Simplification de la vie économique (Procédure accélérée - Suite)
M. le président. - L'ordre du jour appelle les explications de vote des groupes et le vote par scrutin public solennel sur le projet de loi de simplification de la vie économique.
Explications de vote
M. Fabien Gay . - (Applaudissements sur quelques travées du groupe CRCE-K) En juin dernier, nous étions saisis de ce projet de loi dont le but annoncé était de créer un choc de simplification. Sa mesure phare, la fiche de paie simplifiée, a été détricotée. C'est heureux ! Celui qui a eu cette idée à Bercy n'avait jamais géré une entreprise ni établi une fiche de paie !
Mme Pascale Gruny. - C'est clair !
M. Fabien Gay. - Même le Medef y était opposé...
Les habilitations à légiférer par ordonnance ont été supprimées.
Ne reste qu'un texte un peu creux, sans fil rouge, empilant diverses mesures disparates.
Le nouveau Gouvernement souhaite-t-il aller au bout de l'examen de ce texte ? La droite sénatoriale, désormais au Gouvernement, le défendra-t-elle ?
Ce texte illustre un cap politique largement désavoué lors des élections : rien pour les salariés, les syndicats, l'environnement, le droit social... Les travailleurs, surtout les plus précaires, en font les frais.
Dans le domaine environnemental, on va de renoncement en renoncement environnemental - un contresens historique. Alors que nous sommes déjà confrontés aux terribles effets du changement climatique, vous proposez de faciliter l'installation de giga data centers énergivores en dérogeant au droit environnemental.
Il est impensable de revenir à cette conception archaïque de l'économie. Les conquis sociaux et la défense de la biodiversité ne sauraient être de simples variables d'ajustement.
Or la France souffre d'une absence de politique industrielle claire et efficace. Il ne suffit pas de distribuer l'argent public - plan de relance, France 2030, dispositifs d'accompagnement des entreprises, pour 182 milliards d'euros - pour construire une politique industrielle. (M. Pascal Savoldelli renchérit.)
On connaît le résultat : beaucoup de communication, d'annonces, mais une seule gigafactory créée, pour 2 000 emplois, contre 162 plans de licenciement qui menacent 100 000 emplois.
Pour les droites coalisées, l'entreprise, c'est le patronat et les actionnaires, pas les travailleurs. L'intelligence et la créativité ouvrière montrent que l'on devrait pourtant les écouter et les associer à la gestion de leur entreprise et du pays.
Nous voulons un moratoire immédiat sur tous les plans de licenciements en cours. On ne peut pas mener une politique industrielle audacieuse en supprimant des milliers d'emplois. Nous ne sommes pas condamnés à assembler des pièces usinées aux quatre coins du monde !
Il est temps d'amorcer une croissance vertueuse. Les aides publiques doivent être assorties de garanties pour l'emploi et l'environnement. Une entreprise qui délocalise doit rembourser. Cessons de demander plus aux travailleurs qu'à des grands groupes gavés d'argent public.
À quand l'examen d'un texte responsabilisant les donneurs d'ordre ? Les grands groupes considèrent leurs sous-traitants comme des variables d'ajustement de leur profit. Je salue les salariés de MA France, à Aulnay-sous-Bois, en grève depuis six mois. Stellantis, leur donneur d'ordre, a décidé de délocaliser les pièces embouties en Turquie, et le patron italien de l'usine leur propose 15 000 euros, pour trente ans de bons et loyaux services !
Le groupe CRCE-K votera contre ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K et du GEST)
Mme Raymonde Poncet Monge . - (Applaudissements sur les travées du GEST et sur quelques travées du groupe SER ; exclamations sur quelques travées du groupe Les Républicains) Ce projet de loi, présenté comme un texte de justice sociale pour les TPE et PME, n'est qu'un fourre-tout de mesures qui arrangent les grands groupes. Ainsi de la dérogation à l'allotissement pour l'éolien en mer, qui pénalise les PME, transformées en sous-traitants et non en cotraitants.
Le texte n'allège pas la charge administrative qui pénalise les PME par rapport aux grands groupes. Quant à la tentative de modification du bulletin de paie - marotte du Gouvernement, que personne n'a jamais demandé - son objectif, idéologique, était de s'attaquer au salaire socialisé, en faisant disparaître les droits et risques couverts par les contributions sociales, ainsi que le montant croissant des exonérations.
Idem pour la suppression du droit d'information des salariés en cas de vente de l'entreprise, au mépris du risque juridique et de la possibilité offerte aux salariés de reprendre leur entreprise introduite par la loi Hamon. Selon un rapport du Sénat, 30 000 entreprises disparaissent chaque année faute de repreneurs.
Vous refusez de voir qu'une entreprise, c'est aussi ses salariés. Le Haut Conseil à la simplification ne comprend que les représentants des entrepreneurs. La simplification, pour la droite, c'est la dérégulation du droit social, le détricotage du droit de l'environnement et la fin de l'ambition écologique.
Un article vide de sa substance la compensation environnementale du principe « éviter, réduire, compenser » des projets à fort impact sur la biodiversité. Fin de l'obligation de résultat, simple obligation de moyens, renvoyée à un « délai raisonnable », alors que les atteintes au milieu et aux habitats peuvent être irréversibles immédiatement. L'indice de risque d'extinction des espèces a doublé en métropole en vingt ans, la plus forte augmentation en Europe, alors que seuls 20 % des habitats naturels d'intérêt communautaire sont en bon état.
Les 66 000 hectares artificialisés chaque année, la loi ZAN à peine adoptée, ne vous arrêtent pas : le dispositif d'intérêt national majeur est étendu aux data centers, grands consommateurs de terres agricoles ou naturelles, sous couvert de souveraineté économique.
Dans sa précipitation, le Gouvernement modifie des dispositions du code minier pas encore entrées en vigueur, mettant en péril l'une des dernières forêts primaires, en Guyane.
Levée des normes, participation à la politique austéritaire du Gouvernement, recherche d'économies pour compenser les offres aux grands groupes : voilà votre logique.
Puisqu'il manque des magistrats administratifs, on élargit les fonctions des magistrats honoraires !
In fine, ce projet de loi écrit dans la précipitation est celui d'un Gouvernement qui avance à tâtons, sans étude d'impact.
Sa seule logique est la suppression de normes environnementales. Véritable retour du refoulé anti-écologique, c'est un cadeau aux grands groupes, auquel le GEST s'opposera. (Applaudissements sur les travées du GEST et sur quelques travées des groupes CRCE-K et SER)
M. Michaël Weber . - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Je savais le Président de la République grand lecteur d'André Gide, mais je ne savais pas qu'il inspirait ses ministres : « Tant pis pour le lecteur paresseux : j'en veux d'autres. Inquiéter, tel est mon rôle ». Si le romanesque admet cette complexité qui dans ses scories y dévoile toute sa profondeur, cela ne doit pas être le cas de nos textes, dont la clarté est une caryatide pour notre démocratie. Dès 1999, le Conseil constitutionnel reconnaissait la valeur constitutionnelle des principes d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi.
Simplifier est donc un objectif des plus louables, alors que le poids des normes s'élève à 44,1 millions de mots. Cependant, sous couvert de rigueur, le Gouvernement inquiète. Derrière de belles intentions se cachent des idoles.
Le coup de grâce fut porté au droit d'information des salariés, à la protection de la biodiversité, à la libre administration des collectivités territoriales. Je pourrais en dire plus, tant ce texte composite est informe.
Dans ce foisonnement de dispositions censément simplificatrices, trois exemples de confusion, entre simplification et régression. L'article 7, même supprimé, nous hante encore. La fiche de paie n'est pas compréhensible ? Supprimons ses lignes, plutôt que de les expliquer. L'article 18 supprime l'obligation de résultat pour la défense de la biodiversité. Les articles 15 à 21 multiplient les recours au dispositif d'intérêt national majeur permettant de déroger au droit de l'urbanisme.
Bref, cette simplification ne bénéficie qu'aux grandes entreprises, et rien de plus. Elle « rationalise » à tout prix, et pose en vitesse un semblant de nouveauté sur des sujets non urgents.
Malgré les réticences du Conseil d'État, nous fut présenté un texte tout droit venu de Bercy, mais sans ministre pour le défendre.
M. Le Maire se targuait de simplifier la fiche de paie et se posait en sauveur de la France.
M. Mickaël Vallet. - Il est en Suisse !
M. Michaël Weber. - Désormais, la France stagne à AA et le dérapage des finances publiques fait l'objet d'une commission d'enquête.
Monsieur le ministre, que signifie le terme de simplification dans votre intitulé ? Vous disiez vouloir « débureaucratiser » les services publics régionaux. (M. Guillaume Kasbarian le confirme.) Tant de néologismes pour arriver au même résultat : le superflu. En « simplifiant » par pure émanation de la pensée et non à droit constant, la plume ajoute du futile et raye du nécessaire. Mme Grégoire nous disait : « Évitons la loi bavarde, les entrepreneurs en bavent. » Je vous dirai, moi : « Évitons les lois bâclées, les citoyens en blêmissent. »
Le groupe SER votera contre ce projet de loi du Mozart de la finance. (Bravos et applaudissements sur les travées du groupe SER, du GEST et sur quelques travées du groupe CRCE-K)
M. Christopher Szczurek . - « Qu'on arrête un peu d'emmerder les Français avec de nouvelles lois, de nouvelles obligations et surtout de nouvelles interdictions », disait le président Pompidou.
En effet, le poids grandissant des normes sur l'activité économique, sur les ménages et sur les collectivités est souvent du fait du législateur.
Selon l'OCDE, le coût des normes avoisine les 3 % du PIB.
Nous rejoignons votre constat, mais ce texte fourre-tout déçoit.
Il traite à la fois de la facilité d'installation des débits de boissons, des infrastructures de télécommunications, de la commande publique... Plus étonnant, il prévoit une énième facilité pour les énergies prétendument renouvelables. Dans mon département, portées par un lobby, les éoliennes se sont développées, grâce à des financements massifs. Pourquoi soutenir encore ce secteur qu'on ne peut pas dire lesté de blocages ?
Quant aux mesures visant à faciliter la recherche scientifique, elles posent des questions de bioéthique.
Comme d'habitude, on pourrait espérer que les bonnes lois chassent les mauvaises. L'effort de simplification gagnerait à être systématisé et à porter sur des domaines précis. Nous ne pouvons soutenir un texte comprenant trop de mesures inadéquates. Nous voterons contre.
M. Emmanuel Capus . - (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP ; M. Ludovic Haye applaudit également.) Loi de simplification, projet ambitieux qui sonne comme un oxymore.
M. Marc-Philippe Daubresse. - Après les allitérations, les oxymores !
M. Emmanuel Capus. - Le nombre d'amendements déposé est une illustration de notre volonté de simplifier.
Ce projet de loi fut le dernier instrument législatif de simplification après les lois Pacte, Asap et la loi Essoc sur le droit à l'erreur.
Les normes sont devenues trop nombreuses : la complexité normative nous coûterait trois points de PIB.
Même l'administration finit par s'y perdre. En vingt ans, le volume des normes a plus que doublé. Nous ne pouvons donc que soutenir les simplifications, comme la procédure de rescrit.
Nous devons améliorer la lisibilité du droit. Relèvements de plafond pour la concentration des entreprises, délais raccourcis, dérogations notamment en matière de marchés publics sont bienvenus. Mais il ne faut pas multiplier les dérogations : si elles simplifient la vie des personnes concernées, elles complexifient le droit.
Le volume du droit en vigueur a augmenté de 20 %, aussi devons-nous veiller à mieux légiférer pour moins légiférer. Des principes simples font gagner du temps ; l'un d'entre eux consiste à affirmer que le silence de l'administration vaut acceptation. Cependant, les dispositions réglementaires tendent à le renverser... Nous nous félicitons donc de l'adoption du nouvel article 3 bis porté par Dany Wattebled.
Certains ont mis en doute le caractère simplificateur de ce texte, mais il s'agit là d'un travail de longue haleine. C'est en amont que le législateur doit se préoccuper de simplification.
Selon Saint-Exupéry, « la perfection est atteinte, non pas quand il n'y a plus rien à ajouter, mais lorsqu'il n'y a plus rien à retirer ».
Ne concentrons pas l'action publique sur la création de normes : bannissons les lois d'émotion, légiférons moins, pour une loi plus durable. L'inflation normative affaiblit nos institutions. Nous croulons sous le poids des 354 000 lois et décrets en vigueur. « On reconnaît la décomposition d'un État à la surabondance de ses lois », écrivait Tacite. D'autres textes de simplification devront suivre.
Nous savons le Gouvernement attaché à l'objectif de simplification ; le groupe INDEP votera sans réserve en faveur de ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP ; M. Bernard Buis applaudit également.)
M. Rémy Pointereau . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Nous devions procéder au vote de ce texte le 11 juin dernier, dans un large consensus ; la dissolution en a voulu autrement.
Nous n'avions eu que trois semaines pour examiner le texte, mais nous aurons eu quatre mois pour le voter. J'espère que nous le voterons, car il est encore plus nécessaire de libérer la croissance dans le contexte actuel des finances publiques.
J'associe à mes propos les rapporteurs, Catherine Di Folco et Yves Bleunven, et le président de la délégation aux entreprises, Olivier Rietmann.
Le projet de loi s'appuie sur de nombreux travaux du Sénat, qui a adopté 91 amendements en commission, 101 en séance. C'est une base solide pour les futures discussions à l'Assemblée nationale.
Nous avons relevé le défi de la simplification sans renoncer à exercer notre mission de législateur. Nous avons complété l'article visant à simplifier les normes à l'avenir : le test PME, issu de la proposition de loi Rietmann, est une mesure essentielle pour gérer le flux des normes.
Nous ne pouvons pas traiter tout le stock, mais saluons l'ouverture de l'accès à la commande publique. Nous avons facilité les relations avec les assurances ainsi que la transmission des TPE et PME.
Nous avons adopté des mesures au bénéfice des commerçants, notamment pour favoriser la réouverture de commerces de proximité dans les petites communes. La ruralité est trop souvent oubliée. Nous avons complété les dispositions relatives à la banque et l'assurance pour rééquilibrer les rapports de force et simplifié les obligations en matière de compensation des atteintes à la biodiversité - répondant à une attente forte dans nos territoires.
Dans le domaine des télécommunications, les mesures n'ont pas grand-chose à voir avec la simplification, mais aideront à lutter contre la spéculation foncière.
Dans le secteur de l'énergie, la commission spéciale a soutenu les mesures relatives au droit minier et aux installations d'énergies renouvelables. Ses travaux sont utilement complétés par ceux du groupe de suivi sur le ZAN.
Nous n'avons pas abordé les domaines de l'agriculture et du logement, où il est pourtant urgent de simplifier, car ils feront l'objet de textes ad hoc, dont le Sénat souhaite être saisi au plus vite.
Nous avons refusé les mesures faussement simplificatrices - relatives au bulletin de paie, par exemple.
Les mesures de portée générale reposaient trop souvent sur des ordonnances larges et floues, qui auraient dessaisi le Parlement de ses compétences. On nous annonçait un rendez-vous annuel de simplification, désormais plus difficile, et on nous promettait que l'administration travaillerait à la simplification des normes légales et réglementaires.
Ce travail doit être poursuivi et ses conclusions présentées au Parlement. Si des mesures précises sont adoptées à l'Assemblée nationale - et non des ordonnances - nous les examinerons avec intérêt.
Nous avons ouvert la voie pour les lois de simplification à venir. Le texte doit poursuivre son parcours à l'Assemblée nationale, où nous espérons que les apports du Sénat seront conservés. Nous sommes prêts à travailler avec vous, monsieur le ministre.
Le groupe Les Républicains votera ce texte, dans l'attente de travaux futurs. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC ; M. Vincent Louault applaudit également.)
Mme Nadège Havet . - (Applaudissements sur les travées du RDPI) Le 16 octobre, France Info titrait : « Avec 74 codes juridiques et 1 800 formulaires Cerfa, la simplification administrative, c'est compliqué ». Simplifier, dans notre pays légicentriste, est difficile mais n'en reste pas moins nécessaire.
Avec plus de 400 000 normes, la France se classe au deuxième rang des pays où la bureaucratie est la plus complexe. Au législateur de forcer sa nature pour lutter contre cette autre inflation !
Il faut simplifier sans déréguler, sans recomplexifier. Appliquer les règles existantes, former ceux auxquels elles s'adressent.
Le coût des normes est estimé à 84 milliards d'euros par an. Elles pèsent sur l'activité des entreprises et créent de la désespérance chez les travailleurs et de la défiance vis-à-vis des parlementaires.
Il est urgent de passer d'un principe de contrôle à un principe de confiance. Ce texte, largement amendé et coconstruit, est la deuxième étape du travail parlementaire entrepris dernièrement, après la proposition de loi d'Olivier Rietmann sur le test PME, réintégrée au projet de loi par amendement. Nous y sommes très favorables.
Sur la simplification annoncée du bulletin de paie, mieux vaut procéder par voie réglementaire.
Sur l'article 6, mon groupe défendait un compromis - ce qu'avait souhaité Olivia Grégoire en pointant le risque d'inconventionnalité.
Nous avons souhaité accroître la maîtrise des élus locaux sur leur foncier, avec des mesures sur les zones commerciales visant à faciliter la requalification et le déplacement d'une activité commerciale le temps des travaux.
Plusieurs amendements ont conforté l'obligation pour les opérateurs téléphoniques de privilégier le partage de sites et de pylônes afin de ne pas multiplier les implantations.
Sur la commande publique, nous avons relevé à 100 000 euros le seuil de dispense de procédure de publicité et de mise en concurrence.
Enfin, plusieurs amendements ont ouvert des dérogations au PLU.
Lors de sa déclaration de politique générale, le Premier ministre a affirmé vouloir reprendre le chantier de la simplification. Nous partageons cette volonté et souhaitons que ce texte soit rapidement examiné par l'Assemblée nationale. (Applaudissements sur les travées du RDPI)
M. Michel Masset . - (Applaudissements sur les travées du RDSE) L'inscription de ce texte sur le temps du Gouvernement est respectueuse du travail parlementaire.
Sur le fond, ce texte comporte des mesures pertinentes et bienvenues pour le monde économique, d'autant qu'il donne une large place aux propositions émanant des entreprises. Le RDSE a porté des amendements de consensus, notamment de Raphaël Daubet et Nathalie Delattre, visant à faciliter les formalités pour le bénéfice d'un taux réduit de TVA. Je salue également l'amendement transpartisan porté par Éric Kerrouche, qui généralise l'expérimentation du recours à un prestataire pour le recensement de la population.
Les mesures facilitant les relations entre entreprises et administration étaient attendues. Les recommandations de notre mission d'information sur le foncier économique ont été reprises. Le principe du « silence vaut acceptation » va dans le bon sens, tout comme le renforcement de la médiation ou l'augmentation du nombre de juges des référés.
J'ai émis des réserves sur certaines mesures, dont l'article 16 qui porte une atteinte disproportionnée aux droits des soumissionnaires à la commande publique et handicape les TPE et PME. J'ai également alerté sur l'article 6 qui réduit l'information préalable des salariés en cas de cession de leur entreprise : la simplification ne doit pas être moins-disante pour les salariés.
Le rehaussement du seuil d'exonération de publicité et mise en concurrence devra être évalué. Je m'interroge également sur la pertinence de légiférer sur le ZAN, alors que le groupe de suivi sénatorial vient de rendre son rapport et que le Premier ministre a promis des assouplissements. En la matière, il nous faut coconstruire une solution globale, durable, gage de sérénité et de sécurité juridique.
Sur la forme, la simplification législative suppose d'abord d'identifier l'essentiel, sans forcément modifier l'esprit des lois simplifiées. En la matière, tout ne passe pas par la loi, mais le plus souvent par l'exécution. Il faut capitaliser sur l'existant. Les lois de simplification passées ont conduit à augmenter le corpus de normes, et la temporalité législative n'est pas celle des entreprises.
Parler de simplification revient à dépolitiser les choix opérés et brouille le message auprès des entreprises. Ainsi, alléger les contraintes liées à la transition énergétique et écologique traduit une certaine vision de la place des entreprises dans cette transition ; au législateur de l'affirmer clairement. C'est pourquoi j'avais proposé - en vain - de modifier l'intitulé du texte.
Reste que ce texte, large et composite, traduit le soutien du Sénat aux acteurs de l'économie. Le RDSE, dans sa pluralité, votera principalement en sa faveur. (Applaudissements sur les travées du RDSE ; M. Bernard Buis applaudit également.)
M. Yves Bleunven . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Les aléas de la vie politique font que nous votons un projet de loi examiné « en urgence » il y a plus de trois mois. Situation cocasse, qui ne doit pas faire oublier la véritable urgence à simplifier nos procédures et contrôles, et surtout notre état d'esprit.
Une cure de simplification s'impose, sachant que le coût des normes est estimé à 84 milliards d'euros - 3% du PIB ! Nous devons lancer un plan Marshall de la simplification. Ce projet de loi apporte sa pierre à l'édifice, mais il reste du travail, d'autant que tout ne passe pas par la loi.
Nous n'avions pas caché notre désarroi lors de la présentation de ce texte hétéroclite et disparate. Dans cette cacophonie de mesures, le Sénat a fait entendre sa voix et a inclus la proposition de loi de M. Rietmann sur les tests PME. La commission spéciale a aussi adopté plusieurs mesures de simplification pour les commerçants : mensualisation des loyers commerciaux, encadrement des dépôts de garantie, assouplissement de la politique d'aménagement commercial. Simplifier, c'est faire preuve de bon sens pour soutenir la croissance !
Nous avons adopté une mesure favorisant la réouverture de cafés et bistrots dans les petites communes. La ruralité est trop souvent oubliée de nos politiques publiques - mais jamais des sénateurs. (Sourires) Simplifier, c'est améliorer la vie des Français partout sur le territoire.
S'agissant du ZAN, nous avons exclu du décompte de l'artificialisation tous les projets d'intérêt national majeur et les aménagements liés. Simplifier, c'est mettre l'action publique au service de la croissance et de la réindustrialisation.
Nous avons aussi intégré des mesures de la proposition de loi de Patricia Demas sur les infrastructures de télécommunications. Espérons que l'engagement du Sénat en faveur de la régulation de la spéculation des baux, de la mutualisation des infrastructures et d'une meilleure information des élus locaux trouvera un écho favorable à l'Assemblée.
Dans le secteur de l'énergie, la commission a soutenu des mesures de simplification du droit minier et favorisé le déploiement d'installations de production d'énergies renouvelables, en cohérence avec la proposition de loi de Daniel Gremillet adoptée la semaine dernière.
Défenseur des prérogatives du Parlement, le Sénat s'est opposé à la suppression de la commission supérieure du numérique et des postes, composée de parlementaires. Impossible d'accorder autant d'habilitations à légiférer par ordonnance si le Gouvernement ne précise pas sa volonté de réforme. Si les intentions sont claires, nous sommes prêts à travailler à vos côtés. Soyons constructifs ensemble. Le chantier de la simplification nécessitera des travaux récurrents.
Le groupe UC votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur plusieurs travées du groupe Les Républicains ; M. Daniel Chasseing applaudit également.)
Scrutin public solennel
M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°19 :
Nombre de votants | 340 |
Nombre de suffrages exprimés | 335 |
Pour l'adoption | 232 |
Contre | 103 |
Le projet de loi est adopté.
(Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP)
M. Guillaume Kasbarian, ministre de la fonction publique, de la simplification et de la transformation de l'action publique . - Au nom du Gouvernement, je vous remercie pour l'adoption de ce projet de loi. Je salue le travail de concertation préalable mené sous la précédente législature par Olivia Grégoire et Bruno Le Maire ainsi que la mobilisation des acteurs.
Ce texte est le fruit d'une prise de conscience désormais partagée. Nous devons cesser de bureaucratiser à outrance. Nous sommes convaincus que la simplification est un gisement majeur d'économies et de croissance. Dans la continuité des lois Asap et Industrie verte, ce projet de loi redonnera de l'oxygène à nos entreprises. Je salue le test PME, véritable bouclier normatif pour contrôler le flux de normes.
Grâce à des mesures ciblées, nous poursuivrons la dynamique de réindustrialisation et améliorerons le quotidien de nos artisans. Je salue le président Pointereau et les rapporteurs Bleunven et Di Folco.
Ce vote est un souffle d'espoir. Nous irons le plus loin possible dans cette cure de simplification. Comptez sur l'engagement du Gouvernement pour continuer de débureaucratiser à tous les étages. (Applaudissements sur les travées du RDPI et sur quelques travées des groupes INDEP, UC et Les Républicains)
La séance est suspendue à 16 h 30.
Présidence de M. Dominique Théophile, vice-président
La séance reprend à 16 h 35.