Gaston Monnerville approuve le projet de Constitution de 1958. Il en a suivi de près l’élaboration. Un des principaux rédacteurs est le garde des Sceaux, Michel Debré, membre du Conseil de la République, qui entretient des rapports confiants avec son Président d’assemblée. D’autre part, plusieurs membres du Comité Consultatif Constitutionnel rendent compte régulièrement des séances de travail et des versions successives du texte.
Contrairement à celle de 1946, la nouvelle Constitution est favorable à la Haute Assemblée, qui retrouve son nom de Sénat, son prestige et l’essentiel de ses anciens pouvoirs. C’est enfin une véritable assemblée qui vote la loi et contrôle le gouvernement. Le Président du Sénat voit avancer son rang protocolaire. En cas d’empêchement du chef de l’Etat, c’est lui qui assure l’intérim. Les vœux du bicamériste convaincu qu’est Monnerville ne peuvent qu’être comblés.
A l’époque, politologues et observateurs pensent que le pouvoir exécutif s’est ainsi donné les moyens constitutionnels de s’appuyer, en cas de besoin, sur le Sénat pour contenir une Assemblée nationale, rétive ou hostile. (En 1958, personne ne prévoit le fait majoritaire, qui s’affirmera quatre ans plus tard, et transformera les conditions de fonctionnement du régime).
La Constitution de la Vème République comble également les vœux de Monnerville, dans l’autre domaine qui lui est cher : l’Outre-Mer.
A la place de " l’Union Française ", le nouveau pacte fondamental institue une
" Communauté " rassemblant des pays, relativement autonomes, mais fortement liés à la France. Une assemblée spéciale est prévue : le Sénat de la Communauté. Gaston MONNERVILLE en sera élu et réélu Président.
Les débuts de la Vème République sont donc particulièrement prometteurs. Monnerville fera campagne pour les institutions nouvelles.
Il expliquera dans ses mémoires comment et pourquoi viendront ce qu’il nomme " ses premières désillusions " : l’évolution de l’Outre-Mer, l’indépendance rapidement acquise par les anciennes colonies, l’ajournement indéfini du Sénat de la Communauté..., autant d’événements qui déçoivent celui qui, depuis tant d’années, rêvait pour la France, d’un système cohérent et stable, à l’égal du Commonwealth britannique.