Financement de la sécurité civile : soutenir les Sdis dans leur gestion des nouveaux risques
M. le président. - L'ordre du jour appelle le débat sur le thème : « Financement de la sécurité civile : soutenir les Sdis dans leur gestion des nouveaux risques », à la demande du groupe RDSE.
M. Philippe Grosvalet, pour le groupe RDSE . - (Applaudissements sur les travées du RDSE ; Mme Émilienne Poumirol applaudit également.) La sécurité est une préoccupation majeure de nos concitoyens. Guerre aux portes de l'Europe, menace du narcotrafic dans nos campagnes et nos quartiers, difficultés pour nous soigner : les questions de sécurité saturent notre débat public. Mais la sécurité civile est moins souvent évoquée, en dehors des grandes catastrophes.
Nous avons, en France, un service public exceptionnel pour porter secours à nos concitoyens, sur simple appel téléphonique, 24 heures sur 24 et 365 jours par an, mobilisant des centaines de femmes et d'hommes, avec des moyens considérables, en tout point du territoire.
Ce service public repose sur un modèle unique, marqué tout d'abord par la coexistence de statuts variés : 198 800 sapeurs-pompiers volontaires, 43 000 professionnels et 13 200 militaires.
Unique aussi dans sa gouvernance, avec le couple maire-préfet pour l'opérationnel, le département et les communes pour la gestion.
Unique dans son financement : les Sdis sont largement financés par les collectivités, le département au premier chef.
Grâce au maillage de 6 100 centres, on compte 5 millions d'interventions par an. C'est un service public essentiel du quotidien.
Les Sdis ont connu de grandes évolutions depuis le début du XXe siècle avec la montée en compétences des sapeurs-pompiers, la mutualisation et la modernisation de leurs moyens, la rénovation des centres, et une meilleure planification des risques.
Mais il y a un hic. Certaines évolutions interrogent sur la capacité des Sdis à continuer à remplir leurs missions.
Notre système repose à 78 % sur les sapeurs-pompiers volontaires, qui ne représentent que 12 % de la dépense. L'engagement citoyen constitue le socle du modèle français. Mais cette spécificité est remise en cause par la directive européenne de 2003 sur le temps de travail et la jurisprudence Matzak de 2018. Une requalification du statut des sapeurs-pompiers volontaires avec une obligation de professionnalisation diminuerait le service rendu à la population.
Il faut garder l'hybridité des statuts, mais ne pas oublier que les droits sociaux des sapeurs-pompiers volontaires restent incomplets et qu'ils sont surmenés en raison de l'alourdissement de la charge opérationnelle. Le nombre d'interventions a crû de 30 % entre 2005 et 2021, avec sursollicitation médicale - trois quarts des interventions dans mon département de la Loire-Atlantique. Cela s'explique par la fragilisation des autres services publics de santé - désertification médicale, disparition des urgences en milieu rural, carences ambulancières.
Les sapeurs-pompiers volontaires s'interrogent de plus en plus sur le sens de leur engagement. Ils ont l'impression de se substituer à d'autres acteurs absents ou défaillants. Conséquence : une moindre attractivité, alors même que les phénomènes climatiques critiques - notamment outre-mer - et les évolutions démographiques mettent à l'épreuve notre système.
Nous devons conserver des capacités d'anticipation en amont et des capacités d'adaptation en aval. Cela passe par la consolidation du financement des Sdis - 5,39 milliards d'euros. Le modèle de financement, qui repose quasi exclusivement sur les collectivités territoriales, est à bout de souffle, car la situation budgétaire des départements est extrêmement préoccupante et impacte les budgets des Sdis. Les communes ne peuvent pas reprendre le relais en raison du plafonnement de leur contribution. Les collectivités territoriales ont de plus en plus de difficultés à suivre la dynamique de dépenses des Sdis.
Toutes les pistes sont à explorer, notamment l'élargissement de la fraction de taxe spéciale sur les conventions d'assurances (TSCA), l'augmentation de son taux, ou encore l'actualisation de son assiette, inchangée depuis 2003. La création d'une nouvelle part départementale additionnelle à la taxe de séjour mérite aussi d'être étudiée. Les travaux autour de la valeur du sauvé doivent être poursuivis, afin de ne pas oublier la participation des assureurs impactés positivement par les interventions des Sdis. Nouvelles recettes, mutualisation, recentrage des missions sur le coeur de métiers : autant de pistes à explorer.
J'ai présidé un Sdis pendant dix-sept ans. J'y ai vu des femmes et des hommes affronter tous les risques, parfois au péril de leur vie.
M. le président. - Il faut conclure.
M. Philippe Grosvalet. - Ils remplissent des missions qui n'ont pas de prix, mais qui ont un coût financier, et parfois humain. (Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur des travées des groupes CRCE-K, SER, INDEP et du GEST)
M. Nicolas Daragon, ministre délégué chargé de la sécurité du quotidien. - Merci de nous sensibiliser un peu plus sur ce sujet, qui fait partie du portefeuille que le Premier ministre m'a fait l'honneur de me confier.
Nous souhaitons préserver le modèle de sécurité civile français, largement fondé sur le volontariat, même s'il doit évoluer, notamment pour améliorer le statut des volontaires, qui constituent le gros des troupes.
Le Beauvau de la sécurité civile, qui sera rouvert le 25 novembre à Rouen, sera l'occasion d'évoquer tous les chantiers, dont celui du financement, qui pèse pour partie sur les départements, les communes, mais aussi le reversement d'une part de TSCA par l'État. Nous y travaillerons dans les mois à venir. Les contributions parlementaires et l'expertise des élus locaux seront les bienvenues. Je rencontre les acteurs de la sécurité civile depuis plusieurs semaines pour ne rien omettre dans l'ordre du jour des Beauvau. Nous voulons élaborer des propositions concrètes pour le mois de mars.
M. Ronan Dantec . - (Applaudissements sur les travées du GEST et du groupe SER) Je remercie le RDSE d'avoir suscité ce débat.
J'ai une pensée pour la région de Malaga, victime d'une goutte froide comme Valence il y a quinze jours. Nous basculons dans un monde nouveau et devons remettre à plat notre gestion des risques.
La prévention est essentielle, comme avec l'évacuation de 3 000 personnes à Malaga ou l'interdiction de circuler en Bretagne.
La question de l'artificialisation des sols est centrale : nous avons besoin du ZAN en urgence. À ce titre, je ne peux que me réjouir des propos très clairs de Mme Vautrin en commission. Elle a rappelé l'importante d'un palier à dix ans et pris ses distances avec la proposition de loi du groupe Les Républicains. (M. Jacques Fernique applaudit.)
Il faut aussi des pratiques agricoles respectueuses de l'environnement. En 2015, l'agence de l'eau avait alerté sur les liens entre les mutations du système agricole dans le Pas-de-Calais et le risque accru d'inondations.
Je rappelle les incendies en Gironde et dans les Monts d'Arrée. L'incendie de la forêt de Paimpont est peut-être devant nous. (Applaudissements sur les travées du GEST)
Pour faire face, nous devons redimensionner nos moyens d'intervention. Certes, il y a le pacte capacitaire, mais notre parc de Canadair est en très mauvais état. La mutualisation des moyens à l'échelle européenne - notamment du bassin méditerranéen - doit être débattue.
Un pacte capacitaire inondation devra être mis à l'ordre du jour du Beauvau de la sécurité, car on manque de pompes. Le plan national d'adaptation au changement climatique (Pnacc) n°3 sera l'occasion de vérifier l'engagement de l'État.
Le statut des sapeurs-pompiers volontaires et l'articulation entre professionnels et volontaires doivent être remis à plat.
La baisse des dotations fragilise notre capacité de réponse aux risques. Doit-on sacraliser des budgets ?
Le risque est devant nous, le réchauffement climatique est là. Nous n'avons pas le temps de procrastiner. (Applaudissements sur les travées du GEST et du RDSE ; MM. Pierre Barros et Hervé Gillé ainsi que Mme Patricia Schillinger applaudissent également.)
M. Nicolas Daragon, ministre délégué. - Le premier chantier des Beauvau sera la résilience, c'est-à-dire la prévention et le traitement des risques inondation et incendie.
Je m'associe à votre message de compassion envers les Espagnols. Nous nous sommes portés volontaires pour les aider : la solidarité européenne fonctionne, même si elle doit être renforcée.
Oui, notre flotte aérienne vieillit. Nous avons signé une lettre d'intention avec un consortium, dont fait partie Airbus, pour créer un appareil analogue aux Canadair. Le pacte capacitaire sera tenu. Nous prévoyons d'acheter deux pompes de grande capacité en 2025.
M. Hervé Gillé . - Malaga, Valence, l'actualité nous rappelle chaque jour l'ampleur des défis auxquels notre pays doit faire face : inondations, feux de forêt, crises sanitaires... Ces événements imprévisibles exigent une réponse rapide et adaptée. Dans ce contexte, nous devons soutenir nos Sdis, piliers de la sécurité civile.
En Gironde, les mégafeux de 2022 ont touché plus de 30 000 hectares et mobilisé des milliers de pompiers.
N'oublions pas la santé des sapeurs-pompiers. Je salue le remarquable rapport d'Émilienne Poumirol sur les cancers professionnels chez les sapeurs-pompiers. (Mme Émilienne Poumirol apprécie.)
Les Sdis doivent être mieux soutenus et équipés. La force aérienne nationale de la sécurité civile doit être renforcée, avec des moyens stationnés dans le massif des Landes de Gascogne.
Nous devons réformer le système de financement, car les départements et les communes sont exsangues. Le soutien de l'État aux pactes capacitaires doit être pérennisé et un pacte pour le risque inondation mériterait d'être créé.
Le mode de calcul de la TSCA doit prendre en compte le potentiel budgétaire et la pression démographique - près de 20 000 habitants supplémentaires par an en Gironde. Une péréquation doit aussi être envisagée au profit des départements les plus soumis aux aléas.
Les quatre points de cotisation de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) représentent 9 millions d'euros sur trois ans pour la Gironde. Qui va compenser ?
Nos pompiers ont besoin de tenues de protection adaptées aux risques chimiques notamment, or elles coûtent jusqu'à 2 000 euros pièce.
Il faut prendre en compte la valeur du sauvé, pour sortir de la logique de coûts. Une évaluation socio-économique de l'action des Sdis pourrait être envisagée.
Nous devons renforcer les capacités des Sdis par un financement pérenne - c'est un impératif absolu. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE-K, ainsi que du RDSE et du GEST)
M. Nicolas Daragon, ministre délégué. - Un travail sur la santé des sapeurs-pompiers a été entamé, par Émilienne Poumirol notamment. Un observatoire de la santé a été créé. Les nouvelles tenues de feu, disponibles l'an prochain, coûteront moins de 1 000 euros.
Les difficultés de financement seront abordées le 11 ou le 12 décembre. Nous nous réunirons avec les départements pour aborder toutes les questions de fiscalité et trouver le meilleur système.
M. Pierre-Jean Verzelen . - (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP) Comme nombre d'entre nous ici, j'ai eu la chance de présider un Sdis. J'ai rencontré des gens dévoués. Notre modèle de sécurité civile fonctionne bien.
Merci au groupe RDSE pour ce débat.
La sauvegarde du modèle tel qu'il existe, c'est celle du statut de sapeur-pompier volontaire, qui représente 80 % des effectifs. La mobilisation de ces volontaires permet d'assurer un maillage territorial efficace et des interventions rapides. Mais une épée de Damoclès menace le statut à la française. Depuis l'arrêt Matzak et la décision du comité européen des droits sociaux du Conseil de l'Europe, plane le risque que le sapeur-pompier volontaire soit requalifié en travailleur. Ce serait l'effondrement du modèle ! Il faut saisir la Commission européenne. J'avais d'ailleurs interpellé les têtes de liste aux dernières élections européennes, en vain.
Les casernes sont l'un des derniers services publics ouverts toute la nuit, avec toujours quelqu'un au bout du fil. Conséquence : les Sdis assument des missions qui ne sont pas les leurs. Le Samu a pris la mauvaise habitude d'appeler les pompiers, qui suppléent les ambulances et les Smur. Or ces interventions sont peu, voire pas, compensées par les ARS.
Je ne puis passer sous silence la nécessaire augmentation de la part de la TSCA revenant aux départements pour financer les Sdis. Dans l'Aisne, les factures des jeux Olympiques ne sont toujours pas payées... Ne répétons pas les mêmes erreurs que pour les loyers de gendarmerie.
Monsieur le ministre, nous attendons vos propositions. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP et sur quelques travées du RDSE)
M. Nicolas Daragon, ministre délégué. - Nous sommes particulièrement attachés au modèle fondé sur le volontariat, nous le conforterons. Non, les sapeurs-pompiers volontaires ne sont pas des travailleurs, mais certaines situations, comme les gardes postées, les fragilisent. Nous allons donc revenir à des pratiques plus adaptées au droit européen, en lien avec d'autres pays européens dont le modèle est comparable au nôtre.
Il est délicat de faire exercer des missions qui ne sont pas les leurs par les sapeurs-pompiers volontaires : nous travaillerons lors du Beauvau avec le ministère de la santé sur la doctrine d'emploi, pour nous recentrer probablement sur l'urgence. Nous aurons peut-être aussi l'occasion de travailler avec les fédérations d'ambulanciers afin qu'ils assurent une meilleure couverture du territoire.
Nous aurons l'occasion de reparler de la TSCA à la mi-décembre : nous ne sommes pas fermés, il faut trouver un bon accord avec les fédérations d'élus communaux et départementaux.
Mme Françoise Dumont . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; MM. Olivier Bitz et Michel Masset applaudissent également.) Le financement de la sécurité civile est un serpent de mer.
Rapporteure pour avis des crédits de la sécurité civile dans le PLF 2025, j'ai proposé de réévaluer la TSCA, taxe dynamique, mais répartie sur des critères obsolètes. La sanctuarisation de l'intégration des véhicules d'incendies et de secours dans les exceptions à l'accise sur les énergies est une autre piste. Rouvrons aussi le chantier de la contribution des métropoles et des grandes agglomérations au budget des Sdis, par souci d'équité.
Nous devons aussi explorer la piste de nouvelles ressources : pourquoi ne pas attribuer une part de la taxe de séjour, ou d'une taxe sur les plateformes touristiques ? Mais cette mesure ne serait vertueuse que pour les seuls départements touristiques.
Les Sdis pourraient aussi facturer leurs prestations, en lien avec la téléalarme et la télésurveillance, mais cela va à l'encontre de la jurisprudence actuelle.
Les carences ambulancières méritent d'être revalorisées à hauteur du coût réel de la prestation, en lien avec une simplification de la procédure de remboursement, directement de l'ARS aux Sdis, sans passer par les centres hospitaliers universitaires (CHU).
Enfin, les assureurs devraient prendre une part plus importante dans le financement des Sdis.
Le groupe de travail sur la sécurité civile du groupe Les Républicains, dont nous vous avons remis le rapport, a recommandé de favoriser la mutualisation des commandes entre les Sdis, avec un appui de votre ministère, afin de réduire les coûts d'achat de véhicules et de matériels et de favoriser l'émergence d'une offre française et européenne. Il a également recommandé la création d'un guichet unique national pour faciliter l'accès aux fonds européens, auxquels nous avons peu recours, faute parfois de formation.
La situation financière des Sdis est précaire et doit être rapidement améliorée, afin de sanctuariser ce service disponible sept jours sur sept partout en France. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du RDPI ; MM. Olivier Bitz et Michel Masset applaudissent également.)
M. Nicolas Daragon, ministre délégué. - Merci pour le rapport que vous m'avez remis le 30 octobre dernier : il est très intéressant.
Votre voeu a été exaucé : un ministre est dédié à la sécurité civile, je suis là ! (Sourires)
S'agissant de la mise en place d'une politique industrielle nationale et européenne de sécurité civile, sachez que nous avons signé une lettre d'intention pour un avion bombardier d'eau, fabriqué chez nous.
Cet après-midi, j'ai échangé avec la fédération des directeurs de Sdis à propos des fonds européens : parfois ils ne répondent pas aux critères, parfois ils n'ont pas l'ingénierie humaine, même si certains ont réussi, à l'instar de l'Ardèche qui a pu acheter des tablettes numériques grâce à 2 millions d'euros des fonds européens. Nous devons diffuser les bonnes pratiques.
Nous avons obtenu 30 % d'économies sur les prix d'achat des camions grâce à une commande groupée. J'ajoute que 98 % des camions achetés étaient français.
L'exonération de taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) est à la signature de Bruno Retailleau, pour 300 000 euros par Sdis en moyenne.
La piste de la taxe de séjour sera évoquée : il me semble normal qu'un touriste contribue à la sécurité du lieu qu'il visite.
S'agissant des remboursements, nous sommes passés de 125 euros en 2022 à 209 euros en 2023, et je reste attentif à la revalorisation régulière de cette somme.
Mme Patricia Schillinger . - (Applaudissements sur les travées des groupes UC, SER et du RDSE ; Mme Françoise Dumont applaudit également.) Les inondations récentes en Espagne ou en octobre dernier en France témoignent de la fréquence croissante des événements climatiques extrêmes. On assiste aussi à la multiplication et à l'intensification des feux de forêt. Ces conséquences du bouleversement climatique mobilisent nos Sdis. C'est pourquoi il est si important de lutter contre le réchauffement climatique et de soutenir ces services essentiels à la sécurité des Français.
Les nouvelles menaces - terroristes, chimiques, biologiques - nécessitent une préparation humaine et technique spécifique. Les sapeurs-pompiers sont appelés à être de plus en plus polyvalents.
Je rends hommage à nos 240000 sapeurs-pompiers dont 80 % sont volontaires et j'ai une pensée émue pour ceux qui ont perdu leur vie ou ont été blessés dans leur mission.
Face à ces bouleversements, les missions du Sdis évoluent, avec des conséquences sur leurs dépenses, déjà fort dynamiques. La modernisation des équipements, l'amélioration des conditions de travail et les indispensables revalorisations salariales nécessitent des investissements coûteux, à la charge principalement des départements. L'État assure un quart du financement et les intercommunalités se sont en partie substituées au bloc communal.
Face à la recrudescence des feux de forêt, le Président de la République a renforcé la flotte aérienne, essentielle pour les interventions rapides. Des équipements adaptés aux risques nucléaire, radiologique, biologique et chimique (NRBC) ont été déployés. La formation et la coopération interservices ont été développées.
L'exonération de la taxe sur les carburants pour les véhicules d'incendie et de secours, d'initiative sénatoriale, allège les charges pesant sur les Sdis.
Reste que les défis demeurent nombreux. La hausse des dépenses étant difficilement tenable à long terme, il est impératif d'explorer de nouvelles pistes de financement. Les marges de manoeuvre des départements sont faibles : comment renforcer leurs ressources pour financer les Sdis ? Puisse le Beauvau de la sécurité civile s'emparer de cette question cruciale.
Il faut aussi lutter contre les sursollicitations liées au transport sanitaire, dans la continuité de la loi Matras, et rendre le recours aux Sdis en cas d'absence de couverture ambulancière plus dissuasif, en révisant le tarif de l'indemnité de substitution.
Nous devons renforcer les incitations au volontariat, pour préserver un modèle qui montre des signes de faiblesse. L'efficacité de notre système d'intervention repose sur l'engagement des plus de 9 000 sapeurs-pompiers volontaires : ouvrons-leur la possibilité de la vétérance, pour soutenir les communes et le volontariat.
Il nous appartient de faire des choix stratégiques pour donner aux Sdis les moyens de remplir leurs missions. Plus que jamais, nous devons engager les réformes nécessaires et valoriser ces services indispensables à notre sécurité. (Applaudissements sur les travées du RDSE et des groupes UC et SER)
M. Nicolas Daragon, ministre délégué. - La récente crise en Espagne nous marque - celle qu'a traversée la France aurait pu être grave également. Nous ne déplorons que des blessés, preuve que les plans communaux de sauvegarde et notre sécurité civile fonctionnent.
Le Premier ministre et Agnès Pannier-Runacher ont présenté notre plan national d'adaptation. En plus des 11 millions d'euros prévus pour la gestion des risques complexes, 1 million d'euros supplémentaires iront notamment à l'achat de pompes de grande capacité. Contre les feux de forêt, les pélicandromes se déploient - nous en avons inauguré un à Marignane récemment. Nous prévoyons d'acquérir 36 hélicoptères EC146 en six ans.
Nous débattrons des pistes de financement le mois prochain.
M. Jean-Yves Roux . - (Applaudissements sur les travées du RDSE) Le Beauvau de la sécurité civile sera l'occasion de prendre en compte concrètement les difficultés des territoires ruraux.
La multiplication et la violence des risques climatiques placent les sapeurs-pompiers sous tension. Notre rapport sur les inondations montre que 53 % des départements ont été touchés par des inondations entre novembre 2023 et juin 2024. Les services de secours ont été confrontés à leurs limites, notamment au manque d'équipements et de moyens héliportés. Un renforcement capacitaire s'impose.
J'espère que le Gouvernement accueillera favorablement nos amendements destinés à mieux équiper nos Sdis, au moment où des compagnies d'assurances refusent d'assurer certains services, sinon avec des primes en hausse de 60 %.
Mme Émilienne Poumirol. - Exactement !
M. Jean-Yves Roux. - Dans les Alpes de Haute-Provence, les surcoûts se montent à 150 000 euros en 2023 et 250 000 euros en 2024. Or le recouvrement de la facturation des services est insuffisant.
Dans notre département, le système repose à 96 % sur les sapeurs-pompiers volontaires. Les difficultés de recrutement et l'épée de Damoclès que constitue la possible requalification de leur statut sont autant de problèmes supplémentaires.
Nos Sdis ont atteint un point de rupture. La sécurité civile ne saurait être une variable d'ajustement, le drame de Valence nous le rappelle. Avec Raphaël Daudet, nous plaidons pour un moratoire sur les ponctions financières afin d'aider les départements, exsangues. L'augmentation de quatre points de la cotisation à la CNRACL représente 180 000 euros en plus ; la perte de compensation représente 230 000 euros de recettes en moins. C'est autant de matériel renouvelé en moins.
Des mesures de bon sens s'imposent : mutualisation et péréquation, rationalisation de la commande et simplification des procédures.
Une augmentation de la part de TSCA versée aux départements me semble également indispensable.
Nous avons besoin d'un pacte capacitaire de sécurité civile et d'un contrat d'objectifs clair entre l'État, les départements et les collectivités partenaires.
Dans les Alpes de Haute-Provence, nous avons mis en place des stages pour les jeunes pompiers volontaires et un baccalauréat professionnel de sécurité civile, pour sensibiliser à ces enjeux dès le plus jeune âge. (Applaudissements sur les travées du RDSE)
M. Nicolas Daragon, ministre délégué. - J'ai reçu hier l'Association des maires ruraux de France : nous avons évoqué la sécurité civile, la police municipale et les gardes champêtres. Nous avons bien cerné le problème de recrutement des sapeurs-pompiers volontaires. Nous travaillons sur la reconnaissance et l'attractivité du volontariat. Sur la bonification de pension, le décret est en cours d'arbitrage.
Mme Émilienne Poumirol. - Il est temps qu'il paraisse !
M. Nicolas Daragon, ministre délégué. - En matière de transport sanitaire, 209 euros sont versés aux Sdis, mais le coût réel est supérieur à 400 euros. Nous aborderons ce sujet lors du Beauvau de la sécurité civile, en liaison avec le ministère de la santé.
M. Pascal Martin . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Les récentes inondations qui ont ravagé l'Espagne, mais aussi plusieurs départements français, rappellent le caractère vital des services de sécurité civile.
L'excellence des Sdis n'est plus à prouver. La France est d'ailleurs le premier contributeur au mécanisme européen de sécurité civile.
Mais les Sdis sont menacés par un effet ciseau : multiplication des événements climatiques - inondations, incendies, sécheresses, retrait-gonflement des argiles (RGA), risques industriels - et stagnation, voire régression, des moyens. Certes, des économies de gestion sont possibles via des mutualisations, mais cela ne résoudra pas tout. Ce débat est donc nécessaire, et je remercie le RDSE de l'avoir suscité.
Nous ne pouvons faire l'économie d'une réforme du financement des Sdis. Les financements ont d'ailleurs déjà été partiellement adaptés - je pense à l'exonération de malus écologique pour les véhicules. Mais une réforme plus fondamentale est nécessaire : le système de financement des Sdis par les départements et le bloc communal est à bout de souffle, comme l'a montré un récent rapport de l'IGA.
Il faut améliorer le rendement de la TSCA par une modification de l'assiette, de la péréquation ou de la fraction versée. On peut envisager aussi le versement aux Sdis d'une quote-part de la taxe de séjour ou d'une nouvelle contribution sur les locations de type Airbnb. Nous sommes plus réservés sur l'élargissement de la taxe Gemapi. Plus intéressantes sont les pistes consistant à facturer des prestations relevant d'un service privé et à valoriser le sauvé - des mesures disruptives nécessitant un changement culturel.
Nous ne nous adapterons à un réchauffement de 4 degrés qu'en réformant les Sdis dans cette perspective. (Applaudissements sur les travées du RDSE et du groupe INDEP ; Mme Émilienne Poumirol applaudit également.)
M. Nicolas Daragon, ministre délégué. - La France est le premier contributeur de l'Union européenne en formation et en déploiement. En ce moment, cinquante sapeurs-pompiers français sont à Valencia - je le dis en espagnol, un peu effrayé d'entendre depuis tout à l'heure ce qui arrive à Valence... (Sourires)
Une vingtaine de plateformes d'appels d'urgence 15 et 18 sont à l'étude. Nous devons réfléchir à d'autres pistes de mutualisation, comme nous l'avons fait pour l'achat de camions. Inspirons-nous aussi de la carte neige. Nous devrons discuter des ressources, de la présence des assureurs dans la gouvernance - plus nous ferons de prévention, plus leurs charges baisseront.
Mme Céline Brulin . - Le satellite Copernicus a montré que 2024 sera l'année la plus chaude jamais enregistrée. Inondations, feux de forêts, tornades, sécheresses : les interventions se multiplient, se diversifient et courent sur des durées de plus en plus longues. La pression capacitaire s'accroît d'autant sur les Sdis. Il y a un an, au moment de la tempête Ciaran, le Sdis de Seine-Maritime a dû réaliser 600 interventions en deux jours...
Ces évolutions devraient augmenter les coûts d'au moins 20 % d'ici à 2040. La désertification médicale et les carences ambulancières posent aussi problème. Lorsque les urgences ferment régulièrement, comme à Lillebonne et Fécamp, les Sdis sont davantage mis à contribution. Le secours à personne fait certes partie de leurs missions, mais ils sont de plus en plus contraints d'intervenir hors de leur champ de compétences. Le transport de personnes vers des lieux de soins de plus en plus éloignés a augmenté de 85 % en vingt ans.
Les Sdis sont aussi touchés par l'inflation des matériels et des carburants.
Leurs budgets sont assurés pour moitié par les départements, pour un tiers par les communes et intercommunalités. On voit mal, dans le contexte financier actuel, comment le budget 2025 aidera les collectivités territoriales à les soutenir. Le budget de la sécurité civile pour 2025 est d'ailleurs en baisse. En outre, les cotisations des employeurs territoriaux à la CNACRL augmenteront, ce qui pèsera sur les Sdis.
Les orateurs précédents ont évoqué la TSCA et la taxe de séjour. Ces pistes méritent d'être examinées.
Enfin, nos sapeurs-pompiers volontaires attendent la publication du décret sur la bonification de retraite pour ceux qui ont accompli au moins dix ans de service.
Nous participerons dans quelques jours, les uns et les autres, aux fêtes de la Sainte-Barbe. Nous valoriserons l'engagement et honorerons les disparus. Garantissons aussi aux sapeurs-pompiers les moyens de protéger nos concitoyens. (Applaudissements sur les travées du groupe SER, du RDSE, du RDPI et du groupe INDEP)
M. Nicolas Daragon, ministre délégué. - Je partage votre diagnostic sur le changement climatique. Nous devrons inculquer un modèle de prévention auprès de nos concitoyens.
En quelques heures, nous sommes en mesure de mobiliser des centaines de volontaires, comme récemment en Ardèche : 800 sapeurs-pompiers volontaires mobilisés en une heure.
La réforme du transport sanitaire urgent a fait baisser le nombre de carences de 14 % en 2023. Cette bonne pratique doit être amplifiée.
La baisse du budget de 3 % en 2025 s'explique par le décalage de la commande des Canadair, pas disponibles avant 2030, et notre choix de préférer un consortium européen. En réalité, le budget est plutôt étale.
Mme Émilienne Poumirol . - (Applaudissements sur les travées du RDSE et du RDPI) Je remercie le RDSE d'avoir provoqué ce débat sur un sujet fondamental.
Le financement des Sdis se précarise d'année en année.
Je ne reviendrai pas sur le problème du statut des sapeurs-pompiers volontaires, largement évoqué, même si, comme ancienne présidente d'un Sdis, j'y suis sensible. Je me concentrerai sur le financement des Sdis et la protection de la santé des sapeurs-pompiers.
Depuis les lois de 2002 relatives à la démocratie de proximité et de 2004 relatives à la sécurité civile, les contributions des communes sont figées. Le département est ainsi le principal financeur des Sdis, souvent aux deux tiers. En Haute-Garonne, la dotation de l'État est calculée sur la population de 2002, alors que le département gagne de 17 000 à 20 000 habitants chaque année : le conseil départemental compense.
Le PLF 2025 ne fait qu'accentuer les difficultés des départements. Comment pourront-ils encore soutenir les Sdis face aux nouveaux défis ?
Il est indispensable de réformer la part de TSCA versée aux départements, et d'en actualiser l'assiette. Il faut un pacte capacitaire inondation, comme pour le risque incendie. La prise en compte de la valeur du sauvé est un autre enjeu. Autre piste : leur attribuer une quote-part de la taxe de séjour pour faire contribuer les touristes.
Nous devons aussi protéger la santé de nos sapeurs-pompiers. Avec Anne-Marie Nédélec, j'ai publié un rapport sur la santé des pompiers. Les fumées toxiques, l'amiante, les retardateurs de flamme et autres substances sont autant de sources de cancers. Nous préconisons d'élargir la présomption d'imputabilité de certains d'entre eux, comme au Canada, aux États-Unis ou en Australie, et de mettre en place une véritable politique de prévention. Un nouveau modèle de cagoules filtrantes coûte 50 euros : comment les financer ?
Sans réponses concrètes de l'État, la qualité de ce service public, le dernier présent dans certains territoires, se dégradera. (Applaudissements sur les travées du RDSE, du RDPI et du groupe INDEP)
M. Nicolas Daragon, ministre délégué. - Merci pour votre travail sur la santé des sapeurs-pompiers. Nous travaillons sur une matrice emploi-expositions avec l'Inserm. Une étude sur les fumées des feux de forêt est également en cours. Les équipements de protection individuels filtreront 70 % des particules fines. Nous essayons de proposer une tenue polyvalente pour éviter des surcoûts majeurs.
Venez découvrir la Bourgogne le 12 décembre ! Nous aborderons les questions de financement. Mais je précise que le pacte capacitaire intègre déjà le risque inondation. La quote-part de taxe de séjour fait partie des pistes, je m'en suis entretenu avec David Lisnard.
Mme Annick Petrus . - La sécurité civile est un fondement de notre République. Elle repose sur une organisation capable de répondre aux besoins de chaque territoire.
La crise du volontariat exige de trouver de nouvelles incitations.
À Saint-Martin, un service territorial d'incendie et de secours (Stis) autonome sera créé en janvier prochain. J'y participe activement en tant que membre du comité de pilotage.
Nombre de territoires ultramarins font face à des défis naturels combinés aux exigences des activités portuaires et touristiques. Le territoire de Saint-Martin sera doublement voire triplement impacté, or il devra être autosuffisant.
Conventionné depuis 2007 avec le Sdis de la Guadeloupe, Saint-Martin était vulnérable. La nouvelle organisation, autonome, renforcera les moyens humains et matériels de gestion des risques. Nous disposerons de notre propre schéma d'analyse des risques.
Les collectivités territoriales ultramarines font face à des contraintes importantes amplifiées par l'insularité. Le coût de notre Stis, de plus de 9 millions d'euros, pèsera uniquement sur la collectivité. Il en va de même pour toutes les collectivités régies par l'article 74 de la Constitution.
Cette spécificité renforce la nécessité d'un accompagnement de l'État. Les besoins sont clairs et nombreux : renouveler les équipements obsolètes, recruter du personnel administratif, renforcer la formation des sapeurs-pompiers et fidéliser les sapeurs-pompiers volontaires.
M. le président. - Il faut conclure.
Mme Annick Petrus. - C'est un enjeu de souveraineté et de justice territoriale. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et INDEP, du RDPI et du RDSE)
M. Nicolas Daragon, ministre délégué. - Lors du Beauvau de la sécurité civile, nous traiterons en particulier des outre-mer, en liaison avec François-Noël Buffet.
À Saint-Martin, un service territorial autonome sera créé en janvier prochain. Des problèmes d'attractivité se posent dans ce territoire, au même titre que dans les territoires ruraux.
Nous avons testé récemment FR-Alert, un dispositif efficace. Il sera applicable dans tous les territoires ultramarins.
M. Olivier Bitz . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC, du RDPI et du RDSE) Les débats sur le financement de nos politiques publiques ont pris une acuité toute particulière ces derniers mois. Fidèle à ma ligne, je me suis refusé à envisager une hausse de prélèvements obligatoires.
Le modèle de financement de nos Sdis était déjà à bout de souffle. L'augmentation de quatre points des cotisations CNRACL représentera pour celui de l'Orne 200 000 euros de dépenses supplémentaires. S'ajoutent à cela la hausse des coûts d'assurance et l'inflation.
La demande opérationnelle dans le domaine sanitaire progresse bien plus vite que les ressources : forcément, cela coince ! Et le vieillissement de la population et les déserts médicaux renforcent encore la pression.
Les départements, premiers financeurs des Sdis, sont eux-mêmes asphyxiés. Alors que leur participation a plus que doublé entre 2021 et 2022, on constate depuis 2016 une légère baisse de leur contribution nette hors TSCA. Le ralentissement des efforts des départements envers les Sdis traduit leurs propres difficultés financières. Or le PLF prévoit - pour l'instant - de leur demander un effort supplémentaire de 2,2 milliards d'euros... Les Sdis ne relèveront pas les défis financiers si leur premier financeur est lui-même en grande difficulté.
Le premier risque est le risque RH, lié à l'érosion du volontariat, à mettre en regard de l'augmentation simultanée de la demande opérationnelle : moins de volontaires pour plus de missions. L'affaissement du volontariat obligerait à recruter des sapeurs-pompiers professionnels dont nous ne saurions pas financer les postes.
Les nouveaux risques de sécurité civile - liés aux feux de forêt, aux inondations, à la protection du patrimoine ou à la motorisation électrique - exigent de nouveaux moyens, mais ceux-ci ne doivent pas forcément être positionnés au niveau de chaque Sdis. Les moyens nationaux sont des soutiens irremplaçables.
À cet égard, je suis inquiet du ralentissement de la montée en puissance de la 4e unité d'instruction et d'intervention de la sécurité civile (UIISC) basée à Libourne, ainsi que du report des travaux sur la base de sécurité civile de Nîmes.
M. le président. - Veuillez accélérer.
M. Olivier Bitz. - Il nous faut une vision stratégique sur les moyens aériens. (Applaudissements sur les travées du RDSE ; M. Marc Laménie applaudit également.)
M. Nicolas Daragon, ministre délégué. - Quelques chiffres : l'État finance les Sdis à hauteur de 26 % via la TSCA ; les conseils départementaux, hors TSCA, à 29 % ; les communes à 34 % ; les autres ressources, dont le FCTVA, représentent 11 %. Les communes doivent occuper une place aussi importante que les conseils départementaux dans le schéma de financement. Pour que l'évolution soit modérée, il nous faut trouver d'autres pistes de financement. Nous en débattrons en Bourgogne-Franche-Comté le 12 décembre.
Sur le volontariat, Bruno Retailleau cherche à négocier à Bruxelles une nouvelle directive plutôt que de modifier le droit du travail.
La montée en puissance de la 4e UIISC est progressive, mais régulière. Le nombre de militaires fin 2024 sera de 228, contre 160 au début de l'année. Il atteindra les 500 dès que possible - malgré un ralentissement dû au contexte budgétaire.
Mme Nadine Bellurot . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, du RDSE et du RDPI) Dans un département rural comme l'Indre, confronté à la désertification médicale, nos sapeurs-pompiers professionnels et volontaires comblent les défaillances du système de santé. Je les remercie de leur engagement.
Tous les Sdis voient le nombre de leurs interventions augmenter, notamment au titre du secours d'urgence aux personnes - sept interventions par minute !
Le modèle est solide, mais il est en tension, avait dit le ministre Darmanin. Les risques liés au changement climatique se multiplient - ainsi des cent hectares partis en flammes dans le parc naturel de la Brenne, dans l'Indre, en 2021, ou des inondations tragiques en France et en Espagne. Conforter notre modèle suppose de donner aux sapeurs-pompiers les moyens nécessaires à leurs missions « coeur de métier », mais aussi de les accompagner dans leurs missions nouvelles.
Les sapeurs-pompiers appellent à une meilleure préparation des territoires pour faire face aux risques étendus.
De nombreux Sdis évoquent la valorisation du sauvé : une participation financière des assureurs à hauteur des coûts matériels et humains évités par l'action préventive des sapeurs-pompiers, comme le bâchage en période d'inondation ou la préservation des massifs forestiers. En 2022, dans l'Indre, le Sdis est intervenu à deux mille reprises pour couvrir des toitures à la suite d'un violent épisode de grêle, faute de couvreurs, évitant des dégâts supplémentaires. En se substituant à l'intervention d'entreprises privées, l'intervention du Sdis réduit les coûts des compagnies d'assurances.
On demande aux collectivités territoriales de participer à l'effort de redressement des comptes publics, or les premiers financeurs des Sdis sont les départements, les communes et intercommunalités. Les assurances ne pourraient-elles pas reverser aux Sdis une part de cette portion sauvée ? (Applaudissements sur les travées du RDSE ; M. Marc Laménie et Mme Françoise Dumont applaudissent également.)
M. Nicolas Daragon, ministre délégué. - La défaillance de couverture médicale sera évoquée avec le ministre de la santé lors du Beauvau. Sur le risque incendie, lié au réchauffement climatique, une réponse réside dans le pacte capacitaire : plus de 1 000 engins ont été financés grâce à l'État.
Je salue le travail fait à Valabre pour la formation à la lutte contre les incendies. Unique en Europe, ce centre accueille des délégations de nombreux pays, signe que nos pratiques sont reconnues.
Enfin, je vous rejoins sur la valorisation du sauvé : les assureurs devront participer aux discussions sur le financement et la gouvernance des Sdis.
M. le président. - Veuillez conclure le débat, monsieur le ministre.
M. Nicolas Daragon, ministre délégué chargé de la sécurité du quotidien . - Merci au RDSE pour cette initiative.
L'ancrage territorial des Sdis fait leur force. La départementalisation a permis une montée en compétences rapide depuis 1996. Je salue l'intelligence des territoires qui ont inventé un modèle de gouvernance robuste, réactif et résilient. Les résultats sont au rendez-vous.
Les sapeurs-pompiers interviennent toutes les six secondes, en tout point du territoire. Trois mille sapeurs-pompiers ont été mobilisés en un temps record contre les inondations dans le Pas-de-Calais. Notre pays est une référence mondiale et le premier pourvoyeur de formations aux secours à personne en Europe.
Notre modèle est toutefois confronté aux nouveaux enjeux liés au dérèglement climatique, au vieillissement, à la désertification médicale. La pression opérationnelle va donc s'accroître. Il nous faut trouver de nouvelles sources de financement et optimiser les dépenses. Nous relancerons le Beauvau de la sécurité civile le 25 novembre prochain. Tout est envisageable : TSCA, taxe de séjour, participation des métropoles. L'exonération de 30 millions d'euros sur les gasoils des véhicules d'incendie est à la signature du ministre. Nous parlerons aussi mutualisation des moyens.
Dans une logique assurantielle, faire participer les usagers à la prise en charge de certains risques n'est pas tabou. Ainsi les nombreuses interventions du Sdis liées à des activités de loisirs pourraient être couvertes par des assurances privées ou facturées directement à la personne. En Suisse, il en coûte 1 000 francs suisses d'appeler les secours pour de petites blessures de loisirs.
Il nous faut préserver le volontariat, qui permet de mobiliser des centaines de sapeurs-pompiers dans des délais records : 800 sapeurs-pompiers volontaires mobilisés en moins d'une heure en Ardèche, lors du récent épisode cévenol. Le coût, somme toute modique - 90 euros par habitant - est aussi une exception française.
Pour pérenniser ce modèle unique, valorisons l'engagement des sapeurs-pompiers volontaires. Ayons des gestes forts de reconnaissance à leur égard : trimestres de bonification, quotas de décorations, etc. Nous en discuterons en janvier, avec les associations agréées.
La sécurité civile doit rester une politique publique régalienne, sous le commandement opérationnel du ministre de l'intérieur. Alors que plusieurs crises touchent l'Europe, notamment l'Espagne, ce modèle a montré sa pertinence, tout comme les plans communaux et intercommunaux de sauvegarde, qui ont sauvé des vies.
Quel avenir pour notre sécurité civile à l'horizon 2040 ? Des investissements structurels seront nécessaires pour assurer la pérennité de nos moyens de secours : Bruno Retailleau s'est engagé à renouveler la flotte d'hélicoptères EC145 ; la question des bombardiers d'eau se pose également. C'est une question de souveraineté.
Préserver notre modèle de sécurité civile, sécuriser le financement des Sdis, se préparer au dérèglement climatique, tels sont nos défis. Vous pouvez compter sur moi pour les relever. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, du RDSE, du RDPI et du groupe UC ; M. Marc Laménie applaudit également.)
M. Michel Masset . - (Applaudissements sur les travées du RDSE ; M. Marc Laménie applaudit également.) Saluons l'initiative du RDSE d'avoir organisé ce débat crucial.
Les Sdis font un travail d'autant plus remarquable qu'ils sont confrontés à de nouveaux défis. Avec la désertification médicale, les interventions de premier secours ont explosé, sans réelle compensation. Avec le réchauffement climatique, les événements catastrophiques se multiplient - crues soudaines, inondations - sollicitant toujours plus nos pompiers. Le risque d'incendie de forêt est exponentiel. Le vieillissement de la population représente, enfin, un pan important de leur activité.
Vous avez annoncé une concertation pour repenser le financement et refonder le système pour trente ans. À la bonne heure ! Plusieurs pistes ont été évoquées, comme l'augmentation de la part de la TSCA attribuée aux départements ou la modulation de la taxe de séjour. Si les départements assurent 60 % du financement, les communes en assurent 40 %. En Lot-et-Garonne, le coût est de 85 euros par habitant pour près de 25 000 interventions par an. Au regard des missions sanitaires assumées par les Sdis, il est temps que l'État renforce leur financement.
En 2016, le Sdis 47 a créé une plateforme unifiant le 15, le 18 et le service d'accès aux soins pour réguler l'entrée à l'hôpital. Devant le succès de l'initiative, l'ARS a apporté un soutien de 500 000 euros.
Les Sdis s'adaptent à la féminisation de la profession, ce qui est une très bonne chose. Certains travaux d'entretien des casernes sont éligibles au fonds vert et à la DETR, mais l'obtention des subventions demeure parfois difficile.
Il faut renforcer l'attractivité et l'engagement des sapeurs-pompiers, volontaires comme professionnels. Nous disposons de nombreux rapports pour améliorer dès ce PLF 2025 le financement des Sdis et conforter un modèle de protection civile unique au monde, plébiscité par les Français, qui illustre ce que les femmes et les hommes peuvent faire de meilleur.
« Sauver ou périr », « Courage et dévouement » : à nos pompiers, nous serons toujours à vos côtés. (Applaudissements)
Prochaine séance demain, jeudi 14 novembre 2024, à 10 h 30.
La séance est levée à 23 h 20.
Pour le Directeur des Comptes rendus du Sénat,
Rosalie Delpech
Chef de publication
Ordre du jour du jeudi 14 novembre 2024
Séance publique
À 10 h 30 et à 14 h 30
Présidence : Mme Sylvie Robert, vice-présidente, M. Dominique Théophile, vice-président
Secrétaires : M. François Bonhomme, Mme Catherine Conconne
1. Proposition de loi visant à interdire le démarchage téléphonique, présentée par M. Pierre-Jean Verzelen et plusieurs de ses collègues (n°782, 2023-2024)
2. Proposition de loi constitutionnelle visant à accélérer le redressement des finances publiques, présentée par Mme Vanina Paoli-Gagin et plusieurs de ses collègues (n°783, 2023-2024)
3. Proposition de résolution, en application de l'article 34-1 de la Constitution, visant à condamner les actions des rebelles houthis en mer Rouge et à appeler à une action internationale pour protéger le commerce maritime et l'environnement dans cette zone, présentée par Mme Nicole Duranton, MM. François Patriat, Jean-Baptiste Lemoyne et plusieurs de leurs collègues (n°1 rectifié, 2024-2025)
4. Proposition de loi visant à interdire la corrida et les combats de coqs en présence de mineurs de moins de seize ans, présentée par Mme Samantha Cazebonne et plusieurs de ses collègues (n°475, 2023-2024)