« Je suis athée. » Cette déclaration de Victor Schoelcher, le 24 mars 1882 lors de la discussion du projet de loi sur l'enseignement primaire obligatoire, cause un vif émoi sur les bancs du Sénat. Elle répond à l'amendement d'un sénateur proposant l'exclusion de la fonction d'instituteur de toute personne ayant publiquement avoué son athéisme. Pris à partie par les uns, applaudi par les autres pour sa courageuse déclaration, Schoelcher ne croit pas devoir s'expliquer davantage.
En février 1883, lors d'un débat au Sénat sur le serment judiciaire, il s'exprime à nouveau sur l'athéisme : « croire ou ne pas croire à un Dieu est affaire d'examen, de raisonnement, de sentiment, on ne croit pas ce qu'on veut ». Pour mieux se faire comprendre, il évoque son histoire personnelle : il parle de sa mère, catholique et très pieuse, de ses amis dont beaucoup sont déistes, de ses lectures des auteurs sacrés, et conclut : « j'ai cherché Dieu, sincèrement, gravement : je ne l'ai pas trouvé. Libre aux croyants indulgents de m'en plaindre, aux intolérants d'en prendre sujet de m'anathémiser, mais nulle personne sensée ne voudra me l'imputer à faute ».
Puis revenant à l'objet du débat, il témoigne de sa foi en l'homme et de l'existence de valeurs morales hors de la religion : « pourquoi alors ne pas accepter le serment de l'athée qui prend à témoin de sa sincérité l'idéal de ses convictions : la recherche du bien, le culte de la vérité, l'amour de l'humanité, le dévouement jusqu'au péril de la vie, aux devoirs de l'homme et du citoyen ? »