Financement de la sécurité sociale pour 2025 (Suite)

Discussion des articles de la deuxième partie (Suite)

Après l'article 7

M. le président.  - Amendement n°575 rectifié de Mme Le Houerou et alii.

Mme Annie Le Houerou.  - Toujours pour proposer des recettes à notre chère sécurité sociale, et dans l'attente d'une loi Grand Âge, cet amendement assujettit à la contribution de solidarité à l'autonomie (CSA) des revenus qui en sont aujourd'hui exonérés, notamment les sommes allouées au salarié au titre de l'intéressement et de la participation.

Il s'agit d'une recommandation du rapport Vachey, qui rapporterait 600 millions d'euros à la branche autonomie.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale.  - Ces derniers temps, le régime des travailleurs indépendants a subi beaucoup de changements, tant sur son assiette que sur ses taux.

Contrairement à un salarié classique, le travailleur indépendant supporte seul la charge d'employeur comme de salarié. C'est ce qui justifie l'existence de taux spécifiques.

Or la CSA est à la charge unique des employeurs. Il n'est pas souhaitable d'alourdir les cotisations des travailleurs indépendants. Parce qu'ils cotisent moins, ces derniers bénéficient en contrepartie d'une moins bonne couverture sociale.

Le rapport Vachey appelle à une réponse d'ensemble et non à des mesures isolées. (Mme Annie Le Houerou acquiesce.) Avis défavorable.

M. Laurent Saint-Martin, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°575 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°754 rectifié de Mme Conconne et alii.

Mme Monique Lubin.  - Cet amendement crée une contribution de 1 % assise sur les revenus de capitaux mobiliers pour financer la branche autonomie. Celle-ci doit être dotée de financements propres.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale.  - La création d'une contribution sur les dividendes serait une menace pour l'attractivité de la place financière française, alors que les plans de sauvegarde pour l'emploi se multiplient chez les fleurons de notre industrie.

Cette disposition irait à rebours du rapprochement de la fiscalité européenne sur l'actionnariat. La contribution de solidarité par le travail dégage le même rendement et semble plus souhaitable. Avis défavorable.

M. Laurent Saint-Martin, ministre.  - Tout ne passe pas par une hausse de la fiscalité. Le débat des recettes n'est pas tabou, mais prenons garde aux effets négatifs de telles mesures. Avis défavorable.

L'amendement n°754 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°616 rectifié de Mme Pantel et alii.

Mme Sophie Briante Guillemont.  - La loi du 7 août 2020 a créé la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA). Il semble juste de mobiliser les transmissions de patrimoine les plus importantes pour la financer. Cette contribution ne s'appliquera qu'aux successions et donations dont l'actif net taxable dépasse 150 000 euros ; son taux a été fixé à 1 % sur l'excédent au-delà de ce seuil.

M. le président.  - Amendement n°831 rectifié de Mme Poncet Monge et alii.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Cet amendement crée une contribution autonomie de 1 % sur les successions. Les rendements de la taxation sont très faibles, car seule une minorité de successions est concernée. Ainsi, les droits de succession n'ont rapporté que 12,6 milliards d'euros en 2020.

Cette proposition n'est pas nouvelle. Une réforme en profondeur de la taxation de l'héritage était déjà suggérée par le CAE en 2021. L'OCDE plaide aussi pour des impôts sur les successions et donations.

Le rapport Vachey estimait qu'un prélèvement obligatoire sur les successions aurait un rendement de 500 millions d'euros.

Ce nouveau financement représente une mesurette en matière de redistribution du patrimoine. Il permettrait toutefois de faire face aux besoins financiers de la perte d'autonomie. Il faut davantage taxer les successions.

Mme Nathalie Goulet.  - Non, non, non !

M. Laurent Burgoa.  - Arrêtez de taxer !

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale.  - C'est non pas une mesurette, mais une mesure d'ampleur ! Cela mériterait une étude d'impact approfondie dans le cadre d'un projet de loi.

De telles taxes remettraient en cause les efforts fournis en faveur de la solidarité intergénérationnelle aux bénéfices des plus jeunes.

Avis défavorable.

M. Laurent Saint-Martin, ministre.  - Cela représente 20 milliards d'euros ! J'ai vu plus modéré comme mesurette ! C'est une taxation très lourde sur le patrimoine ; les Français n'en veulent pas.

Le Gouvernement assume un budget prévoyant des prélèvements exceptionnels et temporaires, mais certainement pas de cette façon.

Avis défavorable.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Je parlais de mesurette pour la redistribution des patrimoines. Lisez les livres de Thomas Piketty sur la croissance des inégalités patrimoniales. Notre proposition est très ciblée. Le CAE et l'OCDE nous invitent à mieux taxer le patrimoine.

Le rendement de l'impôt, au-delà de son taux formel, est absolument déplorable par rapport aux richesses patrimoniales.

L'amendement n°616 rectifié n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°831 rectifié.

M. le président.  - Amendement n°948 de Mme Apourceau-Poly et du groupe CRCE-K.

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - Cet amendement crée une journée de solidarité des dividendes (on s'en amuse à gauche) en faveur de la branche autonomie, et en particulier la prise en charge à 100 % des fauteuils roulants.

Nous proposons une contribution modique de 2 % sur les dividendes distribués aux actionnaires.

La majorité sénatoriale souhaite faire travailler gratuitement les salariés sept heures par an. Nous, nous mettons les actionnaires à contribution.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale.  - Avis défavorable. (On s'en émeut à gauche.)

M. Laurent Saint-Martin, ministre.  - Même avis pour les mêmes raisons. (Sourires)

L'amendement n°948 n'est pas adopté.

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - Pourtant, cela rapporte de l'argent !

M. le président.  - Amendement n°940 de Mme Apourceau-Poly et du groupe CRCE-K.

Mme Silvana Silvani.  - Nous voulons créer de nouvelles recettes en mettant à contribution les revenus financiers des entreprises. Mettre le capital à contribution n'est pas plus incongru que de fiscaliser la TVA.

Nous modulons le taux de cotisation en fonction des choix de répartition des richesses des entreprises, pour encourager la gestion vertueuse d'entreprises émancipées de la finance et pourvoyeuses d'emplois.

Notre amendement dégagerait 60 milliards d'euros de recettes nouvelles, tout en revenant sur l'étatisation de la sécurité sociale.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale.  - La recette est importante. Ce n'est pas une mesurette ! C'est une charge fiscale énorme pour nos entreprises, pourtant déjà les plus taxées d'Europe.

Nous proposons un choix différent, alors que les plans sociaux se multiplient. Avis défavorable.

M. Laurent Saint-Martin, ministre.  - Même avis.

Mme Silvana Silvani.  - Nous ne traiterions pas toutes les entreprises de la même façon : nous ne sanctionnerions pas les entreprises vertueuses en matière d'emploi et de répartition des richesses, mais bien celles qui ne respectent pas les règles.

L'amendement n°940 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°649 rectifié de M. Fichet et du groupe SER.

M. Jean-Luc Fichet.  - Cet amendement instaure une taxe sur les superprofits réalisés par les Ehpad privés à but lucratif. Il s'inspire de ma proposition de loi, malheureusement rejetée par le Sénat le 17 octobre dernier.

Au-delà d'Orpea et des dénonciations de Victor Castanet, nous constatons une montée en puissance des groupes privés : le nombre de places en Ehpad privés à but lucratif a augmenté de 560 % entre 1986 et 2015 ! Cette financiarisation se développe sous les yeux des pouvoirs publics, souvent pris de court.

Les fondateurs d'Orpea détiennent un patrimoine de plus d'un milliard d'euros. Pourtant, le financement des Ehpad est largement public -  40 % des revenus des Ehpad privés lucratifs.

Il faut redistribuer ces superprofits en prévoyant une contribution additionnelle affectée à la CNSA. On pourrait utiliser cet argent pour assurer une prise en charge plus digne de nos aînés.

M. le président.  - Amendement n°753 rectifié de Mme Conconne et alii.

Mme Marion Canalès.  - Cet amendement d'appel crée une contribution additionnelle sur les Ehpad privés à but lucratif. Il faut de l'argent pour nos aînés, or il y en a dans ce secteur.

M. le président.  - Amendement n°957 rectifié de Mme Apourceau-Poly et le groupe CRCE-K.

Mme Céline Brulin.  - Nous avions identifié le problème originel de la branche autonomie : l'absence de cotisations. Celle-ci est aujourd'hui financée à 88 % par la CSG. Nous proposons de doubler la CSA payée par les entreprises. C'est plus viable et plus juste que de faire contribuer les salariés par du travail gratuit.

Oui, madame la rapporteure générale, la situation de certaines entreprises est compliquée : les plus petites d'entre elles, celles qui remboursent leur prêt garanti par l'État (PGE) et qui rencontrent des difficultés. Mais ce n'est pas le cas pour toutes. Nous devons mettre à contribution les entreprises en bonne santé, propriétés de fonds financiers qui veulent accroître leurs marges.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale.  - L'amendement n° 649 rectifié reprend la proposition de loi de Jean-Luc Fichet, que le Sénat a rejetée il y a quelques semaines. Je suis tentée de croire que notre assemblée n'a pas changé d'avis depuis.

Un tel alourdissement de la fiscalité ferait peser un risque majeur de désinvestissement dans le secteur des Ehpad privés lucratifs. La dénonciation de M. Castanet était légitime. Je ne mâcherai pas mes mots : c'est faire de l'argent sur le dos des anciens.

Mais tout le secteur des Ehpad commerciaux a été touché, jusqu'aux résidents et à leurs familles. Certes, des établissements se comportaient mal, mais l'opprobre a été jeté sur tous.

Il faut nuancer le tableau. Les Ehpad publics ont aussi leurs limites. Il faut trouver un équilibre entre tous ces acteurs dont nous avons besoin.

Avis défavorable à l'amendement n°649 rectifié.

Quant à l'amendement n°753 rectifié, je renvoie au rapport de notre commission sur ce point, qui jugeait non pertinent un alourdissement de la fiscalité sur ces structures.

Enfin, l'amendement n°957 rectifié plaide pour d'autres sources de financement que celles qui sont utilisées actuellement, mais nous formulerons dans quelques minutes une autre proposition. Avis défavorable.

M. Laurent Saint-Martin, ministre.  - Même avis. Vous pointez un problème réel, mais vous proposez de très mauvaises solutions ! Un alourdissement de la fiscalité pourrait avoir deux conséquences : tout d'abord, une baisse d'investissements du privé lucratif. Or nous avons besoin de l'ensemble des acteurs, car nous manquons de places. Ensuite, les Français paieraient plus cher si l'on suivait vos solutions.

Accroître la fiscalité est une fausse bonne idée.

Mme Monique Lubin.  - Vous trouverez toutes sortes de raisons pour expliquer pourquoi il ne faut pas solliciter les grands groupes lucratifs. Mais c'est bien la puissance publique qui paie le soin et la dépendance au sein des Ehpad. La partie hôtelière reste à la charge du client. C'est sur elle que les grands groupes créent des fortunes considérables.

Je ne suis pas contre les entreprises. Mais on ne peut décemment laisser des fortunes se constituer sans mettre à contribution ces entreprises ! Ce n'est peut-être pas la bonne solution, mais peut-on consentir à travailler sur le sujet ?

La plupart des Français ne pourront pas se payer une place en Ehpad. Monsieur le ministre, vous dites que les prix augmenteront. Mais c'est déjà fait ! Les prix sont astronomiques dans ces structures.

Nous devons nous attaquer à ce problème. (M. Alain Milon marque son approbation.)

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Le problème du taux d'occupation a touché tous les Ehpad : cela n'a rien à voir avec la fiscalité, mais tout à voir avec un modèle à bout de souffle.

Orpea - et c'est pareil pour les crèches - a financé son développement international grâce à la solvabilisation que lui a apportée la sécurité sociale.

Ces structures croissent par les profits réalisés par les premiers Ehpad ouverts, mais aussi par l'endettement, la Caisse des dépôts et consignations leur servant même de levier !

Quand on fait de telles fortunes, vous ne pourrez pas me dire que c'est raisonnable ! Surtout si la sécurité sociale est la base de leur profitabilité.

M. Jean-Luc Fichet.  - En ces journées de congrès des maires, je suggère que vous alliez dans les couloirs pour rencontrer ceux d'entre eux qui sont aussi gestionnaires d'Ehpad publics. Expliquez-leur qu'Orpea fait partie des 500 groupes les plus riches, alors qu'eux n'ont pas un euro de plus pour mieux gérer les Ehpad dont ils ont la charge.

L'ARS attribue des financements aux établissements pour 100 postes. Mais seuls 80 sont réellement occupés. Comme il n'y a pas de contrôle en aval, les 20 postes finissent par disparaître, mais les crédits demeurent et contribuent aux superprofits réalisés par ces grands groupes.

Et vous dites que nos propositions les décourageraient d'investir ? Pas du tout, puisqu'ils s'orientent vers les crèches, désormais !

Mme Anne Souyris.  - Le rapport d'information que j'ai rédigé avec Chantal Deseyne et Solanges Nadille montre que les Ehpad privés lucratifs n'ont pas le même cahier des charges que le public ou le privé non lucratif. Résultat : le secteur privé accueille des gens plus riches, moins malades ; les besoins en personnel sont moins importants.

On donne de l'argent à des actionnaires ! Si on le versait à des Ehpad privés non lucratifs, on le dépenserait mieux. Car c'est aussi l'argent de la maltraitance !

Mauvaise gestion, maltraitance institutionnelle : la situation est grave à plus d'un titre.

Donner de l'argent à des actionnaires ne crée pas de places en Ehpad et ne résout aucun problème.

M. Xavier Iacovelli.  - Les scandales des Ehpad et des crèches nous obligent à adopter de nouvelles règles, mais qui dit régulation ne dit pas forcément taxation. Il faut plus de contrôle, face aux dérives.

Il faut des cahiers des charges pour mieux contrôler l'utilisation de l'argent public, plutôt que de créer une nouvelle taxe qui se répercutera sur les prix payés par les résidents. (Exclamations sur quelques travées du groupe SER)

Il y a un problème, nous devons trouver des solutions rapidement : les Ehpad publics sont déficitaires, les Ehpad privés font du profit grâce au financement public. Mais, par pitié, pas de taxe supplémentaire !

Mme Émilienne Poumirol.  - Sur les pauvres entreprises !

Mme Chantal Deseyne.  - Comme vous, je dénonce les abus des Ehpad lucratifs, mais nous avons besoin de ces places d'Ehpad privés, le secteur public et le privé non lucratif ne pouvant pas en proposer suffisamment.

Certes, il faut mieux encadrer, mais ne généralisons pas à partir des abus qui ont pu être constatés. (M. Laurent Burgoa et Mme Frédérique Puissat applaudissent.)

M. Michel Canévet.  - La taxation des entreprises n'est pas la meilleure solution pour développer l'économie. Nous avons des défis à relever, à commencer par le vieillissement de la population. L'action publique seule ne suffira pas. Heureusement que des acteurs privés se sont organisés pour assurer l'accueil de nos anciens, en complément de l'action publique. Il y a aussi de la maltraitance dans les établissements publics !

Les usagers ne sont pas toujours pris en charge comme il le faudrait.

Mme Annie Le Houerou.  - Ils manquent de moyens !

M. Michel Canévet.  - J'ai entendu citer Orpea, mais qui est son premier actionnaire ? La Caisse des dépôts et consignations...

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Je l'ai dit !

M. Michel Canévet.  - ... sous le contrôle du Parlement !

Son deuxième actionnaire ? La MAIF, organisme mutualiste !

Faisons en sorte que les investisseurs répondent aux besoins de la population, pour développer l'économie. (Mme Frédérique Puissat applaudit.)

Mme Monique Lubin.  - Avec des tarifs à 4 000 euros par mois ?

M. Daniel Chasseing.  - Ne mélangeons pas tout. Des contrôles ont montré des cas de maltraitance dans des établissements privés. Les établissements privés à but non lucratif représentent 90 ou 95 % de l'offre dans les départements ruraux, et tout se passe bien. J'en profite pour saluer le travail des employés. Mais les effectifs sont trop peu nombreux pour faire face au vieillissement de la population.

Nous avons besoin d'investisseurs pour créer des emplois, qui généreront des cotisations, lesquelles financeront les retraites.

Mme Céline Brulin.  - On prête un réflexe pavlovien aux parlementaires de gauche que nous sommes : la taxation. (On le confirme à droite.) Vous faites erreur !

M. Laurent Saint-Martin, ministre.  - C'est quand même bien documenté...

Mme Céline Brulin.  - Le personnel des Ehpad agit par vocation - et fait au mieux. (M. Michel Canévet renchérit.)

Sans ouvrir un débat sémantique, « lucratif » signifie « qui apporte des gains, des bénéfices, des profits ». Pas de problème si cet argent est réinvesti pour améliorer les conditions d'accueil des résidents.

Nous ne mettons pas seulement des scandales en avant. Nous dénonçons aussi une logique. Allez sur internet et tapez « investissement en Ehpad » : les taux de rendement laissent rêveur. Prendre soin de nos anciens est-il réellement compatible avec le fait de faire de l'argent pour de l'argent ?

Pas moins de 66 % des Ehpad et 85 % des Ehpad publics sont en déficit. N'est-il pas raisonnable de chercher des nouveaux moyens pour y remédier ?

L'amendement n°649 rectifié n'est pas adopté, non plus que les amendements nos753 rectifié et 957 rectifié.

M. le président.  - Amendement n°682 rectifié de Mme Canalès et du groupe SER.

Mme Marion Canalès.  - Cet amendement vise à limiter les vocations lucratives démesurées des établissements accueillant des publics fragiles, tels que les Ehpad ou les crèches.

Quatre mastodontes des crèches privées sont financés par des fonds de pension américains. Les salariés du groupe People & Baby n'ont pas été payés en octobre dernier ; des problèmes dans l'accueil des enfants ont aussi été constatés. On ne parle pas de groupes privés locaux qui accompagnent les territoires !

Des collectivités passent des délégations de service public avec ces groupes, qui ne recherchent que le profit, sans s'attacher à la qualité d'accueil des enfants et de ceux qui les encadrent.

Thomas Cazenave, ici même, avait dit qu'il fallait « porter le fer sur la régulation » et non « recourir à une nouvelle taxe ». Depuis, rien !

Il faut trouver des solutions. C'est l'objet de notre amendement : non taxer pour taxer, mais réguler pour un développement plus harmonieux.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale.  - J'aimerais trouver des philanthropes, ce serait l'idéal...

Le privé à but lucratif doit prendre sa part pour faire face au manque de place, mais avec une surveillance accrue.

Vous proposez d'instaurer une cotisation de 15 % sur les dividendes des établissements et services sociaux et médico-sociaux et les établissements d'accueil du jeune enfant, soit des structures dont nous pouvons difficilement nous passer.

Mme Audrey Linkenheld.  - Ce n'est pas très clair...

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale.  - Cela découragerait un grand nombre d'investisseurs. (Protestations à gauche)

Nous sommes d'accord sur la nécessité de trouver des financements pour l'autonomie et la petite enfance, mais nous ne sommes pas d'accord sur les moyens d'y parvenir.

Mme Audrey Linkenheld.  - C'est sûr...

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale.  - Avis défavorable.

M. Laurent Saint-Martin, ministre.  - Même avis, pour les mêmes raisons.

Derrière ces amendements, qu'on peut qualifier d'appel, il y a le souhait de ne plus voir le secteur privé investir dans ce domaine.

Mme Marion Canalès.  - Nous n'avons pas vraiment dit cela.

M. Laurent Saint-Martin, ministre.  - C'est votre droit le plus strict de penser que seul le secteur public devrait intervenir dans ces secteurs, comme la petite enfance par exemple.

Mais nous avons besoin des acteurs privés, moyennant un meilleur encadrement, par un cahier des charges plus strict.

Demande de retrait, car ce débat ne concerne pas la fiscalité à proprement parler, sinon avis défavorable.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Il ne devrait pas être permis de faire des profits sur les activités des Ehpad et des crèches. Vous mélangez privé et financiarisation. Orpea a des retours sur investissement très rapides, grâce aux financements publics.

Ces groupes rechigneraient à investir, dites-vous ? Mais la sécurité sociale a payé trois ou quatre fois les places de crèche ! Un tel niveau de dividendes pour s'occuper d'enfants ou pour soigner des gens, est-ce normal ?

La financiarisation de ce secteur est insupportable, au vu du niveau de profits générés.

M. Olivier Henno.  - C'est l'Union soviétique !

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Arrêtons la spoliation !

Avec cet argent, on aurait pu créer des crèches publiques. (Applaudissements sur les travées du GEST et du groupe SER)

M. Jean-Luc Fichet.  - Je suis d'accord pour abandonner l'idée d'une taxe additionnelle, à condition qu'un contrôle de chaque établissement soit réalisé au moins une fois tous les deux ans, de manière aléatoire.

Nous ne sommes pas opposés à l'investissement privé, mais celui-ci doit être contrôlé et l'argent doit être bien utilisé pour améliorer la vie des personnes âgées.

Seules 15 % des personnes résidant en Ehpad sont heureuses d'y vivre : dans le public, du fait du manque de moyens ; dans le privé, du fait du manque de volonté d'investir les moyens importants dont le secteur dispose.

Mme Marion Canalès.  - Nous proposons non pas une taxation à l'aveugle du secteur privé, mais bien une cotisation sur les dividendes, qui découlent non seulement de l'argent public, mais aussi de la recapitalisation de fonds de pension.

Monsieur le ministre, je ne retirerai pas mon amendement. L'an dernier, votre prédécesseur avait donné un avis défavorable. Mais Jean Christophe Combes avait déjà dit en 2021 et 2022 qu'il fallait plus de contrôles. Depuis, rien ! Or les déviances se poursuivent.

Arrêtons les rapports : Combes, Igas, Sénat, Assemblée nationale... Il faut passer aux actes !

M. Michel Canévet.  - La mise au point de M. Fichet m'a rassuré. C'est une hérésie de croire que l'on pourrait tout résoudre par l'action publique.

Plusieurs voix à gauche.  - Ce n'est pas ce que nous avons dit !

M. Michel Canévet.  - Le privé a toute sa place pour répondre aux besoins de la population, je le constate chez moi en Bretagne : sans le privé, pas de prise en charge médicale ou sociale !

Mme Annie Le Houerou.  - C'est l'assurance maladie qui paie !

M. Michel Canévet.  - Les Ehpad, comme les hôpitaux, souvent mutualistes, relèvent du privé.

N'opposons pas privé et public, c'est l'alliance des deux qui répond aux besoins.

Plusieurs voix à droite.  - Bravo !

L'amendement n°682 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°125 de Mme Doineau au nom de la commission des affaires sociales.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale.  - J'ai le sentiment que vous attendiez cet amendement avec impatience, même si ce n'est pas avec enthousiasme...

Comment aborder le mur du Grand Âge, le virage domiciliaire, le défi de l'investissement dans les Ehpad publics ?

Faute d'avoir anticipé le vieillissement de la population, nous sommes au pied du mur. Selon le rapport Libault, il faudrait 10 milliards d'euros pour le financer.

Le rapport Vachey et le rapport de nos collègues sur la situation des Ehpad préconisaient d'affecter un jour de travail pour la solidarité.

La première journée de solidarité date de 2004 : du lundi de Pentecôte on est passé à une journée choisie, un RTT, une fragmentation de ces heures, selon les cas.

Compte tenu de ces évolutions, nous préférons donc parler de « contribution de solidarité par le travail » et proposons une durée de quatorze heures (on feint l'épouvante à gauche) - enfin, sept heures de plus qu'aujourd'hui (on fait mine de se rassurer à gauche), ce qui engendrera un financement pérenne de 5 milliards d'euros. Ce n'est pas de gaieté de coeur que nous faisons ces propositions...

M. Jean-Luc Fichet.  - Dans ce cas, ne les faites pas !

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale.  - Mais vous non plus, tout à l'heure, n'est-ce pas ? (Sourires)

Mme Monique Lubin.  - Si, si !

M. le président.  - Sous-amendement n°1360 de M. Canévet.

M. Michel Canévet.  - La situation est si difficile qu'il faut des moyens importants : je propose donc d'aller plus loin que la proposition de la rapporteure générale.

Nous ne sommes pas assez productifs, les chiffres de l'OCDE le montrent. (On le conteste à gauche.) Étonnez-vous, après, que nous ne soyons pas assez compétitifs à l'échelle internationale ! Il faut donc un effort collectif. (Marques d'ironie sur les travées du GEST)

Mme Cécile Cukierman.  - Par le travail gratuit ?

M. Michel Canévet.  - La production sociale, chacun y a droit, chacun doit donc y contribuer.

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - Avec vous, ce sont toujours les mêmes !

M. Michel Canévet.  - Voilà pourquoi je propose d'allonger le temps de travail de 1 607 à 1 625 heures.

M. le président.  - Sous-amendement n°1365 de Mme Jacquemet.

Mme Annick Jacquemet.  - L'amendement de la commission des affaires sociales abonderait la branche autonomie de 2,5 milliards d'euros, via une hausse de la CSA augmentant les ressources de la CNSA. Les départements s'en félicitent. Les taux de couverture d'allocations personnalisées d'autonomie (APA) et de prestations de compensation du handicap (PCH) des départements sont insuffisants pour faire face aux enjeux du vieillissement. Il convient donc de porter les concours de la CNSA aux départements au niveau de 50 % en fléchant vers eux la moitié de la hausse de la CSA.

M. le président.  - Amendement n°903 rectifié ter de Mme Apourceau-Poly et du groupe CRCE-K.

M. Michel Canévet.  - Le problème..., ce sont les 35 heures. (On rivalise d'ironie à gauche ; Mme Audrey Linkenheld lève les bras au ciel.)

Mme Cécile Cukierman.  - Ben tiens !

Mme Émilienne Poumirol.  - Et les congés payés !

M. Michel Canévet.  - Nous proposons non pas un effort exceptionnel, mais un effort à la hauteur des besoins pérennes de la protection sociale. Nous ne vivons pas en autarcie : le monde évolue, il faut travailler plus, d'autant qu'on entre plus tard dans la vie active. Nos entreprises ne sont pas assez concurrentielles. Une augmentation de dix-huit heures sur l'année n'est pas un effort très important ; mais, sans lui, nous traînerons un déficit impossible à résorber.

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - Faux : nous vous avons proposé des recettes.

M. le président.  - Amendement n°1043 rectifié bis de M. Chasseing et alii.

M. Daniel Chasseing.  - La trajectoire actuelle n'est pas à la hauteur du défi du vieillissement : il faut augmenter le personnel en Ehpad, en créant quatre postes par établissement, ainsi que le nombre de services de soins infirmiers à domicile (Ssiad). Il faut 50 000 emplois supplémentaires, soit 2,5 milliards d'euros de plus. Pour cela, il est impératif d'instaurer une seconde journée de solidarité. La nation doit être consciente de l'enjeu budgétaire de notre pays, d'autant plus que les contribuables ont bénéficié de la suppression de la taxe d'habitation et de la redevance audiovisuelle.

Cela ne représente que dix minutes par semaine pour financer cette noble cause de la solidarité avec nos aînés qui se sont dévoués pour nous. Pas de taxe, mais de la solidarité ! (Applaudissements et acclamations sur les travées du groupe INDEP ; Mme Apourceau-Poly ironise.)

M. le président.  - Amendement identique n°820 de Mme Poncet Monge et alii.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Nous proposons de porter de 0,3 % à 0,6 % le taux de la CSA sans augmenter le temps de travail. Les 35 heures ont entraîné une intensification inédite du travail. Mais c'est de la mauvaise productivité : on fait en 35 heures ce que l'on faisait en 39 heures.

M. Daniel Chasseing.  - (Agitant les bras en signe de dénégation) Non !

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Lisez les études économiques ! Cela a été mesuré par la Dares. (On proteste à droite) Vous pouvez ne pas être d'accord... Dans ces conditions de densification, vous ne pouvez pas augmenter le temps de travail sans récolter du turn-over, de l'épuisement professionnel et des arrêts de travail.

Mme Jocelyne Guidez.  - Pour une journée ?

M. le président.  - Amendement identique n°904 rectifié ter de M. Canévet et alii.

M. Michel Canévet.  - Je partage l'analyse de Raymonde Poncet Monge sur les méfaits des 35 heures... C'est pour cela que je souhaite augmenter le temps de travail ! (Applaudissements et rires au centre et à droite)

M. Patrick Kanner.  - Déposez une proposition de loi !

M. Michel Canévet.  - J'avais déjà déposé cet amendement de repli à l'amendement n°903 rectifié ter l'année dernière, sans succès, hélas - nous ne serions pas dans une situation aussi grave. Il revient à ajouter dix-huit heures supplémentaires de travail, mais rémunérées. (Exclamations ironiques à gauche)

Mais il serait préférable d'adopter mes amendements précédents. C'est le sens de l'histoire que d'augmenter le temps de travail. N'ayons pas peur ! (Exclamations ironiques à gauche)

M. le président.  - Amendement identique n°947 de Mme Apourceau-Poly et du groupe CRCE-K.

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - Cet amendement double le niveau de la CSA payée par les entreprises afin de ne pas laisser les salariés et les retraités seuls à financer la branche autonomie. Il est possible d'augmenter cette contribution sans imposer de travailler gratuitement sept heures supplémentaires par an.

M. le président.  - Amendement n°574 rectifié de Mme Le Houerou et alii.

Mme Annie Le Houerou.  - Nous proposons une alternative à l'amendement n°125 de la rapporteure générale, qui rapporterait également 2,5 milliards d'euros, en doublant le taux de la CSA.

M. Laurent Burgoa.  - On taxe ! On taxe !

M. le président.  - Amendement n°1169 rectifié de M. Capus et alii.

M. Emmanuel Capus.  - Avec 1 664 heures travaillées en moyenne, la France a l'un des plus bas taux de travail des pays de l'OCDE, dont la moyenne est de 1 770 heures. Pourtant, notre système social est plus protecteur. Or la dépendance augmente, avec le vieillissement des baby-boomers.

Quelle réponse y apporter ? Travailler sept heures de plus. (Mme Cécile Cukierman s'exclame.) Pour moi, cela passe par un jour de congés payés en moins. (Marques d'ironie à gauche)

Il est vrai que les 35 heures ont été désastreuses pour la qualité de l'emploi et pour la compétitivité - sans créer aucun emploi.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale.  - Avis défavorable à l'amendement n°903 rectifié ter et au sous-amendement n°1360. Nous partageons votre objectif, mais la quotité proposée compromettrait le consentement des travailleurs. La journée de solidarité, qui date de vingt ans, n'est pas contestée. (M. Mickaël Vallet le conteste ; M. André Reichardt le confirme.) Restons-en donc à la proposition de la commission - même s'il faudra la compléter par de nouvelles sources de financement : 2,5 milliards d'euros ne sont pas suffisants.

Retrait, sinon avis défavorable sur le sous-amendement n°1365. Certes, les dépenses d'APA et de PCH ne sont couvertes respectivement qu'à 46 % à 31 %. Mais votre amendement priverait la branche autonomie d'une partie de ses ressources. En revanche, la proposition de la commission des affaires sociales finance bien la branche autonomie en affectant directement une partie des recettes nouvelles aux départements. Aller plus loin brouillerait le message.

À l'article 20, le Gouvernement a déposé un amendement réformant le taux de participation de la CNSA aux départements : ce sera l'occasion de débattre de ce sujet.

Retrait, sinon avis défavorable aux amendements nos1043 rectifié bis, 1169 rectifié et 574 rectifié, ainsi qu'aux amendements identiques nos820, 904 rectifié ter et 947. La proposition de la commission des affaires sociales augmente le taux de la CSA de 0,3 % à 0,6 % : ils sont donc satisfaits. (Mme Cécile Cukierman s'en étonne.) C'est pourtant le cas.

M. Laurent Saint-Martin, ministre.  - À périmètre constant, avec les annonces faites par le Premier Ministre, la CNSA bénéficiera de 6 milliards d'euros, dont un soutien exceptionnel de 200 millions d'euros de soutien et l'ensemble des concours pour l'APA et la PCH. Le financement de l'autonomie doit-il passer par une augmentation du temps de travail ? Le débat a bien été posé.

Notre modèle de protection sociale est fondé sur le travail - certains le contestent, mais c'est fidèle à l'esprit de ses créateurs. Si nous avons de plus en plus de besoins et de plus en plus de dépenses, alors il faut travailler plus. C'est un simple produit en croix. (Protestations à gauche)

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Vous savez calculer...

Mme Cécile Cukierman.  - Vous êtes le nouvel Ambroise Croizat.

Mme Audrey Linkenheld.  - Sérieusement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre.  - J'ai fait des mathématiques, madame la sénatrice ! Comparons avec les autres pays.

M. Patrick Kanner.  - Nous attendons.

M. Laurent Saint-Martin, ministre.  - Les chiffres...

M. Guillaume Gontard.  - Les chiffres de quoi ?

M. Thomas Dossus.  - De qui ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre.  - ... de la durée annuelle de travail sont de 1 664 heures effectives en France - 122 heures de moins qu'en Allemagne. Nous avons 34 jours de congés en France, contre 27 au Royaume-Uni et 26 en moyenne dans l'Union européenne. Nos 1 664 heures effectives doivent être comparées à 1 696 en Belgique, 1 729 en Espagne, 1 785 en Allemagne, 1 792 en moyenne dans l'Union européenne. On peut en tirer les conclusions que l'on veut mais, à la fin, il faudra financer notre système de sécurité sociale. Comment ? (Marques d'ironie à gauche) Si l'on veut que le travail paye, alors la question du temps de travail n'est pas un tabou.

Mme Audrey Linkenheld.  - Est-ce une annonce ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre.  - Cela ne passera pas par un amendement au PLFSS, mais il serait bon d'en discuter avec les partenaires sociaux. (L'ironie redouble à gauche) Il serait assez hypocrite de balayer cette question d'un revers de main.

Nous voulons nous payer un système de protection sociale sans un temps de travail suffisant en contrepartie. Tous ici, nous souhaitons renforcer ce système. (On le conteste sur les travées du GEST) S'il repose sur le travail, il faudra travailler plus. (Protestations à gauche)

Retrait, sinon avis défavorable sur tous les amendements.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Issu du dernier rapport sénatorial sur les Ehpad - qui n'a pas été adopté à l'unanimité - voilà le retour de la journée de solidarité. Vous avez beau calculer combien cela fait par semaine, cela ne change rien : c'est une journée de repos en moins.

Pourtant, cette idée ne figure ni dans le rapport Libault - qui constatait qu'aucun participant à la consultation ne le demandait - ni dans le rapport Vachey - qui parle « d'effets incertains ».

M. André Reichardt.  - Alors comment fait-on ?

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Au lieu de cela, ces rapports recommandent de revenir sur les exonérations de cotisations sociales du bandeau famille au-dessus de 2,5 Smic, ce qui rapporterait 1,1 milliard d'euros, sans effets notables sur l'emploi.

Notre proposition alternative - revenir sur l'exonération non compensée par le budget de l'État des heures supplémentaires - aurait le même rendement : 2,4 milliards d'euros. D'ailleurs, pour les salariés qui effectuent des heures supplémentaires, votre solution représente une perte de revenus immédiate, puisque leurs sept premières heures supplémentaires ne leur seraient plus payées. (On s'impatiente à droite.) La CSA n'est pas une contribution employeur.

M. Jean-Luc Fichet.  - Il y a le temps de travail d'une part, et la productivité de l'autre. En France, les salariés sont très productifs et font en 35 heures ce qu'ils faisaient en 39 heures. J'ai une pensée pour les nombreux Finistériens qui travaillent dans l'agroalimentaire, et qui au bout de dix ou quinze ans, sont opérés pour des troubles musculosquelettiques.

C'est la même chose dans les hôpitaux : après les avoir applaudis pendant le covid, on demandera aux soignants dix-heures heures de travail gratuit ? (Protestations à droite) C'est désastreux, inadmissible, incompréhensible.

Mme Silvana Silvani.  - J'ai cru entendre tout à l'heure que l'on n'avait pas anticipé le vieillissement de la population ? C'est faux ! On s'est refusé à l'anticiper, c'est différent. Nous attendons toujours la loi Grand Âge...

Vous modifiez les termes, mais pas le fond de la journée de solidarité. Ce n'est pas de gaieté de coeur que vous le proposez, madame la rapporteure générale ? Mais qui parle de coeur ? Nous en avons tous ! Ce sont des choix politiques : assumez-les ! C'est votre projet : quand il s'agit de faire contribuer les entreprises et les plus riches, c'est toujours non.

Il y a vingt ans a été créée une première journée de solidarité. Certains étaient déjà au Sénat, peut-être. Le ministre délégué au travail était alors Gérard Larcher.

Une voix à droite.  - Et alors ?

Mme Émilienne Poumirol.  - Nous n'aurions pas anticipé le vieillissement ? Tout le monde savait que le baby-boom allait avoir des effets.

Une cinquième branche a été créée, mais sans financement réel. La seule solution que vous trouvez est de taxer les travailleurs.

Le ministre dit que nous sommes des obsédés des impôts. Ce n'est pas un gros mot.

M. Olivier Rietmann.  - Le travail non plus !

M. Patrick Kanner.  - Quand il est payé !

Mme Émilienne Poumirol.  - Nous avons fait des propositions pour financer cette cinquième branche.

Quand on entend que le rendement des microcrèches privées est de 16 à 18 %... Mais quelle industrie a un tel rendement ? Même Airbus, fleuron de notre industrie n'y est pas. C'est intolérable. Nous proposons des taxations, que vous balayez toujours d'un revers de la main en les qualifiant de dogmatiques. Et maintenant, c'est la course à l'échalote.

M. Olivier Henno.  - Quelqu'un tout à l'heure a déclaré que pour distribuer la richesse, il fallait la créer.

Mme Monique Lubin.  - C'était moi.

M. Olivier Henno.  - C'est bien de cela qu'il s'agit. L'amendement de la rapporteure générale participe à l'équilibre du PLFSS. Nous ne sommes pas en train de dire que les Français sont paresseux... (On en doute à gauche.)

Dans le privé, les 35 heures n'existent plus, sans avoir eu besoin de passer par la loi. La durée moyenne est de 38,5 heures. Les 35 heures ne sont plus un temps de travail mais un seuil de déclenchement des heures supplémentaires. (Mme Silvana Silvani s'exclame.) Cette contribution de sept heures sera gérée par les entreprises et les branches.

Les demandes des travailleurs portent, dans l'ordre, sur les rémunérations, l'organisation, la considération ; le temps de travail ne vient qu'en quatrième position.

Le temps de travail doit-il est calculé par semaine, par mois, ou tout au long de la vie ? La génération Z a un autre regard sur le travail.

Votons l'amendement de la rapporteure générale.

Mme Monique Lubin.  - Je ne savais pas que c'était la fête, ce soir ! Tant qu'on y est, je vous propose que l'on supprime les 35 heures, et une semaine de congés payés ! (Mme Frédérique Puissat et M. Olivier Rietmann applaudissent.) C'est bien connu : dans ce pays, dès qu'il y a eu des avancées sociales, toutes les entreprises ont fait faillite et le pays a perdu toute attractivité. C'est le marasme !

Mais où sommes-nous ? M. Canévet estime que l'augmentation du temps de travail va dans le sens de l'histoire ! De l'histoire qui marche à reculons, oui !

Les partenaires sociaux seront ravis de savoir que les Français devront perdre un nouveau jour férié. Continuez à ce rythme-là, il n'y en aura plus beaucoup !

Nous avons perdu 500 milliards d'euros depuis sept ans à cause des cadeaux fiscaux, mais nous ne demandons aucune compensation aux entreprises !

M. André Reichardt.  - Nous avons 1 200 milliards d'euros de dette !

Mme Monique Lubin.  - Tout cela nous annonce quelques discussions très intéressantes. Vous faites de la provocation, chers collègues. (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Daniel Chasseing.  - Nous attendions la loi Grand Âge depuis 2020. Nous attendions en 2016 la loi relative à l'adaptation de la société au vieillissement (ASV). Nous avons voté une loi pour une société du bien vieillir, mais sans aucune création d'emploi.

La productivité n'augmente pas en France. (Mme Raymonde Poncet Monge s'exclame.) Nous finançons notre modèle social en partie par la dette.

La proposition représente dix minutes par semaine pour financer une cause noble. Cela montrerait de la cohésion sociale, comme lors des jeux Olympiques.

Mme Poncet Monge prétend qu'on fait la même chose en 35 heures qu'en 39 heures ? Pas dans les hôpitaux ni dans les Ehpad, où les 35 heures ont supprimé l'équivalent en temps de travail de 80 000 emplois, soit 10 % du personnel ! (M. Laurent Burgoa renchérit ; Mme Cécile Cukierman s'exclame ; applaudissements sur quelques travées des groupes INDEP, UC et Les Républicains ; protestations à gauche)

L'amendement n°1043 rectifié bis est retiré.

M. Bernard Jomier.  - Monsieur le ministre, vous parlez d'un système social en danger ? Mais depuis que les LFSS existent, mettant fin au paritarisme, il y a des transferts des finances sociales vers le budget de l'État. Dernière en date, la ponction des 136 milliards d'euros de la Cades.

Le déficit de la sécurité sociale est délibéré : il sert à alimenter l'idée selon laquelle notre système de protection sociale n'est pas tenable - alors qu'il l'est, si l'on respecte son périmètre.

Vous rejetez toutes les pistes de mise à contribution des plus aisés. Pour financer la branche autonomie, vous allez demander aux infirmières de travailler sept heures de plus ? Enfin, pas à toutes, puisque, selon leur statut, les fonctionnaires, les salariés et les indépendants ne sont pas traités à la même enseigne. C'est inacceptable.

M. Alain Milon.  - Travailler sept heures supplémentaires non payées dégagerait 2,5 milliards d'euros par an pour la branche autonomie.

Si notre pays ne veut pas se paupériser, nous devrons travailler plus, car nous sommes à la traîne par rapport aux autres pays développés en nombre d'heures travaillées.

Nous avons longtemps dit que notre productivité était supérieure à celle des autres, mais cela n'est plus vrai.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Depuis quand ?

M. Alain Milon.  - Depuis dix ans, la productivité de la France augmente de 0,4 %, contre 0,7 % en Allemagne et aux États-Unis. (Protestations à gauche)

Si je trouve l'idée de la rapporteure générale économiquement salutaire, son objectif est plus contestable, car il est proposé de travailler plus, non pour renforcer son pouvoir d'achat, mais pour renflouer les caisses de la sécurité sociale.

Mme Cécile Cukierman.  - Ce n'est pas sarkozyste, ça !

M. Alain Milon.  - On alimente le tonneau des Danaïdes... J'espère que cette mesure ne sera que transitoire.

Mme Anne-Sophie Romagny.  - La cinquième branche, qui nous concerne tous, doit être financée par un effort de solidarité.

Je précise : un indépendant ne travaille pas 35 heures, mais 60 ou 70 heures par semaine ! (Murmures à gauche)

On parle de deux minutes de plus par jour ! En est-on incapable, alors qu'il s'agit de sauver la branche autonomie ? (M. Olivier Rietmann applaudit.)

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - Et taxer les actionnaires ?

M. Marc Laménie.  - Je salue les membres de la commission des affaires sociales qui travaillent depuis des jours sur ce PLFSS.

M. Emmanuel Capus.  - Et pas deux minutes !

Mme Audrey Linkenheld.  - Nous aussi, on travaille !

M. Marc Laménie.  - L'intitulé de la contribution fait référence à celle qui avait été créée par la loi de juin 2004.

La démographie explique une partie du problème : les personnes âgées en perte d'autonomie sont au nombre de 1,3 million et devraient être 2 millions à horizon 2050. Les missions à financer sont nombreuses : Ehpad, APA, PCH, maisons départementales des personnes handicapées (MDPH), accompagnement des aidants... Les dépenses sont estimées à 42 milliards d'euros en 2025.

Je voterai l'amendement de la commission.

Mme Céline Brulin.  - Nous sommes d'accord avec la rapporteure générale sur un point : il faut nous appuyer sur le rapport Libault.

Mais vous considérez que seuls les salariés doivent être mis à contribution pour financer la branche autonomie. Si l'on suit cette logique, il faut non pas une journée, mais une semaine de travail gratuit !

Si je n'étais pas normande, j'attendrais de vous, monsieur le ministre, autre chose que : « ptêt' ben qu'oui, ptêt' ben qu'non » ou « non, pas ce soir à 23 h 23, mais sinon pourquoi pas ? ».

Cette journée de travail rapporterait 2,5 milliards d'euros, tandis que nous en sommes à 80 milliards d'euros d'exonérations de cotisations. C'est tellement énorme que vous cherchez vous-même à corriger cela, modestement, à hauteur de 3 milliards d'euros. Pourquoi n'allons-nous pas chercher par là pour financer l'autonomie ?

Certains falsifient les chiffres de la compétitivité française pour tuer les 35 heures. Certes, elle a reculé, mais l'OCDE nous place au sixième rang européen - ce n'est pas si mal.

Vous risquez de mettre encore un peu plus de monde dans la rue en novembre et décembre.

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - Franchement, tout cela n'est pas sérieux. Depuis trois jours, nous vous suggérons des recettes : taxer les Ehpad privés lucratifs ? C'est non. Faire cotiser les actionnaires ? Non. Revenir sur les retraites chapeaux ? Encore non. Alléger les exonérations de cotisations ? Toujours non !

Finalement, vous allez faire payer la note aux plus fragiles, les ouvriers, parce que vous ne voulez pas aller chercher l'argent dans la poche de vos amis.

Vous êtes bienveillants : seulement deux minutes de plus par jour !

Tout cela est une belle arnaque et une sacrée attaque contre le monde ouvrier. (Marques de réprobation à droite)

M. Canévet, qui n'en a jamais assez (M. Canévet s'en amuse), nous propose déjà d'ajouter une troisième journée l'an prochain, et une de plus l'année suivante.

Vous êtes généreux avec les bras des autres ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains ; applaudissement sur quelques travées du GEST)

Mme Cécile Cukierman.  - Finalement, au détour d'un amendement apportant des financements indispensables à la branche autonomie, nous débattons du code du travail...

Il y a une hypocrisie : nous connaissons tous des gens qui prennent des congés pour aider un parent vieillissant ou handicapé. Cet effort individuel sur le temps de repos existe déjà. Si demain, les millions de femmes et d'hommes qui sont à temps partiel ou qui prennent des congés pour s'occuper de leurs proches, arrêtent de le faire, nous serons dans un marasme total. Vous dites à ces femmes et à ces hommes que deux minutes par jour, ce n'est pas si grave.

Nous allons suivre l'avis du ministre, même si nous ne partageons pas ses arguments. La sécurité sociale voulue par Ambroise Croizat reposait sur un véritable paritarisme, qui n'existe plus !

M. Guillaume Gontard.  - Monsieur Canévet, contrairement à ce que vous prétendez, le sens de l'histoire est à la réduction du temps de travail, non à son augmentation ! De tous temps et partout dans le monde !

Le Front populaire a mis en place les 40 heures, rétablies, après Vichy, par le Conseil national de la Résistance (CNR). Puis sont venues les 35 heures.

On parle IA, mécanisation, technologie : et pourquoi ? Pour travailler moins et mieux, et gagner en productivité !

Le ministre nous a présenté des chiffres sur la durée effective du travail. La France est dans la moyenne européenne ; elle ne décroche pas du tout, bien au contraire !

Mme Jocelyne Guidez.  - Avant, on avait la vignette pour les personnes âgées. On a aussi supprimé la taxe d'habitation. Arrêtons de supprimer ce qui rapporte de l'argent !

M. Pierre Jean Rochette.  - J'ai les chiffres, ceux que tout le monde cherche ! (L'orateur brandit un rapport.) Ceux de l'OCDE.

Ce soir, nous honorons la mémoire d'Henri Krasucki. (Sourires)

Mme Cécile Cukierman.  - Eh oui !

M. Pierre Jean Rochette.  - Mais la vraie question c'est celle des 35 heures, qui ne sont pas appliquées partout. Dans le secteur des transports, par exemple, les salariés ont des contrats d'au moins 200 heures par mois, sinon cela ne fonctionne pas.

Dans les collectivités territoriales, tout le monde fait-il 35 heures ?

M. Laurent Burgoa.  - Pas à la Ville de Paris...

M. Pierre Jean Rochette.  - À Paris, 75 % des agents ne font toujours pas les 35 heures ! Là, on perd de l'argent !

Je voterai l'amendement d'Emmanuel Capus qui propose un jour de congé payé en moins. (Exclamations à gauche)

M. Michel Canévet.  - On ne va pas refaire l'histoire, mais essayer de se projeter dans l'avenir.

On a parlé de fête, d'arnaque, d'attaque contre le monde ouvrier... Mais pas du tout ! Que veut-on ?

Mme Silvana Silvani.  - Respecter les travailleurs !

M. Michel Canévet.  - Assurer l'avenir de la protection sociale, à laquelle nous sommes tous attachés !

Arrêtons de taxer tous azimuts ceux qui entreprennent ! (Mme Céline Brulin s'exclame.) Veut-on que les rémunérations diminuent ou que les entreprises soient obligées de licencier, faute de pouvoir payer leurs collaborateurs ? (Mme Émilienne Poumirol proteste.) Non, pas du tout !

Nous voulons préserver le modèle social.

M. Guillaume Gontard.  - C'est cela que l'on veut !

M. Michel Canévet.  - Pour cela, il faudra travailler plus.

Mon second amendement vise à rémunérer le travail supplémentaire. Ce sont les cotisations sociales de ces contributions supplémentaires qui financeront la sécurité sociale.

Projetons-nous dans l'avenir et prenons tout de suite les bonnes décisions, pour ne pas rester dans la difficulté.

M. Philippe Mouiller, président de la commission.  - (« Ah ! » sur plusieurs travées) Quelle logique a présidé à notre réponse à la proposition de budget du Gouvernement ?

Les financements existant pour la branche autonomie ne sont pas à la hauteur.

Nous avons donc essayé d'avoir une vision globale et de demander un effort à tout le monde : retraités, entreprises, actionnaires, complémentaires santé, établissements, industriels du médicament, professionnels de santé, usagers, mais aussi salariés.

Ces sept heures n'auront de sens que si leurs recettes sont fléchées vers la branche autonomie et non pas vers le « trou de la sécu ».

M. Laurent Saint-Martin, ministre.  - Les 35 heures ne sont pas appliquées : un grand nombre de nos concitoyens travaillent davantage ; un quart des Français seulement travaillent strictement 35 heures ; et certains travaillent moins, comme cela a été dit.

La question du temps de travail est loin d'être secondaire. Si l'on regarde à la semaine, au mois, à l'année ou, mieux encore, sur la vie active, la situation française est de moins en moins brillante... Si nous travaillons moins à l'année que nos voisins, c'est en raison d'un nombre de jours de congés très supérieur à la moyenne européenne. Le nombre d'heures de travail effectif n'est pas secondaire, car c'est la base de la cotisation.

Le travail doit-il financer notre protection sociale ? (Mme Cécile Cukierman s'exclame.) On n'est pas obligé de répondre oui ; on pourrait considérer qu'il faut de plus en plus de contributions fiscales.

Mais il ne me semble pas que cela soit votre objectif politique. Vous défendez le paritarisme et la séparation entre l'État et la sécurité sociale (Mme Cécile Cukierman le confirme) ; je suis complètement d'accord.

Alors, soyons cohérents : le financement de la sécurité sociale doit reposer prioritairement sur des contributions assises sur le travail et la question de la durée du temps de travail entre donc en ligne de compte.

Pour la cinquième branche, c'est pareil : la contribution sur le travail est un levier de ressources. Sinon nous devrons trouver d'autres sources de financement et le paritarisme sera fragilisé.

Mme Cécile Cukierman.  - Mais le travail, ce n'est pas que les salaires ! Il y a d'autres richesses !

M. Laurent Saint-Martin, ministre.  - Certes, et d'autres sources de financement ont été trouvées dans ce PLFSS, le président de la commission l'a bien rappelé. Mais faire comme si c'était un tabou fragilise paradoxalement le financement et la gouvernance de notre protection sociale.

Si nous avions une durée du travail bien supérieure à celle de nos voisins européens, tout irait bien. Mais tel n'est pas le cas.

Mme Céline Brulin.  - On est plus productif !

M. Laurent Saint-Martin, ministre.  - Vous pouvez me parler de productivité autant que vous voulez, moi je parle du financement de notre modèle de protection sociale !

Vous ne pouvez pas dire que l'État ponctionne la sécurité sociale et donne des coups de canif. (M. Bernard Jomier le conteste.) Depuis quand les dépenses sociales liées à la crise covid ne sont pas l'affaire de la sécurité sociale, et donc de la Cades ? On ne peut pas avoir une mutualisation des profits et une étatisation des pertes ! La prorogation de la Cades est cohérente avec ce qui s'est passé pendant la crise covid. Faudrait-il ne pas rembourser cette dette sociale ? Ne sommes-nous pas fiers d'avoir protégé nos concitoyens au prix d'une hausse considérable des dépenses ?

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Et les recettes ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre.  - On les a mises en face de l'amortissement de la dette sociale !

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Ce n'était pas des recettes courantes !

M. Laurent Saint-Martin, ministre.  - Vous ne pouvez pas dire que l'État ponctionne la sécurité sociale, quand il y a 289 milliards d'euros de transferts de fiscalité vers le budget de la sécurité sociale ! Or plus de recettes fiscales pour financer la sécurité sociale, ce n'est pas une bonne nouvelle. L'État finance trop la sécurité sociale.

Le sous-amendement n°1360 n'est pas adopté, non plus que le sous-amendement n°1365.

À la demande des groupes CRCE-K et Les Républicains, l'amendement n°125 est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°56 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 335
Pour l'adoption 216
Contre 119

L'amendement n°125 est adopté.

L'amendement n°903 rectifié ter, les amendements identiques nos820, 904 rectifié ter et 947, ainsi que les amendements nos574 rectifié et 1169 rectifié n'ont plus d'objet.

M. le président.  - Amendement n°1172 rectifié de M. Capus et alii.

M. Emmanuel Capus.  - Cet amendement est l'occasion de rétablir une injustice qui vise les salariés et les ouvriers, dont la retraite est calculée sur les 25 meilleures années, quand la retraite des fonctionnaires est calculée sur les six derniers mois. Arrêtons de taper sur les salariés et prenons comme base de calcul les 25 meilleures années, pour tout le monde.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale.  - Le secteur privé tient compte des primes, quand ce n'est pas le cas dans la fonction publique. En outre, les fonctionnaires de catégorie C ont des salaires assez bas.

Ce sujet mérite une véritable concertation. Avis défavorable.

M. Laurent Saint-Martin, ministre.  - Même avis.

M. Emmanuel Capus.  - C'est un débat complexe. Mon amendement est un amendement d'appel. Je suis d'accord pour que l'on intègre les primes dans le calcul des retraites des fonctionnaires, mais le maintien de deux systèmes de retraite différents ne se justifie pas.

Ayons ce débat à tête reposée, à un moment plus serein. Je retire mon amendement.

L'amendement n°1172 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°949 de Mme Silvani et du groupe CRCE-K.

Mme Silvana Silvani.  - Depuis le 8 novembre à 16 h 48, les femmes françaises travaillent gratuitement en raison des inégalités salariales. En moyenne, les femmes gagnent 24 % de moins que les hommes, à compétences égales. Les entreprises sont dans l'illégalité depuis le vote des lois Auroux de 1982, sans que cela choque !

Les femmes représentent 80 % des travailleurs pauvres et des travailleurs à temps partiel, 99 % des assistantes maternelles et 97 % des aides à domicile. Elles aiment leur métier, mais ne parviennent pas à en vivre. Essayez de survivre avec 700 euros par mois !

Le travail à temps partiel est profondément sexiste et les entreprises abusent des contrats précaires. ?uvrons en faveur de l'égalité salariale en majorant de 10 % les cotisations employeurs des entreprises de plus de 20 salariés qui ont plus de 20 % de leurs salariés à temps partiel.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale.  - Avis défavorable. Votre amendement punit les entreprises de secteurs d'activité qui ont structurellement besoin de temps partiel.

M. Laurent Saint-Martin, ministre.  - Avis défavorable.

Mme Silvana Silvani.  - Nous votons des lois, faisons-les respecter !

L'amendement n°949 n'est pas adopté.

La séance, suspendue à 23 h 55, reprend à minuit dix.

M. Philippe Mouiller, président de la commission.  - Ce soir, nous lèverons la séance à 1 h 30. À un tel rythme, nous achèverons l'examen du PLFSS samedi à 20 heures. (Non ! à droite)

M. Mickaël Vallet.  - On n'est pas à une journée près ! (Sourires)

Une voix à gauche. - On viendra gratuitement ! (Rires)

M. Philippe Mouiller, président de la commission.  - J'espère vous voir samedi alors ? (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe Les Républicains)

Mise au point au sujet d'un vote

M. Xavier Iacovelli.  - Au scrutin public n°56, Mme Nadège Havet souhaitait s'abstenir.

Acte en est donné.

Discussion des articles de la deuxième partie (Suite)

Article 7 bis

Mme Hélène Conway-Mouret .  - L'article 7 bis introduit deux mesures problématiques pour les Français de l'étranger. La raison en est peut-être qu'il est issu de députés de la droite à l'Assemblée nationale, dont aucun ne représente nos compatriotes établis hors de France. Il est facile de s'attaquer à ceux que l'on ne connaît pas.

Premièrement, l'article revient sur l'exonération de CSG et de CRDS pour les retraités français établis en Union européenne et en Suisse. Une telle exonération a été instaurée en 2015, à la suite d'une décision de la CJUE. Hier, j'ai proposé que tous les Français de l'étranger en soient exemptés.

Deuxièmement, l'article prévoit que les certificats de vie seront uniquement délivrés par les consulats : les difficultés chroniques qu'ils rencontrent l'empêcheraient. Ce serait un grand bond en arrière. Dans certains pays, se déplacer au consulat est coûteux, long, voire dangereux.

M. le président.  - Amendement n°10 de Mme Richard et M. Cadic.

Mme Olivia Richard.  - Quelle vision ! Les Français de l'étranger auraient énormément d'argent, parce qu'ils fraudent. On peut donc les faire payer plus, quand bien même ils payent la cotisation d'assurance maladie (Cotam)... Bref, c'est retour vers le futur !

Par ailleurs, près de 1 370 000 retraites sont versées à des Français résidant à l'étranger : la disposition prévue entraînerait une surcharge de l'activité consulaire, si c'est à effectif constant, et donc une forte baisse de la qualité du service public dans les consulats.

Cet article n'est qu'une caricature.

Je salue le rôle du GIP Union Retraite, qui a développé la lutte contre la fraude par des moyens biométriques, notamment au Maroc ; les résultats sont bons.

M. le président.  - Amendement identique n°716 rectifié de M. Jomier et du groupe SER.

M. Yan Chantrel.  - Supprimons cet article introduit par un amendement du groupe Les Républicains à l'Assemblée nationale, et soutenu lors d'un scrutin public par les macronistes et le RN, car il stigmatise nos compatriotes établis hors de France.

Nous souhaitons taxer dans la justice, quand vous taxez dans l'injustice. La France a déjà été condamnée par la CJUE pour des dispositions similaires. Rien n'obligeait le Gouvernement à intégrer ce dispositif dans le texte déposé au Sénat.

Les certificats de vie n'étaient plus délivrés par les consulats, car ils n'en ont plus les moyens ; ils sont à l'os. Par ailleurs, le consulat est parfois à des milliers de kilomètres du domicile de nos compatriotes !

M. le président.  - Amendement identique n°843 de Mme Poncet Monge et alii.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Ce dispositif favorise une politique du soupçon envers les Français de l'étranger, au nom de l'obsession du fraudeur. Sur 3 000 dossiers étudiés à l'étranger, la Cnav n'a recensé que seize cas de fraude, pour 70 millions d'euros de manque à gagner. C'est une goutte d'eau par rapport aux 340 milliards de pensions de retraite.

Selon la Cnav, les retraités résidant à l'étranger reçoivent une pension du régime général moyenne de 300 euros.

De plus, la disposition aura sans doute un contrecoup financier qui en annulerait tous les bénéfices ; il faudrait embaucher dans les consulats.

Enfin, le dispositif proposé est un doublon d'une expérimentation déjà en cours. Supprimons l'article.

M. le président.  - Amendement n°1175 rectifié de Mme Renaud-Garabedian et alii.

Mme Évelyne Renaud-Garabedian.  - Il est regrettable que l'Assemblée nationale ait adopté de telles dispositions présentant les Français de l'étranger comme des nantis et des fraudeurs. Supprimons l'article.

Le Gouvernement a présenté un amendement de suppression de l'alinéa 2 de l'article 7 relatif à la CSG, il est ainsi revenu à la raison.

Pour ce qui concerne les certificats de vie, où est passé le sous-amendement présenté par le Gouvernement à l'amendement n°126 de Mme Gruny ?

M. le président.  - Nous n'en sommes pas encore là dans la discussion et ce sous-amendement ne nous est pas parvenu.

Mme Évelyne Renaud-Garabedian.  - Monsieur le ministre, l'avez-vous retiré ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre.  - Il va réapparaître dans le dérouleur.

Mme Évelyne Renaud-Garabedian.  - Mes deux amendements seront satisfaits par le sous-amendement du Gouvernement. Je le retire au profit de l'amendement de n°126 et du sous-amendement du Gouvernement.

L'amendement n°1175 rectifié est retiré.

Mme Pascale Gruny, rapporteur de la commission des affaires sociales pour la branche vieillesse.  - Je vous confirme que le sous-amendement du Gouvernement va arriver.

Cet article apporte deux modifications majeures. D'une part, il assujettit les retraités vivant à l'étranger et percevant des pensions françaises à la CSG et à la CRDS. D'autre part, il restreint les moyens dont disposent les retraités pour justifier leur existence ; actuellement, ils peuvent le faire via un certificat de vie délivré par les autorités consulaires, les autorités locales du pays de résidence ou des professions réglementées comme les notaires, ou via l'utilisation de données biométriques.

L'Assemblée nationale a souhaité préciser que les certificats de vie doivent nécessairement être délivrés par le consulat, pour éviter les faux documents fournis par des notaires corrompus. Or il est très difficile d'obtenir des rendez-vous dans les consulats.

Par ailleurs, l'article 7 bis est contraire au droit européen : les personnes résidant dans un État membre ne peuvent cotiser à perte auprès d'un système de protection sociale d'un autre État membre.

Cela étant dit, je suis défavorable à la suppression de l'article ; je vous invite à voter l'amendement de la commission, sous-amendé par le Gouvernement.

Tous les Français de l'étranger ne sont pas des fraudeurs ! Je connais la situation, vivant près de la Belgique, et une de mes filles vivant au Luxembourg. J'ai déjà monté un dossier pour aider quelqu'un à récupérer la CSG et la CRDS payées à tort !

M. Laurent Saint-Martin, ministre.  - L'article 7 bis vise à lutter contre la fraude, objectif que nous sommes nombreux à partager. À la suite de nos discussions avec les parlementaires représentant les Français de l'étranger, nous avons convenu de préciser l'amendement. Il existe déjà un remplacement de la CSG-CRDS, ce qui autorise un taux de 3,20 % pour les avantages de retraite de base et de 4,20 % pour les autres avantages : la CSG et la CRDS n'ont pas de raison d'être.

Les certificats de vie posent davantage de difficultés opérationnelles qu'ils n'apportent de réponse à la lutte contre la fraude. Capitalisons sur les travaux du GIP Union Retraite. Sagesse aux amendements de suppression.

Mme Mathilde Ollivier.  - Cet article relève au mieux d'une méconnaissance des réalités et au pire d'une stigmatisation des personnes recevant des pensions à l'étranger. Or les niveaux de pensions de retraite à l'étranger sont faibles. De plus, c'est un droit acquis par cotisation, non une faveur administrative !

Pour gérer les certificatifs de vie de 1,38 million de Français de l'étranger, il faudrait une augmentation substantielle des effectifs des consulats - cela nous laisse rêveurs... Il existe d'autres solutions, comme l'expérimentation déjà évoquée.

Mme Olivia Richard.  - Je remercie Mme Gruny pour ses propos. Des actions sont menées contre la fraude à l'étranger, notamment au Maroc, lors de campagnes annuelles. Quelque 8 000 personnes ont été convoquées. Les pensions de celles qui ne s'étaient pas présentées ont été suspendues. Au total, 600 pensions ont été supprimées. Pour rappel, il existe 300 000 retraités de France en Algérie, 100 000 au Maroc.

Les amendements identiques nos 10, 716 rectifié et 843 ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°126 de Mme Gruny au nom de la commission des affaires sociales.

Mme Pascale Gruny, rapporteur pour la branche vieillesse.  - Nous supprimons l'assujettissement à la CSG et à la CRDS. Pour le certificat de vie, nous proposons d'abord de faire appel à la biométrie ; se rendre au consulat restera une possibilité. J'entends bien que les consulats manquent d'effectifs.

M. le président.  - Sous-amendement n°1383 du Gouvernement.

M. Laurent Saint-Martin, ministre.  - Avis favorable à l'amendement de la rapporteure, sous réserve de l'adoption de mon sous-amendement, qui garantit la possibilité de recourir à des solutions alternatives au rendez-vous en consulat.

Mme Pascale Gruny, rapporteur pour la branche vieillesse.  - Avis favorable au sous-amendement du Gouvernement. Des échanges de données entre les caisses de retraite et les autorités chargées de l'état civil sont prévus.

J'espère que le sous-amendement répondra aux inquiétudes de chacun. Sinon le Quai d'Orsay devra améliorer le traitement des dossiers dans les consulats.

Mme Mathilde Ollivier.  - Par cet amendement et ce sous-amendement, on inscrit dans la loi les dispositifs qui existent déjà. Cela me semble inutile. Il suffisait de voter nos amendements de suppression de l'article et le problème était réglé !

Mme Évelyne Renaud-Garabedian.  - Ce n'est pas du tout les mêmes modalités. Elles sont beaucoup plus précises dans l'amendement de la rapporteure, sous-amendé. On pourra désormais obtenir les certificats de vie par l'intermédiaire d'une banque, ce qui n'existe pas aujourd'hui. (« Très bien ! » sur plusieurs travées du groupe Les Républicains)

Le sous-amendement n°1383 est adopté.

L'amendement n°126, sous-amendé, est adopté.

Les amendements identiques nos504 et 1263 ainsi que l'amendement n°633 n'ont plus d'objet.

Après l'article 7 bis

M. le président.  - Amendement n°416 rectifié bis de M. Menonville et alii.

M. Olivier Henno.  - Dans la même logique, cet amendement vise à lutter contre la fraude aux prestations de retraite versées à l'étranger.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Et en faisant quoi ?

L'amendement n°416 rectifié bis, repoussé par la commission et le Gouvernement, est retiré.

Article 8 (Réservé jusqu'avant l'article 11)

Après Article 8

M. le président.  - Amendement n°1145 rectifié bis de Mme Conway-Mouret et alii.

Mme Hélène Conway-Mouret.  - Depuis des années, les sénateurs socialistes alertent sur la dégradation des finances de la caisse des Français de l'étranger (CFE). Cette caisse assure une mission de service public en offrant une couverture sociale à tous les Français de l'étranger, sans distinction d'âge ou d'état de santé. Tenue par une obligation d'autonomie financière, elle compte essentiellement sur les recettes issues des contrats d'adhésion. Contrairement aux CPAM, elle ne bénéficie d'un soutien de l'État que pour la partie aidée ; elle ne bénéficie ni de taxes affectées ni de fraction de CSG.

Aussi, nous proposons de transférer à la CFE une part très modeste, à hauteur de 0,01 %, du produit de la fraction de la CSG sur les revenus du patrimoine destiné Fonds de solidarité vieillesse (FSV).

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale.  - Cet amendement a été rejeté au Sénat l'année dernière.

Ne réduisons pas les ressources du FSV alors que son déficit croîtra jusqu'en 2028. En outre, l'amendement n°1218 du Gouvernement prévoit de supprimer le FSV.

Avis défavorable.

M. Laurent Saint-Martin, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°1145 rectifié bis n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°315 rectifié bis de M. Chantrel et alii.

M. Yan Chantrel.  - Nous voulons défendre la CFE, qui est un organisme de sécurité sociale de droit privé, mais chargé d'une mission de service public. Cela signifie qu'elle ne refuse aucun de nos compatriotes, quels que soient leur âge et leurs pathologies, contrairement aux assurances privées. Le coût de ce service public est de 25 millions d'euros.

Nous vous avons demandé d'exonérer de CSG et de CRDS nos compatriotes établis hors Union européenne. Vous l'avez refusé. Puisqu'ils contribuent à la sécurité sociale française, nous demandons au moins qu'une part infime de CSG-CRDS - 25 millions d'euros sur 300 millions - aille à leur caisse.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale.  - Avis défavorable.

M. Laurent Saint-Martin, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°315 rectifié bis n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°442 rectifié bis de Mme Paoli-Gagin et alii.

M. Marc Laménie.  - Les groupements d'employeurs permettent aux petites entreprises de mutualiser leur main-d'oeuvre.

Cet amendement vise à simplifier la gestion de ces groupements d'employeurs, évite des coûts inutiles pour l'administration et garantit la pérennité des avantages sociaux pour les petites entreprises, particulièrement dans le secteur agricole.

M. Laurent Burgoa.  - Très bien !

M. le président.  - Amendement identique n°785 rectifié ter de Mme Havet et alii.

Mme Nadège Havet.  - La loi prévoit que les salariés de groupements d'employeurs ne sont pas comptabilisés dans l'effectif du groupement. Le transfert des effectifs vers les entreprises utilisatrices est prévu dès 2026, ce qui alourdira leur gestion administrative. Supprimons ce transfert.

M. le président.  - Amendement identique n°907 rectifié de M. Canévet.

M. Michel Canévet.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement identique n°1040 rectifié bis de Mme Romagny et alii.

Mme Anne-Sophie Romagny.  - Les groupements d'employeurs se substituent aux entreprises en matière de ressources humaines. Contrairement à ce que j'ai entendu, ils paient les cotisations sociales de tous leurs salariés.

Étant donné qu'ils se substituent aux petites entreprises, il est logique de leur appliquer le taux de cotisation patronale prévu pour les TPE et les PME.

M. le président.  - Amendement identique n°1202 rectifié bis de Mme Gruny et alii.

Mme Pascale Gruny.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement identique n°1270 rectifié bis de Mme Nadille et alii.

Mme Solanges Nadille.  - Ces groupements sont très fréquents dans le secteur agricole. Cet amendement simplifierait leur gestion, éviterait des coûts inutiles à l'administration et garantirait la pérennité de ces avantages pour ces groupements.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale.  - Nous sommes tous d'accord pour saluer l'utilité des groupements d'employeurs.

Toutefois, ces amendements suscitent plusieurs interrogations : quel est l'avis du Gouvernement ?

En cas de suppression du transfert d'effectifs vers les entreprises utilisatrices, les salariés ne risquent-ils pas de n'être comptabilisés nulle part, suscitant ainsi moins de recettes pour les finances sociales ?

Si la mesure entre en vigueur au 1er janvier 2025, que se passera-t-il pour les entreprises ou les organismes de recouvrement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre.  - Retrait. Les salariés mis à disposition d'une entreprise utilisatrice ne seraient comptabilisés ni dans l'effectif du groupement d'employeurs ni dans celui de l'entreprise utilisatrice. D'où un manque à gagner pour les finances sociales, en particulier pour la formation professionnelle et l'apprentissage, ainsi que pour le Fonds national d'aide au logement (Fnal). Nous créerions un précédent et une différence de traitement inexplicable, notamment par rapport aux agences d'intérim.

Mme Anne-Sophie Romagny.  - Nulle lacune dans le système, puisque les groupements d'employeurs paient les cotisations pour tous leurs salariés.

Les agences d'intérim ont un statut différent. Elles visent un accroissement temporaire d'activité et non un besoin pérenne d'emplois à temps partiel.

Quelque 60 % des bénéficiaires des groupements d'employeurs sont des TPE agricoles. Pas moins de 10 % de la masse salariale agricole de la filière dépend de ce système.

Si l'on va dans le sens du Gouvernement, soit on tue les groupements d'employeurs, soit on met des secteurs sous tension le temps pour les groupements d'employeurs de s'organiser afin de rester sous le seuil de dix employés. Ce serait une perte de temps.

M. Philippe Mouiller, président de la commission.  - Pour une fois, je ne vous suivrai pas, monsieur le ministre.

L'an dernier, nous avons voté cet amendement sous-amendé afin de contourner une partie des difficultés. Je propose de voter cet amendement afin qu'il soit évoqué lors de la CMP. D'ici là, nous tâcherons de répondre aux interrogations du Gouvernement.

Mme Frédérique Puissat.  - Très bien !

Les amendements identiques nos442 rectifié bis, 785 rectifié ter, 907 rectifié, 1040 rectifié bis, 1202 rectifié bis et 1270 rectifié bis sont adoptés et deviennent un article additionnel.

L'article 8 bis est adopté.

Article 8 ter

Mme Émilienne Poumirol.  - Cet article concerne la fraude sociale. Rappelons que la fraude fiscale (« Oh ! » à droite) fait perdre chaque année entre 80 et 100 milliards d'euros à l'État. Souvenons-nous du livre d'Antoine Peillon, Ces 600 milliards qui manquent à la France.

Parmi les grands acteurs de la fraude sociale, on relève des employeurs indélicats et des travailleurs indépendants. La fraude aux Urssaf est estimée à 691 millions d'euros. Ce chiffre s'élève à 340 millions d'euros pour la MSA. Le travail dissimulé représenterait une fraude comprise entre 8 et 10 milliards d'euros ; or seuls 10 % des sommes ayant fait l'objet d'un redressement sont recouvrées, car certaines entreprises disparaissent ou organisent leur insolvabilité.

Les assurés ne représentent qu'un tiers de la fraude sociale, pour 4 milliards d'euros.

La fraude au RSA et à la prime d'activité et les fausses déclarations à France Travail ne représentent que 0,11 milliard d'euros. (Marques d'impatience sur les travées du groupe Les Républicains, l'oratrice ayant épuisé son temps de parole.) Ce sont bien les entreprises et les travailleurs indépendants qui commettent le plus fréquemment des fraudes.

L'article 8 ter est adopté.

Article 8 quater

M. Marc Laménie.  - L'article 8 ter ne portait pas sur la fraude, contrairement à cet article.

Le droit de communication au profit des organismes de sécurité sociale remonte à la LFSS 2008. C'était mon premier PLFSS, sous l'autorité notamment d'Alain Milon. (« Ah ! » sur les travées du groupe Les Républicains)

Les Urssaf et des MSA luttent contre la fraude. La fraude serait estimée à 13 milliards d'euros par an, mais les fautes réellement constatées à 2,1 milliards d'euros.

Il faut améliorer les sources d'information de l'ensemble des corps de contrôle. Le groupe INDEP votera cet article. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe Les Républicains)

L'article 8 quater est adopté.

Après l'article 8 quater

M. le président.  - Amendement n°104 rectifié de Mme Goulet et alii.

Mme Nathalie Goulet.  - Nous devrions associer les agents consulaires à la lutte contre la fraude. Afin d'obtenir un visa, certains demandeurs doivent prouver leur solvabilité ; ils doivent aussi démontrer qu'ils disposent d'un lieu de résidence.

Une fois sur le sol français, ils sollicitent des prestations sociales auxquelles ils ne devraient pas avoir droit, compte tenu des facultés contributives qui ont servi à justifier l'obtention du visa. Les services consulaires se demandent pourquoi ils ne sont pas davantage consultés.

M. André Reichardt.  - Très bien !

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale.  - Je salue le travail de Mme Goulet contre la fraude.

L'article 8 quater propose déjà des avancées.

Votre amendement est satisfait. L'article L. 114-11 du code de la sécurité sociale prévoit que les organismes de sécurité sociale et les services de l'État chargés des affaires consulaires se communiquent les informations nécessaires. Retrait.

M. Laurent Saint-Martin, ministre.  - Même avis, car votre amendement est satisfait : il existe bien un cadre juridique d'échange avec les autorités consulaires.

L'amendement n°104 rectifié est retiré.

Article 8 quinquies

M. le président.  - Amendement n°361 rectifié de Mme Puissat et alii.

Mme Frédérique Puissat.  - L'article 6 de la LFSS pour 2024 a prévu l'obligation pour les plateformes numériques de collecter et verser les cotisations sociales des micro-entrepreneurs qui les utilisent. C'était louable pour les VTC, mais il s'est appliqué à d'autres plateformes comme Leboncoin, dont 99 % des utilisateurs sont des particuliers. Un auto-entrepreneur qui l'utilise paie non seulement ses cotisations à l'Urssaf, mais se voit retenir le montant correspondant au bien qu'il a vendu par la plate-forme.

Le nombre de contentieux risque de se multiplier. Les administrations elles-mêmes sont inquiètes. Restons plutôt sur le chemin actuel.

M. Laurent Duplomb.  - Bravo !

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale.  - L'étude d'impact établit cependant que pas moins de 69 % des micro-entrepreneurs déclareraient à l'Urssaf des chiffres inférieurs à la réalité, et 55 % ne déclareraient rien du tout.

M. André Reichardt.  - Ce n'est pas bien !

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale.  - C'est considérable. L'article 8 quinquies doit entrer en vigueur le 1er janvier 2026 à titre expérimental, avant d'être généralisé un an après, mais avec les corrections qui s'imposent. Avis défavorable.

M. Laurent Saint-Martin, ministre.  - L'amendement me semble disproportionné : il prive les utilisateurs de plateformes d'une simplification bienvenue. Demande de retrait ou avis défavorable. S'il est voté, on le retravaillera en CMP.

M. Philippe Mouiller, président de la commission.  - Nous avons tous entendu le ministre : le travail reste à faire.

Mme Frédérique Puissat.  - Maintenons l'amendement en attendant.

Mme Monique Lubin.  - Un particulier qui vend un article sur Leboncoin paye des cotisations à l'Urssaf ?

Mme Frédérique Puissat.  - Nous parlons des auto-entrepreneurs !

Mme Monique Lubin.  - Nous devons les habituer à verser des cotisations.

Mme Frédérique Puissat.  - Ils le font déjà !

Mme Monique Lubin.  - Cela me semble une simplification vertueuse.

L'amendement n°361 rectifié est adopté.

M. le président.  - Amendement n°844 de Mmes Poncet Monge et Souyris.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - La CMP serait donc là pour raccourcir les débats en séance ? Étonnant.

L'article modifie les dispositions de l'article 6 du PLFSS 2024, qui cherchait à remédier à la sous-déclaration des activités des micro-entrepreneurs sur les plateformes - un manque à gagner de 200 millions d'euros -, sous-déclaration qui réduit les cotisations sociales versées, et donc les droits sociaux des travailleurs.

Limiter le dispositif aux seules plateformes « volontaires » est contradictoire avec les objectifs poursuivis. L'intérêt des plateformes ne doit primer ni l'intérêt national ni celui des travailleurs. Supprimons donc cette restriction.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale.  - Avis défavorable. Les expérimentations sont utiles, car elles permettent de corriger des erreurs dans les dispositifs avant de les généraliser. C'est ainsi que nous nous y étions pris avec Martin Hirsch pour la mise en place du RSA. Les plateformes volontaires seront forcément les plus dynamiques.

M. Laurent Saint-Martin, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°844 n'est pas adopté.

L'article 8 quinquies, modifié, est adopté.

Après l'article 8 quinquies

M. le président.  - Amendement n°15 rectifié de Mme Goulet et alii.

Mme Nathalie Goulet.  - Les administrations consulaires ne comprennent pas comment une simple élection de domicile peut constituer une résidence. Une famille nombreuse ne peut pas habiter dans un CCAS !

M. le président.  - Amendement n°105 rectifié de Mme Goulet et alii.

Mme Nathalie Goulet.  - Il s'agit de considérer que les contrôles réalisés par une caisse sont opposables sur l'ensemble des risques - cela correspond aux recommandations 55 et 56 du rapport de septembre dernier du Haut-Conseil du financement de la protection sociale.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale.  - L'amendement n°15 rectifié est satisfait par l'article R.111-2 du code de la sécurité sociale, qui définit la notion de résidence stable et régulière. Retrait, sinon avis défavorable.

Je comprends la volonté poursuivie par l'amendement n°105 rectifié, mais le dispositif me semble inopérant. Avis défavorable. Il conviendra de reprendre cette réflexion. Monsieur le ministre, je vous invite à y travailler avec Mme Goulet.

M. Laurent Saint-Martin, ministre.  - Même avis, pour les mêmes raisons, avec la même volonté de travailler avec Nathalie Goulet sur le sujet.

L'amendement n°15 rectifié est retiré.

L'amendement n°105 rectifié est adopté et devient un article additionnel.

(Applaudissements sur quelques travées du groupe UC)

M. le président.  - Amendement n°1236 rectifié bis de Mme Nadille et alii.

Mme Solanges Nadille.  - En cas de fraude avérée d'un salarié, cet amendement prévoit la communication par l'assurance maladie des informations relatives à cette fraude à l'employeur de l'assuré concerné. Celle-ci pourrait justifier une éventuelle sanction disciplinaire.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale.  - Je partage l'objectif de lutte contre la fraude, notamment la fraude aux arrêts de travail. Anne-Sophie Romagny nous a alertés sur leur vente sur certains sites pour 9 euros seulement... Il faudra étudier cette réalité.

Avis défavorable néanmoins à l'amendement, dont le dispositif me semble restrictif, car il ne vise que les arrêts de travail non délivrés par un médecin ou une sage-femme.

M. Laurent Saint-Martin, ministre.  - Cet amendement va dans le bon sens, celui de la délivrance d'une information nécessaire à l'employeur. Avis favorable.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - L'employeur qui voudrait décider une sanction disciplinaire sur la base d'une information extérieure se heurterait à une impossibilité en droit du travail et perdrait aux prud'hommes.

L'amendement n°1236 rectifié bis n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°374 rectifié bis de M. Henno et alii.

M. Olivier Henno.  - Il s'agit non pas de voler la vedette à Nathalie Goulet sur le thème de la fraude (sourires), mais de faire évoluer le code de la sécurité sociale pour faciliter la circulation de l'information et caractériser les fraudes aux indemnités journalières.

M. le président.  - Amendement identique n°449 rectifié de Mme Goulet et alii.

Mme Nathalie Goulet.  - Défendu.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale.  - La fraude aux arrêts de travail prend de l'ampleur. En 2023, elle a représenté 7,7 millions d'euros de préjudice, contre 5 millions en 2022.

Les caisses primaires d'assurance maladie (CPAM) peuvent décider de sanctions financières et cette fraude est un délit passible de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende.

Obliger les caisses de sécurité sociale à en informer l'employeur est une idée intéressante. Mon avis est néanmoins défavorable, car le dispositif juridique est perfectible, notamment concernant la définition matérielle de la fraude. Veillons à ne pas fragiliser les procédures civiles et pénales et sécurisons avant tout les dispositifs de sanction et de recouvrement.

M. Laurent Saint-Martin, ministre.  - Avis favorable, car ces amendements vont dans le bon sens.

Les amendements identiques nos374 rectifié bis et 449 rectifié sont adoptés et deviennent un article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°204 rectifié de Mme Goulet et alii.

Mme Nathalie Goulet.  - Il s'agit d'autoriser certains agents à consulter le fichier Passenger Name Record (PNR). Cela existe déjà en matière de fraude fiscale et c'est une recommandation du Conseil des prélèvements obligatoires (CPO).

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale.  - Le fichier PNR est accessible aux agents du ministère de l'intérieur, de la défense, des transports et des douanes, s'agissant d'actes de terrorisme et d'atteintes aux intérêts fondamentaux de la nation.

Cela impliquerait une modification du code de la sécurité intérieure en conséquence : avis défavorable.

M. Laurent Saint-Martin, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°204 rectifié est adopté et devient un article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°27 rectifié de Mme Goulet et alii.

Mme Nathalie Goulet.  - Les droits d'une personne sous obligation de quitter le territoire français (OQTF) doivent être immédiatement suspendus, sauf urgence médicale. C'est de bon sens.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale.  - Le droit est clair : les personnes en situation irrégulière ne peuvent bénéficier d'aucune prestation sociale, à l'exception de aide médicale de l'État (AME) et de l'hébergement d'urgence. Nous risquons une censure du Conseil constitutionnel. Nous pourrions avoir ce débat, mais dans un autre véhicule législatif. Avis défavorable.

M. Laurent Saint-Martin, ministre.  - Nul besoin d'un autre débat, le droit est très clair. Retrait, sinon avis défavorable.

L'amendement n°27 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°18 rectifié de Mme Goulet et alii.

Mme Nathalie Goulet.  - Il s'agit d'ouvrir la possibilité de consulter les fichiers des services de l'État.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale.  - La consultation du fichier des personnes recherchées (FPR), qui contient des informations sensibles, est très encadrée. Toute modification de ses conditions d'accès doit être soumise à l'avis de la Cnil. Avis défavorable.

M. Laurent Saint-Martin, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°18 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°29 rectifié de Mme Goulet et alii.

Mme Nathalie Goulet.  - Cet amendement vise à étendre la flagrance sociale, sur le modèle de la flagrance fiscale.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale.  - Les fraudes aux prestations sont généralement commises par des particuliers, et non par des entreprises. Le problème réside non pas dans la capacité des Urssaf à saisir les biens des fraudeurs, mais dans l'insolvabilité de ceux-ci. Il ne semble donc pas justifié d'étendre la flagrance sociale au-delà du travail dissimulé. Avis défavorable.

M. Laurent Saint-Martin, ministre.  - Même avis.

Mme Nathalie Goulet.  - Le Sénat ayant adopté cette mesure en 2021, je maintiens l'amendement.

L'amendement n°29 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°23 rectifié de Mme Goulet et alii.

Mme Nathalie Goulet.  - Toute attribution d'un numéro au répertoire national doit être précédée d'une vérification du séjour régulier de son demandeur.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale.  - Plusieurs pièces justificatives sont déjà demandées, notamment un titre de séjour. Avis défavorable.

M. Laurent Saint-Martin, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°23 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Nous avons examiné 52 amendements ce soir. Il en reste 563.

Prochaine séance aujourd'hui, jeudi 21 novembre 2024 à 10 h 30.

La séance est levée à 1 h 25.

Pour le Directeur des Comptes rendus du Sénat,

Rosalie Delpech

Chef de publication

Ordre du jour du jeudi 21 novembre 2024

Séance publique

À 10 h 30, l'après-midi, le soir et la nuit

Présidence :

Mme Anne Chain-Larché, vice-présidente Mme Sylvie Vermeillet, vice-présidente M. Loïc Hervé, vice-président

Secrétaires : Mme Alexandra Borchio Fontimp, Mme Véronique Guillotin

- Suite du projet de loi de financement de la sécurité sociale, dont le Sénat est saisi en application de l'article 47-1, alinéa 2, de la Constitution, pour 2025 (n°129, 2024-2025)