Clarifier les obligations de rénovation énergétique des logements (Procédure accélérée)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi visant à clarifier les obligations de rénovation énergétique des logements et à sécuriser leur application en copropriété, présentée par Mme Amel Gacquerre. La procédure accélérée a été engagée sur ce texte.

Discussion générale

Mme Amel Gacquerre, auteure de la proposition de loi .  - Le logement demeure une préoccupation majeure pour les Français. Environ 58 % pointent des difficultés d'accès au logement et 75 % des foyers ont réduit le chauffage pour éviter des factures trop élevées l'hiver dernier.

Il faut offrir un logement décent, abordable et durable à tous les Français. C'est d'abord un enjeu social, alors que les Français peinent à se loger faute d'offre suffisante et abordable.

C'est un enjeu environnemental quand 18 % des émissions de gaz à effet de serre proviennent du secteur du bâtiment.

C'est un enjeu économique, pour tous les propriétaires qui souhaitent rénover leur bien, mais sont freinés par l'aspect financier.

Le calendrier prévoit une interdiction de louer les logements classés G depuis le 1er janvier 2025, soit 2 millions de logements, dont 600 000 locations. Les copropriétés représentent 250 000 logements.

J'ai déposé cette proposition de loi pour clarifier les obligations de rénovation énergétique et sécuriser leur application en copropriété.

Une proposition de loi des députés Bastien Marchive et Inaki Echaniz n'a malheureusement pas abouti. Pourtant, de nombreux logements pourraient sortir du parc locatif, déjà particulièrement tendu.

Le nombre de logements à louer a chuté de 9 % entre fin 2023 et fin 2024.

Nous ne voulons pas retarder l'obligation légale, mais clarifier son application. Le report du calendrier a fait débat, mais nous avons fait le choix de la responsabilité. Ce report risquerait de déstabiliser la trajectoire, que nous ne contestons pas, en changeant les règles du jeu alors que la filière est en pleine restructuration. Cela compromettrait également la pérennité du soutien financier à la rénovation énergétique.

Nous proposons de nous intéresser particulièrement aux copropriétés. Le droit actuel est muet sur les logements dont le respect des obligations énergétiques dépend de travaux dans les parties communes. La commission d'enquête sur l'efficacité énergétique des politiques publiques en matière de rénovation énergétique de Dominique Estrosi Sassone et Guillaume Gontard et la commission d'enquête sur la paupérisation des copropriétés, dont Marianne Margaté était la rapporteure et que je présidais, avaient fait des constats similaires. Un tiers des copropriétés sont des passoires thermiques.

Le droit actuel ne précise pas la temporalité de l'application des obligations de rénovation des propriétaires vis-à-vis des locataires. Nous clarifions en prévoyant que l'obligation ne porte que sur les contrats nouvellement conclus, au terme de la tacite reconduction ou du renouvellement du bail.

Nous avons adopté en commission l'élargissement du champ de la proposition de loi aux logements individuels, ce qui est judicieux, car ce sont ceux qui comptent le plus de passoires énergétiques.

Le propriétaire bailleur qui a réalisé tous les travaux techniquement et juridiquement possibles pourra continuer à louer son bien, même s'il n'a pas atteint l'étiquette visée. Nous avons ajouté les contraintes architecturales et patrimoniales et le cas des travaux dont le coût serait disproportionné.

Dans le cadre des copropriétés, l'obligation de décence énergétique est suspendue en cas de refus de travaux par l'assemblée générale ou le syndic, ou l'architecte des Bâtiments de France (ABF).

Le propriétaire bailleur pourra continuer à louer son logement classé G lorsqu'une démarche de rénovation énergétique est lancée. Cette condition est étendue aux monopropriétés ainsi qu'aux logements individuels. Je proposerai un amendement prévoyant un délai de trois ans, à condition que la démarche de travaux soit engagée. Le délai pour les copropriétés reste de cinq ans.

Nous voulons éviter de sanctionner des propriétaires de bonne foi.

Nous avons souhaité inscrire l'opposabilité du diagnostic de performance énergétique (DPE) collectif. L'obligation de décence énergétique serait satisfaite si ce DPE collectif permet d'atteindre l'étiquette visée.

Cette proposition de loi précise des situations spécifiques pour apporter des sécurités juridiques : elle renforce les droits des locataires en précisant que la minoration de loyer doit être proportionnée au préjudice subi et que le propriétaire est protégé d'une intervention du juge si le locataire empêche la réalisation des travaux.

Le second article intègre la notion de confort d'été, en incluant des éléments de la proposition de loi de Michaël Weber, très justes.

Je salue le travail de la rapporteure sur cette proposition de loi et la remercie, ainsi que la présidente de la commission. Je remercie la ministre pour son investissement fort et sincère.

Enfin, le financement des politiques en faveur de la rénovation thermique des logements reste primordial. Je sais que la ministre y est sensible, preuve en est la mission qu'elle nous a confiée, avec Marianne Margaté, sur la banque de la rénovation pour faire face au mur d'investissements.

Cette proposition de loi ne réglera pas la crise du logement, mais des problèmes concrets.

J'espère un esprit transpartisan pour adopter ce texte le plus largement possible. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, Les Républicains, du RDSE et du RDPI ; M. Lucien Stanzione applaudit également.)

Mme Sylviane Noël, rapporteure de la commission des affaires économiques .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Cédric Chevalier applaudit également.) Quelque 250 000 logements classés G sont frappés d'indécence depuis le 1er janvier 2025, en pleine crise du logement.

La proposition de loi Marchive-Echaniz a été vidée de sa substance puis retirée à l'Assemblée nationale, faisant perdre un temps précieux. C'est pourquoi cette proposition de loi est bienvenue.

Les premières précisions apportées concernent les copropriétés. Il nous faut envisager les difficultés de manière pragmatique. C'est 1,6 million de passoires énergétiques qui doivent sortir du parc locatif d'ici le 1er janvier 2028. Alors que 28 % des logements du parc privé appartiennent à une copropriété, c'est le cas de 45 % des passoires énergétiques.

Un propriétaire occupant, un bailleur ou un loueur de meublé de tourisme ne sont pas soumis aux mêmes règles. Et le propriétaire d'un logement classé E au troisième étage ne sera pas motivé autant que celui d'un logement classé G au dernier...

C'est pourquoi la commission des affaires économiques a souhaité rendre opposable le DPE collectif. Cela s'inscrit dans la continuité des recommandations de la commission d'enquête Rénovation énergétique.

Les 250 000 logements classés G qui devaient sortir du parc cette année représentent autant que toutes les mises en chantier de 2024 en France. Le nombre de logements à louer a chuté de 9 % entre octobre 2023 et octobre 2024. Les propriétaires préfèrent parfois vendre plutôt que rénover : 17 % des logements vendus en 2023 sont des passoires énergétiques.

La commission s'est posé la question de repousser la date de sortie du parc locatif. Mais un report du calendrier de décence énergétique a posteriori aurait déstabilisé la filière et compromis le calendrier, pour un bénéfice qui n'est pas évident.

La commission a procédé à des ajustements pour suivre au plus près les contraintes des propriétaires, pour limiter les contentieux et maintenir le plus de logements dans le parc locatif. Elle a inclus les contraintes architecturales et patrimoniales et celles liées aux travaux trop coûteux.

Elle a aussi inclus les logements individuels : 25 % des ménages locataires occupent une maison et 16 % des logements sociaux sont des logements individuels.

La commission n'avait pas prévu de délai encadrant la durée durant laquelle un logement est considéré comme décent quand des travaux sont engagés. Je vous invite à adopter l'amendement de Mme Gacquerre qui propose une solution claire et adaptée.

La rénovation du parc social se conçoit souvent dans le cadre de travaux d'ensemble. La commission a supprimé l'exigence de recours à un maître d'oeuvre pour les petites copropriétés, souvent les plus anciennes et les moins bien gérées, car dépourvues de syndic.

La commission a souhaité limiter autant que possible les refus de complaisance des copropriétaires sans pour autant rendre conflictuelles les assemblées générales de copropriété. Elle a précisé qu'un refus du syndicat des copropriétaires ne vaut que s'il est intervenu depuis moins de trois ans. Cela incitera à remettre au vote les travaux tous les trois ans.

La commission a supprimé une contradiction dans le texte qui faisait persister la réduction de loyer en cas de travaux réalisés, mais que le logement demeurait classé « G+ ». Il n'est pas légitime de pénaliser un propriétaire alors qu'il a déjà réalisé tous les travaux demandés par le juge.

La commission a appliqué l'article 1er aux baux en cours.

À l'article 2, la commission a introduit des dispositions de la proposition de loi Weber sur le bâti ancien. Il s'agit de valoriser un travail transpartisan et d'utiliser un texte sur lequel le Gouvernement a enclenché la procédure accélérée. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Amel Gacquerre et M. Hervé Marseille applaudissent également.)

Mme Valérie Létard, ministre chargée du logement .  - La sécurisation des propriétaires et locataires des logements classés G est une préoccupation forte depuis le 1er janvier 2025.

Je remercie le Sénat, et en particulier Amel Gacquerre et le groupe UC, d'avoir repris ce sujet essentiel pour maintenir l'offre de logements tout en veillant à ne pas pénaliser les plus modestes qui subissent les charges induites par les passoires énergétiques. Je compte sur la sagesse du Sénat pour faire aboutir ce texte attendu par le secteur.

La loi Climat et résilience de 2021 portait une ambition claire : réduire les gaz à effet de serre de 40 % d'ici à 2030. Nous devons atteindre la neutralité carbone dans les bâtiments à horizon 2050. Nous n'avons pas de temps à perdre : les bâtiments représentent 44 % de la consommation énergétique de notre pays.

La loi a prévu l'impossibilité de louer les passoires thermiques G dès 2025 -  dès 2028 pour les logements classés F, et dès 2034 pour les logements classés E.

Il n'est pas question de remettre en cause cette loi, mais il faut prendre en considération la vraie vie et les préoccupations de nos concitoyens.

Ce sont bien les plus vulnérables qui sont obligés de vivre dans les logements énergivores. Les passoires sont financées sur le dos des locataires via leurs factures d'énergie. Une passoire classée G consomme trois fois plus qu'un logement classé C, en supposant que ses habitants se chauffent, car souvent ils n'en ont pas les moyens.

Selon l'Insee, en 2022, les dépenses de logement sont en première position -  27 % du budget des ménages. Elles comprennent le coût du loyer ou du crédit, mais de plus en plus, c'est l'énergie qui alourdit la facture. En 2024, nous avons battu le record de 1,2 million de factures impayées et ce malgré 900 millions d'euros de chèques énergie.

Les propriétaires bailleurs doivent avoir accès à MaPrimeRénov', qui prend en charge jusqu'à 90 % du montant des travaux pour 22 000 euros de montant moyen de subvention. MaPrimeRénov' Copropriété soutient la rénovation de 30 000 logements par an, et l'éco-PTZ finance jusqu'à 30 000 euros de travaux sans avance de frais pour les ménages.

J'ai confié à un groupe de travail réunissant acteurs privés, parlementaires -  dont Marianne Margaté et Amel Gacquerre  - et Banque des territoires, une mission sur le financement du reste à charge pour les plus modestes.

La rénovation énergétique est devenue populaire : 340 000 logements ont bénéficié d'une aide dans le cadre de MaPrimeRénov' dont 91 000 en rénovation globale, soit une hausse de 27 %. Quelque 2,5 millions de logements ont été aidés depuis la création de MaPrimeRénov'.

Si nous ne remettons pas en cause la loi Climat et résilience, la tension sur le parc n'a jamais été aussi forte. Quelque 660 000 logements classés G sont concernés, dont 92 000 logements sociaux, 94 000 appartements en copropriété ou monopropriété et 223 000 maisons individuelles.

Il n'est pas soutenable qu'un propriétaire de bonne foi ne puisse pas louer son logement parce que la copropriété refuse de voter des travaux, met du temps à les réaliser ou que le locataire les refuse. De nombreux propriétaires et locataires ne maîtrisent pas encore les droits dont ils disposent, ce qui engendre des dysfonctionnements. Nous devons traiter les incompréhensions.

Je remercie la commission pour les modifications apportées. Cette proposition de loi apporte des réponses concrètes, pragmatiques et équilibrées, et notamment de calendrier.

Au 1er janvier, si vous êtes propriétaire bailleur d'un logement classé G, vous ne sortez pas votre logement du parc locatif. La loi Climat et résilience ne s'applique que pour un nouveau bail, un renouvellement ou une reconduction tacite.

Le texte précise que l'obligation de mise en conformité énergétique est réputée satisfaite si le propriétaire a réalisé tous les travaux possibles, mais qu'il se heurte à des contraintes techniques ou administratives, comme l'opposition de l'assemblée générale de copropriété ou de l'ABF.

Je me suis engagée à travailler sur ces questions pour encourager la rénovation sur le bâti ancien en lien avec la ministre de la culture. Ce texte inclut des dispositions de la proposition de loi Weber.

Si une copropriété s'engage dans des travaux de rénovation énergétique, les mesures s'imposant aux bailleurs seront temporairement suspendues.

Le texte renforce les droits des locataires qui pourront demander une réduction de loyer proportionnée jusqu'à ce que les travaux soient réalisés. Le locataire ne pourra pas se retourner contre le bailleur s'il a refusé la réalisation des travaux.

Le DPE est un outil essentiel de la politique du logement. Son impact est multiple. Il faut mettre un coup d'arrêt aux DPE de complaisance ou frauduleux, encore trop nombreux.

Je propose un renforcement des contrôles en recourant à l'IA, la prévention des fraudes, la création d'une liste noire des diagnostiqueurs malhonnêtes et le recensement des professionnels certifiés grâce à un QR code. La formation sera aussi renforcée.

Le DPE est au coeur du dispositif actuel. Il définit la valeur de votre propriété, mais aussi si vous pouvez mettre votre bien en location. Cela confère aux diagnostiqueurs un pouvoir important.

L'intérêt général exige de répondre aux enjeux climatiques, mais aussi que nos concitoyens dépensent moins pour chauffer leur logement.

Nous devons être pragmatiques, aussi le Gouvernement soutient-il cette proposition de loi très attendue et nourrie par un débat constructif. (Applaudissements sur les travées du RDPI, du RDSE, et des groupes UC, INDEP et Les Républicains)

M. Jean-Baptiste Blanc .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Amel Gacquerre applaudit également.) Notre pays connaît une crise du logement, aussi bien au niveau de la production que de l'accès au logement. Le rythme de construction diminue, expliquant les tensions.

La transition énergétique du marché du logement est importante : le secteur représente 27 % des émissions de gaz à effet de serre. Les progrès de ces dernières années sont bienvenus, mais les efforts doivent être poursuivis, avec concertation et pragmatisme.

La puissance publique doit agir avec finesse, c'est l'objet de cette proposition de loi.

Mmes Dominique Estrosi Sassone, Viviane Artigalas et Amel Gacquerre l'ont déjà souligné dans leur rapport, la rénovation énergétique amplifie la crise du logement.

À l'article 1er, face aux refus de travaux qui bloquent les projets des copropriétés, il ressort des débats qu'il est important de maintenir un équilibre entre les droits et devoirs des locataires et des propriétaires. Il ne faut pas décourager les bailleurs de louer.

L'article 2 intègre des dispositions de la proposition de loi sur la rénovation du bâti ancien.

Les dispositions de la loi Climat et résilience sur le DPE risquent de faire sortir 18 % des logements du parc locatif. Pourquoi cette disposition n'a-t-elle pas été mieux préparée ? Il en était de même pour le ZAN : les objectifs étaient mal définis et calculés, alors que les impacts étaient importants. Or il faut prendre en compte les contraintes des territoires. Formons le voeu que la finesse dont fait preuve le Sénat préside aux travaux législatifs futurs.

Je salue le travail de Mme Gacquerre et de la rapporteure Mme Sylviane Noël.

Un point de vigilance : le ministère du budget voit dans les assouplissements des textes une source d'économies supplémentaires, mais la transition énergétique et la rénovation des logements sont des défis majeurs. Nous y serons vigilants notamment en prévoyant un soutien à MaPrimeRénov'.

Nous soutenons les modifications de la commission et voterons en faveur de ce texte. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et du RDPI ainsi que sur quelques travées du groupe INDEP ; M. Philippe Grosvalet applaudit également.)

M. Frédéric Buval .  - Depuis la loi Climat et résilience d'août 2021, la France est engagée dans une démarche ambitieuse pour éradiquer les passoires thermiques. Il s'agit d'atteindre la neutralité carbone en 2050, mais cet objectif pose des problèmes aux propriétaires.

Depuis le 1er janvier, les logements classés G sont interdits à la location, puis ce seront les logements classés F en 2028 et E en 2034.

La mise en oeuvre des mesures soulève des inquiétudes, notamment celle d'une sortie massive de logements du parc locatif.

Cette proposition de loi clarifie et sécurise l'application de ces obligations notamment pour les copropriétés. Elle ne doit pas se traduire par des contraintes inapplicables. Dans les copropriétés, des travaux nécessitent l'accord des assemblées générales. Le droit actuel reste silencieux en la matière, la proposition de loi y remédie.

La proposition de loi précise que l'obligation de décence énergétique ne s'applique qu'aux nouveaux contrats, protégeant les contrats en cours.

Ensuite, elle protège les propriétaires bailleurs qui ont réalisé tous les travaux leur permettant de continuer à louer leur logement.

Enfin, elle étend des mesures à la monopropriété.

Plusieurs ajustements ont été proposés en commission : l'opposabilité du DPE collectif par exemple, comme l'avait recommandé la commission d'enquête Rénovation énergétique.

Le nombre de passoires étant plus élevé en logement individuel, la proposition de loi a été étendue à ce domaine.

La validité de trois ans du refus des copropriétaires est bienvenue.

Enfin, les dispositions de la proposition de loi sur les enjeux énergétiques pour le bâti ancien sont intégrées à ce texte.

Pour l'ensemble de ces raisons, le RDPI votera ce texte (Applaudissements sur les travées du RDPI ; Mme Amel Gacquerre applaudit également.)

M. Philippe Grosvalet .  - (Applaudissements sur les travées du RDSE ; MM. Bernard Buis et Cédric Chevalier applaudissent également.) Véritable outil de la rénovation énergétique des logements, le DPE a été accompagné d'un calendrier difficile d'éviction progressive des logements les moins performants.

L'intention est bonne ! Pas moins de 30 % des ménages déclarent souffrir du froid.

Cette mesure préserve les locataires sur le plan sanitaire et financier et incite les propriétaires à mener des travaux.

Ce calendrier engage une course contre la montre pour ne pas accentuer la pénurie de logement. Quelque 250 000 logements classés G sont sortis du parc au 1er janvier : nous sommes face à un risque de dangereux effet de ciseau.

Les effets d'éviction sont déjà palpables sur le marché immobilier. Nos concitoyens aux faibles revenus se voient proposer de vraies passoires thermiques.

L'apport de correctifs sur les obligations de rénovation énergétique est donc nécessaire.

Le RDSE aborde sous un jour favorable l'examen de ce texte.

L'article 2 reprend les dispositions de la proposition de loi Weber.

L'article 1er apporte des modifications bienvenues, notamment une meilleure prise en compte de la diversité des bâtiments. L'opposabilité du DPE mérite notre soutien. Sur la mise en oeuvre de la décence énergétique, la proposition de loi transpartisane de l'Assemblée nationale avait plus d'ambition. Le texte sénatorial est un recul sur ce point.

Si cette proposition de loi apporte des clarifications, elle ne doit pas nous faire perdre de vue les objectifs de rénovation énergétique du parc immobilier. Or les rénovations ont diminué de 40 % entre 2023 et 2024, et les crédits de MaPrimeRénov' diminuent. Comment accélérer les rénovations, tenir le calendrier et améliorer le quotidien des citoyens, quand les fonds publics pour la rénovation subissent coup de rabot sur coup de rabot ?

Hier, le Président de la République tenait un conseil de planification écologique. La rénovation énergétique « marque le pas », selon les mots mêmes de la ministre de l'environnement. Mais aucune mesure nouvelle n'est apparue pour lutter en même temps contre la crise du logement et contre la crise climatique. (Applaudissements sur les travées du RDSE et du groupe INDEP)

M. Yves Bleunven .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Je salue le travail remarquable d'Amel Gacquerre qui a fait preuve de responsabilité et de vision.

La rénovation énergétique est essentielle pour lutter contre le froid hivernal et les vagues de chaleur, et éviter que nos logements deviennent inhabitables.

La stabilité législative est un point essentiel de cette proposition de loi qui renforce la visibilité dont ont besoin les acteurs du secteur. Un calendrier clair n'évoluant pas au gré des majorités est indispensable pour se préparer. Mais entreprendre une rénovation énergétique reste particulièrement complexe au sein des copropriétés. C'est pourquoi une certaine flexibilité doit être mise en place.

L'élargissement du champ des contraintes à celles architecturales et patrimoniales est une bonne chose.

L'ambition de la rénovation énergétique doit être le fruit d'efforts collectifs, à l'image de la prise en compte du DPE collectif pour rendre les copropriétaires solidaires dans la rénovation énergétique.

Le financement est un sujet crucial. L'État ne peut être le seul financeur. L'exemption des droits de donation pour les rénovations énergétiques est une mesure incitative forte votée lors de la dernière loi de finances initiale.

Il est crucial de renforcer la lutte contre la fraude également.

Cette proposition de loi concilie stabilité, flexibilité et responsabilité pour répondre aux défis énergétiques et climatiques. Le groupe UC la votera. (Applaudissements sur les travées du groupe UC ; M. Bruno Sido applaudit également.)

Mme Marianne Margaté .  - Combien sont-elles ou combien sont-ils à passer des hivers avec des radiateurs brûlants et des couvertures sur les épaules ? Combien sont-ils à surveiller le thermomètre pour arbitrer entre chauffage et solvabilité ?

Nous comptons 5,8 millions de passoires thermiques, il faut agir !

Si nous interdisons de louer les passoires, jusqu'à quel chiffre le nombre de sans-abri montera, alors qu'on en compte 250 000 actuellement ?

Oui, il y a des propriétaires bailleurs de bonne foi qui ont provisionné des financements pour mettre leur logement en conformité.

Une grande partie des passoires thermiques constituent les foyers de locataires qu'il faut protéger. Il faut parvenir à un équilibre cohérent et adapté et assurer des conditions de vie acceptables pour tous.

Nous devons tenir les engagements pour les générations futures. Beaucoup de nos émissions de gaz à effet de serre sont le résultat de notre inaction. Ne chauffons plus l'atmosphère pour rafraîchir les logements l'été avec des climatiseurs. Nos efforts sont en décalage avec les besoins réels.

Une minorité continue de prospérer au détriment d'une majorité paupérisée : 3,5 % des propriétaires sont des multipropriétaires qui possèdent 50 % du parc locatif privé. N'ont-ils pas les moyens de rénover leurs logements ?

Il existe des propriétaires de bonne foi qui ont du mal à rénover leur logement. Ils sont peu concernés par la loi Climat et résilience. Cela évite d'en faire une rente. Les propriétaires occupants devront payer des factures trop élevées et des travaux à mener. Ils ont besoin de soutien public.

Cette proposition de loi ne répond pas à ces préoccupations en tenant compte des exceptions de logements anciens à rénover plutôt qu'en traitant la majorité des cas. Mais quelques amendements de bon sens assouplissent le dispositif sans contourner les obligations.

Renforçons MaPrimeRénov', finançons les bailleurs sociaux et agissons pour rendre effectif le droit à un logement digne. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K)

M. Yannick Jadot .  - (Applaudissements sur les travées du GEST) En 2024, un tiers des Français ont souffert du froid dans leur logement - deux fois plus qu'en 2020. L'été n'est pas plus rassurant, car 70 % des Français déclarent souffrir de la chaleur dans leur logement. Les dernières projections de Météo-France sont dramatiques, avec une explosion des vagues de chaleur jusqu'à 50°C.

Cela fait près de vingt ans que les objectifs de rénovation sont fixés pour répondre aux enjeux sociaux, climatiques et de structuration de filières. Selon l'Ademe, en 2050, le parc de logements devrait avoir 80 à 90 % de logements classés A ou B ; on en est loin, à 6 %, sachant qu'il y a 14 % de logements classés F ou G.

La rénovation énergétique, selon l'Anah, a connu un sérieux revers en 2024 ; avec seulement 400 000 rénovations, soit 35 % moins qu'en 2023, nous sommes loin de l'objectif des 900 000 rénovations annuelles pour 2030. En cause, l'instabilité réglementaire, la complexité administrative et l'effondrement des budgets.

En attendant, dans la « vraie vie », comme vous dites, madame la ministre, des millions de familles souffrent du froid et de la chaleur.

Compte tenu des retards pris, notre groupe soutient les clarifications juridiques et certaines souplesses qu'apporte cette proposition de loi. Nous saluons la volonté de ne pas toucher aux échéances de la décence climatique, mais nous dénonçons deux contournements : les bailleurs ne doivent pas pouvoir se cacher derrière un refus du syndicat des copropriétaires ou derrière un refus du locataire - compte tenu des rapports de force entre locataires et propriétaires.

L'objectif du calendrier vise avant tout à protéger les locataires modestes.

Nous saluons l'intégration dans le DPE du confort d'été - que nous préférons appeler habitabilité d'été. (Mme Sylviane Noël s'en amuse.)

Mais il faut aller plus loin : nous proposons un septième poste de travaux pour ceux liés à l'isolation contre la chaleur. Nous conditionnons notre vote à l'évolution du texte.

Le logement sera le grand chantier du siècle. Arrêtons de procrastiner. (Applaudissements sur les travées du GEST)