Loi n° 2007-1544 du 29 octobre 2007 de lutte contre la contrefaçon (Journal officiel du 30 octobre 2007 et rectificatif au Journal officiel du 10 novembre 2007 ).
Le projet de loi de lutte contre la contrefaçon, déposé sur le Bureau du Sénat , tend à renforcer l'arsenal juridique à la disposition des tribunaux et à permettre une meilleure indemnisation des victimes. Il transpose une directive européenne du 29 avril 2004, elle-même largement inspirée du droit français traditionnellement en pointe dans le domaine de la protection de la propriété intellectuelle.
Le dispositif couvre un vaste champ avec les droits d'auteur, les marques, les dessins et modèles, les brevets d'invention, les topographies de produits semi-conducteurs, les certificats d'obtention végétale ainsi que les appellations d'origine et indications géographiques. Concernant les victimes, il fonde désormais le calcul des dommages et intérêts qui leur sont alloués sur les bénéfices réalisés par le contrefacteur. Par ailleurs, la protection des preuves de contrefaçon est renforcée par des procédures accélérées et simplifiées de saisine du juge en cas d'urgence et un droit d'information qui doit permettre aux autorités judiciaires civiles de mieux identifier les acteurs des réseaux de contrefaçon. Enfin, le juge pourra prononcer diverses mesures provisoires, telles que la saisie conservatoire des biens et le blocage des comptes bancaires, et pourra ordonner le retrait des circuits commerciaux et la destruction des contrefaçons.
Première lecture.
Le projet de loi a été examiné en première lecture par le Sénat le 19 septembre 2007. 53 des 56 amendements déposés sur le texte, soit la quasi-totalité, ont été adoptés, l'essentiel des évolutions proposées émanant de la commission des lois, saisie au fond et à l'origine de 51 amendements.
Au cours de la discussion générale , après Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi, et M. Laurent Béteille, rapporteur de la commission des lois, sont intervenus Mme Michelle Demessine, M. Richard Yung, Mme Jacqueline Gourault et M. Christian Cambon. M. Hervé Novelli, secrétaire d'Etat chargé des entreprises et du commerce extérieur, a répondu aux différents orateurs avant d'exprimer la position du Gouvernement sur les amendements.
Les principales modifications apportées au projet de loi dans la discussion des articles ont consisté, par l'insertion d'articles additionnels, à :
- rationaliser l'organisation judiciaire en spécialisant certains tribunaux de grande instance dans le domaine de la propriété intellectuelle, celui de Paris conservant une compétence exclusive en matière de marques communautaires englobant également désormais les dessins et modèles communautaires : initiative conjointe de la commission des lois et de M. Richard Yung et du groupe socialiste insérant un article 41 1 ( * ) ;
- sanctionner plus sévèrement les contrefaçons dangereuses pour la santé et la sécurité des personnes comme dans le cas des médicaments ou des pièces détachées pour voitures : initiative de la commission des lois insérant un article 43 ;
- renforcer les moyens d'enquête, de poursuite et de contrôle en matière de contrefaçon par :
• l'amélioration des moyens d'action des douanes et des services judiciaires lors du transbordement de marchandises contrefaisantes transitant sur le territoire français avec l'institution d'une procédure de retenue douanière en matière de marques, l'autorisation de la saisie douanière en matière de dessins et modèles, l'extension des compétences de la douane judiciaire à tous les droits de propriété intellectuelle et la possibilité pour le procureur de la République d'ordonner sous certaines conditions la destruction des biens illicites ( article 42 inséré à l'initiative de la commission des lois) ;
• l'introduction dans le code de la consommation de dispositions permettant aux agents habilités en matière de lutte contre la contrefaçon d'échanger spontanément et de façon régulière des informations et des documents confidentiels recueillis dans le cadre de l'exercice de leur mission ( article 44 inséré à l'initiative de M. Christian Cambon et du groupe UMP) ;
• et l'extension aux marchandises présentées sous une marque susceptible d'être contrefaisante de la procédure de consignation sans autorisation judiciaire ( article 45 inséré à l'initiative de M. Christian Cambon et du groupe UMP).
Le Sénat, à l'initiative de la commission des lois, a apporté au dispositif les autres modifications suivantes :
- la suppression de la référence à la notion manquant de précision d' « échelle commerciale » aux articles 3 (Régime juridique applicable à la contrefaçon de dessins et modèles nationaux), 9 (Définition de la contrefaçon de brevets à l'échelle commerciale), 17 (Régime de responsabilité applicable en matière de contrefaçon de produits semi-conducteurs), 19 (Définition de la contrefaçon d'obtentions végétales à l'échelle commerciale) et 23 (Définition de la contrefaçon de marques à l'échelle commerciale) ;
- la substitution à l'expression impropre de « contrefait » de celle de « contrefaisant » pour désigner la marchandise qui copie le produit authentique, dans l'ensemble des dispositions du projet de loi (amendement à l' article 3 ) mais également dans l'ensemble du code de la propriété intellectuelle, du code monétaire et financier, du code des douanes et du code de procédure pénale (amendement insérant un article 40 ) ;
- pour une meilleure protection des droits des producteurs de bases de données, l'ouverture de la possibilité, pour les huissiers de justice, de se faire assister lors de la saisie par des experts choisis par le requérant et le renforcement de l'arsenal des mesures provisoires et conservatoires, comme cela existe en matière de propriété industrielle (amendement à l' article 39 - Saisie-contrefaçon et mesures pénales complémentaires applicables à toute atteinte aux droits des producteurs de bases de données) ;
- l'extension au soutien à la lutte contre la contrefaçon, sur la base du volontariat, du périmètre des missions dévolues aux comités professionnels de développement économique et la possibilité de rapprochement entre ces comités et les centres techniques industriels (amendement insérant un article 46 ) ;
- l'extension à l'outre-mer des dispositions du projet de loi (amendement insérant un article 47 ).
Des modifications d'ordre rédactionnel, de correction d'erreur matérielle ou de coordination ont par ailleurs été apportées au projet de loi aux articles 2, 3, 4, 5, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 17, 19, 20, 21, 24, 25, 26, 27, 28, 31, 33 et 36 . Ont en outre été supprimés par coordination les articles 9 (Définition de la contrefaçon de brevets à l'échelle commerciale), 19 (Définition de la contrefaçon d'obtentions végétales à l'échelle commerciale) et 23 (Définition de la contrefaçon de marques à l'échelle commerciale).
Le Sénat a enfin adopté sans modification quinze articles du projet de loi, soit l' article 1 er (Création d'un chapitre V dans le titre I er du livre V du code de la copropriété intellectuelle, intitulé « Dessins ou modèles communautaires »), l' article 6 (Spécialisation de certains tribunaux de grande instance dans le contentieux des dessins et modèles communautaires), l' article 7 (Mise en oeuvre du règlement n° 816/2006 concernant l'octroi de licences obligatoires permettant l'exportation de médicaments à des pays en développement), l' article 8 (Transposition de la directive 98/44/CE du 6 juillet 1998 relative à la protection juridique des inventions biotechnologiques), l' article 15 (Mesures pénales complémentaires en matière de brevets), l' article 16 (Rectification d'une erreur matérielle et coordination avec l'article 7 du projet de loi), l' article 18 (Application aux produits semi-conducteurs des dispositions relatives aux brevets), l' article 22 (Sanctions pénales complémentaires en matière d'obtentions végétales), l' article 29 (Changement d'intitulé de la section 1 du chapitre I er du titre III du livre III du code de la propriété intellectuelle), l' article 30 (Exercice des actions en contrefaçon par les licenciés exclusifs des producteurs de phonogramme ou de vidéogramme), l' article 32 (Intérêt à agir des organismes de défense professionnelle), l' article 34 (Modification du délai pour agir après une saisie-contrefaçon), l' article 35 (Coordination), l' article 37 (Mesures pénales complémentaires applicables à toute atteinte au droit d'auteur ou aux droits voisins du droit d'auteur) et l' article 38 (Mesures pénales complémentaires applicables à toute atteinte aux droits des producteurs de bases de données).
Après les explications de vote de MM. Yannick Texier et Richard Yung, le Sénat a adopté en première lecture le projet de loi de lutte contre la contrefaçon ainsi modifié.
Deuxième lecture.
Le projet de loi de lutte contre la contrefaçon, examiné en première lecture par l'Assemblée nationale le 2 octobre 2007 au cours d'un débat qui a été l'occasion pour les députés de saluer les avancées initiées par la Haute assemblée, est revenu devant le Sénat en deuxième lecture quinze jours après, soit le 17 octobre 2007.
Au cours de la discussion générale sont intervenus, après M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé des entreprises et du commerce extérieur, et M. Laurent Béteille, rapporteur de la commission des lois, Mme Odette Terrade , M. Jean-Claude Peyronnet et Mme Jacqueline Gourault.
Aucun amendement n'a été adopté au cours de la discussion des articles mais un débat, qui a conduit à repousser trois amendements, s'est instauré sur la nécessité d'exclure du champ d'application de la loi la reproduction des semences de ferme. Ont pris part à ce débat MM. Bernard Seillier, Jacques Muller et Philippe Arnaud, Mme Jacqueline Gourault, MM. Daniel Raoul, Jean-Claude Frécon, René Garrec, François Marc et Charles Revet, ainsi que MM. Jean-Jacques Hyest et Laurent Béteille, respectivement président et rapporteur de la commission des lois.
Après les explications de vote de MM. Jacques Muller, Charles Revet, Daniel Raoul, Mmes Jacqueline Gourault et Odette Terrade ainsi que M. Bernard Seillier, le Sénat a adopté , par le scrutin public n° 14 demandé par le groupe socialiste, le projet de loi de lutte contre la contrefaçon dans sa rédaction issue de l'Assemblée nationale dont les travaux étaient venus compléter l'apport du Sénat. La Haute assemblée a ainsi rendu le projet de loi définitif . Au cours de la navette, le texte est passé de 39 à 48 articles, ce qui correspond à un accroissement de son volume de plus de 60 %.