriculture et de la santé.
M. Gérard Poadja a estimé que la France devrait nouer des liens d’amitié avec tous les États de la région. Des entreprises implantées en Nouvelle-Calédonie disposent d’un savoir-faire dans le domaine de l’environnement. Une entreprise néo-calédonienne est présente aux Palaos pour des activités de dessalement. Le Centre Jean-Marie Tjibaou de Nouméa contribue à entretenir des échanges culturels. Les pays de l’arc mélanésien ont besoin de la France, qui gagnerait à être plus présente.
M. Jean-Jacques Lozach a souhaité obtenir des précisions concernant la situation économique dans ces trois pays. Il a demandé si la production d’énergies renouvelables avait réellement pris son essor et si d’autres pays européens étaient présents.
Mme Michèle Boccoz a souligné que la France s’appuyait naturellement sur ses collectivités du Pacifique pour conduire sa stratégie indo-pacifique. Les entreprises néo-calédoniennes peuvent trouver intérêt à se déployer dans la région.
Il s’agit cependant d’États peu peuplés, durement affectés par les conséquences économiques de la crise sanitaire. Les Palaos ne comptent que 20 000 habitants et leur économie, très dépendante du tourisme lié à la plongée sous-marine, s’est contractée de 7,5% en 2020 et de 17% en 2021. L’économie des Iles Marshall, peuplées de 58 000 habitants, repose principalement sur la pêche et le coprah ; elle a connu une récession de 3,3% en 2020 puis de 1,5% en 2021. Enfin, les États fédérés de Micronésie, peuplés de 120 000 habitants, dépendent beaucoup de la pêche ; le produit intérieur brut y a reculé de 8% en 2020 puis encore de 3,2% en 2021. Dans ce contexte, l’aide financière des États-Unis joue un rôle crucial.
Les Palaos souhaitent favoriser le tourisme haut-de-gamme, en s’inspirant des complexes hôteliers qui existent à Bora-Bora par exemple. L’érosion des côtes et la montée des eaux ont un impact négatif sur l’agriculture en raison de la salinisation des terres agricoles.
Mme Martine Berthet s’est interrogée sur l’organisation du système sanitaire dans ces pays et a souhaité savoir quelles étaient leurs principales sources d’énergie.
Mme Michèle Boccoz a répondu que Palaos disposait du meilleur système sanitaire, grâce à l’appui des États-Unis, qui ont récemment organisé la vaccination de l’ensemble de la population contre la covid-19. Les soins primaires et secondaires sont dispensés sur place, tandis qu’une évacuation vers Guam ou vers Taiwan s’impose pour les soins plus lourds. Le système sanitaire est plus fragile dans les deux autres États, qui ont toutefois réussi à se préserver de la pandémie en fermant leurs frontières.
Ces pays dépendent des sources d’énergie fossiles, ce qui devrait les inciter à rechercher des projets innovants dans le domaine de l’énergie solaire, éolienne ou marémotrice.
Mme Catherine Procaccia a demandé si l’éloignement géographique ne constituait pas un frein au développement du tourisme. Elle a rappelé que le Cirad notamment travaillait à la mise au point de variétés de végétaux plus résistants à la salinisation.
Mme Michèle Boccoz a précisé que les touristes provenaient de Taiwan et du Japon, ainsi que des États-Unis. Les tentatives d’attirer des touristes chinois ont tourné court car il s’agissait d’un tourisme de masse peu adapté à la réalité de ces îles.
M. Marc Piton a ajouté que l’on dénombrait environ 100 000 touristes par an avant la crise sanitaire et que l’objectif était de tripler à terme ce chiffre. Des discussions ont repris avec des groupes hôteliers comme Accor. Il a signalé que le comité olympique des Palaos souhaitait accueillir un volontaire international français dans la perspective des Jeux de 2024 et qu’un appel à candidatures avait été lancé.
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