Projet de loi de finances pour 2025 (Suite)

Seconde partie

Enseignement scolaire

M. le président.  - L'ordre du jour appelle l'examen des crédits de la mission « Enseignement scolaire » du projet de loi de finances, considéré comme rejeté par l'Assemblée nationale, pour 2025.

M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial de la commission des finances .  - La mission « Enseignement scolaire » est toujours - et heureusement - la première mission du budget de l'État et devrait atteindre 64,5 milliards d'euros en 2025.

Si Marianne exerçait un métier, nul doute qu'elle serait professeur, tant la République et l'école ont leurs destinées entrelacées. Les « hussards noirs de la République », chers à Charles Péguy, incarnent cette symbiose.

Cette année, les crédits sont stables. Depuis 2022 ils avaient augmenté de 17 %, en raison de l'indispensable revalorisation des enseignants, qui représentent 74 % des 1,2 million de fonctionnaires de l'éducation nationale. En 2022, nos enseignants étaient moins payés que leurs homologues allemands ou portugais...

Des efforts substantiels ont été faits pour améliorer l'attractivité du métier. L'augmentation du point d'indice, la revalorisation des salaires et le pacte enseignant ont amélioré la situation, même si tous les agents ne bénéficient pas de ce dernier. Sans ces hausses de salaire, le budget de la mission aurait été inférieur de 4,5 milliards en 2025.

Le récif tranchant cette année est la baisse du plafond d'emplois : 4 000 postes pourraient être supprimés, dont 3 815 dans le premier degré, en raison de la baisse démographique, le nombre d'élèves scolarisés dans le premier degré ayant baissé de 6 % entre 2011 et 2023. Le phénomène s'accélère : entre 2023 et 2028, le premier degré perdra 350 000 élèves.

La politique ne saurait se résumer à un exercice comptable : elle doit rendre possible ce qui est souhaitable. Nous ne saurions nous résigner à ce que le taux d'encadrement demeure l'un des plus faibles de l'OCDE.

Mme Marie-Pierre Monier.  - C'est sûr !

M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial  - La diminution du nombre d'enseignants ne doit pas être uniforme, mais progressive et ciblée sur le territoire. Elle présente un risque pour les écoles rurales, qui ont déjà perdu 8,6 % de leurs effectifs entre 2015 et 2023. (Mme Marie-Pierre Monier renchérit.) Leur fermeture s'accompagne souvent de forts risques de « désaménagement du territoire ». Je propose donc de limiter les suppressions à 2 000 postes.

Comme les années précédentes, l'école inclusive progresse : entre 2013 et 2023, 240 000 élèves supplémentaires ont bénéficié d'accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH). Au total, cela coûtera 4,5 milliards d'euros.

Du dédoublement en grande section, CP et CE1 au choc des savoirs, les réformes ont épuisé les enseignants. Point trop n'en faut : il serait souhaitable d'abandonner les réformes de trop grande ampleur.

En 2023, sur les 2 milliards d'euros consacrés à la formation des enseignants, seule la moitié a été consommée. La commission des finances ne comprend pas cette sous-consommation, et a déposé un amendement pour réduire les crédits.

La commission des finances vous propose d'adopter les crédits de la mission, sous réserve de quelques modifications. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Jacques Grosperrin, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l'éducation, de la communication et du sport .  - Nous sommes dans une situation inédite, dans l'attente de je ne sais quelle décision. Merci de travailler dans cette incertitude.

Hors enseignement agricole, les crédits de la mission augmentent de 1,6 milliard d'euros.

Nous nous réjouissons des efforts en faveur de la scolarisation des élèves en situation de handicap, dont le nombre a progressé de 52,4 %, notamment grâce à la loi Vial.

La démographie scolaire diminuant, le Gouvernement propose la suppression de 4 000 postes, dont 3 150 dans le premier degré. Mais n'oublions pas les territoires ruraux, où l'école est souvent le dernier service public. Aussi défendrai-je un amendement, adopté à l'unanimité par la commission de la culture, pour réduire le nombre de postes supprimés. Il est urgent de repenser le maillage territorial.

Faisons de la contrainte démographique un levier pour la réussite des élèves. Je suis un fervent défenseur de l'école du socle commun, qui permet aux écoles rurales de se consolider autour des collèges. La question démographique doit nous conduire à réfléchir à une nouvelle organisation scolaire pour nos élèves. (Applaudissements sur quelques travées du groupe Les Républicains)

M. Bernard Fialaire, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l'éducation, de la communication et du sport .  - Le programme 143 relatif à l'enseignement technique agricole a reçu un avis favorable de la commission, ce qui pourrait sembler paradoxal dans un contexte de réduction démographique. Le nombre d'élèves dans l'enseignement agricole progresse de 1 % par an depuis cinq ans. Il affiche un taux de réussite remarquable, malgré des indices de position sociale (IPS) défavorables.

L'agriculture fera face à un renouvellement générationnel de 30 % d'ici à 2030. L'augmentation de 35 millions d'euros est donc bienvenue. Mais nous sommes inquiets des mesures touchant l'apprentissage, qui a progressé de 49 % depuis 2019. Les ateliers et les fermes sont déficitaires car celles-ci privilégient la pédagogie à la rentabilité. Mme Genevard a annoncé un coup de rabot généralisé sur les crédits de son ministère, sans discernement pour l'enseignement agricole.

Nous ne pouvons nous en satisfaire : pour récolter, il faut semer et donc investir dans l'enseignement agricole. Nous devons améliorer la gestion du pacte enseignant, et confier plus d'autonomie de gestion aux chefs d'établissement en la matière. Néanmoins, l'avis est favorable sur l'adoption de ce budget. (MM. Olivier Paccaud et Jacques Grosperrin ainsi que Mme Samantha Cazebonne applaudissent.)

Mme Monique de Marco .  - (Applaudissements sur les travées du GEST et du groupe SER ; Mme Evelyne Corbière Naminzo applaudit également.) Après les années Blanquer, qui ont laissé des traces, l'année 2024 a été marquée par une instabilité ministérielle inédite : vous êtes la troisième ministre de l'année, la sixième du quinquennat. Cela nuit à la relation de confiance entre les enseignants et les autorités politiques. Votre formation n'a pas encore trouvé la bonne méthode pour s'adresser à eux...

Les constats diffèrent. Les enseignants insistent sur le sous-investissement structurel dans l'école selon l'OCDE, tandis que le Gouvernement s'appuie sur les enquêtes Pisa (programme international pour le suivi des acquis des élèves) pour souligner la baisse de niveau.

En France, le budget par élève est inférieur de 11 % à la moyenne des pays de l'OCDE. Le taux d'encadrement est de 14,6 élèves par enseignant, contre 11,8 pour les autres pays de l'Union européenne. La baisse démographique est une opportunité historique pour rattraper notre retard. Nous déplorons l'absence de revalorisations salariales : il manquait encore 3 000 enseignants à la rentrée 2024.

Notre politique d'enseignement ne peut se limiter à une réussite mesurée par des critères quantitatifs. L'école doit être au coeur de la société, appuyée sur l'apprentissage des savoir-être, comme l'empathie, par exemple, qui devrait devenir un critère d'évaluation.

Il y a aussi un problème de méthode. Le ministère de l'éducation nationale est le premier employeur. La réussite des réformes dépend du soutien des enseignants, or le « choc des savoirs » leur a été imposé, sans débat parlementaire. Votre prédécesseur a décidé seul des savoirs fondamentaux à enseigner. Je me félicite de la décision d'annulation du Conseil d'État, qui vous obligera à réfléchir sur ces méthodes brutales. Je m'inquiète cependant de la réaction du ministère qui veut agir par décret. Pourquoi, après l'opposition du Conseil supérieur de l'éducation, la réforme des groupes de besoins a-t-elle du mal à se mettre en place ? N'est-il pas contradictoire de prôner l'école inclusive au primaire, avant de trier les élèves au collège ? Pour faire face aux difficultés scolaires, le modèle de 1977, fondé sur des classes hétérogènes, est une réponse.

L'année 2024 a été aussi marquée par l'affaire Stanislas. Certains, dans cet hémicycle, militent pour un renforcement de l'autonomie des établissements scolaires.

M. Max Brisson.  - Absolument !

Mme Monique de Marco.  - Attention : les Suédois, qui ont adopté ce modèle, sont sur le point de faire machine arrière ! (Applaudissements sur les travées du GEST et du groupe SER ; Mme Evelyne Corbière Naminzo applaudit également.)

Mme Marie-Pierre Monier .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Jules Ferry disait : « entre toutes les nécessités du temps présent, entre tous les problèmes, j'en choisirai un auquel je consacrerai tout ce que j'ai d'intelligence, tout ce que j'ai d'âme, de coeur, de puissance physique et morale, c'est le problème de l'éducation du peuple ». 

Voilà notre boussole : proposer une éducation de qualité à tous nos élèves. Ce budget en est à mille lieues. Il supprime 4 000 postes, faisant peser 90 % des coupes d'effectifs de la fonction publique sur l'école. La raison invoquée - la baisse démographique - n'est pas entendable. Entre 2018 et 2021, 7 500 postes ont été supprimés dans le second degré en raison de la priorité donnée au premier degré, alors qu'il y avait 68 000 élèves de plus.

La France est le mauvais élève de l'Union : dans le premier degré, on compte 21,4 élèves par classe, 19 dans le reste de l'Union. Au collège, on est à 26 élèves par classe, contre 21 ailleurs.

Continuons à soutenir l'enseignement technologique et professionnel, qui bénéficie d'un meilleur taux d'encadrement. Je me réjouis du signal envoyé par les amendements de la commission des finances et de la commission de la culture pour réduire la baisse des effectifs.

Le groupe SER veut aller plus loin : nous avons déposé des amendements tendant à rétablir l'ensemble des postes supprimés.

Ces dernières années ont été marquées par un tourbillon de réformes coûteuses : fonds d'innovation pédagogique de 500 millions d'euros, campagne d'évaluation des établissements scolaires, choc des savoirs, etc. L'ancienne professeure de mathématiques que je suis est frappée par la lassitude exprimée par les enseignants. Disons-le tout net : ils sont au bout du rouleau !

Alors que des milliers de postes ne sont pas pourvus et que le nombre de démissions explose, nous devons écouter leurs revendications. Cela passe par une revalorisation de leur salaire -  les enseignants ont perdu 15 à 20 % de leur pouvoir d'achat en vingt ans  - et une amélioration de leurs conditions de travail. Soyons au rendez-vous pour les protéger contre les menaces et les attaques dont ils font l'objet - je le dis alors que le procès Paty est en cours.

Il faut saluer la création de 2 000 postes d'AESH, mais seront-ils pourvus ? Vingt ans après le lancement de l'école inclusive, il faut mettre un terme au bricolage. Je relève des signaux inquiétants dans la mise en place des pôles d'appui à la scolarité (PAS) ou dans l'application difficile de la loi Vial sur la prise en charge durant la pause méridienne.

Le budget de l'enseignement agricole est en hausse, mais il doit avoir les moyens de répondre aux enjeux du renouvellement des générations agricoles et de l'évolution des pratiques. Entre 2017 et 2022, 316 postes ont été supprimés, soit l'équivalent de 10 000 dans l'éducation nationale.

Le groupe SER votera contre ce budget, encore amputé de 170 millions d'euros par le Gouvernement. (Applaudissements à gauche)

M. Aymeric Durox .  - « Le peuple qui a les meilleures écoles est le premier peuple : s'il ne l'est aujourd'hui, il le sera demain », disait Jules Simon, ministre de l'instruction publique en 1870 et sénateur durant plus de vingt ans. C'était vrai jusqu'aux années 1960 ; depuis, c'est la dégringolade. N'est-ce pas le but recherché, comme l'écrit Jean-Claude Michéa dans L'enseignement de l'ignorance ?

Le budget de l'enseignement scolaire traduit le « en même temps » : certes, il augmente de 2 %, mais il manque d'ambition et se résume à des mesures sans impact systémique - cours d'empathie, Conseil national de la refondation, éducation sexuelle, groupes de besoins, etc.

Vous affirmez que la maîtrise des fondamentaux est une priorité, mais le coût moyen d'un écolier reste inférieur à celui d'un lycéen, à l'inverse des pays de l'OCDE obtenant les meilleurs résultats.

Vous supprimez à nouveau des classes dans la France périphérique. Vous dédoublez les classes en REP et expérimentez le 8 heures-18 heures, mais en même temps, vous n'engagez aucune évaluation de l'éducation prioritaire pour faire évoluer un modèle obsolète

Vous multipliez les déclarations martiales sur la laïcité, mais en même temps vous refusez un indicateur sur la menace de l'islamisme radical sur nos enseignants, la laïcité et la République en elle-même ! Et ce, alors que 328 atteintes à la laïcité à l'école ont été recensées en septembre, et que les demandes de protection fonctionnelle pour les professeurs augmentent de 29 % en un an !

Le ministère de l'éducation nationale n'est pas un ministère dépensier. Il est, par essence, celui de l'avenir de la nation. Son budget est un budget d'investissement. Or investir sans vision stratégique revient à remplir le tonneau des Danaïdes. Pourquoi est-il impossible d'envisager des objectifs qualitatifs et éducatifs pour le milieu du siècle, alors qu'on parle bien d'objectifs de développement durable ?

Vous nous présentez un budget de routine, alors qu'il faudrait des mesures ambitieuses pour éviter le naufrage.

Le Rassemblement national est le seul mouvement politique ayant proposé une autre ambition pour l'école de la République, pour l'avenir de la nation.

Mme Laure Darcos .  - (Mme Sonia de La Provôté applaudit.) L'enseignement scolaire est à la croisée des chemins. La diminution du nombre d'élèves va s'accélérer, vu l'évolution de la natalité. Le premier degré a perdu 360 000 élèves entre 2011 et 2023, et en perdra 350 000 d'ici 2028.

Dans ces conditions, l'État, appliquant une logique comptable, peut être tenté de diminuer les crédits.

Ce serait une grave erreur, tant les besoins sont immenses. Pour redresser les résultats, objectivement mauvais, dans les matières essentielles que sont les mathématiques et le français, pour financer l'école inclusive, pour offrir une rémunération décente aux AESH et aux enseignants, pour tendre vers l'égalité des chances et relever le défi de la ruralité, les moyens de l'éducation nationale doivent être sanctuarisés.

Olivier Paccaud a considéré à juste titre qu'on ne pouvait supprimer 4 000 postes. Qui n'a pas été sollicité par un maire rural sur une fermeture de classe ? Attractivité du territoire, sentiment de déclassement : les effets sont terribles. Sortons du court-termisme et instaurons des politiques éducatives agiles qui répondent aux enjeux.

Le nombre d'élèves en situation de handicap scolarisés en milieu ordinaire ne cesse d'augmenter, ce qui invite à mieux coordonner l'école et le monde médico-social. Les pôles d'appui à la scolarité (PAS) y pourvoiront, en amont des notifications des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH). Les conditions de mise en oeuvre de la prise en charge sur la pause méridienne doivent être clarifiées : la circulaire de juillet 2024 est d'une complexité inouïe.

Enfin, la médecine scolaire se verra retirer 30 millions d'euros en 2025, l'augmentation de crédits que nous avions votée l'an dernier n'étant pas reconduite. La santé psychologique de nos jeunes ne cesse de se dégrader. Les médecins sont trop peu nombreux et les départs à la retraite se profilent. Dans l'Essonne, seuls 14 ETP sur 36 sont pourvus, alors que le nombre d'élèves augmente.

Il faut réévaluer la grille indiciaire, attirer des médecins contractuels avec un salaire attractif et améliorer les conditions matérielles de ces professionnels qui travaillent sans locaux, sans moyens de dépistage, sans accès partagé aux données de santé, sans assistance médicale. Sans réaction urgente, il n'y aura plus de médecine scolaire dans quelques années.

Il existe des marges de progrès importants. Le groupe INDEP votera les crédits de la mission, tout en restant vigilant.

M. Max Brisson .  - En décembre 2021, la Cour des comptes dressait un constat implacable : « la performance globale du système éducatif français reste médiocre malgré l'importance des moyens mobilisés. » Comment lui donner tort, quand plus de la moitié des élèves entrant en 4e n'ont pas les compétences minimales en français et en mathématiques, et quand 62 000 élèves décrochent chaque année du système scolaire ? Quand la mobilité sociale est la plus faible d'Europe, les actes de violence en hausse, que 3 200 postes ne sont pas pourvus aux concours, et que 53 % des Français estiment que l'école fonctionne mal ? Comment en sommes-nous arrivés là ?

Près de 40 % des élèves en fin de primaire ne possèdent pas les connaissances fondamentales. Plus de trois jeunes sur quatre déclarent avoir subi des violences à l'école, 29 % disent ne pas s'y sentir en sécurité, contre 10 % pour la moyenne de l'OCDE.

Pourtant, l'attachement à notre école demeure. Les Français espèrent son redressement.

Pour la majorité des acteurs, les réponses sont financières : il faut plus de moyens. Le budget 2025 ne déroge pas à la règle. Mais ne serait-il pas temps de questionner la légitimité de cette méthode ? Dépenser toujours plus pour toujours moins de résultats... On alimente un système trop vertical, trop uniforme, trop oublieux des particularités.

En Suède, la tendance est à l'autonomie. En France, c'est la verticalité, la centralisation et l'uniformisation, qui épuisent les initiatives et découragent les meilleures idées. Seules 10 % des décisions sont prises au niveau des établissements ! Le Conseil d'État vient de le rappeler sur les groupes de besoin.

Selon la Cour des comptes, les systèmes scolaires les plus performants sont ceux qui donnent le plus de place aux établissements, fédérant les enseignants autour d'un projet. Tout est dit ! Ce sont bien la liberté et l'autonomie qui font défaut. Ouvrons enfin une réflexion sur le sujet. Le pilotage par le haut est obsolète et inefficace. En avril 2023, le Sénat a adopté une proposition de loi sur les établissements publics autonomes d'éducation. Ces derniers pourraient contractualiser afin de décider de l'organisation pédagogique, de l'affectation des personnels, de l'allocation des moyens ou du recrutement des élèves.

Cette expérimentation s'appuierait sur des contrats de mission, a contrario du barème de l'ancienneté qui conduit à affecter les professeurs les moins chevronnés sur les postes les plus difficiles. C'est absurde ! Résultat : démissions, dépressions, places vacantes au concours. Certes, il existe des postes à profil, mais les contrats de mission reconnaîtraient réellement le service rendu à la République.

Il faut dissocier la formation des enseignants du premier et du second degré et renouer avec les écoles normales du professorat. Il faut agir sur le prérecrutement et lier formation initiale et formation continue en régionalisant les concours du second degré.

Nous devons réaffirmer l'attachement de la République à la liberté d'enseignement. L'école publique ne se rénovera pas en détruisant les réseaux qui fonctionnent ! Nous attendons de la clarté. Il faut rappeler la liberté de choix des parents, qui ont la primauté pour l'éducation.

Je salue quelques initiatives privées originales, comme les réseaux Espérance banlieue et Excellence ruralités, notamment dans les territoires à besoins éducatifs particuliers.

Regardons en face la crise dans laquelle s'enfonce inexorablement notre système éducatif. Nous avons besoin d'un cap, d'une vision. École inclusive, lycée professionnel : nous saluons les initiatives. Oui, il faut aller plus loin : relever la ligne d'horizon, comme dit le Premier ministre, entamer le redressement sur la base de la liberté et de l'autonomie.

L'école doit se recentrer sur ses missions premières : transmission des savoirs fondamentaux, différenciation des parcours via les groupes de niveaux, à rebours de l'uniformisation qui a été un échec absolu. L'hétérogénéité des classes n'est pas la solution. Permettons aux élèves de remédier à leurs difficultés, d'acquérir les compétences et les connaissances qui leur manquent. Cela se passe partout ailleurs dans la société, pourquoi pas à l'école ?

Pour rénover l'école, il faut aussi restaurer l'autorité des professeurs, personnaliser leur carrière, leur assurer une protection sans faille. Bref, retrouver ce qui fait la force de notre école, jadis tant admirée.

En responsabilité, le groupe Les Républicains votera les crédits de la mission. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Mme Samantha Cazebonne .  - Avec 88,9 milliards d'euros alloués à la mission - 64,5 milliards hors contribution au compte d'affection spéciale « Pensions » - l'éducation nationale demeure le premier budget de l'État. Elle enregistre une hausse de 1,68 milliard d'euros, qui s'explique par des facteurs mécaniques.

Dans un contexte aussi contraint, cette stabilité montre l'engagement du Gouvernement en faveur de l'éducation, pilier de notre société. Est prévue la suppression de 4 000 postes, surtout dans le premier degré. Entre 2024 et 2025, le nombre d'élèves y diminuera de 70 000 ; il baissera aussi dans le second degré dans les années à venir. Ce niveau de suppression ne va-t-il pas à rebours des politiques menées ? Nous partageons la volonté du rapporteur de limiter cet effort à 2 000 postes, pour prendre en compte les besoins des territoires ruraux - mais demeurons sceptiques sur la méthode, à savoir le transfert de 75 millions d'euros du pacte enseignant.

Alors que les crédits progressent constamment depuis 2017, ce budget est donc un budget de transition.

Certaines évolutions sont à souligner. Dans le programme 140, je note la mise en oeuvre d'un pilotage et d'un encadrement pédagogique qui garantissent l'efficience de l'action éducative et l'égalité de tous les élèves : plus de 1 milliard d'euros y est consacré.

Dans le programme 230, l'action « Santé scolaire » bénéficie de 732 millions d'euros, en hausse de 20 %, pour des actions d'éducation à la santé et à la prévention - sexualité, alimentation, etc. Ces politiques, sur lesquelles certains souhaiteraient revenir, sont clé, et je salue l'engagement du Gouvernement en leur faveur.

Le programme de lutte contre le harcèlement à l'école (Phare) sera renforcé. Nous défendrons un amendement visant à abonder de 2 millions d'euros le dispositif 3018, numéro unique pour les élèves victimes de harcèlement et de violences numériques.

Je me réjouis de la création de 2 000 ETP d'AESH, alors que le nombre d'élèves en situation de handicap a progressé de 5,6 % entre 2023 et 2024. Nous avons encore des marges de progression en matière d'inclusion, mais nous avançons rapidement. La loi de 2022 visant à lutter contre la précarité des AESH a donné des résultats : ils sont 63 % à être en CDI, soit trois fois plus qu'en 2022. Quant à la loi de janvier 2024 sur l'accompagnement sur le temps méridien, il faudra veiller à sa bonne application.

Le programme 214, en légère augmentation, porte notamment les financements versés aux établissements publics nationaux administratifs participant à la mise en oeuvre de la politique éducative - dont les amendements du rapporteur spécial visent à restreindre encore plus le budget. Il faut au contraire s'appuyer sur ces opérateurs - j'ai d'ailleurs déposé un amendement visant à soutenir le réseau Canopé, acteur incontournable de la formation continue des enseignants. Sénatrice des Français de l'étranger, je sais que l'expertise de ces opérateurs dépasse nos frontières. Les crédits destinés à la formation des enseignants sont sous-consommés : mieux vaut les flécher correctement que les diminuer.

Ce budget témoigne d'un engagement fort en faveur de l'éducation sous toutes ses formes. (Marques d'impatience sur plusieurs travées, l'oratrice ayant dépassé son temps de parole.)

M. le président.  - Il faut conclure.

Mme Samantha Cazebonne.  - Sous réserve de l'adoption de nos amendements et de l'amendement visant à diviser par deux le nombre de postes supprimés, le RDPI votera ces crédits.

M. Ahmed Laouedj .  - Bien que ce budget 2025 soit marqué par l'austérité, je me réjouis que les crédits en faveur de l'éducation nationale augmentent. Je déplore toutefois les suppressions de postes : le système éducatif doit s'appuyer sur des ressources humaines suffisantes pour garantir un encadrement adéquat. La baisse démographique dans certaines zones ne justifie pas une réduction uniforme des moyens humains. L'État doit prendre en compte la réalité territoriale et les défis particuliers que rencontrent certains départements, comme la Seine-Saint-Denis.

Cette baisse démographique pourrait être utilisée comme un levier pour améliorer les conditions d'enseignement et la qualité du service public de l'éducation. Nous devons mieux répartir les ressources. Ainsi, une meilleure coordination entre enseignants du primaire et du secondaire pourrait fluidifier la transition entre le primaire et le collège, un moment clé souvent mal vécu.

Nous devons orienter les ressources vers les départements sinistrés, comme la Seine-Saint-Denis, afin d'assurer l'égalité des chances. Le budget de l'éducation nationale doit prendre en compte la réalité démographique mais aussi les inégalités sociales et territoriales.

Le nombre d'élèves en situation de handicap ne cesse d'augmenter, or nous manquons d'AESH. Je m'interroge donc sur cette logique de suppression. J'ai été interpellé sur le manque d'un infirmier scolaire dans un lycée de mon territoire - poste pourtant essentiel pour gérer les soins du quotidien mais aussi pour alerter sur les situations de grande précarité et de vulnérabilité sociale.

En réorganisant les ressources et en renforçant l'inclusion, nous pourrons améliorer les conditions d'apprentissage.

Autre sujet essentiel : le coût des fournitures scolaires, qui a augmenté de 23 % pour les élèves de primaire. L'inflation qui pèse sur les finances des ménages creuse les inégalités. Je présenterai un amendement instaurant la gratuité des fournitures scolaires pour tous.

Jules Ferry voulait « faire disparaître la dernière, la plus redoutable des inégalités qui viennent de la naissance, l'inégalité d'éducation ».

Il est temps d'appréhender l'école comme un investissement et non comme une dépense. Donnons à l'éducation la place qu'elle mérite !

Mme Annick Billon .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Je salue le travail rigoureux des rapporteurs.

Je me réjouis que le budget de l'enseignement scolaire demeure stable, malgré le contexte grave, entre contrainte budgétaire et baisse démographique, avec 75 000 élèves en moins à la rentrée 2025.

Sur le papier, la suppression de 4 000 postes d'enseignants est justifiée, mais la réalité du terrain n'est pas arithmétique. Les fermetures de classe dans les territoires ruraux risquent de s'accélérer. Maintenir ces postes, c'est améliorer l'encadrement des élèves et offrir de meilleures conditions d'apprentissage.

Les résultats de la France se dégradent au classement Pisa dans tous les domaines, malgré la volonté de vos prédécesseurs d'appuyer sur les savoirs fondamentaux. Un tiers des élèves entrant en sixième ont des difficultés à lire et à écrire. Nous défendrons un amendement pour abaisser le nombre de suppressions de postes à 2 000 ETP.

L'augmentation du nombre de postes d'AESH doit être relativisée, au regard du nombre de postes non pourvus et de notifications MDPH non respectées. Dans un rapport de 2024, la Cour des comptes s'interroge sur le caractère soutenable d'une telle hausse des effectifs d'AESH. Même si, grâce à la loi Vial, 63 % des AESH bénéficient d'un CDI, leur statut demeure précaire et peu attractif. En outre, les familles se heurtent à des lourdeurs administratives, notamment les conventions tripartites pour la prise en charge sur le temps méridien.

Les expérimentations comme la transformation des pôles inclusifs d'accompagnement localisés (Pial) en pôles d'appui à la scolarité (PAS) inquiètent. L'État deviendrait à la fois prescripteur et payeur.

L'an dernier, le Sénat avait voté 30 millions d'euros supplémentaires pour la santé scolaire ; le Gouvernement avait retenu 22 millions. Ces crédits ne seront pas reconduits, pourtant je doute que la médecine scolaire ait retrouvé la santé... Pour rappel, près de 50 % des postes de médecins sont vacants. Or la santé scolaire est avant tout un enjeu de santé publique, au même titre que les séances d'éducation à la sexualité, dont moins de 15 % des élèves bénéficient.

L'éducation à la sexualité, n'est pas une option, mais une obligation légale. Soumission chimique, agressions sexuelles, non-respect du consentement : prenons garde à la dictature de la pornographie ! (Mme Colombe Brossel applaudit.) Une génération informée sera une génération protégée.

La formation des enseignants demeure un angle mort. Le rapport que j'ai rédigé avec Max Brisson montre qu'en 2023, seuls 62,5 % des crédits ont été consommés. Le problème n'est pas le manque de moyens mais leur mauvaise allocation, et des formations inadaptées... Parmi nos recommandations : favoriser une confrontation précoce avec le métier d'enseignant, rendre effective l'obligation de formation continue inscrite dans la loi depuis 2019. Nous appelons le Gouvernement à s'en saisir.

Le budget de l'enseignement technique agricole est stable, à 1,73 milliard d'euros. Les effectifs sont en hausse constante depuis 2019. La voie scolaire accueille plus de 200 000 jeunes, sachant qu'entre 40 et 60 % des agriculteurs partiront à la retraite d'ici à 2030.

Plusieurs points de vigilance. Ce budget ne tient pas compte du coup de rabot supplémentaire annoncé par le Premier ministre. Selon la ministre de l'agriculture, l'éducation technique agricole serait concernée à hauteur de 18 millions d'euros. Or nombre d'établissements, y compris privés, sont en difficulté financière. S'ajoute le déficit des exploitations agricoles adossées à ces établissements.

Peut mieux faire, donc ! Suppressions de postes, défis organisationnels pour les AESH, soutien à la santé scolaire : il faudra un suivi rigoureux. L'enseignement technique agricole mérite d'être soutenu.

La loi d'orientation agricole (LOA), dont le Sénat débattra en janvier, devra être accompagnée d'un soutien budgétaire adéquat.

La dégradation des comptes publics oblige à faire mieux avec moins. Le groupe UC votera ces crédits, en responsabilité. Au Gouvernement d'en faire preuve également. L'enseignement scolaire a besoin de visibilité - or il aura eu quatre ministres différents en un an. La stabilité suppose de ne pas changer de ministre avec les saisons ! (Applaudissements sur les travées du groupe UC)

Mme Evelyne Corbière Naminzo .  - Madame la ministre, vous avez affirmé avoir trois priorités : élever le niveau, élever le niveau, élever le niveau. Pourtant, les grandes enquêtes internationales ne montrent aucune faiblesse singulière du niveau, qui est dans la moyenne des autres pays. En revanche, notre système est le plus discriminant socialement. Il ne répond plus à la promesse républicaine d'égalité. Votre priorité devrait donc être : une école égalitaire. Pour Mayotte et la Guyane, la promesse républicaine reste une fiction.

Ce PLF confirme la reconduction du « choc des savoirs », avec les groupes de besoins en 6e et en 5e, et les prépas lycées qui transforment le brevet en couperet et renforcent les inégalités en matière d'orientation.

Je me félicite que le Conseil d'État ait annulé les groupes de niveaux au collège. Les experts sont dans les classes, sur le terrain. Mais ils ne sont plus consultés sur les évolutions de l'école, depuis longtemps.

Selon le Conseil d'État, vos groupes de niveaux risquent d'accroître l'écart de niveau entre élèves. Pourtant, vous persistez dans cette politique libérale et renforcez la ségrégation sociale, en faisant porter la responsabilité d'une prétendue baisse de niveaux sur les élèves, les parents et les enseignants.

Vacances de postes et démissions attestent que vous ne réussissez qu'à décourager nos professeurs. Alors que 328 000 postes seront à pourvoir d'ici à 2030, le risque de désert d'éducation en France est réel.

Investissements insuffisants pour les lycées publics, orientation contrainte : vous mettez nos élèves face à un mur ! Votre considération pour les enseignants se traduit par l'absence de médecine de travail, les trois jours de carence et le gel de leurs salaires.

Double peine, donc, dans ce PLF : d'une part, 5 milliards d'euros d'économies imposées aux collectivités territoriales, chargées du bâti et du fonctionnement des écoles, collèges et lycées ; d'autre part, suppression de 4 000 postes d'enseignants, et partant, recrutement en hausse de contractuels. Preuve que la pénurie d'enseignants titulaires est organisée ! En vous contentant d'un bref entretien avant d'envoyer un novice devant une classe, vous dégradez le statut d'enseignant et abîmez la dimension universitaire de la formation.

Gratuité effective, revalorisation salariale inconditionnelle, recrutements massifs : telles seront nos propositions, issues du programme du Nouveau Front populaire. Je ne me fais pas d'illusions sur leur adoption ici, où l'on manie la seconde délibération pour écraser le débat parlementaire, mais elles sont partagées par la première coalition à l'Assemblée nationale et répondent aux attentes de l'écrasante majorité des personnels de l'école de la République. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE-K, SER et du GEST)

Mme Colombe Brossel .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du GEST) Lorsqu'ils ont découvert ce budget, les syndicats ont déposé, en intersyndicale, une alerte sociale pour le dénoncer. Ce n'est pas rien ! C'est le signe d'une inquiétude profonde de la communauté éducative.

Je pense aux personnels de direction dans les établissements et aux personnels administratifs des rectorats, qui doivent mettre en oeuvre une série de réformes sans queue ni tête, non concertées. Je pense aussi aux personnels de vie scolaire, aux médecins et infirmiers, aux assistants d'éducation (AED), qui contribuent à la qualité du climat scolaire mais souffrent du manque de moyens.

Si la lutte contre le harcèlement est une priorité, pourquoi un tel manque de moyens pour les personnels médico-sociaux ? Convaincus de leur rôle dans l'accompagnement des élèves, nous présenterons des amendements pour augmenter le nombre de postes et les moyens de la plateforme 3018. Alors que la santé mentale est érigée en priorité nationale, l'éducation nationale doit mieux accompagner les élèves.

L'école doit être inclusive à tous égards : nous défendrons des amendements pour faciliter l'accueil et l'inclusion des élèves allophones.

Madame la ministre, vous ajoutez l'indignité au cynisme en diminuant de 600 000 euros les fonds sociaux des établissements, qui aident les familles en difficulté pour les sorties scolaires ou les fournitures. Vous faites les poches des plus pauvres ! Nous nous y opposons.

Chacun répète en choeur que la réussite des élèves est une priorité. Mais au funeste « choc des savoirs » s'ajoute le chaos budgétaire et institutionnel. Nous nous opposerons à ce budget, car nous, socialistes, aimons l'école publique et croyons à sa force. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du GEST)

Mme Agnès Evren .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Il y a quatre ans, Samuel Paty était décapité devant son collège. Le procès qui s'ouvre est aussi celui de nos renoncements et des maux qui rongent l'éducation nationale : malaise des enseignants, ensauvagement de la société, entrisme islamiste.

Longtemps, la France a été fière de son école. Notre modèle a inspiré le monde. Pour plusieurs générations, l'école a été le moyen de s'élever socialement. C'est la promesse républicaine de l'émancipation et de l'ascenseur social - hélas resté bloqué au rez-de-chaussée. J'en ai bénéficié, comme élève d'un lycée de zone prioritaire du Val-de-Marne.

L'école perd le sens de sa mission : transmettre savoirs et connaissances. On lui demande de devenir la caisse de résonance des préoccupations sociétales et sociales du moment. Au lieu de resserrer les apprentissages, on les a décentrés. Cette perversion s'est accélérée.

Sur une dictée, les élèves de CM2 font neuf fautes d'orthographe de plus que ceux de 1987 : c'est 81 % de plus en trente-cinq ans.

Madame la ministre, vous l'avez martelé, il faut élever le niveau. Vous vous en donnez les moyens puisque l'éducation reste le premier budget de l'État, malgré l'urgence budgétaire.

Mais plusieurs questions demeurent.

On observe une désaffection du métier d'enseignant, autrefois « le plus beau du monde », selon Péguy, qui, comme Camus, a dû son destin d'écrivain à un instituteur. Il faut une réflexion globale sur la rémunération, mais aussi sur la formation et les carrières, sujet cher à Max Brisson notamment.

Il faut restaurer l'autorité des professeurs et leur capacité à faire cours sans s'autocensurer - n'est-ce pas, Olivier Paccaud ? -, sanctionner toutes les atteintes à la laïcité et rétablir l'ordre dans les classes et sur le chemin de l'école. Autant de chantiers qui nécessitent des choix politiques et budgétaires forts.

Quels projets d'ampleur pour élever le niveau ? Plusieurs mesures du choc des savoirs sont en suspens. Après la décision du Conseil d'État, quel sera l'avenir des groupes de besoins, qui ont déjà mobilisé 2 330 ETP et dont vous avez annoncé l'extension en 4e et 3e ?

J'ai déposé une proposition de loi pour le dépôt obligatoire des téléphones portables à l'entrée des établissements. Il y va de la santé de nos jeunes. Le ministre Alexandre Portier a dit vouloir généraliser cette interdiction dès la rentrée. Allez-vous soutenir les départements qui devront financer l'installation de casiers dédiés ?

Nous avons tous une obligation de résultat, pour améliorer les conditions de travail des enseignants et relever le niveau des élèves. Il y va de l'avenir de notre société ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Mme Anne Genetet, ministre de l'éducation nationale .  - Ma priorité se résume en un mot : élever. Élever le niveau, élever notre jeunesse, élever notre exigence en matière de respect dû aux professeurs et en matière de laïcité. Nous partageons tous ces objectifs, tout comme nous partageons ce constat : défendre l'école, c'est aussi défendre son budget.

Avec 1,2 million de personnels dévoués à la réussite de 12 millions d'élèves, l'école est le premier service public. L'éducation nationale est le premier employeur de France et reste le premier budget de la nation. C'est à l'école que nous pouvons briser les inégalités de destins, vaincre les assignations et renouer avec la promesse républicaine.

Depuis 2017, nous avons investi plus de 14 milliards d'euros supplémentaires dans l'éducation nationale. Son budget, qui s'élevait à 49 milliards d'euros en 2017, sera de 63 milliards en 2025. Aucun quinquennat, aucun septennat n'a vu une telle progression.

Ces investissements se traduisent par des progrès sociaux et éducatifs sur tout le territoire. Nous achevons le dédoublement des petites classes en zone prioritaire. À l'entrée en 6e, les élèves sont plus nombreux à être en avance en mathématiques, moins nombreux à être en retard en français.

Depuis 2022, la rémunération des professeurs a augmenté de 258 euros nets par mois en moyenne, soit 11 %, hors pacte enseignant et mesures de crise. Celle des assistants sociaux et infirmiers a progressé de 200 euros. Ce bien-être de tous les acteurs de l'école est fondamental. Je le dis comme ministre, et aussi comme médecin.

Le pacte enseignant, c'est deux millions d'heures pour pallier les absences de courte durée dans les collèges et les lycées, 1,8 million d'heures de « devoirs faits », 1,2 million d'heures de stages de réussite, 800 000 heures de plus pour la voie professionnelle, 300 000 heures de découverte des métiers, avec une rémunération attractive des professeurs volontaires. Le supprimer priverait les élèves de millions d'heures d'école dont ils ont tant besoin.

Même si le budget augmente, si le niveau s'élève, beaucoup reste à faire. Pour la reconnaissance des personnels, la confiance des parents et la réussite des élèves, il reste beaucoup de chantiers à ouvrir.

Regardons la réalité de ce PLF. Les écoles publiques compteront en moyenne 21 élèves par classe, un niveau qui n'a jamais été aussi bas. Le nombre d'heures hebdomadaires d'enseignement progresse. Le budget de l'école inclusive a plus que doublé depuis 2017, il atteint 4,6 milliards d'euros en 2025, avec le recrutement de 2 000 AESH, désormais deuxième métier du ministère.

La baisse démographique aurait conduit mécaniquement à supprimer 5 000 postes d'enseignants. Vous proposez des amendements sur ce sujet ; je suis ouverte à des évolutions, notamment pour tenir compte de l'impact sur les fermetures de classe en milieu rural.

M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial.  - Très bien !

Mme Anne Genetet, ministre.  - L'école est à la croisée des chemins. Deux voies s'offrent à nous : le renoncement ou le sursaut. Renoncer, c'est détricoter tout ce qui a été fait depuis 2017, sans rien proposer d'autre. Qui en paierait le prix ? Les élèves des zones prioritaires et des zones rurales, les lycéens professionnels.

L'autre voie, c'est celle du sursaut, de l'exigence, pour élever chaque jeune au maximum de ses capacités. Je lancerai ce chantier. L'école doit ouvrir tous les chemins, pour que chaque élève puisse choisir le sien. Quand l'école progresse, c'est toute la République qui s'élève !

J'ai présenté l'acte II du choc des savoirs, pour relancer l'ascenseur scolaire. Nous étendrons aux 4e et 3e la dynamique engagée en 6e et 5e. Rien ne me fera dévier de cet objectif. Se réjouir de la suppression des groupes de besoins, c'est ignorer que la décision du Conseil d'État portait sur la forme et non le fond, c'est remettre en question l'aide individualisée des plus fragiles, c'est ignorer que l'urgence de la baisse du niveau scolaire commande de prendre des décisions.

M. Max Brisson.  - Très bien ! Absolument !

Mme Anne Genetet, ministre.  - Ces décisions, je les assume : renforcer l'apprentissage des savoirs fondamentaux, donner plus d'autonomie aux chefs d'établissement et offrir à chaque élève un accompagnement sur mesure, ramener l'ordre et la tranquillité dans certains établissements difficiles.

En annonçant dès à présent les mesures de la rentrée 2025, j'entends offrir stabilité, continuité et visibilité aux équipes de terrain qui l'attendent. Déstabiliser notre école, c'est déstabiliser en cours d'année des milliers d'élèves qui ont besoin de soutien renforcé.

Je sais que nos débats seront vifs, car ils révéleront la réalité des choix à faire, et fervents, car nous partageons une passion pour l'école. Je forme le voeu qu'ensemble, nous saurons consolider ce budget, mais aussi le protéger. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Alexandre Portier, ministre délégué chargé de la réussite scolaire et de l'enseignement professionnel .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Ce budget, élaboré dans des conditions inédites, est forcément perfectible. C'est le sens du débat parlementaire.

La réussite scolaire est la première mission de l'école, qui doit assumer de valoriser l'effort, de cultiver le mérite et de soutenir les élèves qui se donnent du mal. Elle doit viser la réussite pour tous, sans renoncer à l'excellence. Ce budget traduit cette ambition.

Nous prenons à bras-le-corps la question des élèves en situation de handicap, avec 4,6 milliards d'euros prévus en 2025, un niveau inédit. Nous créons 2 000 emplois d'AESH -  soit 3 175 accompagnants en plus  - , ainsi que 500 emplois d'enseignants dédiés aux unités localisées pour l'inclusion scolaire (Ulis) et à l'inclusion des enfants présentant des troubles du neurodéveloppement (TND). Le fonds dédié à l'achat de matériel pédagogique adapté sera doté de 25 millions d'euros.

La loi Vial, dont je salue l'auteur, est indispensable. Nous travaillons à sa mise en oeuvre. (Mme Agnès Evren applaudit.)

Il faut aussi défendre l'égalité des chances dans la ruralité.

M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial.  - Très bien !

M. Alexandre Portier, ministre délégué.  - Il est hors de question que l'école rurale soit l'éternelle sacrifiée ! L'effort doit être équilibré. Ce budget est porteur d'avancées importantes pour maintenir l'école au milieu du village, avec notamment 1 million d'euros supplémentaires pour développer les territoires éducatifs ruraux (TER) et la création de 3 000 places supplémentaires dans les internats d'excellence ruraux, pour près de 40 millions d'euros.

La voie professionnelle scolarise un tiers de nos lycéens. Elle doit être une voie d'excellence, au coeur et non à la périphérie de notre système scolaire. Pour être souverains, pour répondre aux grands défis de demain, nous avons besoin d'un lycée professionnel fort.

C'est la seule filière à gagner des élèves : en septembre 2024 nous avons ouvert 380 classes et recruté 580 enseignants. Les équipes de ces lycées ont été les premières bénéficiaires du pacte, avec 3 500 euros supplémentaires annuels en moyenne. Quelque 370 millions d'euros seront consacrés à la gratification des périodes de formation en milieu professionnel (PFMP) et les dispositifs de lutte contre le décrochage et ceux qui favorisent l'insertion professionnelle seront poursuivis. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Mise au point au sujet d'un vote

Mme Annick Billon.  - Lors du scrutin public n°135, Christine Herzog et Jean-Marie Mizzon souhaitaient voter contre.

Acte en est donné.

Examen des crédits de la mission

Article 42 (État B)

M. le président.  - Amendement n°II-18 de M. Paccaud, au nom de la commission des finances.

M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial.  - C'est un marronnier... Depuis des années, les crédits de la formation sont sous-consommés : 414 millions d'euros en 2020, 478 en 2021, 658 en 2022, et même 1,1 milliard d'euros en 2023 ! Vous me rétorquerez que le sujet est technique, mais cela aboutit à une présentation insincère, que la commission des finances ne peut accepter. Nous proposons donc de minorer ce budget de 1 milliard d'euros.

Mme Anne Genetet, ministre.  - Il s'agit d'un quiproquo, de notre faute. Ce milliard d'euros semble sous-consommé, mais il est utilisé ailleurs. La rémunération des 20 000 professeurs stagiaires n'apparaît pas dans la ligne formation ; idem pour les contractuels. Nous remédierons à ce problème, mais nous vous demandons de nous faire confiance, car nous avons besoin de ces crédits : demande de retrait.

Mme Evelyne Corbière Naminzo.  - La formation continue des enseignants doit mieux répondre aux besoins des enseignants sur le terrain, au regard notamment des missions supplémentaires qui ont été assignées aux enseignants. Décréter que les enseignants sont capables d'assurer leur métier sans formation, cela n'a pas de sens.

Pour que les enseignants acceptent de suivre des formations, il faut prévoir des remplaçants, car lorsqu'un enseignant n'est pas là, on le traite d'absentéiste !

Mme Marie-Pierre Monier.  - En matière de formation continue, la logique descendante prévaut : c'est moins une réponse aux besoins exprimés, que le service après-vente des priorités politiques du moment !

Les contenus sont parfois identiques d'une année sur l'autre. Voilà pourquoi les enseignants ne veulent pas suivre ces formations. Pourtant les enjeux ne manquent pas : école inclusive, éducation sexuelle et affective, protection de l'enfance, etc. Les enseignants doivent aussi monter en compétences dans leur discipline.

Et oui, les stages imposés hors temps scolaire ont rendu ces formations moins attractives : nous sommes contre cette logique.

M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial.  - Je ne retirerai pas mon amendement. Nombre d'enseignants souhaiteraient être formés à l'accueil des élèves en situation de handicap, mais ces formations n'existent pas partout.

M. Cédric Vial.  - Mettons en regard les 10 millions d'euros qui manquent à la mise en oeuvre de ma proposition de loi et les 1,1 milliard d'euros de crédits non consommés...

Mme Anne Genetet, ministre.  - Au total, le budget pour la formation initiale et continue est de 2 milliards d'euros. Tout est perfectible, mais nous avons absolument besoin de ces crédits.

À la demande du groupe Les Républicains, l'amendement n°II-18 est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°136 :

Nombre de votants 344
Nombre de suffrages exprimés 344
Pour l'adoption 228
Contre 116

L'amendement n°II-18 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-478 rectifié de M. Canévet et alii.

M. Michel Canévet.  - La semaine dernière, nous avons évoqué la nécessité de réaliser des économies significatives. D'où notre proposition de donner un coup de rabot de 5 % sur les crédits de la mission, qui, comme les autres, doit faire des efforts. Charge au ministère de décider ensuite de la répartition de ces économies.

M. le président.  - Amendement identique n°II-590 rectifié du Gouvernement.

Mme Anne Genetet, ministre.  - Nous devons atteindre 5 % de déficit public en 2025. Cet amendement, qui traduit l'effort de mon ministère, porte sur la masse salariale et la réserve de précaution.

M. le président.  - Amendement n°II-477 rectifié de M. Canévet et alii.

M. Michel Canévet.  - Amendement de repli.

M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial.  - Sagesse sur les amendements identiques nosII-478 rectifié et II-590 rectifié.

Demande de retrait de l'amendement n°II-477 rectifié qui sera satisfait en cas d'adoption des deux précédents.

Mme Marie-Pierre Monier.  - Moins 24 millions d'euros pour le premier degré, ce sont 600 emplois supprimés : allez-vous le faire ? Moins 59 millions d'euros pour le second degré, ce sont 1 600 emplois supprimés : allez-vous le faire ? Moins 18 millions d'euros pour l'enseignement technique agricole : allez-vous le faire ?

Il n'y a pas d'argent magique qui dormirait dans les tiroirs de l'éducation nationale. Toutes ces coupes auront des conséquences sur l'éducation et le bien-être de nos élèves.

M. Bernard Fialaire.  - Cette diminution des crédits de l'enseignement technique agricole ne correspond pas à la décision prise en commission. (Mme Marie-Pierre Monier renchérit.) Je suis contre ce coup de rabot. (Applaudissements sur quelques travées du groupe SER)

Les amendements identiques nosII-478 rectifié et II-590 rectifié sont adoptés.

L'amendement n°II-477 rectifié n'a plus d'objet.

M. le président.  - Amendement n°II-19 de M. Paccaud, au nom de la commission des finances.

M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial.  - Cet amendement minore les crédits du réseau Canopé et majore ceux des maisons familiales rurales (MFR). Fin 2023, le réseau Canopé disposait d'un confortable fonds de roulement - 25 millions d'euros -, nous le réduisons de 20 millions d'euros.

Les MFR ont vu leur nombre d'élèves augmenter, d'où ces 12 millions d'euros supplémentaires.

M. le président.  - Amendement identique n°II-543 rectifié bis de Mme Billon et alii.

Mme Annick Billon.  - Nous avons bien vu, au cours de nos auditions, combien le réseau des MFR était important. Il a besoin de crédits supplémentaires pour prendre en charge 1 600 nouveaux élèves.

M. le président.  - Amendement n°II-143 de M. Durox et alii.

M. Aymeric Durox.  - Nous proposons une baisse de 17 millions d'euros. En dépit des engagements du Président de la République en 2022, les opérateurs prolifèrent. Ce sera aussi le sens de mes amendements suivants.

M. le président.  - Amendement n°II-323 rectifié de M. Chaize et alii.

Mme Micheline Jacques.  - Cet amendement propose 20 millions d'euros supplémentaires pour les MFR, au lieu de 12.

M. le président.  - Amendement identique n°II-428 rectifié de Mmes Havet et Cazebonne.

Mme Nadège Havet.  - Nous proposons nous aussi 20 millions d'euros supplémentaires pour les MFR : 8 millions d'euros pour les 1 600 nouveaux élèves ; 2 millions pour le coût formateurs ; 10 millions pour aligner le taux d'encadrement sur le reste de l'enseignement agricole.

L'amendement identique n°II-494 n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°II-464 de Mme Cazebonne.

Mme Samantha Cazebonne.  - Le réseau Canopé, ce sont 1 200 agents sur nos territoires, y compris le mien, qui forment vos agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles (Atsem), qui forment à l'inclusion.

Les amendements n°II-19 et II-543 rectifié bis vont supprimer 300 postes de contractuels, qui sont dans vos communes ; les maires comptent sur eux. À Verdun, le 22 novembre, le maire a inauguré l'atelier Canopé.

C'est l'inverse qu'il faut faire : augmenter la dotation du réseau Canopé, car nous avons besoin de formation continue, surtout lorsque l'on recrute autant d'enseignants contractuels !

M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial.  - Demande de retrait de tous les amendements qui ne sont pas identiques à celui de la commission, car ils seront satisfaits -  à l'exception de celui de Mme Cazebonne.

Madame Cazebonne, nous pensons tous du bien de Canopé. Mais ses agents ne sont pas dans nos communes, ils sont dans les villes-préfectures. Ils faisaient initialement de l'édition et se sont adaptés à de nouvelles missions, mais la formation des enseignants est avant tout dispensée dans les instituts nationaux supérieurs du professorat et de l'éducation (Inspé).

Notre proposition de minoration des crédits de 20 millions d'euros est liée aux 25 millions d'euros de fonds de roulement de Canopé : je ne les ai pas inventés !

Mme Anne Genetet, ministre.  - Monsieur le rapporteur spécial, vous souhaitez diminuer de près d'un quart la subvention de Canopé, dont les actions de formation sont complémentaires de celles de formation initiale des Inspé et de formation continue des écoles académiques, créées en 2022.

Nous avons besoin de mener une réflexion sur la formation continue (M. Olivier Paccaud renchérit), mais on ne peut ouvrir ce débat par un tel coup de rabot !

Un fonds de roulement réduit à 5 millions d'euros ne représenterait que dix jours de fonctionnement, alors que la norme prudentielle est de trente. Canopé fait déjà un effort, avec la suppression de 20 ETP.

Mme Marie-Pierre Monier.  - Eh oui !

Mme Anne Genetet, ministre.  - En outre, votre proposition conduira à une perte de ressources commerciales et réduira le nombre et la qualité des formations suivies par 140 000 enseignants l'an dernier.

Retrait, sinon avis défavorable.

Mme Samantha Cazebonne.  - En dix ans, la subvention de Canopé a été réduite de 10 millions d'euros.

Les ateliers Canopé sont implantés dans les territoires ruraux et dans les territoires ultramarins : en Guyane, ils vont former les enseignants en pirogue !

Mme Marie-Pierre Monier.  - Le PLF prévoit déjà une baisse de 3 millions d'euros pour Canopé. Lui retirer 20 millions, c'est énorme ! C'est un acteur essentiel de la formation continue, présent dans tous nos départements et dans tous nos territoires d'outre-mer.

Les agents ont besoin de formation : le réseau doit continuer à développer son offre. Nous ne voterons pas les amendements qui réduisent ses crédits.

M. Max Brisson.  - Je viens d'apprendre que Canopé était l'opérateur de la formation dans l'éducation nationale... Non, c'est avant tout un éditeur, que le rapporteur spécial encourage à développer ses ressources propres. La formation continue échoit avant tout aux inspecteurs de l'éducation nationale. Elle doit être effectuée en interne et non pas déléguée à une agence. Les professeurs attendent des formations très pratiques, d'échanges entre pairs, et des formations de très haut niveau, en lien avec l'université. Ne donnez pas à Canopé un rôle qu'il ne mérite pas. (M. Michel Canévet renchérit.)

Mme Colombe Brossel.  - Si c'était si simple, notre débat ne serait pas si vif. Inutile de s'énerver...

Nous soutenons le développement des maisons familiales rurales (MFR), mais ne prenons pas dans les poches de l'un parce que nous ne savons pas mettre dans les poches de l'autre !

Je pensais à ma grand-mère en nous écoutant : faire et défaire, c'est toujours travailler. Nous nous apprêtons à abonder de plusieurs centaines de millions d'euros la mission « Vie associative et jeunesse », au profit de l'agence du service civique dont la trésorerie a été asséchée par le Gouvernement... Nous ne sommes pas là pour gérer de petits équilibres budgétaires à la mords-moi-le-noeud !

Donnons les moyens à Canopé et aux MFR de remplir leurs missions.

M. Christophe Chaillou.  - Les contre-vérités fusent. Canopé, c'est d'abord la formation continue des enseignants ! (Protestations sur plusieurs travées du groupe Les Républicains ; M. Max Brisson le conteste avec véhémence.) Chaque année, vingt collèges du Loiret bénéficient de l'offre de Canopé -  240 000 enseignants dans toute la France.

Le réseau a fait des efforts de gestion très importants et conclu des partenariats. Monsieur le rapporteur spécial, l'effort que vous demandez n'est pas petit : 25 % de la subvention annuelle !

Comme l'a dit Colombe Brossel, opposer la formation continue aux MFR est une idée funeste. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

Mme Annick Billon.  - Lors de la discussion générale, plusieurs orateurs ont pointé les faiblesses de la formation continue. À l'inverse, le réseau des MFR fonctionne bien.

Au départ, 20 millions d'euros étaient demandés ; la copie a été revue à la baisse, à 12 millions, avec l'accord des MFR, qui comprennent très bien que tout le monde doit faire un effort.

Il faut revoir la formation des enseignants en profondeur. Nous y sommes tous très attachés, mais les enseignants ne s'y rendent pas, car elle n'est pas adaptée à leurs besoins.

Mme Laure Darcos.  - Je suis très partagée. Un tel coup de rabot, avec des conséquences pour les effectifs -  300 emplois pourraient disparaître  - , me choque. Mais je m'interroge aussi sur l'importance du fonds de roulement.

Monsieur Brisson, Canopé n'est plus seulement un éditeur, le réseau s'est concentré sur la formation. Je plaide comme Annick Billon pour une remise à plat totale de la formation.

Bien sûr, les MFR méritent aussi toute notre attention.

Je suis gênée de voter un tel coup de rabot, alors que les professeurs ont besoin de formation continue.

M. Bernard Fialaire.  - Comme Laure Darcos, je suis très mal à l'aise. Je souhaite que les MFR bénéficient de 12 millions d'euros supplémentaires. Mais amputer Canopé n'est pas un bon choix. Avec Christian Bruyen, nous avons mené une mission d'information sur l'intelligence artificielle et l'éducation. Nous comptons sur Canopé pour relever le défi : ne prenons pas encore plus de retard ! Il faut trouver un autre moyen de financer les MFR.

Mme Micheline Jacques.  - En tant qu'ancienne enseignante, j'abonde dans le sens de Max Brisson. La formation devrait s'adapter aux territoires. Or ce n'est pas le cas, notamment en Guyane.

Je retire l'amendement n°II-323 rectifié de Patrick Chaize au profit de l'amendement n°II-19 d'Olivier Paccaud.

L'amendement n°II-323 rectifié est retiré.

M. Aymeric Durox.  - Enseignant il y a peu, je n'ai jamais fait appel à une formation Canopé, mes collègues non plus. L'offre est en totale déconnexion avec les attentes du terrain. Les enseignants attendent des formations concrètes, directement applicables. La baisse de 25 % du budget du réseau sera indolore pour la plupart des enseignants. Prenons là où il y a du gras.

Mme Evelyne Corbière Naminzo.  - Je suis gênée qu'on oppose, une fois encore, le public et le privé. On supprime des crédits à un réseau public, certes perfectible, mais présent sur l'ensemble du territoire, pour renforcer l'enseignement privé.

S'il faut choisir entre le public et le privé, je sais où va ma priorité : pour une école de l'égalité des chances. Si on finance le privé, on est à côté de la plaque !

Disposer d'un réseau national, présent y compris outre-mer, est utile en cas d'événement grave -  crise du covid, attentats  -  : du jour au lendemain, les enseignants doivent réagir. J'étais enseignante : en un week-end, j'ai dû répondre à des questions d'élèves de CE1 sur le Bataclan. Il faut pouvoir compter sur un réseau national ! (M. Stéphane Piednoir s'exclame.)

À la demande du GEST, les amendements nosII-19 et II-543 rectifié bis sont mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°137 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 309
Pour l'adoption 193
Contre 116

Les amendements identiques n°sII-19 et II-543 rectifié bis sont adoptés.

Les amendements nosII-143, II-323 rectifié, II-428 rectifié et II-464 n'ont plus d'objet.

M. le président.  - Amendement n°II-144 de M. Durox et alii.

M. Aymeric Durox.  - Pour lutter contre la gabegie administrative et amoindrir le rôle des opérateurs, nous proposons de minorer les crédits de la mission de 6,4 millions d'euros, afin de réinternaliser le Centre national d'enseignement à distance (Cned) à terme.

M. le président.  - Amendement n°II-451 de M. Chantrel et du groupe SER.

M. Yan Chantrel.  - Dans certains pays -  Algérie, Iran, Niger, Turquie  - , le Cned est la seule solution de scolarisation en français. Or, depuis deux ans, pour accéder au Cned réglementé, vous devez avoir été scolarisé pendant au moins un an dans une classe homologuée par l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE). Nous proposons 6 millions d'euros pour mettre fin à cette restriction.

M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial.  - Le PLF 2025 minore les crédits du Cned de 6 millions d'euros : c'est de bonne politique. Avis défavorable aux deux amendements.

Mme Anne Genetet, ministre.  - Monsieur Durox, votre amendement reviendrait à supprimer le Cned. C'est pourtant un opérateur indispensable, qui accompagne 90 000 élèves chaque année, à l'étranger ou malades. C'est un acteur majeur de la continuité pédagogique, notamment via la plateforme Program'cours.

Il génère de surcroît 63 millions de ressources propres chaque année : ce n'est pas le moment de s'en priver.

Avis défavorable aux deux amendements.

Mme Mathilde Ollivier.  - Je voterai l'amendement de Yan Chantrel.

Oui, le Cned est important pour les jeunes Français établis hors de France. Madame la ministre, je m'attendais plutôt à un avis favorable sur cet amendement, car on sait que certains élèves sont sans solution, qu'ils soient à Bakou, à Téhéran, ou au fin fond du Tyrol.

Mme Samantha Cazebonne.  - Souhaitez-vous que les binationaux connaissent notre langue, nos valeurs et nos programmes ? Certains élèves à l'étranger n'ont pas d'école française près de chez eux ou tout simplement pas les moyens de se payer l'école française. Le Cned est alors la seule ressource.

Que fait-on de ces élèves ? Vous les privez de l'accès à notre culture. Le Cned est le seul moyen de transmettre nos valeurs françaises ! Je voterai l'amendement de mon collègue Chantrel.

L'amendement n°II-144 n'est pas adopté.

À la demande du groupe SER, l'amendement n°II-451 est mis aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici le résultat du scrutin n°138 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 343
Pour l'adoption 115
Contre 228

L'amendement n°II-451 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-20 de M. Paccaud, au nom de la commission des finances.

M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial.  - L'office national d'information sur l'enseignement et la formation (Onisep) fait doublon avec les régions, qui ont la compétence formation, comme l'a pointé un rapport de la Cour des comptes.

Au regard de ses 6 millions d'euros de fonds de roulement, je propose une baisse de ses crédits de 5 millions d'euros.

M. le président.  - Amendement n°II-145 de M. Durox et alii.

M. Aymeric Durox.  - Défendu.

M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial.  - Demande de retrait.

M. Alexandre Portier, ministre délégué.  - L'orientation est une priorité du Gouvernement. Nous voulons remettre à plat cette politique et avons engagé une concertation avec tous les acteurs. Amputer les moyens avant les conclusions de cette mission est prématuré. Avis défavorable aux deux amendements.

Mme Marie-Pierre Monier.  - L'amendement n°II-20 ampute le budget de l'Onisep d'un quart de ses crédits. Réforme du lycée, Parcoursup, développement de l'offre privée d'enseignement supérieur : ces enjeux sont complexes pour les élèves et les étudiants. Pérenniser une structure nationale pertinente comme l'Onisep est essentiel. Quelque 75 % des établissements scolaires s'appuient sur ses ressources. Nous voterons contre ces amendements.

M. Max Brisson.  - Les amendements du rapporteur spécial s'apparentent à des coups de rabot. Cela dit, compte tenu du contexte budgétaire actuel, il faut mettre fin à l'éparpillement des acteurs, sur la formation comme sur l'orientation. (M. Olivier Paccaud renchérit.)

Il est grand temps de mener une vraie réflexion sur l'orientation, car le décrochage découle d'une orientation mal bâtie.

M. Michel Canévet.  - Les régions se sont vu confier la compétence de l'orientation, mais, sur le terrain, on a parfois du mal à comprendre qui fait quoi. Pourquoi augmenter les moyens de l'État alors que la compétence revient aux régions ? Le rapporteur spécial a raison de soulever la question. Dans une République dont l'organisation est décentralisée, l'État ne peut pas continuer à vouloir tout faire. Il faut plus de cohérence et de complémentarité entre les acteurs publics.

M. Bernard Fialaire.  - Je soutiens également la philosophie de cet amendement. La région doit être l'opérateur unique en matière d'orientation.

J'irai même plus loin : il faut opérer la même clarification pour les compétences médico-sociales des départements, dont la médecine scolaire. Chacun doit remplir pleinement son rôle.

Mme Laure Darcos.  - Je voterai également l'amendement. L'Onisep ne remplit plus sa mission d'orientation comme elle le faisait à l'époque que nous avons connue - souvenez-vous de ses fameuses fiches. À la fin du collège, nombre d'orientations sont décidées vers des voies de garage, ce qui montre une déconnexion entre cet organisme -  et d'autres encore  - et les réalités. Recentrons la politique d'orientation au niveau régional.

L'amendement n°II-20 est adopté.

L'amendement n°II-145 n'a plus d'objet.

M. le président.  - Amendement n°II-450 de Mme Monier et du groupe SER.

Mme Marie-Pierre Monier.  - Le groupe SER était opposé à la création du Conseil d'évaluation de l'école (CEE) dans la loi pour une école de la confiance. Il se trouve que j'y siège : j'ai donc une bonne connaissance de ce qui s'y fait. Les campagnes d'évaluation sont chronophages pour les personnels évalués, pour des résultats peu probants. Les établissements ont peu de moyens pour rédiger leur projet et les moyens ne suivent pas. Bref, beaucoup d'efforts pour peu de choses... En outre, certains travaux sont redondants avec ceux de la direction de l'évaluation du ministère, qui fait un excellent travail. C'est pourquoi nous supprimons les crédits alloués à cette structure.

M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial.  - La question soulevée est tout à fait légitime. La pertinence de ce conseil d'évaluation interne se discute. Les processus sont en effet chronophages pour les écoles, alors que des inspections sont réalisées par ailleurs. Avis de sagesse, mais je pense que vous avez raison.

Mme Anne Genetet, ministre.  - Avis défavorable : nous avons besoin d'évaluer plus, et mieux.

Mme Evelyne Corbière Naminzo.  - Je voterai l'amendement. Le Parlement et le ministère n'ont pas besoin de décréter que des évaluations sont nécessaires. Sur le terrain, l'autoévaluation des enseignants et des élèves eux-mêmes est encouragée. Les équipes sont capables de porter un regard objectif sur leurs pratiques. N'engageons pas des crédits inutiles pour une action qui se fait d'elle-même !

M. Max Brisson.  - Je regrette, monsieur le rapporteur spécial, mais je suis plutôt de l'avis de la ministre. Ces outils d'évaluation et de dialogue sont utiles dans la perspective de l'autonomie que je prône pour les établissements - je comprends que cela puisse déplaire sur les travées de la gauche. L'évaluation est certes chronophage, mais elle est une contrepartie nécessaire à l'autonomie.

Mme Samantha Cazebonne.  - Je suivrai également le Gouvernement. Pour avoir été longtemps proviseure, je mesure la nécessité de cette évaluation, ainsi que de l'autoévaluation. Elles permettent d'apprendre collectivement à remettre en question certaines pratiques. Évaluer, ce n'est pas juger a priori, mais aider chacun à réfléchir.

M. Aymeric Durox.  - Je suis peut-être l'un des seuls présents à avoir subi en tant qu'enseignant un tel processus. J'ai rarement vu une telle usine à gaz ! Et je ne connais pas un enseignant qui ait trouvé cela utile. Je voterai l'amendement du rapporteur spécial.

L'amendement n°II-450 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-147 de M. Durox et alii.

M. Aymeric Durox.  - Connaissez-vous le Centre d'études et de recherches sur les qualifications (Céreq) ? Ce énième établissement public administratif emploie 120 agents et dispose même d'antennes à l'étranger. Faisons des économies en baissant ses crédits de 1,4 million d'euros.

M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial.  - Le budget du Céreq a déjà été un peu raboté par le Gouvernement. Avis défavorable.

Mme Anne Genetet, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°II-147 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-148 de M. Durox et alii.

M. Aymeric Durox.  - Dommage que tous nos amendements se heurtent à une opposition dogmatique. Celui-ci vise à minorer de 900 000 euros les crédits de France Éducation internationale, qui emploie 250 agents et dispose de locaux à La Réunion. Les économies, il faut bien les trouver quelque part ! J'espère au moins un avis de sagesse...

M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial.  - Je suis navré : c'est une demande de retrait.

Mme Anne Genetet, ministre.  - Avis défavorable.

M. Aymeric Durox.  - Je ne vois aucune raison de le retirer.

L'amendement n°II-148 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-554 rectifié de Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.

Mme Evelyne Corbière Naminzo.  - D'après une étude récente de l'Association des maires de France, le coût moyen d'un repas à la cantine a augmenté de 11,3 % et 60 % des communes font face à des impayés. Compte tenu des coupes dans les budgets locaux, il est à craindre que certaines communes n'augmentent les frais de cantine.

Il est essentiel d'aller vers la cantine gratuite. À La Réunion, un enfant sur deux vit dans un foyer pauvre ! Pendant la crise sanitaire, nous n'avons pas eu de second confinement, notamment car nous nous sommes aperçus que l'école assurait à nombre d'enfants au moins un repas quotidien. Aujourd'hui, nous assistons à une fracture de classe : certains élèves profitent de la récréation, quand d'autres sont obligés de faire la queue devant le bureau de la gestionnaire pour régler leur repas...

M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial.  - Cet amendement est très généreux, mais très coûteux : plus de 1 milliard d'euros. Il existe des aides pour certains élèves dans certaines communes - d'aucunes, comme Saint-Denis, ont fait le choix de la gratuité totale. La loi Égalim prévoit un euro par repas et par enfant et des aides spécifiques existent dans les écoles rurales. Enfin, votre amendement concerne seulement l'éducation prioritaire (ZEP), ce qui me gêne. Avis défavorable.

Mme Anne Genetet, ministre.  - En plus d'être extrêmement coûteux, cet amendement manque sa cible : le problème ne se pose pas que dans les établissements REP et REP+ et vous oubliez les lycéens. Avis défavorable.

Mme Annick Billon.  - L'amendement méconnaît les actions menées par les collectivités pour apporter des réponses au plus près du terrain, notamment à travers les centres communaux d'action sociale. Les problèmes ne se posent pas uniquement dans les établissements d'éducation prioritaire. Il faut agir sur les causes, car la gratuité ne résout rien à long terme. On le voit pour les services, notamment de transport, rendus gratuits : il y a toujours quelqu'un qui paie - et les collectivités territoriales ont des moyens de plus en plus contraints.

Mme Evelyne Corbière Naminzo.  - En effet, il faudrait viser plus large - en particulier, inclure les lycéens. La réalité, c'est que certaines familles optent pour l'externat dans une stratégie d'évitement, car la cantine est trop chère. Résultat : une partie des élèves ne mangent pas - mais vous ne les voyez pas dans vos tableaux. Comment parler de réussite scolaire quand des enfants ont le ventre vide ?

Mme Audrey Bélim.  - Je voterai l'amendement de ma collègue. Elle parle avec le coeur, parce que, à La Réunion, 46 % des enfants vivent dans une famille pauvre. Des communes ont instauré la cantine gratuite, un choix politique courageux. Pour réussir à l'école, il faut commencer par manger et dormir correctement !

L'amendement n°II-554 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-567 de Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.

M. Gérard Lahellec.  - Les assistants d'éducation (AED) sont le meilleur moyen de conquérir une école plus égalitaire. Or notre taux d'encadrement est particulièrement faible : un AED pour 115 élèves, bien loin des un pour 89 naguère promis par M. Attal. Le transfert de crédits proposé est nécessaire pour recruter et atteindre nos objectifs.

M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial.  - Oui, les AED - ceux qu'on appelle parfois les pions - jouent un rôle clé dans l'amélioration du climat scolaire. Leur nombre a déjà augmenté, de 61 000 à 67 000, en cinq ans. Certes, on peut vouloir « toujours plus », comme disait François de Closets. Mais le coût de votre amendement s'élève à 560 millions d'euros - pris, de surcroît, sur l'enseignement privé. Avis défavorable.

Mme Anne Genetet, ministre.  - Je rends hommage aux AED, qui encadrent et soutiennent nos élèves. Ils sont souvent leurs premiers interlocuteurs en cas de harcèlement ou de difficultés familiales. Leur rôle est essentiel pour la sérénité de nos établissements. C'est pourquoi j'ai décidé d'ouvrir 600 postes supplémentaires à la prochaine rentrée. Nous serons bien à un AED pour 89 élèves. Avis défavorable.

Mme Annick Billon.  - Tous ces amendements retirent des financements à l'enseignement privé sous contrat. Cessons de le prendre en permanence pour cible ! Je rappelle qu'il a davantage mis en oeuvre le pacte enseignant.

L'amendement n°II-567 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-439 de Mme Brossel et du groupe SER.

Mme Colombe Brossel.  - Je parlerai moi aussi des AED, mais de leur rémunération. Un assistant à temps plein perçoit entre 1 305 et 1 487 euros nets, ce qui ne favorise pas leur fidélisation dans les communautés éducatives. Certains vivent encore sur un vieux fantasme selon lequel les AED seraient tous des étudiants. Mais près de 75 % d'entre eux ne le sont pas, et leur âge moyen est de 30 ans ! Nous proposons d'augmenter leurs traitements de 150 euros mensuels.

M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial.  - Cet amendement est très généreux : avis défavorable pour des raisons budgétaires. Des améliorations sont intervenues, notamment depuis 2022 : revalorisation du point d'indice et prime de pouvoir d'achat. En outre, les primes perçues en REP et REP+ ne sont pas négligeables.

Mme Anne Genetet, ministre.  - J'entends votre demande, mais les AED ont déjà été revalorisés de 1 070 euros nets par an pour un temps complet. Ce n'est pas rien. En 2015, la gauche a créé la prime REP et REP+ pour les seuls professeurs ; nous l'avons étendue aux AED. Nous poursuivrons aussi la politique de CDIsation, qui va dans le sens de la fidélisation. Avis défavorable.

L'amendement n°II-439 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-488 rectifié de Mme de Marco et alii.

Mme Monique de Marco.  - Nous souhaitons créer un fonds destiné à la réouverture d'écoles publiques dans les déserts scolaires. Pas moins de 2 238 écoles ont été fermées depuis 2017. En quarante ans, nous avons perdu plus de 17 000 écoles ! Les territoires ruraux sont les premières victimes de cette destruction du service public éducatif.

Au mépris du principe d'égal d'accès aux services publics, on oblige de nombreux enfants à parcourir chaque jour des dizaines de kilomètres. Dans nombre de villages, l'école est le dernier service public de proximité. Sa présence est un facteur d'attractivité pour l'accueil de nouvelles familles.

M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial.  - Vous avez raison : le soutien à l'école rurale est un enjeu essentiel. Nous partageons tous cette préoccupation - MM. Grosperrin et Sautarel, notamment, y travaillent. C'est pourquoi je défendrai dans quelques instants un amendement tendant à réduire de moitié les suppressions de postes prévues, afin que la ruralité soit moins saignée. J'ajoute que, une fois de plus et par facilité, l'amendement est financé en prenant 500 millions d'euros à l'enseignement privé. Avis défavorable.

Mme Anne Genetet, ministre.  - Avis défavorable.

Mme Colombe Brossel.  - Je remercie Mme de Marco d'avoir déposé cet amendement, que nous voterons. On entend souvent sur les bancs de cette assemblée que le libre choix prévu par la loi Debré est essentiel, mais certains parents en sont privés parce qu'il n'y a tout simplement plus d'école publique dans leur commune !

M. Max Brisson.  - Vouloir retirer des fonds à l'enseignement privé est décidément le sport favori d'une partie de cet hémicycle...

Madame la ministre, on ne peut continuer à réduire le nombre d'écoles rurales au rythme actuel, avec une approche purement comptable. Les maires se projettent et planifient : face à eux, le ministère compte chaque élève et supprime des postes pour parfois un élève en moins. Cette approche est obsolète et ruine la confiance entre les maires et l'éducation nationale.

La commission de la culture, de l'éducation, de la communication et du sport proposera une nouvelle méthode, pour prendre de la hauteur. On ne peut faire comme si la baisse démographique n'existait pas, mais pas non plus comme si nos territoires n'avaient aucun besoin.

Mme Monique de Marco.  - Vous voterez donc l'amendement ?

L'amendement n°II-488 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-562 de Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.

Mme Evelyne Corbière Naminzo.  - Alors que les salaires de nos enseignants sont inférieurs à la moyenne européenne, aucune revalorisation n'est prévue dans ce PLF. Le métier d'enseignant continue de glisser inexorablement vers le déclassement.

Certes, les traitements ont été augmentés en début de carrière et les promotions vers la hors-classe sont plus nombreuses. Mais il faudrait faire beaucoup plus pour restaurer l'attractivité du métier, tant le retard accumulé est considérable.

On nous opposera que l'amendement ponctionne encore le secteur privé. Mais, sans opposer les deux systèmes, on voit bien sur le terrain que les conditions d'exercice des enseignants sont différentes. Ce n'est pas aux plus fragiles qu'il faut demander un effort.

M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial.  - Avis défavorable, hélas. Oui, il faudrait mieux payer nos enseignants, parmi les moins bien payés en Europe. Mais des efforts ont déjà été faits, notamment en début de carrière. Et nous sommes en France, pas au Qatar... Reste que nous manquerons de plus en plus de professeurs s'ils n'y trouvent pas leur compte financièrement.

Mme Anne Genetet, ministre.  - J'entends votre préoccupation, mais la rémunération des enseignants a été augmentée de près de 11 % depuis 2017 - au-delà, donc, des 10 % promis par le Président de la République.

En outre, votre amendement prévoit la suppression du pacte enseignant. À mon arrivée au ministère, j'ai demandé un bilan de ce dispositif : l'an passé, il a permis le remplacement de 7,6 millions d'heures d'enseignement ; à La Réunion, 6 000 enseignants s'y sont engagés ; le complément de rémunération associé est de l'ordre de 2 500 euros annuels. Et, contrairement à ce que vous soutenez, le pacte enseignant n'est pas facteur d'inégalités entre les femmes et les hommes : 69 % des adhérents sont des femmes.

Mme Evelyne Corbière Naminzo.  - Ce pacte ne fonctionne pas : à quoi bon mettre un professeur devant des élèves pour qu'ils aient des heures de sport ou de mathématiques, s'ils perdent des heures de français ? Il faut valoriser les enseignants, reconnaître la qualité de leur travail. S'ils ont été volontaires pour intégrer le dispositif, c'est parce qu'aujourd'hui, hélas, on travaille plus pour gagner moins. Allez dans les écoles et parlez aux parents qui ne comprennent pas pourquoi leurs enfants ont des heures de sport ou de langues mais pas de mathématiques. On est bien loin de la promesse républicaine !

L'amendement n°II-562 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-563 de Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.

Mme Evelyne Corbière Naminzo.  - Amendement de repli, qui affecte les crédits supplémentaires du pacte enseignant à la revalorisation des professeurs du second degré. Rappelons que le temps de travail effectif des enseignants inclut un important travail de l'ombre, consacré aux préparations et corrections. Augmenter leur temps de présence devant les élèves accroît considérablement leur charge de travail.

L'amendement n°II-563, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-149 de M. Durox et alii.

M. Aymeric Durox.  - Le Gouvernement veut supprimer 4 000 postes d'enseignants, dont 3 155 pour le seul premier degré : le service public de l'éducation aurait rarement connu pareille saignée ! L'intersyndicale a lancé une alerte préalable à une grève unitaire. D'après le Snes-FSU, 8 865 postes ont déjà été supprimés dans le second degré depuis 2022. L'argument démographique est fallacieux : la baisse de la population scolaire serait l'occasion de réduire le nombre d'élèves par classe, ce qui améliorerait les conditions d'étude des élèves et les conditions d'exercice des enseignants.

M. le président.  - Amendement n°II-546 rectifié de M. Pillefer et alii.

Mme Jocelyne Antoine.  - Le Gouvernement entend supprimer plus de 4 000 postes en s'appuyant sur un argument mathématique. La baisse démographique est indéniable, mais elle est une opportunité à saisir pour redresser le niveau des élèves en améliorant le taux d'encadrement.

Les écoles rurales sont particulièrement vulnérables face aux suppressions de postes. Une suppression de poste y entraîne souvent une fermeture de classe. Cette politique accentue le clivage entre territoires ruraux et urbains. Nous proposons donc d'annuler les suppressions de postes envisagées.

M. le président.  - Amendement n°II-224 de Mme de Marco et alii.

Mme Monique de Marco.  - La France est le pays de l'OCDE dont les classes du premier degré sont les plus chargées - 22,1 élèves, contre 19,3 en moyenne. Nous proposons le recrutement de 15 809 enseignants pour ramener ce taux à 19 élèves par classe.

M. le président.  - Amendement n°II-77 rectifié de Mme Ollivier et alii.

Mme Mathilde Ollivier.  - Cet amendement annule les 3 155 suppressions de postes dans le premier degré. Par cette décision, le Gouvernement affiche son mépris pour le corps enseignant. Vous vous abritez derrière la démographie, mais les fermetures d'établissement s'enchaînent et nos enseignants travaillent déjà 43 heures en moyenne par semaine. Pour élever le niveau des élèves, abandonnez le choc des savoirs et épargnez ces emplois !

M. le président.  - Amendement n°II-557 de Mme Corbière Naminzo et alii.

Mme Evelyne Corbière Naminzo.  - Le premier degré public paie le plus lourd tribut aux suppressions de postes prévues par le Gouvernement. Il faut, au contraire, de nouveaux moyens pour nos écoles : nous proposons donc un plan pluriannuel de recrutement dans le premier degré, pour 5 000 postes supplémentaires d'ici à 2027.

M. le président.  - Amendement n°II-21 de M. Paccaud, au nom de la commission des finances.

M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial.  - Nous en arrivons au point saillant de l'examen de cette mission.

La réduction du nombre de postes d'enseignant se justifie pour des raisons démographiques, mais elle pose un certain nombre de problèmes pédagogiques et territoriaux. Dans une logique toute sénatoriale de sagesse et de responsabilité (marques d'ironie à gauche), la commission des finances propose de ne supprimer que 2 000 postes sur les 4 000 prévus. Le ministre délégué, qui est philosophe, connaît la formule : in medio stat virtus... (M. Alexandre Portier sourit.)

Les 74 millions d'euros nécessaires sont pris sur le pacte enseignant, dont le Gouvernement augmente les moyens par ailleurs. Cela ne déséquilibrera pas ce dispositif, utile dans certains cas mais qui constitue une réponse seulement partielle. Si nous avons tant de difficultés à assurer les remplacements de courte durée, c'est parce que le vivier des remplaçants a fondu.

M. le président.  - Amendement identique n°II-150 rectifié de M. Grosperrin, au nom de la commission de la culture.

M. Jacques Grosperrin, rapporteur pour avis.  - Oui, le nombre d'élèves baisse, mais l'approche du Gouvernement est trop comptable. Nous ne l'acceptons pas. Quand on supprime une classe dans une grande ville, les enfants peuvent assez facilement changer d'établissement ; en zone rurale, ils sont parfois contraints de faire 30 ou 40 minutes de trajet, deux fois par jour. Cet amendement a été adopté par la commission de la culture à l'unanimité.

M. le président.  - Amendement identique n°II-289 de Mme Ollivier et alii.

Mme Mathilde Ollivier.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement identique n°II-544 rectifié bis de Mme Billon et du groupe UC.

Mme Annick Billon.  - Le groupe UC appuie la position pragmatique du rapporteur spécial. Près de 40 % des écoles se trouvent dans des territoires ruraux : une suppression de 4 000 postes aurait des conséquences graves sur le maillage des écoles.

M. le président.  - Amendement n°II-208 rectifié de M. Laouedj et alii.

M. Ahmed Laouedj.  - Quelque 3 155 suppressions de postes sont prévues dans le premier degré. Cette mesure a suscité une grande émotion dans les zones rurales et les quartiers prioritaires de la politique de la ville. Le rapporteur spécial propose de ramener cette baisse à 1 155 postes, mais cela nous semble insuffisant. Nous voulons revenir entièrement sur les suppressions prévues.

M. le président.  - Amendement n°II-431 de Mme Monier et du groupe SER.

Mme Marie-Pierre Monier.  - Depuis 2017, 9 437 postes ont déjà été supprimés, dont 7 000 dans le public. C'est grave ! La priorité doit être d'améliorer les taux d'encadrement et de remplacement : c'est un levier essentiel pour assurer la réussite scolaire et réduire les inégalités. Mes chers collègues, il est inutile d'appuyer les mobilisations locales si nous ne nous opposons pas, au moment de l'examen du PLF, aux suppressions de postes prévues ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

M. le président.  - Amendement n°II-223 de Mme de Marco et alii.

Mme Monique de Marco.  - Nous revenons sur la suppression de 8 865 postes d'enseignants dans le second degré depuis 2017.

M. le président.  - Amendement n°II-556 de Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.

M. Gérard Lahellec.  - Nous avons besoin d'un véritable plan pluriannuel de recrutement d'enseignants. Pour 2025, nous proposons 3 300 postes supplémentaires dans le second degré. L'article 40 nous oblige, à notre grand regret, à retirer les fonds nécessaires à d'autres actions.

M. le président.  - Amendement n°II-558 de Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.

Mme Evelyne Corbière Naminzo.  - Cet amendement vise à recruter 180 nouveaux enseignants dans le second degré public. En sept ans de présidence d'Emmanuel Macron, 8 865 postes ont été supprimés. D'après le Snes-FSU, il faudrait recruter 45 000 professeurs pour retrouver le taux d'encadrement de 2006. Mais le Gouvernement préfère suivre l'IGF, qui veut supprimer les postes par milliers. Il faut cesser de considérer l'école comme une variable d'ajustement budgétaire ! Nos effectifs par classe sont parmi les plus élevés en Europe, nos professeurs parmi les moins payés et leur temps de travail parmi les plus importants.

M. le président.  - Amendement n°II-214 de Mme de Marco et alii.

Mme Monique de Marco.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement identique n°II-432 de Mme Monier et du groupe SER.

M. Yan Chantrel.  - Cet amendement rétablit 180 postes dans le second degré. Depuis 2017, le Président de la République procède à une casse de l'école publique : 8 000 postes supprimés dans le secondaire, 10 000 en comptant le privé. Avec près de 26 élèves par classe, la France est parmi les pays de l'OCDE ayant le plus faible taux d'encadrement. Il n'est pourtant pas acquis que le nombre d'élèves ait baissé - les données se situent dans la marge d'erreur. Avec autant de postes en moins, comment assurer l'école inclusive, lutter contre le harcèlement ou mettre en place les fameux groupes de besoins ?

M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial.  - Je demande la priorité de vote sur l'amendement de la commission n°II-21 et les amendements identiques nosII-150 rectifié, II-289 et II-544 rectifié bis. Leur adoption satisferait en partie les autres, dont je sollicite le retrait.

La priorité, acceptée par le Gouvernement, est ordonnée.

Mme Anne Genetet, ministre.  - Monsieur Paccaud, je vous remercie pour l'attention que vous portez aux besoins de nos élèves. C'est le sens de l'acte II du choc des savoirs.

Vous souhaitez réaugmenter les effectifs de 2 000 postes pour le premier degré ? Je suis assez réservée, les inégalités se consolident le plus dans le second degré.

Mesdames Monier et Ollivier, la baisse du nombre d'élèves par classe se poursuit : il était de 24 en 2017, c'est 21 aujourd'hui. (Mme Marie-Pierre Monier proteste.)

Mme Laurence Rossignol.  - C'est une moyenne !

Mme Anne Genetet, ministre.  - Pourquoi vous opposez-vous aux groupes de besoins, si vous considérez que la diminution du nombre d'élèves par classe joue un rôle important ? (Mme Laurence Rossignol proteste.)

Sagesse sur les amendements identiques nosII-21, II-150 rectifié, II-289 et II-544 rectifié bis. Avis défavorable à tous les autres.

M. Jacques Grosperrin, rapporteur pour avis.  - J'espère que le Gouvernement lèvera le gage.

Mme Anne Genetet, ministre.  - Cela ne dépend pas de moi.

M. Bernard Delcros.  - Ces amendements reviennent sur la suppression de 4 000 postes. Je les voterai. Les gouvernements passent, mais la méthode en matière de carte scolaire, elle, ne change pas.

M. Max Brisson.  - Absolument !

M. Bernard Delcros.  - C'est toujours une approche comptable, descendante et linéaire. Il faut s'adapter à la réalité des territoires ! Vingt élèves dans une classe de CM2, ce n'est pas la même chose que vingt dans une classe rurale où les niveaux vont du CP au CM2...

Cette politique a des effets dévastateurs sur les territoires, tant en matière d'attractivité que d'offre éducative. Sans parler des conséquences politiques ! Il faut changer de méthode pour partir des besoins du terrain. Les élus sont responsables, ils peuvent comprendre les évolutions nécessaires. Il faut plus de concertation.

Élus, acteurs éducatifs, parents ont besoin de visibilité à trois ans sur la carte scolaire. Cette mention est inscrite noir sur blanc dans le plan France ruralités, appliquons-la !

Mme Colombe Brossel.  - Le groupe SER s'oppose à la suppression de 4 000 postes. Nous continuerons à réfuter l'argument démographique : quand les effectifs augmentaient dans les lycées, on supprimait aussi des postes ! En réalité, c'est l'argument budgétaire qui prévaut toujours.

Je suis d'accord : les enseignants et les élus souffrent d'un manque de visibilité, et les communautés éducatives ne sont pas assez associées aux décisions.

Nous voterons pour les amendements nosII-21 et II-150 rectifié de MM. Olivier Paccaud et Jacques Grosperrin et les identiques. Nous avons abouti à une position unanime au sein de la commission. Cela fera bouger les lignes, même si ce n'est pas suffisant.

Madame la ministre, nous sommes en train de danser au bord du cratère du volcan : en cas de 49.2 ou de 49.3, y aura-t-il des enseignants devant les enfants ? C'est là notre seule préoccupation ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; M. Jacques Fernique applaudit également.)

Mme Laurence Rossignol.  - Très bien !

M. Stéphane Sautarel.  - Mon intervention s'inscrira dans la même veine. L'approche ne doit pas être uniquement quantitative. En outre, il faut de la lisibilité. Les recommandations inscrites dans le plan France ruralités doivent enfin être mises en oeuvre.

J'avais déposé un amendement visant à assurer une visibilité sur les fermetures de classe sur trois ans, mais celui-ci a été déclaré irrecevable.

Il faut organiser le dialogue : la communauté éducative et les élus locaux sont responsables. Éducation, santé, sécurité : voilà les trois services publics prioritaires. En responsabilité, en cas de besoin impérieux pour redresser nos finances, il faut prioriser les suppressions de postes d'enseignants qui ne sont pas devant les élèves.

M. Michel Canévet.  - En 2009, il y a eu 830 000 naissances, 700 000 en 2023, 326 000 au premier semestre 2024 : la baisse démographique est considérable.

Tout se joue dans le primaire : je voterai les amendements visant à réduire le nombre de suppressions de postes.

La gestion des effectifs des enseignants se fait en silos. Certains, qui ont des fonctions de remplacement, restent à la maison, faute d'activité. Or les besoins sont nombreux dans les territoires. Il faut plus de souplesse et de complémentarités pour réduire le nombre d'enseignants sans classe et de classes sans enseignant.

M. Ahmed Laouedj.  - Nous voterons les amendements nosII-21 et II-150 rectifié d'Olivier Paccaud et Jacques Grosperrin.

M. Max Brisson.  - Ces sujets méritent un débat. Madame la ministre, la pédagogie est l'art de la répétition : voilà plusieurs années que nous soulignons le caractère obsolète de la carte scolaire. On nous renvoie aux études, mais, sur le terrain, rien ne change. Lorsqu'on dit aux directeurs académiques des services de l'éducation nationale (Dasen) que nous travaillons de manière pluriannuelle, ceux-ci nous répondent qu'ils appliquent les instructions.

Ne tombez pas dans le cratère dessiné par Mme Brossel ! Si vous poursuivez votre action avec votre ministre délégué (Mme Laurence Rossignol ironise.), il faut poursuivre ce chantier : le Sénat peut vous y aider. Le sujet est tout sauf consensuel, mais il faut remettre les choses à plat.

Mme Evelyne Corbière Naminzo.  - Nous suivrons la position de la commission, même si elle ne nous satisfait pas totalement.

L'amendement porte une attention particulière aux territoires ruraux. Quid des territoires ultramarins ? Certes, 2 000 postes supprimés, c'est mieux que 4 000, mais pensons à la Guyane et à Mayotte notamment. Le 20 novembre, à l'occasion de la journée internationale des droits de l'enfant, le cas des élèves mahorais et guyanais a été mis en avant. J'espère que les coupes qui s'annoncent ne toucheront pas davantage ces territoires.

À La Réunion, il y a de forts enjeux de formation, alors que les taux d'illettrisme et d'illectronisme ne diminuent pas et que le nombre d'élèves ni en emploi, ni en études, ni en formation (NEET) s'accroît. D'où des inégalités particulièrement criantes dans ces territoires.

À la demande du groupe Les Républicains, les amendements identiques nosII-21, II-150 rectifié, II-289 et II-544 rectifié bis sont mis aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici le résultat du scrutin n°139 :

Nombre de votants 340
Nombre de suffrages exprimés 340
Pour l'adoption 340
Contre    0

Les amendements identiques nosII-21, II-150 rectifié, II-289 et II-544 rectifié bis sont adoptés.

M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial.  - Très bien !

Les amendements nosII-149, II-546 rectifié, II-224 rectifié, II-77 rectifié, II-557, II-208 rectifié et II-431 n'ont plus d'objet.

Les amendements nosII-223, II-556, II-558, II-214 et II-432 ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°II-207 rectifié ter de M. Laouedj et alii.

M. Ahmed Laouedj.  - Nous voulons améliorer les conditions de travail des AESH, qui jouent un rôle crucial pour l'inclusion scolaire. Le manque d'attractivité du métier est un problème bien connu, notamment dû à la rémunération modeste, aux contrats précaires et à l'absence de prise en charge des frais annexes comme le transport. L'amendement s'inscrit dans la lignée de la proposition de loi Vial.

M. le président.  - Amendement n°II-78 rectifié de Mme Ollivier et alii.

Mme Mathilde Ollivier.  - Nous souhaitons mieux rémunérer les AESH, qui constituent le deuxième corps de métier de l'éducation nationale en termes d'effectifs. Nous saluons l'ajout de 2 000 ETP supplémentaires, même si cet effort est insuffisant.

Les AESH sont essentiels pour accueillir les enfants en situation de handicap. Or 96 % d'entre eux disent ne pas pouvoir vivre dignement. Nous ne pouvons regarder ailleurs ! Il faut une revalorisation catégorielle.

M. le président.  - Amendement n°II-438 de Mme Monier et du groupe SER.

Mme Marie-Pierre Monier.  - Malgré des efforts ces dernières années, les AESH continuent de gagner entre 800 et 1 000 euros par mois : cela revient à les placer dans une situation de précarité institutionnalisée. Plus de 90 % des AESH sont des femmes. Nous proposons une revalorisation de 220 euros par an, après leur CDIsation au bout de trois ans. Près de 80 % de ces personnels sont encore en CDD. Le turnover progressera si nous n'agissons pas !

M. le président.  - Amendement n°II-575 rectifié bis de M. Vial et alii.

M. Cédric Vial.  - Cet amendement garantit la bonne application de la loi : nous proposons d'abonder de 31 millions d'euros le programme « Vie de l'élève » pour assurer la prise en charge des élèves en situation de handicap durant la pause méridienne. Cette somme est issue des estimations des services du ministère sur une année pleine.

Nous ne voulons plus que l'on nous oppose l'argument budgétaire pour ne pas appliquer la loi. Car oui, la loi n'est pas appliquée ! Comme le dit Bruno Retailleau, quelqu'un qui n'applique pas la loi, c'est un délinquant. (On s'en amuse à gauche.) Foin des arguments budgétaires fallacieux ! Les 20 000 à 25 000 enfants qui ont besoin d'aide sur le temps méridien doivent être pris en charge.

Ce ne sont pas des recrutements supplémentaires : les AESH en poste demandent à faire plus d'heures. Environ 8 % des enfants ont besoin d'un accompagnement le midi. Il est temps de faire appliquer cette règle ! Vous n'êtes pas responsables, ni la nouvelle directrice générale de l'enseignement scolaire (DGESCO), en poste depuis le mois d'août ; ce sont vos prédécesseurs qui le sont. Mais si vous ne faites rien, vous le deviendrez !

M. le président.  - Amendement n°II-570 rectifié de Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.

Mme Evelyne Corbière Naminzo.  - C'est un amendement d'appel. La loi Vial impose à l'État de prendre en charge les enfants en situation de handicap durant le temps de midi. Pourtant, certains rectorats ne l'appliquent pas. L'application de la loi devient un véritable casse-tête face à la mauvaise volonté de certains services déconcentrés de l'État.

M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial.  - Les trois premiers amendements nosII-207 rectifié ter, II-78 rectifié et II-438 visent à améliorer la rémunération des AESH : retrait, malheureusement, pour des raisons budgétaires. Toutefois, mieux ces personnes seront payées, mieux ce sera. Des efforts ont été menés, notamment avec la CDIsation. En outre, le PLF 2025 prévoit une majoration de 60 millions d'euros pour améliorer leur situation. Il est injuste de faire le procès de l'inclusion scolaire aux gouvernements successifs : il y a plus de 135 000 AESH, 240 000 enfants en situation de handicap ont été inclus dans l'école. Le procès est cruel !

Je solliciterai l'avis du Gouvernement pour les amendements nosII-575 rectifié bis et II-570 rectifié, car la loi Vial n'est pas bien appliquée partout. Mais ce problème ne fait pas de Mme la ministre une délinquante... Il s'agit moins d'une question de moyens que d'une question d'organisation. La loi est compliquée à appliquer.

M. Max Brisson.  - On l'a compliquée !

M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial.  - Dans mon département, l'Oise, certains enfants sont pris en charge sans problème. Ce n'est pas le cas pour d'autres. Il faut trouver des solutions.

Mme Anne Genetet, ministre.  - Monsieur Vial, je vous remercie pour cette loi, votée à l'unanimité et qui répond à un réel besoin. Lors de mon audition, vous m'avez alertée sur certaines difficultés : en effet, il semble plus facile de faire compliqué que de faire simple...

J'ai demandé la rédaction d'un projet de décret qui simplifie la règle et clarifie le régime de responsabilité. Il sera publié dans les prochains jours et remplacera la convention actuelle, qui manque d'agilité.

Le budget 2025 couvrira les besoins de la pause méridienne. Je salue le travail difficile des AESH. Nous avons revalorisé leur salaire, modifié leur contrat et travaillons encore à améliorer leur situation.

J'ai la volonté politique d'avancer et m'y engage. Retrait, sinon avis défavorable à votre amendement n°II-575 rectifié bis.

Avis défavorable aux amendements nosII-207 rectifié ter, II-78 rectifié, II-438 et II-570 rectifié.

M. Cédric Vial.  - Merci, madame la ministre, pour vos propos. Je ne suis pas sûr qu'un décret soit nécessaire : nous avons fonctionné sans décret entre 2005 et 2022. Dont acte, toutefois !

Monsieur le rapporteur spécial, certaines situations sont difficiles : on ne réglera pas tous les problèmes. Les contrats prendront en compte la volonté de l'agent, selon que ce dernier souhaite travailler ou non durant la pause méridienne. C'est un sujet majeur, ce n'est pas pour rien qu'il a fait l'unanimité au Sénat et à l'Assemblée nationale !

Le système est devenu un casse-tête pour les collectivités territoriales, alors qu'on l'avait conçu pour leur simplifier la vie. Je maintiens mon amendement, pour que le sujet avance d'ici à la CMP.

Il faudra traiter le sujet de l'organisation de l'école inclusive, qui représente 4,6 milliards d'euros ! Le sujet de la compensation humaine est essentiel.

Les amendement nosI-207 rectifié bis, II-78 rectifié et II-438 ne sont pas adoptés.

M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial.  - Je le regrette, mais avis défavorable. Ce n'est pas une question financière, mais organisationnelle. Le montant n'est pas neutre : 31 millions d'euros.

M. Max Brisson.  - Je n'aime pas m'opposer au rapporteur spécial de la commission des finances... Mais la complexification introduite par une circulaire de huit pages de la DGESCO avait des motivations financières : on ne voulait pas que la loi soit mise en oeuvre ! Je voterai l'amendement de M. Vial.

L'amendement n°II-575 rectifié bis est adopté.

L'amendement n°II-570 rectifié n'a plus d'objet.

M. le président.  - Il reste 55 amendements à examiner sur cette mission. Conformément à l'organisation de nos travaux, leur examen est reporté au samedi 7 décembre.

La séance est suspendue à 13 h 35.

Présidence de Mme Anne Chain-Larché, vice-présidente

La séance est reprise à 15 h 05.