Trajectoire de réduction de l'artificialisation concertée avec les élus locaux (Procédure accélérée - Suite)
Mme la présidente. - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la proposition de loi visant à instaurer une trajectoire de réduction de l'artificialisation concertée avec les élus locaux.
Discussion des articles (Suite)
Article 1er (Suite)
Mme la présidente. - Amendement n°48 rectifié de M. Duplomb et alii.
M. Laurent Duplomb. - Le sursis à statuer ZAN doit être encadré et clarifié. Il faut le stipuler dans les actes d'urbanisme, et le doter des mêmes règles que le sursis à statuer d'urbanisme, pour lever les incertitudes juridiques concernant les projets déjà engagés. Ne dissuadons pas les maires de poursuivre des projets pour lesquels ils ont souvent déjà dépensé beaucoup d'argent.
M. Jean-Marc Boyer, rapporteur de la commission des affaires économiques. - En général, il n'est pas souhaitable de codifier des dispositions transitoires - mais si cette mention peut apporter de la clarté à nos élus, pourquoi pas ? Sagesse.
M. François Rebsamen, ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation. - Faire obligatoirement mention du sursis à statuer ZAN lors de la délivrance d'un certificat d'urbanisme pourrait effectivement améliorer l'information du pétitionnaire.
En revanche, l'inscription du sursis à statuer ZAN dans le code de l'urbanisme n'est pas souhaitable. Retrait, sinon avis défavorable.
M. Laurent Duplomb. - Je ne retirerai pas cet amendement. Ce dernier point est hyper important. Sans cela, l'administration, qui n'est pas toujours guidée par le principe de neutralité, pourra interpréter la règle, au mépris de la volonté du législateur, pour faire tomber des projets déjà engagés. Les conséquences sont loin d'être anodines !
M. François Rebsamen, ministre. - Il est d'usage de ne codifier que des dispositions pérennes. Or le sursis à statuer n'a pas vocation à perdurer au-delà de la mise en conformité des documents d'urbanisme, en 2028 au plus tard.
M. Vincent Louault. - Nous voterons cet amendement. M. Duplomb peut-il rectifier l'écriture pour satisfaire le ministre ? (M. Laurent Duplomb secoue la tête.) Non ? Nous le voterons tout de même. (Sourires)
L'amendement n°48 rectifié est adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°37 de M. Buis et alii.
M. Bernard Buis. - Le sursis à statuer ZAN introduit par la loi de 2021 est parfois détourné et conduit à un gel excessif des projets, parfois cruciaux.
Il existe déjà un dispositif de sursis dans le droit commun qui permet de suspendre des autorisations d'urbanisme.
Selon l'Association des maires de France (AMF), 86 % des maires n'utilisent pas les nouveaux outils de la loi ZAN 2, notamment ce sursis à statuer. Supprimons-le, pour éviter des blocages injustifiés.
Mme la présidente. - Amendement identique n°59 rectifié de Mme Pauline Martin et alii.
L'amendement n°59 rectifié n'est pas défendu.
Mme la présidente. - Amendement identique n°96 rectifié ter de Mme Doineau et alii.
Mme Élisabeth Doineau. - Défendu.
M. Jean-Marc Boyer, rapporteur. - Le sursis à statuer ZAN est un outil important pour les maires car il évite que l'enveloppe foncière pour la période 2021-2031 ne soit entièrement consommée avant même qu'ils aient pu modifier leurs documents d'urbanisme. Ils y sont très attachés. Avis défavorable.
M. François Rebsamen, ministre. - Même avis.
Mme Cécile Cukierman. - Si 86 % des maires ne l'utilisent pas, c'est que ce n'est pas bien dérangeant...
Le péché originel du ZAN, c'est son insertion par voie d'amendement dans la loi Climat et résilience et son application par décret. La question est donc très sensible. On aurait pu faire bien mieux.
Supprimer le sursis à statuer générerait de l'inquiétude, inutilement, puisque les maires n'utilisent cette possibilité qu'avec parcimonie.
Les amendements identiques nos37 et 96 rectifié ter ne sont pas adoptés.
Mme la présidente. - Amendement n°162 rectifié bis de M. Fagnen et du groupe SER.
M. Sébastien Fagnen. - Pour mieux accompagner les élus, nous proposons de regrouper l'ensemble des données relatives à la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers (Enaf) et aux financements existants pour leurs projets de sobriété foncière.
M. Jean-Marc Boyer, rapporteur. - Le champ resserré de la proposition de loi ne permet pas de traiter de la question, pourtant cruciale, de l'accompagnement des collectivités territoriales par l'État, en termes d'ingénierie et de financement.
Dans le prolongement du « porté à connaissance » renforcé, il nous semble pertinent que l'État informe les collectivités des possibilités de soutien en ingénierie qui existent. Avis favorable.
M. François Rebsamen, ministre. - Même avis.
L'amendement n°162 rectifié bis est adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°161 de M. Redon-Sarrazy et du groupe SER.
M. Christian Redon-Sarrazy. - Il s'agit de permettre aux communes d'expérimenter un dispositif de pondération afin de valoriser des projets faiblement artificialisants, dans une approche incitative, territorialisée et coordonnée, intégrant la préservation des sols. Ce bonus-malus servirait aussi de point d'appui à la réforme tant attendue de la fiscalité locale. Un décret déterminerait la méthode de pondération et les critères d'éligibilité des projets. Cet outil serait à la seule main des élus.
M. Jean-Marc Boyer, rapporteur. - Les notions de gradient et de coefficient s'accordent mal avec la notion de consommation d'Enaf, qui est binaire.
Laisser chaque collectivité déterminer ses objectifs de pondération, sans encadrer les écarts dans la loi, me semble dangereux. Elles pourraient s'exonérer du respect de leurs obligations de réduction de la consommation d'Enaf. Avis défavorable.
M. François Rebsamen, ministre. - Même avis. J'ajoute que l'intégration de critères de pondération serait source de complexité.
M. Christian Redon-Sarrazy. - Cette pondération mérite tout de même d'être étudiée. Nous en avions parlé lors de ZAN 2.
Nous ne sommes pas là pour complexifier, mais pour simplifier des situations complexes, notamment dans les petites communes. La pondération peut minorer la consommation, mais aussi la majorer. Nous pourrions moduler à l'intérieur d'un périmètre, en fonction des attentes et des projets spécifiques des territoires : relocalisation, circuits courts, etc.
M. André Reichardt. - Je suis sensible à cet amendement. Il est sans doute source de complication, mais marque la volonté de tenir compte du souhait des élus locaux.
Je défendrai tout à l'heure un amendement plus simple, qui renvoie aux PLU et PLUi le soin de se prononcer sur la sobriété foncière.
J'appelle de mes voeux un plus grand respect de la compétence des élus locaux, communaux et intercommunaux.
Je voterai cet amendement à titre d'amendement d'appel, pour qu'on y travaille.
M. Sébastien Fagnen. - Au vu de la volonté affichée par le ministre de travailler conjointement sur cette question, nous retirons l'amendement.
L'amendement n°161 est retiré.
L'article 1er, modifié, est adopté.
Après l'article 1er
Mme la présidente. - Amendement n°170 rectifié de M. Fagnen et du groupe SER.
M. Sébastien Fagnen. - Nous discutons beaucoup du « comment », mais il faut aussi parler du « pourquoi ». Pourquoi artificialisons-nous ?
Dans les enveloppes foncières déterminées par la contractualisation, nous souhaitons que soient encouragés les projets participant à la transition écologique ancrée dans les territoires, souhaitée par les élus locaux. Il faut s'interroger sur la finalité de la consommation d'Enaf.
M. Jean-Marc Boyer, rapporteur. - La lutte contre l'artificialisation ne doit pas être pensée en silos, mais comme faisant partie de la transition écologique. Parfois, artificialiser un peu plus peut être bon pour l'environnement. Je ne sais pas si tout le monde saisit cette subtilité... (M. Yannick Jadot s'exclame.)
Avis favorable à cet amendement qui va dans le sens de la différenciation territoriale.
M. François Rebsamen, ministre. - Les critères de territorialisation géographique des Scot prennent déjà en compte d'éventuels projets favorables à la transition écologique. Les projets que vous évoquez peuvent être considérés d'intérêt communal ou intercommunal.
En pratique, votre amendement est satisfait. La rédaction risquerait de complexifier et de rigidifier l'appréciation des critères de territorialisation. Retrait, sinon avis défavorable.
L'amendement n°170 rectifié est adopté et devient un article additionnel.
Mme la présidente. - Amendement n°158 rectifié bis de M. Canévet et alii.
L'amendement n°158 rectifié bis n'est pas défendu.
Mme la présidente. - Amendement n°129 rectifié de M. Bleunven et alii.
M. Bernard Pillefer. - En Bretagne, mais aussi dans le Loir-et-Cher, de nombreuses friches de bâtiments agricoles amiantés ont été laissées à l'abandon. Nous prévoyons un mécanisme incitatif permettant aux EPCI d'obtenir un droit à construire sur leurs zones d'activité économique, à hauteur d'un pour trois, en échange de la renaturation. Cela pourra se faire directement, ou au travers des Safer.
Mme la présidente. - Amendement n°130 rectifié de M. Bleunven et alii.
M. Bernard Pillefer. - Amendement de repli, qui prévoit un ratio d'un pour deux au lieu d'un pour trois.
M. Jean-Marc Boyer, rapporteur. - La construction de bâtiments agricoles n'est pas comptabilisée dans la consommation d'Enaf. Difficile de demander que la renaturation ouvre droit à la consommation d'espace supplémentaire, a fortiori avec un ratio supérieur à un pour un.
En outre, pourquoi cibler uniquement l'activité économique ? C'est contradictoire avec la volonté de redonner la main aux territoires pour répondre à leurs besoins spécifiques.
Une telle mesure ne bénéficierait pas aux agriculteurs, puisqu'on augmenterait la consommation de terres agricoles.
Les EPCI qui souhaitent se substituer aux propriétaires pour désamianter doivent pouvoir mobiliser les aides existantes et être accompagnés par les services de l'État, mais leur octroyer des droits supplémentaires à construire n'est pas le bon vecteur. Avis défavorable aux deux amendements.
M. François Rebsamen, ministre. - Même avis.
Mme Cécile Cukierman. - J'en ai discuté avec Gérard Lahellec : si l'amendement n°129 rectifié est excessif, le 130 rectifié est pertinent.
La requalification des bâtiments agricoles amiantés est un défi. Ces verrues empêchent tout aménagement et toute activité.
L'amendement n'introduit pas un droit à construire supplémentaire pour faire de l'habitat pavillonnaire, mais pour préserver l'activité économique.
Mieux vaut privilégier l'incitation à la sanction couperet. Faisons confiance aux territoires. Si cette disposition peut accélérer la requalification de ces friches agricoles amiantées, vrai sujet environnemental et sanitaire, cela vaut le coup.
M. Christian Redon-Sarrazy. - Nous voterons l'amendement n°130 rectifié, plus raisonnable.
Dans les territoires qui perdent leurs agriculteurs, ces bâtiments, souvent amiantés, sont de vraies verrues. Évitons de laisser ces biens en déshérence, incitons à les requalifier, à les renaturer, à les réutiliser, avant qu'ils ne deviennent des bâtiments abandonnés, voire des biens sans maître.
M. Daniel Gremillet. - Ce débat dépasse le cas des bâtiments agricoles amiantés. Dans tous les territoires, il y a dans nos villages des bâtiments qui n'ont plus de vocation agricole, et qui sont de véritables verrues, qui consomment inutilement du foncier.
Cet amendement est donc intéressant. Le problème réside dans le coefficient prévu. (Mme Amel Gacquerre le confirme.) Si ce point était réglé, nous pourrions résoudre ce problème, et retrouver ainsi des surfaces significatives au coeur de nos villages.
Ces bâtiments ne retrouveront pas de vocation agricole car ils ne sont plus conformes aux nouvelles règles de distance vis-à-vis des habitations.
Il serait bon de faire un pas sur ce sujet.
Mme Amel Gacquerre, rapporteure de la commission des affaires économiques. - Nous ne pouvons qu'aller dans votre sens. Le problème est réel. La question est effectivement celle du coefficient prévu : un pour trois ou un pour deux, c'est beaucoup trop.
Nous donnerons en revanche un avis favorable à l'amendement n°123 rectifié quater de Cécile Cukierman qui propose un coefficient de 1,2 pour un hectare. C'est plus réaliste.
M. Bernard Pillefer. - Je retire l'amendement n°129 rectifié et maintiens l'amendement n°130 rectifié qui permettrait de « nettoyer » les espaces et encouragerait un retour à la nature.
L'amendement n°129 rectifié est retiré.
M. Daniel Chasseing. - Je voterai cet amendement. Il s'agit uniquement d'une possibilité pour les EPCI, pas d'une obligation. Dans nos villages, dans les périphéries de bourg, ces bâtiments qui menacent ruine sont un vrai problème.
M. Ronan Dantec. - C'est un amendement typiquement breton ! D'abord, à cause du nombre de poulaillers amiantés qu'on y trouve. Mais aussi parce que cet amendement ne marche que pour des territoires dynamiques, comme en Bretagne, où l'on a besoin de foncier, où des entreprises s'installent, où les intercommunalités sont globalement puissantes. Les territoires en déprise économique, eux, seront exclus de votre dispositif ! Comment une intercommunalité qui n'a aucun projet va-t-elle financer le désamiantage d'un vieux poulailler ?
C'est tout le problème de votre loi ZAN, depuis le début : vous faites des cadeaux aux territoires en développement et laissez à l'abandon les territoires en déprise. (Mme Cécile Cukierman s'exclame.) C'est une loi pour les territoires qui vont bien !
M. Alain Cadec. - Je voterai cet amendement pertinent.
Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente de la commission des affaires économiques. - Les Bretons votent pour les Bretons !
M. Vincent Louault. - La vérité, c'est que grâce à la compensation, on va pouvoir se débarrasser de ces bâtiments abandonnés, et financer ainsi la dépollution de nos territoires ruraux. Si ceux-ci n'ont plus de projets, monsieur Dantec, c'est à cause de toutes les lois qui empêchent le développement agricole : les écologistes ont fait en sorte qu'on ne puisse plus monter un seul poulailler dans ce pays ! (Protestations sur les travées du GEST)
M. Yannick Jadot. - La blague ! Vous avez tout détricoté !
M. Sébastien Fagnen. - J'ignore si c'est un amendement breton, mais je m'exprime en tant que Normand. (Sourires) Il faut donner cette possibilité aux élus. Ces bâtiments amiantés sont parfois éventrés, les poussières d'amiante se dispersent sur des kilomètres, avec des conséquences sanitaires et environnementales dramatiques.
La déprise n'est pas une fatalité, monsieur Dantec. Il est parfois nécessaire pour des EPCI ruraux d'artificialiser pour accueillir de nouvelles activités. Nous voterons cet amendement.
M. Jean-Marc Boyer, rapporteur. - Il n'y a pas que des poulaillers en Bretagne. (Sourires)
M. Yannick Jadot. - Il y a aussi des porcheries !
M. Jean-Marc Boyer, rapporteur. - Il y a des bâtiments agricoles amiantés dans tous les territoires.
M. Mathieu Darnaud. - En Auvergne !
M. Jean-Marc Boyer, rapporteur. - Le problème est celui du coefficient : prévoir un ratio d'un pour trois, c'est prendre encore plus de surface agricole ! L'amendement de Cécile Cukierman est plus raisonnable.
Arrêtons avec les poulaillers bretons ! On n'entend que ça ! En Auvergne, nous avons des poulaillers, mais aussi des burons qui s'effondrent. (Rires et exclamations diverses)
M. Laurent Somon. - L'idée est intéressante ; je le prends comme un amendement d'appel. Toutes ces friches abandonnées, amiantées, devraient être acquises par les établissements publics fonciers (EPF) pour compenser de nouveaux projets. (M. Ronan Dantec approuve.) J'en ai fait la proposition à l'EPF de la Somme. C'est une piste à creuser.
Mme Cécile Cukierman. - La navette affinera...
Mme Sonia de La Provôté. - Il manque un élément dans le ZAN devenu Trace : comment on finance, comment on encourage les bonnes pratiques en matière d'aménagement et d'urbanisme. (M. Grégory Blanc approuve.) Il y a des problèmes de financement, de fiscalité. Investir sur une friche polluée revient 30 à 50 % plus cher. Il faudra motiver les élus mais aussi les promoteurs pour construire là où cela coûte plus cher.
M. Grégory Blanc. - C'est toute la difficulté de cette loi extrêmement mal ficelée. Ronan Dantec a raison...
M. Jean-Marc Boyer, rapporteur. - Comme toujours, bien sûr !
M. Grégory Blanc. - Oui, cet amendement encouragera les déséquilibres territoriaux. Mais pour certaines intercommunalités, c'est un outil pertinent. Faute d'avoir posé les enjeux de manière globale, on est dans un entre-deux. Je m'abstiendrai.
Mme Amel Gacquerre, rapporteure. - Le sujet est réel, mais soyons sérieux : il n'est pas possible de voter un ratio de compensation de deux ou trois pour un ! Vous rendez-vous compte du signal envoyé ?
Nous donnerons un avis favorable à l'amendement n°123 rectifié quater de Cécile Cukierman, qui prévoit 1,2 pour un. Nous proposerons de le sous-amender pour viser toutes les friches, industrielles mais aussi agricoles.
On compense davantage, on incite davantage, on n'aggrave pas les déséquilibres territoriaux. Soyons réalistes et pragmatiques !
L'amendement n°130 rectifié n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°20 rectifié bis de Mme Bonnefoy et du groupe SER.
Mme Nicole Bonnefoy. - Cet amendement reprend une partie de ma proposition de loi visant à préserver des sols vivants. Il s'agit de conserver l'esprit de la loi Climat et Résilience. Nous proposons d'expérimenter avec des communes ou des EPCI volontaires la réalisation d'un diagnostic de la qualité et de la santé des sols, dont les résultats et les orientations qui en découlent figureront au rapport de présentation du PLU ou du PLUi.
Les travaux de l'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (Inrae), du Cerema, et de l'Ademe ont conféré à la France une véritable expertise en matière de santé des sols.
Nous pouvons ainsi poser les jalons d'une future politique nationale des sols, en adaptant notre cadre légal à la transition climatique.
Mme la présidente. - Amendement identique n°28 de M. Gueret, au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable.
M. Daniel Gueret, rapporteur pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. - Cet amendement part d'un constat : les fonctionnalités et les services rendus par les sols ne sont pas suffisamment pris en compte.
Cependant, l'évolution proposée remet en cause nos habitudes urbanistiques. Une obligation imposée à toutes les collectivités serait prématurée. En revanche, une expérimentation est intéressante pour favoriser l'intégration d'une approche plus qualitative des sols.
Nous proposons donc aux blocs communaux d'expérimenter la réalisation d'un diagnostic sur la qualité des sols, en amont de la révision de leurs documents d'urbanisme.
Nous anticiperons ainsi les évolutions de la législation européenne.
M. Jean-Marc Boyer, rapporteur. - Je remercie Daniel Gueret de présenter cet amendement très positif. Je salue la proposition de loi de Nicole Bonnefoy. Le dispositif reste facultatif, et les retours d'expérience seront très utiles. Avis favorable à cette expérimentation.
M. François Rebsamen, ministre. - Voilà une très bonne chose. Cette expérimentation permettra aux élus locaux d'aller plus loin. Certaines communes le font déjà, comme à Ris-Orangis et à Rouen.
Néanmoins, au regard de la longueur des études et de l'élaboration des documents d'urbanisme, le temps d'expérimentation de cinq ans semble un peu court. Avis favorable tout de même.
M. Jean-Baptiste Blanc. - Trace est un texte de progrès. (M. Ronan Dantec ironise.)
Cela vous chagrine que la majorité sénatoriale s'occupe de la question des sols vivants ?
M. Ronan Dantec. - Cela vient de la commission !
M. Jean-Baptiste Blanc. - Nous sommes d'accord sur le fait que le sol et le sous-sol sont en mauvaise santé. Commencer par une expérimentation sera un grand pas collectif. (Marques d'approbation sur les travées du groupe Les Républicains)
M. Vincent Louault. - J'ai combattu votre proposition de loi, madame Bonnefoy. L'expérimentation me convient davantage. Mais cela peut coûter un pognon de dingue de réaliser autant d'études. Parfois avec de bonnes intentions, nous finissons par tomber dans le réglementaire : ajouter des critères d'analyse des sols pourrait coûter des centaines de milliers d'euros.
D'accord pour l'expérimentation, mais veillons à ne pas ajouter du réglementaire à bas bruit. (M. Laurent Duplomb acquiesce.)
Mme Sonia de La Provôté. - Il est important de savoir ce que nous cherchons. Sur la qualité des sols, les critères manquent, et les études peuvent durer très longtemps.
Il ne faudrait pas que des territoires investis imposent aux autres, à l'issue de l'expérimentation, des dispositifs inatteignables par tous. Cela ne doit pas aboutir à la mise en place de normes contraignantes.
Mme Nicole Bonnefoy. - Je remercie mes collègues de leur soutien. La commission du développement durable a pu recevoir des experts de l'Inrae...
M. Laurent Duplomb. - Oh la la !
Mme Nicole Bonnefoy. - ... et a constaté la qualité de leur expertise, très utile aux collectivités territoriales. Le maire de Ris-Orangis en a bénéficié. Les collectivités qui se sont engagées ne reviendraient jamais en arrière : cette expertise permet de rendre des terres riches à l'agriculture et de construire là où il faut, évitant de faire des bêtises.
Par rapport à ma proposition de loi présentée en février, il s'agit d'un rattrapage, certes expérimental, mais dont j'espère qu'il fera des petits. Je remercie le rapporteur et le Gouvernement pour cette avancée.
Les amendements identiques nos20 rectifié bis et 28 sont adoptés et deviennent un article additionnel.
Article 2
M. Jean-Baptiste Blanc . - Cet article est particulièrement important. Nous avons convenu avec les rapporteurs de réitérer l'intention de supprimer l'objectif chiffré et intermédiaire. Nous voulons sortir d'un urbanisme comptable pour aller vers un urbanisme de projet.
Les urbanistes disent que la logique comptable ne marche pas.
Tout d'abord, le temps d'action pour atteindre l'objectif de 50 % est insuffisant au regard de l'inertie de l'élaboration et de l'application des documents de planification. Cet objectif, inatteignable en 2031, est contre-productif.
M. Jean-François Husson. - Il a raison.
M. Jean-Baptiste Blanc. - Ensuite les modalités de l'objectif sont instables. Trop de textes divergent d'un territoire à l'autre, et la définition de l'artificialisation, technocratique, est trop complexe pour être applicable.
Enfin - le plus important - , les 50 % sont, aux yeux des urbanistes, profondément injustes. Ils pénalisent les territoires qui ont été sobres, que ce soit par choix, par manque de dynamisme ou en raison de facteurs exogènes comme la crise sanitaire. Cette règle fige les territoires dans leurs dynamiques passées.
Sortons d'un urbanisme comptable pour un urbanisme de projet - telle est la demande des urbanistes.
M. Guislain Cambier . - L'état d'esprit de l'article 2 n'est pas d'ouvrir les robinets en grand - nous conservons l'objectif de 2050. Mais nous devons rétablir de la confiance entre l'État et les élus locaux et permettre une différenciation entre les uns et les autres. L'urbanisme de projet se construit avec tous et ne se décrète pas ! Nous devons ouvrir le dialogue, aller plus loin dans la logique de territorialisation et sortir d'une logique uniquement comptable. (Applaudissements sur quelques travées du groupe UC)
M. Jean-François Husson. - Très bien !
M. Grégory Blanc . - J'ai eu l'impression d'entendre les conseillers régionaux de chez moi. Le défi collectif à relever est immense. Dès lors, comment réunir nos forces pour avancer ?
La région Auvergne-Rhône-Alpes et les Pays de la Loire sont les deux régions sans schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (Sraddet). Dans les deux cas, Laurent Wauquiez et Bruno Retailleau soutiennent que les Sraddet sont compliqués. Mais sans Sraddet, sans outils, nous serons incapables de réussir le ZAN !
Avec cet article, vous voulez casser le thermomètre ! Le problème, ce n'est pas le ZAN, c'est le dérèglement climatique. Il faut travailler sur le financement, la fiscalité, la correction du droit. Ce n'est pas l'objectif de ce texte. Pour savoir si on est en phase de guérison, il faut des outils d'évaluation.
Voilà le problème, et l'article 2 en est symptomatique.
M. Philippe Grosvalet . - Nous sommes au coeur du sujet. J'ai succédé à Bruno Retailleau à la présidence du syndicat mixte pour l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes, sujet de conflit majeur en France et en Europe. La question de l'usage du sol a été au coeur de nos réflexions. Les maires de Loire-Atlantique ont donc été bien acculturés à cette question du ZAN, raison pour laquelle Ronan Dantec parle tant d'eux, sans doute.
Aristote disait que, en toute chose, c'est la fin qui est essentielle. Je ne partage ni l'avis de Laurent Duplomb ni celui de Yannick Jadot concernant l'objectif de 2050.
Sanctuariser l'objectif de ZAN à 2050 est un acte fondateur, à condition de convaincre et non de contraindre. Si les maires ne sont pas convaincus, cela ne marchera pas.
Mais quel chemin emprunter ? Entre ceux qui ne voulaient aucune contrainte et ceux qui, comme Ronan Dantec, souhaitaient le ZAN dès 2030, il y a un chemin. J'y reviendrai tout à l'heure.
M. Simon Uzenat . - Cet article cristallise les tensions au sein de l'hémicycle.
L'artificialisation est une réalité, voilà ce sur quoi nous pouvons nous mettre d'accord.
M. André Reichardt. - Ce n'est pas la même partout.
M. Simon Uzenat. - De ce côté de l'hémicycle, nous assumons la planification. Qui peut dire qu'on aurait construit autant de logements sociaux sans la loi SRU ?
Quand on entend un ancien président de région et ancien ministre dire qu'on pourrait ne pas respecter la loi, on n'incite pas les élus à s'engager.
Nous revendiquons de fixer un objectif intermédiaire. Un large consensus s'est dégagé en Bretagne. De nombreux élus, y compris de droite, nous disent qu'il ne faut plus toucher aux règles, qu'il faut les laisser travailler.
Toutefois, sur le calendrier, une forme de souplesse est envisageable. Assouplir sans dénaturer, c'est conserver un objectif intermédiaire clair, net et précis, mais avec plus de latitude donnée aux élus sur le calendrier. Voilà le sens de nos propositions.
M. Yannick Jadot . - Nous sommes tous d'accord au niveau européen sur la neutralité carbone à horizon 2050. Dès lors, comment s'organise-t-on ?
On ne peut pas dire que chacun fait ce qu'il veut, et qu'on fait confiance à tout le monde ! On le sait, les COP, ça ne marche pas. Il faut des objectifs intermédiaires contraignants. En France, nous avons la stratégie nationale bas-carbone (SNBC), qui prévoit des jalons réguliers. (M. Jean-Marc Boyer marque son désaccord.)
Nous avons discuté de la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) il y a quelques mois, à l'occasion de l'examen de la proposition de loi de Daniel Gremillet. On n'a pas dit alors qu'on faisait confiance aux opérateurs. Nous avons fixé des objectifs. Il faut de la prévisibilité, et de l'ambition.
Beaucoup d'élus se sont engagés, de tous les bords politiques, pour que cela marche. Ne le nions pas. Qu'un retard ait été pris, nous pouvons l'entendre, mais rien ne fonctionnera sans étape intermédiaire. Tout contrat s'assortit d'obligations. Là, on reste dans le déclaratif. Il faut au moins un objectif pour 2034.
M. Vincent Louault . - Les élus qui ne « zanifient » pas leur Sraddet ont bien raison ! Car que se passe-t-il ? Ce sont les petits copains des grandes métropoles qui décident et, à la fin, dans nos Scot et PLUi, plus rien ne se passe.
Que l'État définisse les enveloppes, et ensuite foutez-nous la paix : les maires et les présidents d'intercommunalité feront le boulot ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
M. André Reichardt. - Très bien ! Bien sûr que c'est ce que nous devons faire !
Mme Céline Brulin . - Tout en étant favorables à ce texte, nous considérons qu'une étape intermédiaire n'est pas un obstacle, bien au contraire.
Je note un problème bien français. Dans de nombreux domaines, on impose des dates telles des couperets, sans que le processus conduisant à l'atteinte des objectifs soit réellement travaillé. C'est un problème, politique ou culturel, sur lequel il faudrait avancer.
Ensuite, les élus qui seront à la tête de nos communes en 2044 ne seront pas les mêmes qu'aujourd'hui. Ne pas leur laisser un travail en friche et anticiper la transition, c'est plutôt leur rendre service.
M. Jean-Marc Boyer, rapporteur. - C'est fini !
Mme Céline Brulin. - Nous voterons l'amendement du RDSE. (M. Philippe Grosvalet applaudit.)
M. André Reichardt . - Bien sûr qu'une étape intermédiaire n'est pas un problème, à condition qu'on s'accorde sur la méthode. Tant qu'il y aura un désaccord sur la méthode, tant que des maires ne se sentiront pas concernés par les décisions prises au niveau du Sraddet, tant qu'ils n'auront plus que leurs larmes pour pleurer, cela ne fonctionnera pas.
Il aurait été bien plus simple, comme nous l'avons fait pour la loi SRU, de prévoir un contrat tenant compte des réalités des territoires : inondables ou non, avec quelle consommation foncière. Les situations de la Meuse et du Bas-Rhin n'ont rien à voir l'une avec l'autre ! Je n'ai rien contre les Meusiens, mais ils ont toute la terre qu'ils veulent. (M. Jean-François Husson proteste.)
Il faut une déclinaison locale des principes nationaux. Pourquoi ne sommes-nous pas capables de faire cela dans ce pays, bon Dieu ! (Applaudissements sur quelques travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP)
M. Sébastien Fagnen . - Vous noterez le salut amical d'un Normand à la région Bretagne, louant le travail réalisé sur le Sraddet. Les régions peuvent y parvenir, pour peu qu'elles le veuillent. En Normandie, où le président était plus que dubitatif à propos du ZAN - c'est un euphémisme - nous y sommes parvenus.
Sans cadre clair - 125 000 hectares pour la première période décennale - nous ouvrons la voie à des différences d'interprétation et des conflits entre les élus locaux et les services de l'État.
Chaque élu doit pouvoir déterminer ses projets et discuter avec les services de l'État, dans un cadre national parfaitement établi, fermant la voie à des différences interprétatives malsaines.
M. Jean-Pierre Corbisez. - Très bien !
Mme la présidente. - Amendement n°73 de M. Dantec et alii.
M. Ronan Dantec. - Je remercie Jean-Baptiste Blanc de nous avoir éclairés. On se demandait d'où venait cette disposition. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains) De manière un peu politicienne, nous pensions que cela venait de la surenchère entre Laurent Wauquiez et Bruno Retailleau, mais non.
M. Jean-Marc Boyer, rapporteur. - C'est nul !
M. Ronan Dantec. - Tout cela, c'est grâce aux urbanistes ! Je ne sais pas comment ils sont organisés professionnellement, mais Jean-Baptiste Blanc les a entendus.
Nous, nous faisons de la politique avec les corps constitués et les syndicats. Nous savons, malgré les déclarations de M. Duplomb, que les jeunes agriculteurs sont contre ce texte, que la FNSEA est contre, que les Safer le passent au vitriol !
Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente de la commission des affaires économiques. - Arrêtez de provoquer !
M. Ronan Dantec. - Dans la Loire-Atlantique, département breton en avance sur les autres, les maires de droite sont contre. (Protestations à droite) Vous faites cette loi pour des raisons qu'on ne comprend pas.
Remettre en cause l'enveloppe nationale, c'est se priver de la capacité de rééquilibrer le territoire. Cette disposition servira les territoires dynamiques, qui vont bien, comme la Bretagne ou la région parisienne, alors que vous ne cessez de prétendre oeuvrer pour les petits territoires ruraux. Cette loi est une escroquerie !
M. Jean-François Husson. - C'était cela l'amendement ?
Mme Amel Gacquerre, rapporteure. - En réalité, cette discussion est très consensuelle. Nous sommes d'accord sur l'objectif du ZAN, d'accord aussi sur le fait qu'il y a un problème de méthode.
La commission a réintroduit un jalon intermédiaire, à 2034 au lieu de 2031. En effet, entre 2021 et 2024, les élus ne disposaient pas des outils pour mettre en oeuvre le ZAN.
La seule différence entre nous, exposée par André Reichardt, est la volonté de redonner la main aux élus. Voulons-nous, oui ou non, leur faire confiance ? Nous leur faisons confiance et nous passons des paroles aux actes.
Les régions, en fonction de leurs dynamiques territoriales, détermineront leurs objectifs dans le cadre des conférences territoriales. C'est aussi simple que cela. Les arguments politiciens n'ont pas leur place dans notre assemblée, où nous défendons le pragmatisme. (Applaudissements sur les travées du groupe UC ; M. Ronan Dantec proteste.)
Mme Anne-Sophie Romagny. - Très bien !
M. François Rebsamen, ministre. - Retrait, sinon avis défavorable. Je vous invite à adopter l'amendement du Gouvernement que je défendrai dans quelques instants, un amendement de compromis.
M. Jean-François Husson. - Excellent !
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. - Quand on va en Bretagne, les maires ruraux ne tiennent pas le même discours que nos collègues.
En Île-de-France, il n'y a pas d'objectif d'intermédiaire, mais un schéma directeur de la région d'Île-de-France (Sdrif) entraînant. Le territoire est au rendez-vous. C'est à méditer.
André Reichardt l'a dit : nous proposons un contrat. Mais il comportera évidemment des clauses d'ordre public, par exemple pour les zones inondables. Il ne doit pas y avoir d'inquiétude à ce sujet. Je le précise car il y a, çà et là, un peu de malhonnêteté intellectuelle... (M. Ronan Dantec renchérit.)
Nous écrirons ce contrat ensemble pour que chacun soit rassuré sur la trajectoire, mais nous le ferons en partant de la base.
M. Jean-François Husson. - Excellent !
M. Yannick Jadot. - Il n'est pas vrai qu'il y aurait un consensus et des objections seulement politiciennes.
Le jalon proposé par la commission n'est pas prescriptif.
M. Jean-Marc Boyer, rapporteur. - Nous faisons confiance aux élus.
M. Yannick Jadot. - J'ai pris hier l'exemple d'un budget à vingt-cinq ans qui serait proposé sans objectif intermédiaire. Vous n'accepteriez pas de donner aux ministères une pleine autonomie sans échéance ni contrôle.
Il ne s'agit pas de faire ou de ne pas faire confiance. Pour assurer un enjeu aussi essentiel, on ne peut pas miser sur la bonne volonté. Il faut des objectifs contraignants, sinon l'enveloppe allouée sera évidemment dépassée et nous perdrons des milliers d'hectares pourtant essentiels.
M. Vincent Louault. - Les Safer, je les connais bien. Dans leurs conseils d'administration, les jeunes agriculteurs veulent protéger le foncier, les vieux le rendre constructible pour toucher le pactole. On connaît la musique - et la mauvaise foi des agriculteurs dans ce domaine. (MM. Yannick Jadot et Ronan Dantec s'exclament.) C'est ici que nous écrivons la loi : ce n'est pas aux Safer de nous dire ce que nous avons à faire.
M. Grégory Blanc. - Nous avons besoin d'outils, ainsi que de sanctions pour ceux qui ne respectent pas les objectifs. Depuis hier, nous passons en revue les difficultés qu'ont les élus locaux pour changer de modèle sans disposer des outils nécessaires.
Au lieu de cela, vous proposez d'effacer les objectifs fixés initialement... Quelle urgence y avait-il à déposer ce texte ? N'aurait-il pas mieux valu prendre le temps de travailler conjointement sur les objectifs ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente de la commission. - On y travaille depuis quatre ans !
M. Jean-Marc Boyer, rapporteur. - Quatre ans !
M. Philippe Grosvalet. - Il faut trouver un chemin : il est étroit, mais il existe. Le compte n'y est peut-être pas tout à fait à ce stade, mais ce ne sont pas les positions radicales, dans un sens ou dans l'autre, qui permettront d'y arriver. Avancer est une nécessité impérieuse. Peut-être notre vénérable institution ferait-elle preuve de sagesse en s'inspirant de son groupe le plus petit, qui est aussi le plus ancien ? L'amendement que nous avons déposé est susceptible de recueillir une majorité.
M. Yannick Jadot. - Amen !
M. Daniel Chasseing. - Je rejoins les propos de Jean-Baptiste Blanc.
M. Jean-François Husson. - Comme tout le monde !
M. Daniel Chasseing. - Cet article abroge l'objectif intermédiaire. Les collectivités territoriales pourront fixer elles-mêmes la trajectoire pour parvenir au ZAN en 2050. Faisons confiance aux élus, qui sont gens responsables. Ils s'engageront, sous le contrôle des conférences régionales où siège le préfet. Bref, avançons dans le sens du ZAN, mais en inversant la logique actuelle : en partant du terrain et en faisant confiance aux élus.
M. Ronan Dantec. - Dans une grande démocratie moderne, l'État fixe des objectifs, puis les collectivités compétentes les déclinent dans les territoires.
La loi ZAN n'est pas une loi contre les élus. (M. Olivier Rietmann est dubitatif.) Elle recouvre des enjeux majeurs d'adaptation au changement climatique et de lutte contre les inondations, sans parler de la souveraineté alimentaire.
L'échelon clé, c'est la région, chargée de la planification. Or le dispositif que vous proposez fragilise la région au bénéfice des présidents d'intercommunalité, qui seront au coeur de la contractualisation que vous souhaitez. Est-ce vraiment ce que vous voulez ?
En supprimant la balise, vous allez envoyer la loi Trace dans les récifs !
M. Simon Uzenat. - Je respecte l'avis des collègues qui pensent connaître la Bretagne ; moi qui en suis l'élu, je n'aurais pas cette prétention.
La conférence régionale de gouvernance que nous avons mise en place est composée à 85 % d'élus du bloc communal. Ce sont eux qui disent qu'il faut maintenir les étapes intermédiaires !
M. Ronan Dantec. - Eh oui !
M. Simon Uzenat. - Vous dites faire confiance aux élus, mais lorsqu'un ancien président de région déclare ne pas vouloir appliquer la loi, il est permis de douter de l'engagement républicain de certains élus. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains)
Vous allez entraîner une course au moins-disant. Comment une commune pourrait-elle accepter que les règles ne soient pas les mêmes à quelques kilomètres de distance ?
M. Jean-Marc Boyer, rapporteur. - Nous assumons la différenciation.
M. Simon Uzenat. - Il n'est pas possible que certains imaginent faire tous les efforts dans les dernières années. Il faut assurer une équité entre les territoires.
Mme Ghislaine Senée. - Nos collectivités n'en peuvent plus des changements de cap. Une grande majorité des régions ont réalisé leurs consultations, parfois non sans difficultés, comme en Île-de-France, où Valérie Pécresse n'a peut-être pas toujours été assez soutenue. Je pense pour ma part qu'elle n'est pas allée assez loin, compte tenu de l'importance de l'artificialisation en Île-de-France.
Freiner l'artificialisation des sols est indispensable. Selon une récente étude anglaise, la captation organique par les sols risque d'être mise à mal dès 2070. Si nous ne sommes pas capables de décarboner nos activités, laissons au moins les sols faire leur travail.
Je suis pour la confiance aux élus : nombre d'entre eux ont déjà intégré les échéances prévues. Il serait incompréhensible que le Sénat, représentant des territoires, fasse un pas en arrière. Nous devons accompagner les collectivités qui font des efforts. Montrons l'exemple, soyons vertueux !
Mme Sonia de La Provôté. - Il y a un chemin entre le « c'est comme ça » et le « je m'en fous » ! Ce sont les jalons intermédiaires adaptés aux territoires. Le ZAN est un objectif essentiel, mais il a des incidences considérables dans les territoires. Tout le monde n'a pas le même niveau de compréhension des enjeux ni les mêmes moyens de mettre en oeuvre les objectifs. Nous devons trouver une formule qui entraîne tout le monde dans cette direction en permettant à chacun de trouver sa place et sa manière de faire.
L'amendement n°73 n'est pas adopté.
M. Jean-François Husson. - C'est net !
Mme la présidente. - Amendement n°165 de M. Redon-Sarrazy et alii.
M. Christian Redon-Sarrazy. - Nous instaurons une souplesse pour permettre aux territoires d'avancer à leur rythme, en conservant deux étapes intermédiaires et sans pénaliser ceux qui ont pris de l'avance. Plus précisément, nous réintroduisons un objectif intermédiaire commun compris entre 40 et 50 % de réduction ; nous lissons la réalisation de cet objectif jusqu'en 2034 ; et nous instaurons une seconde étape intermédiaire, en 2044. Nous avons besoin d'une trajectoire partagée, mais aussi vérifiée.
Mme la présidente. - Amendement n°171 de M. Redon-Sarrazy et du groupe SER.
M. Christian Redon-Sarrazy. - Nous proposons de maintenir une échéance intermédiaire en 2035 : une réduction de moitié au moins de la consommation d'espaces, différenciée entre les différentes parties du territoire régional. Cette échéance commune permettra de ne pas pénaliser les régions qui ont déjà modifié leurs Sraddet. Elle sera gage d'atteinte effective de l'objectif en 2050, d'égalité entre les régions et de sécurité juridique.
Mme Amel Gacquerre, rapporteure. - Dans ma région, le Sraddet a été voté : nous avons eu à coeur de ne jamais contraindre les collectivités. Là où tout va bien, chacun continuera selon sa propre trajectoire.
L'amendement n°131 rectifié de M. Grosvalet, l'amendement n°137 rectifié du Gouvernement et l'amendement n°186 de la commission proposent aussi des jalons intermédiaires. La fixation d'un objectif chiffré au niveau national serait trop rigide : laissons chaque région définir ses propres jalons, dans le cadre d'une trajectoire crédible. Nous sollicitons donc le retrait de l'amendement n°165 au profit de celui de la commission.
Avis défavorable à l'amendement n°171.
M. François Rebsamen, ministre. - Même avis - mais au profit de l'amendement du Gouvernement... (Sourires)
M. Christian Redon-Sarrazy. - Je retire notre amendement, mais il est regrettable que nous n'ayons pas pu examiner auparavant celui de la commission.
L'amendement n°165 est retiré.
M. Ronan Dantec. - Sous l'influence de Régions de France, on propose de réintroduire dans la communauté nationale les deux régions qui ont décidé de ne pas appliquer la loi.
Il est prématuré de vouloir trouver la solution ici, au Sénat. L'Assemblée nationale doit aussi jouer son rôle : une mission d'information est en cours, une proposition de loi sera peut-être déposée. (Marques d'agacement au banc des commissions)
Nous nous abstiendrons sur l'amendement n°171 et voterons contre les amendements qui seront présentés dans quelques instants. Nous devons rester fermes sur les objectifs.
L'amendement n°171 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°131 rectifié de M. Grosvalet et alii.
M. Philippe Grosvalet. - Mon histoire politique aurait dû me conduire à voter l'amendement précédent ou le suivant. Mais je fais un petit pas de côté pour trouver le bon chemin - me déplaçant non vers la droite, mais vers le coeur de l'hémicycle. (Sourires et marques d'ironie, l'orateur s'exprimant depuis un micro situé à quelques mètres de sa place)
Notre amendement propose deux jalons : 2034, qui semble faire l'unanimité, et 2042, soit deux ans avant l'installation des équipes qui auront à supporter notre héritage à partir de 2044.
La confiance accordée aux territoires doit être à la fois encouragée et évaluée - je ne dis pas contrôlée. À cet égard, nous proposons une méthode d'évaluation associant les chambres régionales des comptes, chargées d'évaluer les politiques publiques au niveau territorial.
Mme la présidente. - Amendement n°137 rectifié du Gouvernement.
M. François Rebsamen, ministre. - Il s'agit d'un amendement de compromis qui répond à vos préoccupations.
L'article 2 n'incite pas les collectivités territoriales à faire évoluer leurs documents d'urbanisme avant 2050. Un objectif intermédiaire est indispensable pour une trajectoire de sobriété foncière crédible.
Nous rétablissons un tel jalon, mais en le reportant à 2034, pour tenir compte de la période 2021-2024, durant laquelle les collectivités territoriales n'avaient pas connaissance des perspectives élaborées par les régions. Nous veillons aussi à ne pas pénaliser les collectivités régionales et locales qui ont déjà intégré un objectif de réduction de la consommation d'Enaf sur la base actuelle.
Mme la présidente. - Amendement n°186 de Mme Gacquerre et de M. Boyer, au nom de la commission des affaires économiques.
Mme Amel Gacquerre, rapporteure. - Non, l'amendement du Gouvernement n'est pas un amendement de compromis. Il concentre au contraire tous les problèmes que nous dénonçons, à commencer par la rigidité d'un objectif intermédiaire uniforme au niveau national. Nous y sommes opposés.
Notre amendement n°186, au contraire, confie aux régions la possibilité de fixer de manière différenciée les objectifs de réduction pour la période 2024-2034, dans le cadre de la conférence régionale de sobriété foncière.
Mme la présidente. - Amendement n°187 de Mme Gacquerre et de M. Boyer, au nom de la commission des affaires économiques.
Mme Amel Gacquerre, rapporteure. - Amendement rédactionnel.
Mme la présidente. - Amendement n°182 rectifié bis de Mme Doineau.
Mme Élisabeth Doineau. - Je reviens sur la discussion du début de la matinée : il s'agit de supprimer le permis à statuer spécifique, parfois dévoyé pour bloquer des projets d'aménagement ou de construction.
Mme la présidente. - Amendement n°132 rectifié de M. Grosvalet et alii.
M. Philippe Grosvalet. - Vous souvenez-vous de ce que vous faisiez le 13 mars 2009 ? Seize ans, c'est long... Il faut donc baliser la route avec de vrais rendez-vous. Fixer une méthode est nécessaire pour s'assurer que nous sommes en mesure d'atteindre l'objectif prévu. C'est extrêmement difficile - en matière de routes, par exemple. Nous devons donc aider les élus.
Mme Amel Gacquerre, rapporteure. - Avis défavorable à l'amendement n°137, pour les raisons que j'ai exposées.
L'amendement n°131 rectifié de Philippe Grosvalet est intéressant, car il propose une voie de passage acceptable pour tous, sans objectif chiffré. Mais le jalon rigide fixé en 2042 ne nous convient pas. Avis favorable si celui-ci est supprimé ; sans rectification, avis défavorable.
Oui, il faut évaluer les trajectoires, mais ces évaluations sont déjà prévues par la loi Climat et résilience, notamment via les bilans à mi-parcours présentés devant les conférences régionales de sobriété foncière. Avis défavorable à l'amendement n°132 rectifié.
L'amendement n°182 rectifié bis est un amendement de coordination avec l'amendement n°196, non adopté : retrait ?
M. François Rebsamen, ministre. - L'amendement n°131 rectifié introduit notamment un contrôle de la chambre régionale des comptes. En vingt-trois ans de mandat municipal, j'ai été sous contrôle de la chambre régionale pendant dix-sept ans... N'en rajoutons pas ! (Sourires)
S'agissant de l'amendement n°186 de la commission, la liberté totale laissée aux régions ne garantit pas l'atteinte de l'objectif final, dont l'ambition risque de se perdre.
L'étape intermédiaire proposée par le Gouvernement permettra de voir où nous en sommes. En 2034, il n'y aura pas de sanction si un territoire est à 48 % ou 52 %.
Voyez l'inscription sur les listes électorales : elle est normalement obligatoire, mais, en l'absence de sanction, nombre de nos concitoyens ne s'inscrivent pas.
Des exceptions sont déjà prévues, par exemple pour les territoires ultramarins.
Retrait de l'amendement de la commission au profit de celui du Gouvernement.
Sur l'amendement n°187, d'ajustement rédactionnel, sagesse.
Retrait de l'amendement n°182 rectifié bis.
Avis défavorable à l'amendement n°131 rectifié, malgré la finesse de M. Grosvalet.
Quant à l'amendement n°132 rectifié, je demande à M. Grosvalet de bien vouloir le rendre identique à celui du Gouvernement ; à défaut, avis défavorable.
L'amendement n°182 rectifié bis est retiré.
M. Sébastien Fagnen. - L'enfer est pavé de bonnes intentions. Que se passera-t-il si une région fixe ses objectifs de réduction à 30 ou 35 %, alors qu'une autre poursuit l'objectif de 50 % ?
Le plus dur n'est pas la chute mais l'atterrissage, selon une métaphore cinématographique célèbre. À la fin, ce seront d'autres collectivités qui devront porter l'effort des autres. Le texte est hypocrite, puisque l'objectif de 2050 demeure. Le coup de frein dans la décennie 2040 risquera d'être particulièrement violent dans certains territoires, et d'autres élus devront porter cet effort. Ne pas avoir d'enveloppe nationale créerait une insécurité juridique. L'amendement de Christian Redon-Sarrazy souhaitait y remédier.
Nous soutiendrons l'amendement du Gouvernement pour réintroduire une enveloppe nationale.
M. Grégory Blanc. - Je voterai pour l'amendement n°132 rectifié de Philippe Grosvalet. Nous devons mobiliser les CRC, avoir une palette d'outils et le concours de tous les acteurs.
La mission d'information sur le financement a conduit plusieurs auditions, et j'ai rencontré des magistrats de CRC. Les CRC ont des outils qu'elles pourraient mettre à disposition des collectivités, mais nous relevons un problème d'acculturation des services, pour comprendre les contraintes des collectivités.
Je le dis de manière tout à fait objective... (On ironise à droite.)
M. Jean-François Husson. - Bien sûr !
M. Jean-Marc Boyer, rapporteur. - C'est certain !
M. Grégory Blanc. - Les magistrats et la haute fonction publique estiment souvent que pour réussir le ZAN, il faut des règles, des contraintes, plus de droit. Certes, il en faut, mais il faut aussi des outils de financement.
Il n'y a pas si longtemps, l'État disait aux collectivités territoriales qu'elles étaient trop endettées et contribuaient à mettre la nation dans le rouge.
M. Jean-Marc Boyer, rapporteur. - C'est fini !
M. Grégory Blanc. - Le même jour, un autre ministre nous disait que les collectivités territoriales pouvaient continuer de s'endetter pour financer la transition écologique. Il faut mettre fin à cela.
M. Philippe Grosvalet. - Je m'étonne de la première réaction du ministre à l'évocation des CRC.
Nous avons tous été élus locaux, et vous avez vécu des contrôles des CRC. J'en ai contesté moi-même. Mais ces contrôles n'en sont pas moins une garantie d'indépendance.
Monsieur le ministre, pourriez-vous rectifier ce point ?
M. Christian Redon-Sarrazy. - Je crains que l'absence de quantification n'entraîne des concurrences entre territoires.
Tout ce qui est pris est pris. On prétend que tout le monde est d'accord sur l'objectif de 2050, ce dont nous pouvons douter, mais certains territoires pourront choisir de ne faire l'effort que dans la dernière période, pour faire venir plus d'industries chez eux que leurs voisins durant dans la première période.
Cette concurrence entre les territoires peut être malsaine et remettre en cause l'objectif final de ZAN.
Sans jalon, nous risquons d'avoir beaucoup de mal à atteindre l'objectif de 2050.
M. Vincent Louault. - Monsieur le ministre, vous dites que l'amendement du Gouvernement est un compromis. C'est peut-être un compromis au sein du Gouvernement ! (Sourires) Mais pour nous, c'est de la recentralisation. Votons l'amendement de la commission.
M. Ronan Dantec. - La commission propose un jalon indicatif. Certaines régions pourraient fixer un objectif de moins 50 % dans leur Sraddet, avant de voir la région Auvergne-Rhône-Alpes (Aura) se contenter de moins 30% ! Elles auront l'impression qu'on se moque d'elles, et reviendront sur leurs efforts.
Certains territoires ont plus besoin que d'autres d'être réindustrialisés. Créer une enveloppe nationale mutualisée d'aménagement du territoire serait bienvenu, pour favoriser les territoires ayant besoin d'accueillir davantage d'entreprises. Mais vous n'en avez pas voulu ! Vous ne voulez pas faire du ZAN/Trace un outil d'aménagement du territoire. Vous voulez rendre les forts encore plus forts, et les faibles encore plus faibles. Vous voulez simplement que la région Aura puisse faire ce qu'elle veut.
M. François Rebsamen, ministre. - J'étais au cabinet de Pierre Joxe quand les CRC ont été créées et ai beaucoup d'estime pour elles. Cependant, elles ont déjà beaucoup de travail. N'en rajoutez pas !
Les tentatives de les faire disparaître dans les années 1980 n'ont pas eu d'effet. Je fais confiance aux élus locaux.
M. André Reichardt et Mme Dominique Estrosi Sassone. - Très bien !
M. Philippe Grosvalet. - C'est mieux...
M. Daniel Salmon. - Cet article est symptomatique de la pensée magique qui s'installe à droite de l'hémicycle. La réalité s'évapore. Comment pouvez-vous croire qu'on atteindra l'objectif de 2050 sans jalon intermédiaire ?
Les lois se suivent et à chaque fois, vous voulez lever des contraintes. Avec vous, c'est open bar, après nous le déluge, les inondations, la sécheresse ! (Vives protestations sur les travées du groupe Les Républicains)
Ce qui se passe ici est très grave. Nous remettons aux calendes grecques ce que nous aurions dû faire hier. Il nous faut des jalons si nous voulons avoir ne serait-ce qu'une petite chance d'atteindre l'objectif.
Nous sommes devant l'histoire. Si l'artificialisation continue ainsi, nous n'atteindrons pas l'objectif. (M. Jean-Marc Boyer ironise.)
Mme Cécile Cukierman. - Nous avons tous des orientations et des combats politiques. Les citoyens n'aiment pas qu'on caricature ou qu'on stigmatise leur territoire.
Conseillère régionale de Rhône-Alpes depuis 2004 et de la région Aura depuis 2016, je parlerai très librement.
Depuis ce matin, j'ai l'impression de vivre ailleurs que dans la République française. La région Aura a bien un Sraddet ! J'ai d'ailleurs voté contre. C'est donc bien qu'il existe.
Lors de l'examen de la loi ZAN 2, Valérie Létard et Jean-Baptiste Blanc avaient proposé une différenciation départementale au sein d'une même région. Mais dans certaines régions, sans cibler personne, cela pourrait entraîner des pressions, leur ai-je dit. À ma grande surprise, l'ancien président de région dont tout le monde parle depuis hier a dit que les sénateurs avaient voté n'importe quoi et qu'il refusait la différenciation. La différenciation n'est utilisée que pour mettre en oeuvre un objectif. La région Aura ne va pas surartificialiser et vivre en dehors de son monde. Faisons un peu confiance aux territoires et arrêtons de régler des débats qui ne sont pas ceux de la proposition de loi que nous examinons ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC, ainsi que sur quelques travées du groupe INDEP ; M. Bernard Buis applaudit également ; marques d'ironie sur les travées du GEST)
M. Jean-Marie Mizzon. - Une fois n'est pas coutume, je voterai l'amendement du Gouvernement. Fixer une date est clair pour tous. Sinon, on ne règle pas le problème et on le renvoie à un niveau différent ; nous risquons de nous défausser sur des acteurs qui subiront des pressions, notamment de la part des métropoles.
Mme la présidente. - Il aurait été intéressant que nous puissions aller au bout de l'article 2 avant la suspension à treize heures, mais ce choix vous appartient.
M. Guillaume Gontard. - Habitant et élu dans la région Aura...
M. Damien Michallet. - Idem !
M. Guillaume Gontard. - Je tenais à intervenir.
Pourquoi parle-t-on de cette région ? Parce que l'ancien président de région a appelé à ne pas appliquer la loi !
M. Fabien Genet. - Non, à changer la loi !
M. Guillaume Gontard. - J'étais à l'Alpe d'Huez. Nombre d'élus départementaux n'étaient pas d'accord.
M. Damien Michallet. - Ce n'est pas vrai !
M. Guillaume Gontard. - Les élus sont responsables, et conscients du fait qu'on ne peut pas continuer à utiliser de la terre agricole comme on le faisait jusqu'à présent. Il faut changer nos pratiques. Il nous faut du temps, mais aussi des étapes. Sinon, nous n'avancerons pas.
Il n'y a rien dans ce texte sur l'ingénierie ou les moyens financiers. Qui fait les compromis ? Toujours nous, jamais vous ! (Mme Dominique Estrosi Sassone le conteste.) L'amendement n°137 rectifié du Gouvernement est un amendement de sagesse.
L'amendement n°131 rectifié n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°137 rectifié.
L'amendement n°186 est adopté,de même que l'amendement n°187.
L'amendement n°132 rectifié n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°3 rectifié quater de M. André Reichardt et alii.
M. André Reichardt. - Cet amendement décline les objectifs de sobriété foncière au sein des documents d'urbanisme communaux et intercommunaux et non plus au sein des Sraddet.
Maintenir les objectifs de réduction d'artificialisation des sols au niveau des régions place les élus communaux et intercommunaux en porte à faux vis-à-vis de leurs administrés, car ils conservent sur le papier leurs compétences sans avoir les moyens concrets de les mettre en oeuvre. Cela pénaliserait les territoires les plus isolés, pauvres ou excentrés. Faisons confiance aux élus locaux.
Mme Amel Gacquerre, rapporteure. - Cet amendement va dans le sens de ce que nous voulons, à savoir donner plus de poids aux territoires, mais avis défavorable : qui définirait les modalités de répartition des enveloppes foncières entre les territoires ?
La région détient le chef de filat pour la compétence d'aménagement du territoire ; elle est donc l'acteur à part entière pour ces sujets.
Il est de bonne pratique que la répartition des enveloppes se fasse au niveau régional, mais avec davantage de place pour les maires et les EPCI.
M. François Rebsamen, ministre. - Je connais vos motivations, monsieur le sénateur. L'échelon régional reste néanmoins pertinent. Avis défavorable.
M. André Reichardt. - Je plaide encore ma cause.
Plusieurs exemples, comme les objectifs de construction de logements sociaux, démontrent qu'il est possible d'organiser une déclinaison des objectifs nationaux au niveau local sous le contrôle du préfet. Prescrire un contrat obligatoire de sobriété foncière entre, d'une part, les communes et les EPCI et, d'autre part, les préfets, tenant compte de la situation locale, pourrait être judicieux, pour un meilleur respect d'un principe constitutionnel de libre administration territoriale.
Si nous maintenons le niveau régional dans la proposition de loi Trace, les élus locaux seront toujours dépossédés de la faculté d'agir.
La garantie communale n'améliore pas la situation.
M. Jean-Marc Boyer, rapporteur. - Mais si !
Mme Nathalie Goulet. - Je fais partie du faible nombre de parlementaires de l'hémicycle à ne pas avoir voté pour la loi Climat et résilience, car je prévoyais des difficultés d'adaptation. La loi ZAN 2 avait été une première rustine, on nous en propose une autre.
Notre collègue Guislain Cambier parcourt la France pour expliquer aux élus ce qui va se passer, mais monsieur le ministre, il existe un problème de compréhension de ce texte. Dans l'Orne, un sentiment d'extrême injustice existe, car ce territoire n'a pas beaucoup construit auparavant, contrairement au Havre. Je voterai pour cet amendement.
M. Cédric Chevalier. - Représentant de la Marne, j'appartiens à la même très grande région que mon collègue André Reichardt et je suis d'accord avec lui.
Certains niveaux ne sont pas adaptés pour définir des schémas d'aménagement du territoire. Revenir aux niveaux communal et intercommunal, c'est reconnaître que les documents d'urbanisme traduisent aussi des projets communs. Les territoires sont les plus à même d'évaluer leurs besoins en matière de consommation foncière.
Je voterai pour l'amendement.
M. Vincent Louault. - La vraie vie, c'est quoi ? Mon enveloppe ZAN a crû de 60 hectares en 2020, à la suite d'un avis du Cerema. Ma seule solution, c'était d'attaquer le Sraddet ! Sans décision administrative à attaquer, on ne peut saisir le tribunal administratif, c'est aussi simple que cela. C'est ce qu'il aurait fallu mettre dans la loi depuis le départ.
M. Simon Uzenat. - On peut engager la différenciation à partir du moment où un objectif clair, stable et mesurable est défini.
En Bretagne, 1 000 hectares supplémentaires sont prévus pour la métropole de Rennes, et le même nombre pour le Centre Bretagne, alors que ces deux territoires sont très différents et verront leur population augmenter de 60 000 habitants pour l'un contre 1 500 habitants pour l'autre. Mais nous devons différencier pour soutenir les territoires ruraux, afin qu'ils accueillent plus d'activités. C'est une discussion à l'échelle régionale qui permet de tenir compte de ces distinctions, sans avoir à en référer à l'État.
Nous nous opposerons à l'amendement.
Mme Cécile Cukierman. - Nous nous heurtons à une réelle difficulté. On a construit des grandes régions qui, pour certaines, ne correspondent à aucune réalité de vie ! (M. Vincent Louault le confirme ; M. Ronan Dantec applaudit.)
M. André Reichardt. - Tout à fait !
Mme Cécile Cukierman. - On a ensuite défini des Sraddet. Mais si un Sraddet a du sens dans une région à quatre départements, avec une histoire commune, c'est difficile quand la région va du plateau du Cézallier à la Drôme provençale, en passant par le Mont-Blanc. Telle est la réalité. (M. Grégory Blanc lève les bras au ciel.)
L'amendement de M. Reichardt répond à cette difficulté.
Le caractère de « bon élève » de certaines régions - je le dis sans jugement de valeur - n'est pas duplicable dans des régions comme le Grand Est, la Nouvelle-Aquitaine ou la région Auvergne-Rhône-Alpes.
M. André Reichardt. - Très bien !
M. Grégory Blanc. - Dans certaines petites régions, cela ne marche pas non plus...
Mme Amel Gacquerre, rapporteure. - Ne cédons pas à la tentation de tout requestionner.
M. Daniel Salmon. - Nous sommes d'accord !
Mme Amel Gacquerre, rapporteure. - C'est exactement ce que les élus nous demandent d'éviter.
Vous rendez-vous compte de ce que fait cet amendement ? Il remet en question les règles actuelles. Ce n'est pas ce que nos élus attendent. Ils veulent des assouplissements. Certes, il faut bouger, mais n'allons pas trop loin.
L'amendement n°3 rectifié quater n'est pas adopté.
Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente de la commission des affaires économiques. - De manière calme et apaisée, mais avec une certaine fermeté, je vous informe que nous avançons à un rythme de 8,8 amendements par heure.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. - Excès de vitesse !
Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente de la commission. - Depuis 10 h 30, nous avons examiné 22 amendements ; il nous en reste donc 119 à examiner. À ce rythme, treize heures et demie de débat seront nécessaires.
M. Ronan Dantec. - C'est faisable !
Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente de la commission. - Certes, il est prévu de travailler cet après-midi, le soir et la nuit - donc si tout le monde veut continuer jusqu'à 3 ou 4 heures du matin, c'est possible. Mais je ne sais pas si cela est vraiment souhaitable.
Depuis hier soir, les uns et les autres, nous avons eu le temps de nous exprimer, lors de la discussion générale ou de différentes prises de parole. Refaire une discussion générale sur chaque article, lors de la présentation des amendements et des explications de vote, alors que les rapporteurs recadrent le sujet, ne me semble pas utile, sauf à faire de l'obstruction. (Murmures à gauche)
Les arguments comme ceux de M. Dantec et de ses collègues sont des arguments politiciens et purement idéologiques. (Vives protestations sur les travées du GEST ; applaudissements à droite) Monsieur Dantec, vous ne sortez pas grandi de ce débat. Cessez de vous abriter derrière des arguments fallacieux. Cela fait quatre ans que nous débattons de ce sujet depuis la loi Climat et résilience.
M. Guy Benarroche. - Et ce n'est pas fini !
Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente de la commission. - Je salue le travail de compromis des rapporteurs.
M. Guy Benarroche. - Nous aussi, nous travaillons !
Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente de la commission. - Monsieur Gontard, vous prétendez être les seuls à faire des compromis. Mais de quel bois vous chauffez-vous ? (M. Guy Benarroche s'exclame.) Nous faisons tous des compromis ici. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe UC ; M. Vincent Louault applaudit également.)
Soyons sérieux et responsables ; nous aurions tous intérêt à poursuivre nos débats de manière apaisée...
M. Guy Benarroche. - C'est-à-dire voter votre loi ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente de la commission. - ... sans faire de débats idéologiques ou politiciens. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, INDEP et au banc des commissions)
M. Guy Benarroche. - On ne va pas aller plus vite, avec cela !
Rappel au règlement
M. Guillaume Gontard. - Mon rappel au règlement se fonde sur l'article 44 du règlement. Madame la présidente, je vous ai connue plus sereine. Vous avez votre ligne à tenir, ce que nous disons ne vous plaît peut-être pas, mais nous faisons notre travail parlementaire.
J'ai été maire d'une petite commune comme vous, je connais donc les sujets d'urbanisme.
J'aurais préféré que Mme la présidente prenne la parole pour se féliciter des débats. Je suis étonné que le mot compromis pose problème.
Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente de la commission. - Ce n'est pas le mot ! Mais vous avez dit que vous étiez seuls à en faire.
M. Guillaume Gontard. - Nous n'étions pas favorables à l'amendement du Gouvernement, mais nous acceptons ce compromis. C'est tout le travail que nous menons depuis hier.
Quant à l'idéologie, ce n'est pas un gros mot, il est bon d'avoir des idées. (Mme Dominique Estrosi Sassone ironise.)
J'aurais aimé plus de respect pour ce travail et que nous retrouvions de la sérénité. (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains) Je comprends qu'il vous sera difficile de porter ce discours dans vos territoires.