Le Dalaï-Lama a été reçu au Palais du Luxembourg, mercredi 14 septembre 2016, par 30 sénateurs et députés membres du groupe d’information sur le Tibet du Sénat, présidé par M. Michel Raison (LR – Haute-Saône), et du groupe d’études sur le Tibet de l’Assemblée nationale, co-présidé par MM. Jean-Patrick Gille (SOC – Indre-et-Loire) et Noël Mamère (EELV - Gironde).
Le Dalaï-Lama a rappelé que le peuple tibétain a su préserver depuis 1949 sa stricte opposition à la non-violence malgré « la présence subie » de la Chine, et a considéré que les centaines d’auto-immolations par le feu qu’il faut déplorer ces dernières années, aussi tragiques et tristes soient-elles, se distinguent radicalement des attentats suicides commis ailleurs dans le monde. Il a réaffirmé qu’il ne revendiquait nullement un retour à l’indépendance passée du Tibet.
Le Dalaï-Lama a considéré que l’exemple de paix donné au monde par l’Union européenne méritait d’être étendu à d’autres continents, tels que l’Afrique ou l’Asie, à une époque où les divisions nationalistes n’ont plus de sens et où l’unité de l’humanité devient manifeste. Il a invité les parlementaires français, lorsqu’ils ont l’occasion de rencontrer leurs homologues chinois, à leur faire part de leurs points de vue et de leurs suggestions concernant le Tibet.
Le Dalaï-Lama a estimé que, derrière la façade en apparence immuable du système de parti unique en Chine, les choses évoluent et que même les plus intransigeants sur la question du Tibet commençaient à se rendre compte que la méthode suivie depuis des années pour assurer l’unité et la stabilité du pays n’est pas la bonne. Il a considéré que leur position manquait tout simplement de bon sens.
Le Dalaï-Lama a aussi relevé que des voix se multiplient dans la société chinoise pour manifester un soutien à la position du gouvernement tibétain en exil en faveur d’une autonomie réelle du Tibet, et pour critiquer l’intransigeance en retour du gouvernement chinois.
Il a observé que les étudiants et les hommes d’affaires chinois voyagent de plus en plus nombreux à l’étranger, et voient bien la réalité du monde libre, que la censure gouvernementale ne peut plus leur cacher. Il a rappelé que le nombre des bouddhistes chinois approchait les 400 millions et que beaucoup de ceux-ci manifestent un intérêt croissant pour le bouddhisme tibétain, voyagent au Tibet et contribuent à la reconstruction des monastères détruits.
Évoquant la dégradation des équilibres écologiques sur le plateau tibétain, le Dalaï-Lama a suggéré aux parlementaires français présents de demander aux autorités chinoises à pouvoir visiter le Tibet en compagnie de scientifiques chinois compétents dans ce domaine, afin d’avoir une juste appréciation de la situation.
A propos de sa succession future, le Dalaï-Lama a rappelé avoir dit dès 1969 que l’avenir de l’institution des dalaï-lamas serait décidé démocratiquement par le peuple tibétain. Il a indiqué avoir déjà pris une semi-retraite politique en 2001, en s’appuyant sur un Premier ministre directement élu par la communauté tibétaine en exil, et s’être mis en retraite complète en 2011, en confiant à celui-ci tous ses pouvoirs politiques. Il a relevé que les autorités chinoises semblaient curieusement davantage attachées à l’institution des dalaï-lamas dans sa forme traditionnelle que lui-même.
Enfin, évoquant la question de l’éducation et de la culture, le Dalaï-Lama a dénoncé la sinisation en cours auprès de la population tibétaine. Plus largement, il s’est déclaré favorable à l’intégration dans les systèmes éducatifs du monde entier de valeurs fondamentales, éthiques et humaines dans une forme laïcisée, indépendante de toute religion.