Loi n° 2005-811 du 20 juillet 2005 portant diverses dispositions d' adaptation au droit communautaire dans le domaine des marchés financiers ( Journal officiel du 21 juillet 2005).
Ce projet de loi, déposé en première lecture sur le Bureau du Sénat, concerne la transposition en droit national de deux directives européennes : celle sur les opérations d'initiés et les manipulations de marchés du 28 janvier 2003 et celle concernant les marchés d'instruments financiers du 21 avril 2004.
La première de ces directives, qui aurait dû être transposée au plus tard le 12 octobre 2004, fait partie intégrante du plan d'action pour les services financiers (PASF) prévoyant l'harmonisation du droit boursier européen et devant faciliter l'émergence d'un marché financier intégré. A cet égard, la répression des « abus de marchés » constitue un enjeu majeur car les investisseurs et les émetteurs ne peuvent envisager de se positionner sur un marché n'ayant pas fait la preuve de sa sécurité. La directive propose une définition harmonisée des manipulations de marchés et oblige les Etats membres à se doter d'une autorité administrative capable de sanctionner les manquements à la réglementation en vigueur. Une telle structure existe déjà en France : l'Autorité des marchés financiers, créée par la loi n° 2003-706 du 1 er août 2003. La présente directive renforce ses moyens d'action et son pouvoir de sanction tout en permettant d'améliorer la qualité de l'information financière des intervenants et la prévention des opérations d'initiés.
La seconde directive dont le projet de loi propose la transposition par voie d'ordonnance abroge et remplace la directive du 10 mai 1993 concernant les services d'investissement en valeurs mobilières. Elle complète les dispositions relatives aux marchés réglementés et introduit de nouvelles règles concernant les systèmes multilatéraux de négociation et les systèmes internes des banques. Elle propose également des mesures de clarification et de simplification concernant les interventions des autorités compétentes en la matière.
Première lecture.
Au cours de la discussion générale en première lecture au Sénat , M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, a constaté que la poursuite de l'objectif d'harmonisation à l'échelon européen avait permis d'aboutir « à un socle de règles très exigeantes, permettant d'assurer non seulement un fonctionnement efficace des marchés mais également la transparence de l'information, la protection des investisseurs et l'efficacité de la coopération entre les autorités de contrôle nationales ». Rappelant que la France disposait d'ores et déjà de règles de protection significatives, il a affirmé que les dispositions proposées permettraient à l'AMF d'être plus rapidement et mieux informée des opérations pouvant être jugées suspectes, des transactions sur les titres de sociétés et de la qualité des personnes ayant accès à des informations privilégiées. Il a insisté sur la nécessité de responsabiliser et de sécuriser les auteurs de transactions sur titres puis a présenté le contenu des articles du projet de loi. Le ministre, commentant la demande d'habilitation en vue de la transposition par ordonnance de la directive sur les marchés d'instruments financiers, a souligné le caractère très technique et complexe de ces mesures et la nécessité de disposer des moyens juridiques adéquats au « bon moment » de façon à faire face à la compétitivité qui s'exercera sur les marchés au moment où l'internalisation des ordres sera admise.
M. Philippe Marini, rapporteur général, rapporteur de la commission des finances, a considéré que ce projet, outre qu'il participait directement à l'objectif de résorption du retard en matière de transposition du droit européen, permettait à la France de « se doter des industries financières indispensables à son rayonnement économique en Europe ». Il a noté que ces dispositions complétaient utilement le cadre juridique posé par les lois du 2 juillet 1996 de modernisation des activités financières, du 15 mai 2001 portant nouvelles régulations économiques et du 1 er août 2003 de sécurité financière. Ayant précisé que les mesures « abus de marchés » constituaient un bloc complet comprenant non seulement la directive mais également les textes d'application tandis que celles sur les marchés d'instrument financiers ne comprennaient que la directive, il a noté que ces textes communautaires « s'avér(aient) très respectueux de l'architecture juridique et judiciaire française en la matière... faisant une juste part aux sanctions administratives et une non moins juste part aux sanctions pénales ».
Dans la discussion générale sont alors intervenus MM. François Marc, Jean-Jacques Jegou et Thierry Foucaud.
Le Sénat a ensuite commencé l' examen des articles sur lesquels sont également intervenus M. Jean-Pierre Sueur, Mme Josiane Mathon, M. Robert Badinter, M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois, et Mme Eliane Assassi.
A l' article premier portant sur les articles L. 621-17-1 à L. 621-17-6 du code monétaire et financier concernant la déclaration d'opérations suspectes, le Sénat, sur proposition de la commission des finances et dans le cadre d'une stricte transposition de la directive :
- a prévu que soient concernés non seulement les instruments déjà côtés sur un marchés réglementé tel que le prévoit la directive mais également ceux dont l'admission sur une côte réglementée a été sollicité (avis favorable du Gouvernement) ;
- a précisé que dans le cas de déclaration verbale une confirmation écrite doit également être transmise à l'AMF (avis favorable du Gouvernement) ;
- a étendu à l'ensemble des personnes concernées la portée de l'obligation de confidentialité (avis favorable du Gouvernement) ;
- a organisé les modalités de la transmission des informations par l'AMF à l'autorité de tutelle d'un autre Etat membre compétente et a garanti que la déclaration faisait d'abord l'objet d'une communication à l'AMF (avis favorable du Gouvernement).
L' article 2 portant mesure de coordination a été adopté sans être modifié.
Le Sénat a adopté un amendement de la commission des finances proposant une nouvelle rédaction de l' article 3 portant sur l' article L. 621-18-2 du code monétaire et financier et tendant à adapter le régime de la déclaration d'opérations sur titres effectuées par les dirigeants d'un émetteur et les personnes qui leur sont liées. Etant entendu que l'obligation de déclaration incombe aux personnes physiques et non pas à l'émetteur, le Sénat a précisé les catégories de personnes soumises à l'obligation de déclaration que sont les dirigeants sociaux, les responsables de haut niveau et les personnes entretenant des liens personnels étroits avec ces deux précédentes catégories et a indiqué que l'information devait concerner directement ou indirectement l'émetteur (avis favorable du Gouvernement).
A l' article 4 portant sur l' article L. 621-18-4 du code précité relatif à l'établissement d'une liste d'initiés par les émetteurs, le Sénat a adopté un amendement de coordination de la commission des finances (avis favorable du Gouvernement).
L' article 5 autorisant la transposition par voie d'ordonnance de la directive 2004/39/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 avril 2004 concernant les marchés d'instruments financiers, notamment celles tendant à la protection des investisseurs, par le renforcement de la transparence et de l'intégrité des marchés d'instruments financiers a été adopté sans être modifié.
Il en a été de même de l' article 6 relatif à l'application du présent projet de loi à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna.
Sur proposition de la commission des finances, le Sénat a introduit, avec l'avis favorable du Gouvernement, un article 7 complétant le processus de transposition des directives et proposant de ratifier l'ordonnance du 12 novembre 2004 relative à la surveillance complémentaire des établissements de crédit, des entreprises d'assurance et des entreprises d'investissement appartenant à un conglomérat financier d'une part, et l'ordonnance du 31 mars 2005 relative à la simplification des règles de transfert de propriété des instruments financiers, d'autre part.
Après les explications de vote de MM. François Trucy, François Marc, Jean-Jacques Jegou, Thierry Foucaud et Jean Arthuis, president de la commission des finances, le Sénat a adopté le projet de loi ainsi modifié qui a été transmis à l' Assemblée nationale pour y être examiné en première lecture.
Deuxième lecture.
Lors de l'examen en deuxième lecture au Sénat , Mme Christine Lagarde, ministre déléguée au commerce extérieur, a rappelé que des mesures de régulation des marchés financiers figuraient également dans le projet de loi pour la confiance et la modernisation de l'économie, notamment celles renforçant les pouvoirs de sanction de l'Autorité des marchés financiers et celles organisant la coordination de ses interventions avec celles de ses correspondants européens. Ainsi, il n'est plus nécessaire qu'une manipulation des marchés réussisse pour qu'elle puisse être sanctionnée et les sanctions sont applicables aux manipulations sur les marchés non réglementés. Elle a relevé que l'Assemblée nationale avait amélioré la cohérence de la codification relative aux nouveaux instruments mis à disposition de l'AMF, que sont les listes d'initiés et les déclarations de transactions suspectes, lui permettant ainsi d'exercer un contrôle plus efficace. Elle a indiqué que les décrets d'application détermineraient précisément la liste des personnes concernées par l'obligation de déclaration du fait de leur accès à des informations privilégiées et a signalé que l'Assemblée nationale avait décidé que les personnes concernées effectueraient directement leurs déclarations auprès de l'AMF et informeraient simultanément l'émetteur, ce dernier devant aider les déclarants en leur rappelant leurs obligations ou en leur fournissant le soutien logistique nécessaire. La ministre a ensuite évoqué l'adoption sans modification des dispositions relatives à l'habilitation donnée au Gouvernement pour transposer la directive « marchés d'instruments financiers » introduisant une concurrence accrue entre les plates-formes de négociation et n'autorisant plus le monopole de centralisation des ordres sur les marchés réglementés. Elle a considéré que les objectifs de renforcement de la transparence des marchés financiers et de garantie d'accès consolidé des entreprises aux financements étaient atteints et a donc demandé au Sénat d'adopter le projet de loi en l'état.
M. Philippe Marini, rapporteur de la commission des finances, ayant rappelé que ce projet de loi était un texte de transposition du droit communautaire, a souligné son caractère essentiel en matière de renforcement de la transparence sur les marchés financiers. Il a indiqué que ses dispositions auraient des conséquences concrètes sur l'environnement des professionnels des marchés, des épargnants et des investisseurs. Le rapporteur a souscrit aux précisions apportées par l'Assemblée nationale et a proposé l'adoption conforme de ce projet de loi.
Après l'intervention de M. François Marc dans la discussion générale, le Sénat a procédé à l' examen des articles restant en discussion sur lesquels il n'a retenu aucun amendement.
Après les explications de vote de M. Jean Boyer, de Mme Joëlle Garriaud-Maylam et de M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, le Sénat a adopté définitivement le projet de loi.
Travaux préparatoires
Sénat :
Première lecture (2 mai 2005) : n°s 267, 309 et adoption 101 (2004-2005).
Nombre d'amendements déposés 18
Nombre d'amendements adoptés 8
Nombre d'amendements retenus par l'A.N. 8
Assemblée nationale :
Première lecture (27 juin 2005) : n°s 2281, 2351 et adoption 457 (12 ème législ.).
Sénat :
Deuxième lecture (11 juillet 2005) : n°s 432, 456 et adoption 138 (2004-2005).
Nombre d'amendements déposés 5
Nombre d'amendements adoptés 0
Rapporteur au Sénat : M. Philippe Marini, commission des finances.