SÉANCE

du mercredi 23 octobre 2024

10e séance de la session ordinaire 2024-2025

Présidence de M. Gérard Larcher

Secrétaires : Mme Sonia de La Provôté, Mme Patricia Schillinger.

La séance est ouverte à 15 heures.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Questions d'actualité

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.

Je vous rappelle que la séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur notre site internet.

Chacun sera attentif au respect des uns et des autres et au temps de parole.

Intempéries (I)

M. Thomas Dossus .  - (Applaudissements sur les travées du GEST ; Mmes Karine Daniel et Colombe Brossel ainsi que M. Rémi Cardon applaudissent également.) Après Kirk, la tempête Leslie a frappé brutalement le sud-est de la France. Plus violente que beaucoup d'autres, elle a mis à nu nos faiblesses et nos erreurs d'aménagement. Nous saluons les maires et leurs équipes, les services de sécurité civile et de l'État ainsi que les bénévoles sur le pont tout le week-end pour aider les habitants, qui ont parfois tout perdu. Notre solidarité doit être totale.

Le maire de Givors me disait lundi avoir besoin d'un interlocuteur interministériel tant les besoins sont urgents et variés.

Ces épisodes intenses et violents sont de plus en plus fréquents et ces catastrophes n'ont plus grand-chose de naturel, tant notre responsabilité est forte.

Pourtant, le budget semble ignorer l'urgence. Madame Pannier-Runacher, vous-même avez mis votre démission dans la balance. Vous avez raison, le coup de rabot sur l'écologie est violent et aggrave la dette écologique pour régler la dette financière.

Plus cynique et dangereux, le Premier ministre a rouvert le débat sur l'objectif ZAN, la droite s'y est engouffrée, prônant toujours plus d'artificialisation et de bétonisation. (Protestations à droite)

Sommes-nous victimes de dissonance cognitive ? Avons-nous le temps d'un budget de recul ? Comment pouvez-vous priver les collectivités territoriales de moyens d'investir ? (Applaudissements sur les travées du GEST et sur quelques travées du groupe SER)

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques .  - Au nom du Gouvernement, je fais part de tout mon soutien aux sinistrés. Je salue l'action remarquable des secours et des élus locaux. Ces inondations résultent de précipitations inédites : 600 à 700 millimètres d'eau sur Annonay, l'équivalent d'un an de précipitations dans une ville comme Paris. C'est une des manifestations du dérèglement climatique. Elles se répéteront. Nous devons agir, c'est-à-dire mettre les moyens. Si j'assume prendre ma part d'effort, je n'oublie pas que face à la dette financière, nous avons aussi une responsabilité dans la dette écologique.

Le Premier ministre annoncera personnellement des mesures pour le plan d'adaptation au changement climatique, présenté prochainement, pour mieux anticiper, prévoir et accompagner les collectivités territoriales.

Nous mobiliserons d'autres moyens que ceux de l'État : certificats d'économies d'énergie, crédits carbone, crédits biodiversité, crédits européens.

Vous pouvez compter sur moi pour que les moyens soient à la hauteur des enjeux.

M. Yannick Jadot.  - Et le fonds Barnier ?

Intempéries (II)

Mme Anne Ventalon .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Le 17 octobre, un épisode cévenol d'une rare intensité s'est abattu en France. L'Ardèche a été particulièrement touchée par ces inondations dévastatrices : axes routiers impraticables, habitations sinistrées, entreprises et exploitations agricoles endommagées.

Pourtant, la solidarité n'a pas failli : services de secours, élus locaux et habitants ont fait preuve d'un courage admirable. Ils ne peuvent toutefois pas relever seuls le défi : la mobilisation nationale doit être à la hauteur.

Pour permettre aux sinistrés d'être indemnisés, les communes concernées doivent être rapidement reconnues en état de catastrophe naturelle. Au-delà des mesures d'urgence, réfléchissons à long terme sur la culture du risque et la gestion des crises à répétition.

Madame la ministre, envisagez-vous de créer un fonds Barnier II ? (M. Michel Barnier s'en agace ; applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques .  - Ces catastrophes naturelles sont d'une violence inouïe. J'ai constaté à Annonay et à Limony les désastres que vous avez décrits, avec le ministre Daragon.

Ces catastrophes sont traumatisantes pour la population. Aussi, nous agirons avec rapidité : reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle - les dossiers, examinés par le ministre de l'intérieur, aboutiront rapidement -, missions d'inspection avec Catherine Vautrin pour évaluer les dégâts sur les ouvrages non assurables pouvant bénéficier de la dotation de solidarité - les services du Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema) sont positionnés en appui des collectivités territoriales pour construire des ponts provisoires ou vérifier la solidité des ponts endommagés.

Vous pouvez compter sur le Gouvernement. Le plan national d'adaptation au changement climatique sera soumis à la concertation dans les prochains jours, porté par le Premier ministre. Nous mobiliserons aussi le fonds Barnier - mais le Premier ministre fera lui-même ces annonces.

M. Yannick Jadot.  - Ah, combien ?

Mme Anne Ventalon.  - Mon département paie un lourd tribut, vous l'avez vu. De nouvelles pluies sont attendues en fin de semaine sur des sols déjà saturés : la réponse de l'État est indispensable. Nous espérons que le Gouvernement soutiendra la proposition de loi visant à assurer le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles, que nous examinerons la semaine prochaine au Sénat. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Insécurité en Guyane

M. Georges Patient .  - (Applaudissements sur les travées du RDPI) Après Mayotte, la Nouvelle-Calédonie et la Martinique, la Guyane sera-t-elle le prochain brûlot de l'empire ?

Insécurité et grande pauvreté, tout y concourt. Le taux d'homicides est de 20 pour 100 000 habitants, cinq fois plus que dans les Bouches-du-Rhône. Nous avons enregistré le 42e homicide de l'année. Pas moins de 25 % des vols à main armée commis en France en zone gendarmerie ont été commis à Saint-Laurent-du-Maroni. Le fleuve, frontière officielle avec le Suriname, n'en est pas une ; la ville est ouverte à tous les trafics : armes, drogue, immigration illégale.

L'opération « place nette », qui avait montré un début d'efficacité en avril, a été interrompue avec le départ de deux escadrons de CRS pour les jeux Olympiques. Le Gouvernement a annoncé l'envoi de la Garde républicaine, mais nous voulons le retour des deux escadrons.

Il faut aussi faire du Maroni une vraie frontière et la surveiller 24 heures sur 24, au besoin avec l'armée, et éradiquer les quartiers informels, refuges des criminels. Le Gouvernement compte-t-il assurer aux Guyanais une vie paisible ? (Applaudissements sur les travées du RDPI et sur quelques travées du groupe SER)

M. Bruno Retailleau, ministre de l'intérieur .  - Vous avez raison de citer les statistiques : 42 homicides depuis le début de l'année, deux à trois tentatives d'homicides par jour, 37 % de hausse des vols à main armée depuis le début de l'année.

Un pic de violence a éclaté le 3 octobre dernier : nos gendarmes ont subi 40 tirs à balles réelles. Saluons les forces de l'ordre qui sont là-bas, dans des conditions très difficiles. Bravo pour leur courage ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP, du RDSE, du RDPI et sur quelques travées du groupe SER)

Nous sommes mobilisés pour déférer à la justice les individus ayant pris part aux désordres du 3 octobre : notre main ne tremble pas.

Vous demandez des renforts : nous les envoyons. Hier, l'antenne du GIGN à Saint-Laurent du Maroni a été renforcée et des gendarmes de la Garde républicaine sont arrivés pour soutenir les 1 525 gendarmes et policiers territoriaux déjà sur place. Mais cela ne suffira pas.

Par ailleurs, nous contrôlons mieux les frontières. La passoire du Maroni, c'est l'autoroute de la délinquance et des ultraviolents. Nous rétablirons le contrôle des accostages des bateaux dans le port, avec le soutien des collectivités territoriales, et utiliserons des drones pour une surveillance permanente du fleuve.

La République, c'est en métropole, mais aussi dans l'ensemble des territoires ultramarins français ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC et sur quelques travées du groupe INDEP)

Contrôles des agriculteurs initiés par les procureurs

M. Vincent Louault .  - (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP) Loin de moi l'idée d'interférer dans une procédure judiciaire en cours. Toutefois je m'émeus et m'interroge sur la forme : en pleine crise agricole, est-il vraiment raisonnable et proportionné de déployer plus de 50 gendarmes chez un seul agriculteur pour un contrôle mutualisé, comme la semaine dernière en Indre-et-Loire ? (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP ; M. Michel Savin applaudit également.)

M. Didier Migaud, garde des sceaux, ministre de la justice .  - J'entends votre émotion et votre incompréhension. Vous faites référence à un maire de votre département, agriculteur de surcroît - comme vous, monsieur le sénateur. Le métier d'agriculteur est difficile, demande engagement et pugnacité et est soumis à de nombreuses contraintes.

Le garde des sceaux ne peut pas commenter sur le fond une affaire individuelle.

Un agriculteur est soumis aux dispositions légales encadrant son activité. Mus par cette préoccupation, les comités opérationnels de lutte contre la délinquance environnementale (Colden) ont été instaurés en septembre 2023 pour veiller à la bonne coordination des actions administratives et pénales.

Les contrôles des exploitations agricoles suscitent l'incompréhension. Les députés Blin et Martineau avaient mené un groupe de travail sur le sujet. Une circulaire du 9 octobre 2023 de mon ministère avait rappelé que les contrôles devaient être nécessaires et proportionnés. Une stratégie nationale des contrôles a été établie en janvier dernier dans cet esprit. Je suis ouvert à perfectionner les procédures. (MM. François Patriat et Bernard Buis applaudissent.)

M. Vincent Louault.  - Votre bienveillance est importante, vu le contexte - sur BFMTV, on annonçait tout à l'heure de prochaines manifestations d'agriculteurs.

Voix à gauche.  - C'est à cause du Mercosur !

M. Vincent Louault.  - Les agriculteurs sont au bout du rouleau. Comment imaginer qu'ils se fassent encercler et contrôler sur 300 points le même jour, et finissent en garde à vue trois ou quatre mois après ? Moi-même, je préférerais trois ou quatre contrôles par an avec des administrations pédagogues !

Notre pays est un pionnier de la défense de l'environnement et il faut en être fier. Les agriculteurs s'occupent de 80 % de la surface de notre pays. Ils sont attachés à l'environnement. Par pitié, ne les traitons pas comme des criminels ! Les procédures doivent être humaines. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP et sur des travées des groupes UC et Les Républicains)

Urgence de réformer la politique de santé périnatale

Mme Véronique Guillotin .  - (Applaudissements sur les travées du RDSE) Historiquement performant en matière de santé périnatale, notre pays est passé de la première aux 21e et 22e places en Europe pour la mortinatalité et la mortalité infantile.

La situation est aussi préoccupante pour la santé mentale des mères. Le suicide est la première cause de mortalité maternelle et les hémorragies du post-partum, qui concernent 10 % des accouchements, ne sont pas prises en charge correctement.

La mission d'information santé périnatale, dont j'ai été rapporteure avec Annick Jacquemet, a adopté le 10 septembre dernier un rapport avec des propositions de réforme.

Les facteurs liés à la mère n'expliquent pas tout, car d'autres pays européens les connaissent. Notre organisation des soins est inadaptée. Mme Jacquemet et moi préconisons une sécurisation accrue de l'acte de l'accouchement et un meilleur suivi pré et postnatal. Nous recevrez-vous pour que nous puissions vous présenter nos travaux ? (Applaudissements sur les travées du RDSE et sur quelques travées du groupe UC ; Mme Pascale Gruny applaudit également.)

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre de la santé et de l'accès aux soins .  - Je salue votre travail, avec votre collègue Annick Jacquemet, et partage votre constat : nous reculons en matière de périnatalité depuis vingt ans.

Le suicide, première cause de mortalité des jeunes mères, fera partie de la réflexion sur la santé mentale, grande cause nationale 2025.

Dans le cadre des assises de la pédiatrie et de la santé de l'enfant, la feuille de route fixée reprend onze de vos préconisations. La prévention doit être une priorité ; nos équipements et conditions d'examen doivent être améliorés ; il faut un lit de réanimation néonatale pour 1 000 naissances dans chaque région ; une évolution est nécessaire du cadre réglementaire des activités de néonatologie et de soins intensifs et de réanimation néonatale. Enfin, 600 postes d'internes en pédiatrie seront ouverts, en augmentation de 75 % par rapport à 2022. Tous ces efforts devront être amplifiés.

Je vous recevrai, bien sûr, pour enrichir cette feuille de route.

Mme Véronique Guillotin.  - Nous attendons ce rendez-vous avec impatience. Il y a urgence ! Sortons du dogme des 1 000 naissances nécessaires pour maintenir le seuil réglementaire. Nous vous proposons une réorganisation par bassin de naissances, ce qui suppose un nouveau pilotage national. (Applaudissements sur les travées du RDSE et sur des travées du groupe INDEP ; Mmes Isabelle Briquet et Amel Gacquerre applaudissent également.)

La Loire face aux intempéries

M. Jean-Claude Tissot .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Le département de la Loire a été frappé par un épisode climatique extrême : dans la vallée du Gier et le massif du Pilat, des crues historiques ont causé d'immenses dégâts.

La mobilisation exceptionnelle des services de secours a évité le pire.

Les élus demandent des mesures pour accompagner la réparation mais aussi préparer l'avenir.

Si la procédure de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle a été rapidement activée, elle ne suffira pas, notamment pour les dégâts non assurables.

Comment imaginer répondre aux enjeux avec votre plan national d'adaptation au changement climatique, alors que vous siphonnez le fonds vert - moins 1,5 milliard d'euros - ou le fonds de prévention des risques naturels, dit fonds Barnier, dont le financement passe de 450 millions à 225 millions seulement dans le projet de loi de finances ? Comment le conseil départemental pourra-t-il soutenir les communes sinistrées, alors que le PLF le ponctionne de 16 millions d'euros ?

À chaque fois que les communes sont en première ligne, vous saluez les élus locaux. Mais quelle est la valeur de ces mots si, dans le même temps, vous leur retirez les moyens d'agir ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE-K et du GEST)

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques .  - Je sais l'ampleur des dégâts sur votre territoire, ainsi que dans le Rhône, à Givors. À Rive-de-Gier, l'eau a dépassé les 4 mètres, quand l'étiage moyen est de 50 centimètres.

Oui, les communes ont besoin de moyens. C'est pourquoi la dotation de solidarité sera déployée pour soutenir les ouvrages non assurables. Nous lancerons avec Catherine Vautrin des missions d'inspection pour évaluer les dégâts - notamment les chaussées détruites.

Nous présenterons bientôt le plan national d'adaptation au changement climatique. Il y aura aussi la proposition de loi de la sénatrice Lavarde sur le régime catastrophes naturelles (« Ah ! » sur les travées du groupe Les Républicains), puis la discussion budgétaire. Comment rétablir les comptes publics, faire participer à l'effort ceux qui en ont les moyens sans pénaliser ceux qui ont besoin de la solidarité ? Ce sera tout l'objet de notre travail. (M. François Patriat applaudit.)

Mme Laurence Rossignol.  - Nous ne sommes pas des renards, inutile de nous enfumer !

Décolonisation de la Nouvelle-Calédonie

M. Robert Wienie Xowie .  - (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K) Monsieur le ministre de l'outre-mer, vous vous êtes récemment rendu en Kanaky-Nouvelle-Calédonie.

Face à l'urgence économique, sociale et politique, l'État français doit d'abord porter un regard décomplexé sur son histoire coloniale. Ensemble, donnons-nous une chance d'une décolonisation réussie.

La véritable reconstruction ne pourra avoir lieu qu'une fois le fait colonial assumé. Les crises sont cycliques, nos peuples aspirent à la pleine souveraineté. Encore en 2024 l'attitude coloniale persiste : criminalisation des militants, répression, économie sous perfusion...

La Kanaky-Nouvelle-Calédonie s'inscrit-elle toujours dans un processus de décolonisation posé par l'accord de Nouméa ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K et sur quelques travées du GEST)

M. François-Noël Buffet, ministre chargé des outre-mer .  - Je vous remercie, monsieur le sénateur, pour l'action que nous avons menée la semaine dernière en Nouvelle-Calédonie : constater la situation de visu, mettre en place des moyens pour redresser économiquement et socialement la Nouvelle-Calédonie. La violence des émeutes de mai dernier fut extrême. Je salue, à mon tour, les forces de l'ordre, sous l'autorité du Haut-commissaire.

L'urgence immédiate est celle de la reconstruction. Une mission se rendra très prochainement sur place pour engager ses travaux.

Il fallait renouer le dialogue avec l'ensemble des intervenants politiques du Congrès et du gouvernement. Je les ai rencontrés ; les discussions ont été intenses et très libres.

Il faut donner à la Nouvelle-Calédonie un projet global qui l'inscrive dans l'avenir. Nous sommes à un point de bascule.

La Constitution prévoit un principe d'autodétermination. Les discussions porteront aussi sur ce point. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP)

M. Robert Wienie Xowie.  - L'accord de Nouméa précise que « tant que les consultations n'auront pas abouti à la nouvelle organisation politique proposée, l'organisation politique mise en place par l'accord de 1998 restera en vigueur, à son dernier stade d'évolution, sans possibilité de retour en arrière ». Or aucun accord n'a été trouvé.

Les discussions politiques doivent être centrées sur le processus de décolonisation et la trajectoire vers la pleine souveraineté. Ne regardons plus jamais en arrière, mais en avant. L'assemblée générale des Nations unies a rappelé la priorité d'éradiquer le colonialisme dans le monde. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K et sur quelques travées du GEST ; M. Victorin Lurel applaudit également.)

M. Éric Bocquet.  - Très bien !

Surveillance des gardes à vue

M. Pierre-Antoine Levi .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Le récent assassinat d'un chauffeur VTC à Marseille, commandité depuis la prison de Luynes, rappelle l'importance de la surveillance dans les lieux de détention.

Or depuis le 1er octobre 2024, en application de normes européennes et d'une instruction DGPN, l'usage de la vidéosurveillance dans les cellules de garde à vue est limité, ce qui oblige les forces de l'ordre à mener des rondes fréquentes, la vidéosurveillance devenant l'exception. Et que dire de l'exigence d'un avis médical de non-contre-indication à la vidéosurveillance pour les mineurs gardés à vue !

Cette nouvelle obligation mobilise des effectifs considérables, au détriment de la présence sur le terrain. Au commissariat de Montauban, cette mesure nécessite de mobiliser deux fonctionnaires supplémentaires pour surveiller les gardés à vue - concrètement, c'est un équipage de Police-secours en moins, réduisant la capacité d'intervention et la présence policière dans l'espace public.

Allez-vous réévaluer le dispositif ? S'il est maintenu, comment comptez-vous garantir une présence policière suffisante sur le terrain pour assurer la sécurité de nos concitoyens ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC ; MM. Vincent Louault et Marc Laménie applaudissent également.)

M. Bruno Retailleau, ministre de l'intérieur .  - Je partage totalement votre analyse. Le Sénat et l'Assemblée nationale ont voté la loi Sécurité intérieure du 24 janvier 2022, qui prévoit l'utilisation de caméras de surveillance pour les cellules de garde à vue. Mais voilà, le Conseil d'État a encadré de façon draconienne leur utilisation, en opposant des obstacles insurmontables.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - La Cnil !

M. Bruno Retailleau, ministre.  - L'utilisation des caméras n'est possible qu'à condition d'enregistrer, et doit être dûment motivée par un risque d'évasion, de suicide ou des menaces contre autrui. Or équiper les caméras d'enregistreurs coûterait des dizaines de millions d'euros !

À Montauban, cette surveillance mobilise 16 % des forces de l'ordre - autant de policiers qui ne sont plus sur la voie publique. (Protestations sur les travées du GEST) Voilà le problème !

Les policiers sont pris dans un étau : augmentation de la violence et de la délinquance d'un côté, complexification des procédures de l'autre...

Je ne renoncerai pas à simplifier, mais c'est Sisyphe ! Il faut pouvoir lutter contre la délinquance sans crouler sous la paperasserie. (« Très bien ! » et applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP)

M. Pierre-Antoine Levi.  - Les fonctionnaires de police attendent une simplification de cette procédure totalement inadaptée. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, Les Républicains et INDEP)