B. DES DÉSÉQUILIBRES FINANCIERS ET SOCIA UX PRÉOCCUPANTS
1. Une situation économique et financière fragile
Les déficits internes et externes persistent et pèsent lourdement sur l'économie.
•
Le
déficit
budgétaire
a ainsi atteint 19,5 % du PIB en 1997. Le poids
de la dette interne (12 milliards de dollars) et externe (2,3 milliards de
dollars) est préoccupant. Les autorités libanaises ont de plus en
plus de difficulté à mobiliser l'épargne domestique, ce
qui les oblige à se tourner davantage vers l'emprunt extérieur.
Dans ces conditions, la part des recettes de l'État consacrées au
seul paiement des intérêts de la dette ne cesse de croître
(60 % en 1997). La croissance s'est contractée en 1997 (3 %),
alors que le secteur immobilier, moteur de la croissance, est en crise.
• Traditionnellement, les importations libanaises
sont dix fois supérieures aux exportations, le Liban vivant
structurellement sur les produits importés. Or, depuis cinq ans, il a
connu une très forte progression de la demande, liée à la
reconstruction. Cinq fournisseurs concentrent près des deux-tiers des
importations : l'Italie, largement en tête avec 18 % des parts
de marché, la France (13 %), les États-Unis (12 %),
l'Allemagne (10,6 %) et la Grande-Bretagne.
Le déficit de la balance des paiements courants qui résulte de cette structure commerciale (entre 40 et 50 % du PIB) est financé en grande partie par des capitaux à court terme très volatils, rendant la livre vulnérable. Le Liban n'est donc pas à l'abri d'une crise des paiements, tandis que le Gouvernement ne dispose plus de marge de manoeuvre budgétaire.
Au total, le pays vit largement « sous perfusion », ce qui n'est pas sans le fragiliser. L'argent de la diaspora a commencé à revenir, mais celle-ci reste prudente. D'après les informations fournies à la délégation par le secrétaire général du CDR, le Fonds Monétaire International estimerait à 60 milliards de dollars les actifs des Libanais à l'étranger.
2. Des déséquilibres sociaux inquiétants
• Prévu pour une période de 13 ans
(1995-2007), le plan de reconstruction couvre l'ensemble du territoire
libanais. Il faut cependant constater que le chantier de Beyrouth concentre une
large partie des efforts et que l
es déséquilibres
régionaux sont flagrants.
Un certain nombre de régions
ont besoin d'un développement de services publics aussi essentiels que
la fourniture d'énergie, les télécommunications, les
routes, l'enseignement, la santé publique et la gestion de
l'environnement.
En effet, les secteurs social et éducatif ont été jusqu'ici plutôt négligés par les autorités. Par ailleurs, les problèmes d'environnement sont considérables et concernent notamment le traitement des eaux usées et des déchets urbains. Enfin, l'administration libanaise a besoin d'une profonde réforme, que le confessionnalisme persistant rend délicate.
• En définitive,
la priorité
accordée à la reconstruction a un coût social non
négligeable.
La délégation a profondément ressenti le risque d'une fracture sociale et l'existence d'un décalage entre, d'un côté, une minorité très aisée qui bénéficie de la reconstruction et, de l'autre, une majorité qui baigne dans la désillusion et vit sans réel espoir de voir sa situation rapidement s'améliorer.
Le niveau de vie d'une grande partie de la population est, en effet, encore très affecté par la guerre, la paupérisation de la classe moyenne s'accélère, les inégalités et les tensions s'accroissent.
Cette situation se trouve aggravée par la présence accrue de travailleurs immigrés qui acceptent des rémunérations moins élevées que les Libanais. Leur nombre s'élèverait à plus de 800.000 personnes 1 ( * ) : beaucoup de Syriens, des Egyptiens, ainsi que des Srilankais ou des Philippins.
* 1 Des estimations officieuses, qu `il est cependant difficile de vérifier, avancent des chiffres plus élevés.