Corrida et combats de coqs
M. le président. - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi visant à interdire la corrida et les combats de coqs en présence de mineurs de moins de seize ans, présentée par Mme Samantha Cazebonne et plusieurs de ses collègues, à la demande du RDPI.
Discussion générale
Mme Samantha Cazebonne, auteure de la proposition de loi . - La protection de nos enfants contre l'exposition à la violence, en particulier les corridas et les combats de coqs, transcende les clivages politiques et les traditions. Ces pratiques sont reconnues comme des actes de cruauté par l'article 521-1 du code pénal. L'exception pénale dont elles bénéficient au titre de la tradition locale, d'ordre culturel, ne saurait atténuer leur caractère cruel et violent.
Le législateur a souhaité protéger les mineurs de l'exposition à la violence, en vertu de leur vulnérabilité. L'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) encadre la diffusion de la tauromachie à la télévision « pour éviter de heurter la sensibilité des téléspectateurs », en imposant une signalétique jeunesse et en interdisant de diffuser la mise à mort.
Rappelons que 80 % des Français dans les territoires taurins et 86 % au total sont favorables à cette proposition de loi, selon un sondage Ifop. Ce soutien transcende les divisions partisanes même dans les départements taurins et témoigne d'une conscience collective qui appelle à une action législative cohérente.
Comment comprendre que l'on restreigne l'exposition des enfants à des scènes de violence et de cruauté à la télévision, mais pas in vivo ?
Je veux vous livrer le témoignage d'une petite fille, âgée de 6 ans lors de sa première et dernière corrida. Adulte, son traumatisme reste vif. « On fait courir le taureau dans tous les sens, on le pousse, on le pique, on le harcèle jusqu'à son épuisement. La foule hurle des « olé » à qui mieux mieux... C'est donc ça, une corrida ? C'est donc ça, une fête, pour certaines personnes. Le coup de grâce a mis fin à ce carnage. Tout le monde hurle de joie, l'animal meurt, et je suis dégoûtée. » Voilà ce qu'écrit Marina Ruiz Picasso, forcée, enfant, d'assister à cette cruauté.
Est-il acceptable qu'un enfant soit témoin de la souffrance infligée à un être vivant ? Nous avons le devoir de protéger son innocence.
Nous devons aussi prendre en compte le conflit de loyauté auquel est confronté l'enfant qu'un parent enthousiaste pousse à assister à de telles atrocités, qui violent les normes fondamentales de respect pour la vie.
De nombreuses études documentent l'impact négatif de l'exposition à des images de violences sur le développement moral et comportemental des jeunes. Comment alors justifier une exposition réelle ?
Le Comité des droits de l'enfant de l'ONU a, depuis 2016, recommandé à la France de redoubler d'efforts pour interdire l'accès des enfants aux spectacles de tauromachie, au nom de l'intérêt supérieur de l'enfant. Nous ne pouvons plus accepter la complaisance. En ratifiant une convention, nous nous engageons. Comment ignorer en toute conscience les recommandations du Comité des droits de l'enfant ?
Pourquoi ne serions-nous pas fiers de faire respecter l'interdiction d'exposer les enfants à la violence et à la cruauté ? Pourquoi une exception en France, pays de l'égalité ?
Avec M. Bazin et l'ensemble des cosignataires transpartisans, nous ne demandons que de la cohérence pour protéger les enfants. Je rappelle le soutien de Simone Veil et d'Élisabeth Badinter à une telle interdiction.
Je salue l'engagement de toutes celles et tous ceux qui se battent pour protéger les enfants et s'élèvent contre la cruauté. Leur mobilisation est un exemple de courage et de détermination.
La commission des lois a estimé que « le dispositif proposé était inapplicable en l'état, n'apportait pas de réponse adaptée et était susceptible de poser d'importantes difficultés de droit et de fait. » On met l'accent sur la forme pour mieux éviter de parler du fond. Que de contorsions juridiques pour justifier d'exposer des enfants à une pratique que nous interdisons partout ailleurs ! J'y vois une énième stratégie pour éviter de débattre de ce texte, que 80 % des Français réclament.
Si vous jugiez les peines surdimensionnées, pourquoi ne pas avoir proposé d'alternative ? Nous avons déposé un amendement avec Arnaud Bazin en ce sens, pour que le débat ait lieu. Aussi, je vous demande de retirer vos amendements de suppression.
Ce texte serait un premier pas vers l'abolition de la corrida, voire vers l'interdiction de la chasse, prétendent certains. Mais il ne faut voir que la loi, rien que la loi. Reconnaissez, en toute bonne foi, qu'il n'est nullement fait mention de la chasse ni de l'interdiction de la corrida.
Refusons toute forme de complaisance, regardons la réalité en face. Prétexter la forme du texte serait un mauvais procès, car nous pouvons l'amender. (Marques d'impatience sur plusieurs travées, l'oratrice ayant dépassé son temps de parole.)
S'agissant d'un régime dérogatoire, ce véhicule législatif est le bon. La loi de protection des enfants ne doit faire aucune exception.
M. le président. - Il faut conclure.
Mme Samantha Cazebonne. - Cette proposition de loi n'est pas hors sujet. Protéger nos enfants n'est pas qu'une question de législation, mais un impératif moral.
M. Laurent Burgoa. - Déjà deux minutes de dépassement !
Mme Samantha Cazebonne. - Les droits des enfants doivent être respectés sur tout le territoire national, sans exception. (M. Laurent Burgoa manifeste son impatience grandissante.)
Le Comité des droits de l'enfant de l'ONU nous regarde. Les Français nous regardent. (Applaudissements sur les travées du GEST et du RDPI ; M. Christopher Szczurek applaudit également.)
M. Louis Vogel, rapporteur de la commission des lois . - La commission des lois n'a pas adopté cette proposition de loi, considérant qu'elle n'est pas adaptée à l'objectif poursuivi. Ses auteurs défendront des amendements tenant compte de certaines remarques juridiques de la commission.
Les réserves de la commission sont doubles. D'abord, le texte entend couvrir des situations très différentes par un dispositif unique fondé sur les sévices faits aux animaux, ce qui est une source d'incohérence substantielle. Surtout, la loi n'a pas à se substituer aux parents, s'agissant de traditions locales avérées.
Cette proposition de loi couvre à la fois les combats de coqs et les courses de taureaux, or ce sont deux traditions différentes.
Si la tradition des combats de coqs décline en Flandres et dans le Nord-Pas-de-Calais, tel n'est pas le cas dans les outre-mer. Assimilée à la pratique des paris, c'est une activité d'adultes. L'accès est libre, sans vente de billets. Le dispositif proposé supposerait un contrôle de l'accès et donc une implication forte des pouvoirs publics, alors que le nombre de mineurs présents est faible. Outre le risque de déport vers les pratiques illégales, une telle mesure risquerait d'être perçue comme une remise en cause des cultures locales et une source de tension inutile.
S'agissant des courses de taureaux, mes observations ne sont pas de pure forme. Interdire la présence de mineurs de 16 ans, y compris lors des courses de taureaux sans mise à mort, rendrait très complexe l'organisation des courses de taureaux landaises ou camarguaises.
M. Laurent Burgoa. - Absolument !
Mme Monique Lubin. - N'est-ce pas !
M. Louis Vogel, rapporteur. - La proposition de loi entend interdire les situations où le mineur de moins de 16 ans assiste à la course ou au combat, mais également celles où il y participe - mais elle ne dit rien des écoles taurines. La loi pénale est d'interprétation stricte : le texte interdirait à des mineurs de 16 ans d'assister à une corrida, mais pas à des enfants de 6 ou 8 ans de se former à la tauromachie...
Plus grave du point de vue du droit, la proposition de loi entend traiter de la protection des mineurs en modifiant deux articles du code pénal relatif au bien-être animal, et sans modifier le régime pénal. Elle fait reposer sur l'organisateur la responsabilité liée à la présence d'un mineur de 16 ans, sans rien prévoir pour les parents ni pour le mineur qui aurait bravé l'interdiction. Pour les exploitants de salles de cinéma, leur responsabilité s'exerce conjointement avec la responsabilité parentale, et est sanctionnée par une contravention. Cela paraît plus approprié.
La présence d'un seul mineur de 16 ans transformerait un spectacle légal en sévices graves infligés à un animal, avec circonstances aggravantes. Cela exposerait les personnes physiques à une peine de cinq ans de prison et 75 000 euros d'amende, et les personnes morales à l'interdiction d'exercice de l'activité professionnelle. Alors que pour une salle de cinéma, c'est une contravention ! Pareilles sanctions, qui aboutiraient de fait à interdire la corrida, ne sont pas conformes à l'échelle des peines du code pénal.
La loi doit-elle déterminer à la place des parents l'âge auquel on peut assister à une corrida ?
La commission des lois n'a pas trouvé de motif suffisant pour retenir l'âge de 16 ans. Ce seuil, correspondant à la fin de l'obligation scolaire et à l'émancipation, a été jugé trop bas par certains, trop élevé par d'autres, la majorité sexuelle étant fixée de 15 ans. Certains ont proposé un seuil à 14 ou à 12 ans. Bref, il n'y a pas de consensus.
L'interdiction proposée substitue l'appréciation du législateur à celle des collectivités concernées. Les traditions locales ininterrompues ouvrent droit à exemption, car elles sont identifiées juridiquement à des coutumes. Le législateur ne peut intervenir sans toucher à la nature même des traditions locales - qui suppose la possibilité de transmission.
Les règlements taurins municipaux sont un véhicule plus adapté pour encadrer le fonctionnement des écoles taurines et la présence et la participation des mineurs aux spectacles.
Il n'est pas opportun de substituer l'appréciation du législateur à celle des parents. Eux seuls, dans le cadre de l'exercice de l'autorité parentale, elle-même encadrée par le code civil et éventuellement le juge aux affaires familiales, peuvent déterminer si un enfant peut assister ou non à un spectacle fondé sur une tradition reconnue par la loi.
Cette proposition de loi nous semble inapplicable et disproportionnée. Nous proposons de ne pas l'adopter. (Applaudissements sur plusieurs travées des groupes Les Républicains, UC et du RDSE ; M. Marc Laménie, Mme Monique Lubin et M. Denis Bouad applaudissent également.)
M. Didier Migaud, garde des sceaux, ministre de la justice . - Je partage la préoccupation des auteurs relative à la protection des enfants, notamment au risque de surexposition à des images violentes. L'intérêt supérieur de l'enfant doit nous guider.
Toutefois, les premiers protecteurs de l'intérêt de l'enfant sont ses propres parents. L'autorité parentale, définie dans le code civil, est un ensemble de droits et devoirs ayant comme finalité l'intérêt de l'enfant. Il est de la liberté de chacun de choisir sa culture, ses coutumes, ses pratiques ; l'État n'a pas à se montrer paternaliste ou intrusif, au risque de déresponsabiliser les parents. À chacun son rôle.
Va-t-on pénaliser les parents qui laissent leur enfant regarder des vidéos sur les réseaux sociaux ou jouer à des jeux vidéo violents ? On ne résoudra rien en sanctionnant - on risque surtout de braquer, a fortiori quand la question est culturelle. La prévention est plus efficace.
J'entends l'objectif général de lutte contre la maltraitance animale. Notre droit réprime déjà les sévices graves, les actes de cruauté, l'abandon, les expériences illicites, les atteintes à la vie de l'animal et les mauvais traitements. Nous veillons à sa bonne application sur l'ensemble du territoire.
Les courses de taureaux et les combats de coqs sont exclus des infractions visées aux articles 521-1 et 522-1 du code pénal en cas de tradition locale ininterrompue - notion strictement encadrée par la jurisprudence de la Cour de cassation.
Une tradition locale ininterrompue a ainsi été reconnue dans plusieurs communes des régions Nouvelle-Aquitaine, Occitanie et Provence-Alpes-Côte d'Azur pour les courses de taureaux. Sont concernées par les combats de coqs une cinquantaine de communes des départements du Nord et du Pas-de-Calais, mais aussi La Réunion, la Guadeloupe, la Martinique, la Guyane et la Polynésie française.
Le Conseil constitutionnel a jugé que l'exclusion applicable à ces territoires ne méconnaissait pas le principe d'égalité devant la loi pénale. Il contrôle la nature même de la pratique. Il a ainsi validé l'incrimination de la création de nouveaux gallodromes, au motif que le législateur traitait différemment des situations différentes. Là aussi, la jurisprudence a trouvé un point d'équilibre qu'il serait préjudiciable de bousculer.
Interdire aux mineurs de 16 ans l'accès aux courses de taureaux et aux combats de coqs sous-tendrait un contrôle de l'âge légal des participants, qui aurait de lourdes implications concrètes. L'effet de bord serait d'autant plus important que l'accès aux combats de coqs est libre.
Les dispositions proposées n'atteignent pas l'objectif poursuivi. Elles mettent à mal l'équilibre jurisprudentiel trouvé et pourraient entraîner des effets de bord. C'est pourquoi le Gouvernement est défavorable à cette proposition de loi. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe Les Républicains, du RDPI, des groupes INDEP et UC et du RDSE)
M. Laurent Burgoa . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Au regard des difficultés de notre pays, je m'étonne du dépôt d'un tel texte.
Vous l'aurez compris à mon accent, je vais surtout parler de corrida. Je mesure que pour quelqu'un qui n'a pas été initié à la tauromachie, celle-ci peut troubler. C'est ce trouble qui en fait un art aussi populaire, en témoigne la fréquentation de nos arènes.
La corrida et ses acteurs ont pour tutelle le ministère de la culture : c'est en effet un pan de notre culture que nous voulons pouvoir transmettre. Comme toute culture, elle nécessite qu'on s'y intéresse, sans préjugés, pour l'apprécier.
La tauromachie est née d'un culte du taureau, qui remonte à l'antiquité. Je vous invite à visiter un élevage de toros bravos. Ce ne sont pas ceux que vous voyez au salon de l'agriculture. Élevés en semi-liberté en terre de Camargue, ils sont choyés par les éleveurs, auxquels je rends hommage. Ils mènent une vie bien plus paisible et plus libre que leurs congénères destinés à l'abattoir. Leur mort, nous la souhaitons digne d'eux et cherchons à la magnifier.
Dans une société aseptisée, numérisée, transhumaniste, la corrida nous interroge sur notre rapport à la mort, et donc à la vie.
Les aficionados, dont je suis, n'ont jamais cherché à faire de prosélytisme. Ils souhaitent simplement que leur culture soit respectée et puisse être transmise.
Les collectivités membres de l'Union des villes taurines françaises n'ont pas attendu le législateur pour faire figurer à leur règlement que les moins de 12 ans doivent être accompagnés.
Notre pays est confronté à bien des difficultés, mais la culture taurine n'en est pas une. Si vous souhaitiez nous diviser davantage, du Nord au Sud en passant par les outre-mer, vous ne vous y seriez pas pris autrement ! Respectons nos identités, laissons aux parents le choix de transmettre notre culture.
Je me réjouis du rejet du texte par notre commission des lois et remercie Louis Vogel pour son écoute.
Passons à des sujets plus importants pour notre pays.
Notre groupe votera très majoritairement contre cette proposition de loi ; certains s'abstiendront ou voteront pour. (Applaudissements sur de nombreuses travées des groupes Les Républicains, UC et du RDSE ; MM. Jean-Pierre Grand et Pierre Ouzoulias applaudissent également.)
Mme Nicole Duranton . - Cette proposition de loi ouvre un débat sur la protection des mineurs et le respect des traditions culturelles. L'ayant cosignée, je la défendrai.
Notre code pénal protège les mineurs de l'exposition à des images violentes. Les combats de coqs ou de taureaux sont violents et sanglants. L'encadrement existe en cas de diffusion à la télévision ou en ligne, mais pas dans la vie réelle.
Cela dit, j'entends les objections relatives à l'autorité parentale. Il faut conserver la liberté d'éduquer ses enfants comme on l'entend.
La tauromachie et les combats de coqs sont ancrés dans notre patrimoine culturel. Il est fondé de vouloir préserver cet héritage.
J'entends également l'argument de la discrimination : interdire aux mineurs l'accès aux arènes, mais leur permettre de chasser pourrait être perçu comme une atteinte au principe d'égalité.
Indéniablement, le secteur de la tauromachie crée des emplois dans nos territoires. Les écoles taurines transmettent des valeurs de discipline, de courage et de respect. Nous n'ignorons pas l'impact financier qu'aurait pour elles l'interdiction de la corrida pour les mineurs.
Cela vaut aussi pour les combats de coqs qui, en Guadeloupe, rassemblent nombre de personnes pour des moments conviviaux.
Mais une tradition justifie-t-elle d'exposer nos enfants à cette violence crue ? Ne doit-on pas réévaluer certaines pratiques culturelles à l'aune des valeurs que nous défendons ? Encourager l'évolution de nos traditions ne signifie pas éradiquer notre patrimoine, mais l'inscrire dans la modernité. Trouvons un équilibre entre la préservation de notre patrimoine culturel, la protection des mineurs et le bien-être animal.
Débattons de façon éclairée. Le RDPI est partagé, chacun votera selon sa conscience. (M. François Patriat, Mme Samantha Cazebonne, MM. Christopher Szczurek et Laurent Somon applaudissent.)
Mme Sophie Briante Guillemont . - (Applaudissements sur les travées du RDSE) Je sais le Sénat attaché à la défense des territoires et de leurs traditions locales, dont la corrida fait incontestablement partie. Les fêtes taurines sont devenues des corridas ritualisées au XVIe siècle. Ce sont les rois catholiques espagnols qui ont utilisé ce spectacle comme outil d'unification. Ce que l'on nomme tradition a des origines politiques ! La forme actuelle de la corrida résulte d'adaptations aux multiples prohibitions au cours des siècles, venant tant de l'Église que des autorités. La corrida a toujours eu ses détracteurs, c'est pourquoi elle s'est transformée.
La proposition de loi a le mérite de poser le débat. Il s'agit non pas d'interdire une tradition, mais de la mettre en conformité avec notre sensibilité actuelle. Il n'est pas question d'interdiction généralisée, mais de protection des mineurs. Hier, le Sénat votait un texte protégeant les enfants, et dénoncerait aujourd'hui leur protection comme un leurre ?
Plusieurs amendements viseront à corriger les imperfections juridiques du texte.
Assister aux spectacles de corrida ou de combats de coqs n'est pas anodin, compte tenu de leur violence. Seul l'intérêt supérieur des enfants doit nous guider. Le Comité des droits de l'enfant de l'ONU s'inquiète de l'état émotionnel des enfants qui y sont exposés. L'Équateur, plusieurs États du Mexique ou encore le Portugal ont interdit l'accès des corridas aux mineurs.
Nombre d'études ont montré les conséquences délétères pour les plus jeunes de l'exposition à des actes de cruauté envers les animaux. Les pédopsychiatres auditionnés par le rapporteur l'ont confirmé.
Cela dit, je me dois d'exposer les arguments de mes collègues du RDSE. Les parents savent mieux que nous ce qui convient à leurs enfants, et s'inquiètent de voir reculer l'autorité parentale. Il vaudrait mieux légiférer sur l'accès aux écrans. Pourquoi se cantonner seulement aux taureaux et aux coqs ? Pourquoi ne pas légiférer sur le bien-être animal dans son ensemble ? L'absence de concertation avec les intéressés est également un motif de regret.
Ces arguments ne m'ont pas convaincue. J'insiste : le seul intérêt de ce texte réside dans une meilleure protection des enfants.
Chaque membre du RDSE votera selon sa conscience. (Applaudissements sur les travées du RDSE, du RDPI et du GEST, ainsi que sur quelques travées des groupes SER et CRCE-K ; M. Arnaud Bazin applaudit également.)
Mme Isabelle Florennes . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) La dette, les ravages du narcotrafic, les défis migratoires, autant de défis majeurs auxquels nous devons faire face. Dans ce contexte, y avait-il urgence à se préoccuper de l'accès des mineurs aux corridas ? La question est légitime.
M. Loïc Hervé. - Bravo !
Mme Isabelle Florennes. - Cela n'est pas le plus urgent.
M. Christopher Szczurek. - C'est absurde !
Mme Isabelle Florennes. - Nous n'avons pas besoin de ces tensions alors que ce débat est parsemé de faux-semblants.
In fine, le véritable enjeu est l'interdiction des corridas et combats de coqs (MM. Laurent Burgoa et Jean-Pierre Grand applaudissent), pas tant pour protéger les mineurs que pour défendre la condition animale. Cette position est légitime, mais il faut le dire clairement !
Cette proposition de loi n'est pas la voie adéquate pour atteindre l'objectif. Sans nier la violence de ces spectacles, nous partageons les griefs exprimés par le rapporteur. Ce texte soulève de nombreux problèmes de droit et de fait, ce qui le rend inadapté et inopportun.
Il assimile des situations différentes. Nous ne saurions adopter un dispositif identique pour la corrida et les combats de coqs.
Si l'extinction des combats de coqs représente un objectif pour le législateur, les corridas font l'objet d'un régime moins restrictif - il est ainsi permis de construire de nouvelles infrastructures taurines.
Les combats de coqs sont une activité d'adultes, qui plus est en libre accès, souvent liée à des paris. Instaurer des contrôles serait coûteux et difficile, et favoriserait les combats illégaux.
Il faudrait distinguer les courses de taureaux avec ou sans mise à mort, et dissocier le cas du mineur spectateur de celui participant au spectacle.
Sur le plan pénal, la responsabilité pénale concentrée sur l'organisateur paraît disproportionnée. Quid du jeune ayant enfreint la loi ou de ses parents ? La simple présence d'un mineur aurait pour conséquence de requalifier ces pratiques en sévices graves envers les animaux, avec à la clé de lourdes peines. Ce n'est pas audible, sauf à assumer que ce texte vise l'interdiction de ces combats.
En outre, une telle interdiction limiterait de facto l'exercice de l'autorité parentale.
Enfin, comment envisager de modifier de la sorte des traditions locales sans concertation avec les acteurs de terrain ? Le Sénat, chambre des territoires, a toujours le souci de privilégier le dialogue et la concertation locale. Ce serait une caricature de mesure venue d'en haut !
M. Laurent Burgoa. - Très bien !
Mme Isabelle Florennes. - Je salue le travail précis et éclairant de Louis Vogel. Il a su trouver les arguments juridiques et politiques pour nous démontrer que cette proposition de loi n'est pas adaptée. Le groupe UC votera très majoritairement contre. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains, à l'exception de M. Arnaud Bazin)
M. Loïc Hervé. - Évidemment !
Mme Cécile Cukierman . - Corridas et combats de coqs font débat parfois jusque tard dans la nuit et divisent. Beaucoup d'entre nous préféreraient débattre d'autre chose.
M. Loïc Hervé. - Très bien !
Mme Cécile Cukierman. - Aucun habitant n'est obligé d'y assister tous les week-ends. (M. Thomas Dossus ironise.)
Sont concernés les territoires ayant une tradition locale ininterrompue. Les corridas sont plus encadrées que les combats de coqs. Il est plus aisé d'organiser un combat de coqs clandestin qu'une corrida, car il est plus facile de cacher un coq qu'un taureau dans un sac... (Sourires)
M. Ronan Dantec. - C'est juste.
Mme Cécile Cukierman. - Cette proposition de loi mélange deux pratiques totalement différentes, et saute du coq au taureau. (Sourires)
Les auteurs du texte se sont attachés à la composition du public : faut-il interdire la présence de mineurs ? Est-ce à nous de le faire ou aux parents ? Le danger est d'abord pour ceux présents dans l'arène : le taureau et les toreros.
L'empreinte psychologique ? On peut porter la même accusation contre les jeux vidéo, taxés de rendre les enfants violents ; ils sont pourtant autorisés et même considérés comme des jeux culturels. On y consacre même des salons ! Faisons confiance aux parents.
Nous ne mettons pas au même niveau les violences sexuelles et la violence des combats de coqs ou des corridas.
La corrida fait naître le rejet ou la passion. Certains enfants veulent entrer dans l'arène après avoir fréquenté une école taurine - c'est d'ailleurs ainsi que s'est perpétuée la tradition.
Les enjeux touristiques sont centraux, les retombées économiques importantes. Priver les familles souhaitant s'y rendre, par passion ou par curiosité, revient à priver ces territoires d'une attractivité particulière, sans les avoir consultés.
Vous l'aurez compris : ce texte ne nous a pas convaincus.
Compte tenu des fractures qui affectent déjà notre pays, entre jeunes et vieux, entre villes et campagnes, ce texte n'est pas à la hauteur des enjeux. Le CRCE votera majoritairement contre, mais le vote sera libre. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K ainsi que sur quelques travées des groupes SER, Les Républicains et UC)
Mme Raymonde Poncet Monge . - (Applaudissements sur les travées du GEST) Est-ce bien légitime de défendre l'intérêt supérieur de l'enfant en le préservant de spectacles cruels, demandait une oratrice, lorsqu'on a 3 000 milliards de dette ? Plus que de s'interroger sur le port du voile pour les accompagnateurs scolaires ! (M. Max Brisson ironise.)
Le code pénal condamne le fait d'exposer un enfant à des contenus violents, mais, au nom de la tradition, tolère leur présence à une corrida.
Comment tolérer cette contradiction ?
Le Comité des droits de l'enfant de l'ONU est préoccupé par l'état de santé mentale des enfants exposés à la tauromachie. En 2016, il demandait à la France de limiter les pratiques préjudiciables à l'intérêt de l'enfant. Cela n'a pas éliminé la corrida. Nul ethnocide, comme le prétend l'Union des villes taurines de France : c'est simplement respecter les fondamentaux de la protection de l'enfance.
Ces recommandations s'appuient sur de nombreuses études établissant un lien entre le fait d'assister à des actes de cruauté envers les animaux et le fait d'en commettre ensuite. Il y a un apprentissage par l'observation d'actes de maltraitance, a fortiori s'ils sont approuvés par les proches.
En 2009, l'université de Madrid a montré que la majorité des enfants réprouvait spontanément la corrida et ressentait de l'empathie face à la souffrance animale. Cela fait naître un conflit émotionnel chez l'enfant confronté aux manifestations de joie de ses proches, donc de l'anxiété. Une fois passé le traumatisme initial, l'approbation des proches fonctionne comme un apprentissage, entraînant une diminution des valeurs et du sens moral.
Certaines études montrent qu'être témoin de violences animales peut conduire au harcèlement scolaire. Continuerons-nous à les ignorer au seul prétexte de la tradition ?
L'exposition à des actes de violence contrevient au bon développement de l'enfant. La corrida ne doit pas échapper aux prescriptions sur la protection de l'enfance.
Le GEST avait déposé une proposition de loi semblable. Soucieux de la protection des enfants et de la lutte contre la maltraitance animale, nous voterons ce texte. (Applaudissements sur les travées du GEST ; Mmes Samantha Cazebonne, Nicole Duranton, Sophie Briante Guillemont et M. Christopher Szczurek applaudissent également.)
Mme Marie-Pierre de La Gontrie . - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Chers collègues...
M. Loïc Hervé. - Vous allez nous parler des corridas à Paris ?
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. - Jaloux ! (Sourires)
Une fois n'est pas coutume, le vote du groupe SER ne sera pas unanime. L'équilibre est quasi parfait entre tendances favorables et défavorables à ce texte.
En équilibriste, le rapporteur Louis Vogel a trouvé des arguments juridiques pour rejeter cette proposition de loi. Le vrai sujet qui aurait dû être assumé comme tel est le suivant : est-on pour ou contre la corrida ?
Mme Samantha Cazebonne. - Tout à fait !
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. - Les combats de coqs sont un autre sujet.
Mme Laurence Rossignol. - Vous n'en avez jamais vu !
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. - Pour ma part, je voterai ce texte, mais je souhaite présenter les arguments de mes collègues qui s'y opposent.
La tradition, l'identité locale, l'activité économique. Qui n'a pas assisté à une corrida ne peut comprendre. C'est un spectacle époustouflant, l'ambiance dans l'arène est inouïe. Les toreros, les fanfares, les pasodobles... Même si vous n'y êtes pas favorable, allez voir une corrida !
Je mettrai de côté l'argument de l'autorité parentale. On ne peut pas à la fois trouver normal d'interdire la vente d'alcool ou les jeux de hasard aux mineurs et considérer qu'en l'espèce, l'autorité parentale doit primer. Parfois, la société doit s'intéresser à la façon dont les mineurs sont traités par leurs propres parents - mais pas sans discussion.
Les arguments en faveur du texte sont nombreux : protéger les enfants, éviter l'accoutumance à la violence. Il s'agit aussi de prendre en compte la condition animale - mais si la mise à mort d'un animal vous est insupportable, devenez végan !
Assumons franchement le débat sur ce sujet complexe, plutôt que d'adopter des contorsions juridiques parfois difficiles à suivre.
La pratique est déjà modérée en France : elle est interdite, sauf lorsqu'elle est autorisée au nom des traditions locales, parfaitement identifiées territorialement.
Voilà pourquoi notre vote sera partagé. Espérons qu'une conciliation se dessine avec le temps. Pour ma part, je voterai ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du RDPI)
M. Loïc Hervé. - C'était parfait !
M. Christopher Szczurek . - Pour une fois, je m'exprimerai à titre personnel. Mes convictions animalistes sont profondément ancrées.
M. Loïc Hervé. - Vous aussi, vous aimez les chats ! (Sourires)
M. Christopher Szczurek. - Je n'assimile pas la chasse à de la violence gratuite.
Il est délicat de mettre les pratiques visées ici dans le même sac.
J'ai un problème avec les violences inutiles et symboliques. L'ultraviolence est suffisamment présente dans notre société pour exposer des mineurs à un esthétisme morbide.
Évitons d'utiliser des exutoires sensibles et vivants, qui n'ont rien demandé. Ceux qui nous disent qu'il ne faut pas humaniser l'animal à outrance sont les mêmes qui cherchent à parer la corrida de noblesse. Dépecé, débité et servi dans la grande distribution, l'animal n'a que faire de l'honneur qui lui est rendu.
La tradition n'est pas bonne par nature. La grandeur d'une civilisation est de distinguer le bon grain de l'ivraie et d'écarter certaines traditions pour en conserver d'autres. (M. Loïc Hervé s'exclame.)
On ne peut voir dans toute tradition une bonne chose. Et l'on peut s'interroger sur le caractère historique et populaire de la corrida.
Ce texte aborde le sujet sous le prisme de la protection de l'enfance, mais il faut aussi évoquer la dignité animale. Alors que des alternatives sans souffrance et sans mise à mort existent, elles sont systématiquement refusées avec mépris.
Soyez assuré de mon soutien personnel - ma formation politique respecte la liberté de conscience de chacun.
Je remercie ceux qui oeuvrent souvent bénévolement à la défense de la cause animale. (Mmes Samantha Cazebonne, Nicole Duranton et M. Arnaud Bazin applaudissent.)
Mme Laurence Rossignol. - (S'adressant à Mme Samantha Cazebonne) Non ! Il ne faut pas applaudir !
M. Jean-Pierre Grand . - Ce texte, juridiquement contestable, s'apparente à une abolition de la corrida et des combats de coqs. On peut s'interroger sur l'opportunité de débattre d'un sujet clivant et non prioritaire, dans le contexte politique actuel, alors que les extrêmes veulent paralyser nos institutions. À l'Assemblée nationale, le député LFI Aymeric Caron est l'adversaire acharné des corridas...
Ce texte est perçu par notre sud populaire comme discriminant nos traditions taurines, sacrées. Le code pénal reconnaît la corrida comme une exception culturelle lorsque la tradition est ininterrompue.
Ne nous y trompons pas : sous prétexte de protéger les mineurs, cette proposition de loi est un faux nez pour interdire la corrida.
Depuis le milieu du XIXe siècle, la jeunesse du sud de la France participe aux corridas : cela ne se manifeste pas par un surcroît de violence. Aucune étude scientifique n'a démontré le moindre effet.
La vraie violence s'exprime ailleurs : à la télévision, sur internet. Les enfants, dès 12 ans, peuvent regarder Terminator, film pervertissant la jeunesse jusqu'à la criminalité. (M. Yan Chantrel, Mme Laurence Rossignol et M. Thomas Dossus ironisent.)
Laissons aux parents exercer leur droit sacré d'autorité parentale.
La corrida est un patrimoine culturel immatériel. Ne détruisons pas la pratique de la tauromachie. Le groupe INDEP votera contre. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; MM. Denis Bouad et Henri Cabanel applaudissent également.)
M. Arnaud Bazin . - (Mme Samantha Cazebonne applaudit.) Je remercie Samantha Cazebonne pour sa ténacité. Je remercie également notre rapporteur, qui a eu l'honnêteté de reconnaître que c'est un texte de protection de l'enfance, et le président Patriat pour l'inscription du texte à l'ordre du jour.
Non, cette proposition de loi n'est pas hypocrite. Bien sûr, les auteurs de la proposition de loi sont contre la corrida. Mais nous sommes lucides et conscients du rapport de force à l'Assemblée nationale, qui n'a même pas pu débattre du sujet. Ne pourrions-nous pas, à tout le moins, limiter les dégâts et éviter aux mineurs d'y être confrontés ? L'accusation d'atteinte à la sincérité de ce texte est déplacée.
Que dit l'article 521-1 du code pénal ? Il pénalise les actes de cruauté et les sévices envers les animaux. Trois ans de prison et 45 000 euros d'amende, ce n'est pas rien. La présence de mineurs est une circonstance aggravante. Dans ce cas, on n'a pas eu de problème à introduire la protection des mineurs dans un texte visant à protéger les animaux... (Mme Samantha Cazebonne applaudit.)
La corrida, ce sont des actes de cruauté et des sévices graves. Dans le code pénal, la corrida est tout à fait caractérisée pour ce qu'elle est.
Le législateur est intervenu à de nombreuses reprises pour protéger les mineurs : l'autorité parentale est alors battue en brèche.
L'article D. 4153-37 du code du travail interdit aux jeunes de moins de 18 ans d'effectuer des travaux d'abattage, d'euthanasie et d'équarrissage des animaux. C'est bien la preuve qu'assister à de tels actes est nocif pour le développement psychologique des mineurs.
Il n'y a pas d'acte de cruauté dans la course camarguaise et la course landaise : aucun problème pour légiférer, donc.
Lorsqu'un mineur est exposé à la vue répétée de sévices, il est statistiquement sujet à en commettre. Les mécanismes psychologiques de conflit de loyauté ont été démontrés par les psychiatres.
Enfin, il y a le bon sens des parents, tout simplement. Qui emmènerait spontanément son enfant voir des actes de cruauté ?
Mme Monique Lubin. - Justement !
M. Arnaud Bazin. - Enfin, l'argument selon lequel interdire l'accès des mineurs à la corrida irait à l'encontre de cette pratique est totalement réversible : si on ne conditionne pas les mineurs à assister à des corridas, ils n'iront pas en voir une fois devenus adultes. (Applaudissements sur les travées du RDPI et du GEST ; M. Yan Chantrel et Mme Sophie Briante Guillemont applaudissent également.)
Discussion des articles
Article 1er
M. Arnaud Bazin . - La peine serait disproportionnée selon la commission. Nous en avons tenu compte : l'un de nos amendements prévoit une amende de 7 500 euros - la même qu'en cas de vente d'alcool à des mineurs. Ne votons pas l'amendement de suppression de l'article, sinon nous empêcherons le débat de se tenir.
M. Max Brisson . - Je défendrai la corrida non pas comme une tradition, mais comme une culture, une identité et une sensibilité.
L'article 1er interdit la corrida en présence de mineurs de moins de 16 ans en faisant porter l'infraction sur les organisateurs. Il suffirait de faire entrer un mineur dans une arène pour mettre à mal l'organisation d'une corrida. Il s'agit non pas de se préoccuper de santé mentale, mais d'interdire la corrida.
Selon l'Union des villes taurines de France, un enfant de moins de 12 ans doit être accompagné dans la plupart des cas.
Les corridas sont régies par des règlements municipaux. Cet article porterait atteinte au droit de différenciation des collectivités. Il poursuit les mêmes visées que les propositions de loi d'interdiction de la corrida. En supprimant la transmission de la corrida aux enfants, on la condamne à mort. (M. Laurent Burgoa et Mme Elsa Schalck applaudissent.)
M. Pierre Ouzoulias . - Je m'interroge sur le titre de la proposition de loi. Vous nous dites que vous voulez interdire la corrida en présence de mineurs de moins de 16 ans. Pourquoi ne pas avoir inversé les termes et interdit la présence de mineurs de moins de 16 ans aux corridas ? Comme Max Brisson, je pense qu'il aurait été plus clair d'interdire la corrida.
Vous voulez protéger les enfants, mais savez-vous que la chasse accompagnée est possible en France à partir de 15 ans, notamment la grande vénerie ? (M. Laurent Burgoa renchérit.)
À 15 ans, on peut assister à la mise à mort d'un cerf lors d'une chasse à courre, mais on ne pourrait pas assister à celle d'un taureau dans une arène ? Ce n'est pas logique.
Mme Laurence Rossignol. - J'avais déposé une proposition de loi contre la chasse à courre...
M. Pierre Ouzoulias. - Je ne suis pas favorable à la chasse à courre, mais je veux pointer le manque de logique.
La France importe chaque année 1,2 million de têtes de bétail. Dans certains pays étrangers, l'abattage se fait-il dans des règles de respect de la souffrance animale ? Je n'en suis pas sûr, et je pense même que des mineurs participent à la mise à mort, dans les abattoirs.
Mme Raymonde Poncet Monge. - Et alors ?
M. Pierre Ouzoulias. - On pourrait forger des textes plus responsables et moins hypocrites, et éviter ce faux débat sur la corrida.
M. Henri Cabanel . - Nos lois sont trop souvent bavardes. Dépensons notre énergie à voter des lois que les Français attendent. Je ne pense pas que ce soit le cas en l'espèce.
Je partage les propos de Pierre Ouzoulias sur l'hypocrisie de la proposition de loi. On met en avant l'exposition à la violence des moins de 16 ans pour lutter contre la corrida. Il aurait été beaucoup plus simple de déposer une proposition de loi contre la corrida comme Aymeric Caron l'a fait plutôt que d'utiliser cet artifice.
Avec ce texte, les organisateurs seraient responsables. Or la plupart d'entre eux se trouvent dans une situation économique difficile.
Les parents ne sont-ils pas les gardiens de l'intérêt supérieur de l'enfant ?
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. - Pas toujours.
M. Henri Cabanel. - La corrida est une fête. Les Français en ont besoin. Laissons-les tranquilles. (Applaudissements sur quelques travées du groupe Les Républicains ; Mme Isabelle Florennes applaudit également.)
M. Thomas Dossus . - Il y a quelques mois, nous pointions le laxisme des exploitants de plateformes pornographiques. Nous avons régulé le secteur : c'est bien la société qui fixe les limites. Ne nous réfugions pas derrière l'argument de l'autorité parentale. Il en va de même pour les paris en ligne. Mais cela ne veut pas dire qu'on souhaite interdire la pornographie ou les paris en ligne : nous voulons protéger les mineurs. C'est la même chose dans les bars, où les cafetiers n'ont pas le droit de leur vendre de l'alcool.
Nous devons fixer le cadre de ce qui est acceptable ou non. Exposer un mineur à ce spectacle de torture animale ne l'est pas, assurément.
Mme Laurence Rossignol . - La question du bien-être animal est un sujet philosophique passionnant, qui interroge les rapports de l'homme avec le reste du vivant. Avec la révolution industrielle, les animaux ont été réifiés et notre droit a progressivement construit les notions de bien-être animal, de protection des animaux et de sensibilité animale.
Il faut avoir le courage de reconnaître que la corrida est une dérogation à l'ensemble des règles de notre droit, au nom de la tradition. Culture, tradition, peu importent les nuances. Sommes-nous prêts à défendre ces dérogations en leur nom ?
J'entends les collègues qui considèrent qu'il y a déjà suffisamment d'incendies dans leur territoire pour ne pas en allumer d'autres.
Mais tout le monde reconnaît que les taureaux ont la même sensibilité que les labradors - c'est l'article 521-1 du code pénal. Les enfants ne doivent pas être éduqués à se réjouir de la cruauté vis-à-vis des animaux.
Mme Samantha Cazebonne . - Je veux m'exprimer, au nom des 80 % de Français qui souhaitent que nous nous emparions de ce sujet.
Moi aussi, je viens du Sud-Ouest, comme mon nom l'indique, mais je veux que les choses évoluent.
Certains d'entre vous, chers collègues, ont voté en faveur de la protection des enfants. Nous, enfants, avons mis nos ceintures de sécurité à l'arrière de la voiture, par obligation, et nous vous en remercions, car vous nous avez sauvés.
Écoutons les arguments des enfants traumatisés par ces spectacles. Le débat doit être respecté.
M. Guillaume Gontard . - Je remercie les auteurs de cette proposition de loi importante. Nous avions déposé, il y a quelques années, une proposition de loi interdisant la corrida.
On n'autorise pas tout au nom des traditions, et heureusement !
J'ai été élevé en milieu rural. J'ai vu tuer le cochon et dépecer un lapin, par mon grand-père : je sais d'où vient la nourriture. Mais il s'agit ici d'un tout autre débat.
J'ai vu une corrida, et cela m'a traumatisé - j'y pense encore. C'est une mise en scène cruelle de la mort. Que des adultes y aillent consciemment, à la rigueur, mais faut-il laisser des enfants assister à la célébration de la mort ? On doit protéger les enfants et ne pas les faire assister aux mêmes spectacles que les adultes.
Mme Monique Lubin . - Cette proposition de loi n'est que le faux nez de l'extinction de la corrida et des combats de coqs.
Un extraterrestre au Sénat, qui assisterait à nos débats, aurait l'impression que tous les enfants assistent tous les jours à des corridas ! Or ces spectacles sont encadrés et rares : il s'agit de quelques arènes, dans lesquelles se déroulent quelques corridas chaque année et où le nombre de mineurs y est infinitésimal.
M. Thomas Dossus. - Oui, et alors ?
Mme Monique Lubin. - Les enfants présents y assistent en compagnie d'adultes qui leur ont expliqué la chose.
La protection des enfants est nécessaire, face à une actualité qui chaque jour les agresse. De grâce, les enfants ne sont quasiment jamais exposés à ces spectacles ! (MM. Denis Bouad, Jean-Pierre Grand, Henri Cabanel, Laurent Burgoa et Max Brisson applaudissent.)
M. Éric Kerrouche . - Ce texte est hypocrite : il vise la fin de la corrida et pas autre chose. Le travail du rapporteur montre qu'il n'est pas opérationnel juridiquement.
Sans être aficionado, je me rends à des corridas, dont le spectacle peut effectivement être dur, surtout dans une société qui cache la mort - notamment des animaux. Néanmoins, la corrida reste un combat dont il ne faut pas nier l'essence.
La corrida n'existe que là où il y a tradition. Je n'aime pas ce mot de tradition. Contrairement à Laurence Rossignol, je pense qu'il y a une différence entre tradition et culture. Et la corrida fait partie des cultures locales.
On est en train de dire à une partie de la population que leur diversité culturelle, qui fait aussi la France, n'a pas de sens et qu'il y a un seul mode de vie dans notre pays.
Je voterai l'amendement de suppression. (Applaudissements sur quelques travées du groupe Les Républicains)
Mme Cécile Cukierman . - Quel est le vrai sens de cette proposition de loi ? Nous avons reçu de nombreux courriers et vu un déchaînement sur les réseaux sociaux. La question n'est-elle pas l'interdiction de la corrida et des combats de coqs plutôt que la protection des enfants ?
Pour qui les connaît, ces spectacles sont reconnus comme culture et non comme tradition. Est-il violent d'emmener un enfant au Louvre pour voir des statues grecques nues ? (Mme Raymonde Poncet Monge mime une brasse coulée et plusieurs sénateurs du groupe SER s'exclament ironiquement.) Chacun a sa définition de la violence...
La corrida ne peut pas être comparée à un accident de la route ni rapportée à la question du port de la ceinture à l'arrière de la voiture. (M. Laurent Burgoa applaudit.)
M. Laurent Burgoa . - Bien sûr, je voterai l'amendement de suppression de M. Grand.
Madame Cazebonne, lors de la discussion générale, chacun a exprimé ses positions, pour ou contre. C'est la démocratie.
Il n'y a pas de mineurs seuls aux corridas. Ils viennent avec leurs parents. Mes parents m'ont emmené à 5 ans : suis-je plus traumatisé que d'autres ? (M. Henri Cabanel renchérit.) J'ai emmené mon fils et ma fille : lui a adhéré, elle non.
La corrida est-elle plus violente qu'un combat de boxe ? Si c'est le cas, il faudrait aussi interdire aux enfants d'assister à un combat de boxe. (Applaudissements sur quelques travées du groupe Les Républicains ; MM. Pierre Ouzoulias, Henri Cabanel et Mme Isabelle Florennes applaudissent également.)
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. - Bonne idée ! On va y penser.
Mme Raymonde Poncet Monge . - Vous m'expliquerez l'exemple du Louvre, car je suis dépassée... (Mme Cécile Cukierman s'exclame.)
J'ai déposé une proposition de loi identique et je n'autorise personne à dire que je souhaitais faire autre chose. Alors, oui, il y a aussi une proposition de loi du GEST pour interdire la corrida, antérieure à ma propre proposition.
Pour interdire la corrida aux mineurs, j'ai consulté de nombreux travaux scientifiques qui montrent que ces combats créent des traumatismes émotionnels chez les enfants. Le Portugal, le Mexique, le Venezuela se sont posé la question de l'âge auquel on pouvait être confronté, sans dégât émotionnel, à la cruauté gratuite envers un animal, alors même que les autres spectateurs sont dans la joie et la bonne humeur. Ces États ont instauré une limite d'âge sans interdire la corrida ! Ne vous en déplaise.
M. le président. - Amendement n°1 rectifié sexies de M. Grand et alii.
M. Jean-Pierre Grand. - Comme l'a souligné notre rapporteur, l'instrument juridique retenu n'est pas adapté au but poursuivi. L'objet est, non pas le bien-être animal, mais la protection des enfants. Or en modifiant l'article 521-1, le dispositif n'aurait d'autre effet que d'interdire les courses de taureaux et les combats de coqs. Je rappelle que les courses camarguaises et landaises sont des jeux sportifs, qui n'aboutissent pas à la mort de l'animal... Par ailleurs, cette proposition de loi ne dit rien des écoles taurines.
Pour toutes ces raisons, supprimons l'article 1er. Et idem pour l'article 2.
M. Louis Vogel, rapporteur. - Avis favorable. D'un point de vue strictement juridique, brancher un texte de protection de l'enfance sur des dispositions de droit pénal relatives aux sévices contre les animaux conduira à des dysfonctionnements.
Tradition locale ininterrompue signifie usage. Celui-ci évolue de lui-même, sous l'influence des habitants concernés, ici les parents. Ayons la main tremblante avant de modifier un système juridique, nous conseillait Portalis. (L'orateur se tourne vers la statue de Portalis.)
Les mineurs sont exclus des casinos, pour éviter la dépendance aux jeux d'argent. Quand on va à un spectacle, on fixe des limites d'âge, on n'exclut pas. (M. Thomas Dossus et Mmes Samantha Cazebonne et Raymonde Poncet-Monge protestent.)
Il faut respecter le droit et l'appliquer, sauf motifs tout à fait exceptionnels, que je n'ai pas trouvés. (MM. Laurent Burgoa et Max Brisson applaudissent.)
M. Didier Migaud, garde des sceaux. - Même si le Gouvernement est défavorable à la proposition de loi, sagesse sur la suppression de l'article 1er.
Mme Laurence Rossignol, rapporteur. - Cette proposition de loi n'a pas de sens caché. Les spectacles où les animaux souffrent et sont mis à mort ne sont pas conformes à nos règles communes. En interdisant ces spectacles aux enfants, nous soulignons le caractère dérogatoire des corridas et des combats de coqs, qui ne sont pas des spectacles pour enfants. Si ces spectacles ont été épargnés jusqu'à présent, c'est parce que des rapports de force politiques ont obligé le législateur à prévoir des dérogations.
Le droit de la protection de l'enfance s'est construit par dérogation à la liberté éducative et à l'autorité parentale : nous protégeons les enfants, y compris contre leurs parents. C'est pourquoi les casinos sont interdits aux mineurs, même si leurs parents veulent les y emmener ; même chose pour l'accès aux sites pornographiques. Pis, exposer des enfants à des images pornographiques est une défaillance de l'autorité parentale. Sans rappeler les débats sur l'interdiction de frapper son enfant - certains collègues estimaient que cela allait à l'encontre de la liberté éducative... (Applaudissements sur les travées du GEST ; M. Yan Chantrel et Mme Samantha Cazebonne applaudissent également.)
M. Arnaud Bazin. - Si l'amendement est adopté, nous ne pourrons examiner les amendements suivants sur cet article. Souhaitez-vous arrêter le débat maintenant ? J'aimerais bien savoir pourquoi mon amendement qui répond à l'objection de la commission sur le caractère proportionné de la sanction n'a pas reçu d'avis favorable.
Peut-on exposer sans risque un enfant à un spectacle d'actes de cruauté conduisant à la mort d'un animal ? La réponse est clairement non. Le psychisme de certains enfants ne le supportera pas ; les études montrent que le risque est réel et certain.
Pourquoi est-il si difficile d'adopter une mesure somme toute assez bénigne ? Cela relève d'un mécanisme psychique profond. Considérer comme moralement inacceptable quelque chose que l'on a accepté pendant de longues années nécessite élévation et ouverture d'esprit. Je vous y invite. (Applaudissements sur les travées du GEST ; Mmes Laurence Rossignol, Sophie Briante Guillemont et Véronique Guillotin applaudissent également.)
M. Max Brisson. - Lors de la discussion générale, le débat concernait l'objet de la proposition de loi, désormais nous débattons de l'interdiction de la corrida.
Sans être juriste, je constate que notre pays, jacobin, a du mal avec le droit local.
Nos municipalités ont beaucoup travaillé sur leur règlement taurin, à l'écoute des attentes de la société. Nous sommes l'assemblée des communes de France : respectons le travail des maires qui accueillent et organisent des corridas. Si les corridas méritent d'être vues, les règlements taurins méritent d'être lus. (M. Laurent Burgoa applaudit.)
Mme Raymonde Poncet Monge. - Je n'ai pour objectif que d'interdire la corrida aux moins de 16 ans. Monsieur le rapporteur, nous posons une limite d'âge, rien de plus. Dans beaucoup de pays, l'interdiction vise les enfants de moins de 12 ans et non les adolescents, notamment au Portugal et en Espagne, mais la corrida continue dans ces pays. Il y a bien une limite d'âge pour regarder des films porno, et ça continue !
Mme Samantha Cazebonne. - J'insiste : nous souhaitons protéger les enfants. Le Portugal, l'Équateur, la Catalogne, les Baléares où je réside ont légiféré...
M. Laurent Burgoa. - Ils sont revenus sur leur position !
Mme Samantha Cazebonne. - Oui, malheureusement le pouvoir central espagnol est revenu sur les décisions du pouvoir régional. Mais, depuis, plus aucun enfant n'a assisté à une corrida en Catalogne ou aux Baléares ! (M. Laurent Burgoa le conteste.)
Mme Frédérique Espagnac. - Ils les ont supprimées !
Mme Samantha Cazebonne. - Je regrette vos arguments. Vous avez rendu ce texte hors sujet. Les experts du Comité des droits de l'enfant de l'ONU constateront, en lisant nos débats, que nous ne sommes pas au rendez-vous.
M. Henri Cabanel. - Nous partageons tous l'objectif de protéger les enfants. Il y a bien des sujets où les enfants sont exposés.
Mme Raymonde Poncet Monge. - On s'en occupe !
Mme Laurence Rossignol. - Nous n'arrêtons pas de penser à cela !
M. Henri Cabanel. - Si l'on tape « jeux très violents » sur internet, le premier résultat est « jeux sanglants » !
Mme Samantha Cazebonne. - L'un n'empêche pas l'autre !
M. Henri Cabanel. - Il y a d'autres priorités ! (MM. Laurent Burgoa, Max Brisson, Loïc Hervé et Denis Bouad applaudissent.)
Mme Laurence Rossignol. - Ce n'est pas ça, protéger les enfants ! Vous ignorez le travail qui est réalisé dans l'hémicycle, et tout ce que font les acteurs de la protection de l'enfance !
Mme Frédérique Espagnac. - L'interdiction de la corrida dans les autonomies espagnoles était très politique, en réaction au pouvoir central. (MM. Laurent Burgoa et Max Brisson applaudissent et renchérissent.) Elle est intervenue en 2011 ; l'État central est revenu dessus en 2016. Certes, depuis, au vu de la situation politique, rien ne s'est passé. Mais cela n'a rien à voir avec la corrida ! (Mêmes mouvements)
À la demande du groupe INDEP et du GEST, l'amendement n°1 rectifié sexies est mis aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°37 :
Nombre de votants | 322 |
Nombre de suffrages exprimés | 309 |
Pour l'adoption | 254 |
Contre | 55 |
L'amendement n°1 rectifié sexies est adopté, et l'article 1er est supprimé.
Les amendements nos6 et 4 n'ont plus d'objet.
Après l'article 1er
M. le président. - Amendement n°3 rectifié de Mme Poncet Monge et alii.
Mme Raymonde Poncet Monge. - Il existe déjà plusieurs écoles taurines ouvertes aux enfants dès 6 ans, où ils peuvent tuer des animaux et commettre des actes de cruauté. Or cela relève du code pénal !
Rien ne justifie de laisser un enfant tuer un animal de façon gratuite, avec des banderilles et un poignard. C'est un entraînement à la cruauté.
Nous proposons donc d'interdire les écoles taurines pour les mineurs de moins de 16 ans.
M. Louis Vogel, rapporteur. - Cet amendement complète la loi sur un point qu'elle ne traitait pas. L'encadrement des pratiques des écoles relève des règlements taurins municipaux. L'interdiction de s'inscrire avant 16 ans dans ces écoles me paraît disproportionnée et ignore le rôle de ces écoles. Avis défavorable.
M. Didier Migaud, garde des sceaux. - Avis défavorable.
M. Laurent Burgoa. - Je remercie le garde des sceaux et le rapporteur de leur avis.
On me dit qu'on ne veut pas porter atteinte à la corrida, et maintenant on veut interdire l'accès aux écoles taurines à des mineurs de moins de 16 ans. Madame Poncet Monge, avez-vous déjà été, une seule fois, dans une école taurine ? Avant d'interdire, allez voir. Au lieu d'être dans la rue (M. Thomas Dossus s'exclame), ces jeunes y apprennent le respect des uns et des autres.
Venez les voir, un samedi après-midi, avec moi. Vous verrez que ces jeunes sont comme les autres, des jeunes normaux. Pourquoi interdire à un mineur de vivre sa passion ?
M. Jean-Pierre Grand. - Bravo !
M. Arnaud Bazin. - L'amendement de Mme Poncet Monge ne nous paraissait pas nécessaire : les écoles taurines, si elles ne pratiquent pas la course de taureaux, sont visées pas l'interdiction de sévices graves.
Si on considère qu'elles pratiquent la course de taureaux, l'interdiction aux moins de 16 ans prévue par la proposition de loi s'appliquerait de plein droit. Le texte a toute sa cohérence.
Je ne voterai pas l'amendement.
M. Max Brisson. - En effet, la proposition de loi mettait déjà en péril, sans l'amendement de Mme Poncet Monge, les écoles taurines.
Je ne doute pas des convictions de Mme Poncet Monge. Je parlerai moi aussi avec mon coeur. Une école taurine, c'est une école de règles, de codes, et non de barbarie. C'est l'apprentissage d'une histoire et d'une culture. Bien sûr, on y apprend la confrontation avec le taureau, progressivement, avec des professionnels.
Nous respectons les personnes opposées à la corrida. Mais les écoles taurines sont des écoles de la vie, où l'on vit une passion, où l'on apprend une discipline.
Envoyons un message positif à ces écoles qui, dans nos régions - nous ne demandons pas qu'elles essaiment ailleurs -, jouent un rôle social déterminant. (MM. Laurent Burgoa et Cédric Vial ainsi que Mme Elsa Schalck applaudissent.)
À la demande du groupe Les Républicains, l'amendement n°3 rectifié est mis aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°38 :
Nombre de votants | 318 |
Nombre de suffrages exprimés | 306 |
Pour l'adoption | 47 |
Contre | 259 |
L'amendement n°3 rectifié n'est pas adopté.
Article 2
M. le président. - Amendement n°2 rectifié quinquies de M. Grand et alii.
M. Jean-Pierre Grand. - Je vous ferai grâce de l'exposé des motifs... les raisons sont les mêmes que pour l'amendement n°1 rectifié sexies. Je demande la suppression de l'article 2.
M. le président. - Amendement identique n°7 de M. Bazin et Mme Cazebonne.
M. Arnaud Bazin. - Défendu !
M. Louis Vogel, rapporteur. - Par cohérence avec la position de la commission sur l'article 1er, avis favorable.
M. Didier Migaud, garde des sceaux. - Comme pour l'article 1er, sagesse.
M. le président. - Si cet article était supprimé, la proposition de loi n'aurait plus d'objet. Il n'y aurait donc pas d'explication de vote. Y a-t-il des demandes de prise de parole ?
M. Arnaud Bazin. - Mon amendement n°6 de réécriture de l'article 1er n'a pas pu être examiné, du fait de la suppression de l'article 1er. Or mon amendement n°7 de suppression de l'article 2 s'articulait avec celui-ci. Je demandais cette suppression, mais pour des raisons différentes de celles de notre collègue.
M. Laurent Burgoa. - Je voterai l'amendement de suppression.
Madame Cazebonne, le Sénat a pris position. L'article 2 risque de connaître le même sort que l'article 1er. Cela vous honorerait d'en prendre acte et de retirer votre proposition de loi avant le vote de l'article 2.
Dans mon département, j'ai défendu le président Patriat, qui aime la chasse et les traditions. (Sourires)
M. François Patriat. - C'est vrai. (Sourires)
M. Laurent Burgoa. - Beaucoup l'ont vilipendé, et je l'ai défendu.
Vous voyez que les jeux sont faits. Un retrait du texte vous honorerait et honorerait le Sénat, dans l'intérêt de tous.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. - Ce n'est pas correct !
Mme Samantha Cazebonne. - Vous parlez d'honneur ? Moi, je fais honneur au Comité des droits de l'enfant de l'ONU. C'est sans doute ce qui nous distingue ! (Applaudissements sur les travées du GEST ; Mme Sophie Briante Guillemont applaudit également.)
Mme Raymonde Poncet Monge. - Nous redéposerons ce texte, convaincus de l'intérêt de poser une limite d'âge à la corrida, spectacle de cruauté gratuite.
Je veux bien aller dans une école taurine mais pas le jour où l'on massacre un veau.
M. Laurent Burgoa. - Venez, je vous expliquerai. (Mme Cécile Cukierman s'en amuse.)
M. Max Brisson. - Le débat n'a pas été agressif. La remarque de mon collègue Burgoa sur M. Patriat était sympathique. Tous les groupes sont divisés sur le sujet. (M. Thomas Dossus le nie de la main.) Ces positions sont respectables. Chacun parle avec sa sensibilité, avec son parcours, la vision qu'il peut avoir de la corrida et des activités taurines. Un peu de respect. Votre intervention est brutale par rapport à l'intervention amicale de Laurent Burgoa (Mme Marie-Pierre de La Gontrie le conteste.)
Madame Cazebonne, vous vous référez sans cesse à l'ONU. Bien des fois, j'ai des réticences sur les positions de l'ONU. Ce n'est pas l'alpha et l'oméga de ce que nous devons décider en France. (MM. Laurent Burgoa et Cédric Vial applaudissent.)
Mme Monique Lubin. - Je comprends très bien que tout le monde n'apprécie pas ces combats de coqs ou de taureaux. Mais je suis un peu étonnée des références selon lesquelles ces enfants sont en danger.
Qui fait ces études, qui les commande, qui les paie, et combien d'enfants sont-ils concernés ?
Je le répète : le nombre de mineurs assistant à des corridas est infinitésimal.
Madame Cazebonne, je n'aime pas que l'on soupçonne que je n'ai pas d'honneur. Personne n'a considéré que quelqu'un ici manquait d'honneur. Je n'en manque pas. Nous sommes, tout comme vous, des personnes respectant les droits des enfants et nous nous battons pour cela.
Ce n'est pas parce que je ne souhaite pas cette interdiction que je perdrais mon honneur. (MM. Laurent Burgoa et Loïc Hervé applaudissent.)
À la demande du groupe INDEP et du GEST, les amendements identiques nos2 rectifié quinquies et 7 sont mis aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°39 :
Nombre de votants | 319 |
Nombre de suffrages exprimés | 301 |
Pour l'adoption | 237 |
Contre | 64 |
Les amendements identiques nos2 rectifié quinquies et 7 sont adoptés. En conséquence, l'article 2 est supprimé et l'amendement n°5 n'a plus d'objet.
La proposition de loi n'est pas adoptée.
Prochaine séance, lundi 18 novembre 2024, à 16 heures.
La séance est levée à 19 h 20.
Pour le Directeur des Comptes rendus du Sénat,
Rosalie Delpech
Chef de publication
Ordre du jour du lundi 18 novembre 2024
Séance publique
À 16 h 00, le soir et la nuit
Présidence :
M. Gérard Larcher, président,M. Loïc Hervé, vice-président, M. Dominique Théophile, vice-président
Secrétaires : Mme Marie-Pierre Richer, M. Guy Benarroche
1. Projet de loi de financement de la sécurité sociale, dont le Sénat est saisi en application de l'article 47-1, alinéa 2, de la Constitution, pour 2025 (n°129, 2024-2025) (discussion générale)
2. Suite du projet de loi de financement de la sécurité sociale, dont le Sénat est saisi en application de l'article 47-1, alinéa 2, de la Constitution, pour 2025 (n°129, 2024-2025) (discussion des articles)