Prise en charge des mineurs en questionnement de genre (Suite)

Mises au point au sujet de votes

M. Bernard Buis.  - Lors du scrutin n°201, MM. Jean-Baptiste Lemoyne et Martin Lévrier souhaitaient voter contre.

Mme Brigitte Devésa.  - Lors du scrutin n°201, M. Vincent Capo-Canellas, ainsi que Mmes Élisabeth Doineau, Catherine Morin-Desailly, Dominique Vérien et Sylvie Vermeillet ne souhaitaient pas prendre part au vote, tandis que M. Bernard Pillefer et Mme Nadia Sollogoub souhaitaient s'abstenir.

Acte en est donné.

Discussion de la motion préjudicielle

M. le président.  - Motion préjudicielle n°42, présentée par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel.

En application de l'article 44, alinéa 4, du Règlement, le Sénat décide de suspendre le débat sur la proposition de loi visant à encadrer les pratiques médicales mises en oeuvre dans la prise en charge des mineurs en questionnement de genre (n° 623, 2023-2024) jusqu'à ce que la Haute Autorité de santé ait rendu ses recommandations concernant la prise en charge des mineurs transgenres.

Mme Anne Souyris .  - (Applaudissements sur les travées du GEST) Nous savons qu'il y a dans l'hémicycle ce soir des militants favorables et défavorables à ce texte. Avec mon groupe, nous nous opposons clairement aux mesures qu'il contient.

Mais je m'adresse à celles et ceux qui ne savent pas si les pratiques médicales sont source de risques pour les mineurs ; à celles et ceux qui ont une opinion, mais s'autorisent à se poser des questions - j'en ai fait partie avec d'autres collègues, trop peu nombreux, qui ont assisté aux auditions du rapporteur.

Les transitions des mineurs transgenres sont-elles dangereuses ? J'ai interrogé des familles concernées. Je ne vous répéterai pas ce qu'elles m'ont dit : vous avez tous et toutes été interpelés.

Sans ces pratiques médicales, ces jeunes -  osons le mot  - seraient morts. Notre vote a donc une importance particulière pour eux. Mais que nous disent les expertes et les experts médicaux ?

Les bloqueurs de puberté donnent aux jeunes en questionnement de genre du temps pour prendre une décision éclairée sur la suite de leur parcours. Les traitements hormonaux influent sur la poitrine, la voix et la pilosité : ils ne peuvent être prescrits que sur avis médical et à partir de 16 ans, si l'autorité parentale y consent.

Les opérations chirurgicales de réassignation de sexe sont interdites avant 18 ans. Les opérations chirurgicales de réassignation de genre - surtout des torsoplasties - sont interdites avant 16 ans et sont réalisées en moyenne à 18,4 ans, selon une étude réalisée sur les 239 jeunes pris en charge à la Pitié-Salpêtrière depuis 2012.

J'étais bien seule, avec Alain Milon et Silvana Silvani, lors de la vingtaine d'auditions réalisées.

M. Alain Milon, rapporteur.  - C'est vrai.

Mme Anne Souyris.  - Seule exception, lors de l'audition de l'association La petite sirène, dirigée par Céline Masson et Caroline Eliacheff, qui ont participé à la rédaction de la proposition de loi...

Ces pratiques médicales ne touchent que 300 jeunes par an. Ils ne demandent pas d'évolution de la législation. À peine 2 % des jeunes concernés expriment une volonté de retour en arrière, presque toujours à cause de la stigmatisation dont ils sont victimes.

L'autrice de la proposition de loi a publié un rapport de 300 pages il y a quelques semaines. Les expertes et les experts ont affirmé que leurs propos avaient été tronqués. La presse a dénoncé une supercherie.

Alors, faut-il encadrer davantage ces pratiques déjà encadrées qui permettent à 300 jeunes de survivre ? Comment le justifier ? Pour le rapporteur, « il ne va pas de soi que le législateur doit intervenir ainsi dans la pratique médicale ; il ne peut le faire que guidé par d'impérieux motifs éthiques ou de santé publique. » Je le rejoins. Sommes-nous en présence de ces impérieux motifs ?

Si ces motifs sont éthiques, comment juger des pratiques médicales liées à la transidentité ? En leur temps, d'autres ont tenté de juger les minorités homosexuelles. Ils n'étaient pas du bon côté de l'Histoire.

Si ces motifs sont liés à la santé publique, disposons-nous de preuves solides pour renforcer l'encadrement de ces pratiques ? Nous ne devrions légiférer qu'une fois éclairés par les dernières connaissances scientifiques, mais aucune agence sanitaire nationale n'a publié d'avis sur la question. La HAS ne formulera ses recommandations que dans un an.

Légiférer dès aujourd'hui serait méconnaître la démarche démocratique fondée sur la connaissance scientifique. Si nous le faisions, nous devrions légiférer de nouveau dans moins d'un an !

J'invite toutes celles et tous ceux qui se retrouvent dans cette démarche à me suivre. (Applaudissements sur les travées du GEST, du groupe SER et sur plusieurs travées du groupe CRCE-K ; M. Olivier Bitz applaudit également.)

M. Alain Milon, rapporteur.  - Les auteurs de la motion ne précisent pas à quelle recommandation ils font référence.

La HAS doit publier les siennes fin 2024 ou début 2025 sur les populations de 16 ans et plus. Dans un second temps -  pas avant fin 2025  - , elle publiera ses recommandations pour les moins de 16 ans. Celles-ci ne visent pas à faire évoluer les connaissances scientifiques ; elles se fondent sur la mobilisation des connaissances disponibles à travers l'analyse de la littérature existante.

Enfin, j'ai auditionné la HAS - seule Mme Souyris était présente. Ses représentants ont précisé que l'Autorité respecterait évidemment la loi lorsqu'elle établirait ses recommandations. Que le Gouvernement ait saisi la HAS de cette question ne dessaisit pas le Parlement. Il ne revient pas non plus à la HAS de définir l'ordre du jour du Sénat.

Des revues internationales font état de la qualité insuffisante des études existantes. Les effets des traitements que nous proposer de différer sont irréversibles. Avis défavorable.

M. Frédéric Valletoux, ministre délégué.  - Sagesse.

À la demande du groupe Les Républicains, la motion42 est mise aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici le résultat du scrutin n°202 :

Nombre de votants 320
Nombre de suffrages exprimés 300
Pour l'adoption 115
Contre 185

La motion n°42 n'est pas adoptée.

Discussion générale (Suite)

M. Xavier Iacovelli .  - (Applaudissements sur les travées du RDPI) Cette proposition de loi, loin d'apporter des solutions aux mineurs atteints de dysphorie de genre, présente des éléments préoccupants. En commission, le rapporteur a posé des garde-fous et a tenté d'objectiver le débat.

Initialement, l'article 1er souhaitait interdire les bloqueurs de puberté et les traitements hormonaux, qui sont pourtant utilisés depuis quarante ans pour lutter contre la puberté précoce et pour offrir une pause aux mineurs qui s'interrogent sur leur genre.

Cette proposition d'interdiction générale ne prend pas en compte les avis scientifiques.

En 2020, 8 952 personnes relevaient du régime des ALD pour transidentité ; 3,3 % d'entre elles étaient mineures. Seule une petite dizaine de personnes est concernée par cette proposition de loi. Ces jeunes peuvent recourir aux bloqueurs de puberté et aux traitements hormonaux, qui sont des procédés réversibles -  ces pratiques sont encadrées. En les privant d'un suivi nécessaire, nous risquons de voir se développer un marché parallèle, hors de tout contrôle. Leur détresse psychologique augmentera, peut-être jusqu'au suicide.

Le plus souvent, les traitements sont prescrits vers 15 ou 16 ans, quand la puberté est la plus forte. Le moratoire de deux ans revient à ne les autoriser qu'à la majorité - comme le prévoyait le texte initial !

Selon les auteurs, on aurait laissé les transactivistes s'immiscer partout, surtout à l'école. Une mode trans s'emparerait des jeunes de notre pays. C'est nier les difficultés qu'ils traversent. Présenter ces traitements comme une mode est stigmatisant, car ces jeunes vivent une grande détresse morale. Alors que nous attendons l'avis de la HAS, vous préférez une proposition de loi idéologique sans fondement scientifique. (Mme Jacqueline Eustache-Brinio proteste.)

Pis, vous souhaitez sanctionner pénalement les médecins qui veulent accompagner ces jeunes. Ce message de répression contraste avec l'esprit de compréhension qui devrait prévaloir à l'endroit de ces mineurs.

Et que dire de l'article 3, le plus scandaleux ? Pourquoi lier dans le même texte la psychiatrie et la dysphorie de genre, qui n'est pas reconnue comme une maladie mentale, ni par la France ni par l'OMS ?

Si un accompagnement psychologique est nécessaire, c'est au corps médical de le décider, certainement pas au législateur.

Y a-t-il un lien entre les sénateurs qui ont cosigné ce texte et ceux qui ont voté contre la fin de l'interdiction des thérapies de genre ?

Mme Jacqueline Eustache-Brinio.  - Pas du tout !

M. Xavier Iacovelli.  - Ce sont les mêmes ! (M. Thomas Dossus et Mme Mélanie Vogel renchérissent.)

M. Philippe Bonnecarrère.  - Pas d'attaques personnelles.

M. Xavier Iacovelli.  - Les organisations internationales de santé ont mis en garde contre la remise en cause des traitements. Je salue la position d'Aurore Bergé qui s'est opposée à ce texte. (Marques d'ironie sur les travées du groupe Les Républicains)

Voter cette proposition de loi serait une première dans notre République : ce serait la première fois que le législateur déterminerait ou interdirait des prescriptions médicales. Nous ne donnerons pas notre voix à une démarche qui n'est qu'un prétexte pour donner crédit aux positions les plus radicales, les plus injustes et les plus réactionnaires de notre assemblée. Le groupe RDPI votera contre ce texte. (Applaudissements sur les travées du RDPI, du RDSE et du groupe SER, ainsi que sur plusieurs travées du groupe CRCE-K)

Mme Laurence Rossignol .  - Je ne suis pas sûre d'avoir autant de certitudes que ceux que j'entends depuis deux heures...

Beaucoup de jeunes contestent leur assignation au genre lié à leur sexe de naissance, de plus en plus de jeunes se déclarent non binaires. Enfin, nous restons malgré tout dans une échelle modeste : il n'y a pas de vague transitionnelle !

Je constate aussi l'empathie et la solidarité des autres jeunes à l'égard de ceux qui souffrent d'incongruence de genre.

M. Philippe Tabarot.  - Nous sommes les méchants...

Mme Laurence Rossignol.  - En cela, c'est un phénomène non pas idéologique, mais générationnel.

La jeunesse n'est déjà pas en bonne santé mentale ni à l'aise avec ce monde. Et nous n'avons rien trouvé de mieux qu'interdire ce qui les touche et les émeut.

Des collègues ont évoqué l'absence de données scientifiques. Mais, quand celles-ci existent, elles sont soupçonnées d'être manipulées.

Je suis allé chercher dans ce fameux rapport du groupe Les Républicains - qui n'est pas un rapport sénatorial et qui n'engage donc que le groupe Les Républicains... (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains) C'est bien que le pays le sache et que vous l'assumiez, mes chers collègues !

Il part d'un fait, sans vraiment s'intéresser au fond : l'augmentation du nombre de demandes de transition chez les filles, qui ont vu leurs mères se battre pour l'égalité et contre les violences sexistes et sexuelles. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains). Or celles-ci constatent que la condition des femmes est peu enviable et que la puberté les expose à ces violences ; il est donc naturel qu'elles se posent la question : le genre féminin est-il le meilleur pour vivre heureux et épanoui ? (Les protestations redoublent.)

Mme Pascale Gruny.  - C'est scandaleux !

Mme Laurence Rossignol.  - Les services de santé seraient complices, dites-vous. Ils seraient « transaffirmatifs ». Que signifie ce néologisme ? Devraient-ils les dissuader d'agir plutôt que de les aider ?

La transition ne s'encourage pas, mais ne se combat pas non plus : c'est un fait. Cela me rappelle les débats sur l'homosexualité. On constate qu'on est homosexuel, on ne le choisit pas.

Je n'ai pas trouvé dans votre rapport trace de l'intérêt de l'enfant. Votre approche est idéologique : les fondements de notre société, menacés hier par les homosexuels, le seraient aujourd'hui par les jeunes en transition. C'est le chapitre II du grand remplacement, qui conduira à la décadence de l'Occident... Vous rejoignez Vladimir Poutine, qui a fait des homosexuels et de la transidentité ses cibles principales.

J'ai été très étonnée qu'au nom du principe de neutralité de l'école, vous proposiez de revenir sur la circulaire Blanquer, qui aménage l'espace des enfants en questionnement de genre et les autorise à changer de prénom, avec l'accord des parents. Pour vous, la transition de genre est une opinion. Vous faites une grave erreur et manifestez ainsi le caractère politique de votre propos.

Le rapporteur a essayé de remettre la décision médicale dans l'interdiction générale. Il y a autant de parcours que d'enfants. Pour certains, les traitements sont adaptés, pour d'autres, inadaptés ou prématurés. Mais cela relève d'une décision médicale !

Nous sommes d'accord pour confier la prise en charge à des centres spécialisés, comme nous l'avons fait pour les enfants intersexes dans la loi bioéthique. Un médecin ne peut assurer à lui seul l'accompagnement du jeune et de sa famille. Mais il n'y a pas besoin d'une loi pour ce faire.

Malgré les efforts du rapporteur, il demeure des éléments inacceptables : qui sommes-nous pour décider qu'il faut attendre deux ans pour autoriser le traitement hormonal ?

L'interdiction des hormones croisées avant 18 ans ne ferait que renforcer la contrebande et le trafic de médicaments ; là encore, le législateur se substituerait à la décision médicale.

Le groupe SER est favorable à une prise en charge dans des centres spécialisés, avec des décisions adaptées à l'intérêt de l'enfant. La chirurgie ne doit pas être accessible aux mineurs.

Monsieur le ministre, j'aurais pu reprendre mot pour mot votre intervention. Nous voterons contre ce texte. Mais soyez cohérents : engagez-vous à organiser l'offre de soins et donnez un avis défavorable à ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe SER, du RDPI et du GEST ; Mme Silvana Silvani applaudit également.)

Mme Muriel Jourda .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe UC) Ce texte est issu d'un travail fouillé du groupe Les Républicains sur une situation connue du monde juridique et du monde médical. Bien que le phénomène soit peu quantifiable, on observe une recrudescence chez les mineurs, au point que le ministre de l'éducation nationale a pris une circulaire...

M. Xavier Iacovelli.  - ... pour protéger les enfants !

Mme Muriel Jourda.  - Nous ne voulons pas d'actes irréversibles pour les mineurs ; nous une prise en charge par une équipe pluridisciplinaire, qui ne prescrira de bloqueurs de puberté que si elle le juge adéquat.

Un argument m'a marqué : le droit à l'autodétermination de l'enfant. Mme Vogel a invoqué la liberté de l'enfant à définir son sexe. Pardonnez-moi d'être abrupte, mais avons-nous perdu tout bon sens ? Si vous interrogez un enfant, il vous répondra qu'il ne veut pas aller à l'école et qu'il préfère regarder des vidéos sur TikTok en mangeant des frites au ketchup. (M. Xavier Iacovelli marque son désaccord ; protestations à gauche) Et on le laisserait décider de son sexe ? Avez-vous oublié ce qu'est un adolescent ? Il oscille entre vantardise, moquerie, timidité. Et c'est à ces êtres instables que vous voulez demander s'ils veulent changer de sexe ? (« Très bien ! » à droite ; Mmes Mathilde Ollivier et Émilienne Poumirol marquent leur désapprobation.)

Notre rôle est de protéger les enfants, y compris contre eux-mêmes lorsqu'ils n'ont pas la capacité de mesurer les conséquences de leurs décisions. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Mme Jacqueline Eustache-Brinio.  - Bravo !

M. Stéphane Ravier .  - Les mineurs trans n'existent pas, n'en déplaisent aux adeptes de la transmania. Ils n'existaient pas avant que le progressisme le plus fanatique n'abolisse tous les repères. C'est votre idéologie libertaire d'adulte qui leur a construit un labyrinthe de souffrances. (Exclamations à gauche)

En 2020, je me souviens d'un petit garçon de 8 ans qui prétendait être une fille, et était présenté comme une bête de foire dans une émission à forte audience : c'est de l'exploitation, et non de l'éducation.

Les pédopsychiatres sont pourtant unanimes : à cet âge, on agit pour plaire à ses parents.

Votre individualisme exacerbé et dévoyé combine paradoxalement l'enfant roi, à qui l'on passe tous les caprices, à l'enfant proie, à la merci des délires idéologiques et des grandes personnes. Ce n'est pas pour rien que la loi refuse le changement de sexe dans l'état civil.

Les enfants n'ont pas toutes les données pour prendre des décisions irréversibles : la loi doit protéger leur intérêt supérieur. S'il existe un principe de précaution pour l'écologie environnementale, il faut un principe de précaution pour l'écologie humaine.

Sans alternance politique, l'Angleterre a supprimé les bloqueurs de puberté pour les mineurs depuis le 1er avril. Des études montrent qu'ils nuisent au développement du squelette et du cerveau. (Mme Émilienne Poumirol s'exclame.) Tirons les leçons des calamiteuses expériences de nos voisins.

Notre assemblée, qui a renforcé la protection des mineurs victimes de violences sexuelles en 2021, ne devrait pas faire fi de leur vulnérabilité au moment de choisir une mutilation.

L'opposition à ces trois traitements devrait être unanime, la mienne est en tout cas sans équivoque. (Mmes Sylviane Noël et Laurence Muller-Bronn applaudissent.)

M. Ian Brossat.  - On a les soutiens que l'on mérite...

Mme Marie-Claude Lermytte .  - (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP) Protéger les mineurs, c'est notre volonté à tous. Nous avons conscience que la transidentité, notamment des mineurs, prend de plus de place dans la société et dans la communauté médicale.

Comme moi, vous avez reçu de nombreux mails pour ou contre cette proposition de loi, qui traite d'une question médicale et personnelle.

Ce texte est issu du rapport du groupe Les Républicains. Globalement, les arguments ne correspondent pas toujours aux données, qui concernent les majeurs. La HAS travaille à l'élaboration d'un rapport complet. Légiférer sur un tel sujet avant sa publication et sur la base d'un rapport interne à un groupe parlementaire n'est pas opportun. Plus on politise les sujets de santé, moins ils sont bien gérés.

La proposition de loi aborde deux thèmes qui ne doivent pas être confondus, la transidentité d'une part et la pédopsychiatrie d'autre part. Nous refusons que ce sujet important soit traité ainsi ; les personnes concernées souffrent. À la quasi-unanimité, les sénateurs INDEP ne prendront pas part au vote.

M. Rémi Féraud.  - Vous auriez pu voter contre !

Mme Brigitte Devésa .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Je salue Jacqueline Eustache-Brinio : le sujet est difficile et il faut du courage. Merci à Alain Milon pour son expertise et pour son travail de rapporteur.

Ce n'est pas un petit texte ; il s'agit de l'émancipation des individus - de savoir si les mineurs, enfants et adolescents, peuvent échapper au déterminisme. Il pose la question de l'émancipation. Comme disait Cioran : « ce que nous nommons émancipation, c'est le libre choix d'une âme entre différentes limitations. »

Les auditions l'ont montré : il y a urgence à légiférer. Les scientifiques et les philosophes nous ont rappelé que la prise en charge des mineurs en questionnement de genre ne devait pas être l'apanage de l'idéologie et de la morale. Le législateur doit établir une référence acceptée de tous, définie en assemblée et non selon l'appréciation intime d'un psychologue ou d'un endocrinologue en cabinet.

Comment répondre aux mineurs qui se sentent engoncés dans un genre dont ils disent - ou dont on leur dit - qu'il n'est pas le leur ? Pourquoi briser un triptyque : volonté d'un jeune, accord des tuteurs et validation d'un professionnel ? Que répondre aux tenants de la transidentité qui considèrent qu'il y a urgence à agir ?

Pourquoi attendre la majorité ? Ce texte traite de la question du temps. S'il y a bien un âge ou le temps n'est pas comme du sable qui s'écoule, c'est celui de l'enfance, où chaque pas fait sens. C'est le temps de la construction de l'être, de l'apprentissage et des doutes.

Nous croyons que donner du temps au temps n'est pas une chose vaine : la pensée évolue davantage que le corps. Seul le temps permet à la pensée de dominer le corps. Mais si le corps domine et que la pensée évolue, les mutations sont irréversibles.

Cette proposition de loi fait de la patience la seule forme de prudence convenable. Le temps est la dernière arme contre le déterminisme. C'est pourquoi certains membres de mon groupe voteront ce texte.

Si Marianne nous rappelle que de nombreux endocrinologues sont frileux et que certains psychologues refusent tout traitement avant 18 ans, les réunir en réunion pluridisciplinaire ne changera rien

Merci à la commission et au rapporteur.

Permettez-moi de m'adresser à cet enfant qui nous écoute peut-être.

Ce n'est qu'en grandissant que tu mesureras la valeur des choix. Un jour, tu seras l'adulte que tu veux être et tu te rappelleras que les sénateurs t'auront empêché de t'en vouloir, à toi et aux adultes qui t'entouraient. (Marques d'agacement à gauche) La sénatrice que je suis voit en toi non pas la fille ou le garçon, mais le citoyen qui accepte de voir en lui autre chose que son identité. (Mme Émilienne Poumirol et M. Yan Chantrel ironisent.) Tu comprendras que nous avons voulu t'isoler des adultes qui trop souvent suivent la mode et ont peur de s'opposer au rouleau compresseur du progrès. (Protestations à gauche) Les voix sont contradictoires, mais le doute doit profiter à l'insouciance de l'enfance. La frontière entre la majorité et la minorité doit être sacrée.

Une voix à droite.  - Excellent !

Mme Brigitte Devésa.  - Tu comprendras qu'il ne faut pas manipuler les corps et des cellules au nom du bien-être. Tu comprendras que nous avons dû légiférer face à des dérives sans précédent et en tenant compte du nombre grandissant de personnes qui ont regretté. (Les protestations redoublent.)

Mme Émilienne Poumirol.  - C'est le grand remplacement !

Mme Brigitte Devésa.  - Si tu ne comprends cela qu'une fois adulte, c'est que nous avions raison : attendre n'était pas une si mauvaise idée.

Victor Hugo disait : « les opiniâtres sont les sublimes. (...) L'obstiné dans le vrai a la grandeur. Presque tout le secret des grands coeurs est dans ce mot : perseverando. La persévérance est au courage ce que la roue est au levier. » (Bravos et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mmes Nadia Sollogoub, Nadège Havet, MM. Olivier Henno et Stéphane Ravier applaudissent également.)

Mme Anne Souyris .  - (Applaudissements sur les travées du GEST, du groupe SER, ainsi que sur quelques travées du groupe CRCE-K) Madame Eustache-Brinio, vous avez fait grand bruit autour de votre rapport et M. Retailleau a inscrit cette proposition de loi très vite à notre ordre du jour : voilà une histoire bien ficelée.

Vous répandez des idées fausses qui alimentent la peur vis-à-vis d'une population encore très méconnue. Heureusement, une première parole commence à se libérer. Vous vous appuyez sur des études tronquées ou biaisées et brandissez les quelques cas de détransition comme des totems. Vous faites croire qu'il n'y aurait aucun cadre concernant les mineurs.

Ce rapport est une défaite de la pensée et de l'honnêteté. C'est la fabrique de la peur. Votre combat, c'est la haine et la transphobie, pas la protection de l'enfance.

Le taux de suicide des jeunes en questionnement de genre est l'un des plus élevés. Mais vous vous en détournez.

Écrire 300 pages de mensonges ne fera pas une vérité scientifique. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains) Votre rapport est un pamphlet dans lequel les personnes auditionnées ne reconnaissent pas leurs propos et qui abîme notre institution et la démocratie.

Heureusement, il y a eu de vraies auditions ; j'en sais gré à M. Milon. Tous les organismes, y compris le Conseil national de l'ordre des médecins et l'Académie nationale de médecine, se sont dits inquiets de cette loi.

Non, il n'y a pas d'activistes dans les écoles pour transformer vos enfants comme le suggère votre rapport !

M. Max Brisson.  - C'est insupportable !

Mme Anne Souyris.  - Ce qui est insupportable, c'est ce rapport !

Non, un jeune ne devient pas trans après avoir visionné un TikTok !! Ces affabulations sont dangereuses : elles creusent le sillon de la discrimination.

Les parents, les enseignants, les rares médecins prescripteurs ne sont pas des activistes : ils essayent d'éviter la désocialisation, la déscolarisation voire le suicide de l'enfant. Les seuls activistes sont les propagateurs de fausses nouvelles par pure idéologie. Madame Eustache-Brinio, de quel côté penche l'activisme ?

S'il existe une épidémie, c'est celle des suicides dans la communauté trans. Pourquoi une loi, alors que les jeunes suivis par le centre de la Pitié-Salpêtrière ne font plus de tentatives de suicide ? Tous les jeunes suivis dans le centre se rescolarisent, quand 28 % arrivent déscolarisés.

Nous manquerions d'études ? Celles qui existent prouvent que les bloqueurs de puberté et les prises d'hormones limitent les risques suicidaires et dépressifs et améliorent le bien-être. C'est le seul horizon qui devrait nous guider.

La commission a réécrit un texte en autorisant les bloqueurs de puberté, mais en les retardant de deux ans, voire plus... C'est une interdiction de facto, car la puberté n'attend pas.

Les écologistes se battront contre ce texte, jusqu'au bout. (Applaudissements sur les travées du GEST et du groupe SER ; MM. Philippe Grosvalet, Ian Brossat et Mme Cathy Apourceau-Poly applaudissent également.)

Mme Silvana Silvani .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) L'augmentation du nombre de jeunes qui demandent une consultation médicale pour inadéquation entre le genre ressenti et le genre de naissance serait, selon les auteurs de la proposition de loi, la conséquence des discours de certains influenceurs vecteurs de mal-être existentiel à l'adolescence...

Rappelons que la crise d'identité vécue par de nombreux jeunes à l'adolescence existait bien avant Instagram et TikTok. Reconnaissons collectivement que cette société capitaliste qui met à mal le vivre ensemble, les droits sociaux et l'écologie contribue à alourdir leurs inquiétudes.

Pour les accompagner dans leur questionnement, il faut des professionnels formés, pas une proposition de plan national pour la pédopsychiatrie au détour d'un article.

Disons-le clairement, cette proposition de loi issue d'un texte interne au groupe Les Républicains se sert de la protection des enfants comme d'un paravent dans son combat idéologique contre les personnes transgenres.

Vous voulez interdire des substances qui ne sont quasiment pas prescrites et une chirurgie qui n'est ni autorisée ni pratiquée. Selon la HAS, seules 294 personnes de moins de 18 ans ont été prises en charge en 2020 pour transidentité, soit 0,002 % des 14 millions de moins de 18 ans.

Vous surfez sur les vagues d'un grand remplacement (Mme Jacqueline Eustache-Brinio proteste vivement), au mépris de la souffrance des personnes concernées et des familles.

J'ai constaté le mécontentement du personnel médical qui estime avoir été utilisé dans votre rapport.

Le rapporteur, si l'on en croit l'Agence France-Presse, a souhaité effacer tout soupçon de transphobie... Quel aveu !

Bravo pour le toilettage, mais il s'agit plutôt de maquillage : ne soyons pas dupes, c'est le même texte, sous des dehors différents ! L'accès aux bloqueurs de puberté et aux traitements hormonaux est si strict qu'il est quasiment impossible.

Assumez votre objectif politique qui est d'interdire les parcours de transition des mineurs, mais aussi des majeurs. C'est écrit noir sur blanc dans la recommandation n°5 qui préconise l'interdiction des chirurgies de réassignation sexuelle aux moins de 25 ans.

Il s'agit de marquer des points à quelques jours des élections européennes auprès d'un électorat traditionaliste et conservateur. (Marques d'indignation à droite)

M. Guy Benarroche.  - C'est vrai !

Mme Silvana Silvani.  - Ce texte régressif reprend les arguments de l'extrême droite. Ce faisant, vous adressez un message de haine à ces jeunes qui subissent une explosion des violences à leur encontre. Notre groupe votera majoritairement contre ce texte. (Applaudissements sur la plupart des travées des groupes CRCE-K, ainsi que sur les travées du groupe SER et du GEST ; M. Philippe Grosvalet applaudit également.)

Mme Véronique Guillotin .  - Le groupe RDSE entend fonder son opinion sur la science. Loin de la pandémie clamée, les transitions médicales ne concernent que quelques centaines de mineurs. L'augmentation des demandes entre 2013 et 2020 s'explique davantage par le plus grand nombre de consultations disponibles et la déstigmatisation. Ni mode ni lubie.

Le texte n'interdit plus les bloqueurs de puberté et c'est heureux.

Les sociétés savantes préconisent l'usage des traitements hormonaux, au moment opportun, sans barrière d'âge. Ces traitements réduisent la souffrance et l'anxiété et permettent parfois d'éviter la chirurgie. Les études montrent qu'ils ont peu d'effets secondaires.

Les réassignations chirurgicales ne sont pas pratiquées sur les mineurs, à l'exception de torsoplasties, dans des cas très exceptionnels.

L'éligibilité au traitement médical ou chirurgical est individualisée, validée collégialement, après plusieurs consultations. On compte en moyenne un an entre la première consultation et la première prescription, ce qui laisse un délai de réflexion aux jeunes et à leurs familles. Nulle légèreté dans la prise en charge.

Rien n'indique qu'il faille poser des interdictions au personnel médical, avec prison et amende à la clé.

Le rapport à l'origine de cette proposition de loi, à rebours des positions majoritaires de la communauté scientifique et médicale, a été corédigé par une psychologue et une pédopsychiatre, militantes d'une association de lutte contre toute transition de genre chez les mineurs. Cela interroge sur son impartialité. Des retranscriptions partielles ou des déformations des propos des personnes auditionnées sont à déplorer.

Nous ne minimisons pas les questions éthiques soulevées, autour du regret et de la nature du consentement de l'enfant, notamment. L'identification transgenre est moins stable chez l'enfant. Aussi les effets sur la fertilité doivent être pris en compte dans la décision de traiter.

Faut-il punir de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende un médecin qui prescrirait un tel traitement à un mineur de 17 ans et demi, ce qui peut le sauver du suicide ? Non.

En janvier dernier, le groupe RDSE a fait adopter par le Sénat une résolution en faveur de la santé mentale des jeunes. Pour autant, l'article 3 sur la pédopsychiatrie n'a pas sa place ici, la dysphorie de genre n'étant plus classée dans la liste des affections psychiatriques. Nous ne nous associerons pas à un tel retour en arrière.

Nous considérons préférable de confier ces jeunes à des professionnels de santé compétents, et d'attendre les recommandations actualisées de la HAS.

Malgré le travail d'équilibriste du rapporteur, notre groupe défendra plusieurs amendements pour modifier le texte en profondeur. (Applaudissements sur les travées du RDSE, du groupe SER et sur plusieurs travées du groupe CRCE-K ; MXavier Iacovelli applaudit également.)

Mme Laurence Muller-Bronn .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Cette proposition de loi est l'aboutissement d'une année de travail à écouter l'ensemble des parties concernées, sans parti pris et sans stigmatiser qui que ce soit. (Marques d'ironie à gauche)

Nous avons pris cette initiative en constatant les préoccupations dans les familles et chez les professionnels de l'enfance et de la santé.

Si nous étions transphobes et liberticides, nous aurions déposé ce texte sans ce travail de fond et ses 60 auditions.

En premier lieu, les médecins auditionnés ont réaffirmé que la transsexualité est une pathologie (on conteste le terme à gauche) reconnue dès le plus jeune âge. Sa prise en charge, par des équipes pluridisciplinaires, existe depuis longtemps. Le mal-être des enfants et des adolescents a toujours existé et c'est le rôle des parents, des adultes et de la société de leur laisser le temps d'évoluer.

Trop souvent, l'argument du risque suicidaire occulte les pathologies et les comorbidités telles que l'anorexie, l'autisme et les traumatismes enfouis dus parfois à des abus sexuels. (Protestations à gauche)

Mme Émilienne Poumirol.  - C'est scandaleux !

Mme Laurence Muller-Bronn.  - Des études internationales ont montré que ces comorbidités étaient présentes dans 70 % à 80 % des cas et que 80 % des mineurs se réconcilient avec leur sexe après la puberté. Si le trouble reste, l'adulte reprendra les démarches.

M. Xavier Iacovelli.  - Trouble ? Quel trouble ?

Mme Laurence Muller-Bronn.  - Dès lors, y a-t-il nécessité médicale impérative et véritable consentement ? L'enfant possède-t-il un discernement suffisant pour s'autodéterminer en matière de sexualité ? La reconnaissance de l'autonomie de l'enfant dans sa vie sexuelle est dangereuse, et même perverse : poussée à l'extrême, elle conduit à la pédophilie ! (Marques d'indignation et de perplexité à gauche)

M. Guy Benarroche.  - Au bûcher !

M. Ian Brossat.  - Mais on est où là ?

Mme Laurence Muller-Bronn.  - Les connaissances médicales sur les effets secondaires des traitements hormonaux nous invitent à la plus grande prudence. En mars, des victimes transgenres ont déposé plainte contre l'État au sujet de l'Androcur.

En avril, le Royaume-Uni a interdit les traitements hormonaux. Dès 2020, la Finlande a fortement limité l'hormonothérapie. La Suède a suivi deux ans plus tard. En décembre dernier, la Norvège a réduit l'usage des hormones aux seuls essais cliniques. Le Danemark prend le même chemin.

M. le président.  - Veuillez conclure.

Mme Laurence Muller-Bronn.  - Je souhaite que notre débat, qui ne doit pas tomber dans l'idéologie, soit entendu par les parents et la société tout entière. (On s'impatiente à gauche.)

Notre responsabilité à l'égard des jeunes nous impose d'être parfaitement conscients et informés des pratiques médicales et chirurgicales pour les mineurs, tout particulièrement lorsqu'elles sont irréversibles. (Protestations à gauche ; applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Stéphane Ravier applaudit également.)

Mme Pascale Gruny .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Ce sujet délicat a trait à la santé de nos enfants et à la responsabilité parentale. Je salue Jacqueline Eustache-Brinio qui a mis ce sujet sur la table et remercie Alain Milon qui a préparé un texte équilibré et responsable.

La dysphorie de genre touche peu d'enfants en France, mais elle est en augmentation. L'intervention du législateur est donc nécessaire pour mieux accompagner ces jeunes.

Nous devons tenir compte des situations personnelles et des retours d'expérience des pays étrangers « en avance ». Or l'incertitude prévaut. Plusieurs études récentes remettent en cause la solidité scientifique qui fonde les traitements et des pays font machine arrière, comme l'Angleterre qui a limité la prescription des bloqueurs de puberté. Bien que considérés comme réversibles, ils ont des conséquences sur la santé osseuse et le développement cognitif. Les jeunes et les familles doivent être informés.

Les traitements hormonaux de substitution sont difficilement réversibles et entraînent des effets secondaires - problèmes cardiovasculaires, de fertilité. Interdire ces traitements est sage.

Si l'enfant doit être écouté, les décisions concernant sa santé doivent être prises au regard de son intérêt supérieur. Notre droit restreint sa capacité juridique pour le protéger des décisions aux conséquences irréversibles qu'il pourrait vouloir prendre. Ceux qui autonomisent l'enfant en lui attribuant la capacité de choisir se trompent - voyez la détresse des jeunes qui découvrent que la détransition est impossible.

Les scientifiques considèrent l'adolescence comme une période de vulnérabilité, au cours de laquelle le jeune peut prendre des décisions pour contester l'ordre établi ou se conformer à une mode.

La science étant incertaine, soyons prudents et ne donnons pas l'impression aux adolescents qu'ils sont utilisés dans une expérimentation médicale. Je salue la clause de revoyure à cinq ans proposée par le rapporteur, comme dans les lois de bioéthique.

Soyons aussi attentifs aux majeurs sous tutelle, parfois influencés par des associations qui les coupent de leurs proches : je pense à quelqu'un.

Je salue la stratégie nationale en faveur de la pédopsychiatrie, indispensable pour que les enfants aient accès à une prise en charge.

Soyons attentifs à nos concitoyens présentant une dysphorie de genre, car ils ont plus de mal à trouver leur place dans la société, mais gardons-nous d'en faire une généralité et essayons de traiter à l'avenir ces sujets avec moins de passion. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Frédéric Valletoux, ministre délégué.  - Dans mon intervention liminaire, je n'ai pas donné d'indication concernant l'avis du Gouvernement. Mais je le dis maintenant solennellement : le Gouvernement est contre l'adoption de cette proposition de loi. (Vifs applaudissements sur les travées du RDPI, du RDSE, du GEST et sur plusieurs travées du groupe SER ; M. Ian Brossat applaudit également.)

Tout ce que j'ai entendu m'a donné le sentiment que nous étions dans une approche dogmatique où les arguments scientifiques n'ont que peu d'importance. (Applaudissements sur les travées du RDPI, du GEST et du groupe SER ; M. Philippe Grosvalet applaudit également ; protestations sur les travées du groupe Les Républicains.) Or la décision relève du domaine médical et scientifique ; je ne ferai jamais primer la décision politique sur les arguments scientifiques. (Applaudissements sur les travées du RDPI, du GEST et du groupe SER ; MPhilippe Grosvalet applaudit également.)

Discussion des articles

Article 1er

M. Alain Milon, rapporteur de la commission des affaires sociales .  - Xavier Iacovelli a affirmé que l'interdiction à l'article 2 n'existait nulle part ailleurs ; c'est faux, puisque nous nous sommes inspirés des peines prévues en cas d'IVG sans consentement et d'IVG hors délais. L'affirmation de M. Iacovelli était donc mensongère.

Oui madame Rossignol : les jeunes filles victimes de violences, par peur de devenir des femmes complètes, peuvent penser à changer de sexe, mais il faut les accompagner pour les orienter vers leur genre ou leur sexe réel.

Mme Laurence Rossignol.  - Interdisez plutôt le patriarcat !

M. Alain Milon, rapporteur.  - Nous souhaitons protéger les mineurs...

M. Xavier Iacovelli.  - Ils se suicident !

M. Alain Milon, rapporteur.  - ... et leurs parents.

La HAS s'inspire de travaux scientifiques pour mettre en place des protocoles, mais elle ne produit pas de travail scientifique.

L'Académie nationale de médecine recommande la prudence dans les soins (murmures sur les travées du RDPI) et demande l'interdiction des opérations définitives avant 18 ans. (Mme Silvana Silvani proteste.)

Quand on est docteur en médecine, on peut prescrire des traitements. Mais de quel droit ? Dispose-t-on de suffisamment de connaissances ? Voilà pourquoi la loi pose un cadre.

Oui, le taux de suicide des adolescents transgenres est très élevé, car ils ne sont pas acceptés dans la société, dans la famille et parce qu'ils ne sont pas suivis. Ce texte propose de les accompagner.

Mme Laurence Rossignol.  - Ce n'est pas ça qui va les aider !

M. Alain Milon, rapporteur.  - Nous proposons qu'ils soient suivis pour trouver leur véritable identité, soit en les soignant, soit en les écoutant. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Brigitte Devésa applaudit également.)

Mme Cécile Cukierman .  - Nous sommes face à un débat de société complexe, qui touche à l'intime et à l'éthique.

J'ai toujours considéré la minorité comme un temps de la vie à protéger, jusqu'à la défense de la minorité pénale. J'aimerais avoir vos certitudes d'un bonheur individuel qui fait fi de celui des autres ; vos certitudes que les autres jeunes dans une classe de lycée ne sont pas ébranlés par le choix d'un camarade ; vos certitudes pour ranger les gens dans deux cases : les transphobes et les transactivistes.

Mais je n'ai qu'une certitude : ce débat reviendra, car il dépasse le seul débat entre réactionnaires et anti-réactionnaires. Je souhaite une société progressiste et émancipatrice. À titre personnel, je ne voterai pas ce texte, mais sans m'y opposer.

M. Jean-Jacques Panunzi.  - Bravo !

M. Hussein Bourgi .  - D'aucuns ont voulu voir dans la dysphorie de genre une mode ou un cheval de Troie wokiste. Pourtant, elle existe depuis la nuit des temps. Ce que la nature a fait, pendant longtemps la société l'a ignoré et psychiatrisé. Il a fallu attendre les travaux du sexologue allemand Magnus Hirschfeld au début des années 1900 pour documenter la transidentité.

Mais pendant longtemps, y compris en France, les personnes transgenres ont été considérées comme des bêtes de scène qu'on allait voir au cabaret pour s'en moquer. (Marques d'indignation à droite) Elles ont souvent été marginalisées et réduites à la prostitution.

Depuis quelques années, elles revendiquent leur droit d'être reconnues comme des citoyens à part entière. Elles ne veulent plus de thérapies de conversion ou de séances d'exorcisme. Cette proposition de loi va les lester de chaînes et de boulets.

Derrière la transidentité, il y a l'humanité qui ne doit jamais nous quitter. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du RDPI ; Mme Cathy Apourceau-Poly et M. Philippe Grosvalet applaudissent également.)

M. Bruno Retailleau .  - Je salue les propos mesurés de Cécile Cukierman.

Je ne supporte pas d'entendre caricaturer la position de mon groupe (protestations à gauche) : il n'y a pas d'un côté le camp du bien et de l'autre le camp du mal (applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains), d'un côté l'humanité et de l'autre la transphobie.

Mme Laurence Rossignol.  - Quand même !

M. Bruno Retailleau.  - Ce genre d'affirmation relève de l'insulte et d'une technique visant à verrouiller le débat. Nous ne sommes pas à l'Assemblée nationale et devons préserver ici une vraie conversation civique, où l'on échange des arguments et non des invectives caricaturales.

Pourquoi d'autres pays rétropédalent-ils ? Pourquoi n'aurions-nous pas le droit de nous interroger ?

Pas plus que Mme Cukierman ou que Mme Rossignol, je n'ai de certitudes. D'où la nécessité de la précaution, de la prudence, pour préserver des mineurs mal dans leur peau, qui ne savent pas encore s'ils sont dans une dysphorie de genre, de traitements irréversibles.

Je remercie Jacqueline Eustache-Brinio et Alain Milon d'avoir trouvé le bon équilibre.

Monsieur le ministre, arrêtez de nous caricaturer ! (Applaudissements et « Bravo ! » sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Frédéric Valletoux, ministre délégué chargé de la santé et de la prévention .  - Je crois avoir apporté, lors de la discussion générale, des éléments loin de la caricature. (On le conteste sur les travées du groupe Les Républicains.) En tout cas, vous m'avez écouté dans le calme, sans manifester.

M. Bruno Retailleau.  - Nous sommes au Sénat !

M. Frédéric Valletoux, ministre délégué.  - Je ne veux stigmatiser personne. Ce débat...

M. Bruno Retailleau.  - ... mérite d'être ouvert ! Nous avons le courage de le faire.

M. Frédéric Valletoux, ministre délégué.  - Sans doute, et je n'ai pas nié que des questions se posaient, s'agissant de mineurs. Mais il nous manque l'avis scientifique.

Monsieur le rapporteur, la HAS n'est pas là pour produire une étude scientifique de plus mais pour faire des méta-analyses, rechercher le consensus scientifique, dans la collégialité.

Sur ces sujets complexes, tant que nous n'avons pas de repères posés par les hautes autorités scientifiques...

M. Bruno Retailleau.  - Justement !

M. Frédéric Valletoux, ministre délégué.  - ... il est difficile d'imaginer que la décision politique prenne le pas sur l'analyse médicale et scientifique. C'est ce que j'ai plaidé, modestement.

Oui, ce sujet mérite qu'on l'aborde avec précaution. La temporalité n'est pas la bonne. La HAS a annoncé qu'elle poserait un cadre : attendons-le !

Monsieur le rapporteur, vous avez pris l'exemple des IVG sans consentement.

Mme Laurence Rossignol.  - Ce n'est pas la même chose !

M. Frédéric Valletoux, ministre délégué.  - Ce n'est plus un acte de prescription, mais un acte en dehors du droit. Comparons ce qui est comparable !

Avec l'article 2, la prescription serait pénalisée par principe. C'est mettre le doigt dans un engrenage dangereux. J'imagine la réponse de l'Ordre des médecins ou de la HAS...

Mme Émilienne Poumirol.  - Absolument.

Mme Mélanie Vogel .  - Non, il n'y a pas plus d'hommes trans que de femmes trans : les chiffres de la HAS disent plutôt le contraire. Non, il n'y a pas parmi les victimes de violences plus de personnes trans. Cela n'a aucun rapport.

M. Retailleau refuse d'entendre qu'il y aurait dans cet hémicycle « le camp des transphobes » et « le camp du bien ». La réalité, c'est qu'il y a, dans cet hémicycle, des personnes qui veulent priver d'accès aux soins des mineurs, et d'autres qui ne le veulent pas. (Vives protestations sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Max Brisson.  - Vous ne voulez pas les protéger !

Mme Mélanie Vogel.  - C'est la ligne de démarcation entre nous.

Cet article a pour effet de priver des mineurs d'accès à des soins nécessaires. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains : « C'est insupportable ! »)

Vous dites vouloir empêcher des traitements irréversibles et laisser le temps de la réflexion ? Mais la puberté ne se décide pas, et elle arrive avant la majorité ! Refuser l'accès aux bloqueurs de puberté, aux traitements hormonaux, a des conséquences irréversibles. Un suicide, c'est irréversible. Il n'y a pas de neutralité possible : soit ces jeunes ont accès aux soins, soit ils n'y ont pas accès. Dans les deux cas, il y a un caractère irréversible. Réfléchissez-y. (Applaudissements sur les travées du GEST ; M. Xavier Iacovelli applaudit également.)

M. Laurent Burgoa.  - Et M. Iacovelli applaudit !

M. Xavier Iacovelli.  - Et oui, cela vous pose un problème ?

M. le président.  - Amendement n°4, présenté par Mmes Silvani, Apourceau-Poly et Brulin, MM. Brossat, Bacchi, Barros et Bocquet, Mme Corbière Naminzo, MM. Corbisez et Gay, Mme Gréaume, M. Lahellec, Mme Margaté, MM. Ouzoulias et Savoldelli, Mme Varaillas et M. Xowie.

Supprimer cet article.

M. Ian Brossat.  - Le rapporteur a eu beau atténuer les dispositions les plus radicales : en réservant la prescription de bloqueurs de puberté aux services hospitaliers spécialisés et en retardant de deux ans la primo-prescription, vous portez atteinte à l'accès aux soins. Alors que 11 % des jeunes accompagnés dans une transition de genre ont eu accès à des bloqueurs de puberté après un délai de dix mois en moyenne, selon la Défenseure des droits, vous maintenez ces jeunes dans leur souffrance en retardant l'accès au traitement.

M. le président.  - Amendement identique n°8 rectifié, présenté par Mme Guillotin, MM. Grosvalet, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, M. Daubet, Mme N. Delattre, M. Fialaire, Mme Girardin, MM. Gold et Guiol, Mme Jouve, MM. Laouedj et Masset, Mme Pantel et M. Roux.

M. Philippe Grosvalet.  - Alors que nombre d'études soulignent les bienfaits de l'accès à un traitement pour les personnes en dysphorie de genre, vous allez dans le sens inverse en supprimant, ni plus ni moins, toute possibilité de transition médicale et sociale pour les mineurs.

La poursuite de l'intérêt général supérieur de l'enfant suppose que le législateur n'entrave pas les soins nécessaires à son bien-être. Les conséquences peuvent être lourdes : dépression, mutilations, pensées suicidaires, voire passage à l'acte... Les traitements hormonaux, les opérations de réassignation sexuelle, exceptionnelles, sont parfois salvateurs. De manière générale, ce parcours doit s'effectuer dans un cadre d'écoute et d'accompagnement, par du personnel formé et aguerri.

M. le président.  - Amendement identique n°32, présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Jadot, Mmes Guhl et de Marco, M. Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel.

Mme Anne Souyris.  - C'est le même.

M. Alain Milon, rapporteur.  - La commission a modifié l'article, car nous avons voulu que le ministère agrée des équipes spécialisées dans chaque région. Il en existe une quinzaine, mais qui le sait ? Les familles ne sont pas au courant. Nous demandons que le Gouvernement et les ARS en fassent la publicité pour que les parents d'enfants transgenres ne soient pas orientés n'importe comment. Il y a à Lyon une équipe qui s'en occupe très bien, mais personne ne le sait !

Avis défavorable aux amendements de suppression.

Les équipes auditionnées nous ont toutes dit qu'à raison d'une consultation toutes les six semaines, il fallait en moyenne deux ans pour avoir la certitude de diagnostic et pouvoir commencer le traitement. Ce que nous proposons n'est que le fruit de nos auditions. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Mme Jacqueline Eustache-Brinio.  - Bravo !

M. Frédéric Valletoux, ministre délégué.  - Avis favorable.

Mme Anne Souyris.  - Cet article répondrait aux inégalités territoriales ? Formidable ! Certes, il faut former des professionnels de santé pour accompagner ces jeunes - y compris en prescrivant bloqueurs de puberté et hormones -, mais ce n'est pas ce que vous proposez. S'il y a une attente de deux ans, c'est faute de place dans les centres existants !

À la demande du groupe Les Républicains, les amendements identiques nos4, 8 rectifié et 32 sont mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°203 :

Nombre de votants 322
Nombre de suffrages exprimés 315
Pour l'adoption 136
Contre 179

Les amendements identiques nos4, 8 rectifié et 32 ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°9 rectifié, présenté par Mme Guillotin, MM. Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, M. Daubet, Mme N. Delattre, M. Fialaire, Mme Girardin, MM. Gold, Grosvalet et Guiol, Mme Jouve, MM. Laouedj et Masset, Mme Pantel et M. Roux.

I.  -  Alinéas 4 à 7

Supprimer ces alinéas.

II.  -  Alinéa 10

1° Première phrase

a) Après le mot :

puberté

insérer les mots :

et de traitements hormonaux tendant à développer les caractéristiques sexuelles secondaires du genre auquel le mineur s'identifie, ainsi que la réalisation d'opérations chirurgicales de réassignation de genre

b) Remplacer les mots :

est établie

par les mots :

sont établies

2° Deuxième phrase

Remplacer les mots :

Cette prescription initiale n'est possible

par les mots :

Cette prescription initiale et la réalisation d'actes chirurgicaux ne sont possibles

Mme Véronique Guillotin.  - Amendement de repli, visant à réserver les traitements hormonaux croisés et la chirurgie de réassignation de genre sur les mineurs aux services hospitaliers spécialisés assurant une prise en charge pluridisciplinaire.

La chirurgie de réassignation sur les organes génitaux n'est de toute façon pas réalisée dans notre pays sur des mineurs ; les quelques cas de mammectomie, sur des sujets de 17 ans et demi, se justifiaient par l'équilibre bénéfice-risque, au vu du risque suicidaire.

Les RCP n'ont pas pour but de ralentir les interventions mais de les encadrer et de les sécuriser, s'agissant de sujets fragiles.

M. le président.  - Amendement n°17, présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel.

Alinéas 4 à 7

Supprimer ces alinéas.

Mme Anne Souyris.  - Le choix d'interdire la chirurgie de réassignation « sexuelle » prouve votre méconnaissance du sujet, car les opérations sur les organes génitaux sont déjà interdites avant 18 ans. Elles sont en revanche autorisées pour les personnes non trans. Seules les torsoplasties sont autorisées...

Mme Jacqueline Eustache-Brinio.  - « Seules » !

Mme Anne Souyris.  - ... à partir de 16 ans.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio.  - Seize ans !

Mme Anne Souyris.  - En réalité, elles sont réalisées en moyenne à 18,4 ans, et ne concernent qu'un jeune homme trans sur cinq.

Vous instaurez une discrimination de fait entre personnes trans et non trans. Une jeune fille de 17 ans peut faire une augmentation mammaire ! Aucune raison médicale ou éthique ne justifie que des traitements accessibles aux autres mineurs soient inaccessibles aux mineurs transgenres - sinon la transphobie.

M. le président.  - Amendement n°15, présenté par Mme Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

I.  -  Alinéas 4 à 7

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

« Art. L. 2137-1.  -  Dans le cadre de la prise en charge de la dysphorie de genre, il est interdit de réaliser sur un patient âgé de moins de dix-huit ans des actes chirurgicaux de réassignation de genre.

II.  -  Alinéa 10, dernière phrase

Supprimer cette phrase.

III. - Alinéa 11

Supprimer cet alinéa.

Mme Laurence Rossignol.  - Je le retire au profit des précédents.

L'amendement n°15 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°41, présenté par M. Milon, au nom de la commission.

Alinéas 4 et 7

Remplacer les mots :

âgé de moins de dix-huit ans

par le mot : 

mineur

M. Alain Milon, rapporteur.  - Rédactionnel.

M. le président.  - Amendement n°10 rectifié, présenté par Mme Guillotin, MM. Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, M. Daubet, Mme N. Delattre, M. Fialaire, Mme Girardin, MM. Gold, Grosvalet et Guiol, Mme Jouve, MM. Laouedj et Masset, Mme Pantel et M. Roux.

Alinéa 10, dernière phrase

Supprimer cette phrase.

Mme Véronique Guillotin.  - Supprimons le délai minimum de deux ans. Il faut déjà environ six mois pour obtenir un premier rendez-vous : dans les faits, cela ferait passer à deux ans et demi.

Les limites d'âge précises ne sont pas adaptées à un phénomène comme la puberté, qui varie selon les individus. Six mois pour un premier rendez-vous, puis environ un an de réunions avant d'entamer le traitement : on arrive à dix-huit mois de manière naturelle.

M. le président.  - Amendement n°2 rectifié, présenté par Mme Muller-Bronn, M. Bouchet, Mme Joseph, M. Dhersin, Mmes F. Gerbaud, Jacquemet, Gosselin et Demas, M. Cadec, Mme Josende, MM. Panunzi et Menonville, Mme Noël, M. Naturel, Mmes Belrhiti, Sollogoub, Pluchet et P. Martin et MM. Reynaud et Saury.

Alinéa 11

1° Première phrase

a) Après le mot :

pédiatrie

insérer les mots :

, un psychologue

b) Compléter cette phrase par les mots :

ainsi que les professionnels de santé impliqués dans la prise en charge du patient

2° Seconde phrase

Supprimer cette phrase.

Mme Laurence Muller-Bronn.  - Il s'agit de rendre obligatoire la présence d'un psychologue dans les RCP.

La commission a émis un avis défavorable au motif que je souhaitais remplacer les assistantes sociales par des psychologues : non, je veux leur présence à leurs côtés.

Une étude de 2023 sur la consultation des jeunes à la Pitié-Salpêtrière montre qu'avec une prise en charge psychologique sans prescription médicamenteuse, 80 à 90 % des jeunes se réconcilient avec le sexe de leur naissance.

M. Alain Milon, rapporteur.  - Ces amendements reviennent tous sur les modalités d'encadrement de la primo-prescription des bloqueurs de puberté adoptés par la commission.

Madame Guillotin, lorsque les équipes seront constituées, le délai de six mois avant la première consultation disparaîtra. D'où l'intérêt de conserver le délai de deux ans, demandé par les équipes.

L'amendement de Mme Muller-Bronn impose la présence d'un psychologue en RCP mais exclut l'assistant social. L'encadrement proposé par notre commission est le bon : les bloqueurs de puberté peuvent être prescrits, après expiration du délai de deux ans, pour s'assurer du consentement éclairé ; les traitements chirurgicaux et hormonaux, en partie irréversibles, sont différés à l'âge adulte.

La présence de l'assistant social en RCP éclairera les professionnels de santé sur la situation administrative du patient. N'imposons pas la présence d'autres professionnels, pour éviter d'alourdir l'organisation. Avis défavorable à tous ces amendements.

M. Frédéric Valletoux, ministre délégué.  - Par cohérence, pour ne pas pousser plus loin l'encadrement des pratiques médicales, avis défavorable sur tous ces amendements.

Mme Laurence Muller-Bronn.  - Il n'est pas question d'imposer la présence du psychologue à la place de l'assistant social, mais de la rendre obligatoire, à ses côtés.

L'amendement n°9 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°17.

L'amendement n°41 est adopté.

L'amendement n°10 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°2 rectifié.

M. le président.  - Amendement n°11 rectifié, présenté par Mme Guillotin, MM. Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, M. Daubet, Mme N. Delattre, M. Fialaire, Mme Girardin, MM. Gold, Grosvalet et Guiol, Mme Jouve, MM. Laouedj et Masset, Mme Pantel et M. Roux.

Alinéa 11

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Ces réunions peuvent se tenir en visioconférence.

Mme Véronique Guillotin.  - Je propose que les RCP puissent se tenir en visioconférence, dans un souci d'égalité territoriale et afin d'éviter le renoncement aux soins.

M. Alain Milon, rapporteur.  - Laissons les équipes s'organiser, sans l'interdire mais sans non plus le rendre obligatoire. Retrait, sinon avis défavorable.

M. Frédéric Valletoux, ministre délégué.  - Là encore, tant que la HAS ne s'est pas exprimée, je plaide contre l'encadrement des pratiques. Avis défavorable.

L'amendement n°11 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°3 rectifié, présenté par Mme Muller-Bronn, M. Bouchet, Mmes Joseph et Demas, M. Dhersin, Mmes F. Gerbaud, Jacquemet et Gosselin, M. Cadec, Mme Josende, MM. Panunzi et Menonville, Mmes Sollogoub et Pluchet, M. Naturel, Mme P. Martin, MM. Reynaud et Saury et Mme Noël.

Alinéa 12

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Les titulaires de l'autorité parentale assistent aux réunions de concertation pluridisciplinaire. Ils décident de la présence du patient aux réunions. »

Mme Laurence Muller-Bronn.  - Les parents sont souvent désemparés face à l'intensité du mal-être de leur enfant et au risque suicidaire. Il s'agit ici de les intégrer pleinement aux RCP afin qu'ils soient étroitement associés au diagnostic.

M. Alain Milon, rapporteur.  - Nous sommes évidemment favorables à ce que les parents puissent assister aux réunions, mais sans rendre cette présence obligatoire. Certains pourraient ne pas le souhaiter. Leur consentement préalable à la prescription demeurera en tout état de cause nécessaire. Retrait, sinon avis défavorable.

M. Frédéric Valletoux, ministre délégué.  - Avis défavorable.

L'amendement n°3 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°40, présenté par M. Milon, au nom de la commission.

Alinéa 13

1° Remplacer la première occurrence du mot :

Les

par les mots :

Le I n'est pas applicable aux

2° Après les mots : 

promulgation de la

rédiger ainsi la fin de cet alinéa : 

présente loi.

M. Alain Milon, rapporteur.  - Rédactionnel.

M. Frédéric Valletoux, ministre délégué.  - Sagesse.

L'amendement n°40 est adopté.

L'article 1er, modifié, est adopté.

Article 2

M. le président.  - Amendement n°5, présenté par Mmes Silvani, Apourceau-Poly et Brulin, MM. Brossat, Bacchi, Barros et Bocquet, Mme Corbière Naminzo, MM. Corbisez et Gay, Mme Gréaume, M. Lahellec, Mme Margaté, MM. Ouzoulias et Savoldelli, Mme Varaillas et M. Xowie.

Supprimer cet article.

Mme Silvana Silvani.  - La proposition de loi a suscité beaucoup d'inquiétude chez les personnes transgenres. Nous avons reçu de nombreux témoignages, y compris de parents dont l'enfant, victime de transphobie, s'était suicidé.

En tant qu'humanistes, on ne peut refuser l'accès aux soins à des personnes, ni remettre en cause le serment des médecins.

En sanctionnant la prescription d'une peine de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende, vous condamnez les jeunes transgenres soit à se tourner vers l'étranger ou vers la médecine parallèle, soit à endurer leur mal-être et subir la transphobie, et vous empêchez les médecins de faire leur travail.

M. le président.  - Amendement identique n°12 rectifié, présenté par Mme Guillotin, MM. Grosvalet, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, M. Daubet, Mme N. Delattre, M. Fialaire, Mme Girardin, MM. Gold et Guiol, Mme Jouve, MM. Laouedj et Masset, Mme Pantel et M. Roux.

Mme Véronique Guillotin.  - Il est désolant de fixer des sanctions. Les professionnels de santé le savent : les cas sont très individuels. Faudra-t-il éconduire un patient de 17 ans et demi, devant le risque de sanctions ? Je défends cet amendement de suppression avec force.

M. le président.  - Amendement identique n°14, présenté par Mme Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Mme Laurence Rossignol.  - Il a été bien défendu par le ministre.

M. le président.  - Amendement identique n°34, présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel.

Mme Anne Souyris.  - Défendu.

M. Alain Milon, rapporteur.  - Ces sanctions pénales sont à notre sens nécessaires. Le législateur a régulièrement assorti l'encadrement de prises en charge médicales de peines associées : deux ans de prison et 30 000 euros d'amende pour avoir procédé à un diagnostic prénatal ou à des activités d'assistance médicale à la procréation sans autorisation. Avis défavorable.

M. Frédéric Valletoux, ministre délégué.  - La seule interdiction de prescrire prévue dans le code de la santé publique a trait aux substances classées comme stupéfiants - et cette interdiction n'est assortie d'aucune répression. En effet, le médecin n'est libre de ses prescriptions que dans les limites fixées par la loi ; sa responsabilité civile peut être engagée uniquement sur la base d'une faute.

En votant cet article, vous ouvrez une brèche dans la conception de la prescription médicale en France. Favorable aux amendements de suppression.

Les amendements identiques nos5, 12 rectifié, 14 et 34 ne sont pas adoptés.

L'article 2 est adopté.

Article 3

Mme Laurence Muller-Bronn .  - L'article 3 est consacré aux moyens nécessaires à la pédopsychiatrie

Les chiffres sont alarmants : 1,5 million d'enfants et d'adolescents souffrent de troubles, dont 600 000 à 800 000 de troubles sévères. Selon la Drees, le nombre d'hospitalisations pour tentative de suicide ou automutilation a doublé.

Ce sujet dépasse largement la question des transitions de genre.

La surconsommation de psychotropes par les enfants doit aussi nous inquiéter, d'autant que ces prescriptions sont données hors autorisation de mise sur le marché. Cette médicalisation à outrance est impuissante face à la complexité des troubles psychiques. Plutôt que de nouveaux traitements chimiques incertains, donnons la priorité à la psychothérapie.

Les personnes qui ont pris de l'Androcur, produit par Bayer, portent plainte : cette substance, prescrite massivement aux femmes contre l'endométriose ou comme contraceptif, fait aussi partie des traitements donnés aux personnes transgenres.

M. le président.  - Amendement n°13 rectifié, présenté par Mme Guillotin, MM. Grosvalet, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, M. Daubet, Mme N. Delattre, M. Fialaire, Mme Girardin, MM. Gold et Guiol, Mme Jouve, MM. Laouedj et Masset, Mme Pantel et M. Roux.

Supprimer cet article.

M. Philippe Grosvalet.  - Par un décret du 10 février 2010, la France devenait le premier pays au monde à exclure le transsexualisme des maladies mentales. Mme Bachelot en avait fait la promesse.

La question de la psychiatrie n'a absolument rien à faire dans un texte sur les questionnements de genre. De l'eau a coulé sous les ponts en quatorze ans, mais, hélas, certains ont conservé les mêmes idées rétrogrades.

M. le président.  - Amendement identique n°16, présenté par Mme Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Mme Laurence Rossignol.  - On se demande vraiment ce que cet article fait dans ce texte.

Tout le monde est favorable à une stratégie nationale pour la santé mentale des jeunes. Le ministre vient d'ailleurs d'en présenter une. Ce que nous attendons maintenant, c'est qu'elle soit suivie d'effets.

Pourquoi lier une telle stratégie à la question des personnes transgenres plutôt que, par exemple, aux troubles alimentaires ? Est-ce au nom d'une vision plus large de la santé des enfants ?

M. Bruno Retailleau.  - Exactement !

Mme Laurence Rossignol.  - Est-ce parce que l'on considère que la transition de genre relève de la psychiatrie ? Pour éviter les malentendus, supprimons cet article !

M. Alain Milon, rapporteur.  - Je le réaffirme : nous ne considérons pas la transition de genre comme une maladie psychiatrique. Nous ne sommes pas rétrogrades, monsieur Grosvalet, bien au contraire. Mais ces questionnements entraînent une souffrance qui nécessite une prise en charge. C'est la raison de l'article 3.

L'année dernière, 13 % des enfants en école élémentaire présentaient des troubles de la santé mentale. Les hospitalisations pour geste auto-infligé - dont la tentative de suicide - ont doublé entre 2012 et 2020, puis doublé à nouveau entre 2020 et 2022.

Tout enfant doit pouvoir bénéficier d'un accès aux soins psychiatriques. Monsieur le ministre, dans le cadre de la politique conventionnelle, peut-être faut-il aussi faire en sorte qu'un acte de pédopsychiatrie soit mieux rémunéré qu'un acte de psychiatrie classique. Une consultation de psychiatrie dure une vingtaine de minutes ; pour la pédopsychiatrie, c'est deux heures !

Avis défavorable aux amendements identiques.

M. Frédéric Valletoux, ministre délégué.  - Le Gouvernement est favorable à la suppression de l'article. Cette stratégie n'a rien à faire dans cette proposition de loi. Mais je rejoins le rapporteur sur la nécessité d'une mobilisation commune pour réveiller le secteur de la santé mentale, s'agissant notamment de l'accompagnement des jeunes.

M. Bruno Retailleau.  - Madame Rossignol, si cet article fait l'objet d'un titre spécifique, c'est parce que nous ne voulions pas le lier à l'article 1er ni à l'article 2.

Mme Silvana Silvani.  - Dans ce cas, pourquoi dans ce texte ?

M. Bruno Retailleau.  - Les vecteurs possibles sont rares. Or l'enjeu est trop important ! Que fait un médecin scolaire quand il a devant lui un enfant qui se scarifie ou menace de se suicider et qu'il ne peut l'adresser à un psychologue avant trois mois ? (M. Alain Milon approuve ; protestations à gauche.)

Les amendements identiques nos13 rectifié et 16 ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°6 rectifié bis, présenté par Mme Devésa, M. Mizzon, Mme Guidez et MM. Canévet et Ravier.

Alinéa 2, première phrase

Rédiger ainsi cette phrase :

Elle a comme objectif de garantir à tout enfant ou adolescent l'accès aux soins nécessaires à la bonne prise en charge de sa santé mentale.

Mme Brigitte Devésa.  - Amendement de simplification, qui vise la bonne prise en charge de la santé mentale, définie par Santé publique France suivant trois composantes : santé mentale positive, détresse psychologique réactionnelle et troubles de durée variable.

M. Alain Milon, rapporteur.  - Avis favorable.

M. Frédéric Valletoux, ministre délégué.  - Avis défavorable.

Mme Laurence Rossignol.  - La liste des signataires de cet amendement est surprenante : quatre membres du groupe UC et le sénateur de Reconquête... Qu'en pensent nos collègues centristes ? Cela les engage-t-il tous ? (Applaudissements à gauche ; protestations à droite)

L'amendement n°6 rectifié bis est adopté.

M. le président.  - Amendement n°7 rectifié bis, présenté par Mme Devésa, M. Mizzon, Mme Guidez et MM. Canévet et Ravier.

Alinéa 3

Supprimer les mots

de manière à garantir à chaque enfant ou adolescent en souffrance psychique d'être soigné au sein de son lieu de vie ou de son lieu de soins

Mme Brigitte Devésa.  - Encore un amendement de simplification : nous supprimons la référence au lieu de vie ou de soins.

M. Alain Milon, rapporteur.  - Je comprends l'intention de Brigitte Devésa. Mais le réseau de structures territoriales doit permettre à chacun d'avoir des soins dans un lieu proche de son lieu de vie. Retrait, sinon avis défavorable.

L'amendement n°7 rectifié bis est retiré.

L'article 3, modifié, est adopté.

L'article 4 est adopté.

Vote sur l'ensemble

M. Ian Brossat .  - En écoutant nos débats, je repensais à celui du Pacs et à Christine Boutin qui s'étendait sur les souffrances des homosexuels. Muguette Jacquaint, députée de Seine-Saint-Denis, lui avait répondu : « À cause de vous ! »

Ce texte est mauvais, car il ne réduira pas les souffrances des personnes trans. Mais je suis optimiste pour l'avenir. Il y a eu des oppositions à la dépénalisation et à la dépsychiatrisation de l'homosexualité, au Pacs, au mariage pour tous : et pourtant cela s'est fait !

Les personnes trans doivent être traitées avec une dignité égale aux autres. Ce texte n'y contribue pas, mais ce temps viendra. Je souhaite qu'il vienne vite. (Applaudissements sur de nombreuses travées à gauche ; M. Philippe Grosvalet applaudit également.)

Mme Silvana Silvani .  - Je déplore que certains aient manipulé des données statistiques qui ne sont pas stabilisées. L'article 3 n'aurait rien à voir avec l'article 1er et l'article 2. Quant à l'article 4, il repose sur l'idée que, les connaissances étant susceptibles d'évoluer, il est probable que nous ayons à y revenir... Ce texte est un peu brouillon ! Ouvrir un débat, c'est une chose ; mais voter un texte sans cerner la question, c'en est une autre. À l'évidence, nous ne sommes pas prêts pour prendre une décision sur ce sujet.

M. Rémi Féraud .  - Les choses s'éclairent. Deux sortes d'arguments sont avancés à l'appui de cette proposition de loi, qui ne sont pas compatibles. Soit il n'y a pas de certitude, mais alors pourquoi légiférer dans la précipitation ? Soit il s'agit d'une démarche idéologique, fondée sur beaucoup d'ignorance et de préjugés. (Protestations à droite) Les mêmes arguments étaient employés contre le Pacs ou mariage pour tous. En réalité, vous rejetez ce que vous ne comprenez pas.

Vous n'empêcherez pas les personnes trans d'exister.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio.  - Ce n'est pas le sujet !

M. Rémi Féraud.  - Avec ce texte, vous leur rendrez la vie plus difficile.

Le problème ce ne sont pas les personnes trans, c'est la transphobie ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains) Or ce texte contribuera à alimenter une transphobie déjà forte.

Je ne retiens qu'un point positif : la position du Gouvernement, qui, après un petit flottement, est claire. J'espère que son opposition à ce texte sera durable. (Applaudissements à gauche)

Mme Mathilde Ollivier .  - Mme Devésa nous dit que les jeunes trans doivent attendre, mais les bloqueurs de puberté réduisent de 45 % les risques de suicide et de dépression ! Empêcher ces soins, c'est augmenter les risques pour leur santé - le rapport de la Défenseure des droits le montre.

Je déplore la dérive réactionnaire de la droite républicaine...

M. Olivier Rietmann.  - C'est reparti pour les insultes !

Mme Mathilde Ollivier.  - ... et d'une partie du groupe UC, qui rejoignent l'extrême droite.

M. Joshua Hochart .  - Ce texte va dans le même sens que celui de Joëlle Mélin et du groupe RN à l'Assemblée nationale.

M. Xavier Iacovelli.  - Eh oui !

M. Hussein Bourgi.  - Nous y voilà !

M. Joshua Hochart.  - Beaucoup d'enfants et d'adolescents peuvent traverser des doutes, dont ils croient parfois que la cause est la transidentité. Il faut les accompagner vers un choix éclairé et libre de toute contrainte à leur majorité. La vraie menace contre les personnes trans, mais aussi les personnes homosexuelles, c'est l'immigration massive ! (Nombreuses marques d'indignation à gauche)

Mme Marie-Do Aeschlimann .  - Sur ce sujet grave, nous remercions Jacqueline Eustache-Brinio pour son travail de documentation qui débouche sur une position équilibrée, ainsi que le rapporteur Alain Milon qui a fait progresser le texte.

En aucun cas nous ne prenons position contre les personnes transgenres. Nous respectons profondément chacune et chacun. La finalité de ce texte est de protéger les mineurs en évitant des décisions irréversibles qu'ils pourraient regretter.

Nous prenons nos responsabilités. Avec le temps, nous verrons que ce débat était nécessaire. Le groupe Les Républicains votera ce texte avec sérieux et détermination. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Philippe Tabarot.  - Bravo !

M. Daniel Chasseing .  - Dans les mots du rapporteur, que je connais de longue date et qui est un humaniste, je n'ai pas perçu d'idéologie, mais une bienveillance vis-à-vis de jeunes qui cherchent leur identité, souvent dans la souffrance. (Mme Christine Bonfanti-Dossat renchérit.)

Cette proposition de loi ne nie pas les personnes trans, ni leur besoin de traitements hormonaux ou de bloqueurs de puberté ; nous voulons éviter des effets irréversibles, comme la stérilité.

Les adolescents sont fragiles ; ils ont besoin d'un meilleur accompagnement psychologique, voire psychiatrique dans certains cas.

Je n'ai pas voté pour l'article 2, qui devrait être modifié en CMP. Même si l'article 3 n'a pas de rapport avec le texte, le sujet est très important.

Personnellement, je voterai ce texte. (Marques de satisfaction à droite)

M. Yan Chantrel .  - Nous voterons contre cette proposition de loi ultra-idéologique et violente, nourrie des contre-vérités du rapport Les Républicains, qui n'est que la projection de vos fantasmes identitaires. (Sarcasmes à droite)

Monsieur Retailleau, voilà qui en dit long sur votre groupe : vous confiez systématiquement la responsabilité de ces sujets à des parlementaires marginaux sur ces questions et outranciers dans leurs propos...

Finalement, rien n'a changé à droite. Vous avez toujours été dans le camp de la réaction : ceux qui ont combattu la dépénalisation de l'homosexualité, le Pacs et le mariage pour tous ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Max Brisson s'indigne.)

La transidentité ne se combat pas ; elle s'écoute et s'accompagne avec le souci du bien-être des jeunes.

Mme Olivia Richard .  - Le groupe centriste est partagé sur ce texte. Je comprends les interrogations de certains sur le calendrier de cet examen, alors que le texte fait attendre les jeunes depuis deux ans : le temps est visiblement relatif...

Seuls 1 % des jeunes concernés estiment avoir pris une mauvaise décision ; pour la chirurgie esthétique, le taux de regret atteint parfois 35 % !

Je me mets à la place des parents qui doivent accompagner des adolescents trans ; je préfère ceux qui les accueillent à ceux qui les mettent à la rue, car cela existe. (Mme Christine Bonfanti-Dossat proteste.)

À titre personnel, je voterai contre le texte. (Mme Anne-Sophie Romagny abonde ; applaudissements à gauche et sur les travées du RDSE et du RDPI)

Mme Anne-Sophie Romagny .  - En ce qui me concerne, je me suis posé beaucoup de questions. Le message d'un papa m'a émue et éclairée, je vous le livre donc.

« La question clé est : mon enfant peut-il attendre sa majorité pour prendre en charge sa transidentité ? Aucun parent n'accueille une telle situation en sautant de joie, mais un parent responsable n'a qu'un souci : le bien-être de son enfant. Aujourd'hui, mon enfant rit à nouveau, ses résultats scolaires sont redevenus excellents. Il peut se tromper, mais la vie n'est jamais certaine. Cette affirmation de soi est déstabilisante mais aussi impressionnante à un si jeune âge. » (Applaudissements à gauche et sur les travées du RDSE et du RDPI)

Mme Mélanie Vogel .  - Je me suis engagée à lire ici le message de la mère d'une petite fille trans. (Murmures à droite)

« Je vous écris en tant que mère inquiète. Je vous demande de ne pas voter cette loi, amendée ou pas, car elle met en danger nos enfants, les condamne à l'attente. Nos enfants ont besoin de professionnels formés à la transidentité. Ayez la sagesse de vous en remettre à notre expérience qui confirme la position de la Défenseure des droits.

Nos enfants méritent de vivre dans la dignité. Le choix vous appartient : les reconnaître ou les condamner à des années de détresse. J'ai envie que mon enfant continue à me dire : regarde comme je suis belle ! » (Applaudissements sur les travées du GEST)

Mme Anne Souyris .  - Pourquoi examinons-nous un tel texte sans avis de la HAS ? Il est porteur de discrimination de facto, puisqu'il interdit des pratiques aux trans mais pas aux cis. (Ironie à droite) Je parle des cis-genres.

Ce texte est ascientifique. Il ne part pas de la réalité que les jeunes vivent, que les soignants vivent. Il a été proposé pour complaire à une minorité qui s'égare du côté de l'extrême droite et que d'aucuns cherchent à récupérer. J'espère qu'il ne passera pas à l'Assemblée nationale. (Applaudissements sur les travées du GEST)

Mme Muriel Jourda .  - Vous nous avez lu des textes de parents d'enfants qui veulent transitionner, et c'était émouvant. Nous pourrions vous lire des textes de parents d'enfants qui veulent détransitionner, et ce serait tout aussi émouvant. Que chacun vote en son âme et conscience, mais abstenez-vous d'être aussi péremptoires. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales .  - Le texte ne nie pas la dysphorie de genre, ne porte aucun jugement. Il prévoit des outils d'accompagnement dans la durée, car il faut éviter des actes irréversibles.

On évoque la HAS : habituellement, on doit attendre son avis pour pratiquer des actes ; nous disons qu'il faut attendre son avis et suspendre la pratique d'actes dans cette attente. Nous prévoyons une revoyure dans cinq ans. C'est une position guidée par la prudence.

Beaucoup d'arguments de bonne tenue ont été avancés. Mais considérer qu'il y aurait, d'un côté, les transphobes et, de l'autre, les défenseurs des trans n'est pas honnête.

Il faut voter cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

À la demande du groupe Les Républicains et du RDPI, la proposition de loi est mise aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°204 :

Nombre de votants 324
Nombre de suffrages exprimés 316
Pour l'adoption 180
Contre 136

La proposition de loi est adoptée.

(Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Prochaine séance, mercredi 29 mai 2024, à 15 heures.

La séance est levée à minuit vingt-cinq.

Pour le Directeur des Comptes rendus du Sénat,

Rosalie Delpech

Chef de publication

Ordre du jour du mercredi 29 mai 2024

Séance publique

À 15 heures, à 16 h 30 et le soir

Présidence : M. Gérard Larcher, président, Mme Sylvie Robert, vice-présidente, Mme Sylvie Vermeillet, vice-présidente.

Secrétaires : Mme Alexandra Borchio Fontimp, M. Guy Benarroche.

1. Questions d'actualité

2. Débat sur le thème : « Le contrôle des investissements étrangers en France comme outil d'une stratégie d'intelligence économique au service de notre souveraineté »

3. Proposition de loi ouvrant la possibilité de concilier une activité professionnelle avec la fonction d'assistant familial, présentée par M. Xavier Iacovelli (texte de la commission, n°618, 2023-2024)

4. Débat sur le thème : « La France a-t-elle été à la hauteur des défis et de ses ambitions européennes ? » (demande du groupe SER)