Programmation et simplification dans le secteur économique de l'énergie (Suite)
Mme la présidente. - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la proposition de loi portant programmation nationale et simplification normative dans le secteur économique de l'énergie.
Article 12
Mme la présidente. - Amendement n°184 de MM. Cadec et Chauvet au nom de la commission des affaires économiques.
M. Alain Cadec, rapporteur de la commission des affaires économiques. - Décalons le délai d'adoption de la loi quinquennale sur l'énergie d'octobre 2024 à janvier 2025.
Mme Olga Givernet, ministre déléguée chargée de l'énergie. - Avis favorable.
L'amendement n°184 est adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°7 de M. Mandelli au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable.
M. Didier Mandelli, rapporteur pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. - Cet amendement apporte des précisions sur les technologies de captage et de stockage de CO2.
M. Alain Cadec, rapporteur. - Avis favorable.
Mme Olga Givernet, ministre déléguée. - Le Gouvernement soutient le développement des technologies de captage et de stockage du carbone, qui sont l'un des leviers de sa stratégie globale. Elles doivent être mobilisées de façon mesurée, pour décarboner les activités pour lesquelles il n'existe pas d'alternative bas-carbone à moyen terme.
L'amendement va dans le bon sens, mais les « situations transitoires » qu'il vise ne sont pas définies dans le temps, ce qui risque de créer un effet de verrouillage technologique. Avis défavorable.
L'amendement n°7 est adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°86 de M. Jadot et alii.
M. Yannick Jadot. - La politique est souvent l'art de la répétition...
Les e-fuels, d'origine non biologique, ont fait l'objet d'un débat au Parlement européen pour leur usage dans l'automobile - débat porté par Porsche et Ferrari... Ils n'ont pas leur place ici et doivent être réservés à l'aviation.
La proposition de loi est un exercice de programmation à dix ans, revu à cinq ans. Les EPR2, dont le design et le coût ne sont pas encore précisément connus, n'entrent pas dans une programmation à horizon 2035 ! Nous devons résoudre le problème de l'équilibre de l'offre et de la demande d'électricité des dix prochaines années, dans un contexte d'électrification des usages : seules les énergies renouvelables le permettront, ni le nucléaire ni les e-fuels.
L'amendement n°170 rectifié n'est pas défendu.
Mme la présidente. - Amendement n°140 rectifié bis de Mme Berthet et alii.
Mme Martine Berthet. - La production de chaleur, qui représente 75 % de la consommation énergétique de l'industrie, mérite d'être intégrée au texte. La chaleur produite par fission nucléaire constitue une solution décarbonée et compétitive susceptible de réduire drastiquement l'empreinte carbone de l'industrie.
Mme la présidente. - Amendement n°49 de M. Michau et du groupe SER.
M. Jean-Jacques Michau. - Dans le même esprit que l'amendement n°47 que j'ai défendu hier soir, il s'agit de conditionner le développement des petits réacteurs nucléaires à l'élaboration d'une doctrine d'emploi.
M. Alain Cadec, rapporteur. - L'amendement n°49 adresserait un signal négatif sur les petits réacteurs modulaires. Il est en outre satisfait, puisque l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) est chargée du contrôle de l'ensemble des réacteurs.
L'amendement n°86 supprimerait toute référence à la construction de réacteurs électronucléaires et de petits réacteurs modulaires, alors qu'il s'agit d'un apport du Sénat à la loi Nouveau nucléaire de 2023. Il supprimerait en outre la référence aux e-fuels qui découle pourtant de nos obligations européennes.
L'amendement n°140 rectifié bis est satisfait par le code de l'énergie qui fixe un objectif de développement des énergies renouvelables pour la chaleur.
Retrait, sinon avis défavorable sur ces trois amendements.
Mme Olga Givernet, ministre déléguée. - Monsieur Jadot, une relance inédite du nucléaire est nécessaire. Elle impose d'aller au-delà de 2035 et de développer parallèlement les énergies renouvelables. Conservons l'équilibre entre nucléaire et renouvelable. Avis défavorable à l'amendement n°86.
Le Gouvernement partage l'objectif de l'amendement n°140 rectifié bis, mais il n'est pas utile d'introduire une telle précision dans la loi. Sagesse.
L'appel à projets France 2030 vise à faire émerger des technologies au potentiel inconnu. Cette doctrine est définie dans la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE). Le développement de petits réacteurs modulaires sera strictement encadré. Nul besoin d'une doctrine d'emploi supplémentaire.
L'amendement n°140 rectifié bis est retiré.
L'amendement n°86 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°49.
Mme la présidente. - Amendement n°73 rectifié ter de M. Michel Canévet et alii.
M. Jean-Michel Arnaud. - Nous intégrons une dimension rurale, en mentionnant les communes rurales qui ne disposent pas d'une solution de raccordement à un réseau de chaleur urbain, d'un réseau de gaz naturel ou d'un réseau de distribution public d'électricité.
Mme la présidente. - Amendement identique n°103 rectifié bis de Mme Vanina Paoli-Gagin et alii.
M. Jean-Luc Brault. - Défendu.
Mme la présidente. - Amendement identique n°108 de M. Jean-François Longeot.
M. Jean-François Longeot. - Il a été brillamment défendu.
M. Alain Cadec, rapporteur. - Nous avons déjà adopté un objectif en faveur des foyers ruraux non raccordés, à l'article 1er bis. Retrait, sinon avis défavorable.
Mme Olga Givernet, ministre déléguée. - La loi de programmation sur l'énergie et le climat (LPEC) fixe des objectifs nationaux. Cet amendement n'a pas de portée opérationnelle et alourdirait inutilement la loi. Avis défavorable.
Les amendements identiques nos73 rectifié ter, 103 rectifié bis et 108 sont retirés.
L'article 12, modifié, est adopté.
Article 13
Mme la présidente. - Amendement n°87 de M. Yannick Jadot et alii.
M. Yannick Jadot. - L'exercice devrait nous conduire, en 2030, au respect de la trajectoire définie au niveau européen.
Or nous voyons la politique française qui s'annonce : coups de rabot, sabordage des mesures d'économie d'énergie, remise en cause de l'objectif français sur le renouvelable, fixé à 33 % alors qu'Emmanuel Macron s'était engagé sur 44 % !
En investissant dans le nucléaire, qui ne sera pas disponible tout de suite - quoi qu'on pense par ailleurs -, votre seule solution, c'est de revenir sur nos engagements européens. Ces SMR, dont on ne sait pas s'ils seront implantés dans nos jardins ou sur des sites dangereux, n'ont rien à faire ici !
M. Alain Cadec, rapporteur. - Vous semblez adepte du « mieux vaut se répéter que se contredire » ...
M. Yannick Jadot. - Ça s'appelle la cohérence !
M. Alain Cadec, rapporteur. - Votre proposition supprimerait des informations utiles aux parlementaires et aux citoyens. Elle n'atteindrait pas ses objectifs puisque l'énergie nucléaire figure déjà dans le volet I de la PPE sur la sécurité d'approvisionnement. Et l'intégration en droit national des carburants de synthèse et des dispositifs de stockage et de captage du carbone sont des obligations européennes.
Retrait, sinon avis défavorable.
Mme Olga Givernet, ministre déléguée. - Le rapport de Réseau de Transport d'Électricité (RTE) sur les futurs énergétiques à 2050 a montré la nécessité de relancer le nucléaire tout en accélérant le déploiement des énergies renouvelables. Compte tenu de la PPE, les dispositions de l'article paraissent superflues. Sagesse.
M. Fabien Gay. - Les interventions du GEST interrogent. C'est le rôle du Parlement.
La PPE garantit la sécurité des approvisionnements et couvre deux périodes successives de cinq ans. Comme les SMR ne seront pas opérationnels avant quinze ou vingt ans, il faudrait arrêter la recherche, dites-vous. Ce n'est pas mon point de vue. Mais dans l'attente, poussons le curseur beaucoup plus loin sur les énergies renouvelables, avec les gaziers et les électriciens sous statut.
Si l'on suit votre raisonnement, on ne ferait plus de recherche et on ne se projetterait jamais à vingt, vingt-cinq ou cinquante ans ! Or la politique énergétique se mène sur le très long terme.
Marcel Paul n'a pas créé EDF-GDF pour quelques années. Parti peu après, il n'en a tiré aucun avantage politique. Agissons dans cet esprit.
M. Daniel Salmon. - Je suis d'accord avec Fabien Gay : n'arrêtons pas la recherche, mais soyons lucides. Les EPR seront opérationnels au plus tôt en 2037, plus vraisemblablement vers 2045.
On nous vantait les mérites du Nuward, soi-disant presque prêt. En juillet, patatras ! EDF a revu son plan de financement et Nuward a été repoussé. De même, nous ne savons pas où en est la start-up Jimmy, censée produire de la chaleur à Bazancourt.
Alors que certains élus locaux s'opposent aux éoliennes, je doute que la perspective de SMR disséminés dans le territoire leur plaise !
M. Yannick Jadot. - Madame la ministre, RTE propose aussi d'autres scénarios : un scénario de sobriété, notamment, avec une réduction forte de la part du nucléaire et des investissements massifs dans le renouvelable, que nous défendons. C'est aussi un scénario de RTE, mais pas le même que vous !
M. Daniel Gremillet. - Je remercie le rapporteur de son avis défavorable, mais je m'étonne de l'avis de sagesse de la ministre.
Nos collègues du GEST tentent de piéger la France. (On s'en défend sur les travées du GEST.) Le texte est clair. On sait tous que le nucléaire s'inscrit dans le temps long, que l'on a besoin de recherche et d'innovation pour les SMR.
Notre dépendance dans le renouvelable, notamment pour le photovoltaïque et l'éolien, ne vous pose pas problème ? Moi, oui !
Nous savons que le renouvelable est la seule solution pour les dix prochaines années, mais une loi de programmation doit afficher une vision. Faute de quoi, la France sera fragile à moyen et long terme. Cette proposition de loi a le courage de porter cette vision.
M. Thomas Dossus. - En 2022, quand la moitié des réacteurs étaient en panne, nous avons réalisé que notre mix énergétique était trop nucléarisé et que le piège, c'était le nucléaire ! Aucun des scénarios de RTE ne propose un mix avec plus de 50 % de nucléaire. Nous avons besoin d'augmenter la part de renouvelable.
La ministre n'a pas répondu sur les engagements européens que piétine cette proposition de loi.
Il y a quatre ans, nous avions adopté une loi de programmation qui augmentait les crédits de la recherche. Dans le projet de budget pour 2025, il en manque les deux tiers. Où est la cohérence ?
M. Franck Montaugé. - Pour être au rendez-vous de nos objectifs ambitieux de décarbonation, il ne faut rien exclure, ni le nucléaire ni le renouvelable.
Nous avons besoin d'une véritable LPEC. La Stratégie française sur l'énergie et le climat (Sfec) existe, elle est ambitieuse. La proposition de loi dont nous débattons n'est pas à la hauteur.
Nous ne voterons pas cet amendement de suppression, car l'article 13 est utile. (M. Daniel Gremillet s'en montre satisfait.)
M. Michel Canévet. - Je me méfie de ce que certains entendent par « sobriété ». (Marques d'étonnement sur les travées du GEST) Nous étions un grand pays agricole et alimentaire, exportateur ; notre souveraineté est désormais menacée. Attention quand on appelle à la « sobriété ».
L'amendement n°87 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°88 de M. Jadot et alii.
M. Yannick Jadot. - Il faut informer les citoyens, les acteurs économiques et les collectivités territoriales. Or cette proposition de loi n'est assortie d'aucune étude d'impact pour en évaluer les effets et les coûts. Un EPR2 coûte au moins 13 milliards d'euros ; Flamanville, 19 milliards d'euros. Les énergies renouvelables sont deux à trois fois moins chères que le nucléaire.
M. Stéphane Piednoir. - C'est 25 milliards d'euros !
M. Yannick Jadot. - Ce sont les énergies renouvelables qui ont payé le bouclier tarifaire ! Soyons sérieux !
Informons les citoyens : 1 euro investi dans le renouvelable a un impact cinq à six fois plus efficace sur le carbone que 1 euro investi dans le nucléaire. Dépendre de l'uranium du Kazakhstan, de l'Ouzbékistan ou de la Russie n'est pas un gage de souveraineté.
M. Stéphane Piednoir. - La Chine c'est mieux ? Et les éoliennes ?
M. Yannick Jadot. - Mettre notre dépendance alimentaire sur le dos des écologistes, ce n'est pas sérieux. J'espère que vous serez là pour voter contre l'accord avec le Mercosur, qui sacrifie nos agriculteurs !
M. Alain Cadec, rapporteur. - L'information sur les coûts globaux du nucléaire ne relève pas de la PPE, mais plutôt de rapports d'information distincts. En outre, votre demande est satisfaite par l'adoption de l'amendement n°34 à l'article 1er, bien plus exigeant.
Retrait, sinon avis défavorable.
Mme Olga Givernet, ministre déléguée. - Vous demandez un niveau de détail déraisonnable. Nombre d'informations sont déjà publiques, dans les rapports d'EDF ou de la Cour des comptes. Avis défavorable.
M. Yannick Jadot. - Reconnaissez que la commission d'enquête sénatoriale, présidée par M. Montaugé, a contraint EDF à corriger son estimation des coûts, passée de 51 à 67 milliards !
Sur le renouvelable, on connaît l'histoire : nous avions une industrie photovoltaïque, mais le moratoire du gouvernement Fillon l'a sabordée. Puis, sous Hollande, un deuxième coup a été porté.
Quant à la lutte contre le dumping chinois, souvenez-vous, Cadec, nous étions alors au Parlement européen.
M. Stéphane Piednoir. - Camarade Cadec ! (Sourires)
M. Yannick Jadot. - La France, comme tous les pays européens, a cédé et accepté que toute notre industrie photovoltaïque disparaisse.
Oui, il faut investir sur le nucléaire, mais aussi sur nos filières industrielles d'énergies renouvelables car nos territoires ont besoin d'usines et d'emplois.
M. Daniel Salmon. - Monsieur Gremillet, comment financer les efforts d'efficacité énergétique, le développement des énergies renouvelables et la relance du nucléaire ?
De même que l'ancienne majorité, qui était et de droite et de gauche, a fini par pencher d'un côté ; de même, en matière énergétique, on voit bien que vous procrastinez sur le renouvelable et la sobriété.
Il n'est pas question de piéger quiconque, mais d'avoir une vision claire à vingt ans.
La filière des EPR2 et des SMR est loin d'être mûre. Dette d'EDF, grand carénage, Cigéo : tout compris, on atteint les 200 milliards d'euros !
M. Fabien Gay. - Le débat sur la souveraineté et l'indépendance est intéressant. Pour le renouvelable, nous dépendons de la Chine ; pour le nucléaire, du Kazakhstan, du Canada et d'autres.
Pour être souverains, il faut des capacités de production qui répondent à nos besoins industriels et humains. Nous avons besoin de renouvelable et de nucléaire. Avec un scénario 100 % renouvelable, plus rien ne serait pilotable. Oui, il faut fermer les centrales à charbon, mais sans nucléaire, demain, que pourrons-nous piloter ?
Nous devons sortir de la logique binaire, car dans trente ans, nous aurons besoin des deux sources d'énergie.
L'amendement n°88 n'est pas adopté.
L'article 13 est adopté.
Après l'article 13
Mme la présidente. - Amendement n°51 rectifié de M. Montaugé et du groupe SER.
M. Franck Montaugé. - Nous voulons mettre la PPE en cohérence avec les objectifs de planification énoncés dans la feuille de route de la Sfec. Selon le code de l'énergie, la PPE doit faire l'objet d'une synthèse pédagogique. Nous proposons qu'il en soit de même pour la Sfec. Faisons oeuvre de pédagogie, afin d'embarquer nos concitoyens.
M. Alain Cadec, rapporteur. - Je termine en beauté : avis favorable ! (Marques de satisfaction sur les travées du groupe SER)
Votre amendement donnerait une base légale à la Sfec et le Gouvernement devra exposer sa stratégie tous les cinq ans.
Mme Olga Givernet, ministre déléguée. - La PPE est de niveau législatif, alors que la Sfec traduit la volonté du Gouvernement de mettre en cohérence les différents outils de programmation. Elle ne porte rien d'autre que les ambitions de la PPE, de la Stratégie nationale bas-carbone (SNBC) et du Plan national d'adaptation au changement climatique (PNACC). Cet amendement est donc satisfait : retrait ?
L'amendement n°51 rectifié est adopté et devient un article additionnel.
M. Fabien Gay. - Rappel au règlement ! Nous avons interpellé le Gouvernement sur la centrale de Cordemais. Hier soir, la ministre a annoncé que les syndicats seraient reçus le 21 octobre. En réalité, il s'agit d'une visioconférence avec son cabinet, alors qu'ils attendaient un rendez-vous avec la ministre, ou un déplacement sur place.
La situation s'enlise : le directeur du site a démissionné et désormais, ce sont les salariés qui pilotent l'entreprise. Gare à la colère sociale !
Madame la ministre, vous n'êtes pas responsable à titre personnel, mais vous vous inscrivez dans la continuité de sept ans de macronisme.
Mon rappel au règlement a pour but de clarifier nos débats : vous aviez dit « ma porte est ouverte », la réalité est un peu différente !
Acte en est donné.
Article 14
Mme la présidente. - Amendement n°35 de M. Michau et du groupe SER.
M. Jean-Jacques Michau. - Nous souhaitons la suppression de cet article, car les mesures d'accélération et de simplification doivent être limitées dans le temps. Il n'y a pas lieu de les prolonger jusqu'en 2050.
Nous ne souhaitions pas non plus revenir sur la récente loi Nouveau nucléaire en élargissant les possibilités d'installation des SMR. L'acceptabilité du nucléaire repose sur la transparence et la concertation, mais aussi sur une évaluation démocratique et pluraliste des besoins.
Mme la présidente. - Amendement identique n°89 de M. Jadot et alii.
M. Yannick Jadot. - Chers collègues, vous faites plus fort que sur l'immigration : une loi tous les six mois ! Des dérogations ont déjà été accordées dans le cadre de la loi Nouveau nucléaire. Arrêtons de faire de la cavalerie sans étude d'impact et au mépris de la protection de l'environnement.
M. Patrick Chauvet, rapporteur de la commission des affaires économiques. - Il serait inopportun de supprimer l'article 14 qui a fait l'objet d'un retour d'expérience dans le cadre de notre bilan de l'application des lois. Les ajustements ont été proposés par les acteurs de terrain. J'ajoute que l'article de la loi Nouveau nucléaire qu'il modifie avait fait l'objet d'une étude d'impact et d'un avis du Conseil d'État.
D'autre part, l'article 14 ne pose aucune difficulté sur le plan de la sécurité et de la sûreté nucléaires. Ses dispositions nécessiteront un décret d'application.
La proposition de loi de Daniel Gremillet est un texte dual, de programmation, mais aussi de simplification.
Retrait, sinon avis défavorable.
Mme Olga Givernet, ministre déléguée. - Sortir de l'emprise des sites nucléaires existants ne correspond pas à l'équilibre trouvé en 2023. J'ajoute que la procédure de droit commun pour les SMR peut parfois être plus favorable que la procédure accélérée.
Un travail de fond, engagé avec les porteurs de projets de SMR pour identifier les évolutions réglementaires ou législatives nécessaires, débouchera dans quelques mois. Prudence d'ici là.
La prolongation jusqu'en 2050 des mesures de simplification et l'extension à cinquante ans de la durée maximale des concessions d'utilisation du domaine public maritime ne sont pas nécessaires au développement de nouvelles installations. Sagesse.
M. Yannick Jadot. - Je n'ai pas compris la réponse du rapporteur : il y aurait déjà des études d'impact et des retours de terrain pour des projets de SMR qui n'existent pas encore, et pour une loi à peine adoptée ?
Les amendements identiques nos35 et 89 ne sont pas adoptés.
Mme la présidente. - Amendement n°135 de M. Gay et du groupe CRCE-K.
M. Fabien Gay. - Un équilibre a été trouvé à la suite de la loi Nouveau nucléaire.
Monsieur le rapporteur, j'ai lu moi aussi le rapport de l'Opecst paru en décembre dernier, mais je ne partage pas votre analyse. Ce dernier nous invitait à adapter, de façon prudente, le cadre juridique du déploiement de l'énergie nucléaire pour mieux prendre en compte les besoins des technologies innovantes, par exemple en définissant un cadre spécifique pour des dispositifs expérimentaux implantés sur les sites de recherche nucléaires actuels, dans le strict respect des règles de protection de la population et de l'environnement.
Votre proposition est bien différente ! Nous souhaitons en rester au dispositif adopté il y a moins d'un an. Tant que certaines questions ne sont pas réglées, nous ne préférons pas élargir les implantations actuelles sans information complémentaire. Madame la ministre, je vous invite à retirer votre amendement au profit du nôtre ! (Sourires)
Mme la présidente. - Amendement identique n°154 du Gouvernement.
Mme Olga Givernet, ministre déléguée. - Nous sommes d'accord, monsieur Gay : sortir de l'emprise des sites nucléaires existants ne correspond pas à l'équilibre politique de la loi Nouveau nucléaire. Cela dit, je vous propose de retirer votre amendement au profit de celui-ci. (Sourires)
Mme la présidente. - Amendement n°50 de M. Michau et du groupe SER.
M. Jean-Jacques Michau. - Nous nous opposons à la mesure de simplification visant à faciliter l'installation des SMR. Nous ne voulons pas modifier la loi adoptée en juin dernier. La répartition des SMR doit être conditionnée à la définition d'une doctrine d'emploi.
M. Patrick Chauvet, rapporteur. - Aucune de ces dispositions n'est souhaitable, je m'en suis déjà expliqué : l'alinéa 4 de l'article 14 a fait l'objet d'une étude d'impact, il n'est pas d'application directe et il répond aux besoins des acteurs économiques. Par ailleurs, la condition de doctrine est déjà satisfaite. Retrait, sinon avis défavorable.
Au-delà de ces amendements, je ressens un blocage sur les SMR, qui présentent pourtant de l'intérêt pour certains territoires oubliés.
Mme Olga Givernet, ministre déléguée. - Monsieur Michau, vous mettez la doctrine d'emploi à toutes les sauces. Le Gouvernement maintient son avis défavorable.
Les amendements identiques nos135 et 154 ne sont pas adoptés, non plus que l'amendement n°50.
Mme la présidente. - Amendement n°159 rectifié bis de Mme Berthet et alii.
Mme Martine Berthet. - Les petits réacteurs modulaires fourniront électricité ou chaleur, mais tous participeront à la décarbonation de l'industrie.
Mon amendement reprend la définition des SMR qui fait consensus au niveau international, et qui correspond en outre aux dispositions de notre législation fiscale. Enfin, la puissance thermique d'un réacteur est toujours connue - ce n'est pas le cas de la puissance électrique d'un réacteur calogène.
M. Patrick Chauvet, rapporteur. - Les critères techniques des petits réacteurs modulaires peuvent être définis par voie réglementaire. En outre, il n'y a pas lieu d'introduire de différence de traitement entre les réacteurs de troisième génération et les petits réacteurs modulaires.
Retrait, sinon avis défavorable.
Mme Olga Givernet, ministre déléguée. - Les petits réacteurs modulaires désignent des technologies en cours de maturation. Celles-ci se distinguent par leur puissance différente, mais aussi par les usages visés. Attendons que ces technologies soient mieux définies avant de leur donner une définition légale. Retrait, sinon avis défavorable.
L'amendement n°159 rectifié bis est retiré.
Mme la présidente. - Amendement n°90 de Mme de Marco et alii.
Mme Monique de Marco. - Cet amendement, déjà déposé lors de l'examen du projet de loi Nouveau nucléaire, avait reçu un avis favorable du rapporteur Daniel Gremillet.
Il tend à prendre en compte le risque d'inondation ou de submersion marine avant d'autoriser l'utilisation du domaine public maritime pour de nouvelles installations nucléaires.
Au cours du siècle, les catastrophes climatiques ne cesseront d'augmenter, inondations et submersions marines se multiplieront, le trait de côte reculera - jusqu'à 479 mètres dans l'estuaire de la Gironde !
Auditionnée en mars 2023, Annie Podeur, présidente de la deuxième chambre de la Cour des comptes, indiquait que les conséquences du changement climatique affectaient déjà les réacteurs du parc actuel. Nous ne pouvons pas déplacer les réacteurs existants, mais nous pouvons garantir la sécurité des futures installations. J'en appelle à votre bon sens !
M. Patrick Chauvet, rapporteur. - L'amendement est déjà satisfait.
En outre, il ne tient pas compte des apports du Sénat lors de la loi sur le nouveau nucléaire.
Enfin, les dispositions afférentes à la sûreté nucléaire figurent dans le code de l'environnement, non dans le code général de la propriété des personnes publiques.
Retrait, sinon avis défavorable.
Mme Olga Givernet, ministre déléguée. - Même avis.
L'amendement n°90 n'est pas adopté.
M. Stéphane Piednoir. - J'ai beaucoup travaillé au sein de l'Opecst avec Mme la ministre sur les SMR. Il s'agit d'un champ en ébullition, sans mauvais jeu de mots.
Nul ne sait quel modèle sera pertinent à l'avenir, c'est le lot de la recherche. Seuls les pays totalitaires décident à l'avance de ce qui fonctionnera ou non dans un projet ! (Exclamations sur les travées du GEST)
Certains projets aboutiront, d'autres non. Aux États-Unis, Google a signé un contrat avec Kairos : des SMR accompagneront ainsi le développement du numérique.
Par ailleurs, l'Agence internationale de l'énergie atomique (AEIA) pronostique un doublement voire un triplement du parc nucléaire mondial d'ici à 2050. Arrêtons de nous regarder le nombril !
M. Yannick Jadot. - Arrêter de se regarder le nombril, excellente idée ! Autour de la France, en Allemagne, en Espagne, en Grande-Bretagne...
M. Stéphane Piednoir. - On construit un EPR2 !
M. Yannick Jadot. - Nous verrons combien coûte le fiasco d'Hinkley Point ! Les contribuables français paieront la facture - cela ne vous gêne-t-il pas ?
Tous les pays que j'ai cités investissent massivement dans l'éolien et le photovoltaïque, technologies qui fourniront au moins 50 % de leur électricité d'ici à 2030.
Oui, il faut arrêter de se regarder le nombril ! Nous sommes des responsables politiques : l'enjeu n'est pas de savoir si nous avons les moyens de tout financer, y compris le projet de recherche le plus farfelu. Nous devons faire des choix et, vu l'urgence, nous devons choisir de flécher l'investissement public vers les solutions qui fonctionnent !
M. Jean-Jacques Michau. - Je ne suis pas contre les SMR, mais ce sont des technologies non abouties : on ignore qui en sera propriétaire ou maître d'ouvrage. Il faut les encadrer et éviter l'accaparement par le privé. Les chercheurs doivent pouvoir travailler sereinement.
L'article 14 est adopté.
Article 15
Mme la présidente. - Amendement n°91 de M. Yannick Jadot et alii.
M. Yannick Jadot. - Le nucléaire fonctionne tellement bien qu'il a toujours besoin d'un régime dérogatoire. Regardez le projet Iter : de nombreux rapports - dont l'un émane de la Cour des comptes - montrent que celui-ci pose de gros problèmes et que c'est un gouffre financier.
Dérogations à la loi Littoral, recul du trait de côte, élévation du niveau de la mer... Je ne vais pas répéter ce qu'a dit Monique de Marco : est-ce une bonne idée d'installer des réacteurs nucléaires tels qu'Iter sur le littoral ?
M. Patrick Chauvet, rapporteur. - Cet amendement n'est pas souhaitable. L'article 15 n'a peut-être pas fait l'objet d'étude d'impact, mais il a fait l'objet d'un retour d'expérience au sein de notre commission.
De plus, il ne pose aucun problème sur le plan de la sûreté et de la sécurité nucléaires.
Les dérogations ne changent rien au régime fiscal et contentieux spécifique à Iter et n'ont aucune conséquence pour les particuliers. Retrait, sinon avis défavorable.
Cette proposition de loi propose un chemin, une perspective de réindustrialisation. Pardon, mais, avec Iter, le coup est parti, si je puis dire : accompagnons la recherche !
Mme Olga Givernet, ministre déléguée. - Les bâtiments d'Iter sont déjà construits ou autorisés, le décret d'autorisation datant de 2012.
L'installation est très éloignée du littoral - plus de 50 kilomètres -, j'espère que nous n'aurons pas de vague de submersion à cette distance de la mer. (Sourires ; M. Yannick Jadot lève les bras au ciel.)
Nous n'avons pas identifié de difficulté législative pour cette installation très spécifique. Nous restons cependant ouverts au dialogue. Si des adaptations sont nécessaires, il faudrait plutôt modifier le titre V de la loi du 18 avril 2006. Toutefois, sagesse.
M. Yannick Jadot. - Rectificatif : c'est l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et non la Cour des comptes qui nous a alertés sur les problèmes d'Iter.
L'horizon d'Iter, c'est non pas 2040, mais plutôt 2070 ou 2080 ; nous sommes hors-jeu.
L'amendement n°91 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°174 de MM. Alain Cadec et Patrick Chauvet, au nom de la commission des affaires économiques.
M. Patrick Chauvet, rapporteur. - Amendement rédactionnel.
Mme Olga Givernet, ministre déléguée. - Cet amendement vise le réacteur Iter dans chacune des occurrences de souplesse administrative. Cela me semble inutile. Retrait, sinon avis défavorable.
L'amendement n°174 est adopté.
L'article 15, modifié, est adopté.
Après l'article 15
Mme la présidente. - Amendement n°11 rectifié bis de M. Michel Canévet et du groupe UC.
M. Michel Canévet. - Nous avons beaucoup parlé de simplification au travers du projet de loi dédié et lors des dernières élections. Le Premier ministre l'a largement évoquée dans sa déclaration de politique générale.
La simplification doit être au coeur de l'action publique ; ces cinq amendements de notre groupe y pourvoient.
La procédure de grand chantier doit bénéficier des avantages liés à la qualification de projet d'intérêt général ; en témoigne le projet dans la baie de Saint-Brieuc, qui a mis douze ans à se concrétiser ! Tel est le sens de l'amendement n° 11 rectifié bis.
Mme la présidente. - Amendement n°14 rectifié ter de M. Franck Menonville et du groupe UC.
M. Michel Canévet. - Défendu.
M. Patrick Chauvet, rapporteur. - Les lois Nouveau nucléaire, Industrie verte et Énergies renouvelables fixent déjà un cadre facilitateur pour les nouveaux projets d'installation.
Le dispositif de ces amendements est trop large et induirait des effets de bord.
En outre, ce sont des sujets sensibles au niveau local : les compétences relatives à l'urbanisme des communes et de leurs groupements sont en jeu. Avec le dispositif proposé, le préfet aurait la main.
Retrait, sinon avis défavorable.
Mme Olga Givernet, ministre déléguée. - Même avis.
L'amendement n°11 rectifié bis n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°14 rectifié ter.
Mme la présidente. - Amendement n°10 rectifié bis de M. Franck Menonville et du groupe UC.
M. Michel Canévet. - La simplification ne se décrète pas, il faut avancer ! Plutôt que de fustiger les réglementations, adoptons des mesures concrètes. L'amendement n°10 rectifié bis vise à sortir les projets du ZAN, tandis que l'amendement n°12 rectifié bis tend à obtenir des dérogations à la loi Littoral, absurde dans certaines situations - même s'il ne s'agit pas, bien sûr, d'urbaniser le littoral à tout va.
M. Patrick Chauvet, rapporteur. - La dérogation à l'objectif ZAN est satisfaite par le droit existant. Retrait, sinon avis défavorable.
Mme Olga Givernet, ministre déléguée. - Même avis.
L'amendement n°10 rectifié bis est retiré.
Mme la présidente. - Amendement n°12 rectifié bis de M. Michel Canévet et du groupe UC.
M. Michel Canévet. - Défendu.
L'amendement n°12 rectifié bis, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°13 rectifié bis de M. Franck Menonville et alii.
M. Michel Canévet. - Défendu.
M. Patrick Chauvet, rapporteur. - Cet amendement ne semble pas souhaitable.
Je ne reviendrai pas sur les difficultés liées à la création d'un label Grand Chantier ; l'évolution proposée, majeure, nécessite une évaluation. Elle est de plus satisfaite par le droit existant.
Retrait, sinon avis défavorable.
Mme Olga Givernet, ministre déléguée. - Même avis, pour les mêmes raisons.
M. Michel Canévet. - Je ne retire pas cet amendement de bon sens. Certaines de ses dispositions ne sont pas satisfaites par le droit en vigueur.
L'amendement n°13 rectifié bis n'est pas adopté.
Article 16
Mme la présidente. - Amendement n°92 de M. Yannick Jadot et alii.
M. Yannick Jadot. - Le nucléaire, c'est risqué, en cas d'accident ou d'attaque terroriste. J'ai dirigé pendant sept ans les campagnes de Greenpeace en France. Nous avons mené plusieurs actions sur la filière nucléaire.
M. Michel Canévet. - Hélas !
M. Yannick Jadot. - Ce n'est pas aussi simple que cela ! Les hauts fonctionnaires et les responsables d'EDF nous ont toujours remerciés. Toujours pacifiques, ces intrusions ont mis en lumière le danger de cette industrie. (Murmures sur plusieurs travées des groupes UC et Les Républicains) La sécurité de nos installations, à force de routine, a faibli.
Greenpeace participe en réalité de la sécurité de nos installations nucléaires. (Exclamations sur plusieurs travées du groupe Les Républicains)
Une voix à droite. - C'est nouveau, ça !
M. Stéphane Piednoir. - Il fallait oser !
M. Yannick Jadot. - Vous pouvez facilement arrêter un camion transportant du plutonium parce que son conducteur fait une pause à heure fixe dans la même station-service pour déjeuner. Des sanctions existent déjà, nul besoin de les renforcer.
Mme la présidente. - Amendement identique n°136 de M. Gay et du groupe CRCE-K.
Mme Marianne Margaté. - Ce durcissement des peines est disproportionné : il ne repose sur aucune étude. Il renforce en outre la criminalisation des militants pour le climat.
Il faut une réelle politique de prévention et de gestion des risques. Les actions des associations écologiques sont des apports utiles au débat public. Nous sommes opposés au renforcement des sanctions, qui ne peut être la seule réponse à leurs actions.
M. Patrick Chauvet, rapporteur. - Cet article ne stigmatise aucune association - c'est juste une question de sécurité.
Il respecte les principes de l'égalité et de la proportionnalité des peines. Le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 21 juin 2023, a estimé qu'il n'avait pas sa place dans la loi Nouveau nucléaire pour une question de procédure, non de fond.
Le Sénat, l'Assemblée nationale et le Gouvernement étaient parvenus à un accord lors de l'examen de la loi Nouveau nucléaire, preuve que le dispositif est nécessaire et attendu.
Retrait, sinon avis défavorable.
Mme Olga Givernet, ministre déléguée. - L'alourdissement des peines n'améliorera pas la protection des sites nucléaires. Le Conseil constitutionnel a considéré que cette disposition constituait un cavalier législatif, mais il ne l'a pas censurée. Sagesse.
M. Daniel Salmon. - Nous parlons de lanceurs d'alerte, qui mettent en évidence des défauts de sécurité et les failles des installations ; ce sont des actions pacifiques, qui n'ont pas à être punies. (M. Stéphane Piednoir s'exclame.)
M. Fabien Gay. - Nous ne souscrivons pas toujours à tous les modes d'action de ces associations. Cela dit, faut-il punir le monde associatif - et les lanceurs d'alertes - aussi fortement qu'une attaque terroriste ? Restons sérieux ! Notre pays a vécu le terrorisme dans sa chair. Les militantes et les militants des associations environnementales qui participent à des actions pour révéler des failles de sécurité encourent déjà des peines assez lourdes. Pourquoi surenchérir ? Ces peines, nous ne les avons pas votées, mais elles existent et font partie de notre droit.
De telles actions n'ont pas eu lieu depuis des mois, voire des années. Restons-en à l'état du droit actuel.
Les amendements identiques nos92 et 136 ne sont pas adoptés.
L'article 16 est adopté.
Après l'article 16
Mme la présidente. - Amendement n°64 rectifié bis de M. Piednoir et alii.
M. Stéphane Piednoir. - Cet amendement reprend ma proposition de loi de décembre 2023 visant à sécuriser le stock d'uranium appauvri.
L'uranium s'appauvrit après un passage de quatre à cinq ans en combustion. Environ 320 000 tonnes d'uranium appauvri sont entreposées dans des hangars. Les combustibles usés peuvent être retraités et deviennent des mélanges d'oxydes (MOX). Après un nouvel enrichissement, ils peuvent être réutilisés, notamment par les réacteurs à neutrons rapides, comme le réacteur Superphénix. C'était le but du projet Astrid, arrêté en plein vol : limiter la production de nouveaux déchets, ne plus produire de plutonium. C'est une occasion de rédemption pour ceux qui ont tué la filière des réacteurs à neutrons rapides il y a 25 ans. (M. Yannick Jadot s'en amuse.)
M. Patrick Chauvet, rapporteur. - Cet amendement est intéressant. (M. Yannick Jadot ironise.) Le stock d'uranium appauvri pourrait être réutilisé dans la perspective de la construction de réacteurs de quatrième génération. L'autorité administrative doit pouvoir requalifier des matières radioactives en déchets radioactifs. Avis favorable.
Mme Olga Givernet, ministre déléguée. - L'uranium appauvri est déjà utilisé pour produire du MOX ; c'est non pas un déchet, mais une matière radioactive. Le droit applicable offre une latitude suffisante pour préserver le statut de matière pour l'uranium appauvri.
Cette disposition semble satisfaite. Retrait.
M. Yannick Jadot. - Ah, le retour de Superphénix ! C'est la fête du nucléaire au Sénat ! C'est formidable, on résout le problème des déchets !
Soyons sérieux, EDF n'est pas ravie de la filière MOX. La disparition des déchets, grâce à Superphénix ou je ne sais quoi, est une illusion.
Oui, il y a des déchets, souvent stockés dans des conditions dramatiques, dans la Manche, par exemple, ou en Russie - et nous ne sommes pas en mesure de les traiter. Assumons-le.
M. Daniel Salmon. - On n'a pas d'uranium en France, mais on a des stocks considérables d'uranium appauvri. On voudrait les valoriser, mais c'est très compliqué ! Le MOX est un million de fois plus radioactif qu'un combustible classique.
Pour l'enrichir, on envoie l'uranium appauvri en Russie, car c'est très polluant. (M. Stéphane Piednoir proteste.) Soyons clairs : ces 320 000 tonnes sont des déchets. On n'arrivera pas à les réutiliser, il faut donc les stocker. En ne les considérant pas comme des déchets, on prétend les valoriser et faire croire qu'EDF n'est pas endettée. Mais c'est un tour de passe-passe !
M. Bruno Sido. - L'amendement est intéressant.
Les déchets seront enfouis à Bure, donc oui il y a bien des déchets. Classer ces uraniums appauvris en déchets n'est pas un problème. Mais peut-on revenir à la case départ, c'est-à-dire les qualifier comme matière ?
L'amendement n°64 rectifié bis est adopté et devient un article additionnel.
Les articles 17 et 17 bis sont successivement adoptés.
Article 18
Mme la présidente. - Amendement n°155 rectifié du Gouvernement.
Mme Olga Givernet, ministre déléguée. - La loi Nouveau nucléaire a prévu un dispositif de partage territorial de la valeur : les lauréats des procédures de mise en concurrence ou des appels à projets au titre du code de l'énergie financent des projets en lien avec la transition énergétique, l'éolien en mer, notamment.
Il s'agit de transformer l'obligation de financement en possibilité ; le dispositif prévu à l'article 18 ferait doublon avec les dispositions existantes.
M. Patrick Chauvet, rapporteur. - Je suis particulièrement attaché à l'article 18, car il résulte de nos travaux de contrôle. J'ai proposé d'inscrire le partage territorial de la valeur dans la loi Énergies renouvelables. Après l'adoption de la loi, j'ai constaté que le Gouvernement entendait exclure réglementairement les projets d'éolien en mer et que les législateurs avaient omis les projets liés à l'hydrogène renouvelable et bas-carbone.
Cet article a été accueilli avec bienveillance par des acteurs économiques et locaux. Cela dit, je comprends qu'une certaine souplesse est nécessaire ; avis favorable.
L'amendement n°155 rectifié est adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°185 de MM. Cadec et Chauvet au nom de la commission des affaires économiques.
L'amendement rédactionnel n°185 de la commission, approuvé par le Gouvernement, est adopté.
L'article 18, modifié, est adopté.
Après l'article 18
Mme la présidente. - Amendement n°62 rectifié bis de M. Chaize et alii.
M. Didier Mandelli - C'est un amendement de Patrick Chaize, que connaît bien Mme la ministre. Il s'agit de résoudre une difficulté liée à la contribution d'urbanisme acquittée pour le raccordement des projets d'installations renouvelables aux réseaux de distribution d'électricité.
M. Patrick Chauvet, rapporteur. - L'amendement répond à un besoin juridique identifié par le Sénat, le Gouvernement et les acteurs économiques. L'ordonnance du 23 août 2023 n'avait en effet pas pu modifier le code de l'urbanisme.
Avis favorable.
Mme Olga Givernet, ministre déléguée. - Nous partageons l'objectif de M. Chaize. La loi Énergies renouvelables a entraîné un traitement différencié entre les approvisionnements en électricité d'une part et ceux en eau et en gaz d'autre part. Cet amendement favorise la lisibilité du droit pour nos concitoyens et diminue le risque contentieux. Avis favorable.
L'amendement n°62 rectifié bis est adopté et devient un article additionnel.
Article 19
Mme la présidente. - Amendement n°175 de MM. Cadec et Chauvet au nom de la commission des affaires économiques.
M. Patrick Chauvet, rapporteur. - Il s'agit d'un ajustement technique.
Mme Olga Givernet, ministre déléguée. - Sagesse.
L'amendement n°175 est adopté.
L'article 19, modifié, est adopté.
Article 20
Mme la présidente. - Amendement n°16 rectifié bis de M. CABANEL et alii.
M. Henri Cabanel. - Nous souhaitons supprimer l'article 20, qui revient sur les dispositions encadrant l'augmentation de puissance d'une installation hydraulique concédée ainsi que sur la redistribution des revenus indispensables, en raison de ses effets sur l'environnement. Un tel encadrement doit être maintenu.
Mme la présidente. - Amendement identique n°94 de M. Jadot et alii.
M. Yannick Jadot. - La loi sur l'eau définit une hiérarchie des usages de l'eau : la consommation potable, la protection des systèmes et les enjeux écologiques. Cet article revient sur cette hiérarchie, ce que nous refusons.
Mme la présidente. - Amendement identique n°137 de M. Gay et du groupe CRCE-K.
M. Fabien Gay. - Défendu.
M. Patrick Chauvet, rapporteur. - Je ne suis pas favorable à la suppression de l'article. Les dérogations proposées sont issues des travaux menés par le Sénat dans le cadre de l'examen de la loi Énergies renouvelables. En tant que rapporteur, j'avais opté pour l'existence d'une « menace grave », car le dispositif était nouveau. Pourtant, l'existence d'une « menace » est suffisante.
Une évaluation au cas par cas de l'existence d'une menace sur la sécurité d'approvisionnement électrique est possible.
Les dérogations proposées en matière d'installations hydrauliques sont suffisamment encadrées et sont en outre en phase avec les acteurs économiques. Retrait, sinon avis défavorable.
Mme Olga Givernet, ministre déléguée. - Pour protéger l'environnement, le Gouvernement n'envisage de recourir à ces dispositions que lors de menaces graves - et non simples. Sagesse.
Les amendements identiques nos16 rectifié bis, 94 et 137 ne sont pas adoptés.
L'article 20 est adopté.
Article 21
Mme la présidente. - Amendement n°126 rectifié de M. Buis et alii.
Mme Nicole Duranton. - Il s'agit de supprimer l'article, qui place de façon expérimentale les concessions en situation dite de délais glissants d'un régime de concessions vers un régime d'autorisation. Ce n'est pas souhaitable.
Mme la présidente. - Amendement identique n°156 du Gouvernement.
Mme Olga Givernet, ministre déléguée. - Nous souhaitons garder la maîtrise de nos barrages et éviter la mise en concurrence. Comme vous le savez, des contentieux au niveau européen bloquent les investissements d'ampleur.
Je souhaite approfondir les options sur la table, en associant les parlementaires à la mission d'information qui vient d'être lancée.
L'expérimentation introduite par l'article 21 ne fonctionnerait pas, car l'État devrait céder ces ouvrages pour une durée limitée ; ce serait une d'une complexité inédite.
Elle ne résoudrait rien, car aucun investissement significatif ne peut être amorti en trois ans.
M. Patrick Chauvet, rapporteur. - Ces amendements ne sont pas souhaitables. Le Sénat est très attaché à l'expérimentation proposée, qui doit concourir à la résolution du contentieux européen gelant l'activité des concessions hydroélectriques.
C'est un vieux sujet. On avait prétendu que celui-ci allait être réglé avec la réorganisation d'EDF ; or nous n'avons rien vu de tel. Pour un investisseur, l'incertitude n'est pas bienvenue.
L'adoption de l'article 21 doit être l'occasion pour la représentation nationale d'affirmer son soutien clair à une résolution rapide du contentieux.
Nous ouvrirons cette faculté au Gouvernement, charge à lui de s'en saisir.
Il s'agit donc d'un amendement d'appel. Retrait, sinon avis défavorable.
M. Fabien Gay. - Voilà un sujet intéressant ! Cela fait des années qu'EDF et les autres acteurs voient les concessions arriver à échéance. Il n'y a pas cinquante possibilités, mais trois : la mise en concurrence - ce serait évidemment sans nous - , la quasi-régie et le passage de la concession à l'autorisation. À peu près tout le monde souhaite le dernier scénario, à commencer par les syndicats et la direction d'EDF.
Soit on laisse l'extrême droite régler le problème à l'Assemblée nationale, soit le Gouvernement est au clair sur ses intentions et dépose un projet de loi, soit un travail transpartisan est mené au Sénat. Qu'on ne nous dise pas d'attendre le rapport de Mme Battistel, aussi compétente soit-elle. Nous avons déjà trop attendu. Ce qu'il faut faire, on le sait déjà.
M. Daniel Gremillet. - Je remercie le rapporteur pour sa position. Je partage les propos de Fabien Gay. L'adoption de ces amendements priverait le Sénat de toute possibilité d'influence pour régler un problème qui n'a que trop duré. L'article 21 est symboliquement fort, il marque un positionnement clair. Madame la ministre, il ne vise pas à empêcher le Gouvernement d'agir, bien au contraire. Il doit sans doute être amélioré, mais il est destiné à renforcer la position de la France vis-à-vis de Bruxelles. L'enjeu est de retrouver une capacité d'investissement pour développer l'énergie hydroélectrique.
M. Jean-Jacques Michau. - Nous ne sommes pas dans l'épaisseur du trait, madame la ministre : l'hydroélectricité, c'est 13 % de notre mix énergétique - et les barrages pourraient produire davantage.
Voilà des décennies que l'on cherche une solution. On y est parvenu pour la Compagnie nationale du Rhône. Je ne comprends pas pourquoi on n'y arriverait pas pour les autres situations. EDF est prête à investir pour développer l'hydroélectricité. Il faut sortir du blocage.
Nous devons faire comprendre à la Commission européenne que les barrages contiennent de l'eau, qui ne sert pas seulement pour l'électricité, mais pour bien d'autres usages. C'est pourquoi ils doivent rester dans le giron public.
Les amendements identiques nos126 rectifié et 156 ne sont pas adoptés.
L'article 21 est adopté.
Article 22
Mme la présidente. - Amendement n°176 de MM. Alain Cadec et Patrick Chauvet au nom de la commission des affaires économiques.
L'amendement d'ajustement technique n°176, accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article 22, modifié, est adopté.
Après l'article 22
Mme la présidente. - Amendement n°116 de M. Daniel Gremillet.
M. Daniel Gremillet. - RTE doit pouvoir contraindre non seulement les installations de production d'électricité renouvelable raccordées au réseau public de transport, mais aussi celles raccordées au réseau public de distribution, à mettre à sa disposition leur puissance non utilisée aux fins d'équilibrage de l'offre et de la demande.
M. Patrick Chauvet, rapporteur. - Il est pertinent de compléter en ce sens le mécanisme d'ajustement prévu à l'article L. 321-13 du code de l'énergie. Cet amendement s'inscrit dans la ligne des travaux du Sénat sur la loi de 2022 pour la protection du pouvoir d'achat. Avis favorable.
Mme Olga Givernet, ministre déléguée. - Cet amendement reprend une disposition envisagée par le Gouvernement dans le cadre de la loi sur la transition énergétique. Avis favorable sur le principe, mais il ne paraît pas judicieux de fixer le seuil dans la loi - au demeurant, 12 MW paraît trop élevé. Nous pourrons en discuter dans la suite de la navette.
L'amendement n°116 est adopté et devient un article additionnel.
Mme la présidente. - Amendement n°27 rectifié bis de M. Claude Kern et alii.
M. Michel Canévet. - Par cet amendement de simplification, M. Kern étend l'exemption dont bénéficie le solaire photovoltaïque en matière d'artificialisation des sols à l'énergie solaire thermique, pour plus d'efficience.
M. Patrick Chauvet, rapporteur. - Dès la loi Climat et résilience, Daniel Gremillet a proposé d'exonérer le photovoltaïque du régime d'artificialisation des sols. Cet amendement élargit l'exemption en y incluant l'énergie solaire thermique. Avis favorable.
Mme Olga Givernet, ministre déléguée. - L'exemption dont bénéficie le solaire photovoltaïque est justifiée. Mais les installations solaires thermiques produisent de la chaleur pour des usages privés liés à des processus industriels y compris, voire surtout, en été. Elles n'ont pas leur place sur des espaces naturels, agricoles ou forestiers. L'exemption proposée n'est donc pas opportune, d'autant que les installations de stockage artificialisent les sols. Retrait, sinon avis défavorable.
L'amendement n°27 rectifié bis est adopté et devient un article additionnel.
Mme la présidente. - Amendement n°113 rectifié bis de M. Philippe Grosvalet et alii.
M. Philippe Grosvalet. - Les amendements nos113 rectifié bis, 112 rectifié bis et 114 rectifié bis ont trait à la transposition des articles 16 bis et 16 ter la directive RED III, s'agissant notamment des délais pour l'instruction des permis de construire des nouveaux parcs éoliens.
Les amendements nos113 rectifié bis et 114 rectifié bis ont reçu un avis favorable de la commission, mais pas l'amendement n°112 rectifié bis. Pourquoi cela ?
Les filières économiques ont besoin de visibilité pour développer leurs stratégies industrielles et commerciales. C'est le cas notamment pour les parcs éoliens. Aujourd'hui, les Chantiers de l'Atlantique construisent encore des paquebots, mais aussi des sous-stations dont l'exportation contribue positivement à notre balance commerciale. Donnons à cette filière la visibilité dont elle a besoin.
M. Patrick Chauvet, rapporteur. - L'amendement n°113 rectifié bis est intéressant pour accélérer les projets d'énergies renouvelables dans les zones prévues. Comme rapporteur de la loi Aper, j'ai veillé à un équilibre entre accélération et contrainte, selon le souhait des élus locaux. Cet amendement contribue aussi à l'application du paquet européen Ajustement à l'objectif 55. Avis favorable.
Mme Olga Givernet, ministre déléguée. - Les zones d'accélération de la directive RED III bénéficieront de délais spécifiques. Vous faites référence aux zones d'accélération Aper, mais ces deux types de zones sont différents. Avis défavorable.
L'amendement n°113 rectifié bis est adopté et devient un article additionnel.
Mme la présidente. - Amendement n°112 rectifié bis de M. Philippe Grosvalet et alii.
M. Philippe Grosvalet. - Défendu.
M. Patrick Chauvet, rapporteur. - Contrairement au précédent, cet amendement ne reprend pas précisément le cadre européen. Le délai d'examen prévu par la directive s'applique à partir du moment où l'administration dispose de suffisamment d'informations. Le premier délai s'applique aux installations inférieures à 50 kilowatts, le second aux autres. Ces conditions ne sont pas reprises dans l'amendement. Enfin, la limitation des demandes de complétude à une seule demande ou une décision implicite serait source de complications et nuirait in fine aux porteurs de projet. Retrait, sinon avis défavorable.
Mme Olga Givernet, ministre déléguée. - Fixer un délai pour que l'administration statue sur la recevabilité relève du domaine réglementaire. En outre, un délai d'un mois serait parfois insuffisant pour examiner des dossiers de cette complexité. L'autorité administrative doit conserver la possibilité de demander des compléments pendant toute la phase d'examen, pour limiter le risque de rejet des dossiers, source de perte de temps, de contentieux potentiels et de frustration. Sur le fond, la réforme industrie verte de la procédure d'autorisation environnementale raccourcira l'instruction de plusieurs mois. Avis défavorable.
M. Philippe Grosvalet. - Alors que nous perdons des emplois - General Electric va licencier 300 à 500 personnes en Loire-Atlantique - , on ne peut se satisfaire de ces arguties juridiques.
L'amendement n°112 rectifié bis n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°114 rectifié bis de M. Grosvalet et alii.
M. Philippe Grosvalet. - Défendu.
M. Patrick Chauvet, rapporteur. - Avis favorable.
Mme Olga Givernet, ministre déléguée. - Avis défavorable.
L'amendement n°114 rectifié bis est adopté et devient un article additionnel.
Article 23
M. Fabien Gay . - En matière de protection des consommatrices et des consommateurs, il faut commencer par faire baisser les factures. Mme Pannier-Runacher évoquait, lors de la récente campagne législative, une baisse de 20 à 25 %. Patatras : vous décidez de rehausser l'assise sur la facture de 22 à 47 euros le mégawattheure, un niveau inédit. Un véritable racket ! Avec l'augmentation de la TVA, les taxes représentent la moitié de la facture. Quand les prix de marché montent, les usagers sont taxés ; quand ils baissent, ils le sont aussi !
Je m'adresse au Gouvernement et à la majorité sénatoriale, qui désormais le dirige, puisqu'il compte dix sénateurs. (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains) Les factures vont s'alourdir de 3 à 4 milliards d'euros. Vous allez faire peser la fiscalité sur le plus grand nombre, à commencer par les plus précaires.
Mme Olga Givernet, ministre déléguée chargée de l'énergie . - Les dispositions de l'article 23 nous semblent prématurées. Le Fit for 55 fixe un objectif global pour l'Union européenne. Nous plaidons pour des objectifs proportionnés par pays, en fonction du degré de décarbonation. Les énergies renouvelables pour remplacer l'énergie fossile, oui ; pour remplacer le nucléaire, non ! (Exclamations sur les travées du GEST) L'objectif cardinal est la neutralité carbone en 2050. Nous avons été parmi les premiers pays à l'inscrire dans la loi, en 2019.
Mme la présidente. - Amendement n°186 de MM. Cadec et Chauvet au nom de la commission des affaires économiques.
M. Patrick Chauvet, rapporteur. - Il s'agit de compléter les compétences de la Commission de régulation de l'énergie (CRE) en matière d'hydrogène, pour se conformer au cadre européen.
Mme Olga Givernet, ministre déléguée. - Avis favorable.
L'amendement n°186 est adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°157 rectifié du Gouvernement.
Mme Olga Givernet, ministre déléguée. - Cet amendement conforte la CRE dans sa compétence de formulation d'avis.
Mme la présidente. - Amendement n°33 de M. Michau et du groupe SER.
M. Jean-Jacques Michau. - La CRE veille au bon fonctionnement du marché de l'électricité au bénéfice de tous les consommateurs. C'est une autorité de contrôle et de régulation : elle n'a pas pour mission de participer au développement des installations de stockage du dioxyde de carbone, technologies au demeurant controversées et qui devraient faire l'objet d'un débat démocratique.
M. Patrick Chauvet, rapporteur. - Ces amendements suppriment totalement ou partiellement les compétences attribuées à la CRE en matière de captage, de transport et de stockage du dioxyde de carbone.
Le Gouvernement a proposé une réforme du stockage du dioxyde de carbone dans le cadre du projet de loi de simplification. Reconnaître des compétences à la CRE dans ce domaine encouragera le développement de cette technologie.
Retrait, sinon avis défavorable aux deux amendements.
Mme Olga Givernet, ministre déléguée. - Retrait de l'amendement n°33 au profit de celui, plus complet, du Gouvernement.
M. Yannick Jadot. - Mme la ministre a dit que l'accélération des énergies renouvelables se ferait au détriment du nucléaire. Qui peut croire que, d'ici à 2030, on fermera la moindre centrale, le moindre réacteur ? Tout est dit : ce débat est une forfaiture !
L'amendement n°157 rectifié n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°33.
L'article 23, modifié, est adopté.
Après l'article 23
Mme la présidente. - Amendement n°139 de M. Gay et du groupe CRCE-K.
M. Fabien Gay. - Comme le souligne notamment le Médiateur de l'énergie, les frais dus en cas de résiliation anticipée des contrats d'énergie occasionnent de plus en plus de litiges pour les petits professionnels, moins protégés que les particuliers. Engagés le plus souvent sur une durée déterminée, ils doivent s'acquitter de pénalités très élevées en cas de résiliation. Les très petites entreprises doivent être exonérées de ces frais dès lors qu'elles sont éligibles au tarif réglementé de l'électricité.
M. Patrick Chauvet, rapporteur. - Sur le principe, je partage l'intérêt d'une telle exonération. Mais la rédaction proposée n'est pas codifiée. Elle n'est, en outre, assortie d'aucune condition, ouvrant la voie aux effets de bord. Retrait, sinon avis défavorable.
Mme Olga Givernet, ministre déléguée. - Même avis.
L'amendement n°139 n'est pas adopté.
Article 24
Mme la présidente. - Amendement n°177 de MM. Cadec et Chauvet au nom de la commission des affaires économiques.
M. Patrick Chauvet, rapporteur. - Notre amendement complète les compétences de la CRE pour prévoir la publication d'un prix repère mensuel de vente du gaz naturel.
Mme Olga Givernet, ministre déléguée. - Avis favorable.
L'amendement n°177 est adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°141 du Gouvernement.
Mme Olga Givernet, ministre déléguée. - Cet amendement supprime des dispositions qui pourraient poser problème, sans échange préalable avec les acteurs. Nous craignons une augmentation du prix des contrats, par intégration d'une prime de risque. L'article pourrait opportunément être complété dans la suite de la navette.
M. Patrick Chauvet, rapporteur. - Cet amendement porte sur l'interdiction de l'accès à l'Arenh. Il reprend une recommandation du Médiateur de l'énergie et de la commission des affaires économiques. L'Arenh devant s'éteindre fin 2025, cette proposition est sans doute moins actuelle qu'au dépôt de la proposition de loi. Du reste, le Gouvernement a proposé à l'article 4 du projet de loi de finances un dispositif de substitution à l'Arenh. Avis favorable.
L'amendement n°141 est adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°117 de M. Gremillet.
M. Daniel Gremillet. - Cet amendement applique les obligations prudentielles aux fournisseurs d'électricité.
M. Patrick Chauvet, rapporteur. - La proposition est pertinente. C'est une faculté ouverte par le droit européen. Le Sénat a plaidé en ce sens dans une résolution de juin 2023 déposée par Daniel Gremillet et Claude Kern et dans leur rapport d'information adopté en 2023 par la commission des affaires économiques. En outre, c'est une demande de la CRE. Avis favorable.
Mme Olga Givernet, ministre déléguée. - Avis favorable.
L'amendement n°117 est adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°178 de MM. Cadec et Chauvet au nom de la commission des affaires économiques.
M. Patrick Chauvet, rapporteur. - Amendement d'ajustement technique.
Mme Olga Givernet, ministre déléguée. - Sagesse.
L'amendement n°178 est adopté.
L'article 24, modifié, est adopté.
L'article 25 A est adopté.
Après l'article 25 A
Mme la présidente. - Amendement n°57 rectifié de M. Montaugé et du groupe SER.
M. Franck Montaugé. - Il est indispensable de se doter de tableaux de bord. J'ai dit tout le bien que je pense de la stratégie française énergie climat, cette feuille de route pour ne plus dépendre des énergies fossiles. Nous demandons un rapport d'évaluation de cette stratégie, afin de savoir régulièrement où nous en sommes et d'exercer notre mission de contrôle et de proposition.
M. Patrick Chauvet, rapporteur. - Avis favorable.
Mme Olga Givernet, ministre déléguée. - La Sfec traduit la volonté du Gouvernement d'assurer une cohérence entre les différentes trajectoires. À l'inverse de la PPE ou de la SNBC, elle n'a pas de portée normative. Le Gouvernement remet déjà au Parlement des indicateurs de suivi. Avis défavorable.
L'amendement n°57 rectifié est adopté et devient un article additionnel.
Mme la présidente. - Amendement n°60 de Mme Belrhiti.
Mme Catherine Belrhiti. - Nous demandons un rapport annuel sur les mesures, y compris financières, prises pour assurer la pérennité de l'activité des centrales à charbon.
M. Patrick Chauvet, rapporteur. - Avis favorable.
Mme Olga Givernet, ministre déléguée. - Ces données font déjà l'objet d'une large publicité. Avis défavorable.
L'amendement n°60 est adopté et devient un article additionnel.
Mme la présidente. - Amendement n°183 de MM. Cadec et Chauvet au nom de la commission des affaires économiques.
M. Patrick Chauvet, rapporteur. - Cet amendement renforce l'évaluation de l'éolien en mer, suivant les recommandations de la commission d'enquête dont Vincent Delahaye est rapporteur.
Mme Olga Givernet, ministre déléguée. - Les informations demandées sont déjà rendues publiques dans les rapports de la CRE. De plus, le nombre relativement faible de parcs éoliens en service empêchera toute représentativité, d'autant plus que les coûts de la filière ont évolué. Sagesse.
L'amendement n°183 est adopté et devient un article additionnel.
Article 25
Mme la présidente. - Amendement n°188 du Gouvernement.
Mme Olga Givernet, ministre déléguée. - Nous parvenons au terme de la discussion des articles. Merci aux rapporteurs et à l'auteur de la proposition de loi, M. Gremillet.
Nous nous félicitons des équilibres trouvés sur plusieurs points. Une divergence demeure, sur le mix majoritairement nucléaire en 2050. Soyons humbles et ne fermons aucune porte, car les incertitudes technologiques restent fortes.
Nous devons aller vers une énergie décarbonée et suffisamment pilotable. C'est ainsi que nous assurerons la sécurité de nos approvisionnements et notre souveraineté énergétique.
Le Gouvernement lève le gage sur cette proposition de loi. Néanmoins, je le répète, nous voulons un mix fonctionnant sur deux jambes, les énergies renouvelables et le nucléaire, tout en gardant une neutralité technologique.
Contrairement à ce que j'ai pu entendre, ce texte transpose bien les objectifs du paquet Fit for 55.
M. Patrick Chauvet, rapporteur. - Avis favorable. Je remercie Mme la ministre de l'intérêt qu'elle porte à ce texte.
L'amendement n°188 est adopté.
L'article 25 est supprimé.
Vote sur l'ensemble
M. Franck Montaugé . - Il apparaît plus que jamais nécessaire que le Gouvernement dépose un projet de loi Énergie climat. Nous le demandons depuis trop longtemps.
Je salue le travail de Daniel Gremillet de la commission des affaires économiques. Pour autant, cette proposition de loi ne peut valoir loi de programmation Énergie climat.
Je regrette que nombre de recommandations de notre commission d'enquête sur le prix de l'électricité n'aient pas été intégrées.
Ainsi, la taxation de l'électricité - voire du gaz - annoncée par le Gouvernement dans le projet de loi de finances pour 2025 envoie un signal catastrophique aux entreprises et plus encore aux particuliers, dont le pouvoir d'achat sera de nouveau réduit. C'est inacceptable, tout comme le prélèvement de dividendes sur EDF, confrontée à une montagne d'investissements - dont le financement n'est pas précisé.
Le groupe SER votera contre ce texte, en attendant que le Gouvernement présente un projet de loi Énergie et Climat cohérent avec le PNA Changement climatique, dont nous sommes prêts à discuter.
M. Yannick Jadot . - Le GEST attend également une vraie loi de programmation de l'énergie, accompagnée d'une étude d'impact et d'un avis du Conseil d'État. C'est ainsi que l'on doit travailler en démocratie.
Nous ne pouvons pas approuver ce texte. De fait, il enjambe les dix prochaines années. Il vise le développement massif du nucléaire, sans tenir compte des coûts ni des incertitudes à horizon 2040, 2050. Que fait-on de nos objectifs d'énergies renouvelables de 2030, qui correspondent à un engagement européen ? La France est le seul pays européen à ne pas respecter son objectif en matière d'énergies renouvelables pour 2020, quatre ans plus tard. Madame la ministre, vous ne pouvez pas dire que nous respectons nos engagements européens - sans compter que votre projet de budget va encore nous faire reculer !
Nous espérons que le Sénat travaillera d'arrache-pied pour développer de vraies filières industrielles, y compris dans les énergies renouvelables.
M. Daniel Gremillet . - Merci pour ce débat, qui a démontré la nécessité que le Parlement s'empare de ce sujet stratégique. Notre vision s'inscrit dans le moyen terme, avec les énergies renouvelables, et dans le long terme, avec le nucléaire.
Le texte va plus loin : il traite de sobriété énergétique, d'énergie décarbonée, de rénovation, de simplification, d'efficacité, de sécurité.
Je remercie nos rapporteurs Chauvet et Cadec, le rapporteur pour avis Didier Mandelli, ainsi que Mme la ministre : nous avons su cheminer ensemble, et la levée du gage est une marque de confiance à l'égard du travail parlementaire. Merci à la présidente Estrosi Sassone, à l'ensemble des cosignataires et aux membres du groupe d'études Energie. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Nadia Sollogoub applaudit également.)
M. Henri Cabanel . - Le RDSE étant un groupe pluriel, nos votes seront partagés.
Je le redis, il y a un sacré problème de méthode : si cette proposition de loi a vu le jour, c'est que le groupe Les Républicains s'est substitué au Gouvernement, qui aurait dû, aux termes de la loi, présenter une programmation pluriannuelle de l'énergie. Le débat a été intéressant, mais on s'aperçoit des limites d'une simple proposition de loi sur un tel sujet. Il y a eu des avancées, des reculs aussi, notamment sur les seuils. Je regrette que l'on revienne sur des dispositions adoptées il y a à peine un an ; c'est un mauvais signal.
Je voterai contre cette proposition de loi, considérant que c'est au Gouvernement d'assumer la responsabilité de notre politique énergétique. (Applaudissements sur quelques travées du RDSE)
M. Fabien Gay . - Merci à Daniel Gremillet et aux rapporteurs pour leur travail sérieux, grâce auquel nous avons eu un débat argumenté et posé. Mais beaucoup de questions restent sans réponse ! Ce texte devient-il la PPE du Gouvernement ? Comment se passera la navette ?
Nous partageons la volonté des auteurs de relancer le nucléaire - mais dans le même temps, le Gouvernement s'apprête à taxer les énergéticiens non plus sur la rente inframarginale, mais sur l'outil de production. Pour EDF, c'est 3 milliards d'euros ! De quoi la décourager de se lancer dans l'aventure des EPR2, car elle risque d'être taxée davantage que ceux qui vivent d'une autre rente. Vous devrez sortir de ces contradictions, chers collègues de la droite sénatoriale.
Sur tous les bancs, nous avons réclamé un texte dédié sur le post-Arenh. Finalement, cela viendra à travers un amendement au projet de loi de finances. Chers collègues, une telle méthode vous convient-elle ?
Nous attendons une PPE, un projet de loi, l'avis du Conseil d'État. Cela ne se règle pas en un après-midi. Nous voterons contre ce texte.
Mme Dominique Estrosi Sassone , présidente de la commission des affaires économiques. - Je me réjouis que le Sénat ait pu, à travers cette proposition de loi, inscrire la programmation énergétique au coeur de l'agenda législatif. Ce texte porte une ambition forte pour notre pays, sa croissance, sa compétitivité, et fait en sorte que notre politique énergétique soit plus résiliente, pilotable et cohérente.
Nous avons ainsi acté la relance de la production d'énergie nucléaire, nous avons promu le développement et la diversification des énergies renouvelables - n'en déplaise à M. Jadot, nous avons renforcé la protection des consommateurs d'électricité et de gaz et simplifié les normes applicables aux collectivités territoriales.
Je remercie Daniel Gremilllet de son travail. Merci à nos deux rapporteurs, merci à la ministre. Les échanges avec votre cabinet ont été très fluides.
Le résultat est là et nous en sommes satisfaits. Nous souhaitons désormais que cette proposition de loi soit inscrite à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale dans les meilleurs délais. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC ; Mme Maryse Carrère applaudit également.)
À la demande du groupe Les Républicains, la proposition de loi, modifiée, est mise aux voix par scrutin public.
Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n°10 :
Nombre de votants | 331 |
Nombre de suffrages exprimés | 323 |
Pour l'adoption | 220 |
Contre | 103 |
La proposition de loi, modifiée, est adoptée.
(Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP)
Mme Olga Givernet, ministre déléguée. - Je vous remercie pour ce débat. Chacun a compris que nous voulions un mix énergétique équilibré, sur deux jambes, énergie renouvelable et nucléaire.
Je souhaite que ce cadre législatif soit accompagné d'une PPE détaillée - la fameuse ! Nous lancerons très vite une concertation à ce sujet, afin de fixer un cadre clair pour les trente prochaines années. (Applaudissements sur quelques travées du groupe Les Républicains)
Prochaine séance demain, jeudi 17 octobre 2024, à 10 h 30.
La séance est levée à 19 h 30.
Pour le Directeur des Comptes rendus du Sénat,
Rosalie Delpech
Chef de publication
Ordre du jour du jeudi 17 octobre 2024
Séance publique
À 10 h 30 et à 14 h 30
Présidence : M. Loïc Hervé, vice-président, M. Pierre Ouzoulias, vice-président
Secrétaires : Mme Sonia de La Provôté, Mme Patricia Schillnger
1. Proposition de loi visant à renforcer l'indépendance des médias et à mieux protéger les journalistes, présentée par Mme Sylvie Robert et plusieurs de ses collègues (texte de la commission, n°21, 2024-2025)
2. Proposition de loi visant à mettre à contribution les Ehpad privés à but lucratif réalisant des profits excessifs, présentée par M. Jean-Luc Fichet et plusieurs de ses collègues (n°682, 2023-2024)
3. Explications de vote puis vote sur la proposition de loi visant à sécuriser le mécanisme de purge des nullités, présentée par MM. François-Noël Buffet, Philippe Bonnecarrère et plusieurs de leurs collègues (procédure accélérée) (texte de la commission, n°25, 2024-2025) (demande de la commission des lois)
4. Proposition de loi visant à assouplir la gestion des compétences « eau » et « assainissement », présentée par M. Jean-Michel Arnaud et plusieurs de ses collègues (procédure accélérée) (n°556, 2023-2024) (demande du groupe UC)