107 ème Conférence et réunions connexes

Marrakech, 17-23 mars 2002 - point 4

LE RÔLE DES PARLEMENTS DANS LA DÉFINITION DES POLITIQUES PUBLIQUES À L'ÈRE DE LA MONDIALISATION, DES INSTITUTIONS MULTILATÉRALES ET DES ACCORDS COMMERCIAUX INTERNATIONAUX.

Mémoire présenté par le groupe français

Les présidents de Parlement ont adopté le 1er septembre 2001 une déclaration fondatrice sur la vision parlementaire à l'aube du troisième millénaire notamment en ce qui concerne le rôle des Parlements à l'ère de la mondialisation. Cette conférence, réunie à l'initiative de l'UIP avait notamment déclaré :

« Les relations internationales ont connu une évolution profonde : elles ne se limitent plus à la diplomatie traditionnelle. Le développement de la coopération multilatérale, dont le champ d'action n'a cessé de s'élargir, a ajouté de nouvelles facettes à ces relations. La coopération internationale exige désormais de nouvelles méthodes de travail et la participation d'acteurs nouveaux. En particulier, la mise en oeuvre des engagements pris dans les forums internationaux et régionaux, aujourd'hui plus importants que jamais, requiert la participation des parlements et bien des questions traitées par les parlements sur le plan national ont une dimension internationale. »

« Ces nouvelles approches sont d'autant plus nécessaires que le monde a profondément changé ces dernières années. Nous assistons à une révolution technologique sans précédent. Les progrès extraordinaires des communications sont tels qu'il est possible aujourd'hui de suivre instantanément les événements qui se déroulent dans le monde. Désormais, le monde nous apparaît comme un village planétaire, un univers rapetissé, chaque jour plus interdépendant. Les activités économiques de toutes sortes que mènent les entreprises nationales et transnationales, localement et par delà les frontières, les investissements, les échanges commerciaux et les flux transfrontières de capitaux rapprochent les nations les unes des autres, comme le fait la prise de conscience que les ressources de la planète ne sont pas illimitées. »

« La complexité croissante et la mondialisation des évolutions observées en matière politique, économique, sociale, environnementale et culturelle imposent plus que jamais aux parlements et à leurs membres qu'ils jouent leur rôle pour permettre aux citoyens et à la société tout entière de comprendre et maîtriser les liens entre la mondialisation et leur réalité quotidienne, et pour traduire leurs préoccupations dans les politiques nationales et internationales. Faute de quoi, le risque est grand que la coopération et la prise de décision au plan international soient considérées comme une menace pour les intérêts nationaux ou locaux, voire la démocratie. »

« La mondialisation et la prééminence des facteurs économiques dans le développement des nations imposent un renforcement du processus politique et du lien entre les citoyens et leurs représentants. Aussi nous faut-il consolider le rôle de médiateur que jouent le parlement et ses membres, placés entre le processus complexe de prise de décisions internationales et les citoyens. »

Toutefois, à l'ère de la mondialisation, le rôle et la liberté d'action de la représentation nationale dans la détermination des politiques publiques sont profondément modifiés et de plus en plus encadrés par des données extérieures régionales, comme dans le cas de l'Europe, ou mondiale, dans le cadre des institutions internationales comme les organes de l'ONU ou l'OMC. Cette nécessaire intégration régionale ou internationale peut s'accompagner d'un déficit démocratique si elle est trop exclusivement organisée par les exécutifs. Les Parlements, qui sont les représentants légitimes de la société civile, et leurs organisations régionales ou internationales se doivent d'agir pour que la voix des peuples soit entendue lors des négociations internationales dont l'impact national est de plus en plus important.

1 - LA DÉMOCRATIE PARLEMENTAIRE À L'HEURE DE LA RÉGIONALISATION ET DE LA MONDIALISATION

La déclaration du millénaire fixait les recommandations suivantes : « Sur le plan régional, les parlements devraient utiliser au mieux les organisations interparlementaires régionales et, à travers elles, s'efforcer d'influer sur les institutions intergouvernementales correspondantes. Les parlements devraient aussi évaluer le travail des organisations interparlementaires pour les rendre plus efficaces et éviter tout double emploi. Ils devraient par ailleurs comparer leurs expériences respectives pour améliorer et simplifier leurs législations.

Sur le plan international, parallèlement au renforcement de l'apport politique des institutions parlementaires nationales au processus de coopération inter-étatique, il convient de consolider l'Union interparlementaire en tant qu'organisation mondiale de la coopération interparlementaire et relais de la vision et de la volonté de ses membres auprès des organisations intergouvernementales. »

a - au niveau européen

Dans le cadre européen, environ 50% de la législation française adoptée est aujourd'hui d'inspiration européenne. Ce schéma répond bien évidemment à une volonté partagée par chaque État membre de l'Union européenne que ce soit au niveau des gouvernements, à celui des parlements ou à celui des citoyens quand les accords sont adoptés par la voie référendaire. La délégation de souveraineté nationale s'exerce alors dans le cadre de la subsidiarité.

Néanmoins, ce phénomène d'intégration est perçu par certains citoyens comme une contrainte délégitimant la décision en raison de l'absence ou de l'insuffisance d'un contrôle démocratique effectif. Afin de répondre à cette critique, un mouvement de démocratisation dans l'élaboration et l'adoption des normes européennes s'est amorcé depuis une vingtaine d'années. Ce mouvement s'est accéléré ces dernières années. C'est dans ce contexte que le Parlement européen a été démocratiquement élu puis a développé son rôle en matière de co-décision. C'est également dans ce contexte que l `Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe intervient.

De leur côté, les parlements nationaux de l'Union ont développé leurs contrôles sur la législation européenne. A cet égard, la France s'est dotée d'un mécanisme principal dans l'une et l'autre assemblée parlementaire nationale : les délégations pour l'Union européenne qui exercent un rôle d'information et de contrôle. Elles se réunissent en moyenne une fois par semaine durant les sessions parlementaires, publient des rapports d'information et des avis sur tous les textes européens qui leur sont soumis dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution. Ce dispositif prévoit en effet que le Gouvernement soumet à l'Assemblée Nationale et au Sénat, dès leur transmission au Conseil de l'Union européenne, les projets ou propositions d'actes des Communautés européennes et de l'Union européenne comportant des dispositions de nature législative. Il peut également leur soumettre les autres projets ou propositions d'actes ainsi que tout document émanant d'une institution de l'Union européenne. Il est ainsi possible aux Assemblées parlementaires françaises de faire connaître leur opinion au gouvernement alors que la négociation est en cours au niveau européen. Des mécanismes différents, mais créés dans le même esprit démocratique, existent dans les différents pays membres de l'Union européenne.

Par ailleurs, le Sénat s'est doté d'une antenne permanente à Bruxelles, petite structure administrative, afin d'informer en amont la Haute assemblée lors de l'élaboration des nouvelles législations européennes mais aussi d'informer les institutions européennes sur les opinions et les positions du Sénat.

Enfin, de grandes étapes de la construction européenne, comme l'adhésion au Traité dit de Maastricht, ont été validées directement par le peuple, par la voie du référendum.

Des outils existent et sont utilisés -parfois certes insuffisamment- afin de prendre en compte, dans la construction européenne, la nécessaire garantie démocratique qui permet d'associer les peuples à l'édification de leurs destins.

b - au niveau supra-régional

Au niveau supra-régional, en revanche, il n'en est malheureusement pas de même. Des contraintes extérieures pèsent sur la liberté d'action du législateur national. En effet, si la mondialisation est une évolution inévitable et souhaitable à bien des égards, elle doit s'inscrire dans un contexte multilatéral et démocratique. En conséquence, l'un des enjeux primordiaux de la mondialisation réside dans la volonté de transformer une contrainte externe, perçue comme subie, en une donnée réfléchie, souhaité et contrôlée. L'essentiel réside donc en la quête d'une mondialisation maîtrisée par les peuples et leurs représentants démocratiquement élus. Les Parlements sont en effet les plus à même d'indiquer des objectifs qui ne peuvent être déterminés seulement par des exécutifs et des technostructures intergouvernementales, ni même orientés par des mouvements associatifs et organisations non-gouvernementales qui ne bénéficient pas de la légitimité de l'élection populaire.

Cette légitimité démocratique se doit alors également de transparaître dans les vecteurs de la mondialisation régulée que constituent les organisations internationales.

2 - DES ORGANISATIONS INTERGOUVERNEMENTALES EN QUÊTE D'UNE NOUVELLE LÉGITIMITÉ DÉMOCRATIQUE

Le multilatéralisme impose une égalité de traitement effectif dans la détermination de l'ordre du jour des négociations, dans les prises de parole et diverses contributions ainsi que dans la détermination de ces nouvelles règles applicables à tous. S'il en est ainsi théoriquement, la pratique nuance plus que sensiblement la règle comme cela a pu être constaté et dénoncé par un certain nombre de pays. Plus de transparence dans les mécanismes décisionnels s'impose en conséquence non seulement sur le plan des relations entre les pays membres de ladite organisation mais aussi et surtout sur le plan des relations de l'Organisation avec les citoyens.

A cet égard, l'exemple de l'Organisation mondiale du commerce est particulièrement significatif :

La recherche d'un commerce équitable et non discriminatoire, à l'origine de l'OMC passe également par un véritable contrôle démocratique sur les travaux de cette organisation, exigé par les parlementaires et leurs électeurs. Le contrôle citoyen permet en effet de légitimer une action, à bien des égards nécessaires mais aussi source de fractures sociétales importantes.

De récentes manifestations dégénérant parfois en incidents violents comme à Seattle, Turin et Québec ou des contre-sommets liés à des mouvements anti-mondialisation, comme récemment à Porto-Alegre -en présence de nombreux parlementaires- ont montré la nécessité d'une telle démarche, seule source pacifiée de l'acceptation de l'architecture internationale existante. Cette « exigence de transparence parlementaire » devient une impérieuse nécessité que les organisations intergouvernementales se doivent de prendre compte. L'expertise décisionnelle ne se justifie que si elle est soutenue par une responsabilité devant les peuples. Les structures de la mondialisation ne peuvent continuer, à défaut d'une adhésion populaire et citoyenne totale, de s'abstenir d'intégrer toute dimension représentative et par conséquent parlementaire. Il convient du reste de souligner que l'OMC a pris conscience de cette question comme en témoigne sa participation aux réunions organisées par l'Union interparlementaire à Genève les 8 et 9 juin 2001 sur le commerce international ainsi que la tenue d'une réunion parlementaire lors du sommet de Doha.

Cette coopération doit être poursuivie notamment en mettant en oeuvre le groupe de pilotage envisagé lors de la réunion de Doha qui sera chargé de la préparation d'une conférence sur le commerce international en 2002 et de proposer des options pour la mise en place de la dimension parlementaire. Enfin, il convient d'encourager les parlementaires à participer au symposium qui est organisé par l'OMC en avril 2002 pour débattre et s'informer des enjeux du Programme de développement adopté à Doha. Comme le rappelle l'OMC une séance de travail sera organisée à l'attention des parlementaires afin « de leur permettre de voir comment se servir au mieux de la mondialisation et des négociations en cours pour que les pays puissent en retirer des avantages économiques. »

Le sommet du millénaire des Présidents de Parlement a également souligné les conséquences de la mondialisation sur le développement en soulignant que « La mondialisation crée une situation nouvelle. L'essor du commerce, les nouvelles technologies, l'apport croissant d'investissements extérieurs et le développement des échanges d'information stimulent la croissance économique et le progrès humain. Toutefois, cette évolution a plus favorisé les nations développées que les nations en développement et ces dernières rencontrent de grandes difficultés dans l'application des accords commerciaux internationaux. Il faut veiller à ce que les opportunités et les bienfaits de la mondialisation soient mieux répartis et à ce que le droit au développement soit respecté. A cet égard, l'Organisation mondiale du commerce doit veiller à assurer des échanges à la fois libres et équitables produisant des bienfaits à long terme. » Il convient que les Parlements soient particulièrement attentifs à cette dimension.

Mais on ne peut envisager sérieusement une régulation et une réorientation de la mondialisation avec la seule OMC. L'ensemble des organisations internationales du système des nations unies doivent se sentir concernées par cette réflexion démocratique qui, par une légitimation de leurs fonctions est la clé du renforcement de leurs actions. C'est la raison pour laquelle l'obtention du statut d'observateur auprès de l'ONU, de l'OMC et d'autres organismes internationaux doit être poursuivie avec détermination.

Cette volonté a du reste été soulignée de la manière la plus claire dans le rapport du Secrétaire général de l'ONU qui dans sa résolution 55/2 du 8 septembre 20001(*) a décidé de "renforcer davantage la coopération entre l'Organisation des Nations Unies et les parlements nationaux, représentés par leur organisation mondiale, l'Union interparlementaire, dans divers domaines, notamment la paix et la sécurité, le développement économique et social, le droit international et les droits de l'homme, la démocratie et la parité entre les sexes",

Cette direction a été confirmée par la résolution 55/19 du 8 novembre 20002(*) dans laquelle l'Assemblée générale a exprimé le souhait que la coopération entre l'Organisation des Nations Unies et l'Union interparlementaire se resserre encore et a prié le Secrétaire général, en consultation avec les Etats Membres et avec l'Union interparlementaire, de rechercher les moyens d'établir, entre l'Union interparlementaire et l'Assemblée générale et ses organes subsidiaires, une relation nouvelle et renforcée.

Face à ces progrès indéniables qui tendent à pallier le déficit démocratique dans le fonctionnement de la mondialisation, des institutions multilatérales et des accords commerciaux internationaux, deus sortes de réponses semblent pouvoir être valablement apportées.

3 - LA RECHERCHE DE STRUCTURES APPROPRIÉES DANS LES PARLEMENTS NATIONAUX

Le Parlement ne peut être exclu du grand débat public sur la mondialisation et doit devenir un lieu de réflexion privilégié sur sa régulation.

Le Parlement se doit ainsi de renforcer à l'international ses trois missions essentielles de médiateur entre les peuples et les gouvernements, de législateur et de contrôleur de l'action de l `exécutif.

a - Sa mission de médiateur entre le peuple et le Gouvernement

Relais naturel entre son électorat et le Gouvernement, le parlementaire est, par excellence, le porte-parole des réalités du terrain et de la perception par l'électorat des mesures prises aux niveau national et international. Cette fonction est souvent renforcée en pratique par un mandat local. Le parlementaire vit la proximité de ses électeurs. En retour, l'élu est le meilleur relais pour porter à l'électorat l'information et la justification des décisions prises ou à prendre notamment par les organisations internationales. Ce schéma de démocratie représentative ne peut fonctionner que dans la mesure où l'élu est correctement informé et participe réellement et activement au processus de décision.

b - Sa mission de législateur

La parlementaire élabore la loi nationale. Il en est de même en matière internationale pour l'application en droit interne de normes internationales. Ainsi, le parlement français adopte des projets de loi portant autorisation de ratification d'un traité international ou d'approbation d'un autre engagement international.

En pratique, par un vote, il autorise le gouvernement à ratifier les traités. L'exécutif est, de son côté, exclusivement compétent pour conduire les négociations internationales, signer et ratifier les conventions. En conséquence, les dispositions des règlements intérieurs de chaque assemblée organisent une irrecevabilité absolue concernant le droit d'amendement aux articles du traité annexé au projet de loi de ratification. Ainsi lorsque le Sénat ou l'Assemblée nationale est saisi d'un projet de loi tendant à autoriser la ratification d'un traité conclu avec une puissance étrangère, il n'est pas voté sur les articles de ce traité, mais seulement sur le projet de loi tendant à autoriser la ratification.

Cette procédure, juridiquement justifiée, est probablement insatisfaisante surtout à un moment où la mondialisation impose un afflux de normes extérieures. Il devient alors essentiel de permettre aux parlements d'intervenir en amont sur les orientations des négociations internationales et de travailler à la convergence des législations nationales dans les domaines étudiés.

c - Sa mission de contrôle de l'exécutif

Entre contrôle politique et contrôle technique, le parlementaire exerce sa troisième mission de manière différenciée suivant le type de système institutionnel qui l'organise. Pour autant, le suivi des activités de chacune des organisations internationales habilitées à édicter des normes internationales devrait être une constante et une priorité dans le contexte de la mondialisation.

A cet égard, le Parlement français a précisé, dans l'un de ses nombreux rapports portant sur les relations entre Parlement et mondialisation, le contrôle que le Parlement doit effectuer sur l'exécutif en ce domaine. « Les parlementaires doivent pouvoir contrôler l'action de l'exécutif, par un suivi des négociations commerciales, afin de vérifier leur conformité avec les orientations définies en amont et d'en informer les parlements nationaux ».

Ainsi, déjà à Seattle, 150 parlementaires avaient pris l'initiative de se réunir sans mandat particulier en demandant l'établissement d'une assemblée parlementaire « dans le cadre de laquelle les membres des parlements pourront échanger des vues, être informés des activités et négociations menées dans le cadre de l'OMC et suivre ces dernières. »

L'an dernier, une rencontre parlementaire s'est également tenue dans le cadre de la quatrième conférence ministérielle de l'OMC à Doha, cette fois sous l'égide conjointe de l'UIP et du Parlement européen avec l'appui du Parlement andin et de l'Assemblée du Conseil de l'Europe. Dix parlementaires français, membres des deux assemblées parlementaires et de différentes formations politiques y ont participé. Cette rencontre a permis la constitution d'un groupe de pilotage chargé de la préparation d'une conférence sur le commerce mondial au cours de laquelle devraient être proposées « des options pour la mise en place d'une dimension parlementaire de l'OMC ».

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La dimension parlementaire doit être concrétisée par les parlements eux-mêmes au plan national, de quatre manières en :

influant sur la politique de leurs pays respectifs concernant les questions traitées à l'ONU et autres forums de négociations internationales;

se tenant informés du déroulement et de l'issue de ces négociations;

se prononçant sur la ratification, lorsque la Constitution le prévoit, des textes et traités signés par les gouvernements;

contribuant activement à la mise en oeuvre des résultats de ces négociations.

Pour atteindre ces objectifs chaque parlement doit lancer une réflexion sur la meilleure utilisation des procédures parlementaires lui permettant, avec l'apport actif de tous les partis et les parlementaires, de contribuer utilement aux négociations gouvernementales au niveau international.

Les parlements devraient aussi s'impliquer davantage dans les processus concernant la ratification et le respect des accords internationaux. Plus généralement, le Parlement a la responsabilité particulière de nourrir un dialogue permanent avec les citoyens et de favoriser leur implication dans la prise de décision.

Une telle orientation n'aura cependant de sens que lorsque les questions multilatérales feront l'objet d'un véritable contrôle parlementaire au niveau des parlements nationaux.

En effet, les structures existantes au Parlement répondent à une conception classique de la détermination des politiques publiques. Cette détermination est naturellement adaptable comme le montre la réaction du Parlement face à la croissance de l'engagement européen de la France. Par la création de délégations à l'Union européenne, au statut quasi similaire de celui dont jouissent les commissions permanentes à l'Assemblée nationale et au Sénat, par l'antenne permanente de Bruxelles crée il y a trois ans par le Sénat, le Parlement a montré qu'il était en mesure d'adapter ses structures en s'intégrant dans un dispositif décisionnel pluri-étatique à portée régionale.

Les activités de collecte de l'information devraient être renforcées pour que les parlements soient au fait des grands dossiers internationaux.

Aujourd'hui, à l'ère de la mondialisation, des institutions multilatérales et des accords commerciaux internationaux, ce dispositif doit s'élargir.

A cet égard, il est significatif d'observer que des propositions en ce sens émanent justement des délégations à l'Union européenne des deux assemblées :

- que ce soit, pour l'Assemblée nationale, une délégation spécifique aux questions multilatérales ( propositions actuellement à l'étude) ;

- que ce soit, pour le Sénat, un groupe d'études commun sur les négociations commerciales internationales (récemment créé en commun par la délégation pour l'Union européenne et la commission des affaires économiques)

Outre ces structures, il faut surtout que le Parlement bénéficie de moyens concrets pour travailler sur ces questions et que des parlementaires continuent de se spécialiser sur la mondialisation, les institutions multilatérales et les accords commerciaux internationaux dans un cadre national mais aussi dans un cadre international.

4 - l'acteur naturel d'une démocratisation de la mondialisation : l'UIP

Les instances démocratiques -au premier rang desquelles se trouvent les parlements et leurs représentants- doivent être réintroduites dans les mécanismes de prise de décision des organisations internationales. S'il appartient à chaque Parlement national de déterminer laquelle de ses structures serait la mieux à même d'atteindre cet objectif, il est nécessaire également de capitaliser les efforts qui ont été menés ces dernières années au niveau des structures interparlementaires représentatives des peuples.

Au niveau international cette volonté a été clairement réaffirmée par les Présidents de Parlement réunis à New York, à l'ONU du 30 août au 1er septembre 2000 pour une conférence organisée par l'UIP en coopération avec l'ONU. Dans une déclaration commune intitulée « La vision parlementaire de la coopération internationale à l'aube du troisième millénaire » les présidents affirmaient : « Nous, Présidents de parlement, sommes réunis au Siège de l'Organisation des Nations Unies à New York à la veille de l'Assemblée du Millénaire pour affirmer notre attachement à la coopération internationale, animée par une Organisation des Nations Unies renforcée. Nous sommes résolus à faire en sorte que nos parlements contribuent plus substantiellement à cette coopération en faisant entendre la voix des peuples, donnant ainsi un caractère plus manifestement démocratique à la prise de décision et à la coopération internationales. Il est souhaitable, pour aider l'Organisation des Nations Unies à prendre un nouvel élan, que les parlements soient associés plus étroitement à son action afin de donner tout leur sens aux premiers mots de la Charte des Nations Unies : "Nous, peuples des Nations Unies". »

Ayant vocation à faire participer l'ensemble des parlements mondiaux, l'U.I.P., par son existence même, est naturellement l'organisation qui peut devenir rapidement l'interlocuteur de ces organisations internationales.

La déclaration du Millénaire affirme solennellement que « parallèlement au renforcement de l'apport politique des institutions parlementaires nationales au processus de coopération inter-étatique, il convient de consolider l'Union interparlementaire en tant qu'organisation mondiale de la coopération interparlementaire et relais de la vision et de la volonté de ses membres auprès des organisations intergouvernementales ».

L'Union ne doit cependant pas, en effet, en être l'interlocuteur unique. Les structures parlementaires nationales, régionales et linguistiques existantes doivent également trouver leur juste place dans cette refondation de l'action internationale. Il existe en effet une complémentarité évidente à ces différents niveaux dans le plein respect des souveraineté nationales.

S'agissant de l'Union Interparlementaire l'obtention du statut d'observateur auprès de l'ONU et de l'OMC, mais aussi d'autres institutions internationales, devrait être une des priorités de l'Union. Ce statut d'observateur devrait permettre à l'Union de refléter dans toutes ses prises de position orales ou écrites la variété et la richesse des opinions exprimées dans les débats de l'UIP et traduites dans ses résolutions.

Union interparlementaire

107 ème Conférence et réunions connexes

Marrakech, 17-23 mars 2002 - point 4

LE RÔLE DES PARLEMENTS DANS LA DÉFINITION DES POLITIQUES PUBLIQUES À L'ÈRE DE LA MONDIALISATION, DES INSTITUTIONS MULTILATÉRALES ET DES ACCORDS COMMERCIAUX INTERNATIONAUX.

Projet de Résolution présenté par le groupe français

La 107ème conférence interparlementaire,

1 ) Rappelant les termes de la déclaration des présidents de parlement du 1er septembre 2000 sur la vision parlementaire de la coopération internationale à l'aube du troisième millénaire,

2 ) Rappelant les résolutions de l'Assemblée Générale des nations Unies, notamment les résolution 55-2 et 55 19 du 8 septembre 2000 et du 8 novembre 2000 ainsi que les rapports du Secrétaire général (A/RES/996) appelant à une coopération renforcée entre l'ONU et l'UIP,

3 ) Rappelant les différentes déclarations des parlementaires réunis aux réunions de l'OMC et notamment celles de Seattle et de Doha,

4 ) Consciente que le mouvement de mondialisation, entraîne un déplacement des pouvoirs de décision du niveau national vers le niveau régional et international,

5 ) Consciente que ce déplacement des centres de décision repose sur une légitimité démocratique insuffisante notamment pour ce qui est de la représentation des citoyens à travers leur représentants légitimes, les Parlements,

6 ) Constatant que ce déficit démocratique est de nature à mettre en cause les effets positifs de la mondialisation,

7 ) Soulignant que les causes de ce déficit démocratique doivent être combattues au niveau des parlements nationaux comme de leurs organisations régionales et internationales,

1. exhorte les parlements membres de l'Union interparlementaire à développer en leur sein les structures appropriées d'information, de suivi et de contrôle de l'action des gouvernements au sein des institutions et en matière d'accords commerciaux internationaux,

2. invite les parlements et leurs représentants à utiliser au mieux les organisations interparlementaires régionales et, à travers elles, s'efforcer d'influer sur les institutions intergouvernementales correspondantes.

3. invite les membres de l'Union Interparlementaire à procéder à des évaluations du travail des organisations interparlementaires pour les rendre plus efficaces, éviter tout double emploi et à comparer leurs expériences respectives pour améliorer et simplifier leurs législations.

4. invite les membres de l'Union interparlementaire à consolider l'Union interparlementaire en tant qu'organisation mondiale de la coopération interparlementaire et relais de la vision et de la volonté de ses membres auprès des organisations intergouvernementales,

5. recommande que l'Union interparlementaire fasse les démarches utiles à l'obtention, pour l'Union en tant qu'entité, d'un statut d'observateur auprès de l'ONU et de l'OMC,

6. encourage l'Union à créer lors de sa réforme une structure permanente de relations avec les autres organisations internationales,

7. demande à l'Union interparlementaire de continuer à organiser des séminaires de formation destinés aux parlementaires et à leurs collaborateurs, notamment dans le cadre des relations commerciales internationales.


* 1 Déclaration du Millénaire (paragraphe 30).

* 2 Coopération entre l'Organisation des Nations Unies et l'Union interparlementaire (A/RES/55/19).