SÉANCE

du mardi 22 octobre 2024

9e séance de la session ordinaire 2024-2025

Présidence de M. Alain Marc, vice-président

Secrétaires : Mme Catherine Di Folco, Mme Véronique Guillotin.

La séance est ouverte à 9 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu intégral, est adopté.

Questions orales

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

DMTO et évolution de la population communale

Mme Annick Jacquemet .  - L'article 1595 bis du code général des impôts prévoit, pour les communes de moins de 5 000 habitants, la perception des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) de l'année n dans un fonds départemental de péréquation distribué aux communes en année n+1. Au-dessus de ce seuil, les communes les perçoivent directement en année n. Le changement de strate entraîne mécaniquement l'exclusion du fonds de péréquation.

C'est ce qui arrive à la commune de Saint-Vit, dans le Doubs, dont la population a atteint 5 044 habitants fin 2023 : elle est dès lors privée des DMTO de cette année, soit 200 000 euros, ce qui n'est pas rien. Les élus ont le sentiment de perdre des ressources, d'autant plus que lors de la mise en place du dispositif, les communes de plus de 5 000 habitants ont bénéficié immédiatement des ressources, tandis que les autres ont dû attendre une année supplémentaire en raison de la péréquation. Attention à ne pas rompre l'équité entre les deux catégories.

Quelles sont les intentions du Gouvernement pour que Saint-Vit et les communes dans la même situation ne perdent pas une année de DMTO ?

Mme Laurence Garnier, secrétaire d'État chargée de la consommation .  - L'article 1584 du code général des impôts prévoit qu'une taxe additionnelle aux DMTO est perçue au profit des communes de plus de 5 000 habitants, tandis que l'article 1595 bis prévoit, en dessous de 5 000 habitants, son versement à un fonds de péréquation départemental réparti l'année suivante par le conseil départemental selon trois critères légaux : l'importance de la population, le montant des dépenses d'équipements brutes et l'effort fiscal.

Une commune passée au-dessus de 5 000 habitants en année n devra donc en être exclue, mais elle bénéficiera directement de la taxe de manière contemporaine. Inversement, une commune passant sous ce seuil n'en bénéficie plus, mais le conseil départemental la réintègre dans le fonds, alors même qu'elle ne l'a pas alimenté l'année précédente.

Dans tous les cas de figure, les communes continueront bien à recevoir ces ressources, sans rupture d'une année à l'autre. Ces modalités méritent d'être stabilisées, toute évolution pouvant avoir des effets de bord importants pour chaque bénéficiaire.

Taxe sur la publicité extérieure et redevance d'occupation du domaine public

M. Didier Rambaud .  - L'articulation entre la taxe locale facultative sur la publicité extérieure et la redevance d'occupation du domaine public doit être clarifiée lorsque deux autorités sont compétentes pour percevoir l'une ou l'autre. En septembre 2021, Brigitte Micouleau avait posé une question écrite à ce sujet au ministère de l'économie et des finances, qui a répondu le 14 avril 2022, mais en laissant planer un doute sur l'interprétation du terme « chronologique » : une commune ne peut pas lever la taxe locale sur la publicité extérieure en même temps que l'EPCI perçoit la redevance sur un même support ; en l'absence de texte, le seul droit de priorité qui puisse exister entre les deux ne peut être que chronologique. Mais doit-on prendre en compte la date de la levée ou la date de décision ?

Mme Laurence Garnier, secrétaire d'État chargée de la consommation .  - L'article 2333-6 du code général des collectivités territoriales (CGCT) prévoit que, dès lors que la commune ou son groupement lève la taxe sur un support publicitaire ou une préenseigne, il ne peut être perçu, au titre du même support ou de la même préenseigne, un droit de voirie ou une redevance d'occupation du domaine public. L'objectif du législateur était de préserver l'occupant du domaine public d'un double prélèvement par la voie fiscale et domaniale pour un même fait générateur. Dès lors que la taxe est levée, une redevance d'occupation domaniale ne peut être perçue, conformément à l'avant-dernier alinéa de l'article L. 2333-6 qui précise clairement ce point et ses modalités de perception.

New Deal mobile

M. Hervé Maurey .  - En matière de communication fixe et mobile, la France a devant elle un certain nombre d'échéances : le New Deal mobile, destiné depuis 2018 à assurer la couverture en téléphonie mobile jusqu'en 2025 - à son issue, il manquera encore plusieurs milliers de pylônes pour atteindre l'objectif ; le démantèlement du réseau cuivre, commencé le 31 janvier dernier et censé s'achever en 2030, avec un risque de déconnexion de certains usagers ou de services non assurés ; le démantèlement du réseau 2G en 2025-2026 et du réseau 3G en 2028-2029, avec d'importantes conséquences, notamment sur les objets connectés, alarmes ou dispositifs médicaux.

Comment le Gouvernement prépare-t-il ces échéances ? Un nouveau programme de couverture mobile est-il prévu ? Comment éviter les effets de bord des suppressions de réseaux ?

Mme Laurence Garnier, secrétaire d'État chargée de la consommation .  - L'accès à un réseau mobile de qualité est une condition essentielle au bon développement des territoires, notamment ruraux. Six ans après le début du New Deal mobile, la couverture est très satisfaisante : selon l'Arcep, 99,9 % de la population et 94 % du territoire étaient couverts au 31 décembre 2023, pour un coût de 3 milliards d'euros. Les territoires ruraux ont bénéficié de 67 % des sites mobiles. La couverture 4G en France est bien meilleure qu'en Allemagne, en Espagne ou au Royaume-Uni. Nous le poursuivrons après 2025, notamment sur la totalité des axes routiers prioritaires et des axes ferroviaires d'ici à 2030. Des obligations de couverture indépendantes du New Deal élargiront également le réseau, notamment via les sites 5G.

M. Hervé Maurey.  - Je ne conteste pas l'utilité du New Deal, mais je ne qualifierais pas ces résultats de très satisfaisants ; selon les services de l'État eux-mêmes, il manquera plusieurs milliers de pylônes. D'où la question d'un nouveau New Deal, ou d'un prolongement du New Deal, sans lequel l'objectif de couverture totale annoncé en 2018 ne sera pas tenu. Je n'ai pas entendu de réponse à ma question sur la suppression des réseaux.

Informations fiscales fournies aux collectivités

M. Philippe Grosvalet .  - La suppression de la taxe d'habitation et de la CVAE et la mise en oeuvre de mécanismes de compensation auraient dû s'accompagner d'une plus grande transparence de l'information fiscale et financière sur les ressources transférées. Or tel n'est pas le cas : la DGFiP a ainsi refusé à la Loire-Atlantique de lui fournir le montant de CVAE retenu pour le calcul de sa compensation. Idem pour le suivi de l'évolution du produit de TVA qui concerne désormais directement les collectivités, la taxe spéciale sur les conventions d'assurance ou les droits de mutation à titre onéreux (DMTO). Il est pourtant nécessaire de renouer un lien de confiance, qui passe par plus de transparence. Cela renforcerait de surcroît leur capacité de projection et de souplesse. Comment l'État compte-t-il rendre cette information plus transparente ?

Mme Laurence Garnier, secrétaire d'État chargée de la consommation .  - En contrepartie de la suppression de la CVAE, les collectivités bénéficient depuis 2023 d'une fraction de TVA, qui donne lieu à trois actualisations annuelles en fonction des prévisions de recettes. La DGFiP, pour accompagner au mieux les collectivités dans l'évaluation de leurs ressources fiscales, a mis en place plusieurs outils : elle notifie chaque année, en mars, le montant des ressources fiscales prévisionnelles revenant à chaque collectivité afin de les aider à bâtir leur budget ; chaque actualisation de la TVA s'accompagne d'un courriel individuel à chaque collectivité ; la DGFiP adresse chaque mois à chaque collectivité un état détaillé des ressources fiscales qui lui ont été versées sous forme d'avance de fiscalité. Ce circuit nous paraît fonctionnel et éprouvé.

Le produit des DMTO est versé quotidiennement au département en fonction des cessions enregistrées - schéma classique comparable à d'autres produits perçus par les collectivités locales. La DGFiP travaille enfin en étroite collaboration avec les associations d'élus locaux, qui peuvent aider à résoudre les problèmes éventuels.

Financement des Ehpad

M. Jean-Claude Anglars .  - La population vieillit : dans six ans, les Français âgés de 75 à 84 ans seront 49 % de plus et la France n'est pas prête. Les professionnels le disent : la situation est catastrophique. La loi pour bâtir la société du bien-vieillir du 8 avril 2024 a introduit diverses dispositions, certes bienvenues, mais insuffisantes. Le précédent gouvernement n'a pas su consolider la situation financière des Ehpad - en déficit pour près de 80 % d'entre eux. Le risque de fermeture pèse ainsi sur les Ehpad de Bozouls ou de Saint-Chély d'Aubrac - plus ancienne maison de retraite du département, datant de 1873.

Quel est le bilan des commissions départementales pour le suivi et l'examen de la situation financière des structures médico-sociales en difficulté établies il y a un an ? Certes la loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 ouvre la possibilité d'une fusion des sections soin et dépendance des Ehpad à titre expérimental pour les départements volontaires ; mais quelle solution pour les autres ?

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée des personnes en situation de handicap .  - Les crédits des établissements et des services pour personnes âgées ont augmenté de près de 7 milliards d'euros entre 2019 et 2024 ; les Ehpad ont bénéficié d'un plan d'aide exceptionnel dans le cadre du Ségur de la santé entre 2021 et 2024 et le volet médico-social s'est élevé à 1,5 milliard d'euros. Le Gouvernement a également prévu 100 millions d'euros à disposition des agences régionales de santé (ARS) pour répondre aux urgences.

Les commissions départementales de suivi de la situation financière des structures en difficulté, installées fin septembre 2023, réunissent ARS, conseils départementaux, DGFiP, Urssaf et CPAM. Elles ont été pérennisées en janvier 2024 et sont jugées utiles par 82 % de leurs membres. Un suivi est également réalisé par une cellule ministérielle. La direction générale de la cohésion sociale a enfin mis en place un groupe de travail, associant les fédérations du secteur, des ARS et des conseils départementaux, avec cinq sous-groupes.

L'expérimentation de la fusion des sections soin et dépendance des Ehpad dans 23 départements est financée dans le PLFSS 2025. Une évaluation annuelle par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) et un rapport du Gouvernement seront remis au Parlement en 2028 pour préparer sa généralisation et sa pérennisation. Les moyens de tous les Ehpad sont par ailleurs renforcés par la création de 6 500 ETP supplémentaires, afin d'atteindre un taux d'encadrement de 7,3 ETP pour dix résidents.

Coupes budgétaires au CRCDC de Nouvelle-Aquitaine

Mme Frédérique Espagnac .  - Le centre régional de coordination des dépistages des cancers (CRCDC) Nouvelle-Aquitaine est confronté à une réduction budgétaire drastique.

C'est pourtant un acteur incontournable de la prévention : cette année, la Nouvelle-Aquitaine est la première région en termes de progression du taux de dépistage -  plus 14 % pour le cancer du sein et plus 50 % pour le cancer colorectal au premier trimestre par rapport à 2023.

Alors que 40 % des cancers sont évitables et que l'objectif du Gouvernement est de réduire leur nombre de 60 000 par an et de réaliser un million de dépistages supplémentaires d'ici à 2025, pourquoi réduire le budget de ce centre, seul en France à être touché par une telle mesure ?

Pourriez-vous, madame la ministre, reconsidérer cette décision ?

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée des personnes en situation de handicap .  - En décembre 2022, le Gouvernement a annoncé une nouvelle organisation du dépistage des cancers : transfert du pilotage de plusieurs missions à l'assurance maladie et recentrage des CRCDC notamment sur le suivi des programmes organisés et la formation des professionnels de santé. L'agence régionale de santé (ARS) a favorisé l'adaptation de ce CRCDC, avec un financement de 9 millions d'euros. Le déficit de 11 millions d'euros du centre est dû au décalage entre les orientations qu'il a prises, non prévues au cahier des charges, et celles définies par l'ARS. Celle-ci cherchera des solutions pour rétablir l'équilibre. Le Gouvernement est engagé en faveur de la prévention et du dépistage.

Mme Frédérique Espagnac.  - Le centre répond aux besoins du territoire. Il faut trouver des solutions.

Zonage des chirurgiens-dentistes dans la Sarthe

M. Thierry Cozic .  - En avril 2024, le ministère de la santé a proposé un nouveau zonage des chirurgiens-dentistes afin d'inciter l'installation des praticiens dans des zones sous-dotées, en échange d'une contrepartie financière.

Selon la répartition proposée, le territoire de vie-santé (TVS) de La Flèche est classé en zonage intermédiaire, or le reste du département est en zonages très sous-dotés et sous-dotés. Ce nouveau zonage conduirait au déménagement du seul cabinet fléchois dans le Maine-et-Loire voisin, au sein d'une nouvelle structure située en zone France Ruralités Revitalisation (FRR), plus attractive.

Quel mode de calcul a été appliqué ? Le département de l'Indre, qui compte 39,53 chirurgiens-dentistes pour 100 000 habitants, contre 38,61 praticiens pour 100 000 habitants dans la Sarthe, est entièrement classé en zonage très sous-doté, contrairement à la Sarthe. Pourquoi de telles différences d'appréciation ?

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée des personnes en situation de handicap .  - L'accès aux soins est une priorité du Gouvernement ; nous devons faire plus et mieux partout. Les solutions proposées visent à attirer les professionnels de santé dans les territoires qui en manquent le plus et à améliorer l'accès aux soins. Leur déclinaison relève des agences régionales de santé (ARS).

En 2024, l'ARS Pays de la Loire a proposé un zonage pour les chirurgiens-dentistes, fondé sur l'indicateur d'accessibilité potentielle localisée, calculé à l'échelle des TVS, qui tient compte de l'activité des chirurgiens-dentistes, de la consommation de soins de la population et de la distance entre les communes. Au niveau national, la borne maximum pour les zones sous-dotées et très sous-dotées est de 52,19 chirurgiens-dentistes pour 100 000 habitants, contre 53,22 pour 100 000 habitants dans le TVS de la Flèche en 2022, un niveau supérieur aux TVS de l'Indre. Les données pour 2023 permettront aux ARS d'actualiser leur zonage si besoin.

Hôpital Louis Constant Fleming de Saint-Martin

Mme Annick Petrus .  - Une fois encore, j'attire votre attention sur cet établissement, le seul de l'île, qui connaît une instabilité dangereuse.

Dirigé par un second directeur par intérim, la continuité de sa gestion est compromise. L'absence de certification, de projet d'établissement et d'instances - comité stratégique, comité territorial des élus locaux, commission médicale de groupement -, mais aussi le nombre de départs de médecins, l'absentéisme, le turn-over des dirigeants, la grave réduction de l'offre de soins et des comportements qui interrogent l'éthique plaident pour une inspection neutre et objective de l'inspection générale des affaires sociales (Igas). La population paie le prix fort de ces dysfonctionnements et ne veut ni se laisser mourir ni se laisser tuer.

Madame la ministre, pouvez-vous déclencher un contrôle de l'Igas ?

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée des personnes en situation de handicap .  - L'hôpital de Saint-Martin a bénéficié d'investissements d'ampleur : 12 millions d'euros pour augmenter sa résilience et réduire les inégalités en santé ; 70 000 euros, sur les 970 000 euros du Fonds pour la modernisation et l'investissement en santé, pour son service de psychiatrie d'ici à la fin 2024.

En dépit du turn-over des dirigeants, l'offre de soins n'a pas été affectée. Les effectifs sont constants depuis plusieurs années, de même que l'activité. L'absence de certification de la Haute Autorité de santé (HAS) est liée à des manquements à des critères impératifs en voie de correction. Néanmoins, l'hôpital affiche un taux de satisfaction de 76,8 %. La ministre de la santé est pleinement engagée en faveur de la protection de l'hôpital de Saint-Martin.

Mme Annick Petrus.  - Vous n'avez pas répondu à ma question. Le droit fondamental à l'accès aux soins des Saint-Martinois doit être respecté. Il y va de leur confiance en l'État.

Prothèses capillaires

Mme Patricia Demas .  - Depuis la loi du 23 décembre 2022 de financement de la sécurité sociale pour 2023, les perruques des patients ayant subi une chimiothérapie sont remboursées par la sécurité sociale, mais le montant du remboursement dépend de la composition de la perruque.

Les perruques entièrement en cheveux synthétiques et inconfortables, dont le prix est plafonné à 350 euros, sont prises en charge intégralement. Celles ayant au moins 30 % de cheveux naturels sont remboursées 250 euros, si leur prix n'excède pas 700 euros. Mais, dans les faits, les patients optent plutôt pour des perruques composées entièrement de cheveux naturels, dont le coût varie entre 1 000 et 3 000 euros, pour lesquelles la sécurité sociale ne rembourse rien. Nombre de patients y renoncent.

Il serait équitable que tout type de perruque soit remboursé sur une même base. Quelles raisons justifient une telle différence ? Qu'envisage le Gouvernement pour y remédier ?

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée des personnes en situation de handicap .  - Offrir des accessoires de qualité et adaptés aux patients ayant subi une chimiothérapie est essentiel à leur bien-être et fait partie du parcours de soins. Le Gouvernement a donc décidé de les prendre en charge à partir de 2023.

Vous l'avez rappelé, les prises en charge diffèrent selon les spécifications techniques. Pour favoriser l'équité d'équipement et l'accès aux soins adaptés, des travaux sont en cours pour améliorer la spécification technique des produits et réduire le reste à charge. Une prise en charge des perruques en cheveux naturels est aussi prévue.

En septembre dernier, un projet de révision de la nomenclature a été publié, sur lequel la HAS rendra un avis prochainement. Les travaux seront finalisés après une négociation tarifaire avec les acteurs du secteur. Les services du ministère de la santé seront très attentifs à l'avis de la HAS afin de finaliser ces travaux.

Mme Patricia Demas.  - C'est une bonne nouvelle ! Nous serons attentifs à cet avis.

Vaccination des collégiens contre les infections à HPV

Mme Marie-Do Aeschlimann .  - La deuxième campagne nationale de vaccination scolaire contre les infections à papillomavirus humains (HPV) est en cours dans les collèges publics et les collèges privés volontaires, à destination des élèves de cinquième lorsque leurs parents y ont consenti. Cette vaccination prévient 90 % des infections à l'origine de cancers pour une efficacité proche de 100 % si elle est réalisée avant le début de la vie sexuelle.

Bien qu'en progression, la précédente campagne vaccinale n'a pas atteint son objectif -  vacciner 30 % des élèves de cinquième  -  ; votre prédécesseur annonçait, en mars 2024, que seuls 15 % d'entre eux étaient vaccinés. En outre, le taux de vaccination était plus faible dans les collèges REP et REP+, les territoires ultramarins et en Île-de-France, où il était d'à peine 13 %. Dans mon département des Hauts-de-Seine, on constate des différences significatives entre communes.

Les freins à la vaccination ont-ils été identifiés ? Quelles mesures sont envisagées pour améliorer la situation ?

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée des personnes en situation de handicap .  - La vaccination est l'un des meilleurs outils de prévention. Les résultats de la première campagne sont encourageants : 48 % des élèves âgés de douze ans ont reçu au moins une dose en 2023. Agir dans les collèges est une bonne chose pour la prévention : les jeunes et leurs parents ont été informés des risques de cancers et des gains de la vaccination.

Certes, beaucoup reste à faire pour atteindre l'objectif de 80 % d'une tranche d'âge vaccinée d'ici à 2030. Une deuxième campagne de vaccination a donc été lancée et 75 millions d'euros lui seront consacrés en 2025. Des améliorations ont été apportées : information et sensibilisation des élèves de sixième, envoi d'un courrier d'information aux parents dès juin. Il s'agit d'offrir une vaccination gratuite, sûre et efficace. Nous y consacrerons les moyens nécessaires.

Mme Marie-Do Aeschlimann.  - Je vous remercie de ces efforts.

Situation budgétaire des Ehpad

M. Guillaume Chevrollier .  - Les établissements et services médico-sociaux (ESMS) sont confrontés à une dégradation massive, rapide et profonde de leurs comptes. En 2023, 92 % d'entre eux prévoyaient une fin d'année en déficit. Les conséquences de cette situation sont particulièrement inquiétantes.

Alors qu'il est impératif d'investir pour le grand âge en identifiant de nouvelles sources de financement, le secteur est à un moment décisif. En 2023, un fonds d'urgence de 100 millions d'euros a été créé pour aider les Ehpad en situation critique. Dans mon département de la Mayenne, plusieurs structures sont concernées.

Madame la ministre, quelles mesures comptez-vous prendre rapidement ? Quelle sera la politique du Gouvernement sur le grand âge ?

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée des personnes en situation de handicap .  - Les crédits destinés aux établissements et services pour personnes âgées ont crû de près de 7 milliards d'euros entre 2019 et 2024. Les Ehpad ont bénéficié d'un plan d'aide exceptionnel dans le cadre du Ségur de la santé entre 2021 et 2024, dont le volet médico-social s'élevait à 1,5 milliard d'euros.

Face à l'urgence, le Gouvernement a mis en place des actions complémentaires en 2023 : soutien exceptionnel de 100 millions d'euros à la disposition des ARS, actions pérennes pour réussir la transition démographique à venir, installation fin septembre 2023, puis pérennisation en janvier 2024, de commissions dédiées au suivi financier des structures en difficulté dans chaque département, création d'un groupe de travail par la direction générale de la cohésion sociale. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 prévoit l'expérimentation de la fusion des sections soins et dépendance.

Enfin, un taux d'encadrement de 7,3 équivalents temps plein (ETP) pour 10 résidents est prévu dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2025.

M. Guillaume Chevrollier.  - Nous veillerons à la mise en oeuvre de ces dispositions.

Conditions de travail et statutaires des AESH

M. Gérard Lahellec .  - La loi a prévu la prise en charge par l'État de la rémunération des accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH) pour leur emploi sur le temps méridien, mais les décrets tardent et les AESH sont ballottés, tributaires des décisions prises par les MDPH, par les rectorats et par les pôles inclusifs d'accompagnement localisés (Pial), ce qui les précarise. Ce métier a besoin de stabilité et de reconnaissance.

Le plus simple serait de les rattacher aux inspections académiques, en leur donnant un statut. Le Gouvernement garantira-t-il une meilleure stabilité aux AESH ?

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée des personnes en situation de handicap .  - Notre priorité est d'assurer une scolarisation de qualité à tous les élèves. Actuellement, 513 000 élèves en situation de handicap sont scolarisés en milieu ordinaire, un chiffre en constante augmentation depuis 2017. Parmi eux, 336 732, soit 65 %, bénéficient d'une notification de la MDPH.

Fin 2024, 140 000 AESH accompagneront quotidiennement ces élèves. Entre 2022 et 2025, 13 000 emplois auront été créés pour répondre aux besoins d'accompagnement croissants. La dynamique se poursuit en 2025 avec 2 000 ETP.

La gestion administrative des AESH a été progressivement confiée au rectorat dans le cadre d'un service académique dédié, au même titre que les enseignants. Leur statut a évolué depuis la rentrée 2023 avec la CDIsation dès trois ans d'activité et une revalorisation statutaire et financière. Le ministère est tenu de mettre en oeuvre ces notifications dès qu'elles sont portées à sa connaissance.

Afin de garantir une réponse au plus près des besoins, l'emploi du temps des AESH est organisé au sein des PIAL ou, depuis la rentrée 2024, dans quatre départements préfigurateurs au sein des pôles d'appui à la scolarité (PAS), pour une réponse rapide de première intention ou à plus long terme. Je serai attentive à l'évaluation et au déploiement de ces nouveaux PAS.

Service public de la petite enfance

M. Pierre Barros .  - À compter du 1er janvier 2025, la loi pour le plein emploi de 2023 confie la compétence « petite enfance » aux communes en remplacement des EPCI, qui garantissaient un accès diversifié et équitable aux habitants d'un même territoire. Ceux-ci pourront-ils conserver cette compétence pour assurer la continuité du service public ?

La loi oblige à inscrire dans le schéma pluriannuel de maintien et de développement de l'offre d'accueil du jeune enfant le calendrier de réalisation et le coût prévisionnel des opérations projetées, mais avec quels moyens ? Les 86 millions d'euros et les 35 000 places annoncés par le ministre, le 16 octobre dernier à l'Assemblée nationale, sont loin du compte. Les élus n'ont pas attendu la loi pour créer des places d'accueil, mais les moyens financiers et humains manquent. Quel accompagnement des communes et quels moyens pluriannuels prévoyez-vous ?

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée des personnes en situation de handicap .  - En dépit de financements publics importants, la politique familiale demeure marquée par de fortes inégalités territoriales. Le service public de la petite enfance doit accroître et diversifier l'offre à destination des familles. Le Val-d'Oise compte 41 places d'accueil pour 100 enfants de moins de 3 ans.

Les dépenses de la branche famille ne diminuent pas entre 2024 et 2025, signe de l'importance que lui accorde le Premier ministre. En fonction du nombre d'habitants, une commune doit obligatoirement exercer tout ou partie des quatre compétences : recenser les besoins, informer et accompagner les familles, planifier le mode d'accueil et soutenir la qualité de ses modes d'accueil.

La concrétisation du service public de la petite enfance en 2025 sera possible grâce à l'engagement des communes ou des intercommunalités, le cas échéant dans le cadre de nouvelles compétences d'autorité organisatrice. Le Gouvernement a précisé dans une « foire aux questions » les modalités de mise en oeuvre.

L'État accordera un nouveau soutien financier de 86 millions d'euros aux communes. Un amendement au projet de loi de finances énumèrera les critères de répartition du financement - nombre de naissances, potentiel financier - afin d'orienter les financements vers les communes les plus modestes. Nous voulons aider chaque parent à concilier les différents temps de vie et que chaque enfant bénéficie d'un cadre protecteur et de qualité.

Lutte contre l'amiante

M. Sébastien Fagnen .  - Malgré son interdiction en 1997, l'amiante continue de tuer. L'Association des victimes de l'amiante (Adeva) estime qu'il pourrait y avoir 100 000 nouvelles victimes d'ici vingt ans, car les maladies - du poumon ou de la plèvre - peuvent se déclarer des décennies après l'exposition, et 20 millions de tonnes d'amiante sont encore présentes dans les bâtiments.

À la suite d'un revirement de jurisprudence du Conseil d'État, confirmé fin 2023, des ouvriers d'État de la direction des constructions navales (DCN) de Cherbourg ont vu leurs requêtes de dédommagement rejetées, au motif que le délai de prescription avait commencé en 2001, à l'inscription sur la liste des sites ouvrant droit à la préretraite amiante.

C'est désormais l'article 24 du PLFSS 2025 qui pose problème. L'indemnisation sous forme de rente du déficit fonctionnel permanent en cas de faute inexcusable de l'employeur constituerait un recul pour les victimes les plus gravement atteintes. La réparation en cas de faute inexcusable doit être alignée sur la réparation intégrale du préjudice, comme le recommande la Cour de cassation.

Les victimes attendent toujours un procès pénal qui s'éloigne de plus en plus. Le Gouvernement garantira-t-il une politique publique de désamiantage massif et un grand procès pénal, à la hauteur du drame subi par des générations d'ouvriers ? (Mmes Colombe Brossel, Nathalie Goulet et Annick Billon applaudissent.)

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée des personnes en situation de handicap .  - Un décret du 4 mai 2012 a relevé le niveau de prévention en matière d'exposition à l'amiante, abaissé la valeur limite d'exposition professionnelle, et imposé une méthode d'analyse capable de décompter les fibres d'amiante cancérigènes. L'inspection du travail contrôle le respect de cette réglementation, avec près de 11 000 interventions en 2022.

La cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante est justifiée par des expositions importantes avant 1997. Elle s'applique à titre individuel aux salariés atteints de maladies professionnelles liées à l'amiante, et à titre collectif aux salariés des établissements listés par les arrêtés des 3 et 7 juillet 2000, régulièrement mis à jour.

Depuis 2010, les salariés peuvent demander la réparation du préjudice d'anxiété, les ouvriers de l'État depuis 2017. La reconnaissance du droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (Acaata) vaut reconnaissance d'un lien établi entre l'exposition à l'amiante et la baisse de l'espérance de vie.

Des sites relevant historiquement de DCNS - devenu Naval Group en 2017 - sont inscrits depuis 2001 dans l'arrêté ouvrant droit au bénéfice de l'allocation spécifique de cessation anticipée d'activité. Les partenaires sociaux ont réaffirmé en 2023 et 2024 leur attachement au caractère dual de l'indemnisation des accidents de travail et maladies professionnelles. Le PLFSS 2025 retranscrit fidèlement leur accord.

?Complexification du dispositif Qualiopi

Mme Annick Billon .  - Depuis 2021, la certification Qualiopi est obligatoire pour tous les prestataires proposant une formation de développement de compétences, et rend éligibles aux financements publics.

Elle a été révisée à neuf reprises, entraînant des redondances. La certification impose désormais la validation de 32 indicateurs et de multiples points de contrôle. Les formateurs remplissent des procédures administratives et les coûts administratifs sont importants. Ainsi, la Maison familiale rurale (MFR) de Talmont-Saint-Hilaire en Vendée est passée de 0,5 ETP administratif pour 56 apprenants en 2014, à 5,5 ETP pour 150 élèves... Des structures spécialisées prolifèrent, créant un véritable marché parallèle, avec des formations en 100 % distanciel, parfois mal ou peu dispensées. Des élèves insuffisamment formés ne valident pas leurs examens. Pourtant, ces centres disposent du même soutien de l'État ! Quelle est l'efficience de ces dépenses, et comment le Gouvernement compte-t-il garantir la performance du dispositif ?

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée des personnes en situation de handicap .  - Depuis le 1er janvier 2022, les prestataires doivent obtenir la certification qualité Qualiopi pour accéder aux fonds publics et mutualisés. Ces critères et indicateurs sont restés stables et le référentiel n'a pas changé ; seul le guide de lecture a été précisé.

L'augmentation du nombre d'organismes de formation est surtout liée à l'obligation de déclaration des sous-traitants. Tous ne demandent pas la certification : seuls 44 633 des 125 000 organismes actifs sont certifiés Qualiopi. Selon une étude de 2023, seuls 6,5 % des organismes de formation ont recruté durablement dans le cadre de la certification.

La ministre du travail poursuivra les travaux engagés avec les partenaires sociaux et les financeurs sur la qualité des formations. L'accompagnement des apprentis, le respect des quatorze missions assurées par les centres de formation des apprentis (CFA) et l'adéquation des moyens au regard des certifications proposées sont des priorités. Elle travaille également à une meilleure coordination des contrôles et des audits.

Mme Annick Billon.  - L'échec des élèves montre les failles du système. Évitons de subventionner des établissements qui ne remplissent pas l'obligation de qualité des formations !

Enseignement privé sous contrat à Paris

Mme Colombe Brossel .  - L'enseignement privé sous contrat est financé à 76 % par des fonds publics. Pourtant, difficile de connaître précisément les moyens alloués, les effectifs, le nombre de classes et d'enseignants, notamment à Paris.

Selon le rapport de la Cour des comptes de 2023, les inégalités entre enseignement public et privé se creusent, car la répartition des moyens « ne tient pas suffisamment compte des difficultés des élèves accueillis ». Une étude du syndicat SE-UNSA montre que, malgré les écarts d'indice de position sociale (IPS) entre les collèges publics et privés, les dotations sont quasi identiques. Les lycées généraux et technologiques publics seraient les grands perdants.

Si la méthode de calcul utilisée pour définir les moyens des établissements privés s'appliquait aux établissements publics, ces derniers auraient droit à 12 850 postes d'enseignants supplémentaires ! À l'inverse, il faudrait supprimer 2 040 postes dans le privé.

À Paris, 127 classes ont été supprimées dans le premier degré, alors que seulement une cinquantaine de classes du privé ont été déconventionnées. Ce déséquilibre intolérable conduit, de fait, à faire absorber la baisse démographique quasi exclusivement par l'enseignement public. La démographie ne peut pas tout justifier, et notamment pas la suppression de 4 000 postes dans le PLF 2025.

Quels sont les indicateurs justifiant la fermeture d'une classe ou la baisse de dotation horaire globale pour le public et pour le privé sous contrat ?

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée des personnes en situation de handicap .  - La répartition des moyens entre enseignement public et privé est inchangée au niveau national, et répond aux principes de parité et à la règle dite des 20 % : pour l'ensemble du privé sous contrat, 20 % de l'ajout ou du retrait des moyens accordés chaque année à l'enseignement public.

À Paris, la proximité géographique entre établissements privés sous contrat et établissements publics est forte. Un travail de convergence des établissements privés avec le schéma d'emploi prévu dans le public a abouti au retrait de 50 ETP à la rentrée 2024. Durant l'année scolaire 2023-2024, le taux d'encadrement dans le premier degré de l'enseignement privé était de 25,5 élèves par classe, soit six élèves de plus que dans le public. Les taux d'encadrement sont très favorables à l'enseignement public au collège. Au lycée, en revanche, le nombre d'élèves par classe est moins important dans le privé.

Si la composition sociale des établissements publics parisiens est déjà très favorisée, avec un IPS moyen au collège de 117,2 contre 100,8 au niveau national, l'IPS moyen des collèges privés est de 147,5. Le ministère de l'éducation nationale veillera, pour la prochaine rentrée scolaire, à maintenir un équilibre entre les deux secteurs et à oeuvrer en faveur d'une amélioration de la mixité sociale et scolaire à Paris.

Non-respect du principe « extrader ou juger »

Mme Nathalie Goulet .  - La lutte contre le blanchiment d'argent et la criminalité organisée est une priorité, en témoigne la réunion à Paris du Groupe d'action financière (Gafi). Ancienne présidente du groupe France-Asie centrale, j'ai eu connaissance d'un feuilleton judiciaire concernant un ancien banquier en fuite dans l'Hexagone, accusé par son pays d'avoir détourné 7,5 milliards de dollars - une paille. Celui-ci étant inculpé depuis avril 2018 à la suite d'une plainte, nous nous heurtons au principe « extrader ou juger ». Compte tenu des faits avérés de fraude et de blanchiment, la Cour de cassation a invalidé l'annulation des poursuites en mai 2023. L'individu fait l'objet d'une OQTF depuis novembre 2023. La procédure judiciaire n'a pas avancé et l'OQTF n'est pas appliquée.

Depuis le 9 avril 2024, nous avons une convention d'entraide avec le Kazakhstan. Le garde des sceaux a-t-il l'intention d'appliquer le principe « extrader ou juger » ?

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée des personnes en situation de handicap .  - Je vous prie d'excuser l'absence du garde des sceaux.

L'information judiciaire ouverte par le parquet de Paris à l'encontre de ce ressortissant kazakhstanais fait suite au refus de l'extrader. C'est l'illustration flagrante de l'application faite par la France du principe « extrader ou juger », prévu par l'article 113-8-2 du code pénal.

Si les demandes d'extradition entre la France et le Kazakhstan n'ont toujours pas de fondement conventionnel dédié, les demandes d'entraide pénale internationale peuvent dorénavant être transmises à l'appui de la convention bilatérale entrée en vigueur le 1er septembre 2024. Cela fluidifiera la coopération en matière d'entraide.

L'OQTF, procédure administrative, ne relève pas du ministère de la justice.

Mme Nathalie Goulet.  - Cet imbroglio judiciaire est une difficulté pour nos amis et partenaires du Kazakhstan : 7,5 milliards de dollars, ce n'est pas une petite somme ! Il faut lutter contre le blanchiment. Je saisirai le ministre compétent pour l'OQTF.

Livraisons par drones dans les prisons

M. Franck Menonville .  - Les drones sont de plus en plus utilisés par les délinquants pour faire parvenir aux détenus toutes sortes de marchandises illicites. Nos prisons sont constamment en proie à d'innombrables trafics.

Ainsi, au centre de détention de Saint-Mihiel, dans la Meuse, 26 livraisons ont été interceptées depuis le début de l'année.

Cette situation inquiète fortement les agents pénitentiaires, qui font aussi face à une violence croissante des détenus.

Pour contrer les livraisons par drones, divers outils efficaces ont été installés : filets, fusils, brouilleurs. Certains établissements en sont d'ores et déjà dotés. Tous doivent l'être. Nous ne pouvons laisser nos prisons être gangrenées par les trafics, voire devenir le centre de pilotage d'actes de grand banditisme.

Le Gouvernement envisage-t-il de systématiser l'installation d'outils antidrones dans les établissements pénitentiaires ?

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée des personnes en situation de handicap .  - Le garde des sceaux est profondément attaché à la protection du personnel pénitentiaire.

La lutte contre la livraison par drones est une priorité. Les fusils neutralisants sont utilisés par les policiers et les gendarmes mais leur usage n'est pas adapté aux agents pénitentiaires, dont le délai d'intervention est de moins de dix secondes.

À ce jour, 47 sites sont équipés d'un système antidrones. D'autres doivent l'être prochainement. Le centre de détention de Saint-Mihiel en sera équipé en 2025.

Le centre de détention de Montmédy est quant à lui doté d'un brouilleur de téléphones et de filets antiprojections. Par ailleurs, une équipe locale de sécurité pénitentiaire doit être constituée afin de protéger ses abords.

Enfin, des fouilles de cellules sont organisées.

Soutien financier aux communes calédoniennes

M. Georges Naturel .  - Je souhaite relayer avec force l'appel à l'aide des communes calédoniennes. Le 5 août, les trente-trois communes du territoire ont alerté le Gouvernement sur l'extrême fragilité de leurs budgets après les émeutes du 13 mai. Elles souhaitent une augmentation de la dotation globale de fonctionnement (DGF) afin de compenser les pertes de recettes liées à la division par deux de la part versée par la Nouvelle-Calédonie, dont les recettes fiscales se sont effondrées avec la destruction de 25 % du tissu économique. Quelque 25 % des recettes des communes font défaut pour le budget en cours. Aussi, elles demandent une aide exceptionnelle de 34 millions d'euros.

Le Gouvernement a annoncé la prise en charge à 100 % de la remise en état du bâti scolaire et à 70 % des autres bâtiments publics après la mobilisation des assurances.

Comment le Gouvernement aidera-t-il les communes calédoniennes ? Elles constituent l'échelon essentiel du vivre-ensemble et de la reconstruction.

M. François-Noël Buffet, ministre chargé des outre-mer .  - J'ai pu constater la situation sur place. Nous accompagnerons les collectivités territoriales calédoniennes en nous inspirant de ce qui a été mis en place dans l'Hexagone après les événements liés au décès du jeune Nahel Merzouk. Les communes seront aidées pour remettre en état ou reconstruire les bâtiments endommagés ou détruits.

J'ai demandé au haut-commissaire de faciliter le traitement des demandes de subventions, par la mise en place d'un guichet unique pour les collectivités concernées.

Les services de l'État sont mobilisés pour évaluer le montant des dégâts et accompagner les collectivités dans la durée. Elles devront d'abord faire appel aux assurances, après quoi l'État financera intégralement le reste à charge, s'agissant des établissements scolaires. Pour les autres biens et équipements, les taux de subvention accordés par l'État seront modulés en fonction de plusieurs critères, mais pourront atteindre 100 % à titre exceptionnel.

Les collectivités doivent adresser les demandes de subvention au Haut-commissariat avant le 17 novembre.

Jusqu'en septembre, l'État s'est engagé à hauteur de 400 millions d'euros et fournira un nouvel effort substantiel d'ici la fin de l'année. L'aide totale pourrait atteindre un milliard d'euros pour 2024 et 2025.

Drames dans la Manche et la mer du Nord

M. Didier Marie .  - Chaque semaine, des dizaines, voire des centaines de personnes fuyant la misère et l'oppression tentent de traverser la Manche au péril de leur vie, pour rejoindre la Grande-Bretagne, avec l'espoir d'une vie meilleure. La préfecture maritime de la Manche et de la mer du Nord a enregistré 52 décès, dans l'indifférence. Ce nombre est sans précédent.

Le 8 octobre, après quatre nouvelles disparitions, dont celles de deux enfants, les maires du littoral ont exprimé leur sentiment d'abandon et leur colère. Monsieur le ministre, que leur répondez-vous ? Quels moyens déploierez-vous pour éviter ces drames ?

M. Othman Nasrou, secrétaire d'État chargé de la citoyenneté et de la lutte contre les discriminations .  - Le ministre de l'intérieur est très déterminé à reprendre le contrôle de la politique migratoire et à lutter plus efficacement contre l'immigration irrégulière. Il a déjà engagé des discussions à l'échelon européen.

La lutte contre l'immigration irrégulière nécessite de démanteler les filières de passeurs. Nos forces de l'ordre en ont démantelé 197 entre 2020 et 2023 dans la Manche et la mer du Nord. Chaque décès de migrant est un drame absolu. Mais la responsabilité en incombe aux réseaux criminels de passeurs.

Rien ne pourra être durablement accompli sans partenariat avec le Royaume-Uni. Le ministre de l'intérieur a déjà rencontré son homologue britannique. Nous oeuvrons pour un partenariat migratoire entre l'Union européenne et le Royaume-Uni.

M. Didier Marie.  - La France et la Grande-Bretagne sont liées par le traité du Touquet, complété par celui de Sandhurst. Mais les moyens sont manifestement insuffisants. En outre, la question migratoire est européenne. La solution ne viendra ni de l'externalisation de l'accueil des migrants, ni d'une énième loi, mais d'un accord européen. La solidarité à l'égard des migrants ne doit pas être un vain mot.

Demande d'un commissariat de plein exercice à Sevran

Mme Corinne Narassiguin .  - La ville de Sevran a connu deux nuits de violences les 3 et 5 mai, entraînant la mort de trois personnes en pleine rue, quelques semaines seulement après une vaste opération « place nette » dans le quartier des Beaudottes. Les habitants et les élus locaux sont exaspérés.

Depuis près de trente ans, les municipalités successives demandent un commissariat de plein exercice. La mairie a fourni des efforts depuis 2018 pour se doter d'une police municipale mais cette dernière n'a pas vocation à se substituer à la police nationale. L'État ne doit pas abandonner les quartiers.

Actuellement, le commissariat de Sevran est sous l'autorité de celui d'Aulnay-sous-Bois, en cours de reconstruction. Les effectifs actuels de 60 policiers affichés à Sevran ne sont ni pérennes ni garantis. En 2001, les effectifs s'élevaient à 120 agents. Les gardes de nuit ne sont assurées que par trois ou quatre agents.

La Seine-Saint-Denis est sous-dotée, avec 34 policiers pour 10 000 habitants selon l'Insee, contre 44 dans les Hauts-de-Seine.

Instaurez un commissariat de plein exercice à Sevran !

M. Othman Nasrou, secrétaire d'État chargé de la citoyenneté et de la lutte contre les discriminations .  - La priorité du ministre de l'intérieur est de rétablir l'ordre. Les événements que vous évoquez découlent directement du narcotrafic, dont les luttes de territoires sont absolument intolérables. À Sevran, l'Office français anti-stupéfiants (Ofast) compte dix-sept points de deal différents. À la suite des homicides de mai dernier, une très vaste opération de démantèlement des trafics a mobilisé 1 141 agents.

Je salue les polices municipales de Sevran et d'Aulnay-sous-Bois qui travaillent main dans la main avec la police nationale pour sécuriser les établissements scolaires.

Nous sommes prêts à aller plus loin contre le trafic de stupéfiants, avec le concours du Parlement.

À Sevran prévaut la logique de l'intégration des forces de police, en s'appuyant sur les unités départementales. Le service rendu aux habitants de Sevran n'est pas amoindri. Néanmoins nous sommes prêts à regarder la situation de plus près.

Mme Corinne Narassiguin.  - La sécurité du quotidien doit également être une priorité. La demande d'un commissariat de plein exercice à Sevran est transpartisane et ancienne.

Retour des vendeurs à la sauvette à Paris

Mme Catherine Dumas .  - Depuis la fin des jeux Olympiques et Paralympiques, qui ont fait rayonner notre capitale, les Parisiens constatent avec grande lassitude le retour des vendeurs à la sauvette. Installés à proximité des zones touristiques, ces marchands illégaux vendent des aliments, des souvenirs et, très souvent, des contrefaçons. Les commerçants qui bénéficient d'une autorisation d'occupation s'inquiètent légitimement d'une concurrence déloyale de plus en plus forte. La pratique du bonneteau est également de retour.

Je rends hommage au préfet de police et à ses services, qui font tout pour lutter contre ce fléau.

Quels moyens le Gouvernement entend-il déployer pour lutter plus efficacement contre les vendeurs à la sauvette à Paris ?

M. Othman Nasrou, secrétaire d'État chargé de la citoyenneté et de la lutte contre les discriminations .  - De nombreux secteurs de la capitale sont touchés par ce phénomène, que nous combattons tout d'abord très efficacement par la confiscation des marchandises. Nous sommes prêts à aller plus loin. Des opérations spécifiques régulières sont mises en oeuvre, pouvant même mobiliser la garde républicaine, à Montmartre notamment.

L'axe Trocadéro-Champ-de-Mars fait également l'objet d'une surveillance accrue, notamment au regard du regain de délinquance lié à la décision de la Ville de Paris de pérenniser la piétonnisation du pont d'Iéna.

Au cours des neuf premiers mois de cette année, 6 146 ventes à la sauvette ont été réprimées, soit 20 % de plus que l'année dernière à la même période. Le recours aux amendes forfaitaires délictuelles produit ses effets.

En outre, nous démantelons les réseaux d'alimentation des vendeurs à la sauvette. En 2023, pas moins de 13 tonnes de tours Eiffel miniatures ont été saisies lors du démantèlement d'un important réseau, ainsi que 1 million d'euros d'avoirs criminels.

Mme Catherine Dumas.  - La piétonnisation du pont d'Iéna, décidée sans concertation par Anne Hidalgo, offre un terrain propice aux vendeurs à la sauvette. Le Gouvernement doit s'y opposer ! L'image de la France est en jeu.

Accès des polices municipales aux fichiers nécessaires aux contrôles routiers

M. Daniel Fargeot .  - Depuis la suppression de l'attestation d'assurance automobile le 1er avril dernier, les polices municipales, privées d'accès au fichier des véhicules assurés (FVA) par décision du Conseil constitutionnel en 2021, dépendent du commissariat ou de la gendarmerie pour obtenir ces informations - ce qui nuit à l'efficacité de leur intervention.

Ainsi, lors d'un contrôle routier après constat d'infraction, les policiers municipaux ne peuvent même pas utiliser par défaut le FVA accessible aux particuliers. Ils ne peuvent pas davantage contrôler l'assurance d'un véhicule stationné. Leur accès au système d'immatriculation des véhicules (SIV) est limité aux informations accessibles aux garagistes ; l'accès au système national du permis de conduire (SNPC) est tout aussi complexe.

Alors que le besoin d'ordre est grandissant, les maires jouent un rôle essentiel dans le continuum de sécurité et ont besoin de moyens adaptés. Comment allez-vous remédier à ces lacunes et faciliter l'accès des polices municipales aux fichiers nécessaires à leur mission ?

M. Othman Nasrou, secrétaire d'État chargé de la citoyenneté et de la lutte contre les discriminations .  - Le Gouvernement est très attaché aux pouvoirs de police du maire et au rôle et prérogatives des polices municipales.

La fin de l'obligation d'apposer la vignette d'assurance sur les véhicules est une simplification administrative, mais j'entends qu'elle complique la tâche des policiers municipaux.

La loi Sécurité globale de 2021 avait prévu, à titre expérimental, l'accès des polices municipales au FVA en matière délictuelle. Le Conseil constitutionnel avait censuré cette disposition, mais ouvert la voie à un possible travail législatif.

Le ministre de l'intérieur a chargé Nicolas Daragon d'explorer cette voie de passage avec l'Association des maires de France. Le Beauvau des polices municipales sera l'occasion de cette concertation. Bien conscients que les 27 000 policiers municipaux exercent une mission essentielle, nous allons avancer main dans la main avec les élus locaux.

Précarité étudiante

Mme Antoinette Guhl .  - Il y a un an, j'interpellai le précédent gouvernement sur la situation alarmante des étudiants et étudiantes. Aujourd'hui, je vous alerte, je vous exhorte d'en tenir compte. Selon la Fage, 19 % des étudiants, et jusqu'à 28 % des boursiers, ne mangent pas à leur faim. Ce n'est plus de la précarité, mais de la pauvreté.

Dans sa réponse, Sylvie Retailleau avait cité les repas à 1 euro, la revalorisation des bourses, le gel des loyers et des frais d'inscription.

Or selon l'Unef, le coût de la vie étudiante a augmenté de 27,76 % depuis 2017. En cette rentrée, la fin du gel des frais d'inscription et l'augmentation des loyers creusent les inégalités. Il y a urgence ! Allez-vous enfin engager une réforme des bourses basée sur un modèle universel et défamiliarisé, comme le demandent les associations étudiantes ? Où en est la construction de logements étudiants ? Quelles mesures concrètes pour enrayer la dégradation des conditions de vie des étudiants ? Ils sont l'avenir de notre pays, et ne peuvent plus attendre.

M. Othman Nasrou, secrétaire d'État chargé de la citoyenneté et de la lutte contre les discriminations .  - M. Patrick Hetzel est pleinement mobilisé sur ce sujet. Nous consacrons 2,3 milliards d'euros aux bourses. L'an dernier, 500 millions d'euros supplémentaires ont été débloqués. Les barèmes ont été revalorisés de 6 %, ce qui a fait rentrer dans le système 30 000 étudiants et fait gagner un échelon à 18 % des boursiers. C'était un effort nécessaire. Une bonification a également été introduite pour les étudiants en situation de handicap.

La réforme de notre système de bourses doit se poursuivre. Un nouvel outil simplifiera les interfaces entre les étudiants et les gestionnaires des Crous. Malgré le contexte budgétaire contraint, le Gouvernement entend poursuivre la réflexion, notamment pour supprimer les effets de seuil et mieux prendre en compte la situation individuelle des étudiants dans le système des points de charge.

En 2023, 22 millions de repas à 1 euro ont été servis ; nous programmons 16 000 nouvelles places en restauration, dans le cadre de 66 opérations, pour augmenter cette capacité.

Réforme des zones de revitalisation rurale

M. Jean-François Longeot .  - En février dernier, j'avais alerté le précédent gouvernement sur les effets désastreux de la réforme inéquitable des zones de revitalisation rurale (ZRR).

Notre commission de l'aménagement du territoire et du développement durable a fait des préconisations pour mieux appréhender les singularités des communes rurales, comme rebâtir un zonage à la maille communale et non plus intercommunale. Vu les effets de bord de la réforme, il est temps d'écouter le bon sens sénatorial !

En juin dernier, 2 200 communes exclues ont été « rattrapées », mais leur situation reste précaire, faute de base légale. Au demeurant, elles sont réintégrées au dispositif des ZRR, et non au dispositif France Ruralités Revitalisation (FRR). Il semblerait que certaines directions régionales des finances publiques refusent de leur appliquer les abattements et mesures fiscales qui découlent du classement. Cette incertitude est délétère. La parole de l'État est en jeu !

Comment comptez-vous pallier les effets pervers de la réforme ? Quel sort réservez-vous aux communes « rattrapées » ? Allez-vous leur garantir la sécurité juridique en apportant des correctifs structurels ?

M. Fabrice Loher, ministre délégué chargé de la mer et de la pêche .  - La nécessaire réforme des ZRR, adoptée en loi de finances pour 2024, a conduit à l'entrée en vigueur d'un nouveau zonage, France Ruralités Revitalisation (FRR), au 1er juillet 2024. Près de 17 700 communes ont intégré ce zonage qui ouvre droit à des exonérations sociales et fiscales renforcées pour les entreprises locales afin de soutenir l'attractivité des zones rurales.

Gabriel Attal, alors Premier ministre, a annoncé le 4 juin dernier que les 2 200 communes classées en ZRR mais non éligibles au nouveau zonage seraient maintenues dans le dispositif. Cette mesure vise à assurer une continuité dans le soutien aux politiques structurelles de développement économique et territorial en ruralité. Soyez assurés de la détermination de Catherine Vautrin à la faire appliquer.

Mutualisation des opérateurs de téléphonie

M. Pierre-Jean Verzelen .  - Le New Deal mobile a amélioré la couverture mobile et résorbé les zones blanches et grises. Dans l'Aisne, 61 sites ont été retenus pour y implanter des pylônes, avec pour principe celui de la mutualisation entre les opérateurs.

Malgré la loi de 2021 visant à réduire l'empreinte environnementale du numérique qui encourage la mutualisation, celle-ci n'est pas toujours au rendez-vous. On trouve parfois deux opérateurs, avec deux pylônes, sur un même site... Comment contraindre tous les opérateurs à venir sur chaque pylône qui émet ?

Dans les zones AMI (appel à manifestation d'intérêt), les opérateurs privés s'engagent à raccorder 100 % des foyers à la fibre optique, or certains ne respectent pas leur obligation, pour peu qu'un foyer soit un peu éloigné. Comment les y contraindre, sachant qu'avec la fermeture programmée du réseau cuivre, ces foyers vont se retrouver démunis ?

M. Fabrice Loher, ministre délégué chargé de la mer et de la pêche .  - Je mesure l'exaspération qu'entraîne la multiplication des antennes dans certains territoires.

Avec le New Deal mobile et le dispositif de couverture ciblée, les opérateurs privés ont l'obligation de mutualiser leurs pylônes et leurs installations actives lorsqu'ils sont quatre sur la zone. Les towercos favorisent également la mutualisation. D'autres obligations légales existent, en zone de montagne ou pour le déploiement de la 5G en zone peu dense.

Avant toute implantation, un temps de dialogue est requis via le dépôt des dossiers d'information au maire : rien n'est fait sans concertation locale.

Grâce à ces mesures, l'Arcep indique que 70 % des antennes sont mutualisées. Un million de personnes supplémentaires ont une couverture 4G depuis 2018. Dans l'Aisne, 60 sites ont été identifiés et 40 sont déjà mis en service.

Les opérateurs se sont également engagés à mieux couvrir les axes routiers prioritaires et ferroviaires, ainsi que l'intérieur des bâtiments.

Le Gouvernement s'est engagé à ce que 99,6 % de la population bénéficie d'une bonne couverture 4G en 2027, et 99,8 % d'ici 2031.

M. Pierre-Jean Verzelen.  - Personne ne nie les progrès qui ont été faits, mais quid de celui qui n'a ni la fibre, ni la couverture mobile ? Le New Deal était un accord contraignant qui a porté ses fruits. À quand un New Deal II pour enfin raccorder tous les foyers et forcer les opérateurs à aller sur tous les pylônes ?

Dotations d'équipement des territoires ruraux

M. Jean-Gérard Paumier .  - Ma proposition ne coûte rien et renforcerait le lien de confiance envers les élus locaux : élargir le champ de compétences des commissions départementales de répartition de la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR).

Celles-ci ne donnent un avis que sur les subventions supérieures à 100 000 euros. Dans mon département, cela représente, en 2024, 26 dossiers, pour 5 millions d'euros de DETR ; la commission n'a pas eu à se prononcer sur les 152 autres dossiers, pour 3,4 millions d'euros. Sur ces petits projets de communes souvent rurales, elle n'est qu'informée par le préfet.

Élargir la saisine à l'ensemble des dossiers serait facteur de simplification et de transparence. Par ailleurs, il faudrait que les montants de DETR soient notifiés aux préfets avant fin mars, afin que les travaux puissent être lancés avant l'été.

Les commissions départementales DETR pourraient aussi être informées des projets retenus au titre de la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL) et du fonds vert.

C'est simple, c'est rapide, c'est gage de transparence, d'efficacité et de confiance. Qu'en pensez-vous, monsieur le ministre ?

M. Fabrice Loher, ministre délégué chargé de la mer et de la pêche .  - Malgré le contexte budgétaire contraint, le projet de loi de finances pour 2025 maintient les dotations d'investissement à leur haut niveau. Nous croyons à la déconcentration et au rôle des préfets, au plus près du terrain, pour appuyer les projets des collectivités.

La contrepartie, c'est la transparence et l'égalité de traitement. Le préfet publie en open data la liste des projets retenus ainsi qu'un rapport annuel d'exécution ; la commission DETR est également informée des opérations non retenues.

Chaque année, près de 36 000 demandes de DETR sont déposées. La suppression du seuil de 100 000 euros conduirait la commission à formuler un avis sur chaque projet, au risque de retarder l'attribution des subventions.

DSIL et DETR obéissent à deux logiques différentes. La DSIL finance des priorités nationales : transition écologique, bâtiment scolaire, accessibilité. Pour la DETR, les priorités varient en fonction des spécificités locales, ce qui justifie l'intervention de la commission d'élus.

Le préfet de département informe déjà la commission DETR des orientations retenues sur la DSIL, et le préfet de région lui communique la liste des projets subventionnés - liste publiée sur le site de la préfecture. Une synthèse nationale est disponible en ligne.

Aérodrome de Melun-Villaroche

M. Aymeric Durox .  - L'aérodrome de Melun-Villaroche est une infrastructure stratégique. Berceau du groupe Dassault, il accueille aussi, depuis 1947, l'entreprise Safran. Son potentiel est grand au regard du foncier disponible, de sa piste, de sa tour de contrôle - qui a coûté très cher au contribuable - et de sa proximité avec Paris. La Poste et Zalando s'y sont installées.

En avril dernier, l'aérodrome a reçu le label « site industriel clés en main », mais l'État doit jouer son rôle de stratège, aux côtés des collectivités territoriales. En effet, l'aérodrome est sous-utilisé - seulement 600 mouvements annuels en voyages d'affaires. L'État doit aménager de nouvelles pistes, implanter une douane, construire une aérogare et réaménager l'échangeur de l'A5.

Quelles sont les intentions de l'État pour faire de Melun-Villaroche un modèle de réindustrialisation et une infrastructure digne de la première région d'Europe ?

M. Fabrice Loher, ministre délégué chargé de la mer et de la pêche .  - En mars 2007, la propriété de l'aérodrome a été transférée à un syndicat mixte : la stratégie de gestion et de développement de cet aérodrome décentralisé relève donc des collectivités territoriales, et l'État n'a pas vocation à participer à son financement.

Il veille toutefois à accompagner les projets portés par le syndicat mixte : en 2014, il a permis son ouverture à la circulation aérienne publique ; en 2021, il a accompagné l'aménagement de la zone Paris-Villaroche ; enfin, l'exploitant bénéficie de la prise en charge de ses coûts de sécurité et sûreté - 277 000 euros en 2022 et 380 000 en 2023.

En 2016, l'État a retiré treize aéroports de la liste des points de passage frontaliers (PPF), mais Melun-Villaroche n'en a jamais été doté, en raison notamment d'une fréquentation insuffisante.

Finances communales

M. Guislain Cambier .  - Le mécanisme de solidarité financière de la loi de 1999 sur la coopération intercommunale est à l'origine des difficultés de certaines communes qui accueillent des activités économiques : ce mécanisme, mis en place en contrepartie de la perception par l'EPCI de l'impôt économique, est en effet défavorable aux communes économiquement dynamiques, considérées comme riches.

Dans le département du Nord, plusieurs communes sont ainsi en situation financière difficile : Wambrechies ne reçoit que 929 000 euros sur les 3 millions de recettes dégagées par les entreprises de son territoire ; Saint-Saulve, dotée d'équipements structurants, sera dans l'incapacité d'équilibrer son budget en 2025. Faute d'une réforme de la fiscalité locale et de la dotation globale de fonctionnement (DGF), certains services offerts aux habitants devront être supprimés.

La direction générale des collectivités locales (DGCL) reconnaît qu'il ne s'agit pas de mauvaise gestion, mais aucune réponse concrète n'est apportée. Je propose une clause de revoyure de la compensation tous les dix ans et un mécanisme spécifique de calcul des dotations. Quelles mesures le Gouvernement envisage-t-il ?

M. Fabrice Loher, ministre délégué chargé de la mer et de la pêche .  - La loi de 1999 consacre les EPCI comme les acteurs majeurs du développement de leur territoire. À ce titre, ils disposent de la dynamique de la fiscalité économique ; en contrepartie, ils reversent aux communes des attributions de compensation, qui correspondent au montant des charges communales liées aux compétences transférées, qu'ils révisent librement et qui font l'objet d'un rapport tous les cinq ans.

Par ailleurs, afin de réduire les disparités de charges et de ressources entre communes d'une même métropole, la dotation de solidarité communautaire est calculée sur la base de critères légaux obligatoires et de critères complémentaires choisis par l'EPCI.

Ces dispositifs offrent une large latitude aux collectivités pour s'entendre sur le partage des recettes de fiscalité économique et développer en commun les services publics de proximité, dans le respect du principe de libre administration des collectivités auquel le Gouvernement est très attaché.

Électrification rurale

M. Jean-Yves Roux .  - J'apporte mon soutien aux communes touchées par les inondations de jeudi et vendredi ; elles vont devoir reconstruire leurs infrastructures, notamment électriques.

Les articles 7 et 36 du projet de loi de finances pour 2025 réforment le financement du compte d'affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale » (Facé). Quelque 377 millions d'euros sont consacrés chaque année à l'électrification rurale depuis 2012 : ni l'inflation ni les nouvelles missions liées à la transition écologique n'ont été compensées. Et de nouveaux défis sont là : réparation des réseaux à la suite des intempéries, enfouissement des lignes pour améliorer la résilience.

La réforme prévue instaure un tarif uniforme, au détriment de la solidarité territoriale et de la nécessaire péréquation entre urbain et rural, sans lien avec les besoins d'investissements sur le terrain. Nous craignons la disparition, à terme, de ce compte d'affectation spéciale et la dilution de ses crédits dans le budget général.

L'accès à un réseau électrique n'est pas un caprice budgétaire de nos communes. Comment allez-vous aider à court terme les collectivités territoriales à reconstruire leurs infrastructures électriques après les inondations ? Quelle réponse le Gouvernement apporte-t-il aux autorités organisatrices de la distribution d'énergie (AODE) ?

M. Fabrice Loher, ministre délégué chargé de la mer et de la pêche .  - Le Facé est un outil indispensable de soutien aux investissements en milieu rural. L'électrification de nouveaux usages et le raccordement de nouvelles productions d'énergies renouvelables imposent de renforcer nos réseaux.

En 2024, à la suite des tempêtes, les 360 millions d'euros du Facé ont dû être reventilés. Le projet de loi de finances pour 2025 prévoit la simplification de son mode de financement : la contribution des gestionnaires de réseau public de distribution sera remplacée par une fraction du produit de l'accise sur l'électricité, pour un montant total de 377 millions d'euros en 2025 - 360 millions d'euros comme en 2024 et un report de 17 millions d'euros.

Je ne manquerai pas de relayer vos préoccupations auprès de ma collègue Agnès Pannier-Runacher.

Désenclavement de la Guyane

Mme Marie-Laure Phinera-Horth .  - Dans sa déclaration de politique générale, Michel Barnier a cité Michel Rocard : « Nos priorités ne sont pas celles d'une moitié de la France contre l'autre moitié, mais celles de tous les Français. ».

Tous les Français ? J'en doute. Comme toujours, les outre-mer sont les enfants oubliés de la République. Nos priorités, vaguement écoutées à l'occasion de visites ministérielles éclair, ne sont entendues que quand le peuple descend dans la rue. Les Ultramarins sont des « citoyens entièrement à part », disait Aimé Césaire.

La République ne pense jamais à mes compatriotes guyanais enclavés. Une commune guyanaise sur trois n'est pas reliée au littoral par la route. En 500 ans, la République n'a construit que 500 km de route. Alors que penser quand la France dépense plus de 1 milliard d'euros pour une route de 12 km à la Réunion et que l'État refuse d'augmenter sa participation à la continuité territoriale aérienne interne en Guyane ? Que comptez-vous faire pour accélérer le désenclavement de mon territoire ?

M. Fabrice Loher, ministre délégué chargé de la mer et de la pêche .  - Les territoires ultramarins sont au coeur de la politique du Gouvernement : le ministre chargé des outre-mer, François-Noël Buffet, est directement rattaché au Premier ministre, lequel a rappelé dans sa déclaration de politique générale que les douze départements et territoires d'outre-mer sont une partie essentielle de notre pays ; il présidera un comité interministériel des outre-mer au premier trimestre 2025.

Le contrat de convergence et de transformation 2024-2027 pour la Guyane est doté de 171 millions d'euros de crédits d'État et 152,4 millions d'euros sont consacrés à l'entretien et la modernisation du réseau routier, notamment de la RN1.

Mme Marie-Laure Phinera-Horth.  - J'attends avec impatience mon rendez-vous avec le ministre chargé des transports, début novembre.

Sécurisation de la RCEA

M. Fabien Genet .  - La route Centre Europe Atlantique (RCEA) est l'une des plus accidentogènes de France. En 2017, nous avons plaidé pour l'accélération de sa mise à deux fois deux voies en Saône-et-Loire.

La mobilisation des élus locaux, notamment de mes collègues Jérôme Durain et Marie Mercier, a permis d'avancer cet objectif à 2025, grâce à un effort supplémentaire de 87 millions d'euros des collectivités territoriales - la RN relève pourtant de la compétence de l'État !

En 2021, un dépassement de l'enveloppe a imposé un nouvel effort de 12 millions d'euros du département et de la région. Or, aujourd'hui, nous apprenons que l'État envisage un échelonnement de la deuxième tranche, jusqu'en 2029 au lieu de 2025. C'est choquant ! L'État doit être au rendez-vous de sa promesse de sécurisation de cet axe d'intérêt national. Confirmez-vous cette information ?

M. Fabrice Loher, ministre délégué chargé de la mer et de la pêche .  - L'État s'est engagé dans la mise à deux fois deux voies de cet itinéraire depuis 2013. La deuxième phase des travaux est bien avancée : l'aménagement des quatre premières sections est réalisé, celui deux dernières sera achevé en 2026. Malgré l'importance des financements mobilisés en 2022, 15 millions d'euros de crédits d'État supplémentaires sont nécessaires pour achever la seconde phase - 5 millions d'euros en 2024, 10 millions d'euros en 2025.

Soyez assuré de la mobilisation de mon collègue chargé des transports, François Durovray.

M. Fabien Genet.  - Merci pour ces informations. Les travaux avancent, mais on ne voit rien sur la dernière partie. La Saône-et-Loire, trop souvent endeuillée, attend cette infrastructure depuis longtemps. Nous resterons mobilisés.

Projet Charles-de-Gaulle Express

Mme Marianne Margaté .  - Le futur Charles-de-Gaulle Express, attendu pour 2027, avec ses 150 trajets par jour depuis la gare de l'Est à 24 euros le billet, aura des effets acoustiques sur les riverains.

En 2019, 15 millions d'euros, soit seulement 0,75 % du budget global, ont été alloués à la protection acoustique de 7,5 km du tracé, sur un total de 32 km.

En 2022, les élus de Seine-Saint-Denis et de Seine-et-Marne ont appelé à doubler ce montant, afin d'étendre les protections acoustiques, en vain. Pis, la réunion prévue avec le préfet de région, annulée à la dernière minute, n'a jamais été reprogrammée. Quel mépris !

À ces nuisances s'ajouteraient celles résultant de la circulation du Charles-de-Gaulle Express sur les voies du RER B, qui transporte quotidiennement près de 1 million de passagers dans des conditions difficiles, alors que ces voies sont également utilisées par la ligne K du transilien, le TER Picardie et le fret ferroviaire.

Monsieur le ministre, comptez-vous satisfaire la demande des élus ?

M. Fabrice Loher, ministre délégué chargé de la mer et de la pêche .  - Le projet Charles-de-Gaulle Express est indispensable. Pour que son impact sur les voyageurs quotidiens soit moindre et que ses nuisances pour les riverains soient limitées, l'État a mis en place des instances de concertation animées et pilotées par le préfet de région ; les protections phoniques y sont abordées.

Les discussions avec les élus vont reprendre, afin d'identifier les mesures à adopter dans le respect des contraintes inhérentes au projet.

Le projet Charles-de-Gaulle Express est financé sans subvention publique dans le cadre d'un montage spécifique, reposant notamment sur une concession de l'État.

Par ailleurs, d'importants efforts sont réalisés pour renforcer l'infrastructure des lignes préexistantes - RER B et ligne K.

Aménagements ferroviaires du sud de Bordeaux

Mme Monique de Marco .  - Alors que les aménagements ferroviaires du sud de Bordeaux (AFSB) coûteront près de 1 milliard d'euros, dureront neuf ans et émettront 30 000 tonnes de CO2, leur inutilité publique est désormais établie !

Le dossier de l'enquête publique pour la mise en service des lignes à grande vitesse et du RER métropolitain prévoit huit trains par heure ; or, en 2023, SNCF Réseau, dans son graphique de circulation S4, indique que dix trains par heure peuvent circuler sur les deux voies actuelles ; la réserve de capacité serait de 25 %. Aussi, pour justifier les AFSB, SNCF Réseau ajoute désormais une desserte de Saint-André-du-Cubzac à Beautiran.

À Bègles, les aménagements auront un impact sonore sur les riverains, car un saut-de-mouton est prévu, mais sans protection phonique !

Comptez-vous réexaminer l'utilité publique du projet par la réalisation d'une expertise indépendante ?

M. Fabrice Loher, ministre délégué chargé de la mer et de la pêche .  - Les AFSB ont été déclarés d'utilité publique en 2015. Il faut développer l'usage de tous les trains, d'où les aménagements.

S'agissant du saut-de-mouton de Bègles, une étude conduite par SNCF Réseau démontre que les niveaux de bruit réglementaires sont respectés sans mise en place de protections acoustiques. Cela dit, SNCF Réseau réalisera les aménagements nécessaires.

Enfin, votre lecture du graphique de circulation de SNCF Réseau est erronée : il n'y a pas de réserves de capacité. De plus, les récentes projections de circulation ferroviaire confirment la nécessité d'un tel projet : quinze trains circulent dans les deux sens durant les deux heures de pointe du matin ; ce sera trois fois plus, soit quarante-quatre, à la suite des AFSB.

Mme Monique de Marco.  - Et l'expertise indépendante ? Les aménagements que vous proposez pour le saut-de-mouton ne sont pas du tout satisfaisants.

Attractivité des territoires ruraux

M. Jérôme Durain .  - Il y a un flou, qui laisse craindre un gros loup !

Je m'explique : le nouveau zonage intégrateur unique France Ruralités Revitalisation (FRR), introduit par la loi de finances pour 2024 et applicable au 1er juillet 2024, fusionne les précédents zonages de soutien aux territoires ruraux. Conséquence : près de 2 200 communes situées en zone de revitalisation rurale (ZRR) en sont exclues, dont 89 communes en Saône-et-Loire.

À la suite de la mobilisation nationale des élus, Gabriel Attal, alors Premier ministre, a annoncé le 4 juin dernier que ces 2 200 communes continueraient à bénéficier des exonérations fiscales et sociales actuelles pour les commerces en place comme ceux qui s'installeront à l'avenir.  Or l'arrêté du 19 juin a exclu de nouveaux bénéficiaires potentiels dans les communes concernées.

L'article 27 du projet de loi de finances (PLF) pour 2025 permettrait aux 2 168 communes non retenues initialement d'intégrer le dispositif FRR du 1er juillet 2024 jusqu'au 31 décembre 2027 : le confirmez-vous ?

M. Fabrice Loher, ministre délégué chargé de la mer et de la pêche .  - Le Gouvernement a annoncé le 4 juin dernier que les 2 200 communes situées en ZRR qui n'étaient pas éligibles au nouveau zonage FRR au 1er juillet 2024 seraient maintenues dans le dispositif. Cette mesure concerne 89 communes en Saône-et-Loire. L'article 27 du PLF pour 2025 traduit cet engagement.

Je vous le confirme, cette mesure s'applique dès le 1er juillet 2024. Des mesures dérogatoires sont également prévues, afin que le dispositif FRR puisse s'appliquer dès 2025 aux entreprises créées ou reprises dans ces communes à compter du 1er juillet 2024. À cet égard, les collectivités pourront délibérer jusqu'au 28 février 2025 pour instituer les exonérations de cotisation foncière des entreprises et de taxe foncière sur les propriétés bâties.

Déduction prélèvement SRU

M. Jean-Baptiste Blanc .  - Comme me l'a demandé le maire de Courthézon, commune du Vaucluse, est-il possible de déduire les dépenses liées à la production de logements sociaux du prélèvement d'une amende pour non-respect de la loi de 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU) ?

Les communes qui investissent dans l'acquisition de biens en vue de produire des logements sociaux doivent ajouter à ces dépenses le prélèvement prévu par le code de la construction et de l'habitation (CCH). Pourtant, de tels investissements permettent aux communes d'augmenter la part de logements sociaux, notamment en coeur de ville, où les bailleurs sociaux interviennent moins. N'est-ce pas un moyen de lever un frein à la création de logements sociaux ?

M. Fabrice Loher, ministre délégué chargé de la mer et de la pêche .  - Les communes qui n'atteignent pas le taux production de logements sociaux doivent s'acquitter d'un prélèvement annuel sur leurs ressources fiscales, proportionnel à leur retard.

Toutefois, elles peuvent en déduire les dépenses qu'elles engagent en faveur de la production de logements sociaux, à l'instar des subventions versées aux bailleurs sociaux ou des dépenses pour travaux de viabilisation. Il s'agit d'encourager les communes déficitaires à soutenir les opérations concourant au développement de l'offre de logements sociaux, donc au rattrapage de leur déficit.

Néanmoins, ces dépenses ne peuvent pas être déduites lorsqu'elles sont supportées directement par la commune et que cette dernière reste propriétaire du bien. Admettre la déductibilité de telles dépenses reviendrait à déduire du prélèvement de la commune une dépense correspondant à une augmentation du patrimoine de la commune. Cela créerait une forme d'autofinancement contraire à la logique du mécanisme. Les communes peuvent, en revanche, mobiliser les établissements publics fonciers pour procéder à des acquisitions.

Protection de la méthode ancestrale propre aux vins mousseux

M. Bernard Buis .  - Protégeons la méthode ancestrale propre à la clairette de Die et à d'autres vins mousseux d'appellations d'origine protégée, tels que le Limoux, le Bugey-Cerdon et le Gaillac. La réglementation communautaire a défini la méthode traditionnelle, mais aucune disposition ne régit la méthode ancestrale, qui remonte à l'Antiquité ! Les professionnels concernés par les appellations ont souhaité inscrire, dès 2012, une définition commune dans le droit national, mais selon l'administration centrale, une telle mention relève du droit européen ; voilà pourquoi un dossier a été déposé au printemps 2012 auprès de M. Stéphane Le Foll, alors ministre de l'agriculture. Or la profession n'a constaté aucune avancée réelle. Aussi, en 2022, la Confédération nationale des producteurs de vins et eaux-de-vie de vin à appellations d'origine contrôlées (Cnaoc) a renouvelé cette demande. Où en sommes-nous ?

Mme Olga Givernet, ministre déléguée chargée de l'énergie .  - Dans mon département, la méthode ancestrale s'applique au Bugey-Cerdon, et j'en suis fière !

Où en sommes-nous ? Après un rapprochement en 2023 entre les syndicats des appellations concernés et l'administration centrale, un groupe de travail réunissant la DGCCRF, la direction générale de la performance économique et environnementale des entreprises (DGPE) et l'Institut national de l'origine et de la qualité (Inao) a été créé pour vérifier que la demande remplit toutes les exigences européennes. Avant l'été, les professionnels ont apporté les précisions demandées, ce qui permet l'instruction la demande. Vous pouvez compter sur l'implication d'Annie Genevard, qui vous informera de l'avancée du dossier.

M. Bernard Buis.  - Alors que la mention « méthode ancestrale » est utilisée de façon abusive, nos viticulteurs sont inquiets ; nous suivrons le dossier !

Filière bois

Mme Laurence Muller-Bronn, en remplacement de M. André Reichardt, auteur de la question .  - La responsabilité élargie des producteurs sur les produits et matériaux de construction pour le secteur du bâtiment (REP PMCB), issue de la loi Agec du 10 février 2020, oblige les producteurs de matériaux générant des déchets à en assurer la fin de vie via une écocontribution.

Si l'objectif est louable, cela pénalise la filière bois, plus fortement taxé que d'autres matériaux moins recyclables.

De plus, pourquoi assujettir les producteurs scieurs et transformateurs alors que l'Ademe plaide pour que le contributeur de cette taxe soit le dernier acteur industriel ayant transformé ou assemblé les produits et matériaux avant-vente ?

Au titre de l'année 2023, les scieurs doivent payer 2 % de leur chiffre d'affaires, alors que la conjoncture est difficile.

Cette contribution accentue la distorsion de concurrence avec les produits importés et freine l'essor des matériaux biosourcés dans le secteur de la construction.

Madame la ministre, soutiendrez-vous la filière bois ? Modifierez-vous cette réglementation incohérente ?

Mme Olga Givernet, ministre déléguée chargée de l'énergie .  - La REP PMCB, en vigueur depuis le 1er janvier 2023, permet d'éviter les dépôts sauvages, d'améliorer la circularité des produits, le réemploi des matériaux et le recyclage des déchets.

Le Gouvernement soutient les professionnels du bois, tant en amont qu'en aval. De plus, des arrêtés contraignent les éco-organismes à différencier le bois frais des bois secs et rabotés, pour éviter la distorsion de concurrence avec les produits importés.

Des primes sont aussi prévues pour les produits issus de ressources renouvelables, afin d'améliorer la performance de la filière.

Avenir de la Camargue

M. Laurent Burgoa .  - Territoire d'exception, la Camargue est menacée par la hausse du niveau de la mer et une salinité des sols en constante augmentation.

Connue pour ses flamants roses, elle abrite, plus largement, une biodiversité unique. De nombreuses espèces animales et végétales risquent ainsi de disparaître, mais aussi des pans entiers de notre patrimoine historique et économique. L'élevage de taureaux et de chevaux, la production de sel et la riziculture sont autant d'activités ancestrales en péril.

Au coeur de cet écosystème fragile, les marais salants risquent de s'assécher, alors que les ouvrages de production ne demandent qu'à être entretenus et renforcés. Il est impensable que cet environnement exceptionnel soit l'objet d'une politique de repli et de renoncement face aux enjeux du changement climatique.

La Camargue est le fruit de l'action humaine ; elle est vivante et doit être préservée. Envisagez-vous de renforcer les ouvrages de protection pour garantir la survie des espèces et la pérennité d'activités économiques et culturelles qui prospèrent depuis des générations ?

Mme Olga Givernet, ministre déléguée chargée de l'énergie .  - Face à la montée du niveau de la mer, l'adaptation des territoires littoraux est un enjeu majeur.

En avril dernier, le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema) a évalué les biens concernés par le recul du trait de côte à court, moyen et long termes.

En Camargue, des aménagements historiques ont permis de fixer le trait de côte au XXe siècle, mais la moitié seulement des enrochements ont démontré leur efficacité. Certains ouvrages de protection ont accentué latéralement l'érosion côtière.

La stratégie nationale de gestion intégrée du trait de côte, en cours de révision, préconise l'abandon des logiques de lutte contre la mer au profit d'une gestion respectueuse de la biodiversité et des phénomènes hydro-sédimentaires. Le syndicat mixte interrégional d'aménagement des digues du delta du Rhône élabore une stratégie face aux aléas d'érosion et de submersion. Un programme d'action sera décliné dans le prochain plan littoral.

C'est dans ce cadre que doivent être étudiées les différentes options d'adaptation. Les collectivités territoriales sont prêtes à faire évoluer leur politique d'aménagement, comme au Grau-du-Roi.

Dans le Gard, les services de l'État travaillent sur le sel à la suite d'une alerte émise par les viticulteurs en 2021. Le parc naturel régional et l'État ont lancé une démarche participative en vue d'une feuille de route visant à faire face aux défis du sel et du changement climatique. Le 9 avril dernier, un séminaire sur le sujet a débouché sur une trentaine d'actions concrètes, dont la mise en oeuvre a débuté.

M. Laurent Burgoa.  - Il faut agir en partenariat avec les élus locaux, dont le rôle est indispensable. Par ailleurs, dans un département producteur d'huile d'olive, il serait bon que le Gouvernement mette un peu d'huile dans les rouages : je pense au Conservatoire national du littoral, dont certains membres n'ont pas l'attitude la plus facilitatrice...

Artificialisations bénéficiant à plusieurs collectivités

Mme Sylvie Valente Le Hir .  - Ma question porte sur l'imputation au titre du Zéro artificialisation nette, le ZAN, des projets régionaux, interrégionaux et nationaux.

L'équation du ZAN doit tenir compte des aménagements qui bénéficient aussi à d'autres collectivités que celles qui les accueillent. Je pense à la communauté de communes du Vexin Thelle, qui accueille un site d'enfouissement de déchets provenant majoritairement d'Île-de-France. En pareil cas, il n'est pas juste que la collectivité d'implantation soit seule comptable de l'artificialisation. De même, une communauté de communes accueillant un parc d'activités dont le rayonnement dépasse son territoire doit pouvoir partager l'effort foncier avec les collectivités voisines.

Sans mutualisation, les projets de cette nature obéreraient de manière injuste les marges de consommation foncière des collectivités d'accueil, qui ne pourraient plus aménager leur territoire en fonction de leurs propres besoins. La législation et la réglementation doivent tenir compte de ces artificialisations externes, sans quoi de forts déséquilibres se feront jour, au détriment des territoires ruraux.

Élargirez-vous la possibilité de retrancher des enveloppes communales et intercommunales les zones artificialisées dans l'intérêt de plusieurs collectivités pour les imputer sur des enveloppes régionales, voire nationales ? C'est une condition sine qua non de l'équité du ZAN.

Mme Olga Givernet, ministre déléguée chargée de l'énergie .  - En 2021, la loi Climat et résilience a fixé l'objectif de zéro artificialisation nette en 2050. D'ici à 2031, la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers (Enaf) sera réduite de moitié par rapport à la décennie précédente.

En 2023, les possibilités de mutualisation à différentes échelles ont été précisées. Les projets d'envergure nationale, dont la liste est fixée par arrêté, sont essentiellement industriels ou de recherche. Les projets d'envergure régionale peuvent être mutualisés à cette échelle ; ils sont identifiés dans les schémas régionaux d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires. Les projets d'intérêt intercommunal peuvent être mutualisés dans le cadre des schémas de cohérence territoriale.

Ces trois possibilités accompagnent les collectivités dans leur trajectoire de sobriété foncière. Chaque projet doit être pris en compte à son échelle territoriale. Nous avons besoin d'un outil de planification qui soit au service des élus et facilite le développement commun. Les services déconcentrés sont à la disposition des élus pour les accompagner et les conférences régionales de gouvernance de la politique de réduction de l'artificialisation sont des espaces de discussion au plus près des territoires.

Le Premier ministre a indiqué que des adaptations propres à améliorer la mutualisation étaient à l'étude. Je vous invite à faire part de vos propositions.

Redéfinition des territoires concernés par les Bonnes conditions agricoles et environnementales 2

M. Michaël Weber .  - Le dispositif des Bonnes conditions agricoles et environnementales (BCAE) a été renouvelé en application de la politique agricole commune. Les États membres peuvent librement définir les conditions de ces BCAE 2.

L'objectif étant de mieux protéger les zones humides et les tourbières, il est étonnant que le périmètre défini se limite aux territoires labellisés Ramsar. Le Gouvernement semble n'avoir tenu aucun compte des priorités du plan national « milieux humides ». Cette approche minimaliste risque, en outre, de porter un préjudice durable au label Ramsar.

Dans un courrier du mois dernier aux présidents de parc naturel régional, Marc Fesneau assurait : « il n'est pas envisagé que le référentiel Ramsar constitue la seule base de zonage BCAE 2 ». Limiter le territoire de ce dispositif au périmètre du label Ramsar et à quelques zones issues de l'inventaire du réseau partenarial de données sur les zones humides est tout à fait insuffisant.

Pourquoi chercher à abîmer le système Ramsar, dont l'efficacité n'est plus à prouver, en refusant un zonage étendu des BCAE 2 ? Il est urgent de mieux protéger les zones humides et de faciliter le dialogue entre l'administration et les particuliers. Le choix actuel n'est ni responsable en matière environnementale ni adapté du point de vue du dialogue attendu par les agriculteurs.

Mme Olga Givernet, ministre déléguée chargée de l'énergie .  - Les zones humides accueillent 30 % des espèces rares ou menacées. On estime qu'elles permettent à la société d'économiser chaque année 2 000 euros par hectare sur le traitement de l'eau potable. Or, entre 1960 et 1990, la moitié de ces espaces à fort enjeu écologique ont disparu.

La programmation 2023-2027 de la PAC prévoit la mise en place au 1er janvier 2025 d'un zonage spécifique pour les milieux humides. Les règles de travail du sol y seront adaptées. C'est le sens des BCAE 2, destinées à mieux protéger zones humides et tourbières, notamment en interdisant les nouveaux remblais et les réseaux de drainage.

Faute de cartographie disponible, il a été décidé, dans un premier temps, d'utiliser le zonage Ramsar, augmenté des tourbières. Le zonage actuel n'est pas satisfaisant et a vocation à évoluer rapidement, dès que nous aurons une connaissance plus complète des zones humides. L'objectif est d'aboutir progressivement, d'ici à 2027, à un inventaire fiable, réalisé avec les acteurs de terrain. Je vous invite à vous associer à cette réflexion.

Maintien de la présence postale dans les territoires ruraux

Mme Marie Mercier .  - Vous souvenez-vous, monsieur le ministre, de cette belle publicité montrant une camionnette jaune, seule présence humaine dans un magnifique paysage de campagne - qui pouvait être de Saône-et-Loire ? Elle était accompagnée de cette formule : « La Poste crée des liens entre nous. »

Quid de la baisse éventuelle de 50 millions d'euros du budget, de 177 millions d'euros, consacré à la présence postale ? La Poste a pris l'engagement de maintenir un point postal à moins de 5 km ou 20 minutes de voiture pour 90 % de la population en zone rurale ou prioritaire. Il est nécessaire pour le confort de vie de nos administrés.

Cette baisse affecterait le fonctionnement des agences postales, des points postaux et des espaces France Services. Les maires, conscients des difficultés budgétaires, pourraient assumer cette dépense en plus, mais s'inquiètent de l'aggravation des inégalités territoriales et de la disparition des services publics dans nos territoires ruraux.

Vous engagez-vous pour la proximité postale ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre de la fonction publique, de la simplification et de la transformation de l'action publique .  - Habitant un village rural d'Eure-et-Loir, Saint-Martin-de-Nigelles, je suis très attaché au maintien des services publics de proximité. Le Gouvernement ne souhaite en aucun cas les réduire.

La Poste fait face au défi de la transformation de son modèle économique, depuis plusieurs années. Mais le projet de loi de finances pour 2025 ne change rien au montant versé par l'État à La Poste pour la distribution. L'État poursuit ainsi son engagement, à hauteur de 910 millions d'euros, pour la mission de service public de La Poste.

Les débats budgétaires en cours seront l'occasion d'évoquer cette question avec l'ensemble des parlementaires. Je le redis, nous accordons une attention particulière à la présence du service public de proximité dans nos territoires. Je salue à cet égard le succès des maisons France Services, lancées en 2019. Nous en comptons désormais 2 753, dont plus de 400 installées dans un bureau postal. Ce dispositif de proximité répond à une attente forte et fonctionne : 96 % de taux de satisfaction, ce qui est exceptionnel pour un service public.

Vous pouvez compter sur mon action et sur celle de tout le Gouvernement pour préserver nos services publics, même dans le contexte budgétaire actuel.

Mme Marie Mercier.  - Je ne doutais pas de votre volonté. Oui, les maisons France Services fonctionnent très bien, dans la mesure où elles pallient des fermetures antérieures. Notre Premier ministre a eu raison de prononcer ces mots : « Nos villes moyennes, nos sous-préfectures, nos villages, tous font la République et méritent que des services publics y demeurent ou y reviennent. » Nous sommes tous là pour y veiller.

Difficultés de traitement des demandes d'indemnisation de Harkis

M. Christophe Chaillou .  - Le traitement des demandes d'indemnisation forfaitaire déposées au titre de la loi du 23 février 2022 portant reconnaissance de la Nation envers les Harkis se heurte à certaines difficultés.

Cette loi prévoit la légitime réparation des préjudices subis par les Harkis du fait de l'indignité de leurs conditions d'accueil et de vie dans certaines structures sur le sol français. Les Harkis et les rapatriés d'Algérie anciennement de statut civil de droit local, ainsi que leur famille, peuvent constituer un dossier auprès de l'Office national des combattants et victimes de guerre (ONaCVG) pour obtenir une indemnité réparatrice.

En août dernier, 20 000 dossiers avaient été traités, selon la commission nationale indépendante Harkis. Mais de nombreux autres restent en attente, parfois depuis plus de deux ans. Un sentiment d'abandon en résulte pour les personnes concernées.

Combien de demandes sont-elles en attente et le Gouvernement prévoit-il d'allouer des moyens supplémentaires à l'ONaCVG pour accélérer leur traitement ? C'est notre responsabilité collective vis-à-vis des Harkis qui est en jeu.

M. Jean-Louis Thiériot, ministre délégué auprès du ministre des armées et des anciens combattants .  - Rendons hommage aux Harkis, dont le traitement n'a pas été une page de gloire dans notre histoire.

Nous avons reçu un peu plus de 35 000 demandes au titre de la loi de réparation de 2022. Quelque 20 000 ont été traitées, dont 16 000 ont reçu une réponse favorable, pour une indemnisation moyenne de 8 093 euros. Restent environ 15 000 dossiers en cours de traitement, dont 9 000 liés aux 45 nouveaux sites ouverts à l'indemnisation.

L'ONaCVG a quasiment doublé le nombre d'équivalents temps plein (ETP) consacrés à cette mission. La structure nationale a renforcé son soutien aux structures locales.

Une difficulté nouvelle s'annonce, liée à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme dite Tamazount, qui nous oblige à rouvrir certains dossiers. C'est une priorité de mon ministère, et nous veillerons à ce que tous ceux qui ont choisi de porter les armes de la France soient convenablement traités.

M. Christophe Chaillou.  - Je vous remercie pour ces précisions. Nous serons vigilants sur les moyens nécessaires, compte tenu notamment de la jurisprudence dont vous avez parlé, car il y va de notre responsabilité collective.

La séance est suspendue à 12 h 40.

Présidence de M. Gérard Larcher

La séance reprend à 14 h 30.