Le mercredi 5 juin 2024, le Sénat a accueilli Mme Sanija AMETI, Conseillère municipale de Zurich (Suisse) et co-présidente d'Operation Libero, au titre du programme d'invitation des personnalités d'avenir du ministère de l'Europe et des affaires étrangères.

Mme AMETI s'est entretenue avec Mme Florence BLATRIX CONTAT, Secrétaire de la commission des affaires européennes, Vice-Présidente du groupe interparlementaire d'amitié France-Suisse, co-auteure d'une communication sur l'état des relations Union européenne-Suisse.

L'Operation Libero est une ONG dont l'objectif est de collecter 100 000 signatures dans le but d'organiser une votation populaire pour une révision constitutionnelle permettant d'instaurer des relations permanentes entre la Suisse et l'Union européenne. Il s'agirait d'un saut qualitatif allant au-delà des accords-cadres négociés, sans succès, en 2021. Les réactions à cette initiative sont très différentes selon les régions du pays, les zones rurales étant plus conservatrices que les zones urbaines. Si la formation d'extrême droite UDC y est clairement hostile, de même que les lobbies agricoles, de nature protectionniste, plusieurs partis politiques sont divisés, la gauche en particulier, ainsi que les syndicats qui redoutent une baisse des salaires. La jeunesse y est aussi opposée, pour des motifs migratoires essentiellement.

Cette révision constitutionnelle aurait pour avantage d'éviter de renégocier régulièrement les accords existants entre la Suisse et l'Union européenne ; elle établirait un mécanisme institutionnel de règlement des différends et prévoirait in fine une saisine de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) afin de trancher d'éventuels litiges. Ce dernier point constitue le principal point d’achoppement, les Suisses n'étant pas favorables à se tourner vers des juges européens. Quant à l'Union européenne, si elle n'est pas hostile au principe, elle resterait réservée sur la possibilité d'instaurer, pour un État, un statut spécifique inspiré de l'"Europe à la carte".

Cette initiative intervient dans un contexte politique traditionnellement eurosceptique - les Suisses s'étaient déjà prononcés en 1992 contre l'adhésion de leur pays à l'Espace économique européen - qui se serait encore dégradé au cours des dernières années, en particulier, selon Mme AMETI, sous l'influence des positions europhobes de l'UDC qui porte un projet de votation visant à renforcer la neutralité du pays. Pourtant, la contexte géopolitique a changé, et le conflit en Ukraine démontre l’intérêt de se rapprocher de l'Union européenne. Selon elle, le premier objectif de cette initiative est d'ouvrir un débat sur l'avenir du pays : la Suisse veut-elle démontrer sa solidarité envers les Européens ou rester isolée en Europe ? 

Mme Florence BLATRIX CONTAT a rappelé que la France était favorable à des interconnexions entre l'Union européenne et la Suisse, pays frontalier, mais qu'elle était aussi vigilante sur l'intégrité du marché intérieur et les compétences de la CJUE.

Enfin, Mme Sanija AMETI a effectué une visite historique et institutionnelle du Palais du Luxembourg.

Xavier DUPRIEZ – Tél : 01.42.34.32.06 – Courriel : x.dupriez@senat.fr