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Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.


Table des matières



Décès d'un ancien sénateur

Dématérialisation de l'état civil (Procédure accélérée)

Discussion générale

Mme Samantha Cazebonne, auteure de la proposition de loi

M. Christophe-André Frassa, rapporteur de la commission des lois

M. Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

M. Dany Wattebled

Mme Olivia Richard

Mme Mélanie Vogel

M. Ian Brossat

Mme Annick Girardin

M. Ludovic Haye

Mme Hélène Conway-Mouret

M. Ronan Le Gleut

M. Aymeric Durox

Mme Évelyne Renaud-Garabedian

Discussion des articles

Article 1er

M. Yan Chantrel

Article 2

Vote sur l'ensemble

Mme Mathilde Ollivier

Mme Olivia Richard

Accord en CMP

Ordonnance de protection (Procédure accélérée)

Discussion générale

Mme Sarah El Haïry, ministre déléguée chargée de l'enfance, de la jeunesse et des familles

Mme Dominique Vérien, rapporteure de la commission des lois

Mme Olivia Richard

Mme Mélanie Vogel

Mme Evelyne Corbière Naminzo

M. Michel Masset

M. Thani Mohamed Soilihi

Mme Laurence Harribey

Mme Elsa Schalck

M. Dany Wattebled

Mme Laurence Rossignol

Mme Marie-Do Aeschlimann

Mme Alexandra Borchio Fontimp

Discussion des articles

Article 1er

Demande de priorité

Mme Laurence Rossignol

Discussion des articles (Suite)

Après l'article 1er

Article 1er bis

Article 2

Article 3

Vote sur l'ensemble

Mme Annick Billon

Mme Muriel Jourda

Mme Olivia Richard

Financement des entreprises et attractivité de la France (Procédure accélérée)

Discussion générale

M. Roland Lescure, ministre délégué chargé de l'industrie et de l'énergie

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur de la commission des finances

M. Louis Vogel, rapporteur pour avis de la commission de lois

M. Thomas Dossus

M. Éric Bocquet

M. Michel Masset

M. Bernard Buis

M. Rémi Féraud

Mme Christine Lavarde

M. Christopher Szczurek

M. Jean-Luc Brault

M. Michel Canévet

Mme Florence Blatrix Contat

M. Olivier Rietmann

M. André Reichardt

Discussion des articles

Article 1er

Après l'article 1er

Article 2

Après l'article 2

Article 2 bis

Article 2 ter

Après l'article 2 ter

Article 2 quater

Article 2 quinquies

Article 3

Après l'article 3

Article 4

Article 5

Après l'article 5

Article 5 bis

Après l'article 5 bis

Article 8

Article 10

Article 10 bis A

Article 10 quater (Supprimé)

Après l'article 10 quinquies

Article 11 bis

Article 12

Article 13

Après l'article 14

Ordre du jour du mercredi 15 mai 2024




SÉANCE

du mardi 14 mai 2024

85e séance de la session ordinaire 2023-2024

Présidence de Mme Sylvie Robert, vice-présidente

Secrétaires : M. Jean-Michel Arnaud, Mme Catherine Conconne.

La séance est ouverte à 14 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu intégral publié sur le site internet du Sénat, est adopté.

Décès d'un ancien sénateur

Mme la présidente.  - J'ai le regret de vous faire part du décès de notre ancien collègue Gérard César...

M. Jean-Baptiste Lemoyne.  - Hélas !

Mme la présidente.  - ... qui fut sénateur de la Gironde de 1990 à 2017.

Le Président du Sénat lui rendra hommage au début de notre séance de questions d'actualité au Gouvernement ce mercredi.

Dématérialisation de l'état civil (Procédure accélérée)

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi visant à poursuivre la dématérialisation de l'état civil du ministère de l'Europe et des affaires étrangères, présentée par Mme Samantha Cazebonne et plusieurs de ses collègues.

Discussion générale

Mme Samantha Cazebonne, auteure de la proposition de loi .  - (Applaudissements sur les travées du RDPI ; Mme Olivia Richard applaudit également.) En 2019, le ministère de l'Europe et des affaires étrangères a lancé l'expérimentation de la dématérialisation de l'état civil, à la suite du vote de la loi Essoc. (M. Jean-Baptiste Lemoyne le confirme.) Le présent texte pérennise ce dispositif d'une part et poursuit l'expérimentation d'autre part.

Je tiens à remercier la commission des lois d'avoir soutenu ce texte, et le rapporteur pour son travail.

M. Jean-Baptiste Lemoyne.  - Excellent !

Mme Samantha Cazebonne.  - Chantier prioritaire du Gouvernement, la dématérialisation a montré ses bénéfices pour les usagers, l'administration et les officiers de l'état civil.

Sur le territoire national, les fonctions d'état civil sont exercées par les maires ; à l'étranger, ce sont les chefs de missions diplomatiques, les chefs de postes consulaires et le service central d'état civil. Ce projet de registre d'état civil électronique concerne tous les Français nés, résidant ou ayant vécu à l'étranger.

Au vu des bénéfices constatés, tant pour les usagers que pour l'administration, l'article 1er vise à inscrire dans le droit commun la dématérialisation de la délivrance d'un extrait d'acte d'état civil.

L'article 2 prolonge l'expérimentation en ce qui concerne l'établissement, la mise à jour et la conservation des actes d'état civil, et permet la création d'actes dématérialisés ayant même valeur juridique qu'un document papier. En application de l'article 40 du code civil, l'authenticité d'un acte dépend de la signature manuscrite d'un officier d'état civil. Cette expérimentation doit être prolongée de trois ans, afin de disposer d'un état civil dématérialisé offrant à l'usager un service plus simple et plus efficace.

Pour nous, Français de l'étranger, c'est un progrès considérable. Le délai pour obtenir un acte d'état civil est passé de quinze -  voire trente  - jours à deux jours ! L'adhésion à cette réforme est de 95 %. Aujourd'hui, il faut prendre rendez-vous au consulat pour déposer son dossier ou l'envoyer par courrier : avec l'article 2, la démarche pourra être faite en ligne, de façon sécurisée et instantanée. Les actes d'état civil consignés à l'étranger devaient être transportés jusqu'au service central d'état civil de Nantes ; cette étape contraignante et coûteuse sera supprimée.

Les avantages de ce projet sont importants pour l'administration, avec un retour sur investissement supérieur à 1,3 million d'euros par an et qui devrait dépasser 1,5 million d'euros.

Des amendements visant à prévenir la fracture numérique ont été déposés. Les usagers qui le souhaitent pourront toujours obtenir des actes sous format papier et en faire la demande par courrier. En 2023, plus de 80 000 demandes ont été reçues par courrier, contre 1,1 million par voie numérique. Le service central de Nantes reste joignable par téléphone. Il n'y a donc pas de rupture d'égalité.

En outre, une analyse de risques a conclu à l'absence de risque supplémentaire de sécurité lié à la dématérialisation.

Cette dématérialisation constituera une avancée pour le ministère, mais surtout pour nos compatriotes établis hors de France. C'est pour eux que je vous invite à voter cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du RDPI et sur quelques travées du groupe UC ; Mme Marie Mercier applaudit également.)

M. Christophe-André Frassa, rapporteur de la commission des lois .  - En 2018, le législateur a autorisé le ministère de l'Europe et des affaires étrangères à déroger au cadre général de traitement des actes d'état civil pour mener une ambitieuse réforme de dématérialisation, que Pascale Gruny et Jean-Claude Luche avaient alors jugée pertinente. Cette réforme concernait les quatre composantes du traitement de l'état civil : établissement, mise à jour, délivrance et conservation.

Cette expérimentation devait être permise par la loi, car le cadre général de l'état civil demeure régi par le principe du support papier.

Sa durée avait été fixée à trois ans, mais le délai n'a pas été tenu et la loi 3DS a accordé deux ans supplémentaires. Malheureusement, au 10 juillet 2024, l'expérimentation ne sera toujours pas achevée pour trois des quatre composantes, en dépit d'un budget de 11,35 millions d'euros, bien supérieur au coût initialement estimé, de 5 millions d'euros.

Seule la délivrance a été pleinement dématérialisée depuis le 12 mars 2021. Les autres volets nécessitent encore des développements informatiques, au moins jusqu'à la fin 2025. Les deux rapports d'évaluation remis au Parlement en mars 2022 et décembre 2023 n'ont pu dresser de bilan pour ces trois composantes, mais font état d'un bilan positif pour la délivrance, diagnostic que nous partageons.

Sur les 1,2 million de demandes formulées en 2023, seuls 0,3 % ont fait l'objet d'une demande d'impression.

La dématérialisation simplifie les démarches de l'usager et raccourcit les délais de délivrance, ce qui est précieux pour ceux qui résident loin du consulat. Le taux de satisfaction est de 8,7 sur 10.

Les économies pour l'administration sont substantielles, avec plus de 1,3 million d'euros de dépenses évitées et la suppression de onze équivalents temps plein (ETP) en 2021. Il en va du bon usage des deniers publics, cher à notre assemblée.

Les officiers d'état civil adhèrent progressivement au projet.

Que le GEST et le groupe SER soient rassurés, la remise des copies ou d'extraits d'actes sur support papier reste autorisée.

L'expérimentation est prorogée de trois ans jusqu'au 10 juillet 2027, soit une durée totale de huit ans, contre trois initialement prévus.

La commission des lois approuve ce projet et vous invite à faire de même : la dématérialisation est massivement utilisée par nos concitoyens, aucun dysfonctionnement majeur n'est à déplorer et le texte n'exclut pas les usagers éloignés du numérique.

Mais la commission est plus réservée sur la durée globale de l'expérimentation et souhaite que cette prorogation soit la dernière.

Pour assurer la transparence sur l'état d'avancement, la commission a prévu qu'un bilan soit présenté devant l'Assemblée des Français de l'étranger. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger .  - (Applaudissements sur les travées du RDPI) Je remercie Samantha Cazebonne d'avoir présenté ce texte et salue le travail du rapporteur.

Il s'agit de poursuivre l'expérimentation menée par le ministère de l'Europe et des affaires étrangères depuis 2019 qui, sans vote du Parlement, s'achèverait le 10 juillet prochain.

Cette expérimentation vise à dépoussiérer notre vieil état civil, à libérer les Français du carcan bureaucratique et à en finir avec des coûts administratifs excessifs. Avec la signature électronique, le papier n'est désormais plus nécessaire pour garantir l'authenticité d'un document.

Dématérialiser l'état civil est cependant un chantier complexe. La sensibilité des données imposait de prendre toutes les garanties nécessaires. Le choix d'une expérimentation, portée par le ministère de l'Europe et des affaires étrangères, s'est imposé. Avec le vote par internet ou encore le renouvellement à distance des passeports, il est le laboratoire du service public de demain ! Le ministère détient en outre le plus grand fonds d'actes d'état civil de France, avec plus de 16 millions d'actes conservés au service central d'état civil de Nantes.

Ce projet de création d'un registre d'état civil électronique a fait partie des projets prioritaires du premier quinquennat : 4,8 millions d'euros y ont été consacrés, issus notamment du fonds pour la transformation de l'action publique et de France Relance.

Il est temps de faire un premier bilan.

Un rapport d'évaluation, remis début 2024, souligne que la délivrance dématérialisée a permis des économies importantes : onze postes et environ 1,3 million d'euros par an.

Cette mesure est aussi un progrès pour les usagers. Le courrier pouvait mettre plus de quinze jours pour arriver à un Français résidant à l'étranger, quand il arrivait ! La dématérialisation assure l'égalité de traitement, avec un délai de réception des actes de trois jours en moyenne pour ceux qui résident à l'étranger. En 2023, plus de 93 % d'entre eux ont eu recours à la dématérialisation ; depuis 2021, plus de 2,5 millions de documents signés électroniquement leur ont été délivrés. Le bilan de ce premier volet de l'expérimentation est donc sans appel et son entrée dans le droit commun est indispensable.

Sur le second volet de l'expérimentation, le bilan est prometteur. Des développements informatiques sont encore nécessaires. Le chantier a été plus long que prévu, en raison de la crise sanitaire, de complexités techniques et de la sensibilité des données, que nous tenons à protéger : cloisonnement, réplication, traçage des accès et des modifications.

Trois années supplémentaires suffiront pour achever l'expérimentation et mener les développements nécessaires dans l'ensemble du réseau consulaire. L'outil proposé sera performant et permettra de nouveaux redéploiements d'effectifs au sein du ministère.

Cette expérimentation ambitieuse, suivie de près par le ministre Stéphane Séjourné, doit être poursuivie au-delà du 10 juillet prochain, conformément à l'objectif du Président de la République et du Premier ministre de simplifier les démarches administratives de tous les Français. (Applaudissements sur les travées du RDPI ; Mmes Olivia Richard et Sylvie Vermeillet applaudissent également.)

M. Dany Wattebled .  - La dématérialisation des actes d'état civil est un enjeu essentiel de simplification.

L'expérimentation menée depuis 2019 supprime l'obligation de se déplacer. Elle a d'ores et déjà porté ses fruits : les démarches sont plus simples et plus rapides. Les délais de délivrance des documents sont réduits et la procédure est traçable. Nos institutions doivent s'adapter à notre époque dont flexibilité, fiabilité et simplicité sont les maîtres mots.

La délivrance dématérialisée doit toutefois n'être qu'une possibilité, non une obligation. Je pense notamment aux personnes âgées, qui souhaitent conserver un accès aux guichets.

La proposition de loi met la technologie au service de nos concitoyens, afin de simplifier leur quotidien et de diminuer la lourdeur administrative.

Reste un enjeu essentiel : la sécurisation des données personnelles, dans un contexte d'attaques contre les institutions publiques. Nous avons toute confiance dans le système actuel, très encadré. La signature électronique empêche toute contrefaçon. Aucun dysfonctionnement important n'a été relevé ces dernières années.

Le texte a été modifié en commission des lois pour l'adapter aux besoins de nos concitoyens et des services. Je salue notamment l'amendement du rapporteur prévoyant la présentation annuelle d'un bilan d'étape devant l'Assemblée des Français de l'étranger.

Le rapporteur a souligné les économies permises par cette expérimentation qui s'inscrit dans le choc de simplification que nous appelons de nos voeux. C'est une avancée pour nos concitoyens, en particulier les Français de l'étranger, et pour les agents des ministères.

Le groupe INDEP votera ce texte utile avec grand plaisir. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Mme Olivia Richard .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) C'est avec joie que je m'exprime sur un texte qui concerne les Français établis hors de France.

Laboratoire de nombreuses actions de simplification, la France établie à l'étranger est résolument numérique. Dès 2003, les Français établis hors de France ont franchi le Rubicon de la dématérialisation, avec le vote par correspondance électronique. Je salue avec émotion Robert del Picchia, sénateur des Français établis hors de France de 1998 à 2021, père du vote par internet, avec qui j'ai eu l'honneur de travailler pendant vingt ans. Il souhaitait rapprocher l'urne de l'électeur, pour rapprocher l'électeur de la France.

Les réticences étaient fortes alors - elles le sont toujours -, mais la volonté politique sans faille du président Chirac a permis l'adoption d'une loi en mars 2003, à l'unanimité des deux chambres. Espérons qu'il en ira de même pour cette proposition de loi !

Son adoption rapide permettra au service central d'état civil de Nantes de continuer à délivrer aux Français de l'étranger les copies ou extraits d'actes d'état civil de façon dématérialisée.

Merci à notre rapporteur pour son travail éclairant.

Notons que seule la délivrance des actes est actuellement dématérialisée, à l'exclusion de l'établissement, de la mise à jour et de la conservation des actes.

Ce chantier de modernisation et de simplification administratives, plein de bon sens, satisfait les usagers. Dans certains pays, les services postaux sont inexistants.

Certes, le coût du projet est plus élevé que prévu, mais cette dématérialisation est un investissement pour l'avenir.

Certains redoutent que ce projet ne laisse de côté les usagers peu à l'aise avec le numérique -  je pense aux retraités qui ne parviennent pas à fournir un certificat d'existence, ou au service d'identité numérique de La Poste, souvent défaillant. La dématérialisation doit être facteur d'accessibilité, non d'exclusion.

L'administration consulaire est fière de ce chantier-pilote, qui donne une image dynamique de la France à l'étranger. Depuis 2019, à chaque session de l'Assemblée des Français de l'étranger, les ministres chargés des Français de l'étranger s'en sont fait l'écho.

Notre rapporteur a souhaité que l'Assemblée des Français de l'étranger soit informée de l'état d'avancement de la réforme. C'est bien, mais est-ce suffisant ? Cette assemblée ne rassemble que 20 % des conseillers des Français établis à l'étranger qui, contrairement aux autres élus locaux, ne disposent d'aucun moyen pour exercer leur mandat. Je regrette que tous les élus des Français établis hors de France ne soient pas membres à part entière de l'Assemblée des Français de l'étranger.

L'expérimentation prend plus de temps que prévu, mais elle ouvre la voie à la dématérialisation des actes d'état civil en France également. Je remercie Franck Riester et ses équipes ainsi que Pauline Carmona et tous les agents concernés.

En moins d'un an, les grands chantiers de simplification de l'administration consulaire ont été relancés avec pragmatisme : France Consulaire est un progrès ; l'expérimentation pour le renouvellement dématérialisé des passeports est aussi à saluer.

Le groupe UC votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et du RDPI)

Mme Mélanie Vogel .  - Je remercie Samantha Cazebonne pour son initiative ainsi que Christophe-André Frassa pour son travail.

Lorsque vous vivez à l'étranger, le contact avec les autorités françaises peut être très compliqué. Les déclarations de naissance doivent se faire au consulat. Si vous vivez à Manakara, à Madagascar, il faut prendre rendez-vous au consulat à Antananarivo, soit une journée entière de trajet !

La dématérialisation des démarches facilitera la vie des Français établis hors de France. L'expérimentation a montré que l'envoi des actes d'état civil pouvait se faire en ligne. Mathilde Ollivier et moi le saluons.

Malheureusement, c'est le seul volet qui a vu le jour, alors que l'expérimentation est en cours depuis quatre ans. Si elle n'était pas prolongée au-delà du 10 juillet, on fermerait la porte à un progrès notable pour les usagers -  alors que la Belgique et l'Italie y procèdent déjà.

Pourquoi un tel retard ? Selon moi, cela tient au manque de moyens. Le retard dans les développements informatiques s'explique par la réaffectation des informaticiens à d'autres tâches. Il aurait fallu embaucher. Or on a choisi d'annuler des crédits budgétaires...

Nous craignons que la dématérialisation ne serve de prétexte à la suppression de postes, alors qu'il faudrait plutôt investir dans l'accompagnement individuel des Français de l'étranger.

Il faut aussi veiller à l'accessibilité et à la fiabilité de l'état civil du ministère de l'Europe et des affaires étrangères. Nous présenterons plusieurs amendements en ce sens.

Le rôle de l'Assemblée des Français de l'étranger a été conforté - c'est bien.

Avec cette dématérialisation, nos compatriotes de l'étranger seront à l'avant-garde de mutations de l'action publique qui profiteront ensuite à tous les Français. Sans réserve, le GEST votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du GEST et du RDPI)

M. Ian Brossat .  - Le retour d'expérience sur cette réforme phare du ministère nous permet d'en évaluer les atouts, mais aussi les limites.

Nous reconnaissons bien volontiers les mérites de cette démarche, qui apporte une solution concrète à nos compatriotes éparpillés aux quatre coins du monde.

Toutefois, comme le rappelle fréquemment la Défenseure des droits, la dématérialisation n'est pas une démarche anodine. Le service public doit être accessible à tous. Or la dématérialisation accroît les inégalités et isole les personnes les plus éloignées du numérique.

S'y ajoutent d'autres inégalités : certaines régions du globe ont un accès limité à internet et plusieurs pays restreignent l'accès à des sites pourtant essentiels.

En outre, les services publics, même numériques, doivent être de qualité. Or le logiciel utilisé par les services d'état civil du ministère a connu plusieurs défaillances, allant jusqu'à la disparition de certains actes. Lors de la panne d'octobre 2023, les demandes d'extrait ou de copie d'actes en ligne ont été interrompues pendant plusieurs jours... Pourtant, le même logiciel continue à être utilisé.

La réforme ne peut en outre se faire sur le dos du personnel du ministère. Onze ETP ont été supprimés, et près de vingt ETP supplémentaires sont susceptibles de l'être. Si certains postes sont moins sollicités, d'autres doivent être créés pour accompagner les usagers et les agents face à ces évolutions technologiques.

La dématérialisation répond indéniablement à un besoin des usagers, mais elle ne doit pas se faire au détriment de la qualité et de l'accessibilité du service public.

Mme Annick Girardin .  - (Applaudissements sur les travées du RDSE) L'expérimentation est bénéfique sur les plans écologique, administratif et financier. Elle rencontre un franc succès : depuis mars 2021, plus de 2,5 millions de documents d'état civil dématérialisés ont été délivrés. Que de temps gagné, de tracasseries épargnées et d'arbres sauvés ! Ainsi, plus de 1,2 million d'euros ont été économisés chaque année. Les démarches des usagers ont été simplifiées. Les délais de délivrance des copies ont été réduits.

L'expérimentation a été reconduite jusqu'en juillet 2024. Or une nouvelle reconduction est nécessaire pour finaliser la démarche. La proposition de loi est donc bienvenue et le RDSE la soutient, comme nous avions soutenu la réforme de la loi Essoc.

Nous approuvons les orientations du rapporteur. Cette expérimentation doit être la dernière et le ministère doit déployer rapidement les outils attendus, car les retards nuisent, en premier lieu, aux usagers.

Le souhait du rapporteur d'un débat sur la mise en oeuvre de l'expérimentation, suivi d'un vote consultatif, va dans le sens d'une plus grande transparence.

N'oublions pas l'importance de sécuriser les démarches et d'améliorer l'accueil des usagers lorsque leur présence physique reste nécessaire. Le RDSE soutient les objectifs de simplification et de réduction des coûts, mais cela ne doit pas éloigner l'administration de son public.

L'an dernier, le Sénat a voté à l'unanimité une proposition de résolution du RDSE pour l'accessibilité de tous aux services publics. C'est à cette condition que le RDSE votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du RDSE)

M. Ludovic Haye .  - Je remercie Samantha Cazebonne pour le travail réalisé.

La dématérialisation des actes d'état civil est un sujet clé pour les Français de l'étranger, car elle les rapproche de l'État. C'est aussi une réforme de bon sens, qui devrait leur faciliter la vie.

L'expérimentation, dont je remercie M. le ministre d'avoir retracé l'historique, est un succès incontestable, avec des économies pour l'administration et une simplification des démarches pour les usagers. L'observatoire de la qualité des démarches en ligne évalue le taux de satisfaction des usagers à 8,7 sur 10.

L'article 1er, qui pérennise dans le code civil la dématérialisation de la délivrance des copies et des extraits d'actes, inscrit dans la loi un dispositif qui fonctionne.

Le vaste changement de paradigme que représente le reste de l'expérimentation explique le retard pris. L'amendement qui associe l'Assemblée des Français de l'étranger au suivi de l'expérimentation va dans la bonne direction, car les Français de l'étranger sont les meilleurs juges de cette réforme.

La prolongation de l'expérimentation jusqu'en 2027 est nécessaire, afin de permettre au ministère de l'Europe et des affaires étrangères de disposer d'un état civil complet, fonctionnel et facile d'accès. Il a déjà tant investi dans ce projet qu'il serait absurde d'y mettre fin maintenant.

La fracture numérique et la cybersécurité sont deux enjeux majeurs. Le maintien d'un service à Nantes, qui répond au téléphone et adresse des copies d'actes par courrier, constitue une ligne rouge. Le Gouvernement nous a rassurés sur ce point.

La dématérialisation pèse sur les systèmes d'information et de communication du ministère. Toutefois l'analyse des risques n'a pas relevé de risque de sécurité supplémentaire.

Ce projet est cohérent avec l'effort de simplification voulu par les Français. À l'heure du numérique, mettons fin à une administration bureaucratique croulant sous les formulaires papier ! D'autres chantiers seront ensuite menés, pour autant de moyens économisés.

Le RDPI votera le texte. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Mme Hélène Conway-Mouret .  - Je remercie Samantha Cazebonne d'avoir défendu cette proposition de loi. Son premier objectif est de dématérialiser la délivrance des copies intégrales et extraits d'actes d'état civil, ce qui simplifiera indéniablement la vie des Français de l'étranger, alors que nombre d'entre eux sont aujourd'hui tributaires de l'avion ou d'aléatoires tournées consulaires. L'expérimentation a été utile, car 2,5 millions d'actes dématérialisés ont été délivrés depuis 2021.

Second objectif : proroger l'expérimentation du registre d'état civil électronique qui existe depuis cinq ans. Son coût, qui s'élève déjà à 5 millions d'euros, devrait doubler.

Malgré une prolongation, les retards demeurent. Est-ce dû à un manque de personnel ou d'investissement ? Près de 61 % de ses coûts ont été cofinancés, notamment avec le programme budgétaire 151, alors que nous dénonçons chaque année le manque de moyens des services consulaires. Les onze ETP supprimés n'auraient-ils pu être redéployés ?

Sur le fond, nous sommes favorables à cette prolongation, en espérant que ce soit la dernière. C'est pourquoi le groupe SER demandera que le Gouvernement transmette au Parlement le point d'étape fait à l'Assemblée des Français de l'étranger, au titre de notre mission de contrôle.

Comme d'autres groupes, nous avons dénoncé le recours outrageux aux ordonnances depuis 2019, sans avis du Conseil d'État ni étude d'impact - laquelle a pour avantage d'informer le Parlement, mais pour inconvénient de pouvoir être opposée au Gouvernement...

L'excellent rapport de Christophe-André Frassa (l'intéressé apprécie) révèle les deux écueils du coût et du temps : un dérapage de 100 % et un retard de trois ans et demi depuis la loi Essoc -  voilà l'effet du recours aux ordonnances ! Cela étant, ce texte modernise les services rendus aux Français de l'étranger ; à nous de nous en saisir.

Le premier chantier doit être de régler les difficultés de connexion. En attendant France Identité, nombre de nos compatriotes sont confrontés à un parcours du combattant. Beaucoup n'ont pas de numéro fiscal ou de sécurité sociale, et l'identité numérique de La Poste ne reconnaît pas le numéro de téléphone de 20 % des usagers. Les retraités sont dans une impasse, car leur espace dépend de France Connect. Monsieur le ministre, sans résoudre ce dysfonctionnement majeur, la modernisation sera une fausse simplification. Avant de dématérialiser davantage, garantissons les services de base.

Deuxième chantier prioritaire : le renouvellement à distance des cartes d'identité et des passeports. Votre ministère a lancé une expérimentation au Canada et au Portugal, qui répond à une forte demande. Au Royaume-Uni, les documents arrivent en 48 heures ! Certains binationaux vont jusqu'à renoncer à leur passeport...

Cette expérimentation gagne à être élargie : 50 % des demandes au Portugal concernent les passeports et les cartes d'identité ; or celles-ci sont hors du champ de l'expérimentation.

Comment ne pas évoquer, à quelques semaines des élections européennes, la procuration et le vote électronique ? Trop peu en bénéficient du fait de leur éloignement : ils ne peuvent donc exercer leur droit constitutionnel d'élire leurs représentants. Où en est la réflexion, commune avec le ministère de l'intérieur, sur un service de gestion en ligne des procurations qui soulagerait nos consulats ?

Ces évolutions doivent se faire au bénéfice de tous, or certains n'ont ni identité numérique ni smartphone ; je pense aux élus et aux agents qui les soutiennent. Le contact humain est essentiel. Notre amendement à ce sujet répond aux préconisations de la Défenseure des droits.

Avec cette expérimentation, le ministère de l'Europe et des affaires étrangères devient un véritable laboratoire au service des Français de l'étranger ; nous espérons donc qu'elle aboutira, avant un déploiement dans l'Hexagone et les outre-mer. Notre groupe votera cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

M. Ronan Le Gleut .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) « Parcours du combattant » : combien de fois ai-je entendu cette expression ? Bien sûr, les Français résidant en France se plaignent aussi de leurs relations avec l'administration. Mais à l'étranger, les difficultés sont démultipliées.

Pour nous, nos consulats sont nos mairies. Or lorsque l'on réside à plusieurs centaines de kilomètres du consulat, faire son passeport ou voter est complexe. Pourtant, 1 692 978 personnes sont inscrites sur le registre national des Français de l'étranger - c'est le cinquième département de France ! Près de trois millions de Français vivent à l'étranger. Certains vivent à plusieurs centaines de kilomètres de leur consulat et dépendent de l'avion, comme en Australie ou au Brésil. Dans ces conditions, la dématérialisation est une nécessité.

Nous soutenons donc l'expérimentation encadrée par la loi Essoc, d'autant qu'elle n'exclut pas le recours au format papier pour ceux qui ne maîtrisent pas les outils numériques.

Personne ne s'attendait cependant à un triplement du délai : quand un entrepreneur annonce trois mois de travaux, on table sur quatre ou cinq mois, mais pas sur neuf mois ! Encore une prolongation : « jamais deux sans trois ». J'espère que nous n'aurons pas à dire : « jamais trois sans quatre ».

L'amendement de M. Frassa prévoyant un état annuel d'avancement devant l'Assemblée des Français de l'étranger est une bonne initiative, qui placera le Gouvernement face à ses responsabilités.

Le ministère de l'Europe et des affaires étrangères a du mal à réaliser des choix cohérents et efficaces en matière de numérique, comme l'illustrent les couacs sur le vote électronique ou France Connect. Où est la start-up nation vantée par le Président de la République dès 2017 ? Quel échec, sept ans après, alors que la France est moins avancée que tant d'autres pays !

M. Franck Riester, ministre délégué.  - C'est faux !

M. Ronan Le Gleut.  - Espérons que cette nouvelle prolongation sera la dernière. Le groupe Les Républicains votera cette proposition de loi.

M. Aymeric Durox .  - Même s'il est frustrant de constater que l'ensemble de la dématérialisation n'a pu être mis en oeuvre depuis 2019 - et alors même que l'on a manqué de transparence -, il convient d'accompagner ce processus utile. La dématérialisation des actes d'état civil fait de la France un État moderne, efficace et soucieux de ses finances publiques.

Moderne, car il s'agit d'une avancée concrète, surtout pour nos compatriotes de l'étranger, qui vivent parfois à des milliers de kilomètres d'un consulat.

Efficace, car avec la simplification des démarches, les usagers pourront obtenir des documents en sécurité et dans les meilleurs délais.

Soucieux de ses finances publiques, enfin, car le ministère de l'Europe et des affaires étrangères pourra mieux réaffecter les effectifs vers, par exemple, davantage de conseillers culturels ou politiques.

La commission des lois a amélioré le texte : nous le voterons sereinement.

Mme Évelyne Renaud-Garabedian .  - Le décret du 20 septembre 1792 confie aux municipalités les actes de mariage, décès et naissances jusqu'alors gérés par le clergé. Le présent texte parachève l'établissement d'un état civil électronique géré par le ministère de l'Europe et des affaires étrangères.

Désormais, les actes figurant dans le registre électronique ont la même valeur juridique que le papier, une avancée considérable pour les Français de l'étranger.

Nous connaissons tous les affres de l'état civil pour les Français de l'étranger. Depuis dix ans, ils peuvent solliciter un document en ligne, mais son acheminement par voie postale prend parfois des mois.

L'expérimentation, décidée en 2019 pour trois ans, puis prorogée jusqu'à juillet 2024, a débuté par la délivrance sur support électronique. Cela a réduit le délai à quelques jours et a suscité un fort engouement des usagers. En 2022, plus d'un million d'actes d'état civil ont été délivrés par voie électronique, contre 25 000 sur papier. Pour les trois premiers trimestres de 2023, on atteint respectivement 925 000 et 3 000 actes. Une nouvelle prolongation est donc nécessaire.

Cette proposition de loi simplifiera les démarches et réduira les délais. Pour les usagers, d'abord : plus besoin de prendre l'avion pour déclarer aux services consulaires la naissance de son enfant. Pour les postes consulaires, également : les agents de l'état civil pourront ainsi soulager les services visa. Pour l'administration, enfin, avec le redéploiement des effectifs du service courrier, la facilitation des échanges avec l'Insee, la Cnav ou encore les préfectures.

Je voterai ce texte. Monsieur le ministre, vous avez cependant un devoir de vigilance : sur le risque de cyberattaques et de violation de la vie privée ; sur le coût du déploiement, qui doit être mieux chiffré et maîtrisé - évalué initialement à 5 millions d'euros, il dépasse désormais les 11 millions ; sur l'accompagnement des seniors, éloignés de ces outils. Les conseillers des Français de l'étranger pourraient se voir confier cette mission, que certains accomplissent déjà.

Du succès de la dématérialisation des actes d'état civil du service de Nantes dépend le déploiement d'un registre électronique à l'échelle nationale. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Discussion des articles

Article 1er

M. Yan Chantrel .  - La dématérialisation ne se réduit pas à l'état civil. L'article 45 de la Constitution nous interdit de déposer des amendements relatifs à d'autres dispositifs. Or en cette période d'élections européennes, nous souhaitions promouvoir le vote électronique. Or le nombre de centres de vote a diminué : beaucoup de nos compatriotes ne pourront donc pas voter à l'étranger, alors que la France est l'un des rares pays à le permettre. Le Gouvernement s'est engagé à dématérialiser les procurations. Pour quelles élections cela sera-t-il possible, monsieur le ministre ?

Autre sujet : nos compatriotes à l'étranger ne peuvent pas déposer plainte sur internet, contrairement à ceux qui résident en France. Pouvez-vous y travailler avec le ministre de l'intérieur ?

Enfin, dématérialisation ne doit pas rimer avec réduction d'effectifs. J'ai constaté, au Canada, que la dématérialisation alourdit la charge de travail : une démarche qui prenait un quart d'heure peut désormais nécessiter une heure. Prenez-vous l'engagement de corréler la dématérialisation avec le renforcement des effectifs des consulats ?

Mme la présidente.  - Amendement n°5 rectifié, présenté par Mme Conway-Mouret et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par les mots : 

ou par courrier sur demande

Mme Hélène Conway-Mouret.  - Chacun doit pouvoir demander un acte d'état civil sous format papier, même s'il faut penser aux arbres ! Cet amendement d'appel est un appel au secours, car certains retraités ne peuvent percevoir leur pension faute d'accès au service. La dématérialisation ne doit pas synonyme de désincarnation des services consulaires, dont le coeur de métier reste le contact humain.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - La délivrance des actes d'état civil par courrier est déjà prévue par les textes, mais aussi par l'expérimentation. En 2023, moins de 5 000 personnes ont demandé une impression de leur acte d'état civil, sans compter les demandes par courrier. Cela restera toujours possible.

En audition, le ministère a confirmé que la dématérialisation ne serait pas le seul moyen d'obtenir les actes d'état civil. N'alourdissons pas le texte. Retrait, sinon avis défavorable.

M. Franck Riester, ministre délégué.  - En effet, l'amendement est satisfait. Au-delà de l'engagement du Gouvernement, le texte prévoit que les copies et les extraits d'actes d'état civil « peuvent » être délivrés par voie électronique, ce qui signifie donc que la voie classique demeure.

Vous auriez, vous, le souci d'offrir un service physique à nos concitoyens de l'étranger ? Mais nous ne vous avons pas attendue : il est toujours possible de demander des actes d'état civil dans les consulats. Je remercie Samantha Cazebonne et François Patriat, ainsi que Jean-Baptiste Lemoyne, lorsqu'il était au Gouvernement, pour leur travail sur la dématérialisation.

Je trouve Mme la ministre Conway-Mouret et M. Le Gleut quelque peu sévères à l'endroit de l'administration. Dématérialiser demande du temps : inutile de jeter l'opprobre sur les équipes.

France Consulaire permet un contact humain dans 46 pays ; 50 % des Français résidant à l'étranger y ont accès. Nous visons 100 % d'ici à fin 2025

Nous travaillons avec Gérald Darmanin sur le renouvellement à distance des passeports et cartes d'identité.

Retrait, sinon avis défavorable.

Mme Hélène Conway-Mouret.  - C'était un amendement d'appel.

Je ne crois pas être sévère en posant des questions légitimes - vous y avez répondu, je vous en remercie.

Le projet de dématérialisation est très ambitieux : dans cette période transitoire, il ne faut laisser personne de côté.

Je souhaite corriger des problèmes et en éviter d'autres. Mes critiques ne portent nullement sur les agents de l'administration : je voulais comprendre les raisons du retard.

L'amendement n°5 rectifié est retiré.

L'article 1er est adopté.

Article 2

Mme la présidente.  - Amendement n°2, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mme Senée.

Après l'alinéa 5

Insérer un alinéa ainsi rédigé : 

...° Au premier alinéa de l'article 3, après le mot : « centralisé », sont insérés les mots : « , tenu en double exemplaire et » ;

Mme Mélanie Vogel.  - Nous renforçons la sécurité des actes d'état civil détenus par le service central d'état civil (SCEC) en prévoyant qu'ils soient tenus en double exemplaire. En effet, depuis la loi de modernisation de la justice du XXIe siècle, ce principe de double tenue n'est plus applicable aux communes ayant opté pour le traitement automatisé et aux actes établis par le ministère de l'Europe et des affaires étrangères.

Or le garde des sceaux a reconnu la complexité technique des exigences de sécurité que cela suppose. Conserver un seul serveur ajoute le risque de perte au danger induit par la dématérialisation même.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Cette tenue en double exemplaire a suscité un débat en commission.

Votre amendement est satisfait : les actes d'état civil dématérialisés seront conservés simultanément dans le registre d'état civil électronique (RECE) et dans le système d'archivage pérenne pour l'histoire, l'information et la recherche (Saphir) du ministère de l'Europe et des affaires étrangères. Retrait, sinon avis défavorable.

M. Franck Riester, ministre délégué.  - Même avis.

L'amendement n°2 est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement n°1, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Après l'alinéa 5

Insérer un alinéa ainsi rédigé : 

...° Au début du premier alinéa de l'article 5, sont insérés les mots : « Sans préjudice de la possibilité de s'adresser directement auprès des autorités diplomatiques ou consulaires, » ;

Mme Mélanie Vogel.  - Maintenons dans la loi la possibilité d'effectuer des déclarations ou des demandes directement auprès des services consulaires. Nombre de nos compatriotes, par illectronisme ou en raison de leur vie personnelle, sont éloignés des services en ligne.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Cela reste possible. N'alourdissons pas la loi au risque d'affecter sa lisibilité. Retrait, sinon avis défavorable.

M. Franck Riester, ministre délégué.  - Même avis.

Mme Mélanie Vogel.  - Monsieur le ministre, pouvez-vous garantir, à droit constant, que les Français de l'étranger pourront toujours accéder aux services consulaires pour faire leurs déclarations ?

M. Franck Riester, ministre délégué.  - La communication, c'est la répétition... Le texte prévoit la « possibilité » de dématérialiser : dès lors, la démarche physique reste de rigueur. Je vous le confirme.

L'amendement n°1 est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement n°8, présenté par Mmes Ollivier et M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Après l'alinéa 5

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

...° Après l'article 8, il est inséré un article 8-... ainsi rédigé :

« Art. 8 - .... - En cas de dysfonctionnement technique impactant la délivrance dématérialisée des actes de l'état civil effectuée par le service central du ministère des affaires étrangères, les usagers particuliers, professionnels ou institutionnels concernés par une demande en cours sont informés de la survenance du dysfonctionnement et des délais estimés de rétablissement du service. » ; 

Mme Mathilde Ollivier.  - En cas de défaillance technique, les usagers doivent être informés, pour ne pas rester dans l'incertitude et pour éviter une surcharge de travail aux services. Ainsi, en octobre 2023, un dysfonctionnement a interrompu le dépôt de demandes en ligne pendant plusieurs jours, avec une hausse de 46 % des appels et de 111 % des courriels. Anticipons ces situations.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Nous venons d'adopter l'article 1er. L'article 2 tend à supprimer les mentions de la délivrance au sein de l'ordonnance du 10 juillet 2019, que modifie votre amendement. Retrait, sinon avis défavorable : cet amendement s'insère au mauvais endroit.

M. Franck Riester, ministre délégué.  - Même avis. J'ajoute qu'en cas de dysfonctionnement, les Français de l'étranger reçoivent des informations du SCEC ainsi que par le service support de service-public.fr.

Mme Mathilde Ollivier.  - En cas de défaillance, l'usager multiplie les dépôts de demande et les appels, ce qui encombre les services. S'il était informé en amont, cela résoudrait les problèmes.

L'amendement n°8 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°3, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Alinéa 7

Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés : 

...° L'article 12 est ainsi modifié :

...) Au premier alinéa, après le mot : « Parlement », sont insérés les mots : « et à l'Assemblée des Français de l'étranger » ;

...) À la deuxième phrase du second alinéa, le mot : « électroniques » est remplacé par les mots : « de ces actes » ;

Mme Mélanie Vogel.  - En commission, le rapporteur a corrigé le tir (M. Christophe-André Frassa apprécie) en prévoyant un rapport d'étape à l'Assemblée des Français de l'étranger. Mais il faut aller plus loin et transmettre aussi le rapport définitif.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Avis favorable : il est logique que l'Assemblée des Français de l'étranger soit destinataire de ce document important, non public.

M. Franck Riester, ministre délégué.  - Je salue moi aussi l'apport du rapporteur. Avis favorable à cet amendement : c'est une très bonne idée.

L'amendement n°3 est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°6 rectifié, présenté par Mme Conway-Mouret et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 9

Après les mots :

Assemblée des Français de l'étranger

insérer les mots :

et au Parlement

Mme Hélène Conway-Mouret.  - Légiférer par ordonnance oblige le Gouvernement à recourir à des propositions de loi pour corriger ses erreurs : paradoxalement, en voulant aller vite, il a doublé le budget et dépassé les délais...

Nous proposons que le point d'étape annuel présenté devant l'Assemblée des Français de l'étranger, proposé par M. le rapporteur, le soit également au Parlement, afin que nous puissions anticiper de nouveaux retards. Sans cela, le Sénat se priverait d'un droit de regard, alors qu'il pourrait être sollicité pour une rallonge... Nous voulons pouvoir contrôler efficacement l'action du Gouvernement.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - En commission, nous avons estimé que la présentation du point d'étape par le ministre devant l'Assemblée des Français de l'étranger ne revêtait pas un caractère tel qu'elle devait également faire l'objet d'un débat au Parlement. L'amendement de Mme Conway-Mouret me semble excessif : retrait, sinon avis défavorable.

En revanche, le ministre pourrait s'exprimer en audition devant la commission des lois.

M. Franck Riester, ministre délégué.  - Même avis. Je suis à la disposition de la commission des lois pour lui présenter un point précis.

Mme Hélène Conway-Mouret.  - Vous me tendez la main, je suis prête à la serrer...

Je ne proposais pas un débat au Parlement, mais il est important que nous puissions anticiper les débats budgétaires. Une présentation devant la commission des lois me convient parfaitement.

L'amendement n°6 rectifié est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement n°4, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Alinéa 9

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

La présentation comporte une analyse des risques pour la sécurité informatique des procédures d'établissement, de conservation et de mise à jour des actes de l'état civil.

Mme Mélanie Vogel.  - En 2022, les dommages résultant de cyberattaques émanant essentiellement de Chine et de Russie se chiffraient à 2 milliards d'euros. Le rapport annuel doit comporter une analyse de ces risques.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Je comprends votre préoccupation, surtout dans le contexte actuel. Cela dit, l'intervention annuelle du ministre est une allocution, pas un rapport écrit. Le rapport définitif abordera la question des risques cyber : votre demande est satisfaite. Retrait, sinon avis défavorable.

M. Franck Riester, ministre délégué.  - Même avis.

L'amendement n°4 est retiré.

L'article 2, modifié, est adopté.

Vote sur l'ensemble

Mme Mathilde Ollivier .  - La mise à jour dématérialisée des actes d'état civil est un volet majeur du projet RECE. Or sans la reprise des données existantes, cette mise à jour ne pourra être réalisée de façon dématérialisée.

Les agents du quai d'Orsay effectuent manuellement les mises à jour des actes d'état civil : c'est une tâche ardue, comme l'ont relevé l'inspection générale de la justice et l'inspection générale des affaires étrangères. Soyons vigilants sur la reprise des données.

Mme Olivia Richard .  - Un point de vigilance : France Connect reste une barrière infranchissable pour nombre de nos concitoyens. Or pour obtenir une copie d'acte sur service-public.fr, c'est un point de passage obligé ; Marie Barros-Godefroy, conseillère consulaire de Rio, m'en parlait encore la semaine dernière.

Une interrogation : la commission des lois reste souveraine de son ordre du jour, mais c'est également le cas du bureau de l'Assemblée des Français de l'étranger...

La proposition de loi est adoptée.

La séance est suspendue quelques instants.

Accord en CMP

Mme la présidente.  - La commission mixte paritaire chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à assurer une justice patrimoniale au sein de la famille est parvenue à l'adoption d'un texte commun.

Ordonnance de protection (Procédure accélérée)

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, allongeant la durée de l'ordonnance de protection et créant l'ordonnance provisoire de protection immédiate (OPPI).

Discussion générale

Mme Sarah El Haïry, ministre déléguée chargée de l'enfance, de la jeunesse et des familles .  - Je vous prie d'excuser l'absence du garde des sceaux, qui se trouve aux côtés des agents de l'administration pénitentiaire en raison du drame que nous connaissons aujourd'hui. C'est un véritable choc.

Certains combats ne doivent néanmoins jamais cesser. Le texte que nous examinons est le fruit d'une mobilisation transpartisane. Les travaux de Dominique Vérien et Émilie Chandler, ayant abouti au Plan rouge VIF - sur les violences intrafamiliales - feront date.

Nous avons oeuvré collectivement pour faire progresser ce combat : lancement du Grenelle en 2019 ; loi du 18 mars 2024 à l'initiative de la députée Isabelle Santiago et votée à l'unanimité au Sénat de façon transpartisane pour protéger les enfants contre des parents violents ; pôles spécialisés dans toutes les juridictions, effectifs depuis le 1er janvier 2024.

Les juridictions se sont emparées des outils que le législateur a créés : 5 709 téléphones grave danger ont été distribués en 2023, de même que plus de 1 000 bracelets anti-rapprochement - qui ont entraîné plus de 10 500 interventions des forces de sécurité intérieure ; enfin 3 586 ordonnances de protection ont été prononcées en 2022, contre à peine 1 392 en 2017, et le taux d'acceptation des demandes est de plus de 70 %.

L'article 1er permet d'allonger les mesures décidées par le juge de six à douze mois - aujourd'hui, leur prolongation n'est pas automatique et est impossible pour les victimes non mariées ou sans enfants.

L'ordonnance de protection est un dispositif civil qui permet de prendre des mesures quasi pénales : il ne faut donc pas en fragiliser l'équilibre. La notion de danger vraisemblable doit rester au coeur de l'office du juge, avec désormais le danger grave et immédiat. Ne mettons pas en péril un dispositif connu de tous les acteurs ; conservons les deux critères de violences vraisemblables et de danger vraisemblable.

L'article 1er crée aussi une ordonnance provisoire de protection immédiate (OPPI) par laquelle le juge peut prononcer en 24 heures et sans contradictoire des mesures de protection avant l'ordonnance de protection qui sera prise dans un délai de six jours.

L'absence de contradictoire exige un encadrement strict. Les critères de délivrance plus restrictifs pour l'OPPI ont été maintenus : un danger grave et immédiat. Même chose pour son caractère accessoire limité dans le temps : elle prendra fin le jour de la délivrance de l'ordonnance de protection ou lorsque l'instance prendra fin pour un motif de procédure. Enfin, la commission des lois a opportunément ajouté aux mesures pouvant être prononcées la dissimulation de domicile - quelques ajustements rédactionnels pourront en faciliter la mise en oeuvre.

Si je me réjouis des améliorations, je ne souscris pas à certaines évolutions adoptées par la commission des lois.

L'interdiction faite au juge de refuser de délivrer une OPPI sur le fait que la requête est accompagnée de pièces en langue étrangère est inutile : aucun texte n'exige la participation d'un traducteur assermenté et un document en langue étrangère peut toujours être produit en traduction libre ou grâce à un logiciel en ligne.

La possibilité qu'une personne en danger puisse demander au juge une OPPI après avis conforme du procureur de la République renverse l'équilibre actuel où le procureur de la République décide seul. Le traitement de l'urgence est maîtrisé par le parquet comme par le siège et il nous appartiendra d'en préciser le circuit. Ajouter ainsi des étapes supplémentaires à la délivrance d'une OPPI nuirait à son efficacité. Enfin, la saisine directe du juge serait conditionnée à l'avis d'une personne tierce, ce qui porterait atteinte au principe de libre accès à la justice. Nous construisons ici un dispositif inédit, dérogatoire aux règles et aux principes fondamentaux de la procédure civile ; nous devons le sécuriser, tout autant que nous devons garantir son efficacité.

Un amendement vous est donc proposé pour que seul le procureur de la République puisse solliciter sans délai la délivrance d'une ordonnance provisoire.

L'article 1er bis, introduit par un amendement de la rapporteure en commission, prévoit de masquer l'adresse de la personne protégée dans les listes électorales - c'est nécessaire, mais il ne faut pas porter atteinte à la transparence démocratique ; aussi je propose qu'un décret en Conseil d'État précise la mise en oeuvre de cette mesure.

L'article 2 prévoit que la violation d'une ordonnance de protection sera punie de trois ans de prison et de 45 000 euros d'amende. Je salue le travail d'harmonisation des peines par la commission.

L'article 2 bis prévoit utilement qu'une ordonnance provisoire puisse donner lieu à l'attribution d'un téléphone grave danger.

Nous avons l'occasion de sécuriser un dispositif judiciaire inédit. Cette intervention immédiate doit être à fois protectrice des victimes et garante des principes essentiels de notre État de droit. (Applaudissements sur les travées du RDPI ; Mme Elsa Schalck et M. Michel Savin applaudissent également.)

Mme Dominique Vérien, rapporteure de la commission des lois .  - J'exprime mon soutien au ministre de la justice et à la famille pénitentiaire qui a été durement touchée, ainsi que mes condoléances aux familles des victimes.

Cette proposition de loi est la continuation d'un long travail parlementaire. La lutte contre le fléau des violences intrafamiliales nécessite la mobilisation de toutes les parties prenantes. Tous les trois jours, une femme tombe sous les coups de son conjoint ou de son ex-conjoint : en 2022, il y a eu 118 décès et 267 tentatives de féminicide ; la même année, les forces de sécurité ont recensé près de 240 000 femmes victimes de violences commises par leur partenaire ou ex-partenaire et 87 000 femmes victimes de violences sexuelles. Derrière chacun de ces chiffres, ce sont des victimes que la société a échoué à protéger.

Les ordonnances de protection en sont l'un des moyens. Créées en 2010 sur le modèle du dispositif existant en Espagne, elles permettent au juge aux affaires familiales (JAF) d'assurer la protection de victimes de violences intrafamiliales en prononçant des mesures protectrices et temporaires, à mi-chemin entre le civil et le pénal, pour un délai de six mois maximum. Le non-respect de ces mesures peut être puni de deux ans de prison et de 15 000 euros d'amende.

Le nombre de demandes d'ordonnance de protection n'a cessé d'augmenter, passant d'un peu plus de 1 600 en 2011 à 6 000 en 2021. C'est encourageant, mais le nombre d'ordonnances délivrées reste trop faible par rapport au nombre de victimes.

Le danger n'est pas toujours évalué à sa juste valeur : les violences relèvent d'un système qui ne s'arrête ni à la porte de la maison ni après une séparation - d'où le débat que nous aurons sur l'article 515-11 du code civil. La députée Émilie Chandler et moi-même avons remis, voilà un an, le Plan rouge VIF, dont plusieurs des 59 recommandations portent précisément sur les ordonnances de protection.

Plusieurs mesures réglementaires sont en cours d'application. Pour le législatif, je remercie le Gouvernement d'avoir inscrit ce texte à l'ordre du jour.

La proposition de loi, adoptée à l'unanimité par l'Assemblée nationale le 5 mars, compte deux mesures phares, en amont avec l'ordonnance provisoire et en aval avec l'allongement de la durée de l'ordonnance de protection.

Grâce à ce dernier, les personnes non mariées ou n'ayant pas d'enfants auront ainsi un temps plus long pour organiser leur séparation ; aujourd'hui, l'allongement n'est possible que si une demande de changement de l'exercice de l'autorité parentale, de séparation de corps ou de divorce est faite avant la fin de l'ordonnance.

La création de l'OPPI est la mesure la plus novatrice du texte. Telle qu'elle est remaniée par la commission des lois, elle pourrait être demandée soit par la personne concernée avec avis conforme d'un procureur de la République, soit directement par le ministère public avec l'accord de la personne. Elle serait ensuite délivrée par le JAF dans un délai de 24 heures et sans avoir entendu la partie défenderesse.

J'ai bien compris que l'avis conforme constituerait un blocage dans une procédure civile. J'y vois deux solutions : prévoir un avis simple du procureur ou - comme le préconise un amendement de Thani Mohamed Soilihi - ne pas permettre à la victime de solliciter la procédure d'urgence.

Le texte initial prévoyait que le juge pourrait alors interdire à la partie défenderesse de recevoir certaines personnes, de se rendre dans certains lieux désignés par le juge, de détenir ou de porter une arme et lui ordonner de remettre les armes dont elle serait détentrice. La commission a jugé opportun d'y ajouter la suspension du droit de visite et d'hébergement et la possibilité de dissimiler l'adresse de la partie demanderesse.

Ces mesures seraient valables jusqu'à la décision du JAF sur la demande d'ordonnance de protection, soit pendant environ six jours.

La commission a aussi complété le texte : nous avons modifié le code électoral pour mieux dissimuler l'adresse de la victime ; nous avons aligné les peines encourues sur une peine unique de trois ans de prison et de 45 000 euros d'amende, ce qui permet au juge de décider, en cas de nécessité, du port d'un bracelet anti-rapprochement ; nous avons étendu aux OPPI la possibilité offerte au procureur de la République d'attribuer à la victime un téléphone grave danger.

L'atteinte d'une ligne de crête constitutionnelle nécessite des débats que nous avons réservés à la séance publique ; je me réjouis donc que de nombreux amendements sur le sujet aient été déposés. Nous ne pourrons pas entendre d'engagements du garde des sceaux, mais nous avons jusqu'à la CMP pour trouver des solutions qui conviennent à tous. (Mme Sarah El Haïry le confirme.)

Les ordonnances de protection sont un dispositif équilibré, qui concilie efficacité et préservation des libertés publiques, même s'il peut être encore perfectionné. Cette sixième réforme marquera un pas important dans l'amélioration de la protection des victimes. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe UC)

Mme Olivia Richard .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC ; Mme Elsa Schalck applaudit également.) Madame la rapporteure, je rends hommage à votre engagement dans la lutte contre les violences intrafamiliales, dont témoigne votre Plan rouge VIF et ses 59 recommandations. L'accompagnement des victimes et la prévention des violences doivent être envisagés sous tous les angles. Sans réponse claire de la société, la perpétuation des comportements violents ne pourra être endiguée.

La proposition de loi, issue de ce rapport, comporte plusieurs avancées importantes, lesquelles prennent en compte les évolutions sociétales : le statut marital de la victime ou l'absence d'enfants au sein du couple ne seront plus des freins.

La création de l'OPPI, une préconisation du Plan rouge VIF, est heureuse. Nul besoin de rappeler les chiffres effrayants des femmes tombées sous les coups de leurs conjoints...

Le texte de la commission prévoit une demande directe d'OPPI par la victime. Il n'est pas envisageable que les victimes ne soient pas actrices de leur protection. On nous dit que l'avis conforme du procureur ajoute une étape et qu'il existe un risque constitutionnel. Cela ne devrait néanmoins pas conduire à l'éviction des victimes du processus. Un équilibre doit être trouvé entre le respect de l'office du JAF et la possibilité pour les victimes de violences graves de demander une protection en urgence. C'est du bon sens ; nous aurons ce débat.

Pour bénéficier d'une ordonnance de protection, la victime doit avoir été victime de violences vraisemblables et encourir un grave danger actuel. Ces deux critères cumulatifs sont essentiels pour que le juge prenne des mesures civiles - et non pénales - de protection. La charge de la preuve incombe à la personne qui bénéficie du dispositif.

Vu le faible taux de demandes voire leur absence dans certains départements, une réflexion est requise. Trop de magistrats pensent que le danger cesse avec l'absence de communauté de vie. Or l'absence de cohabitation ne signifie pas l'absence de danger ! Je partage le diagnostic de Dominique Vérien sur la nécessité de faciliter le recours à l'ordonnance de protection. Je partage également sur ce point les vues d'Elsa Schalck et de Laurence Harribey. Nous présenterons à ce sujet un amendement transpartisan.

Plus d'un million de Françaises - peut-être 2 millions - résident à l'étranger ; mais le ministère de l'Europe et des affaires étrangères a annoncé avoir secouru 120 femmes en 2023, 120 !

Des numéros d'appel et des plateformes ont été mis en place en France, mais ils sont inaccessibles à l'étranger. Le numéro 3919 ne peut être joint, et la plateforme nationale Arrêtons les violences exige un code postal français ou une ville située en France ; il suffirait d'ajouter la possibilité d'indiquer une ville située hors de France.

Les vidéos de sensibilisation visent tous les milieux, y compris en outre-mer, mais il n'y a rien pour les Françaises établies à l'étranger. Les violences intrafamiliales ne s'arrêtent pourtant pas aux frontières, bien au contraire. Il est plus ardu d'identifier les victimes et de les aider, en raison des conflits de juridiction. Oui, le déplacement des enfants peut être illicite. Néanmoins, il faut les aider !

Les associations comme France Victimes, Sorority, Mots et maux de femmes, ou les actions de Chloé Vialard à Singapour, méritent d'être liées aux systèmes nationaux existants. Considérons toutes les victimes, qu'elles soient en France ou à l'étranger.

Le groupe UC votera cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe UC ; M. Michel Masset et Mme Elsa Schalck applaudissent également.)

Mme Mélanie Vogel .  - En 2017, le mouvement #MeToo a mis les violences fondées sur le genre au coeur du débat public. Depuis, on nous a dit qu'il s'agissait de la grande cause du quinquennat, que la parole des femmes était libérée - alors que les femmes ont toujours parlé... Or le ministre de l'intérieur estime que seules 6 % des victimes de violences sexuelles physiques portent plainte. La lutte contre les violences sexuelles est en réalité loin d'être gagnée. Le renforcement des ordonnances de protection prévu par cette proposition de loi est une brique à l'édifice.

En Espagne, un dispositif permet d'éloigner immédiatement le conjoint violent. On le sait, c'est souvent dans les 48 heures après la dénonciation que le féminicide survient.

Dominique Vérien est exemplaire dans le combat qu'elle mène contre les violences sexuelles.

Je salue l'amendement adopté en commission permettant aux victimes de demander elles-mêmes une OPPI. Près de 400 000 enfants vivent dans un foyer où surviennent des violences intrafamiliales.

Demeurait toutefois un angle mort. Les ordonnances de protection ne sont octroyées qu'à la double condition que la personne ait été vraisemblablement victime de violences et soit exposée à un danger. Or chaque heure qui passe compte. Quand on a vraisemblablement été victime de violences, on est exposé à un danger. Le seul premier critère devrait donc suffire.

Pour de nombreuses victimes, l'ordonnance arrive trop tard : Hadjira, à Franconville, avait demandé une ordonnance de protection ; or le juge la lui a refusée, le 2 mai. Le 21 juillet, son ex-conjoint l'a poignardée à mort dans son appartement en présence de ses deux enfants de 2 et 4 ans. Sandra, à Bordeaux, avait, elle aussi, demandé une ordonnance de protection contre son ex-conjoint violent, qui campait devant son domicile et devant la maternelle de leur fille. Elle avait écrit « je ne tiendrai pas longtemps » ; elle a été tuée par son ex-conjoint le 1er juillet 2021.

Nous sommes plusieurs à avoir déposé des amendements pour revenir sur ces conditions de recevabilité restrictives, qui expliquent aussi le faible nombre de demandes d'ordonnances de protection recensé en France ; là où l'Espagne s'est dotée d'une juridiction spécialisée, il faut en France multiplier les démarches, faute d'une loi globale, comme celle qui est demandée par 147 femmes dans un appel paru aujourd'hui dans Le Monde, auquel je m'associe.

En attendant cette évolution, et sans réserve, les écologistes voteront ce texte.

Mme Evelyne Corbière Naminzo .  - Le rapport annuel 2023 du Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes (HCE) sur l'état des lieux du sexisme en France l'a démontré : les violences sexistes et sexuelles ne reculent pas. En 2022, elles ont fait 244 000 victimes, dont 86 % de femmes. À La Réunion, 66 % des violences intrafamiliales sont des violences conjugales, dont 85 % des victimes sont des femmes. En moyenne, chaque jour, chez nous, douze femmes dénoncent des violences conjugales. On constate une hausse de 17 % des violences intrafamiliales, avec dix-sept interventions des forces de l'ordre chaque jour pour des faits de violences intrafamiliales.

Pourtant, seule une victime sur quatre porte plainte. Il est donc urgent d'agir.

Le dispositif d'ordonnance de protection mis en place en 2010 et amélioré par cinq réformes permet au JAF de prendre des mesures à l'encontre d'un conjoint violent pour protéger les victimes de violences. Sous six jours après la saisine, le juge peut interdire au conjoint violent d'entrer en contact avec la victime, de se rendre dans certains lieux, de porter une arme, ou encore statuer sur la résidence séparée et sur l'autorité parentale.

Le dispositif permet de lutter contre les violences intrafamiliales, mais il reste perfectible.

Il est demandé d'allonger le mécanisme d'ordonnance de protection de six à douze mois. Nous ne pouvons qu'y être favorables d'autant que, dans la plupart des cas, au bout de six mois, l'accusé n'a toujours pas été jugé.

L'OPPI est aussi bienvenue : alors qu'au moins 103 féminicides par compagnon ou ex-compagnon ont été commis en France en 2023, chaque jour compte. Le délai de six jours peut avoir des conséquences dramatiques. Avec ce mécanisme, ce texte se donne l'ambition de sauver des vies.

Nous regrettons que cette ordonnance ne puisse être prononcée par le parquet : à l'inverse de ce dernier, les services du JAF ne disposent pas d'une permanence, et ce texte n'en prévoit pas. Nous souhaitons modifier ce point sur le modèle des ordonnances de protection de l'enfance, par souci de cohérence avec la réalité des moyens de la justice.

Nous invitons le garde des sceaux à mettre en avant ces évolutions auprès des magistrats. En 2022, le ministère public n'était à l'origine que de 2 % des demandes d'ordonnances de protection. Le besoin de formation est donc criant.

Nous voterons naturellement ce texte, pour la protection des victimes de violences conjugales. Mais, alors que le sexisme progresse dans la société française, le rôle du Gouvernement est de lutter contre lui à la racine, car il est la cause de ces violences immondes. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K ; Mme Laurence Rossignol applaudit également.)

M. Michel Masset .  - (Applaudissements sur les travées du RDSE) Le constat reste dramatique : en 2023, on recense près de 110 féminicides par compagnon ou ex-conjoint. Chaque année, des centaines de milliers de faits de violences conjugales ou intrafamiliales sont recensés. L'ordonnance de protection est donc un dispositif absolument nécessaire.

Dans un contexte de libération de la parole des femmes et d'amélioration du travail des forces de l'ordre, le nombre de victimes enregistrées augmente significativement. Le dispositif d'ordonnance de protection doit être réformé en fonction de la réalité du terrain.

Dans le rapport Améliorer le traitement judiciaire des violences intrafamiliales, rendu en 2023, Émilie Chandler et Dominique Vérien ont observé qu'entre 2011 et 2021 le nombre d'ordonnances de protection délivrées en urgence a été multiplié par 3,6. Tant mieux si ce dispositif fonctionne, même si nous pouvons regretter qu'il soit nécessaire d'y recourir...

L'exemple espagnol montre cependant la perfectibilité du modèle français. Saluons donc le présent texte.

L'article 1er double la durée maximale des mesures prises dans le cadre d'une ordonnance de protection, de six à douze mois - c'est une bonne chose - et institue une OPPI par laquelle le JAF devra se prononcer dans un délai de 24 heures sur des mesures d'urgence, dispositif cohérent qui permettra à la justice de mieux répondre à la détresse des victimes.

L'article 2 bis ajouté par la commission permet l'octroi d'un téléphone grave danger dans le cadre des ordonnances de protection, ce qui va dans le bon sens.

Nous franchissons une étape supplémentaire dans un parcours malheureusement loin d'être achevé : lutte pour l'égalité entre les femmes et les hommes, lutte contre les violences intrafamiliales, protection des enfants. Dans son rapport rendu en 2023 La politique d'égalité entre les femmes et les hommes menée par l'État, la Cour des comptes souligne les lacunes du pilotage global de cette politique publique. Si l'égalité entre les femmes et les hommes a été érigée en grande cause nationale, nous manquons d'une vision de long terme dans ce domaine.

Nous saluons néanmoins les démarches engagées, à l'image de ce texte. Mais d'autres mesures peuvent être prises pour agir dans la durée. Les jeunes générations doivent être sensibilisées le plus tôt possible.

Poursuivons aussi nos efforts pour la protection des enfants, qu'ils soient victimes ou témoins traumatisés des violences commises.

Nous devons mobiliser des moyens financiers conséquents. Il reste donc beaucoup à faire. Notre groupe votera unanimement ce texte. (Applaudissements sur les travées du RDSE)

M. Thani Mohamed Soilihi .  - (Applaudissements sur les travées du RDPI) Je salue la qualité du travail et l'engagement de la rapporteure sur le sujet qui nous réunit. Les ordonnances de protection permettent au JAF de prononcer des mesures temporaires en droit pénal et civil. Le nombre de recours comme leur taux d'acceptation n'ont cessé d'augmenter depuis 2011. Son efficacité ne fait donc guère de doutes, d'autant que le dispositif a été perfectionné en 2014, 2019, 2020 et 2022.

Toutefois, la protection demeure plus faible qu'en Espagne, pays précurseur en la matière : 6 435 demandes formulées en 2023, contre 321 000 femmes déclarées victimes de violences conjugales. En cause : des délais de délivrance trop longs, de six jours en moyenne, dans un domaine où l'urgence prime.

Cette sixième réforme des ordonnances de protection en quatorze ans vise à augmenter le nombre de recours en portant de six à douze mois la durée initiale des mesures prononcées au titre des ordonnances de protection. Les bénéficiaires auront ainsi le temps de s'organiser, notamment ceux qui ne sont pas mariés et n'ont pas d'enfants.

Le texte prévoit également la délivrance par le JAF, sur demande du procureur de la République, d'une OPPI dans un délai de 24 heures dans l'attente de la décision au fond sur une ordonnance de protection. Cela va dans le bon sens.

Je salue le fait que les dispositions du texte s'appliqueront également en Polynésie française et à Wallis-et-Futuna. À ce propos, combien d'ordonnances de protection sont-elles demandées et accordées chaque année en outre-mer, madame la ministre ? Nous savons que les violences y sont en moyenne plus nombreuses et plus graves que dans l'Hexagone.

En tant que praticien, je précise qu'il faudra veiller à concilier l'impératif de protection de victime - alors que la charge de la preuve incombe au demandeur - le respect des droits fondamentaux, et la réalité pratique des juridictions. Le ministère public a accès aux antécédents judiciaires, ce qui facilite la décision du JAF.

Le RDPI votera en faveur de la présente proposition de loi, de préférence enrichie des deux amendements que nous avons déposés. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Mme Laurence Harribey .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Les demandes d'ordonnance de protection sont passées de 1 600 en 2011 à 6 000 en 2021. Entre 2019 et 2021, 66 % d'entre elles ont été acceptées. Au 17 avril dernier, nous déplorions déjà 35 féminicides depuis le début de l'année.

Ces chiffres prouvent que cette proposition de loi, qui fait suite au Plan rouge VIF, est nécessaire. Son adoption marquera un pas supplémentaire pour la protection des victimes.

En premier lieu, elle allonge la protection de six à douze mois, mesure que le groupe SER défend depuis longtemps. Hélas, les amendements de Mmes Meunier et Rossignol à la loi Taquet ou les miens à la loi Santiago ont tous été rejetés.

En second lieu, ce texte crée une OPPI, un dispositif d'urgence indispensable. Je salue les assouplissements apportés en commission sur l'initiative de la rapporteure, notamment pour ouvrir la saisine du JAF à toute personne ayant demandé l'octroi d'une ordonnance de protection.

Nous avons déposé plusieurs amendements pour améliorer encore le texte. Nous proposons ainsi d'inciter le JAF à confier l'autorité parentale au parent victime pendant la durée de l'ordonnance ; la non-suspension de l'autorité du parent violent devra être spécialement motivée. Il s'agit aussi de dissimuler l'adresse de l'école des enfants au parent auteur de violences, afin d'éviter qu'il ne retrouve la victime par ce biais.

L'article 515-11 du code civil conditionne l'attribution d'une ordonnance de protection à des faits de violence et à l'existence d'un danger. Dans un arrêt de 2020, la Cour de cassation a donné une interprétation stricte de ce cumul des conditions, ce qui alourdit la charge de la preuve pour les victimes et fait perdre le dispositif en efficacité. Sans supprimer la notion de danger, pour éviter un prétendu problème constitutionnel, nous proposons de rendre ces deux conditions alternatives en remplaçant « et » par « ou ».

Quelle que soit l'issue des débats, nous voterons ce texte nécessaire pour une meilleure protection des victimes de violences intrafamiliales. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

Mme Elsa Schalck .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur de nombreuses travées du groupe UC) Cette proposition de loi s'inscrit dans la continuité de notre combat commun contre les violences conjugales et intrafamiliales.

De nombreuses initiatives parlementaires ont été prises contre ce fléau - dernièrement, un texte relatif à la justice patrimoniale au sein des familles. Cette proposition de loi renforce l'ordonnance de protection en allongeant la durée de ses effets et créé un dispositif nouveau, l'ordonnance provisoire de protection immédiate.

Je salue notre rapporteur, dont nous connaissons l'engagement, notamment dans le cadre des travaux ayant conduit au Plan rouge VIF.

L'ordonnance de protection a été créée en 2010, puis améliorée à plusieurs reprises. Les demandes, en forte hausse, se chiffrent à 6 000 en 2021. Preuve que ce dispositif répond à un vrai besoin.

En 2019, sur l'initiative de notre famille politique, le délai de délivrance a été réduit à six jours. Mais ce délai, même raccourci, laisse encore un intervalle au cours duquel la victime est exposée. D'où l'OPPI instaurée par le présent texte, que nous saluons - même si certains aspects restent en suspens, s'agissant notamment de la saisine du juge.

Je salue aussi l'allongement de la durée de l'ordonnance de protection de six à douze mois : dans les cas conflictuels, le délai actuel est trop court.

Je me félicite enfin de l'harmonisation, en commission, des sanctions entre l'ordonnance de protection et l'OPPI, car nous avons besoin de cohérence. Madame la ministre, combien de sanctions sont effectivement prononcées à l'encontre de ceux qui violent des ordonnances de protection ?

Deux questions restent à trancher. La saisine du JAF, en premier lieu, que le texte initial réservait au procureur. Des garanties sont nécessaires s'agissant d'une procédure sans contradictoire ni recours, et l'amendement adopté en commission fera débat. Mais l'OPPI étant accessoire à l'ordonnance de protection, il me paraît incohérent de permettre à la victime de saisir le JAF pour l'une et non pour l'autre.

En second lieu, la notion de danger. L'ordonnance de protection est accordée à deux conditions cumulatives, dont l'existence d'un danger. Or les professionnels nous alertent sur la non-délivrance d'une ordonnance de protection dans certaines situations, notamment lorsque l'auteur des violences a quitté le domicile.

Nous voterons ce texte, car la lutte contre les violences conjugales doit être un combat de tous les instants. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur de nombreuses travées du groupe UC)

M. Dany Wattebled .  - (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP) En 2022, 321 000 femmes se sont déclarées victimes de violences conjugales, mais seules 62 % des ordonnances de protection demandées ont été accordées. Le chemin à parcourir reste long pour garantir la protection des victimes et prévenir la récidive. Nous resterons mobilisés tant que des femmes et des enfants seront en danger au sein de la cellule familiale.

Bienvenue, cette proposition de loi met en oeuvre une recommandation du Plan rouge VIF. C'est la sixième réforme de la protection des victimes de violences intrafamiliales en quatorze ans.

Plus précisément, elle allonge opportunément de six à douze mois la durée de l'ordonnance de protection et instaure une ordonnance provisoire de protection immédiate, pour une protection plus rapide.

Je me félicite des avancées réalisées en commission, en particulier la possibilité d'attribuer un téléphone grave danger en cas d'OPPI, la saisine du JAF par la personne en danger et à la suspension du droit de visite du parent violent pendant la durée de l'OPPI. Je salue l'implication de Mme Vérien et la qualité de son travail.

Les violences au sein des foyers sont un fléau que nous devons combattre sans répit. Nous voterons à l'unanimité ce texte, qui renforce la protection des femmes contre les violences commises par leur conjoint ou ex-conjoint. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP)

Mme Laurence Rossignol .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Dans une tribune parue dans Le Monde, 147 femmes et quelques hommes demandent une « loi intégrale » - nous dirions plutôt une loi d'orientation, une loi-cadre ou une grande loi - couvrant l'ensemble des violences patriarcales : viols et agressions sexuelles, violences physiques, violences psychologiques, bref, toutes les violences ayant en commun d'être commises par des hommes qui considèrent qu'ils peuvent exercer un droit de propriété ou de cuissage sur les femmes chaque fois que l'occasion s'en présente.

Ce ne sont ni des pervers ni des malades psychiatriques, mais des hommes convaincus que, parce qu'ils sont des hommes, ils y sont autorisés. Je soutiens la démarche des auteurs de la tribune.

Nous légiférons très mal. Entre 2019 et 2023, j'ai proposé à cinq reprises, avec le groupe SER et d'autres groupes de gauche, d'allonger la durée de l'ordonnance de protection ; à chaque fois, le Gouvernement a émis un avis défavorable et la majorité sénatoriale a repoussé nos amendements. Voilà que nous y venons...

Il en va de même pour la suppression des conditions cumulatives de violence et de danger : ce que vous n'adoptez pas aujourd'hui, vous l'adopterez dans six mois ou dans un an ! Pourquoi donc attendre ?

Pendant ce temps, des femmes meurent : ce propos en a offusqué certains, lorsque je l'ai tenu. Je ne juge personne, mais le temps perdu au Parlement est un temps gagné par les prédateurs contre les femmes. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du GEST)

Mme Marie-Do Aeschlimann .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Inspirées du modèle espagnol, les ordonnances de protection, instaurées en 2010, permettent de protéger les victimes, mais demeurent sous-utilisées. En 2022, 321 000 femmes ont déclaré avoir subi des violences de la part de leur conjoint ou ex-conjoint, mais moins de 6 000 ont demandé une ordonnance de protection et seulement 3 600 l'ont obtenue. Le dispositif gagnerait à être mieux connu, mais aussi amélioré.

Cette proposition de loi y contribue judicieusement en allongeant la durée des ordonnances de protection de six à douze mois, laissant ainsi à la victime le temps de sécuriser son nouvel environnement, et en instaurant une OPPI pour une protection quasi instantanée. Le durcissement des sanctions est également un bon signal.

Je salue l'excellent travail mené par la rapporteure sur ce texte qui marque une étape importante, même s'il n'épuise pas le sujet.

Comme élue locale, avocate et femme, je tiens à vous livrer quelques réflexions sur la lutte contre ce fléau.

Il est impératif d'accentuer l'information et la prévention ; le respect de l'autre doit être intégré par chacun. Les associations et collectivités territoriales prennent toute leur part de ce combat. Je pense notamment au Centre francilien pour l'égalité Hubertine Auclert, devenu une référence. À Asnières, nous avons créé un dispositif d'hébergement d'urgence pour les femmes au moment où elles dénoncent les violences qu'elles ont subies. Il faut plus de moyens et de structures d'appui aux victimes.

Nous ne devons pas tolérer la moindre violence, surtout pas la première. N'oublions pas non plus que la vulnérabilité favorise les violences : près de 38 % des femmes victimes de féminicides sont retraitées !

Les violences intrafamiliales sont d'autant plus dangereuses qu'elles sont protéiformes et sournoises ; quand elles prennent en otage les enfants, elles sont encore plus inacceptables, car les conséquences pour eux sont souvent dramatiques jusqu'à l'âge adulte.

Nous voterons naturellement ce texte qui va dans le bon sens, mais beaucoup reste à faire pour mieux détecter, sanctionner et réparer. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur plusieurs travées du groupe UC)

Mme Alexandra Borchio Fontimp .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) « La vérité blesse, le silence tue », a dit Mark Twain.

Malgré cinq réformes, l'ordonnance de protection n'est pas pleinement efficace. Et si 321 000 femmes ont eu le courage de dénoncer les violences conjugales qu'elles avaient subies, seules 6 435 ont demandé une ordonnance de protection en 2023.

Dans un monde idéal, le caractère protecteur de notre droit convaincrait les femmes victimes de violences intrafamiliales d'oser dénoncer leur conjoint violent. Mais nos efforts sont insuffisants pour les rassurer et les conduire à s'extirper du danger.

Les coups tuent, les silences aussi. Comprendre les causes de ces silences est indispensable. Lorsqu'on n'a jamais été confronté à leur situation, il est facile de demander : pourquoi se taisent-elles ? En apparence anodine, cette question est une violence supplémentaire pour des victimes qui se murent dans le silence par honte ou crainte de représailles. D'autres facteurs jouent aussi, comme le manque de moyens de l'institution judiciaire, malgré les progrès récents.

Il faut attendre six jours pour se voir délivrer une ordonnance de protection : 144 heures au cours desquelles les femmes risquent de payer le prix fort. Avec l'OPPI, elles pourront bénéficier d'une protection instantanée et le juge pourra soumettre leur bourreau à de nouvelles obligations.

Nous ne pouvons que souscrire à ces mesures, mais il faudra des moyens humains pour les appliquer. Nous voterons naturellement ce texte qui s'inscrit dans une démarche transpartisane. Je rappelle que la création de l'ordonnance de protection est issue des travaux de notre famille politique.

Une femme sur trois est victime de violences conjugales au cours de sa vie, selon l'OMS. Maintenant qu'un sursaut salutaire est intervenu, il faut donner à la justice des moyens à la hauteur du défi.

Depuis le début de l'année, 38 femmes sont mortes sous les coups d'un homme. Tout récemment, à Antibes Juan-les-Pins, c'est une maman de 33 ans qui a été tuée par un récidiviste. Restons donc humbles et mobilisés, car la tâche ne fait que commencer. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Discussion des articles

Article 1er

Mme la présidente.  - Amendement n°2 rectifié, présenté par Mme O. Richard.

Après l'alinéa 1

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° À la première phrase du premier alinéa de l'article 515-11 du code civil, les mots : « comme vraisemblables la commission des faits de violence allégués et le danger auquel la victime ou un ou plusieurs enfants sont exposés » sont remplacés par les mots : « que la victime ou un ou plusieurs enfants sont exposés à la situation de danger mentionnée à l'article 515-9, au regard de la vraisemblance de la commission des faits de violence allégués » 

Mme Olivia Richard.  - Nous clarifions l'article 515-11 du code civil pour permettre au juge d'apprécier la notion de danger au regard de la vraisemblance des violences alléguées.

La Cour de cassation considère qu'une ordonnance de protection peut être accordée si deux conditions sont réunies : la vraisemblance des violences et le danger actuel. Or bien souvent les juges considèrent que le départ du conjoint violent du domicile conjugal met fin au danger.

Nous souhaitons revenir sur cette interprétation, afin d'augmenter le nombre d'ordonnances délivrées, qui reste trop faible. Je partage la colère de Mme Rossignol sur ce point.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°3 rectifié quater, présenté par Mme Schalck, MM. Anglars et Bazin, Mmes Bellurot et Belrhiti, MM. Brisson et Bruyen, Mme Borchio Fontimp, M. Belin, Mme Dumont, M. Darnaud, Mme Evren, MM. Frassa et Genet, Mmes Gosselin, Goy-Chavent, Gruny, Garnier et Estrosi Sassone, MM. C. Vial et Khalifé, Mme Josende, MM. Sol et Reynaud, Mme Valente Le Hir, MM. H. Leroy et Savin, Mme Micouleau, M. Somon, Mme Ventalon, M. Reichardt, Mme Imbert, MM. Lefèvre et Laménie, Mmes M. Mercier et Jacques, MM. Sautarel, Rapin, Sido, Naturel et Gremillet et Mme Aeschlimann.

Mme Elsa Schalck.  - Cet amendement vise à lever des freins à la délivrance d'une ordonnance de protection. Une femme peut être en danger même lorsqu'elle ne cohabite plus avec son conjoint violent. Des garanties juridiques sont nécessaires, aussi conservons-nous la notion de danger. Ce dispositif est donc un équilibre entre garanties et levée des freins.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°11 rectifié bis, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Mme Mélanie Vogel.  - La double conditionnalité actuelle limite l'octroi d'ordonnances de protection aux femmes victimes de violences et exposées à un danger. Or toute victime de violences est exposée à un danger, y compris de mort.

Oui, les mesures adoptées en Espagne posent question par rapport à la présomption d'innocence ou la proportionnalité. On peut discuter de l'équilibre, mais pas des conséquences de cette politique : la proportion de femmes tuées après avoir porté plainte est passée de 75 à 20 %, et les féminicides sont deux fois moins nombreux en Espagne qu'en France par rapport à la population.

Bref, il y a un choix à faire entre des considérations juridiques, respectables, et la protection des vies.

Mme la présidente.  - Amendement n°15 rectifié bis, présenté par Mme Aeschlimann, MM. Rapin, Bruyen et Brisson, Mme Joseph, MM. Cadec, Milon, Panunzi, Pellevat et Anglars, Mmes Gosselin et Belrhiti, M. J.P. Vogel, Mme Jacques, MM. Karoutchi, Khalifé, Laugier, Klinger et Savin, Mmes Borchio Fontimp, Ciuntu et Evren et M. Genet.

Après l'alinéa 1

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° À la première phrase du premier alinéa de l'article 515-11, les mots : « et le danger » sont remplacés par les mots : « caractérisant le danger » ;

Mme Marie-Do Aeschlimann.  - Nous allons toutes dans le même sens, preuve que l'article 515-11 du code civil pose une difficulté, qu'elle tienne à sa rédaction ou à son interprétation. De fait, il est difficile de caractériser la notion de danger.

La France a pris du retard, notamment par rapport à l'Espagne : pour une population moins importante, 30 fois plus d'ordonnances de protection sont demandées et accordées.

Le guide de l'ordonnance de protection diffusé par la Chancellerie explique que la vraisemblance des violences alléguées établit le danger. Il faut clarifier ce point pour renforcer la protection des femmes. Je me réjouirai donc de l'adoption de tout amendement de cette discussion commune, quel qu'il soit.

Mme la présidente.  - Amendement n°6, présenté par Mme Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'alinéa 1

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° À la première phrase du premier alinéa de l'article 515-11, la deuxième occurrence du mot : « et » est remplacée par le mot : « ou » ;

Mme Laurence Rossignol.  - Cet amendement remplace la conjonction « et » par la conjonction « ou ». Il procède d'un examen attentif de la jurisprudence.

La Cour de cassation applique de manière très stricte le caractère cumulatif des conditions. Or certains juges estiment qu'il n'y a plus de danger lorsque le conjoint violent a quitté le domicile ou n'accordent pas la protection malgré une multitude de SMS menaçants parce que, jusqu'alors, le conjoint n'a pas frappé.

L'ordre d'examen des amendements ne convient pas. Celui-ci aurait dû être examiné au début de la discussion commune, parce qu'il est le plus protecteur. Les trois amendements identiques en constituent un repli - plus exactement, ils sont une arnaque, car ils ne changent rien !

Mme Dominique Vérien, rapporteure.  - Ce point est le noeud du débat. L'ordonnance de protection est un dispositif auquel nous sommes toutes et tous attachés, mais il est perfectible - chacun en est convenu.

L'un des freins identifiés par les associations tient à la rédaction de l'article 515-11 du code civil, qui prévoit deux critères cumulatifs : la vraisemblance des faits de violence allégués et l'existence d'un danger. Certains juges considèrent qu'il n'y a pas lieu d'accorder la protection quand les conjoints ne cohabitent plus, même si cette interprétation ne paraît pas cohérente avec l'article 515-9.

Je suis donc sensible aux amendements déposés, visant à répondre à ces difficultés de terrain. Nous avons travaillé dans un esprit transpartisan pour trouver la bonne solution.

Une ordonnance de protection ne peut être délivrée, réduisant les droits de la personne visée, mais non déclarée coupable, que si elle est considérée comme dangereuse. Il faut donc lier les violences au danger. C'est le sens des trois amendements identiques, auxquels la commission est favorable. Avis défavorable sur les autres.

Mme Laurence Rossignol.  - Ce n'est pas sérieux...

Mme Sarah El Haïry, ministre déléguée.  - Quand il y a violences, évidemment, il y a danger. Mais supprimer la condition autonome de danger mettrait en péril la constitutionnalité du dispositif.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Ce n'est pas vrai !

Mme Laurence Rossignol.  - On nous dit ça à chaque fois...

Mme Sarah El Haïry, ministre déléguée.  - Les juges et les procureurs manient de mieux en mieux cette notion de danger. Le nombre d'ordonnances de protection accordées est passé de 1 000 à 4 000, grâce à la prise de conscience des acteurs. Avis défavorable aux amendements.

Demande de priorité

Mme Laurence Rossignol .  - Pour la bonne tenue de nos débats, je demande la priorité de vote sur l'amendement n°6.

Je comprends les arguments des uns et des autres, même si ceux relatifs à la constitutionnalité me semblent quelque peu tirés par les cheveux... Le Sénat doit pouvoir se prononcer sur toutes les propositions présentées, qui toutes sont sérieuses.

La nôtre est plus simple. Si elle n'est pas adoptée, les autres amendements pourront être mis aux voix comme des replis. L'ordre de discussion actuel nous met dans l'obligation de voter contre ces amendements, dans l'espoir que le nôtre soit soumis au vote.

Acceptée par la commission et le Gouvernement, la demande de priorité est adoptée.

Discussion des articles (Suite)

Mme Laurence Harribey.  - En effet, l'amendement le plus simple est le nôtre : il transforme les conditions cumulatives en conditions alternatives.

Lorsque l'Assemblée nationale a examiné le texte de Cécile Untermaier, le risque d'inconstitutionnalité n'a pas été soulevé. Par ailleurs, le JAF joue déjà un rôle hybride - civil et pénal.

Le document adressé par le ministère de la justice à l'ensemble des acteurs explique bien que toute violence vraisemblable aboutit à un danger. Votons notre dispositif, qui est encore plus clair.

Mme Mélanie Vogel.  - Nous voterons l'amendement n°6. J'ai moi-même été surprise de l'ordre d'examen de ces amendements, déterminé par leur nombre de mots plutôt que par la substance des changements apportés au texte initial...

Mme Annick Billon.  - Je me réjouis que l'amendement n°6 soit voté en priorité. Cette proposition de loi vise à protéger au mieux les victimes, dont le nombre reste élevé. L'argument d'inconstitutionnalité est fréquemment invoqué, mais souvent sans raison. Je voterai cet amendement avec enthousiasme.

Mme Olivia Richard.  - Il faut davantage de protection, mais pas au risque de fragiliser l'ensemble du dispositif. Nous soutenons la position d'équilibre de la rapporteure.

Mme Evelyne Corbière Naminzo.  - Nous voterons l'amendement de Laurence Rossignol pour renforcer la protection des femmes et des enfants victimes de violences intrafamiliales. Trop peu d'ordonnances de protection sont actuellement accordées, et nombre de féminicides sont commis après des refus d'octroi. Cet amendement augmentera le nombre d'ordonnances délivrées, protégeant ainsi mieux les femmes.

Mme Elsa Schalck.  - Je rejoins Olivia Richard. Je comprends l'esprit de cet amendement, mais veillons à ne pas fragiliser le dispositif. On ne peut pas faire fi de la position de la Cour de cassation. Certes, il faut lever des freins, mais veillons à maintenir un équilibre.

Mme Laurence Rossignol.  - Ma chère collègue, la Cour de cassation juge en droit, en fonction de la rédaction actuelle du code. Nous, législateurs, pouvons intervenir pour changer la loi : la Cour de cassation jugera en fonction de la nouvelle rédaction. Nul risque, donc, que la jurisprudence antérieure de la Cour de cassation pose problème.

Quant à l'argument de la constitutionnalité, combien de fois nous a-t-on fait le coup ? Le Conseil constitutionnel, saisi par le biais d'une QPC, estimerait que la notion de danger relève du concept et non du droit. Mais que dire, alors, de celle de violence vraisemblable ? Si le juge constitutionnel écartait la première, il écarterait à plus forte raison la seconde...

Pour allonger la durée de l'ordonnance de protection, je le disais, il aura fallu que nous nous y prenions à six fois. Nous viendrons de même à la suppression du cumul de critères. Gagnons du temps : faisons-le tout de suite !

Mme Dominique Vérien, rapporteure.  - La Cour de cassation s'appuiera, en effet, sur la nouvelle rédaction du code. Mais elle pourrait estimer, cette fois, qu'il y a risque d'inconstitutionnalité, et donc transmettre une QPC au Conseil constitutionnel, lequel ne s'est jamais prononcé sur la constitutionnalité de l'ordonnance de protection. Or cette procédure conduit à faire prononcer par le juge civil des peines relevant normalement du juge pénal, raison pour laquelle il peut y avoir lieu de craindre cette décision.

Gwenola Joly-Coz préconise la création d'un juge VIF, à l'image du juge des enfants. Comme ce n'est pas le cas pour l'heure, nous avons essayé de trouver un équilibre. Les amendements que vous appelez de repli, madame Rossignol, sont des amendements qui nous permettent d'avancer.

Mme Sarah El Haïry, ministre déléguée.  - La position du Gouvernement est constante. Lors des débats antérieurs, le garde des sceaux avait dit que nous devions nous montrer prudents, car le Conseil constitutionnel opère un contrôle rigoureux. Veillons à la proportionnalité du dispositif pour ne pas risquer d'en perdre le bénéfice.

Mme Laurence Rossignol.  - J'attends la décision du Conseil !

L'amendement n°6 n'est pas adopté.

Les amendements identiques nos2 rectifié, 3 rectifié quater et 11 rectifié bis sont adoptés.

L'amendement n°15 n'a plus d'objet.

Mme la présidente.  - Amendement n°10 rectifié ter, présenté par M. Bazin, Mme Eustache-Brinio, M. Karoutchi, Mmes Bellurot et Aeschlimann, MM. Pellevat, Laménie, Mandelli, Daubresse et Chatillon, Mmes M. Mercier, Muller-Bronn et Valente Le Hir, M. Sol, Mme Borchio Fontimp, MM. Bouchet, Khalifé, Savin, Cambon et Lefèvre, Mme Belrhiti, M. Sido, Mmes Gruny et Lassarade, M. Belin, Mme Dumont, M. Saury, Mme Dumas et MM. J.B. Blanc et Genet.

Après l'alinéa 1

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

...° Après le 3° de l'article 515-11, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ...° Statuer sur le sort des animaux de compagnie détenus au sein du foyer ; »

M. Arnaud Bazin.  - Cet amendement améliore la protection des femmes et des enfants exposés aux violences en offrant la possibilité au juge de se prononcer sur le sort de l'animal de compagnie. Il s'agit de permettre à la victime de quitter le domicile sereinement, de nombreux conjoints violents se servant de l'animal comme objet de chantage.

En effet, près de la moitié des femmes victimes de violences ont retardé leur départ en raison de pressions exercées sur l'animal de compagnie, objet de manipulation et de chantage pour les conjoints violents. Un foyer sur deux possédant un ou plusieurs animaux de compagnie, le sujet est important. Nous proposons que le juge statue sur la garde de l'animal de compagnie.

Mme Dominique Vérien, rapporteure.  - Ce sujet a déjà été évoqué plusieurs fois, c'est un vrai moyen de pression. On m'a parlé de pères obligeant leurs enfants à abandonner leur animal... Lors d'un divorce, les animaux sont considérés comme des biens meubles, mais il n'est pas question de ce type de partage lors d'une ordonnance de protection.

J'ai demandé à un juge civil s'il ne pouvait pas déjà décider de ce type de mesure : il m'a répondu que non. Dès lors, avis favorable.

Mme Sarah El Haïry, ministre déléguée.  - L'emprise peut prendre de multiples formes. Mais si le JAF avait à statuer sur le sort de l'animal de compagnie, il devrait se demander qui en est propriétaire... Cet amendement ne règle pas la question du lien affectif. Avis défavorable.

M. Arnaud Bazin.  - J'ai parlé d'attribuer la garde provisoire, non la propriété. C'est raisonnable et proportionné.

L'amendement n°10 rectifié ter est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°4, présenté par Mme Harribey et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'alinéa 1

Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :

...° Le 5° de l'article 515-11 est ainsi rédigé :

« 5° Examiner la suspension de l'autorité parentale de l'auteur des violences jusqu'à ce que le juge ait statué sur les modalités d'exercice de l'autorité parentale. Le cas échéant, la décision de ne pas suspendre l'autorité parentale de l'auteur des violences doit être spécialement motivée, et le juge doit se prononcer sur les modalités du droit de visite et d'hébergement au sens de l'article 373-2-9 » ;

...° Après le 5° de l'article 515-11, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ... ° Se prononcer, le cas échéant et y compris si la suspension de l'autorité parentale prévue à l'alinéa précédent est prononcée, sur la contribution aux charges du mariage pour les couples mariés, sur l'aide matérielle au sens de l'article 515-4 pour les partenaires d'un pacte civil de solidarité et sur la contribution à l'entretien et à l'éducation des enfants » ;

Mme Laurence Harribey.  - Il faut jumeler la question de l'ordonnance de protection avec la suspension de l'autorité parentale du parent violent.

Mme Dominique Vérien, rapporteure.  - L'autorité parentale est retirée pour des faits graves - je vous renvoie à la loi Santiago. Ici, il s'agit de mesures civiles. Elles sont certes teintées de pénal, mais il n'est pas souhaitable de se rapprocher davantage du pénal. Avis défavorable.

Mme Sarah El Haïry, ministre déléguée.  - Avis défavorable. L'ordonnance de protection est prononcée par un juge civil qui ne statue que sur la demande des parties. Le JAF ne peut s'autosaisir et n'est pas compétent pour ordonner le retrait ou la suspension de l'autorité parentale, qui relève du tribunal judiciaire, en formation collégiale. Une décision d'une telle gravité ne peut être prise dans le cadre d'une procédure d'urgence.

Mme Laurence Harribey.  - La discussion précédente et celle-ci montrent que notre système bat de l'aile. Nous sommes constamment entre le pénal et le civil. Cela donne raison aux Espagnols, qui ont créé un tribunal spécialisé. L'objectif, c'est la protection des victimes et des enfants, or nous butons sur des éléments de droit. Que de temps perdu !

Mme Dominique Vérien, rapporteure.  - Les Espagnols ont bien une séparation entre le civil et le pénal, traité trois ans après le civil. En revanche, leur juge civil a de vraies compétences de juge d'instruction, que n'a pas notre JAF. Il nous faut encore travailler pour aboutir à un système réellement mixte.

L'amendement n°4 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°18 rectifié bis, présenté par Mme Aeschlimann, MM. Rapin, Bruyen et Brisson, Mme Joseph, MM. Cadec, Milon, Panunzi, Pellevat et Anglars, Mmes Gosselin et Belrhiti, M. J.P. Vogel, Mme Jacques, MM. Karoutchi, Khalifé, Laugier, Klinger et Savin, Mmes Borchio Fontimp, Ciuntu et Evren et M. Genet.

I. - Après l'alinéa 2

Insérer trois alinéas ainsi rédigés :

...° Après le 7° de l'article 515-11, il est inséré un 8 ° ainsi rédigé :

« 8° Ordonner une évaluation de la situation socioprofessionnelle de la partie demanderesse et l'orienter, le cas échéant, vers une association agréée ou un service public de l'insertion et de l'emploi. » ;

II. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

.... - Les conditions d'application du 8° de l'article 515-11 sont fixées par décret au plus tard six mois à compter de la publication de la loi. 

Mme Marie-Do Aeschlimann.  - Il s'agit de compléter les mesures que le JAF peut prononcer dans le cadre de l'ordonnance de protection, car il y a un impensé : la dépendance économique des femmes victimes de violences. Ainsi 65 victimes de féminicides sur 146 n'exerçaient pas ou plus d'activité professionnelle.

Il faut les accompagner dans leur réinsertion professionnelle. Aussi, je propose que le juge puisse préconiser une orientation vers une association agréée ou un service public de l'insertion et de l'emploi.

Ne laissons pas de telles situations d'emprise économique perdurer !

Mme Dominique Vérien, rapporteure.  - Je partage votre préoccupation, mais ne chargeons pas trop le JAF. Les femmes sont déjà orientées vers des associations d'aide aux victimes ; c'est aussi le rôle des travailleurs sociaux dans les gendarmeries ou les commissariats. Nous demandons au JAF de statuer rapidement : six jours pour l'ordonnance de protection, 24 heures pour l'ordonnance de protection immédiate. Laissons faire les associations. Avis défavorable.

Mme Sarah El Haïry, ministre déléguée.  - Je vous rejoins sur le fond, et rappelle que le parquet oriente aussi vers les associations d'aide aux victimes, qui auront donc un accompagnement. Avis défavorable toutefois, car le JAF se prononce en urgence.

Mme Annick Billon.  - Je partage l'intention de l'amendement, mais n'alourdissons pas l'ordonnance de protection.

À l'initiative de Valérie Létard, nous avions adopté une aide d'urgence, abondée par le Gouvernement, pour ces femmes qui n'ont pas d'autonomie économique.

Nous devons surtout nous battre pour l'égalité salariale des femmes, pour qu'elles aient une retraite convenable, pour qu'elles puissent choisir entre partir et rester. Nous avons voté plusieurs dispositifs en ce sens, dont l'index d'égalité. À travail égal, salaire égal !

Mme Marie-Do Aeschlimann.  - Nous sommes tous d'accord - mais cela ne résout pas le problème ! Il me semble que vous surestimez la surcharge que cela représenterait pour le JAF : il ne s'agit que d'ajouter une ligne pour préconiser une orientation vers une structure adéquate, dans le cas où la victime, sans emploi ni revenus, risque de tomber dans une spirale de précarité économique. Je regrette ces avis défavorables.

Mme Marie Mercier.  - Distinguons dépendance et emprise. La dépendance économique peut être liée à des difficultés inhérentes nécessitant un accompagnement spécifique. Mais l'emprise, c'est la prise de possession du psychisme par l'autre : cela nécessite un traitement thérapeutique.

Mme Anne-Sophie Romagny.  - L'ordonnance de protection sert à sauver des vies, pas à résoudre la dépendance économique. Je partage l'objectif, mais il s'agit ici de sauver des femmes d'un danger grave et imminent.

L'amendement n°18 rectifié bis n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°23, présenté par Mme Vérien, au nom de la commission.

Après l'alinéa 3

Insérer cinq alinéas ainsi rédigés :

...° L'article 515-13 est ainsi modifié :

a) Au début du premier alinéa, est ajoutée la mention : « I.  -  » ;

b) Il est ajouté un paragraphe ainsi rédigé :

« II.  -  Une ordonnance provisoire de protection immédiate peut également être délivrée en urgence par le juge à la personne majeure menacée de mariage forcé, dans les conditions fixées à l'article 515-13-1.

« Le juge est compétent pour prendre les mesures mentionnées au troisième alinéa du même article 515-13-1. Il peut également ordonner, à sa demande, l'interdiction temporaire de sortie du territoire de la personne menacée. Cette interdiction de sortie du territoire est inscrite au fichier des personnes recherchées par le procureur de la République. » ;

Mme Dominique Vérien, rapporteure.  - Les personnes menacées de mariage forcé peuvent demander l'octroi d'une ordonnance de protection. Autorisons-les à demander une OPPI, ce qui permet d'ordonner une interdiction temporaire de sortie du territoire, afin d'éviter qu'elles ne soient conduites de force à l'étranger pour y être mariées.

Mme Sarah El Haïry, ministre déléguée.  - Nous partageons l'objectif. Le mariage forcé est une indignité. Sagesse, car il faudra améliorer la rédaction au cours de la navette.

L'amendement n°23 est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°1, présenté par Mme Corbière Naminzo et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky.

Alinéas 5 à 8

Remplacer ces alinéas par trois alinéas ainsi rédigés :

« Art. 515-13-1. - En cas d'urgence, lorsqu'il existe des raisons sérieuses de considérer comme vraisemblables la commission des faits de violences allégués et le danger grave et immédiat auquel la victime ou un ou plusieurs enfants sont exposés, le procureur de la République délivre une ordonnance provisoire de protection immédiate aux victimes.

« Le ministère public invite et assiste, avec son accord, la personne en danger à la saisine dans les plus brefs délais du juge aux affaires familiales pour qu'il statut sur la délivrance d'une ordonnance de protection telle que prévue aux articles 515-9 à 515-13.

« Le procureur de la République est compétent pour prononcer, à titre provisoire, les mesures mentionnées aux 1° , 1° bis, 2° et 2° bis de l'article 515-11. Ces mesures prennent fin à compter de la décision statuant sur une demande d'ordonnance de protection et au plus tard dans un délai de six jours. » 

Mme Evelyne Corbière Naminzo.  - L'OPPI doit être rendue non par le JAF mais par le procureur de la République. Le parquet dispose d'une permanence ce qui lui permet de répondre dans les 24 heures. De plus, l'OPPI n'a d'intérêt que si elle est correctement notifiée au conjoint violent - or c'est le procureur de la République non le JAF qui est en contact permanent avec la police. Autant de raisons pratiques qui justifient que le procureur soit l'autorité compétente - comme il l'est pour les ordonnances de placement provisoire des enfants en danger.

Mme la présidente.  - Amendement n°8 rectifié, présenté par M. Mohamed Soilihi et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.

I.  -  Alinéa 5

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Art. 515-13-1.  -  Lorsque le juge aux affaires familiales est saisi d'une demande d'ordonnance de protection dans les conditions prévues au premier alinéa de l'article 515-10, le ministère public peut, avec l'accord de la personne en danger, demander également une ordonnance provisoire de protection immédiate. » 

II.  -  Alinéa 6, seconde phrase

Supprimer cette phrase.

M. Thani Mohamed Soilihi.  - Cet amendement a un double objectif : simplifier la procédure de délivrance des OPPI en supprimant l'avis conforme du parquet, et supprimer l'interdiction pour le juge de refuser une OPPI lorsque la requête est accompagnée de pièces en langue étrangère.

Mme la présidente.  - Amendement n°19 rectifié bis, présenté par Mme Aeschlimann, MM. Rapin, Bruyen et Brisson, Mme Joseph, MM. Cadec, Milon, Panunzi, Pellevat et Anglars, Mmes Gosselin et Belrhiti, M. J.P. Vogel, Mme Jacques, MM. Karoutchi, Khalifé, Laugier, Klinger et Savin, Mmes Ciuntu et Evren et M. Genet.

I.  -  Alinéa 5, première phrase

Supprimer les mots :

, sur avis conforme du ministère public qui se prononce dans un délai de vingt-quatre heures,

II.  -  Alinéa 6

Rédiger ainsi cet alinéa :

« L'ordonnance provisoire de protection immédiate est automatiquement délivrée par le juge aux affaires familiales.

III.  -  Après l'alinéa 6

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Vingt-quatre heures après la délivrance de l'ordonnance provisoire de protection immédiate, le juge aux affaires familiales peut, s'il l'estime nécessaire, lever les mesures prévues par l'ordonnance provisoire de protection immédiate.

Mme Marie-Do Aeschlimann.  - Cet amendement d'appel vise à inverser la charge de la preuve. On pourrait considérer que le dépôt d'une demande d'ordonnance de protection est automatiquement assorti d'une ordonnance de protection immédiate, afin de mieux protéger la victime. J'entends que l'OPPI préserve mieux les droits de la défense, mais cette proposition est défendue par des avocats.

Mme la présidente.  - Amendement n°17 rectifié bis, présenté par Mme Aeschlimann, MM. Rapin, Bruyen et Brisson, Mme Joseph, MM. Cadec, Milon, Panunzi, Pellevat et Anglars, Mmes Gosselin et Belrhiti, M. J.P. Vogel, Mme Jacques, MM. Karoutchi, Khalifé, Laugier, Klinger et Savin, Mmes Ciuntu et Evren et M. Genet.

Alinéa 6, première phrase

Remplacer les mots :

et le danger

par les mots :

caractérisant le danger

Mme Marie-Do Aeschlimann.  - Le débat a eu lieu.

Mme la présidente.  - Amendement n°7, présenté par Mme Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 6, première phrase

Remplacer la deuxième occurrence du mot :

et

par le mot :

ou

Mme Laurence Rossignol.  - Il s'agissait d'un amendement de coordination, que je retire.

L'amendement n°7 est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement n°14, présenté par Mme Billon.

Alinéa 6, première phrase

Remplacer les mots :

grave et immédiat

par le mot :

caractérisé

Mme Annick Billon.  - La notion de danger n'étant définie par aucun texte, l'ajout des adjectifs « grave et immédiat » compliquerait encore l'interprétation. Je propose de les remplacer par « danger caractérisé ».

Mme la présidente.  - Amendement n°20 rectifié bis, présenté par Mme Aeschlimann, MM. Rapin, Bruyen et Brisson, Mme Joseph, MM. Cadec, Milon, Pellevat et Anglars, Mmes Gosselin et Belrhiti, M. J.P. Vogel, Mme Jacques, MM. Karoutchi, Khalifé, Laugier, Klinger et Savin, Mmes Ciuntu, Borchio Fontimp et Evren et M. Genet.

Après l'alinéa 7

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« L'ordonnance provisoire de protection immédiate est transmise à la force publique sans délai.

Mme Marie-Do Aeschlimann.  - Il faut informer sans délai la force publique de la délivrance d'une OPPI. La victime est d'autant plus vulnérable que la demande de protection a vocation à être signifiée à l'auteur des violences, ce qui risque d'entraîner un regain d'agressivité. Il faut l'anticiper en s'assurant qu'au moindre appel, la victime sera immédiatement identifiée. L'enjeu est d'aboutir à une meilleure coordination et une meilleure circulation de l'information entre le JAF, la police, la gendarmerie et la victime, qui se sentira ainsi plus soutenue.

Mme Dominique Vérien, rapporteure.  - L'amendement n°1 reprend la proposition du Plan rouge VIF. Or le choix a été fait de rendre l'ordonnance de protection immédiate accessoire à l'ordonnance de protection. Avis défavorable, d'autant que l'amendement reviendrait sur certains apports de la commission.

L'amendement n°8 rétablit la rédaction initiale du Gouvernement, or la commission a souhaité ajouter le filtre de l'avis conforme du procureur, solution suggérée par la conférence nationale des procureurs de la République. Je ne pense pas que cela complexifie la procédure, mais j'entends bien que l'avis conforme du procureur nuit au caractère civil de la procédure. La commission a donc émis un avis de sagesse, car nous voulions entendre le Gouvernement.

Avis défavorable à l'amendement d'appel n°19 rectifié bis, car on ne peut lier ainsi le juge.

Avis défavorable aux amendements nos 17 rectifié bis et 14. L'OPPI est une procédure civile, sans contradictoire et sans recours possible : elle ne peut être ordonnée que dans des cas très exceptionnels, d'où la mention d'un danger « grave et immédiat ».

L'amendement n°20 rectifié bis est satisfait par le 17° de l'article 230-19 du code de procédure pénale, qui prévoit l'inscription sur le fichier des personnes recherchées de toute personne soumise à une ordonnance de protection ou une OPPI. Retrait sinon avis défavorable.

Mme Sarah El Haïry, ministre déléguée.  - Les équipes du garde des sceaux ont beaucoup travaillé pour rassurer ceux qui doutent de la capacité des procureurs à exercer leur office. Ces derniers maîtrisent les procédures d'urgence. Vous connaissez l'implication du garde des sceaux contre les violences sexistes et sexuelles. Nous passerons par une circulaire pour clarifier le circuit opérationnel. Les équipes sont pleinement mobilisées.

Plusieurs amendements tendent à modifier les conditions de délivrance de l'OPPI. Le transfert de compétences au parquet poserait des difficultés constitutionnelles, car l'OPPI s'apparente à une sanction pénale. La séparation des autorités de poursuite et de jugement doit être respectée, les actes les plus attentatoires aux libertés doivent rester de la compétence d'un magistrat du siège. La nature accessoire de l'OPPI participe à la constitutionnalité du dispositif.

Avis défavorable à l'amendement n°1, de même qu'aux amendements nos19 rectifié bis, 17 rectifié bis et 14 qui portent atteinte à la liberté d'aller et venir, au droit à la vie privée et familiale et au droit au logement. Évitons tout risque d'instrumentalisation.

Avis favorable à l'amendement n°8 rectifié, en revanche.

En pratique, les forces de sécurité intérieure seront avisées, puisque les interdictions contenues dans l'ordonnance seront inscrites au fichier des personnes recherchées : dès lors, avis défavorable à l'amendement n°20 rectifié bis.

Mme Dominique Vérien, rapporteure.  - Sur l'amendement n°8 rectifié, madame la ministre, vous parlez de circulaire, mais nous manquons de précisions... Si l'avis conforme du procureur doit être bloquant, nous pouvons envisager un avis simple. Mais comment lui signaler que la partie demanderesse souhaite une mise en oeuvre en urgence ? Je ne doute pas de votre bonne volonté. Nous avons encore une semaine avant la CMP. L'objectif est d'ouvrir plus facilement l'ordonnance de protection, mais aussi de mieux protéger : actuellement, l'OPPI ne concerne qu'une dizaine de cas par an, c'est trop peu.

Je propose que nous n'adoptions pas l'amendement n°8 rectifié et que nous nous laissions le temps de la discussion jusqu'à la semaine prochaine.

Mme Evelyne Corbière Naminzo.  - Nos débats ont tourné autour des limites des compétences du JAF, mal dimensionnées par rapport aux ambitions qui sous-tendent les ordonnances de protection. Le procureur de la République est celui qui prononce les ordonnances de placement provisoire pour les enfants en danger, il est compétent pour évaluer le danger. C'est aussi lui qui assure la coordination avec les forces de l'ordre et qui a la prérogative pour agir lorsqu'un téléphone grave danger ou un bracelet anti-rapprochement a été fourni. Le JAF, a contrario, n'est pas assez équipé.

Il faut peut-être revoir la copie à la base.

Mme Laurence Rossignol.  - C'est la raison !

L'amendement n°1 n'est pas adopté.

Mme Olivia Richard.  - Je rejoins la rapporteure sur l'amendement n°8 rectifié. Je ne vois pas en quoi une demande d'ordonnance de protection immédiate, quand la victime peut demander une ordonnance de protection à titre principal, entacherait le dispositif d'inconstitutionnalité.

J'entends la difficulté liée à l'absence de contradictoire, mais le délai est très court. Il est indispensable que les victimes puissent disposer de ce recours.

M. Thani Mohamed Soilihi.  - Il n'a jamais été question de problème de constitutionnalité ! Je suis dans la coconstruction. La logique voudrait que l'on adopte mon amendement, quitte à l'améliorer au cours de la navette.

Mon but est de simplifier la procédure et de réduire les délais. Nous épargnons à la partie demanderesse des mesures procédurales supplémentaires.

Mme Dominique Vérien, rapporteure.  - Ce que vous proposez correspond à la rédaction de l'Assemblée nationale. Le débat aura donc forcément lieu en CMP ! (Mme Laurence Harribey s'en amuse.)

L'amendement n°8 rectifié n'est pas adopté.

Les amendements nos19 rectifié bis, 17 rectifié bis, 14 et 20 rectifié bis sont retirés.

L'article 1er, modifié, est adopté.

Après l'article 1er

Mme la présidente.  - Amendement n°16 rectifié bis, présenté par Mme Aeschlimann, MM. Rapin, Bruyen et Brisson, Mme Joseph, MM. Cadec, Milon, Panunzi, Pellevat et Anglars, Mmes Gosselin et Belrhiti, M. J.P. Vogel, Mme Jacques, MM. Karoutchi, Khalifé, Laugier, Klinger et Savin, Mmes Borchio Fontimp, Ciuntu et Evren et M. Genet.

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À l'article 515-9 du code civil, le mot : « victime, » est remplacé par les mots : « victime ou ».

Mme Marie-Do Aeschlimann.  - Cohérence rédactionnelle avec la loi du 4 août 2014.

Mme Dominique Vérien, rapporteure.  - C'est pertinent, avis favorable.

Mme Sarah El Haïry, ministre déléguée.  - Avis défavorable.

L'amendement n°16 rectifié bis est adopté et devient un article additionnel.

Mme la présidente.  - Amendement n°5, présenté par Mme Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le 6° bis de l'article 515-11 du code civil, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ...° Autoriser la partie demanderesse à dissimuler l'adresse de l'école de son ou ses enfants ; ».

Mme Laurence Rossignol.  - Nous permettons au juge d'inclure dans le périmètre de l'ordonnance de protection l'anonymisation de l'adresse de l'école où les enfants sont scolarisés. On sait en effet que les pères harceleurs passent souvent par l'école pour poursuivre la mère de leur obsession vengeresse.

Mme Dominique Vérien, rapporteure.  - Avis favorable. Cela complète utilement les mesures que peut prononcer le juge dans le cadre d'une ordonnance de protection, et va de pair avec la dissimulation de l'adresse de la partie demanderesse.

Mme Sarah El Haïry, ministre déléguée.  - L'interdiction de contact est plus forte encore. Le parent connaît déjà l'adresse de l'école. Avis défavorable.

Mme Dominique Vérien, rapporteure.  - Pas forcément, s'il y a eu un déménagement.

Mme Laurence Rossignol.  - Sagesse, madame la ministre ?

Mme Sarah El Haïry, ministre déléguée.  - Non, défavorable.

L'amendement n°5 est adopté et devient un article additionnel.

Article 1er bis

Mme la présidente.  - Amendement n°24, présenté par Mme Vérien, au nom de la commission.

I. - Alinéa 2

Remplacer les mots :

Lorsque l'électeur mentionné au premier alinéa fait l'objet d'une mesure prononcée au 6° ou au 6° bis de l'article 515-11 du code civil

par les mots :

Lorsqu'une mesure mentionnée au 6° ou au 6° bis de l'article 515-11 du code civil a été prononcée

II. - Alinéa 4

1° Après le mot :

puisse

insérer les mots :

, à titre dérogatoire, 

2° Supprimer les mots :

à la personne contre laquelle l'ordonnance de protection a été octroyée 

Mme Dominique Vérien, rapporteure.  - Anne-Sophie Romagny m'a signalé le cas d'un homme venu demander en préfecture la liste électorale, sur laquelle on peut trouver toutes les adresses, y compris celles dont on a pourtant demandé la dissimulation.

Notre amendement en commission était trop restrictif, car l'auteur des violences peut très bien envoyer un ami à sa place. Nous étendons cette dissimulation à toute personne effectuant ce type de demande.

Mme Laurence Rossignol.  - Très bien.

Mme Sarah El Haïry, ministre déléguée.  - Avis favorable à cet amendement de bon sens.

L'amendement n°24 est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°9 rectifié, présenté par M. Mohamed Soilihi et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par les mots :

et précisées par décret en Conseil d'État

M. Thani Mohamed Soilihi.  - Gare à ne pas compromettre la transparence démocratique. Cet amendement encadre strictement la possibilité de masquer l'identité et l'adresse d'un électeur, en renvoyant les modalités d'application à un décret en Conseil d'État.

Mme Dominique Vérien, rapporteure.  - Je comprends cette exigence, mais nous espérons que le Gouvernement prendra ce décret rapidement. Sinon, attendez-vous à ce que plusieurs questions écrites et orales soient posées jusqu'à sa parution ! Avis favorable.

Mme Sarah El Haïry, ministre déléguée.  - Double avis favorable ! Je rassure le Sénat : le décret sera pris rapidement, bien sûr.

L'amendement n°9 rectifié est adopté.

L'article 1er bis, modifié, est adopté.

Article 2

Mme la présidente.  - Amendement n°21 rectifié bis, présenté par Mme Aeschlimann, MM. Rapin, Bruyen et Brisson, Mme Joseph, MM. Cadec, Milon, Panunzi, Pellevat et Anglars, Mmes Gosselin et Belrhiti, M. J.P. Vogel, Mme Jacques, MM. Karoutchi, Khalifé, Laugier, Klinger et Savin, Mmes Ciuntu et Evren et M. Genet.

Après l'alinéa 6

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° Après le premier alinéa de l'article 227-4-2, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« En cas de violation des mesures prononcées dans le cadre d'une ordonnance provisoire de protection immédiate ou d'une ordonnance de protection, il n'est pas sursis à l'exécution de l'ordonnance pendant les délais d'appel et durant l'instance d'appel. »

Mme Marie-Do Aeschlimann.  - Pour renforcer l'effet dissuasif de l'OPPI, faisons prévaloir le régime de l'exécution provisoire de droit attachée aux décisions du JAF sur le régime de l'exécution provisoire, qui n'est pas de droit.

Mme Dominique Vérien, rapporteure.  - Votre amendement est satisfait par l'article 1136-7 du code de procédure civile. Sauf exception décidée par le juge, les mesures prononcées dans le cadre d'une ordonnance de protection pourront être exécutées, même en cas d'appel. En outre, cet amendement serait moins-disant par rapport au droit en vigueur. Retrait sinon avis défavorable.

Mme Sarah El Haïry, ministre déléguée.  - Même avis.

L'amendement n°21 rectifié bis est retiré.

L'article 2 est adopté.

L'article 2 bis est adopté.

Article 3

Mme la présidente.  - Amendement n°25, présenté par Mme Vérien, au nom de la commission.

I.  -  Après l'alinéa 2

Insérer deux paragraphes ainsi rédigés :

....  -  Le premier alinéa de l'article 804 du code de procédure pénale est ainsi rédigé :

« Le présent code est applicable, dans sa rédaction résultant de la loi n° du allongeant la durée de l'ordonnance de protection et créant l'ordonnance provisoire de protection immédiate, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna, sous réserve des adaptations prévues au présent titre et aux seules exceptions : » .

....  -  Le premier alinéa du I de l'article L. 388 du code électoral est ainsi rédigé : 

« I.- Les dispositions du titre Ier du livre Ier du présent code, dans leur rédaction résultant de la loi n° du allongeant la durée de l'ordonnance de protection et créant l'ordonnance provisoire de protection immédiate, à l'exception des articles L. 15, L. 15-1 , L. 46-1 et L. 66, sont applicables à l'élection : » .

II.  -  Alinéa 3

1° Après les mots :

L'article 1er 

insérer les mots :

et le II de l'article 1er bis

2° Remplacer les mots :

est applicable 

par les mots :

sont applicables

Mme Dominique Vérien, rapporteure.  - Coordination afin de rendre les articles 1er bis et 2 bis applicables outre-mer.

Mme Sarah El Haïry, ministre déléguée.  - Avis favorable.

L'amendement n°25 est adopté.

L'article 3, modifié, est adopté.

Vote sur l'ensemble

Mme Annick Billon .  - J'ai été interviewée tout à l'heure au sujet de la tribune sur le #MeToo du cinéma, parue ce jour dans Le Monde, qui appelle à une grande loi contre les violences sexistes et sexuelles. Depuis 2017, nous avons voté plusieurs textes, à l'initiative du Gouvernement et de parlementaires. La loi de 2019 n'allait pas assez loin - elle a été suivie de la proposition de loi de Valérie Létard. Je pense aussi aux travaux de Dominique Vérien sur le Plan rouge VIF.

Ces avancées demeurent toutefois insuffisantes. Derrière les statistiques des féminicides, il y a des enfants privés de leurs mères, des parents qui perdent leurs filles. Le coût pour la société est immense.

Oui, ce texte est bienvenu, mais nous avançons à petits pas : nous nous heurtons systématiquement au manque de moyens, pour la justice, mais aussi pour la médecine légale, notamment.

Merci à la rapporteure d'avoir amélioré le texte. Je le voterai, en attendant des avancées en CMP.

Mme Muriel Jourda .  - Je voterai ce texte, qui marque une avancée dans la lutte contre les violences intrafamiliales.

Cela dit, le terme « féminicide », souvent employé au cours de nos débats, me paraît inapproprié. Ces femmes n'ont pas été tuées parce que femmes. (Mme Annick Billon le réfute.) Il y a eu des « tueurs de femmes », comme Henri Vidal, mais nous parlons ici de femmes tuées parce qu'elles ont des conjoints ou des ex-conjoints. La question n'est pas que sémantique. Au-delà de la prise en charge des victimes, il faut prendre en charge les auteurs. Nous ne le ferons pas correctement si nous les considérons comme mus par un sexisme pathologique. Les violences sont liées à la relation de couple, non à l'existence d'une femme. Appelons les choses par leur nom. Le « féminicide » n'a aucune existence juridique.

M. Michel Savin et Mme Catherine Di Folco.  - Très bien !

Mme Olivia Richard .  - Le groupe UC votera ce texte, et nous poursuivrons le travail en CMP.

Le terme « féminicide » n'est pas une qualification juridique, mais un état de fait. Il permet de visibiliser un phénomène de société contre lequel nous souhaitons tous lutter. (Mme Annick Billon applaudit.)

La proposition de loi, modifiée, est adoptée.

La séance est suspendue quelques instants.

Financement des entreprises et attractivité de la France (Procédure accélérée)

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, visant à accroître le financement des entreprises et l'attractivité de la France.

Discussion générale

M. Roland Lescure, ministre délégué chargé de l'industrie et de l'énergie .  - Cette proposition de loi est une étape supplémentaire dans le travail que nous menons depuis 2017, après trente ans de désindustrialisation.

Depuis 2017, nous créons des emplois - 130 000 dans l'industrie, 2 millions en tout - et nous rouvrons des usines - 176 en 2022, 201 en 2023. Cette évolution positive est le fruit d'une politique qui fonctionne : baisse des prélèvements obligatoires de 60 milliards d'euros, procédures simplifiées avec la loi Industrie verte, investissement dans les compétences et dans l'innovation avec France 2030, projets d'intérêt commun européens.

À ces bons résultats, ajoutons une attractivité retrouvée : le septième sommet Choose France a débouché sur des investissements de 15 milliards d'euros et 56 projets, avec des milliers d'emplois à la clé.

Le secteur financier n'est pas une fin en soi, mais un moyen de financer l'économie productive sur nos territoires. Les besoins de la transition écologique seront massifs : 70 milliards pour la France selon le rapport Pisani-Ferry et Mahfouz, 600 milliards d'euros pour l'Europe.

Les financements publics ne sont pas inépuisables : il faut mobiliser davantage le privé. La loi Industrie verte a créé le plan d'épargne avenir climat (Peac). L'initiative Tibi a permis de générer 30 milliards d'euros d'investissements depuis 2019.

Nous voulons avancer vers l'union des marchés de capitaux afin de mobiliser les 370 milliards d'euros d'excédents d'épargne qui quittent notre continent pour financer des entreprises - surtout américaines.

Pour ce faire, il faut renforcer notre compétitivité financière. Grâce au Brexit, Paris est redevenu le premier marché boursier européen, avec 7 000 emplois directs créés depuis 2017. Cinq ans après la loi Pacte, nous allons un cran plus loin avec ce texte. J'en remercie les rapporteurs de l'Assemblée nationale et du Sénat.

Le titre Ier de ce texte autorise les actions à droits de vote multiples, qui protégeront le contrôle des créateurs. Ils pourront mobiliser des fonds plus facilement pour favoriser leur croissance et leur décarbonation. Cela existe déjà aux États-Unis, au Royaume-Uni, en Allemagne et aux Pays-Bas. La France disposera alors du régime d'introduction en Bourse le plus compétitif d'Europe.

La proposition de loi accompagne mieux les entreprises qui débutent en Bourse en favorisant le maintien au capital des fonds crossover. Il assouplit les modalités d'augmentation du capital sans droit préférentiel de souscription, principalement utilisées par les PME.

Le titre II facilite la croissance à l'international des entreprises françaises par la dématérialisation des titres transférables. Aujourd'hui, la procédure des titres papier est trop lourde. La France sera le premier pays de l'Union européenne à le faire.

Le titre III renforce notre attractivité : le confinement a révélé que notre droit était trop peu agile. Ce titre élargit les assemblées générales au format hybride, avec des actionnaires présents et d'autres à distance. Il encadre les risques de nullité en cas de défaillance électronique.

Ce texte de simplification est attendu par nos entreprises. Il faut créer les conditions pour elles de faire le choix de la France, porte d'entrée de l'Europe, et d'y demeurer. Je suis impatient de débattre avec vous. (Applaudissements sur les travées du RDPI et du groupe INDEP ; M. Michel Masset applaudit également.)

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur de la commission des finances .  - Accroître le financement des États et renforcer l'attractivité de la France : vaste programme...

Son intitulé est ambitieux, mais le texte, technique, l'est moins, en dépit des avancées introduites par les commissions des finances et des lois, qui ont oeuvré pour améliorer le financement des PME. Je salue le travail de Louis Vogel.

Comme cela devient fréquent, le Gouvernement, peut-être faute de temps, soutient une proposition de loi qu'il a inspirée, évitant l'étude d'impact et l'avis du Conseil d'État. Bruno Le Maire avait pourtant annoncé lors de ses voeux un projet de loi... C'est dommage.

Cette proposition de loi, déposée par Alexandre Holroyd, s'inscrit dans un contexte particulier : la France et l'Europe connaissent un déficit d'investissement de 1 000 milliards d'euros selon le rapport de Christian Noyer. Les Européens ont peu d'appétence pour la Bourse : pour atteindre le niveau américain, la capitalisation européenne devrait bondir de 60 %.

La présidente de l'Autorité des marchés financiers (AMF) rappelait qu'en 2023, sept introductions en Bourse ont eu lieu, dont une seule sur le marché réglementé. Comme si cela ne suffisait pas, le directeur général de TotalEnergies a confirmé que le groupe envisageait de délocaliser sa cotation principale de Paris à New York.

M. André Reichardt.  - Lamentable !

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur.  - De simples ajustements techniques ne suffiront pas face à la concurrence fiscale et juridique d'Amsterdam et de New York.

Nous devons répondre à cette question : comment maintenir l'avantage de Paris - première place européenne en termes de capitalisation - et accroître son attractivité, notamment pour assurer le financement en capital des entreprises ?

L'article 1er autorise les entreprises à s'introduire en Bourse avec des actions à droits de vote multiples, ce que nous recommandions depuis 2017 ! Sept ans, c'est long...

La commission des finances a été guidée par une triple exigence : s'assurer du caractère opérationnel des dispositions proposées, préserver l'équilibre entre l'attractivité de la place de Paris et la protection nécessaire des épargnants - j'y avais veillé en tant que rapporteur général - et flécher davantage les dispositions vers les PME et les ETI.

Les règles d'éligibilité des PME et des ETI ont été élargies et assouplies. Par un amendement, je proposerai d'assouplir les règles applicables aux sociétés de capital-risque.

Nous nous réjouissons que l'Assemblée nationale ait retenu une disposition adoptée par le Sénat en janvier 2023, en allongeant la durée de blocage des parts dans les fonds communs de placement à risque (FCPR). Ne nous arrêtons pas au milieu du chemin : le Sénat prévoyait aussi de nouvelles obligations pour ces fonds.

Par principe, le Sénat ne s'oppose pas aux ordonnances. Mais ne perdons pas de vue la protection des épargnants au nom de l'attractivité.

Nous reviendrons sur la demande d'habilitation à légiférer par ordonnance pour modifier le cadre juridique des organismes de placement collectif (OPC). Si leur régime juridique doit être modernisé, pouvons-nous habiliter le Gouvernement à moderniser, à simplifier, à réviser ? Ce serait un blanc-seing, surtout dans un délai particulièrement long : nous avons déposé un amendement à ce sujet. Ces derniers mois, le Parlement n'a-t-il pas été suffisamment contourné ?

Le fractionnement des instruments financiers - par exemple, l'achat d'un dixième d'action - permettra de répondre à de nombreux épargnants exclus de l'accès aux marchés.

L'article 12 illustre un manque d'anticipation : il limite les indemnités de licenciement des preneurs de risque en excluant une partie de leur rémunération variable. Or cela ne concerne que quelques salariés, à la rémunération ou aux fonctions élevées.

Dès 2017, la commission des finances avait pointé le coût du travail comme un handicap pour la place de Paris. Sept ans après, les choses n'ont pas changé. En témoigne la table ronde organisée par le président Raynal le 3 avril dernier : pourquoi ne pas avoir agi plus tôt, monsieur le ministre, sur le plafonnement des indemnités de licenciement ? Il semblerait que le gouvernement ait consulté le Conseil d'État...

En 2017, le ministre qui a inspiré cette proposition de loi avait salué mon rapport sur la place de Paris et souligné que le Premier ministre s'en était directement inspiré. J'espère la même inspiration du Gouvernement, cette fois-ci ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Louis Vogel applaudit également.)

M. Louis Vogel, rapporteur pour avis de la commission de lois .  - (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP et sur quelques travées du groupe Les Républicains) La commission des lois s'est saisie de douze des articles de ce texte, qui portent essentiellement sur le droit monétaire et financier et le droit des sociétés.

Si l'attractivité dépend de facteurs pluriels, qui ne sauraient être traités par ce seul texte - fiscalité, coût du travail, droit du travail, simplification -, les différentes places sont en concurrence à travers le droit des sociétés. Dès lors, le législateur doit se mobiliser pour défendre l'attractivité de la place de Paris et surtout pour empêcher les entreprises qui y sont d'en partir.

MM. Jean-Luc Brault et André Reichardt.  - Ah !

M. Louis Vogel, rapporteur pour avis.  - Mais cet assouplissement du droit ne doit pas se faire au détriment des actionnaires minoritaires.

L'article 1er introduit une mesure attractive et innovante : l'autorisation d'émettre des actions à droits de vote multiples. Cette création est assortie de garanties : durée limitée, ratios, neutralisation des droits en cas de modification des statuts, incessibilité, notamment. La commission des lois les a toutefois nuancées dans le sens de plus de protection.

L'article 3 assouplit les modalités d'augmentation du capital sans droit préférentiel de souscription, c'est-à-dire sans offrir aux actionnaires déjà en place un avantage par rapport aux nouveaux entrants, ce qui est adapté aux PME en croissance. En réalité, nous construisons un « parcours résidentiel » des entreprises.

L'article 10 assouplit le recours à la dématérialisation de l'organisation des instances de réunion comme les conseils d'administration. Tout administrateur pouvait s'opposer à la procédure dans le texte initial : la commission propose que les entreprises déterminent les facultés d'opposition dans leurs statuts. Elle a aussi supprimé un nouveau cas de nullité résultant de problèmes techniques.

Elle a aussi promu un équilibre garantissant la protection des actionnaires minoritaires, via l'article 10 bis A, qui renforce le contentieux en cas de refus injustifié par le conseil d'administration d'inscrire certaines résolutions à l'ordre du jour. (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP et Les Républicains ; M. Michel Masset applaudit également.)

M. Thomas Dossus .  - Ce texte s'inscrit dans la logique obsessionnelle du Gouvernement : instrumentaliser l'attractivité de la France pour accentuer la financiarisation de l'économie.

Aucune conditionnalité verte ici : monsieur le ministre, cessez d'utiliser la transition écologique et le rapport Pisani-Ferry et Mahfouz comme alibi. Les rapporteurs ont été plus sincères : il s'agit bien d'augmenter la financiarisation de l'économie.

Selon le Gouvernement, l'attractivité dépend de la politique de l'offre - soit la pressurisation des travailleurs combinée aux cadeaux fiscaux sans contrepartie aux entreprises. Nous n'avons pas la même lecture. Selon le baromètre Ernst & Young, les principaux critères poussant les entreprises à choisir la France sont la qualité de la main-d'oeuvre, un environnement juridique stable, la fiabilité des infrastructures et la force du marché intérieur.

La liquidité des marchés figure en douzième place, en queue de classement. Mais c'est sur ce sujet que le Gouvernement a décidé d'agir, car cette proposition de loi est bien d'origine gouvernementale - Bruno Le Maire l'avait annoncée lors de ses voeux. Le but de la manoeuvre : s'affranchir d'une étude d'impact.

Les mesures du texte ne sont pas un levier pour l'attractivité de notre pays. Il s'agit surtout de financiariser l'économie.

La mesure phare de ce texte tout à fait dispensable est l'autorisation des actions à droits de vote multiples. Sans étude d'impact, difficile d'en voir les conséquences, alors qu'une poignée d'actions sera suffisante pour contrôler les entreprises. Nous proposerons de limiter le ratio multiplicateur entre action et droit de vote.

Nous demanderons la suppression des articles favorisant les augmentations de capital et les fonds communs de placement, non évalués.

Quant aux articles sur la dématérialisation des titres et les vidéoconférences, ils sont anecdotiques. La transition écologique, en revanche, ne l'est pas. Nous ne croyons pas à la chimère d'une finance naturellement verte. Nous avons déposé des amendements en ce sens. Nous sommes partisans d'un ciblage des entreprises engagées dans une transition écologique et solidaire.

Il faut renforcer la régulation des marchés financiers et lutter contre la dérégulation, ce qui est impossible sans transparence ni redevabilité. Mais cette proposition de loi n'en prend pas le chemin, à l'instar de la politique menée par le Gouvernement. Mon groupe ne la votera pas. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K)

La séance est suspendue à 20 heures.

Présidence de M. Pierre Ouzoulias, vice-président

La séance reprend à 21 h 30.

M. Éric Bocquet .  - Paul Lagneau-Ymonet et Angelo Riva écrivaient en 2012 dans leur Histoire de la Bourse : « La promotion des marchés financiers dans un espace déréglementé et sans frontières scelle le passage du régime économique d'après-guerre à l'économie financiarisée contemporaine ».

L'impératif de liquidité et la possibilité d'échanges infinis, désormais à la nanoseconde, voilà la recette d'une dérive boursière dont l'histoire nous avait prémunis jusque dans les années 1980.

Les Bourses elles-mêmes sont désormais cotées en Bourse, quittant la forme coopérative régulée. La frénésie financière fait perdre de vue l'objectif de financer l'économie productive et les États par la mise en relation d'un épargnant avec une entité publique ou privée.

Les agents de change ne sont plus des officiers ministériels, mais des traders. Ils passent toujours des ordres, mais sont habités surtout par la recherche du profit. Les enjeux financiers ne sont plus les mêmes : 500 milliards de francs au pic de 1930, contre plus de 7 000 milliards d'euros aujourd'hui ! Ils roulent pour des fonds d'investissement pour lesquels les salariés sont des obstacles, tout au plus.

Les marchés réglementés et les Bourses traditionnelles sont de surcroît en concurrence, depuis une directive européenne de 2007, avec des systèmes multilatéraux de négociation, par exemple pour les quotas carbone, considérés comme un actif comme un autre - quelle idée !

Un actif que l'on échange et sur lequel on spécule. Résultat : ce sont les plus gros opérateurs qui peuvent s'échanger des titres à la nanoseconde. Dans chaque faille se glisse un appétit, une prédation. Ces failles sont en fait l'intention des dirigeants libéraux : toujours plus d'échanges de capitaux, jusqu'à la prochaine folie, la prochaine crise... La confiance, dopamine des marchés, a une définition qui ne mérite aucun commentaire : « se dit de l'assurance qu'on prend sur la probité. »

La recherche d'attractivité, à laquelle le texte n'apporte aucune réponse, émane de la mise en concurrence des places comme Londres, Francfort ou Amsterdam. Euronext, fusion des opérateurs français, belges et néerlandais rejoints par quatre places boursières supplémentaires, est un opérateur de Bourse paneuropéen lui-même coté sur le marché français. C'est 513 millions de bénéfices en 2023 et 1 900 émetteurs, soit 6 600 milliards d'euros de capitalisation boursière. Faire la pluie et le beau temps, c'est sa mission. Cette Union des marchés de capitaux (UMC) avant l'heure a-t-elle produit les résultats escomptés ?

L'attractivité de la place française est secouée par l'annonce par Total d'une possible cotation à New York. Je suis tenté de dire « bon vent » à M. Pouyanné et à son groupe, si l'idée n'est pas de transférer le siège social de son groupe (M. Roland Lescure s'en offusque) - même si ce siège n'empêche pas l'évasion fiscale par le biais de filiales de trading de pétrole...

La recherche d'attractivité est un moyen de satisfaire les intérêts des grandes entreprises. Paris est le premier marché boursier européen, devant Londres. Les marchés se portent bien, les entreprises cotées aussi. Nul besoin de légiférer ; nous proposerons aussi de supprimer des dispositions contre-productives.

La seule question à se poser est la suivante : à quoi servent les marchés financiers ? Financer les entreprises et leurs capacités d'investissement. Or les marchés ont dérégulé l'économie ! Définanciarisons plutôt l'économie, en préférant des crédits bancaires rassemblés au sein d'un pôle public sur le modèle de la Caisse des dépôts. Les fonds de pensions et les capital-risqueurs n'ont que faire des projets industriels. Nous sommes résolument opposés à ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K)

M. Michel Masset .  - Un regret, d'abord, sur la méthode : le 8 janvier dernier, le Gouvernement annonçait des mesures pour renforcer l'attractivité financière de la France. Finalement, le choix a été fait de passer par une proposition de loi, qui évite l'étude d'impact et l'avis du Conseil d'État. Cela prive le Parlement d'éléments essentiels pour bien légiférer.

Cette proposition de loi s'inscrit dans une triple démarche. Elle vise à satisfaire les besoins d'investissement en réponse à des enjeux réels comme la transition écologique, la défense ou la transition numérique. Les financements bancaires peinent à satisfaire les besoins nationaux et européens des entreprises ; pour y remédier, l'auteur du texte et le Gouvernement proposent de faire appel aux marchés. Ces enjeux sont réels, car ils touchent des centaines de milliers d'emplois.

Les besoins sont importants. Le marché pourrait effectivement constituer une solution. On peut être attaché à la liberté d'entreprendre et souhaiter lever les freins nuisant aux entreprises. Lever les difficultés auxquelles peuvent se heurter les investisseurs sans perdre le contrôle de leurs entreprises pourrait être une bonne chose. Mais le principe de précaution devrait s'appliquer ici aussi : préservons-nous du tout-marché. (On apprécie sur les travées du groupe CRCE-K.)

La pression financière peut entrer en contradiction avec d'autres objectifs importants. Trouvons plutôt des mix de financement pour préserver les intérêts des entreprises françaises et européennes. Nous en sommes à 17 % de financement de marché, contre 60 % aux États-Unis : la marche est grande, mais ne nous y engouffrons pas à corps perdu.

Un combat oppose les places financières mondiales. L'Union européenne a récemment revu sa législation en matière financière. La France souhaite entretenir le dynamisme de la place de Paris. Nous nous en réjouissons, tout en regrettant un impact limité en matière de création d'emplois.

Le texte vise à moderniser le droit des affaires via la dématérialisation. Beaucoup de ces mesures sont compréhensibles. Mais soyons vigilants : ne privons pas des actionnaires minoritaires du droit de participer à la vie de l'entreprise.

Plusieurs mesures sont nécessaires à la croissance, notamment pour promouvoir une meilleure utilisation de l'épargne des Français, au service des entreprises. Une partie de notre groupe, fidèle à son ADN, pourrait se prononcer en faveur de ce texte en fonction de son évolution.

M. Bernard Buis .  - Vingt-quatre heures avant nos débats, la septième édition du sommet Choose France réunissait 180 investisseurs à Versailles.

M. Jean-François Husson.  - Royal !

M. Bernard Buis.  - À la clé, de bonnes nouvelles pour notre pays : 15 milliards d'euros investis dans 56 nouveaux projets.

C'est un nouveau record, mais nous pouvons aller plus loin. Car l'attractivité de la France, loin d'être une lubie, est palpable. Si les annonces se font dans un château, les parpaings se posent partout en France, comme vous l'avez dit, monsieur le ministre. L'Allemagne est plus touchée que nous par la guerre en Ukraine, et les Britanniques souffrent encore des conséquences du Brexit. Mais il s'agit aussi du résultat d'un travail de longue haleine mené par le Gouvernement et la majorité : réforme du marché du travail, tarifs de l'électricité, création du prélèvement forfaitaire unique et loi Pacte...

La place financière de Paris est la cinquième du monde, selon le classement Ofex (Open Financial Ecosystem IndeX). Alors que le secteur financier britannique a perdu son passeport européen, les entreprises de la City ont dû s'établir dans l'Union européenne ; la majorité d'entre elles ont choisi Paris. Cela représente plus de 5 500 emplois bancaires créés. De nouvelles banques internationales s'y installent aussi, comme la First Abu Dhabi Bank ou la Zenith Bank du Nigeria, sans oublier l'ouverture du nouveau campus européen de Morgan Stanley, avec 100 financiers et chercheurs.

Le secteur financier contribue considérablement à la prospérité du pays. Selon Europlace Paris, plus de 20 000 emplois directs et indirects nouveaux ont été créés entre 2017 et 2022 en Île-de-France. À l'échelle du pays, en 2023, 1 815 décisions d'investissement ont été recensées, avec à la clé la création ou le maintien de 60 000 emplois.

Les investissements bénéficient à l'ensemble du territoire, plus de 49 % des projets étant réalisés dans des communes de moins de 20 000 habitants, à l'image du site Microsoft qui sera construit à Petit-Landau dans le Haut-Rhin : 200 emplois, cela paraît dérisoire, mais pour ce village de 800 habitants, c'est beaucoup d'espoir !

La création d'une usine de raffinage du nickel à Blanquefort près de Bordeaux - marquée par la fermeture de l'usine Ford - est aussi à saluer : cela représente 300 millions d'euros d'investissements dans les batteries de véhicules électriques et 200 emplois. Le constructeur d'avions électriques Lilium a choisi la Nouvelle-Aquitaine, avec 850 emplois créés. Autant d'exemples d'investissements réalisés dans tous les territoires. L'objectif est clair : que la France redevienne une puissance industrielle.

Ces investissements jouent un rôle décisif dans le plein emploi, donc dans le désendettement. C'est pourquoi nous devons permettre aux entreprises d'être plus compétitives. C'est le sens de ce texte : pour renforcer leurs capacités de financement sur les marchés, il prévoit de faciliter leur introduction en Bourse ou leurs augmentations de capital.

Le texte vise aussi à soutenir la compétitivité des entreprises grâce à la reconnaissance des titres transférables électroniques. Plus de 20 % des flux français sont adossés à de tels titres.

Des mesures adapteront notre droit interne aux nouvelles réalités du secteur.

L'article 10 facilitera la numérisation des réunions alors que l'article 11 permettra à la Cour d'appel de Paris de se spécialiser dans l'arbitrage international.

Toutes ces mesures sont nécessaires pour séduire toujours davantage d'investisseurs étrangers. Nous devons gagner en agilité. Notre pays ne doit pas s'empêcher d'accueillir les talents venus d'ailleurs. Derrière une France plus attractive se cache une mosaïque de territoires pouvant en tirer parti. Le RDPI votera ce texte.

M. Rémi Féraud .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Oui, il se pose en France un problème de financement des entreprises, lié à la méfiance des épargnants à l'égard des marchés financiers. Un texte sur le sujet a été promis par Bruno Le Maire il y a quelques mois, mais c'est finalement une proposition de loi qui a été inscrite à l'ordre du jour du Parlement.

Cela soulève une nouvelle fois la question de la méthode. Certes, l'objectif affiché par le texte est louable : attirer des investisseurs à Paris, simplifier les démarches. Mais quel fossé entre cet objectif et les mesures très techniques de ce texte fourre-tout, dont le titre est démesurément ambitieux : accroître l'attractivité de la France...

Le Gouvernement l'a répété à l'occasion du sommet Choose France : la France serait le pays le plus attractif au monde. Cela demande vérification... Un peu de modestie !

Ce texte, même mieux encadré par le travail des rapporteurs, est-il vraiment efficace au-delà de quelques mesures utiles ? Pourquoi s'être empressé de l'inscrire à l'ordre du jour, laissant au rapporteur très peu de temps pour organiser ses auditions ?

Le président de la commission des finances de l'Assemblée nationale a affirmé que l'AMF se serait montrée très réservée à son sujet.

Pourquoi avoir privé la représentation nationale de l'étude d'impact qui aurait pu l'éclairer ?

Ce texte serait justifié par les effets attendus en matière de création d'emplois ou d'amélioration de la balance des paiements... Mais rien ne les démontre. Ce sont surtout les plus grandes entreprises qui risquent d'en bénéficier. Censé aider les start-up, ce texte risque de produire l'effet inverse !

Notre groupe votera contre ce texte aux conséquences trop incertaines. Il porte la marque des services de Bercy et sans doute d'autres acteurs... sans étude d'impact ni avis du Conseil d'État, qui plus est : est-ce bien raisonnable, sur une matière aussi sensible ?

Ce texte s'inscrit dans la ligne de l'action de l'exécutif depuis 2017 : poursuivre la libéralisation de la finance et déréguler pour être compétitif face à Amsterdam. (M. Roland Lescure le conteste.)

En matière de droit du travail et de modalités de licenciement, c'est une approche libérale par le bas ; même si seuls quelques traders très bien payés sont concernés, pourquoi enfoncer ainsi un nouveau coin dans notre code du travail ?

Nous peinons à comprendre l'urgence réelle de ce texte et nous inquiétons de certains de ses effets. La défense de l'innovation doit être pensée au-delà de la seule financiarisation de l'économie. La fuite en avant libérale ne correspond pas à nos convictions. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

M. Éric Bocquet.  - Très bien !

Mme Christine Lavarde .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Certains vivent comme les journaux depuis quelques jours dans le mirage du sommet Choose France.

La balance des investissements est déficitaire de plus de 10 milliards d'euros : nos fleurons préfèrent se développer à l'étranger ! Ce texte est loin de la loi de grande ampleur annoncée par Bruno Le Maire, qui disait vouloir attirer les fonds spéculatifs et même les acteurs du marché des cryptoactifs. Rien de tout cela dans le texte - c'est peut-être pour cela qu'il a été adopté si facilement à l'Assemblée nationale...

Devant notre commission, la présidente de l'AMF indiquait que les besoins d'investissements très importants des entreprises appelaient des mesures allant au-delà de la simple capitalisation boursière.

La mesure phare du texte, ce sont les actions à droits de vote multiples pour les licornes, qui existent déjà à Londres et Amsterdam, mais surtout à Wall Street.

C'est une mesure défensive vis-à-vis de cette dernière et offensive à l'égard de Londres ; sur ce point, nous sommes d'accord avec le ministre. Cette mesure est certes recommandée par le rapport de septembre 2022 du Haut Comité juridique de la place de Paris (HCJP), mais ce dernier y appelle aussi à éviter une disproportion trop importante entre le poids en capital et le pouvoir de vote. Faute d'étude d'impact, nous ne pouvons pas savoir si c'est le cas.

Le reste du texte, très technique, me semble aller plutôt dans le sens de l'histoire.

L'inscription dans la loi de la spécialisation de la Cour d'appel de Paris en matière d'arbitrage n'est pas une révolution - elle traite déjà 80 % de ces affaires.

Que dire d'autre ? Nous pouvons exprimer certains regrets. Ce texte exclut les TPE, les PME et les ETI. Or c'est le vrai sujet !

Les PME sont un maillon important de notre économie. Leur accès aux marchés est une étape clé de leur développement. On observe une décollecte de ces entreprises sur les cinq dernières années, de l'ordre de 8 milliards d'euros, alors que dans le même temps l'épargne des Français a augmenté. C'est un enjeu de souveraineté, monsieur le ministre.

Nous sommes d'accord avec les modifications introduites par le rapporteur pour simplifier les règles du plan d'épargne en actions pour le financement des PME (PEA-PME).

Le texte ne dit rien non plus de la relance du marché de la titrisation, qui permettrait de libérer des fonds pour nos entreprises.

Notre pays manque cruellement de grands investisseurs ; une solution pourrait être d'introduire dans notre système de retraite une petite part de capitalisation... (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; on ironise sur les travées du groupe CRCE-K.)

Notre pays ne manque pas d'argent : l'encours des placements financiers des Français représente près de 6 milliards d'euros, mais à 61 % sur des produits de taux.

Cet accès difficile des entreprises aux marchés financiers n'est pas spécifique à la France ; dans son rapport remis en avril, Christian Noyer relève que ce problème se retrouve partout en Europe et invite à développer une nouvelle classe de produits européens. J'en suis convaincue : l'union des marchés de capitaux serait une véritable solution.

Le groupe Les Républicains soutiendra néanmoins les modestes avancées contenues dans le texte. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Pascal Savoldelli ironise.)

Mme Frédérique Puissat.  - J'ai tout compris ! (Sourires)

M. Christopher Szczurek .  - Renforcer le financement des entreprises pourrait rassembler toutes les bonnes volontés. Pourtant, ce texte cumule les faiblesses : c'est une proposition de loi qui n'en est pas une, la plume ayant été tenue par Bercy ! De plus, sans étude d'impact, comment le législateur peut-il travailler en connaissance de cause ?

Vous nous proposez un texte de financiarisation de l'économie réelle. Nous ne nions pas les problèmes liés à l'investissement, mais défendons le principe d'un financement de proximité.

Lors des débats sur la nationalisation d'EDF, nous avions soutenu le principe d'une participation d'ampleur des salariés au capital de l'entreprise. Mais vous avez préféré laisser plonger les entreprises productives dans les bras de la prédation financière.

L'article 2 ter étend trop la possibilité pour les PME de recourir à un PEA, ce qui comporte un risque de déstabilisation de leurs finances.

Vous nous répondrez que l'économie française doit se moderniser - dont acte... Mais l'attractivité repose sur de multiples facteurs, dont la simplification administrative. Or, en sept ans de pouvoir, le Gouvernement a été le meilleur, ou le pire, dans l'inflation normative.

Certes, les intentions de la proposition de loi sont louables, mais la copie n'est pas satisfaisante. Participation salariale, création d'un fonds souverain pour le développement durable : le texte est dépourvu de tout cela. Nous ne pourrons donc pas le voter.

M. Jean-Luc Brault .  - Vaste chantier, comme dit le rapporteur de Montgolfier... Depuis cinq ans, la France est le pays d'Europe qui attire le plus d'investissements étrangers, à hauteur de 15 milliards d'euros. Soyons fiers de ces résultats. Je salue le volontarisme du Président de la République : réunir chaque année à Versailles des investisseurs du monde entier pour le sommet Choose France est une bonne chose. Je me réjouis de voir autant d'énergie : alors que la compétition internationale n'a jamais été aussi féroce, il faut se battre.

À chaque investissement réalisé, des emplois sont créés, des technologies se développent, des territoires retrouvent des couleurs - sans parler des rentrées fiscales.

À tous les esprits grincheux, je rappelle l'évidence : on ne finance pas un modèle social en tapant sur le capital. Sinon, vous pouvez fermer tout de suite les missions locales.

Si le Président de la République parvient à convaincre, c'est aussi grâce à un travail collectif : réforme du marché du travail, suppression des impôts de production, baisse de l'impôt sur les sociétés et réforme des retraites - autant de réformes positives.

Mais les tensions géopolitiques sont à leur comble : il faut donc poursuivre le travail pour l'avenir de notre modèle social et de notre jeunesse. Aujourd'hui, devenir chef d'entreprise est une folie, devant les difficultés administratives et financières que cela suppose. Les grands entrepreneurs d'aujourd'hui ont pu être les petits patrons d'hier - j'en sais quelque chose.

Notre groupe accueille favorablement cette proposition de loi. Ce texte, très technique, modernisera certaines dispositions de notre droit, devenu désuet. Préserver la compétitivité de nos entreprises, c'est aussi garantir que notre droit suive. Je salue les amendements des deux rapporteurs, qui prouvent leur grande compétence technique.

Le principal risque de Choose France, c'est oublier les PME, les TPE et les ETI.

Mme Frédérique Puissat.  - Absolument !

M. Jean-Luc Brault.  - Comme le disait Louis Vogel, aidez les PME ! Derrière chacune de ces entreprises, il y a un dirigeant : ce sont les héros du quotidien, ils font tourner et vivre le pays. Ils ne côtoient pas les ors de la République : pourtant, sans eux, le pays se décomposerait. Le titre 1er est à cet égard très important.

Plusieurs amendements ont été déposés pour soutenir l'innovation de rupture : ils seront l'occasion d'apporter notre soutien aux PME. Miser sur l'initiative individuelle, c'est enclencher le cercle vertueux de la productivité : plus d'entreprises pour générer de l'activité, plus d'activité pour financer notre modèle social. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP et du RDPI)

M. Michel Canévet .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Le groupe UC est attaché au renforcement de l'attractivité de notre pays : nous voterons donc ce texte.

Monsieur le ministre, les annonces d'hier nous ont satisfaits, avec 56 projets pour 15 milliards d'euros d'investissements étrangers à l'occasion de Choose France et le nouveau campus de Morgan Stanley.

Cela dit, n'oublions pas les difficultés liées au travail. Entre 2019 et 2022, la productivité française a reculé de 3,2 %, contre 2,2 % en Espagne et 0,4 % en Allemagne. Là aussi, nous avons des efforts à faire... Notre rapport au travail est dégradé dans notre pays : 1 550 heures de travail annuel en moyenne, contre 1 792 heures en Europe. Je ne doute pas que la prochaine réforme de l'assurance chômage apportera des réponses.

La situation financière de nos comptes publics est dégradée ; le déficit de la balance commerciale reflète nos difficultés à l'export.

La détention du capital des entreprises par des étrangers pose également problème, comme l'illustre la situation de TotalEnergies : le capital est peu à peu acquis par des étrangers, à telle enseigne que l'entreprise envisage de mener sa cotation à la Bourse de New York.

Je salue l'excellent travail des deux rapporteurs sur ce texte qui institue les actions à droits de vote multiples et simplifie la tenue des assemblées générales, autant de mesures de bon sens pour améliorer la compétitivité de la France.

Sans doute faudra-t-il examiner la place des petits actionnaires dans les assemblées générales : nous pouvons encore progresser sur le sujet. Ces lieux favorisent la prise de conscience, notamment sur la responsabilité sociale des entreprises (RSE).

L'article 2 prévoit une extension de niche fiscale pour les entreprises solidaires d'utilité sociale (Esus). C'est une bonne chose, mais il nous faudra évaluer la mesure. Je pense aux fonds d'investissement de proximité, dans lesquels des particuliers sont invités à investir par des incitations fiscales alors qu'ils présentent des rendements négatifs : ces dispositifs ne vont pas toujours dans le bon sens.

Depuis quelques années, la France a pris des mesures : cela passe notamment par la stabilité fiscale, avec le prélèvement forfaitaire unique (PFU), à hauteur de 30 % qui nous permet de converger vers les standards européens.

Mais nous devons prendre d'autres mesures visant à favoriser l'actionnariat des particuliers. Certaines entreprises peinent à se financer. Pourquoi ne pas agir sur les PEA-PME, qui pourraient être orientés vers les ETI, par exemple en déplafonnant la capitalisation boursière ou en modifiant les règles concernant le chiffre d'affaires ou le nombre d'employés ?

L'écart entre les fonds placés sur des PEA-PME et sur les autres PEA montre qu'il y a encore des efforts à mener.

Ce texte va dans le bon sens, même s'il ne comporte aucune révolution. Ces petits pas renforcent l'attractivité de notre pays, et donc l'emploi, essentiel pour l'émancipation de chacun de nos concitoyens. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et du RDPI ; MM. Olivier Rietmann et Jean-François Husson applaudissent également.)

Mme Florence Blatrix Contat .  - Sur la méthode, le choix du Gouvernement de privilégier une proposition de loi, sans étude d'impact ni avis du Conseil d'État, est préjudiciable à la clarté et à la sincérité des débats, ainsi sans doute qu'à la qualité du texte.

Notre première réserve porte sur l'article 1er, relatif aux actions à droits de vote multiples. Il s'agit d'inciter les dirigeants de PME innovantes à se financer sur les marchés, en leur permettant de conserver la maîtrise de leur entreprise. L'exemple serait-il les Pays-Bas, qui ont fait le choix de la dérégulation et s'engagent dans une compétition juridique intense pour attirer des entreprises ?

De nombreux acteurs sont attachés au principe « une action, une voix ». En outre, le dispositif envisagé est disproportionné : jusqu'à 25 droits de vote pour une seule action, soit un contrôle possible avec seulement 4 % du capital, alors que le HCJP préconise une limitation à dix droits de vote.

Certes, la commission a posé quelques garde-fous, notamment pour les résolutions fixant la rémunération des dirigeants. Reste que, comme l'a dit Christine Lavarde, des droits de vote trop inégaux sont source de défiance. De surcroît, la durée proposée, de quinze ans, est excessive, dépassant de loin la recommandation du HCJP.

Notre deuxième réserve concerne la possibilité pour les fonds communs de placement à risque d'accompagner les entreprises cotées jusqu'à 500 millions d'euros, contre 150 millions d'euros actuellement. Nous craignons que cela ne favorise les entreprises de plus grande taille, au détriment des start-up.

Notre troisième réserve porte sur les conséquences de l'instauration d'une compétence exclusive de la Cour d'appel de Paris en matière d'arbitrage international. La chambre internationale sera-t-elle en mesure de traiter efficacement un nombre croissant de dossiers ?

Enfin, nous soutenons la position de la commission des finances sur la suppression de l'article 10 quater, habilitant le Gouvernement à légiférer par ordonnance sur le cadre juridique des organismes de placement collectif.

Si le renforcement de l'attractivité de la place de Paris est indispensable, ce texte est dépourvu de cohérence et présente des risques d'effets de bord. Au reste, de nombreux acteurs de la place sont dubitatifs sur son efficacité. Nous voterons contre. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

M. Olivier Rietmann .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe UC) L'attractivité de la France est au coeur de la réflexion de la délégation sénatoriale aux entreprises depuis sa création. Dès 2015, un de ses premiers rapports comparait l'attractivité de la France et du Royaume-Uni pour les entrepreneurs et les investisseurs.

De son côté, Albéric de Montgolfier analysait en 2017 les conséquences du Brexit pour la France, dans un rapport aux recommandations toujours actuelles.

Nous nous réjouissons de cette proposition de loi, dont les dispositions amélioreront la compétitivité financière de la France. Je salue le travail des deux rapporteurs et me félicite des souplesses apportées en commission, comme l'élargissement du champ d'investissement des fonds communs de placement d'entreprise aux marchés de croissance comme Euronext Growth ou la simplification des règles d'éligibilité au PEA-PME.

Néanmoins, je tire la sonnette d'alarme sur un point : l'amélioration de l'attractivité de la place financière de Paris ne résoudra pas seule les problèmes de financement de nos PME et ETI. À cet égard, la délégation aux entreprises a confié une mission à Pierre-Antoine Levi, Pauline Martin et Fabien Gay sur le financement de l'entreprise de demain.

Seules 12 % des PME comptent un fonds d'investissement dans leur capital. L'actionnariat familial et le secteur bancaire jouent toujours un rôle prépondérant, et les chefs d'entreprise sont réticents à l'entrée en Bourse. Alors qu'un dirigeant de TPE-PME sur cinq fait état de difficultés dans l'accès au crédit, nous devons diversifier les sources de financement et orienter l'épargne vers les entreprises.

En période de chasses aux dépenses fiscales, le pacte Dutreil est un outil de transmission essentiel. Plus de la moitié des ETI sont des entreprises familiales durablement attachées à un territoire et à des salariés.

Le sommet Choose France est une bonne chose. Mais n'oublions pas les autres composantes de notre attractivité ! C'est une obligation morale envers les entrepreneurs qui agissent au quotidien pour la vitalité de nos territoires. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP)

M. André Reichardt .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Nous étions nombreux à attendre un projet de loi de grande ampleur. Au lieu de quoi, voici une proposition de loi qui certes comporte quelques progrès, mais porte mal son nom, car il s'agit surtout de renforcer l'attractivité de la place financière de Paris.

Je ne nie pas l'intérêt d'une mobilisation des pouvoirs publics à cet égard, alors que le nombre d'entreprises cotées et celui des introductions en Bourse diminuent à Paris. Cette proposition de loi va dans le bon sens, et je la voterai d'autant plus qu'elle a été enrichie par le travail des commissions. Mais il faudra d'autres mesures pour, réellement, « accroître le financement des entreprises et l'attractivité de la France ».

Le texte initial se bornait aux entreprises ayant accès au marché pour se financer. Mais le tissu économique ne s'étend pas seulement de La Défense à la Bourse ! Sur nos territoires, des milliers de PME et ETI rencontrent des difficultés pour se financer. L'allongement de la durée de remboursement des prêts garantis par l'État (PGE) serait une première réponse. Une meilleure mobilisation de l'épargne serait aussi utile, notamment via le PEA-PME.

Compte tenu de la dégradation de notre balance commerciale - 100 milliards d'euros l'année dernière -, nos entreprises, toutes nos entreprises, ont besoin de plus d'engagements. Compenser le déficit commercial par le seul investissement financier est une vue de l'esprit. De même, la seule dématérialisation de titres transférables ne suffira pas.

Nos entreprises ont soif de cotisations allégées, de procédures simplifiées, de formations adaptées. Près de 30 % des Français déclarent être tentés par l'expatriation, 54 % pour les 18-24 ans : c'est dramatique !

Comment retenir les talents et en attirer de nouveaux ? Si le Président de la République se félicite d'investissements records lors de la dernière édition de Choose France, beaucoup reste à faire. On nous dit que d'autres dispositifs vont intervenir au plan européen et qu'un projet de loi de simplification sera prochainement déposé : acceptons-en l'augure... (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Discussion des articles

Article 1er

M. le président.  - Amendement n°1, présenté par MM. Dossus et G. Blanc, Mme Senée, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Souyris et M. Vogel.

Supprimer cet article.

M. Thomas Dossus.  - Supprimons cet article pour préserver l'égalité entre actionnaires, fondement de la démocratie actionnariale. Des dérogations à ce principe peuvent être légitimes, mais limitées et au service d'un objectif précis. Ce n'est pas le cas avec le dispositif proposé, qui nous fait craindre une concentration excessive des pouvoirs et des conflits de stratégie. L'introduction des actions de préférence est une mesure récente, dont les effets n'ont pas été évalués. Refusons la fuite en avant dans la concurrence entre places financières !

M. Louis Vogel, rapporteur pour avis.  - Cet amendement pénaliserait l'attractivité de la place de Paris. De nombreuses autres places ont introduit un tel dispositif : si nous voulons être compétitifs, nous devons faire de même. Nous ne faisons pas n'importe quoi : ces droits sont limités dans le temps, un ratio maximal est prévu et ils seront neutralisés pour certaines résolutions. Le dispositif est donc équilibré. Avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Cet article relève de l'essence même du texte. Nous voulons encourager nos créateurs d'entreprise à rester chez nous. Réserver les droits de vote multiples aux fondateurs, comme il sera proposé dans quelques instants, semble difficile. Avis défavorable, en tout cas, à la suppression proposée.

L'amendement n°1 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°2, présenté par MM. Dossus et G. Blanc, Mme Senée, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Souyris et M. Vogel.

Alinéa 6

Supprimer cet alinéa.

M. Thomas Dossus.  - La financiarisation des PME, entreprises ancrées dans l'économie réelle, est une tendance dangereuse. L'économie financiarisée court-termiste n'est pas sans conséquences sur les tissus économiques locaux. Les PME ne peuvent être vues comme des actifs échangeables à court terme ! En servant des dividendes, beaucoup se retrouveraient dans une situation financière intenable. Sortons des logiques à courte vue.

M. Louis Vogel, rapporteur pour avis.  - Cet amendement supprime la possibilité de négocier des promesses d'actions sur les marchés de croissance des PME. Or cette liquidité est bonne pour leur développement ! Nous en profitons pour harmoniser les règles, ce qui est aussi positif. Avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Même avis. Cette disposition favorisera la cotation des PME.

L'amendement n°2 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°26, présenté par M. Bocquet et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky.

Alinéa 10, première phrase

Remplacer les mots :

d'une ou de plusieurs personnes nommément désignées

par les mots :

d'un ou plusieurs fondateurs ou salariés de l'entité émettrice ou de la holding de la société cotée nommément désignés

M. Éric Bocquet.  - Puisque vous voulez, quoi qu'il en coûte, accentuer la financiarisation, nous proposons de réserver ces actions d'hyper-préférence aux fondateurs des entreprises et aux salariés. Vous ne cessez de dire que vous soutenez l'actionnariat salarié, en expliquant, dans une logique très libérale, qu'ils seront ainsi plus engagés. Vous avez là l'occasion d'agir.

M. le président.  - Amendement n°3, présenté par MM. Dossus et G. Blanc, Mme Senée, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Souyris et M. Vogel.

Alinéa 10, première phrase

Compléter cette phrase par les mots : 

et étant salariées ou mandataire social de la société

M. Thomas Dossus.  - Monsieur le ministre, nous vous prenons au mot sur la protection des PME. En réservant l'attribution des actions à droits de vote multiples aux salariés, dirigeants et fondateurs, nous ferions oeuvre utile pour celles et ceux qui les font vivre réellement au quotidien. Nous limiterions également le risque de prise de contrôle hostile par des investisseurs extérieurs.

M. Louis Vogel, rapporteur pour avis.  - Je comprends l'idée, mais la mesure serait difficile à mettre en oeuvre. Pourquoi ne pas laisser les entreprises déterminer les personnes auxquelles elles réserveront ces droits ? Je rappelle que celles-ci devront être nommément désignées. Avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Même avis, même si je comprends la logique des amendements. Mieux vaut conserver une rédaction plutôt générale. La pratique sera favorable aux fondateurs et aux salariés engagés dans le développement de leur entreprise.

M. Olivier Henno.  - Les actions de préférence sont des outils de souveraineté économique - d'autres places l'ont fort bien compris. Restreindre leur périmètre affaiblirait cet instrument de souveraineté. Ces amendements ne servent donc pas l'intérêt national. (M. Thomas Dossus s'esclaffe.)

L'amendement n°26 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°3.

M. le président.  - Amendement n°56, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 11, au début

Insérer les mots :

Pour les sociétés dont les titres sont admis à la négociation sur un système multilatéral de négociation,

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Il s'agit de revenir à la rédaction initiale de la proposition de loi, qui ne prévoyait aucun nombre maximal de droits de vote par action. Une directive européenne est en cours d'adoption qui ne concerne que les sociétés cotées sur un système multilatéral de négociation. Le dispositif de la commission constituerait donc une surtransposition - vous savez le Gouvernement particulièrement vigilant sur ce point.

M. Louis Vogel, rapporteur pour avis.  - Cet amendement est contraire à la position de la commission.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Je le reconnais volontiers...

M. Louis Vogel, rapporteur pour avis.  - Il revient à réglementer davantage les marchés de croissance que les marchés réglementés, ce qui est incohérent... La directive à laquelle le ministre fait référence ne vise que les marchés de croissance. Profitons plutôt de ce texte pour harmoniser les règles. Avis défavorable.

L'amendement n°56 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°25, présenté par M. Bocquet et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky.

I. - Alinéa 11

Remplacer le mot :

vingt-cinq

par le mot :

dix

II.  -  Alinéa 12, première phrase

Remplacer le mot :

dix

par le mot :

cinq

M. Pascal Savoldelli.  - Nous avions soutenu le droit de vote majoré par action lors de son introduction en droit français, mais on parlait à l'époque de deux voix par action : il est question aujourd'hui de passer de deux à vingt-cinq ! La durée aussi serait majorée, passant à dix ans.

Cet article anéantirait tous les bienfaits de la disposition précédente, qui relève d'un protectionnisme financier. Nous proposons donc de fixer à dix le nombre maximal de voix par action, pour une durée maximale de cinq ans.

M. le président.  - Amendement n°4, présenté par MM. Dossus et G. Blanc, Mme Senée, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Souyris et M. Vogel.

Alinéa 11

Remplacer le mot :

vingt-cinq

par le mot :

dix

M. Thomas Dossus.  - Amendement similaire, qui reprend les recommandations du HCJP.

M. Louis Vogel, rapporteur pour avis.  - Vous feriez de Paris l'une des places les plus restrictives d'Europe. Si nous sommes trop stricts, les investisseurs iront voir ailleurs. Avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Même avis.

L'amendement n°25 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°4.

M. le président.  - Amendement n°50, présenté par M. L. Vogel.

Après l'alinéa 25 

Insérer un alinéa ainsi rédigé : 

« Lorsqu'il est fait application des 1° et 2° du présent IV, les statuts de la société prévoient une indemnisation équitable des pertes enregistrées par les titulaires d'actions de préférence, dans des conditions et selon des modalités déterminées par décret en Conseil d'État pris après consultation de l'Autorité des marchés financiers.

M. Louis Vogel.  - La directive sur les offres publiques d'acquisition prévoit une indemnisation des pertes éventuelles en cas de neutralisation des actions à droits de vote multiples. Cet amendement complète l'article en ce sens.

J'ajoute, comme rapporteur, que la commission a émis un avis favorable... (Sourires)

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Devant tant d'unanimité, le Gouvernement ne peut que suivre ! (Nouveaux sourires)

L'amendement n°50 est adopté.

L'article 1er, modifié, est adopté.

Après l'article 1er

M. le président.  - Amendement n°15, présenté par Mme Blatrix Contat et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le dernier alinéa de l'article 19 nonies de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération est ainsi rédigé :

« L'article 15 et les troisième et quatrième alinéas de l'article 16 ne sont pas applicables. »

Mme Florence Blatrix Contat.  - Nous proposons de stabiliser l'attractivité des sociétés coopératives d'intérêt collectif (SCIC) en leur permettant de constituer une réserve de revalorisation des parts sociales. Toutes les sociétés coopératives peuvent le faire, sauf les SCIC, ce qui constitue un obstacle majeur à leur développement.

Cette mesure est préconisée par un rapport de l'inspection générale des affaires sociales et de l'inspection générale des finances de mai 2021.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur.  - Si l'on comprend l'intérêt d'aligner le régime des SCIC sur celui des autres coopératives, l'avis est partagé, car constituer cette réserve les obligerait à puiser dans leurs fonds propres. Sagesse.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Avis favorable à cette mise en cohérence des outils de financement des coopératives.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur. - Sagesse positive...

L'amendement n°15 est adopté et devient un article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°36, présenté par M. Bocquet et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky.

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le paragraphe 1er de la sous-section 4 de la section 3 du chapitre II du livre III de la deuxième partie du code du travail est ainsi modifié : 

1° L'article L. 2312-37 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« ...° Offres aux publics ; » ;

2° Après le sous-paragraphe 6, il est inséré un sous-paragraphe ainsi rédigé :

« Sous-paragraphe ...

« Offres aux publics

« Art. L. 2312...  -  Le comité social et économique est consulté et dispose d'un avis conforme une année précédent tout projet d'introduction en bourse.

« Art. L. 2312...  -  Le comité social et économique est consulté et peut s'opposer à toutes offres au public recensées à l'article L. 411-2 du code monétaire et financier. »

M. Éric Bocquet.  - L'année dernière, il y a eu dix-neuf introductions en Bourse, le plus faible nombre depuis la crise financière de 2009. Dix-neuf fois, les salariés n'ont pas été consultés, car la réglementation ne le prescrit pas. Cessons de financiariser l'outil de travail des salariés sans leur demander leur avis ! Nous proposons une règle simple : si le comité social et économique (CSE) s'y oppose, pas d'introduction en Bourse.

M. Louis Vogel, rapporteur pour avis.  - Cet amendement va très loin, car il oblige les entreprises à avertir le CSE un an avant l'entrée en Bourse et confère à celui-ci un pouvoir de blocage. Avis défavorable à cet amendement orthogonal avec le texte.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Même avis.

L'amendement n°36 n'est pas adopté.

Article 2

M. le président.  - Amendement n°5, présenté par MM. Dossus et G. Blanc, Mme Senée, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Souyris et M. Vogel.

Supprimer cet article.

M. Thomas Dossus.  - Encore un amendement orthogonal... Il s'agit de supprimer l'article 2, qui élargit la possibilité pour les fonds communs de placements à risque d'accompagner les entreprises cotées jusqu'à une capitalisation de 500 millions d'euros. Cet élargissement pourrait favoriser surtout la croissance des fonds existants, et, en l'absence d'étude d'impact, rien ne garantit que cette mesure n'entraînera pas un coût pour les finances publiques. On a vu des dispositions déclarées irrecevables pour moins que ça...

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur.  - Avis défavorable. La commission des finances est favorable à l'article 2, qu'elle a amendé. Il n'aura aucun coût fiscal et va dans le sens du financement des PME.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - De nombreux orateurs de la discussion générale ont plaidé pour un meilleur financement des PME. Cet article y pourvoit, il faut le conserver. (Mme Christine Lavarde et M. Jean-François Husson opinent du chef.)

L'amendement n°5 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°27, présenté par M. Bocquet et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky.

Alinéa 2

Supprimer cet alinéa.

M. Pascal Savoldelli.  - Nous voulons limiter l'intervention du capital-risque dans les entreprises cotées. La financiarisation de ces fonds se ferait au détriment du financement des PME et même des start-up. Or, pour faire de l'innovation, il faut des financements. Les start-up ont levé 8,32 milliards d'euros en 2023, avec un ticket moyen à 11,64 millions d'euros.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur.  - Avis défavorable. Cette mesure va dans le sens du renforcement du financement des PME et des ETI.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Même avis.

L'amendement n°27 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°14 rectifié, présenté par M. Raynal et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

I. - Compléter cet article par quatre paragraphes ainsi rédigés :

III -  L'article L. 131-1-2 du code des assurances est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, le taux : « 10 % » est remplacé par le taux : « 15 % » ;

2° Au 1°, les mots : « agréées en application de » sont remplacés par les mots : « mentionnées à » ;

3° À la fin du 2°, les mots : « , sous réserve que leur actif soit composé d'au moins 40 % de titres émis par des entreprises solidaires d'utilité sociale mentionnées à l'article L. 3332-17-1 du code du travail » sont remplacés par les mots : « qui sont assimilées aux entreprises solidaires d'utilité sociale au sens de l'article L. 3332-17-1 du code du travail » ;

4° Le 3° est ainsi modifié :

a) Après le mot : « financier », sont insérés les mots : « ou par des fonds professionnels spécialisés mentionnés à l'article L. 214-154 du code monétaire et financier » ;

b) Les mots : « sous réserve que l'actif de ces fonds soit composé d'au moins 40 % de titres émis par des entreprises solidaires d'utilité sociale mentionnées à » sont remplacés par les mots : « qui sont assimilés aux entreprises solidaires d'utilité sociale au sens de ».

IV -  Le V de l'article L. 214-164 du code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° Le troisième alinéa est complété par les mots : "pour une part comprise entre 5 % et 15 %, de titres émis";

2° Le a est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :

« Pour une part comprise entre 5 % et 15 %, de titres émis :

« 1° Soit par des entreprises solidaires d'utilité sociale mentionnées à l'article L. 3332-17-1 du code du travail ;

« 2° Soit par des sociétés de capital-risque mentionnées au I de l'article 1er de la loi n° 85-695 du 11 juillet 1985 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier qui sont assimilées aux entreprises solidaires d'utilité sociale au sens de l'article L. 3332-17-1 du code du travail ;

« 3° Soit par des fonds communs de placements à risque mentionnés à l'article L. 214-28 du code monétaire et financier ou par des fonds professionnels spécialisés mentionnés à l'article L. 214-154 du code monétaire et financier, qui sont assimilés aux entreprises solidaires d'utilité sociale au sens de l'article L. 3332-17-1 du code du travail. » ;

3° Le b est abrogé ;

4° Au dernier alinéa, les mots : « mentionné au b ci-dessus » sont supprimés ;

V. -  L'article L. 3332-17-1 du code du travail est ainsi modifié :

1° Le III est ainsi rédigé :

« III.  -  Sont assimilés aux entreprises solidaires d'utilité sociale agréées en application du présent article les placements collectifs dont l'actif est composé pour au moins 50 % de titres émis par des entreprises solidaires d'utilité sociale définies au présent article ou par des entreprises équivalentes sur le fondement du droit européen. » ;

 2° Au IV, après les mots : « d'utilité sociale sont », sont insérés les mots : « déclarées assimilées ou ».

VI -  Les III à V entrent en vigueur le 1er janvier 2025.

 

II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du V, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

....  -  La perte de recettes résultant pour l'État du V du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

M. Claude Raynal.  - Cet amendement vise à accroître le financement des entreprises solidaires. La France fait la course en tête dans ce secteur grâce à des règles incitatives. Conservons notre avance en poursuivant l'adaptation de notre cadre législatif, dans la lignée de la loi Pacte.

Les fonds dits 90/10, constitués d'une poche solidaire de 5 à 10 %, sont les principaux vecteurs d'investissement solidaire. Il est proposé d'augmenter le plafond de la poche solidaire à 15 %.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur.  - Avis favorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Même avis. C'est une demande récurrente des acteurs de l'économie sociale et solidaire. Je lève le gage.

L'amendement n°14 rectifié bis est adopté.

M. le président.  - Amendement n°62, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

.... - Le 2° du I du présent article s'applique aux fonds communs de placement à risques agréés à compter de la promulgation de la loi n° du visant à accroître le financement des entreprises et l'attractivité de la France.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur.  - Cet amendement aménage une disposition déjà votée par le Sénat dans la loi sur la protection de l'épargne.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Avis favorable.

L'amendement n°62 est adopté.

L'article 2, modifié, est adopté.

Après l'article 2

M. le président.  - Amendement n°40 rectifié, présenté par Mme Paoli-Gagin, MM. Capus et Malhuret, Mme Bourcier, MM. Brault et Chasseing, Mme L. Darcos, M. Grand, Mme Lermytte et MM. V. Louault, A. Marc, Rochette et Wattebled.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Le code général des impôts est ainsi modifié :

1° L'article 199 terdecies-0 A est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« ....  -  En cas de souscription à une augmentation de capital, le montant de la souscription retenu pour le calcul de la réduction d'impôt prévue au I est égal au nombre de titres souscrits multiplié par leur prix d'émission, c'est-à-dire leur valeur nominale augmentée, le cas échéant, de la prime d'émission unitaire. Cette disposition est également valable lorsque les titres acquis l'ont été suite à l'exercice d'un bon de souscription. » ;

2° L'article 199 terdecies-0 A bis est complété par un paragraphe ainsi rédigé : 

« .... - En cas de souscription à une augmentation de capital, le montant de la souscription retenu pour le calcul de la réduction d'impôt prévue à l'article 199 terdecies-0 A est égal au nombre de titres souscrits multiplié par leur prix d'émission, c'est-à-dire leur valeur nominale augmentée, le cas échéant, de la prime d'émission unitaire. Cette disposition est également valable lorsque les titres acquis l'ont été suite à l'exercice d'un bon de souscription. » ;

3° L'article 199 terdecies-0 A ter est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« .... - En cas de souscription à une augmentation de capital, le montant de la souscription retenu pour le calcul de la réduction d'impôt prévue à l'article 199 terdecies-0 A est égal au nombre de titres souscrits multiplié par leur prix d'émission, c'est-à-dire leur valeur nominale augmentée, le cas échéant, de la prime d'émission unitaire. Cette disposition est également valable lorsque les titres acquis l'ont été suite à l'exercice d'un bon de souscription. »

II.  -  La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

M. Jean-Luc Brault.  - Nous voulons valoriser les bons de souscription d'actions - accords d'investissement rapide : inscrivons dans la loi leur éligibilité au dispositif IR-PME. Il ne s'agit pas d'une révolution, mais de la consécration d'une règle de doctrine appliquée de façon trop opaque.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur.  - Ce sujet relève du PLF. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Même avis. Retrait, sinon avis défavorable.

L'amendement n°40 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°43 rectifié, présenté par Mme Paoli-Gagin, MM. Capus et Malhuret, Mme Bourcier, MM. Brault et Chasseing, Mme L. Darcos, M. Grand, Mme Lermytte et MM. V. Louault, A. Marc, Rochette et Wattebled.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  L'article 790 A bis du code général des impôts est ainsi rétabli :

« Art. 790 A bis. I.  -  Les dons de sommes d'argent consentis en pleine propriété au profit d'un enfant, d'un petit-enfant, d'un arrière-petit-enfant ou, à défaut d'une telle descendance, d'un neveu ou d'une nièce ou par représentation, d'un petit-neveu ou d'une petite-nièce sont exonérés de droits de mutation à titre gratuit dans la limite de 31 865 euros tous les quinze ans s'ils sont affectés par le donataire, au plus tard le dernier jour du troisième mois suivant le transfert, à l'acquisition de parts ou d'actions d'organismes de placements collectifs , mentionnés au 3 de l'article L. 221-32-2 du code monétaire et financier, dans le plan d'épargne en actions destiné au financement des petites et moyennes entreprises et des entreprises de taille intermédiaire, prévu aux articles L. 221-32-1 et suivants du même code, dont il est titulaire.

« Cette exonération est subordonnée au respect des conditions suivantes :

« 1° Le donateur est âgé de moins de quatre-vingts ans au jour de la transmission ;

« 2° Le donataire est âgé de dix-huit ans révolus ou a fait l'objet d'une mesure d'émancipation au jour de la transmission.

« Le plafond de 31 865 euros est applicable aux donations consenties par un même donateur à un même donataire. 

« II.  -  Cette exonération se cumule avec les abattements prévus aux I, II et V de l'article 779 et aux articles 790 B, 790 D et 790 G du présent code. 

« III.  -  Il n'est pas tenu compte des dons de sommes d'argent mentionnés au I pour l'application de l'article 784 du même code.

« IV.  -  Sous réserve de l'application du 1° du 1 de l'article 635 dudit code, les dons de sommes d'argent mentionnés au I doivent être déclarés ou enregistrés par le donataire dans le délai d'un mois qui suit la date du don. »

II.  -  La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

M. Jean-Luc Brault.  - Il s'agit d'exonérer de droits de mutation à titre gratuit entre vifs les sommes issues de donations qui seront investies par le donataire titulaire de ce type de plan d'épargne, afin d'inciter au financement des PME et des ETI.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur.  - Là encore, c'est une mesure fiscale qui relève du PLF. Retrait, sinon avis défavorable

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Même avis.

L'amendement n°43 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°44 rectifié, présenté par Mme Paoli-Gagin, MM. Capus et Malhuret, Mme Bourcier, MM. Brault et Chasseing, Mme L. Darcos, M. Grand, Mme Lermytte et MM. V. Louault, A. Marc, Rochette et Wattebled.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code général des impôts est ainsi modifié :

1° L'article 793 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« ...° Les sommes ou valeurs détenues au jour du décès dans le plan d'épargne en actions destiné au financement des petites et moyennes entreprises et des entreprises de taille intermédiaire, prévu aux articles L. 221-32-1 et suivants du code monétaire et financier, dont le défunt était titulaire. » ;

2° Après la section 1 quater du chapitre III du titre IV de la première partie du livre premier, est insérée une section... ainsi rédigée :

« Section...

« Prélèvement sur le plan d'épargne en actions destiné au financement des petites et moyennes entreprises et des entreprises de taille intermédiaire en cas de décès

« Art. 990.... I.  -  Les sommes ou valeurs détenues dans un plan d'épargne en actions destiné au financement des petites et moyennes entreprises et des entreprises de taille intermédiaire, prévu aux articles L. 221-32-1 et suivants du code monétaire et financier, sont assujetties au décès du titulaire à un prélèvement, à concurrence de la part revenant à chaque ayant-droit du défunt titulaire du plan, après application d'un abattement fixe de 152 500 euros. Le prélèvement s'élève à 20 % pour la fraction de la part taxable de chaque ayant-droit inférieure ou égale à 700 000 euros, et à 31,25 % pour la fraction de la part taxable de chaque ayant-droit excédant cette limite.

« II.  -  Le prélèvement prévu au I est dû par chaque ayant-droit et versé au comptable public compétent dans les quinze jours qui suivent la fin du mois au cours duquel les sommes ou valeurs ont été versées aux ayants-droits. »

III. - La perte de recettes résultant pour l'État des I et II est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

M. Jean-Luc Brault.  - Nous créons une incitation au financement des PME-ETI en allégeant le régime fiscal lors de la succession.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur.  - Avis défavorable pour les mêmes raisons.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Même avis.

L'amendement n°44 rectifié n'est pas adopté.

Article 2 bis

M. le président.  - Amendement n°59, présenté par le Gouvernement.

Supprimer cet article.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Nous supprimons des dispositions, adoptées en commission, qui modifient à nouveau le champ des emplois éligibles aux PEA et PEA-PME et octroient des avantages fiscaux très significatifs pour des investissements sans prise de risque dans l'économie réelle. Sans compter que des mesures d'ordre fiscal relèvent plutôt du PLF.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur.  - Avis défavorable. Modifier les titres éligibles aux PEA n'a pas d'incidence fiscale.

L'amendement n°59 n'est pas adopté.

L'article 2 bis est adopté.

Article 2 ter

M. le président.  - Amendement n°28, présenté par M. Bocquet et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky.

Supprimer cet article.

M. Éric Bocquet.  - Apparu en 1992, le PEA doit sa création à la volonté de développer l'actionnariat populaire. Son plafond de versement est de 150 000 euros depuis le 1er janvier 2014.

Gilles Carrez, alors président de la commission des finances de l'Assemblée nationale, avait pointé un risque d'éviction et privilégiait la restriction des critères, et non l'inverse.

M. le président.  - Amendement identique n°61, présenté par le Gouvernement.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Là encore, vous modifiez de manière importante les critères d'éligibilité du PEA-PME : l'avantage fiscal accordé va trop loin. Nous entendons toutefois améliorer le fléchage de l'épargne au profit des entreprises, et relèverons le seuil de capitalisation lors du prochain PLF.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur.  - Avis défavorable. Le PEA-PME ne fonctionne pas : certaines entreprises, pourtant éligibles, n'y ont pas accès. Nous proposons de substituer le critère de la capitalisation au régime actuel d'autodéclaration, trop complexe. C'est un moyen d'apporter de l'argent frais aux entreprises.

Les amendements identiques nos28 et 61 ne sont pas adoptés.

L'article 2 ter est adopté.

Après l'article 2 ter

M. le président.  - Amendement n°39 rectifié, présenté par Mme Paoli-Gagin, MM. Capus, Malhuret et Brault, Mme Bourcier, M. Chasseing, Mme L. Darcos, M. Grand, Mme Lermytte et MM. V. Louault, A. Marc, Rochette et Wattebled.

Après l'article 2 ter 

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - À la dernière phrase du deuxième alinéa de l'article L. 132-5-4 du code des assurances, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2023-973 du 23 octobre 2023 relative à l'industrie verte, après les mots : « code monétaire et financier », sont insérés les mots : « ou de titres de sociétés commerciales qui satisfont aux conditions prévues à l'article 1-1 de la loi n° 85-695 du 11 juillet 1985 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier ».

II. - Le code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° Le d du 3 de l'article L. 221-32-2 est complété par les mots : « ou de titres de sociétés commerciales qui satisfont aux conditions prévues à l'article 1-1 de la loi n° 85-695 du 11 juillet 1985 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier » ;

2° À la dernière phrase du quatrième alinéa de l'article L. 224-3, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2023-973 du 23 octobre 2023 relative à l'industrie verte, après les mots : « du présent code », sont insérés les mots : « ou de titres de sociétés commerciales qui satisfont aux conditions prévues à l'article 1-1 de la loi n° 85-695 du 11 juillet 1985 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier ».

M. Jean-Luc Brault.  - Il s'agit de rendre les sociétés de capital-risque éligibles au PEA-PME, à l'instar des fonds communs de placement à risque (FCPR), afin d'attirer les capitaux vers les entreprises non cotées.

M. le président.  - Amendement identique n°63, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur.  - C'est le même.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Avis favorable.

Les amendements identiques nos39 rectifié et 63 sont adoptés et deviennent un article additionnel.

Article 2 quater

M. le président.  - Amendement n°29, présenté par M. Bocquet et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky.

Supprimer cet article.

M. Pascal Savoldelli.  - Cet article est révélateur. On est loin du financement des entreprises et de l'attractivité de la France. La question est simple, clivante. Pour notre part, nous nous opposons à l'épargne salariale comme substitut à la rémunération du travail.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - C'est un complément !

M. Pascal Savoldelli.  - Votre projet est idéologique, et manifestement inspiré par les grandes organisations patronales : c'est celui de la retraite par capitalisation. Je ne suis pas sûr que les patrons de TPE-PME soient d'accord...

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur.  - L'article que vous voulez supprimer rend éligible de nouveaux titres à l'épargne salariale, voilà tout. Avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Même avis.

L'amendement n°29 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°64, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances.

I.  -  Alinéa 1

Après le mot :

travail

insérer les mots :

, dans sa version résultant de la loi n° 2023-1107 du 29 novembre 2023 portant transposition de l'accord national interprofessionnel relatif au partage de la valeur au sein de l'entreprise,

II.  -  Alinéa 2

Remplacer le mot :

deuxième

par le mot :

quatrième

L'amendement de coordination n°64, accepté par le Gouvernement, est adopté.

L'article 2 quater, modifié, est adopté.

Article 2 quinquies

M. le président.  - Amendement n°60, présenté par le Gouvernement.

Supprimer cet article.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Cet article, véritable marronnier, étend le périmètre de l'agrément Esus, au risque d'engendrer un effet d'éviction de financements qui bénéficient actuellement à des projets sociaux vers des foncières, plus rentables.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur.  - Avis défavorable. Le Sénat l'a déjà voté par le passé.

L'amendement n°60 n'est pas adopté.

L'article 2 quinquies est adopté.

Article 3

M. le président.  - Amendement n°6, présenté par MM. Dossus et G. Blanc, Mme Senée, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Souyris et M. Vogel.

Supprimer cet article.

M. Thomas Dossus.  - Cet article assouplit les modalités d'augmentation de capital sans droit préférentiel de souscription (DPS), ce qui pourrait avoir des effets significatifs sur la structure du capital de l'entreprise, entraîner des réactions négatives sur les marchés financiers et avoir également des implications fiscales.

M. le président.  - Amendement identique n°30, présenté par M. Bocquet et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky.

M. Éric Bocquet.  - Défendu.

M. Louis Vogel, rapporteur pour avis.  - Ces amendements, contraires à la position de la commission des lois, rendraient plus difficile l'accès aux liquidités. Avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Même avis.

Les amendements identiques nos6 et 30 ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°46, présenté par MM. Canévet et Delcros, Mme Havet, M. Bonnecarrère, Mmes Jacquemet et N. Goulet, MM. Kern, Bleunven, Hingray, J.M. Arnaud, P. Martin et Courtial et Mmes O. Richard et Billon.

Après l'alinéa 2

Insérer trois alinéas ainsi rédigés : 

...° L'article L. 225-138-1 est ainsi rédigé :

« Art. L. 225-138-1.  -  Lors d'une augmentation de capital suivant les modalités de l'article L. 225-138 ou de l'article L. 22-10-52-1, un nombre d'actions, au moins égal à 10 % des actions attribuées aux bénéficiaires d'un service d'investissement de gestion de portefeuille pour compte de tiers, doit être proposé aux adhérents du ou des plans d'épargne d'entreprise, salariés ou anciens salariés de la société ou des sociétés qui lui sont liées au sens de l'article L. 225-180, suivant les modalités prévues aux articles L. 3332-18 à L. 3332-24 du code du travail.

« Cette offre aux adhérents du ou des plans d'épargne doit être réalisée dans le délai prévu au III de l'article L. 225-138 du présent code. » ;

M. Michel Canévet.  - On a beaucoup parlé de l'implication des parties prenantes dans le financement de l'entreprise. En cas d'augmentations segmentées du capital, il paraît logique de favoriser l'actionnariat salarié. Fixons un objectif de 10 % en la matière.

M. Louis Vogel, rapporteur pour avis.  - Je comprends cet objectif, mais gare à ne pas introduire de rigidité. L'amendement est déjà satisfait par l'article L. 225-138-1 du code de commerce qui prévoit un régime préférentiel. Retrait, sinon avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Même avis. Soyons prudents sur une disposition qui pourrait paradoxalement conduire les entreprises à exercer une forme de chantage vis-à-vis de leurs salariés. Les augmentations de capital réservées aux salariés sont couvertes. Gardons une écriture plus large. Retrait ?

L'amendement n°46 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°7, présenté par MM. Dossus et G. Blanc, Mme Senée, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Souyris et M. Vogel.

Alinéas 3 à 7

Supprimer ces alinéas.

M. Thomas Dossus.  - Le code de commerce impose un contrôle par l'État pour garantir que les prix d'émission sont fixés de manière équitable et transparente. Supprimer ce contrôle permettrait aux sociétés de procéder à des émissions d'actions au profit d'actionnaires privilégiés, ce qui nourrirait un sentiment d'iniquité et de manipulation.

M. Louis Vogel, rapporteur pour avis.  - La proposition de loi supprime le renvoi à un décret en Conseil d'État, dans un souci d'assouplissement. L'amendement revient au droit existant : c'est contraire à la position de la commission. Ce n'est pas dans l'intérêt des entreprises de nuire à leurs actionnaires ! Faisons confiance au conseil d'administration : nul besoin d'intervention administrative. Avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Même avis.

L'amendement n°7 n'est pas adopté.

L'article 3 est adopté.

Après l'article 3

M. le président.  - Amendement n°35, présenté par M. Bocquet et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 225-132 du code de commerce est ainsi modifié :

1° Le deuxième alinéa est complété par les mots : « dans la limite de la moitié du montant de l'ouverture proposée » ;

2° Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les salariés ont un droit de préférence pour au moins la moitié des actions émises pour réaliser une augmentation de capital dans le cadre de la procédure des articles L. 332-18 et suivants. » ;

3° Au quatrième alinéa, après le mot : « actionnaires » sont insérés les mots : « ou les salariés ».

M. Pascal Savoldelli.  - Nous souhaitons accorder un droit de préférence aux salariés sur au moins la moitié de l'augmentation du capital.

Vous avez voulu faire de l'actionnariat salarié l'alpha et l'oméga d'une politique dite de productivité. En réalité, vous créez un minoritariat salarié : alors que les travailleurs créent l'essentiel de la valeur ajoutée, ils seront toujours minoritaires, et de plus en plus, sans pouvoir se défendre. C'est une conception - celle d'un libéralisme totalement décomplexé.

M. Louis Vogel, rapporteur pour avis.  - Cet amendement serait fortement désincitatif. Il faut plutôt favoriser l'actionnariat salarié pour lui-même. Cet amendement est une mauvaise réponse à une bonne question. (M. André Reichardt sourit.)

M. Pascal Savoldelli.  - On prend leur argent, mais ils n'ont pas le droit de décider. C'est pas mal !

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Les entreprises et les salariés peuvent déjà faire ce que vous proposez, mais cet amendement les y contraint, au risque d'obérer le développement des entreprises et d'exposer les salariés à une forme de chantage de la part du chef d'entreprise. Indépendamment de nos désaccords de fond sur l'actionnariat salarié, auquel je crois profondément, je demande le retrait de cet amendement contre-productif, voire dangereux pour les salariés.

L'amendement n°35 n'est pas adopté.

Article 4

M. le président.  - Amendement n°47 rectifié bis, présenté par M. Reichardt, Mme Muller-Bronn, MM. Burgoa et Rapin, Mmes Lassarade et Dumont, MM. Daubresse, Belin, Paccaud, Lefèvre, Houpert et Kern, Mme Micouleau, MM. Panunzi et Laménie, Mme Aeschlimann, MM. Naturel et Khalifé, Mme M. Mercier, M. Mizzon, Mme Schalck, M. Genet, Mme Imbert, M. Klinger et Mme Drexler.

Supprimer cet article.

M. André Reichardt.  - Cet amendement d'appel a reçu un avis défavorable en commission. Je le défends néanmoins.

La multiplication des informations communiquées aux autorités étrangères alourdira le travail de nos propres autorités - AMF, Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR). Le Gouvernement peut-il s'engager à octroyer à ces autorités les moyens suffisants ?

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur.  - On s'éloigne de l'objet de la proposition de loi.

L'article 4 a pour but d'offrir aux sociétés de gestion françaises la possibilité d'accéder au marché américain, ce qui suppose un accord sur la transmission d'informations. Dès lors, avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Même avis. Les sociétés de gestion françaises ont l'obligation de transmettre des informations à des autorités de supervision étrangères, or les autorités françaises le leur interdisent : elles sont donc exclues de certains marchés.

La dérogation ne concernera que les informations liées aux impératifs de la supervision financière, pas le secret des affaires.

Nous pourrons discuter du budget de l'AMF lors du prochain PLF.

L'amendement n°47 rectifié bis est retiré.

L'article 4 est adopté.

Article 5

M. le président.  - Amendement n°31, présenté par M. Bocquet et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky.

Supprimer cet article.

M. Éric Bocquet.  - Ce texte renforce la possibilité pour les gestionnaires d'actifs étrangers de faire la promotion de leurs produits en France.

Comme l'écrit aujourd'hui Les Échos, mon journal de chevet (sourires), « Cocorico ! La France est le premier marché de la gestion d'actifs - le journal l'écrit en anglais, mais ici, nous parlons la langue de Molière... - pour l'Europe continentale. Avec 4 589 milliards d'euros d'actifs sous gestion, l'Hexagone est loin devant la Suisse, l'Allemagne, les Pays-Bas et l'Italie. De quoi attiser les appétits de bien des maisons de gestion étrangères. » Tout est dit, fermez le ban !

Pourquoi une telle mesure ? Un consultant de McKinsey l'explique : la clientèle des particuliers est bien plus rémunératrice que l'institutionnel, avec 40 % des revenus pour 30 % de la clientèle.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur.  - J'ai pour obsession la protection des épargnants. Une société de gestion peut vendre en France des produits sans être agréée par l'AMF, en étant enregistrée à Chypre, par exemple. Pour ma part, je préfère l'agrément par l'autorité française. Avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Même avis.

L'amendement n°31 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°51, présenté par le Gouvernement.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

....  -  Le code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° Le I de l'article L. 421-10 est ainsi modifié :

a) Le troisième alinéa est supprimé ;

b) Au quatrième alinéa, les mots : «, qui les approuve après avoir effectué les vérifications prévues à l'alinéa précédent » sont supprimés ;

2° Le deuxième alinéa de l'article L. 424-2 est supprimé ;

3° Le troisième alinéa de l'article L. 425-2 est supprimé ;

4° Le livre VII est ainsi modifié :

a) La septième ligne du tableau du I des articles L. 762-4, L. 763-4 et L. 764-4 est ainsi rédigée :

« 

L. 421-10

la loi n° 2024-... du ... 2024

 » ;

b) La troisième ligne du tableau des articles L. 762-5, L. 763-5 et L. 764-5 est ainsi rédigée :

«

L. 424-2

la loi n° 2024-... du ... 2024

 » ;

c) La troisième ligne du tableau du I des articles L. 762-6, L. 763-6 et L. 764-6 est ainsi rédigée :

«

L. 425-2

la loi n° 2024-... du ... 2024

 ».

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Nous supprimons la préapprobation des règles de fonctionnement des marchés : c'est une surtransposition des règles européennes. L'AMF sera toujours notifiée, elle conservera tout son pouvoir de contrôle et de sanction, mais sera allégée d'une charge.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur.  - Avis défavorable à ce passager clandestin : ces dispositions n'ont rien à voir avec l'article 5.

L'amendement n°51 n'est pas adopté.

L'article 5 est adopté.

Après l'article 5

M. le président.  - Amendement n°41 rectifié, présenté par Mme Paoli-Gagin, MM. Capus et Malhuret, Mme Bourcier, MM. Brault et Chasseing, Mme L. Darcos, M. Grand, Mme Lermytte et MM. V. Louault, A. Marc, Rochette et Wattebled.

Après l'article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la première phrase du d du 1° de l'article L. 432-2 du code des assurances, après les mots : « pays étrangers » sont insérés les mots : «, y compris les jeunes entreprises innovantes mentionnées à l'article 44 sexies-0 A du code général des impôts, ».

M. Jean-Luc Brault.  - Rendons les jeunes entreprises innovantes (JEI) éligibles à la garantie pour les projets stratégiques (GPS) proposée par Bpifrance, pour soutenir leur ouverture à l'international.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur.  - Retrait, sinon avis défavorable : cet amendement est satisfait par le droit existant. Le Gouvernement le confirme-t-il ?

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Je le confirme : toutes les entreprises françaises remplissant les critères d'octroi sont éligibles à la GPS de Bpifrance. Retrait.

L'amendement n°41 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°38 rectifié, présenté par Mme Paoli-Gagin, MM. Capus et Malhuret, Mme Bourcier, MM. Brault et Chasseing, Mme L. Darcos, M. Grand, Mme Lermytte et MM. V. Louault, A. Marc, Rochette et Wattebled.

Après l'article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code de commerce est ainsi modifié :

1° Après le 2° de l'article L. 227-2, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

«... ° Au 1° de l'article L. 411-2-1 du même code, si l'offre de titres financiers est proposée par une infrastructure de marche? DLT au sens du règlement (UE) 2022/858 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2022 sur un régime pilote pour les infrastructures de marché reposant sur la technologie des registres distribués, et modifiant les règlements (UE) n° 600/2014 et (UE) n° 909/2014 et la directive 2014/65/UE. » ;

2° Le troisième alinéa de l'article L. 227-2-1 est complété par les mots : « ou au 1° de l'article L. 411-2-1 du même code dans les conditions prévues a? l'article L. 227- 2 et portant sur ses titres de capital ».

M. Jean-Luc Brault.  - Cet amendement permet aux sociétés par actions simplifiées (SAS) de procéder à une offre au public de titres financiers lorsqu'elle repose sur une infrastructure de marché liée à la technologie des registres distribués (DLT).

Il s'agit là de lancer une expérimentation, non de renverser la table.

M. le président.  - Amendement identique n°45, présenté par MM. Canévet et Delcros, Mme Havet, M. Bonnecarrère, Mmes Jacquemet et N. Goulet, MM. Kern, Hingray et Bleunven, Mmes Billon et O. Richard et MM. Courtial, P. Martin et J.M Arnaud.

M. Michel Canévet.  - Défendu.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur.  - Avis défavorable. Ce serait un changement radical, même sous la forme d'une expérimentation.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Même avis. Cela va un peu loin.

Les amendements identiques nos38 rectifié et 45 ne sont pas adoptés.

Article 5 bis

M. le président.  - Amendement n°32, présenté par M. Bocquet et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky.

Supprimer cet article.

M. Pascal Savoldelli.  - Cet article étend l'autorisation de démarchage bancaire et financier aux entreprises proposant... un plan d'épargne retraite d'entreprise ! L'idée est bien d'inciter, par la publicité, les salariés à souscrire à un plan d'épargne retraite financiarisé. Nous sommes résolument contre : pour nous, il n'y a que la protection sociale pour prévenir le risque vieillesse.

Le plan d'épargne pour la retraite collectif (Perco), son frangin le plan d'épargne retraite d'entreprise collectif (Pereco) ou encore le plan d'épargne retraite (PER) peinent à convaincre. Il faut savoir reconnaître les échecs !

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur.  - Il n'y a déjà pas grand-chose dans le texte, alors si vous supprimez tous les articles...

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Ça, ce n'est pas gentil !

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur.  - La publicité est déjà autorisée pour les Perco. Il semble que les Pereco aient été oubliés. Il s'agit de réparer cet oubli. Avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - J'étais le rapporteur de la loi Pacte, qui a créé le PER, en remplacement du Perco, pour lequel le démarchage était autorisé. On a oublié les Pereco - dont acte. Avis défavorable. Je précise que le démarchage obéit aux règles habituelles de déontologie.

L'amendement n°32 n'est pas adopté.

L'article 5 bis est adopté.

Après l'article 5 bis

M. le président.  - Amendement n°54, présenté par le Gouvernement.

Après l'article 5 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le II de l'article 163 bis G du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, les mots : «, incessibles et émis dans les conditions prévues aux articles L. 228-91 et L. 228-92 du code de commerce, » sont supprimés ;

2° Sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :

« L'émission de ces bons, incessibles, est autorisée par l'assemblée générale extraordinaire des actionnaires conformément aux articles L. 225-129 à L. 225-129-6 du code de commerce. Celle-ci se prononce sur le rapport du conseil d'administration ou du directoire et sur le rapport spécial du commissaire aux comptes.

« Lorsque ces bons sont attribués aux membres du conseil d'administration, du conseil de surveillance ou, en ce qui concerne les sociétés par actions simplifiées, de tout organe statutaire équivalent, les membres bénéficiaires ne peuvent participer à la décision de l'organe statuant sur l'opération. »

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Il s'agit de clarifier le régime de souscriptions des bons de souscription de parts de créateur d'entreprise (BSPCE). Or le renvoi actuel au code de commerce est interprété comme les soumettant au régime contraignant des valeurs mobilières. Privilégions une procédure d'émission classique, plus claire et source de sécurité juridique.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur.  - Sur la forme, il y a deux poids, deux mesures : l'amendement touche au code général des impôts... Sur le fond, avis favorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Merci !

L'amendement n°54 n'est pas adopté.

(MM. Roland Lescure et Albéric de Montgolfier expriment des marques de regret.)

M. le président.  - Amendement n°16 rectifié bis, présenté par Mme N. Delattre, MM. Masset, Bilhac et Laouedj, Mme Pantel et M. Cabanel.

Après l'article 5 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 1er de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 réglementant les conditions d'exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« La présente loi ne s'applique pas lorsque l'opération visée aux 1° , 2° , 4° et 5° du présent article est d'une valeur supérieure à cinq millions d'euros et est réalisée par un prestataire de service d'investissement français ou étranger visé aux articles L. 532-18 ou L. 532-18-1 du code monétaire et financier. »

M. Michel Masset.  - Il s'agit de délimiter la responsabilité des prestataires de services d'investissement (PSI) qui fournissent des activités de conseil en fusion acquisition portant sur des sous-jacents immobiliers, dans un souci de simplification.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur.  - Quel est l'avis du Gouvernement sur ce sujet ultra-technique ?

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Nous comprenons l'interrogation, mais nous n'avons pas encore la réponse, d'autant que l'amendement a été déposé assez tardivement.

Le sujet est à examiner dans le cadre d'une réforme transversale afin de cibler les mesures allant dans le sens de la débureaucratisation, sans fragiliser les investisseurs. Retrait ? Nous nous engageons à y travailler dans un cadre plus large.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur.  - Retrait.

M. Michel Masset.  - Soit, au bénéfice de cet engagement.

L'amendement n°16 rectifié bis est retiré.

M. le président.  - Amendement n°52, présenté par le Gouvernement.

Après l'article 5 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est habilité à prendre par ordonnances, dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la présente loi, toute mesure relevant du domaine de la loi permettant de créer un régime de fractionnement des instruments financiers, notamment en :

1° Définissant les modalités de fractionnement d'un instrument financier ;

2° Définissant un régime de propriété pour l'acquisition et la détention des instruments financiers fractionnés ;

3° Étendant les droits associés aux différentes catégories d'instruments financiers dans les cas de fractionnement ;

4° Adaptant les règles de commercialisation et la négociation des instruments financiers aux fins de préciser leur application en cas de fractionnement d'un instrument financier ;

5° Déclinant le régime de protection des investisseurs pour prendre en compte le fractionnement d'instruments financiers ;

6° Étendant à la Nouvelle-Calédonie, à la Polynésie française et aux îles Wallis et Futuna, avec les adaptations nécessaires, les dispositions prises sur le fondement du 1°, 2° et 3° du présent article, pour celles qui relèvent de la compétence de l'État, et prévoir, le cas échéant, les adaptations nécessaires en ce qui concerne Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon.

Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de l'ordonnance. 

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Il n'est pas question de vendre des morceaux d'actions aux épargnants, mais de leur permettre d'acheter des parts d'une action dont la valeur nominale est importante.

Une action Thalès coûte 150 euros ; une action LVMH, 800 euros ; une action Hermès, 2 000 euros. Pourquoi les petits épargnants n'y auraient-ils pas accès ? (M. Pascal Savoldelli s'exclame ; M. Thomas Dossus sourit.)

M. Jean-François Husson.  - Il y a un problème éthique.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Le fractionnement des actions, autorisé sur d'autres places boursières, permet à des actionnaires individuels de diversifier le risque dans le temps et dans l'espace. Cette mesure, certes techniquement complexe, serait utile pour favoriser l'actionnariat individuel populaire. C'est pourquoi nous demandons une habilitation à légiférer par ordonnance.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur.  - Le fractionnement d'actions existe dans les faits, mais pas en droit. Et on ne sait pas très bien ce qu'on achète. Qui exerce le droit de vote ? S'agit-il de dérivés ? Nous sommes en pleine zone grise. Je suis favorable à ce que cette pratique, qui existe, qui intéresse notamment les jeunes, soit encadrée. L'extrême technicité du sujet justifie le recours à une ordonnance.

M. Jean-François Husson.  - Très bien !

M. Pascal Savoldelli.  - N'allez pas proposer à des salariés pauvres de fractionner le risque temporel de leurs actions dans l'entreprise : avec de tels éléments de langage, vous provoqueriez un désordre social total ! (Sourires)

Ce que vous leur proposez, c'est d'acheter des actions à la découpe. L'objectif, en catimini, est qu'ils investissent en Bourse dès leur premier euro ! Je vois Christine Lavarde arborer un large sourire : voilà un projet d'éducation populaire à la haute finance vraiment de droite. (Sourires)

Les salariés pauvres, qui devront fractionner les actions LVMH, se verront proposer la rémunération du capital pour 50 euros d'actions ? Sérieusement ? C'est insolent pour les salariés pauvres ! (M. Roland Lescure s'en défend.) Ils auront leurs actions, mais aucun pouvoir de décision ! Cela frôle le ridicule.

La réponse existe déjà : les cryptomonnaies. On peut fractionner ce que l'on veut. Ne considérons pas les salariés les plus pauvres comme le quart de quelque chose !

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - On n'oblige personne, on n'humilie personne : on donne la possibilité de faire en France ce qui existe à l'étranger. Vous pouvez d'ores et déjà acheter le quart d'une action LVMH sur la place de Francfort. Je préfère que ce soit sur la place de Paris, régulée par l'AMF. Les jeunes peuvent ainsi s'éduquer à l'épargne, et se constituer un pécule.

M. Pascal Savoldelli.  - C'est insultant !

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Nullement. L'épargne populaire est une grande idée, qui mérite d'être développée en France.

L'amendement n°52 est adopté et devient un article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°8, présenté par MM. Dossus et G. Blanc, Mme Senée, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Souyris et M. Vogel.

Après l'article 5 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Le titre Ier de la présente loi ne s'applique pas aux entreprises qui ne prévoient pas la possibilité au sein de leur accord de branche et/ou de leurs accords d'entreprise d'indexer leur salaire minimal en vigueur au sein de l'entreprise sur la valeur du salaire minimum de croissance au dernier trimestre de l'année.

II.  -  Le titre Ier de la présente loi ne s'applique pas aux entreprises, fiscalement domiciliées en France et soumises à l'obligation de déclaration de performance extra-financière prévue à l'article L. 225-102-1 du code de commerce, qui délocalisent et transfèrent volontairement à l'étranger une partie ou de la totalité de leurs activités s'accompagnant d'une diminution du nombre d'emplois en France, que ce soit au travers de filiales appartenant à la même entreprise ou par l'intermédiaire de sous-traitants auprès d'entreprises non affiliées.

III.  -  Un décret en Conseil d'État précise les modalités d'application du présent article.

M. Thomas Dossus.  - Les outils de la proposition de loi ne font l'objet d'aucune contrepartie, notamment sociale. Or les enjeux sont nombreux, notamment pour les salaires. Malgré la récente revalorisation du Smic, trop de branches professionnelles affichent des minimums conventionnels inférieurs aux seuils. Cette situation est inacceptable.

Cet amendement tend à exclure des mesures du titre I de la proposition de loi les entreprises qui n'indexent pas les salaires sur le Smic délocalisent leurs activités à l'étranger.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur.  - Je ne vois pas ce que cet amendement apporte. Avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Même avis.

L'amendement n°8 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°9, présenté par MM. Dossus et G. Blanc, Mme Senée, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Souyris et M. Vogel.

Après l'article 5 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Le titre Ier de la présente loi ne s'applique pas aux entreprises, fiscalement domiciliées en France et soumises à l'obligation de déclaration de performance extra-financière prévue à l'article L. 225-102-1 du code de commerce, qui ne se sont pas subordonnées à la souscription d'engagements annuels en matière de réduction de ses émissions de gaz à effet de serre et qui n'ont pas publié, au plus tard le 1er juillet de chaque année, et à partir du 1er juillet 2025, une trajectoire de dé-plastification au sein de son plan de vigilance défini à l'article 1er de la loi n° 2017-399 du 27 mars 2017 relative au devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d'ordre.

II.  -  Les engagements mentionnés au I doivent être cohérents avec une trajectoire minimale de réduction des émissions de gaz à effet de serre définie pour la période 2020-2030 qui doit être compatible avec le plafond national des émissions de gaz à effet de serre défini par secteurs en application de l'article L. 222-1 A du code de l'environnement ainsi qu'avec l'accord de Paris.

III.  -  À compter du 1er janvier 2024, les entreprises ayant souscrit les engagements mentionnés I publient, au plus tard le 1er avril de chaque année, un rapport annuel sur le respect de leurs obligations climatiques. Il présente le bilan de leurs émissions directes et indirectes de gaz à effet de serre au cours de l'exercice clos ainsi que leur stratégie de réduction de ces émissions, assortie d'un plan d'investissement, pour les cinq exercices suivants. Le bilan précité est établi conformément à une méthodologie reconnue par l'Agence de la transition écologique.

IV.  -  Le non-respect, par les entreprises mentionnées au I, de l'obligation de publication du rapport annuel sur le respect de leurs obligations climatiques prévue au II est passible d'une sanction d'un montant égal à 375 000 €. 

V.  -  Un décret en Conseil d'État précise les modalités d'application du présent article.

M. Thomas Dossus.  - Il s'agit d'un amendement de conditionnalité verte. Monsieur le ministre, vous avez présenté cette proposition de loi comme un levier pour l'économie verte, sans qu'il contienne aucun critère à ce sujet. Pour y remédier, rendons obligatoires des engagements climatiques contraignants et un plan de déplastification. En cas de non-respect, des pénalités financières seraient prévues.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur.  - Avis défavorable, pour les mêmes raisons que précédemment.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Même avis. L'amendement sera satisfait par la directive sur la publication d'informations en matière de durabilité par les entreprises (CSRD).

L'amendement n°9 n'est pas adopté.

L'article 6 est adopté, de même que l'article 7.

Article 8

M. le président.  - Amendement n°55, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 2

Rédiger ainsi cet alinéa :

1° Assurer l'unicité du titre transférable électronique ;

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Cet amendement tend à ce que les titres transférables électroniques ne puissent être dupliqués - comme peut l'être un PDF, par exemple.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur.  - Sagesse.

L'amendement n°55 est adopté.

L'amendement n°37 n'est pas défendu.

L'article 8, modifié, est adopté.

L'article 9 est adopté.

Article 10

M. le président.  - Amendement n°33, présenté par M. Bocquet et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky.

Supprimer cet article.

M. Éric Bocquet.  - Nous craignons que la retransmission de l'intégralité d'une assemblée générale ait des effets pervers. Une chercheuse en sciences de gestion expliquait il y a une dizaine d'années que le vote par internet comportait des risques, créant une inégalité de traitement entre actionnaires au porteur et non-résidents, ainsi qu'avec les actionnaires salariés.

M. Louis Vogel, rapporteur pour avis.  - Avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Même avis.

L'amendement n°33 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°10, présenté par MM. Dossus et G. Blanc, Mme Senée, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Souyris et M. Vogel.

 Alinéa 19

1° Après la référence :

L. 225-96,

insérer les mots :

l'assemblée générale ordinaire mentionnée à l'article L. 225-98 et l'assemblée spéciale mentionnée à l'article L. 225-99,

2° Remplacer le taux :

25 %

par le taux :

5 %

M. Thomas Dossus.  - Un groupe d'actionnaires représentant au moins 25 % du capital pourrait, en l'état actuel du texte, s'opposer à ce que les assemblées générales se tiennent exclusivement par vidéoconférence. L'amendement prévoit d'abaisser ce seuil à 5 %.

M. Louis Vogel, rapporteur pour avis.  - C'est contre-productif : avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Même avis.

L'amendement n°10 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°23 rectifié ter, présenté par M. Canévet, Mme N. Goulet, MM. Henno, Folliot, Cadic, Mizzon, Longeot, Kern, P. Martin, Chauvet et Duffourg, Mme O. Richard, MM. Delahaye et Parigi, Mme Billon et MM. Fargeot et Delcros.

Après l'alinéa 19

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° Après la deuxième phrase du deuxième alinéa de l'article L. 225-105, sont insérées deux phrases ainsi rédigées : « Néanmoins, dans les sociétés dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé, les demandes d'inscription de points ou de projets de résolution à l'ordre du jour doivent parvenir à la société au plus tard le vingtième jour qui précède la date de l'assemblée. Enfin, le décret visé au présent paragraphe peut réduire le pourcentage exigé par le présent alinéa, lorsque le capital social excède un montant fixé par ledit décret. » ;

M. Michel Canévet.  - Cet amendement allonge les délais pour le dépôt de points à l'ordre du jour de l'assemblée générale d'une société cotée en Bourse.

M. Louis Vogel, rapporteur pour avis.  - Cet amendement, comme ceux de la discussion commune qui suit, vise à faciliter l'inscription à l'ordre du jour de résolutions par les actionnaires minoritaires.

Certains abaissent le seuil de capital social nécessaire, d'autres proposent de donner cette faculté à 150 actionnaires au moins. Si je partage la finalité de renforcer la démocratie actionnariale, le sujet n'entre pas dans les objectifs du texte que nous examinons, et les amendements s'éloignent de l'article 10.

Mais ils posent des questions fondamentales qui mériteraient un travail spécifique, en concertation avec des représentants d'entreprises et des investisseurs. Soyons prudents pour ne pas complexifier inutilement le fonctionnement des sociétés. Certains hedge funds utilisent l'arme des résolutions aux seules fins de déstabiliser le management : nous ne devons pas leur faciliter la tâche.

Lorsqu'un débat similaire a eu lieu à l'Assemblée nationale à ce sujet, le Gouvernement a pris un engagement - le ministre pourra peut-être le confirmer. Dans cette attente, la commission des lois a introduit l'article 10 bis A pour renforcer le contentieux en cas de refus injustifié d'inscription d'un point à l'ordre du jour. Avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Même avis.

Je confirme l'engagement pris par Olivia Grégoire à l'Assemblée nationale.

Le rapporteur a raison : certains fonds d'investissement procèdent à des mesures dilatoires. Dès lors, retrait, sinon avis défavorable à l'amendement.

L'amendement n°23 rectifié ter est retiré.

M. le président.  - Amendement n°13, présenté par MM. Dossus et G. Blanc, Mme Senée, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Souyris et M. Vogel.

I.  -  Après l'alinéa 19

Insérer trois alinéas ainsi rédigés :

...° Après le deuxième alinéa de l'article L. 225-105, il est inséré un alinéa ainsi rédigé : 

« Par dérogation à ce qui précède, lorsque le capital d'une société dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé est supérieur à 1 000 000 000 euros, un ou plusieurs actionnaires représentant seul ou ensemble 0,25 % du capital peuvent requérir l'inscription à l'ordre du jour de points ou de projets de résolution.

« Lorsque le pourcentage visé dans le présent paragraphe n'est pas atteint, des actionnaires dont le nombre est au moins égal à celui prévu par l'article D. 411-4 du code monétaire et financier peuvent demander l'inscription à l'ordre du jour de points ou de projets de résolution. » ;

II.  -  Après l'alinéa 33

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

...° Le II de l'article L. 22-10-44 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« ...° 0,25 % au-delà 1 000 000 000 €. » ;

M. Thomas Dossus.  - Cet amendement renforce la démocratie actionnariale en abaissant le seuil de capital nécessaire à la déposition d'une résolution en assemblée générale et en permettant à 150 actionnaires d'ouvrir le dialogue, quelle que soit leur part de capital.

M. le président.  - Amendement n°49 rectifié, présenté par M. Bocquet et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky.

Après l'alinéa 19

Insérer un alinéa ainsi rédigé : 

...° Au deuxième alinéa de l'article L. 225-105 du code de commerce, le pourcentage : « 5 % » est remplacé par le pourcentage : « 0,25 % » ;

M. Pascal Savoldelli.  - Nous avons eu un mini-débat sur le fractionnement des actions pour les salariés. Mais quand on pose la question du seuil pour proposer une résolution en assemblée générale, c'est le blackout ! Nous proposons d'abaisser le seuil de 5 % à 0,25 % des parts. Si les actionnaires majoritaires estiment que la résolution n'est pas valable, ils voteront contre.

On ne peut pas, d'un côté, parler de jouer à la spéculation et, de l'autre, garder le silence radio sur la stratégie de l'entreprise !

Ces avis défavorables sont bien regrettables.

M. le président.  - Amendement n°20 rectifié ter, présenté par M. Canévet, Mme N. Goulet, MM. Henno, Folliot, Cadic, Mizzon, Longeot, Kern, P. Martin, Chauvet et Duffourg, Mme O. Richard, MM. Delahaye et Parigi, Mme Billon et MM. Fargeot et Delcros.

Après l'alinéa 19

Insérer trois alinéas ainsi rédigés :

...° Après le deuxième alinéa de l'article L. 225-105 du code de commerce, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« Par dérogation à ce qui précède, lorsque le capital d'une société dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé est supérieur à 1 000 000 000 euros, un ou plusieurs actionnaires représentant seul ou ensemble 0,25 % du capital peuvent requérir l'inscription à l'ordre du jour de points ou de projets de résolution.

« Lorsque le pourcentage visé au précédent alinéa n'est pas atteint, des actionnaires dont le nombre est au moins égal à celui prévu par l'article D. 411-4 du code monétaire et financier peuvent demander l'inscription à l'ordre du jour de points ou de projets de résolution. » ;

M. Michel Canévet.  - Je présente quatre amendements visent à ce que les actionnaires minoritaires puissent présenter des résolutions, selon des modalités différentes.

M. le président.  - Amendement n°18 rectifié ter, présenté par M. Canévet, Mme N. Goulet, MM. Henno, Cambier, Folliot, Cadic, Mizzon, Longeot, Kern, P. Martin, Chauvet et Duffourg, Mme O. Richard, MM. Delahaye et Parigi, Mme Billon et MM. Fargeot et Delcros.

Après l'alinéa 19

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

...° Après le deuxième alinéa de l'article L. 225-105, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation à ce qui précède, lorsque le capital d'une société dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé est supérieur à 1 000 000 000 euros, un ou plusieurs actionnaires représentant seul ou ensemble 0,25 % du capital peuvent requérir l'inscription à l'ordre du jour de points ou de projets de résolution. » ;

M. Michel Canévet.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement n°22 rectifié ter, présenté par M. Canévet, Mme N. Goulet, MM. Henno, Cambier et Folliot, Mme Guidez, MM. Cadic, Mizzon, Longeot, Kern, P. Martin, Chauvet et Duffourg, Mme O. Richard, MM. Delahaye et Parigi, Mme Billon et MM. Fargeot et Delcros.

Après l'alinéa 19

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

...° Après le deuxième alinéa de l'article L. 225-105, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation à ce qui précède, lorsque le capital d'une société dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé est supérieur à 1 000 000 000 euros, des actionnaires dont le nombre est au moins égal à celui prévu par l'article D. 411-4 du code monétaire et financier peuvent demander l'inscription à l'ordre du jour de points ou de projets de résolution. » ;

M. Michel Canévet.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement n°19 rectifié ter, présenté par M. Canévet, Mme N. Goulet, MM. Henno, Cambier, Folliot, Cadic, Mizzon, Longeot, Kern, P. Martin, Chauvet et Duffourg, Mme O. Richard, MM. Delahaye et Parigi, Mme Billon et MM. Fargeot et Delcros.

Après l'alinéa 19

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° Le II de l'article L. 22-10-44 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« ...° 0,25 % au-delà 1 000 000 000 €. » ; 

M. Michel Canévet.  - Défendu.

M. Louis Vogel, rapporteur pour avis.  - Avis défavorable. Ce n'est pas un blackout : je m'en suis déjà expliqué.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Il s'agit non pas de démocratie sociale, mais de démocratie actionnariale. Vous devez être sensible au risque d'actionnaires activistes qui risqueraient de déstabiliser l'entreprise si les seuils étaient trop bas.

Avis défavorable à ces amendements.

M. Pascal Savoldelli.  - Michel Canévet activiste, c'est la révélation de la soirée !

L'amendement n°13 n'est pas adopté, non plus que les amendements nos49 rectifié, 20 rectifié ter, 18 rectifié ter, 22 rectifié ter et 19 rectifié ter.

M. le président.  - Amendement n°24 rectifié ter, présenté par M. Canévet, Mme N. Goulet, MM. Henno, Cambier et Folliot, Mme Guidez, MM. Cadic, Mizzon, Longeot, Kern, P. Martin, Chauvet et Duffourg, Mme O. Richard, MM. Delahaye et Parigi, Mmes Billon et Saint-Pé et MM. Fargeot et Delcros.

Après l'alinéa 19

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° Le troisième alinéa de l'article L. 225-105 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Le ou les actionnaires ayant demandé l'inscription à l'ordre du jour de l'assemblée de points ou de projets de résolution, bénéficient du droit de présenter leur demande lors de l'assemblée. » ;

M. Michel Canévet.  - Il est logique que tous les actionnaires puissent s'exprimer en assemblée générale, même les petits.

L'amendement n°24 rectifié ter, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°11, présenté par MM. Dossus et G. Blanc, Mme Senée, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Souyris et M. Vogel.

Après l'alinéa 25

Insérer dix-neuf alinéas ainsi rédigés :

...° Après l'article L. 22-10-10, il est inséré un article L. 22-10-10-1 ainsi rédigé : 

« Art. L. 22-10-10-1. - I.  -  Cet article s'applique aux sociétés dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé et qui entrent dans le champ d'application de la directive (UE) 2022/2464 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 modifiant le règlement (UE) n° 537/2014 et les directives 2004/109/CE, 2006/43/CE et 2013/34/UE en ce qui concerne la publication d'informations en matière de durabilité par les entreprises.

« Ces sociétés publient chaque année une mise à jour de leur stratégie en matière de durabilité en conformité avec les obligations d'information prévues par l'article 19 bis de la même directive afin de s'assurer que le modèle et la stratégie de l'entreprise sont compatibles avec les objectifs de transition vers une économie durable et de limitation du réchauffement planétaire à 1,5° C, conformément à l'accord de Paris et à l'objectif d'atteinte de la neutralité climatique tel qu'établi dans le règlement (UE) 2021/1119 du Parlement européen et du Conseil du 30 juin 2021 établissant le cadre requis pour parvenir à la neutralité climatique et modifiant les règlements (CE) n° 401/2009 et (UE) 2018/1999.

« Cette stratégie doit notamment inclure les indicateurs suivants :

« 1° Les émissions de gaz à effet de serre directes et indirectes de l'entreprise en valeur absolue et relative, et leur évolution sur les trois dernières années ;

« 2° Les objectifs de réduction des gaz à effet de serre de l'entreprise, formulés en valeur absolue et relative pour ses émissions directes et indirectes à court terme, moyen terme et long terme ;

« 3° Les dépenses d'investissements prévues à court et moyen terme de l'entreprise, et les contributions au financement de l'investissement en valeur absolue et relative pour les entreprises financières, et leur répartition par activité et nature ;

« 4° Les dépenses opérationnelles de l'entreprise en valeur absolue et relative et leur répartition par activité ;

« 5° Le ou les scenarios de références utilisés pour déterminer les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre et la stratégie de l'entreprise ;

« 6° La contribution éventuelle des émissions de gaz à effet de serre capturées par l'entreprise à l'atteinte des objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre en valeur absolue et relative ;

« 7° Une explication de l'intégration des enjeux climatiques sur la gouvernance et la gestion des risques ;

« 8° Une évaluation de l'alignement du 1° à 7° avec l'objectif de limitation du réchauffement planétaire à 1,5 degrés celsius reposant sur un scénario avec peu ou pas de dépassement et un recours limité aux technologies à émissions négatives ;

« 9° Une explication de la contribution éventuelle de la compensation carbone à la stratégie de l'entreprise.

« II.  -  Chaque année, deux projets de résolutions sont soumis à l'approbation de l'assemblée générale des actionnaires dans les conditions prévues aux article L. 225-98 et L. 22-10-32 :

« 1° Un projet de résolution sur la stratégie mentionnée en I ;

« 2° Un projet de résolution sur la mise en oeuvre de cette stratégie.

« Le projet de résolution mentionné en 1° du présent II indique également de quelle manière ont été pris en compte le vote des actionnaires et, le cas échéant, les avis exprimés lors de l'assemblée générale des actionnaires précédente.

« III.  -  Lorsque l'assemblée générale des actionnaires n'approuve pas à une majorité qualifié des deux tiers des votes exprimés au moins un des deux projets de résolution mentionnées au II, les composantes variable et exceptionnelle de la rémunération du président du conseil d'administration, du directeur général et de chaque directeur général délégué est diminuée d'au moins 50 % par rapport à ce que prévoir la politique de rémunération prévue par l'article L. 22-10-18, selon des modalités définies par décret en Conseil d'État. » ;

...° Au deuxième alinéa du I de l'article L. 225-100, après le mot : « article », est insérée la référence : « L. 22-10-10-1, » ;

M. Thomas Dossus.  - Cet amendement renforce la redevabilité des entreprises en matière de transition écologique. Nous proposons d'imposer aux entreprises soumises à la directive CSRD de publier une stratégie complète en faveur de la transition, avec des engagements concrets. Elle serait soumise à un vote annuel des actionnaires avec, en cas de rejet, une diminution de moitié de la rémunération des dirigeants. Nous instaurerions une logique vertueuse en matière de finance durable.

M. Louis Vogel, rapporteur pour avis.  - L'objectif est déjà satisfait par la directive CSRD, ainsi que par tous les textes en cours d'examen au niveau européen.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Même avis.

L'amendement n°11 n'est pas adopté.

L'article 10 est adopté.

Article 10 bis A

M. le président.  - Amendement n°58, présenté par le Gouvernement.

Supprimer les mots :

et sans recours possible

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Cet amendement vise à mettre en conformité la nouvelle procédure avec le droit effectif au recours prévu par la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH).

M. Louis Vogel, rapporteur pour avis.  - Avis favorable.

L'amendement n°58 est adopté.

L'article 10 bis A, modifié, est adopté.

L'article 10 bis est adopté, de même que l'article 10 ter.

Article 10 quater (Supprimé)

M. le président.  - Amendement n°53, présenté par le Gouvernement.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

I.  -  Dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est habilité à prendre par ordonnances, dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la présente loi, toute mesure relevant du domaine de la loi pour :

1° Harmoniser et simplifier les dispositions relatives à la constitution et à la radiation, à l'organisation des assemblées générales, aux modalités de distribution du capital, au régime de franchissement des seuils et à la fin de vie des organismes de placement collectif ;

2° Moderniser la composition et le fonctionnement des organes de gouvernance des organismes de placement collectif ainsi que la répartition des pouvoirs entre les organes sociaux des organismes de placement collectif et leurs sociétés de gestion ;

3° Réformer le cadre des opérations touchant à la vie des organismes de placement collectif, au fonctionnement des compartiments, au calcul du ratio d'endettement et au fractionnement des parts ou des actions des organismes de placement collectif ;

4° Rendre applicables en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et à Wallis-et-Futuna, avec les adaptations nécessaires, les articles du code de commerce et du code monétaire et financier et, le cas échéant, d'autres codes et lois, dans leur rédaction résultant des dispositions prévues aux 1° à 3°, pour ceux qui relèvent de la compétence de l'État dans ces collectivités, et procéder aux adaptations nécessaires de ces articles en ce qui concerne les collectivités de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon.

II.  -  Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de quatre mois à compter de la publication de l'ordonnance.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Cet amendement vise à rétablir l'article habilitant le Gouvernement à prendre des mesures extrêmement techniques pour mieux articuler le droit commun des sociétés issu du code de commerce et le droit des organismes de placement collectif issu du code monétaire et financier : il s'agit de créer des fonds compétitifs, notamment en faveur de la transition écologique.

M. le président.  - Sous-amendement n°65 à l'amendement n°53 du Gouvernement, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances.

Amendement n° 53

I.  -  Alinéa 2

Remplacer le mot :

douze

par le mot :

neuf

II.  -  Dernier alinéa

Remplacer le mot :

quatre

par le mot :

trois

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur.  - Le sujet est en effet très technique ; il pourrait justifier une ordonnance. Mais l'habilitation s'apparente plutôt à un blanc-seing : le délai est très long et les termes retenus sont très larges. D'où ces sous-amendements qui encadrent le champ d'habilitation. En cas d'adoption, nous serions favorables à l'amendement du Gouvernement.

M. le président.  - Sous-amendement n°66 à l'amendement n°53 du Gouvernement, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances.

Amendement n° 53

I. - Alinéa 3

Remplacer cet alinéa par sept alinéas ainsi rédigés :

1° Harmoniser et simplifier les dispositions relatives à la vie sociale des organismes de placement collectif :

a) en modifiant les modalités relatives à l'organisation des assemblées générales des organismes de placement collectif ;

b) en harmonisant les calendriers relatifs à la publication des comptes et à la distribution des dividendes des organismes de placement collectif ;

c) en harmonisant les définitions de capital et de sommes distribuables au sein des organismes de placement collectif ;

d) en modifiant les modalités relatives à l'affectation du résultat et à la distribution d'une fraction des actifs des organismes de placement collectif immobilier ;

e) en harmonisant les règles relatives au franchissement des seuils dans les organismes de placement collectif dont les actions sont négociées sur un marché règlementé ;

f) en modifiant les régimes de liquidation des organismes de placement collectif ;

II. - Alinéa 4

Remplacer cet alinéa par cinq alinéas ainsi rédigés :

2° Moderniser la gouvernance des organismes de placement collectif :

a) en modifiant la composition des organes de surveillance des sociétés et des sociétés civiles de placement immobilier ;

b) en modifiant les modalités relatives à la tenue des réunions des organes de surveillance des organismes de placement collectif ;

c) en modifiant la répartition des pouvoirs entre les organes sociaux des sociétés d'investissement à capital variable et des sociétés à prépondérance immobilière à capital variable d'une part, et leurs sociétés de gestion d'autre part ;

d) en modifiant les modalités d'intégration des investisseurs dans la gouvernance des organismes de placement collectif ;

III. - Alinéa 5

Remplacer cet alinéa par quatre alinéas ainsi rédigés :

3° Réformer le cadre des opérations des organismes de placement collectif :

a) en modifiant le fonctionnement des compartiments des organismes de placement collectif, s'agissant de leur autonomie juridique, de la compétence des assemblées d'actionnaires des compartiments et des droits des créanciers ;

b) en modifiant les modalités de fractionnement de parts ou d'actions d'organismes de placement collectif ;

c) en modifiant les modalités de valorisation de tout apport en nature dans les organismes de placement collectif immobilier ;

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur.  - Défendu.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - En effet, la durée d'un an est peut-être trop longue : dès lors, avis favorable au sous-amendement n°65. En revanche, avis défavorable au sous-amendement n°66.

Le sous-amendement n°65 est adopté, ainsi que le sous-amendement n°66.

L'amendement n°53, ainsi sous-amendé, est adopté et l'article 10 quater est rétabli.

L'article 10 quinquies est adopté.

Après l'article 10 quinquies

M. le président.  - Amendement n°67, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances.

Après l'article 10 quinquies 

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le deuxième alinéa de l'article L. 621-30 du code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° Le mot : « cinq » est remplacé par le mot : « trois » ;

2° Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Lorsque la décision contestée fait l'objet d'une demande de sursis à exécution, la juridiction saisie se prononce dans un délai d'un mois à compter du dépôt de cette demande. »

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur.  - Cet amendement abaisse le délai dans lequel la juridiction doit se prononcer en cas de recours sur une décision individuelle de l'AMF.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Ces décisions ont une portée réduite. Or la rédaction du rapporteur est plus générale. Certes, envisager une réduction circonscrite des délais est possible, mais ce projet n'est pas mûr et mérite d'être retravaillé. Retrait, sinon avis défavorable.

L'amendement n°67 est adopté et devient un article additionnel.

L'article 11 est adopté.

Article 11 bis

M. le président.  - Amendement n°12, présenté par MM. Dossus et G. Blanc, Mme Senée, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Souyris et M. Vogel.

Supprimer cet article.

M. Thomas Dossus.  - Ajouté à l'absence d'étude d'impact, cet article réduit encore davantage le rôle du Parlement en habilitant le Gouvernement à légiférer par ordonnance, de manière trop large.

M. Louis Vogel, rapporteur pour avis.  - Il est grand temps de réformer le régime des nullités. Une vision d'ensemble s'impose pour ce sujet technique : l'habilitation étant justifiée, avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Même avis.

L'amendement n°12 n'est pas adopté.

L'article 11 bis est adopté.

Article 12

M. le président.  - Amendement n°34, présenté par M. Bocquet et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky.

Supprimer cet article.

M. Éric Bocquet.  - Défendu.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur.  - Avis défavorable. On peut comprendre que, par construction, on soit opposé à toute limitation des indemnités de licenciement. En l'espèce, le nombre de salariés concernés - 0,3 % - est très limité ; en outre, leur rémunération dépasse 500 000 euros. L'article est de portée très limitée.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Même avis.

L'amendement n°34 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°68, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances.

Rédiger ainsi cet article :

L'article L. 511-84-1 du code monétaire et financier est ainsi rédigé :

« Art. L. 511-84-1. - Pour l'application des articles L. 1226-15, L. 1234-9, L. 1235-3, L. 1235-3-1, L. 1235-11 et L. 1235-16 du code du travail, la détermination de l'indemnité à la charge de l'employeur ne prend pas en compte, pour les preneurs de risques au sens des articles 5 et 6 du règlement délégué (UE) 2021/923 de la Commission du 25 mars 2021 complétant la directive 2013/36/UE du Parlement européen et du Conseil par des normes techniques de réglementation fixant les critères permettant de définir les responsabilités dirigeantes, les fonctions de contrôle, l'unité opérationnelle importante et l'incidence significative sur le profil de risque de cette unité, et fixant les critères permettant de recenser les membres du personnel ou les catégories de personnel dont les activités professionnelles ont une incidence sur le profil de risque de l'établissement qui est comparativement aussi significative que celle des membres du personnel ou catégories de personnel visés à l'article 92, paragraphe 3, de ladite directive, la partie de la part variable de la rémunération dont le versement peut être réduit ou donner lieu à restitution en application de l'article L. 511-84 du présent code.

« Pour l'application de l'article L. 1234-9 ainsi que par dérogation aux dispositions des articles L. 1235-3, L. 1235-11 et L. 1235-16 du code du travail, l'indemnité à la charge de l'employeur ne peut au maximum excéder dix fois le montant annuel du plafond mentionné à l'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale. Les modalités de calcul de cette indemnité ainsi que ses montants minimaux et maximaux selon l'ancienneté du salarié sont définies par décret. »

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur.  - Ce sujet a déjà été abordé dans le cadre du rapport de la commission des finances suivant le Brexit, en 2017. J'avais alors relevé que la France n'avait pas de plafonnement des indemnités de licenciement, contrairement à d'autres pays, ce qui pouvait constituer un frein pour la place de Paris par rapport à Amsterdam ou New York. Plafonnons-les pour les preneurs de risques.

Nous sommes tous preneurs de risques quand on fait de la politique... (Sourires) Ici, il s'agit des personnes dont la rémunération dépasse 750 000 euros ou faisant partie des 0,3 % des rémunérations les plus élevées.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Sagesse. Nous parlons d'une très petite part de la population qui gagne beaucoup d'argent. La question du plafonnement de ses indemnités de licenciement se pose effectivement mais cela soulève des questions juridiques et de constitutionnalité.

L'amendement n°68 est adopté.

L'article 12, modifié, est adopté.

Article 13

M. le président.  - Amendement n°69, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances.

I. - Après l'alinéa 31

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

... ° La troisième ligne du tableau du second alinéa du I des articles L. 783-11, L.784-11 et L. 785-10 est ainsi rédigée :

« 

 L. 621-23

 la loi n° du visant à accroître le financement des entreprises et l'attractivité de la France

» ;

II. - Alinéas 34 et 35

Remplacer ces alinéas par sept alinéas ainsi rédigés :

3° Le tableau du second alinéa du I des articles L. 742-8 et L. 743-8 est ainsi modifié :

a) La dix-huitième ligne est ainsi rédigée :

« 

 L. 214-28

 la loi n° du visant à accroître le financement des entreprises et l'attractivité de la France

» ;

b) La trente-septième ligne est remplacée par deux lignes ainsi rédigées :

«  

 L. 214-78

 la loi n° du visant à accroître le financement des entreprises et l'attractivité de la France

 L. 214-79 et L. 214-80

 l'ordonnance n° 2013-676 du 25 juillet 2013

» ;

c) La cinquante-cinquième ligne est ainsi rédigée :

« 

 L. 214-133

 la loi n° du visant à accroître le financement des entreprises et l'attractivité de la France

» ;

III. - Après l'alinéa 35

Insérer sept alinéas ainsi rédigés :

...° Le tableau du second alinéa du I de l'article L. 744-8 est ainsi modifié :

...) La dix-neuvième ligne est ainsi rédigée :

« 

 L. 214-28

 la loi n° du visant à accroître le financement des entreprises et l'attractivité de la France

» ;

...) La trente-huitième ligne est remplacée par deux lignes ainsi rédigées : 

« 

 L. 214-78

 la loi n° du visant à accroître le financement des entreprises et l'attractivité de la France

 L. 214-79 et L. 214-80

 l'ordonnance n° 2013-676 du 25 juillet 2013

» ;

...) La cinquante-sixième ligne est ainsi rédigée :

« 

 L. 214-133

 la loi n° du visant à accroître le financement des entreprises et l'attractivité de la France

».

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur.  - Amendement de coordination pour l'outre-mer.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Avis favorable.

L'amendement n°69 est adopté.

L'article 13, modifié, est adopté.

L'article 14 est adopté.

Après l'article 14

M. le président.  - Amendement n°42 rectifié, présenté par Mme Paoli-Gagin, MM. Capus et Malhuret, Mme Bourcier, MM. Brault et Chasseing, Mme L. Darcos, M. Grand, Mme Lermytte et MM. V. Louault, A. Marc, Rochette et Wattebled.

Après l'article 14

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 3332-16 du code du travail est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est ainsi modifié :

a) Après les mots : « dédié au rachat », sont insérés les mots : « ou à la souscription » ;

b) Les mots : « ou d'actions émises par des sociétés créées dans les conditions prévues à l'article 220 nonies du code général des impôts » sont supprimés ;

c) Les mots : « de rachat réservée aux salariés » sont remplacés par les mots : « proposée aux salariés et aux personnes visées à l'article L. 3332-2 du code du travail à l'exception des anciens salariés ayant quitté l'entreprise à la suite d'un départ à la retraite ou en préretraite » ;

2° À la seconde phrase du deuxième alinéa, après le mot : « débloquées », sont insérés les mots : « ou réaffectées » ;

3° Au dernier alinéa, après la référence : « article L. 233-16 du code de commerce », sont insérés les mots : « , l'identité des autres participants à l'opération » ;

4° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« L'identité des salariés impliqués dans l'opération est annexée audit accord avec le personnel une fois le fonds constitué. »

M. Jean-Luc Brault.  - Soutenons les fonds communs de placement d'entreprise (FCPE) de reprise en leur permettant de racheter des titres existants ou de souscrire à des titres nouveaux.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur.  - La commission souhaite entendre le Gouvernement à ce sujet.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Retrait, sinon avis défavorable. Vous proposez la fin de l'inamovibilité des participants. Je comprends votre souhait, mais le sujet des FCPE de reprise a été abordé il y a un an lors de l'accord national interprofessionnel. Il serait délicat d'y revenir sans concertation avec les partenaires sociaux.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur.  - Même avis.

L'amendement n°42 rectifié est retiré.

La proposition de loi, modifiée, est adoptée.

Prochaine séance aujourd'hui, mercredi 15 mai 2024, à 15 heures.

La séance est levée à minuit vingt.

Pour le Directeur des Comptes rendus du Sénat,

Rosalie Delpech

Chef de publication

Ordre du jour du mercredi 15 mai 2024

Séance publique

À 15 heures, à 16 h 30 et le soir

Présidence : M. Gérard Larcher, président M. Mathieu Darnaud, vice-président, Mme Sylvie Vermeillet, vice-présidente.

Secrétaires : Mme Sonia de La Provôté, M. Mickaël Vallet.

1. Questions d'actualité

2. Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, visant à réduire et à encadrer les frais bancaires sur succession (texte de la commission, n°576, 2023-2024)

3. Conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi améliorant l'efficacité des dispositifs de saisie et de confiscation des avoirs criminels (texte de la commission, n°561, 2023-2024)

4. Deuxième lecture du projet de loi, modifié par l'Assemblée nationale, ratifiant l'ordonnance n°2023-285 du 19 avril 2023 portant extension et adaptation à la Polynésie française, à la Nouvelle-Calédonie et aux îles Wallis et Futuna de diverses dispositions législatives relatives à la santé (texte de la commission, n°581, 2023-2024)

5. Deuxième lecture de la proposition de loi, modifiée par l'Assemblée nationale, visant la prise en charge par l'État de l'accompagnement humain des élèves en situation de handicap durant le temps de pause méridienne (texte de la commission, n°563, 2023-2024)