Erasmus de l'apprentissage (Procédure accélérée)
M. le président. - L'ordre du jour appelle les explications de vote et le vote sur la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, visant à faciliter la mobilité internationale des alternants, pour un « Erasmus de l'apprentissage ».
Ce texte est examiné selon la procédure de législation en commission prévue au chapitre XIV bis du Règlement du Sénat.
Mme Carole Grandjean, ministre déléguée chargée de l'enseignement et de la formation professionnels . - Ce texte est très attendu par les acteurs de l'apprentissage et par les jeunes alternants. Il offre à ces derniers la possibilité de s'enrichir de cultures et de compétences diverses, dans une Union européenne ouverte. À l'heure où les replis nationalistes emportent les espoirs de paix pour toute une génération, il offre la possibilité de développer les échanges, rendant concrète la promesse de mobilité européenne.
Nous avions déjà pris deux décisions fortes : les centres de formation d'apprentis (CFA) doivent désormais se doter d'un référent mobilité, pour accompagner les apprentis dans la constitution de leurs projets. Nous avons aussi développé les parcours de mobilité et renforcé les financements. L'an dernier, il y a eu 25 000 mobilités, contre 7 800 par an auparavant.
Nous devons aller plus loin. Le Président de la République a posé une ambition forte : que la moitié d'une classe d'âge ait passé au moins six mois à l'étranger avant ses 25 ans.
Des efforts sont faits en amont. Par exemple, nous professionnalisons le réseau, grâce aux référents mobilité. Nous travaillons avec Erasmus+ et l'association Euro App Mobility pour favoriser un réseau européen de l'apprentissage. Nous avons renouvelé notre convention avec l'association du ministre Jean Arthuis pour une plateforme européenne de l'apprentissage. Nous travaillons avec les opérateurs de compétences, interfaces privilégiées des entreprises, dans le cadre de conventions d'objectifs et de moyens. Cette proposition de loi s'inscrit donc dans ces multiples démarches pour lever les derniers freins à la mobilité internationale des apprentis.
L'article 1er favorise les mobilités de plus de quatre semaines. Une des causes de non-recours est la suspension du contrat de travail, qui prive le jeune de sa rémunération et de sa protection sociale. Des lourdeurs administratives s'y ajoutent. Ce manque de souplesse doit être corrigé, et cette proposition de loi y pourvoit.
L'article 2 sécurise le développement des partenariats. Le droit en vigueur fait obligation aux écoles étrangères de signer toutes les conventions individuelles, alors que des conventions-cadres existent. Dans ce dernier cas, le texte en dispense l'école étrangère.
Du point de vue de l'employeur, laisser partir son apprenti n'est pas anodin. Nous faisons en sorte qu'il puisse en retour accueillir un apprenti étranger. L'Union européenne est construite sur le principe de réciprocité. Nous levons donc la limite de 29 ans, car dans des pays comme l'Allemagne, cette limite n'existe pas : l'apprentissage n'y est pas réservé aux jeunes.
L'article 3 garantira la prise en charge par les opérateurs de compétences (Opco) des frais de sécurité sociale. C'est la correction d'une véritable inégalité pour les apprentis, qui renoncent à cause de coûts de protection sociale parfois très élevés à l'étranger. L'article permettra aussi d'oeuvrer par voie réglementaire pour la prise en charge des frais de transport, d'hébergement et de restauration à l'étranger. Enfin, il ratifie l'ordonnance relative à l'apprentissage transfrontalier, tout en oeuvrant pour de meilleures possibilités pour nos outre-mer en Amérique et en Afrique.
Le Gouvernement répondra avec diligence aux demandes de rapport incluses dans ce texte pragmatique, qu'il soutient, car il lève les freins identifiés par les acteurs. Je remercie les sénateurs, en particulier la rapporteure Patricia Demas. Ce texte technique est une preuve de l'attachement à notre Union européenne et à ses valeurs.
Cette proposition de loi naît de la conviction que les voyages forment la jeunesse, ses compétences et son ouverture d'esprit. À rebours des nationalismes et du repli sur soi, elle aide à former une jeunesse ouverte. Vous qui croyez en l'Europe et ses vertus pour nos jeunes, je sais pouvoir compter sur vous. (Applaudissements sur les travées du RDPI, du RDSE et du groupe UC ; Mme Frédérique Puissat applaudit également.)
Mme Patricia Demas, rapporteure de la commission des affaires sociales . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Élisabeth Doineau applaudit également.) Acquisition de compétences, découverte d'une nouvelle culture, apprentissage d'une langue étrangère : autant d'atouts pour une meilleure employabilité et un meilleur développement personnel. Or 17 % des étudiants bénéficient d'une mobilité internationale, contre seulement 2,1 % des alternants, dont le contrat, lorsqu'ils partent, est mis en veille. Pour les mobilités de moins de quatre semaines, il continue d'être exécuté si l'apprenti est en mise à disposition.
Chaque CFA nomme un référent, financé par les Opco. Les alternants sont aussi soutenus par des aides de l'Union européenne dans le cadre de Erasmus+ ou par les collectivités territoriales. Mais la mobilité des alternants n'a pas suivi la dynamique des contrats d'apprentissage, qui étaient 800 000 en 2022. La durée moyenne de séjour est de 41 jours, et la médiane de 18 jours.
La mobilité rencontre des obstacles structurels : coût et perturbation pour l'employeur, statut qui ne convient pas à toutes les situations, mise en veille du contrat qui reporte les responsabilités sur le CFA, obligations administratives complexes, coût pour les apprentis - en 2023, Erasmus+ n'a satisfait que 53 % des demandes -, soutien financier très hétérogène des Opco, manque d'information, absence de reconnaissance de la mobilité, ou encore barrières linguistiques et psychologiques.
Notre collègue député Sylvain Maillard a voulu y remédier par le biais de cette proposition de loi.
Elle crée un droit d'option à l'article 1er : la mise à disposition de l'alternant ne sera plus limitée à des mobilités à moins de quatre semaines. L'article 2 supprime l'obligation d'une convention avec l'organisme d'accueil, s'il existe une convention-cadre. L'article 3 oblige les Opco à s'acquitter des frais de protection sociale. Les apprentis venant en France pourront déroger à la limite d'âge. Le texte procède enfin à la ratification de l'ordonnance du 21 décembre 2022 relative à l'apprentissage transfrontalier.
La commission a adopté la proposition de loi sans modification. Pour insuffler une véritable dynamique, ce texte devrait être assorti de mesures complémentaires. Le financement des référents mobilités doit être conforté, et celui des Opco doit être plus compréhensible. La mobilité doit être promue, grâce à une sensibilisation des TPE et PME par les Opco, et reconnue dans les diplômes et certifications.
Cela nécessite une large mobilisation des acteurs publics. La proposition de loi y contribue en levant certains freins. La commission des affaires sociales vous invite donc à l'adopter. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur plusieurs travées du groupe UC et du RDSE)
M. Bernard Buis . - Cette proposition de loi pose le socle d'une grande ambition du Président de la République : que la moitié d'une classe d'âge ait passé au moins six mois à l'étranger avant ses 25 ans - c'est l'esprit d'Erasmus. Ce programme portant le nom d'un érudit néerlandais du XVIe siècle, humaniste voyageur, a fait ses preuves, mais il ne concerne qu'une partie de notre jeunesse.
Malgré son ouverture aux alternants, un rapport de l'Igas de décembre 2022 a présenté un constat alarmant d'Erasmus+ : 7 820 apprentis seulement ont effectué une mobilité entre 2018 et 2019, loin des 17 % d'étudiants. Nous devons donc lever des obstacles. Ainsi, le droit d'option entre la mise en veille du contrat et la mise à disposition de l'alternant ne sera plus limité aux séjours de moins de quatre semaines. L'article 2 permettra au CFA de conclure une convention de partenariat avec son homologue étranger.
Les voyages forment la jeunesse : le RDPI votera ce texte avec enthousiasme. (Applaudissements sur les travées du RDPI et du RDSE ; Mme Frédérique Puissat applaudit également.)
Mme Monique Lubin . - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Cette proposition de loi concerne toutes les alternances : aussi bien les CAP que les Bac+5. Elle encourage la mobilité dans le cadre d'Erasmus+. Elle fait converger les prises en charge financières et rend obligatoire la compensation des coûts de la protection sociale. Pour ce faire, elle lève des contraintes administratives.
Pragmatique, ce texte s'inscrit dans le développement de l'alternance en France, voulu par le Gouvernement, en faisant le choix de la libéralisation, illustrée par la loi Liberté de choisir son avenir professionnel. Nous insistions lors de son examen sur le fait que le développement de l'apprentissage ne devait pas se faire au détriment de la qualité de la formation.
Le bilan de la Cour des comptes, dans sa note de juillet 2023, est mitigé : la loi de 2018 incite à recourir à l'apprentissage et encourage l'usage du compte personnel de formation (CPF), mais elle ne pose aucune limite, ce qui crée des dépenses très dynamiques. Le dispositif devrait être orienté vers les moins qualifiés. Un rapport du Sénat pointe ainsi la soutenabilité d'un modèle qui engendre des créances sans limites pour l'opérateur.
Nous sommes préoccupés par la possible solitude des alternants, en cas de mise en veille du contrat. La solution de développer les mises à disposition est bénéfique, même si elle se comprend plutôt pour les grands groupes, qui ont des filiales à l'étranger.
Cette proposition de loi technique propose des solutions cohérentes. Nous espérons que la demande de rapport au Parlement sur les bourses et aides financières destinées aux apprentis, prévue à l'article 3, sera bien suivie d'effets. (Mme Caroline Grandjean acquiesce.) Nous voterons ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)
Mme Frédérique Puissat . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Élisabeth Doineau applaudit également.) Merci, madame la rapporteure, pour votre travail sur votre premier texte (Mme Patricia Demas apprécie) ; vous vous inscrivez dans la lignée de Jean Arthuis et d'Alain Milon...
M. Philippe Bas. - Très juste.
Mme Frédérique Puissat. - ... lequel est à l'origine d'un article additionnel incitant toutes les parties à profiter des opportunités offertes par Erasmus+, première pierre de l'édifice. Je remercie également Michel Forissier, alors sénateur du Rhône, d'avoir aménagé le dispositif dans la loi de 2018 - deuxième pierre de l'édifice.
Malgré l'augmentation du nombre d'apprentis bénéficiant d'Erasmus+, l'Igas note que cette mobilité est faible et de court terme en comparaison avec celle des étudiants de l'enseignement supérieur. Le nombre d'apprentis est ainsi passé de 320 000 en 2018 à plus de 800 000 en 2022.
Vos travaux, madame la rapporteure, lèveront des freins ; nous vous suivrons pour cette troisième pierre de l'édifice. (M. Philippe Bas applaudit.)
Nous faisons face à quelques difficultés : premièrement, l'équilibre financier de France Compétences, sur lequel nous avons fait des propositions lors de l'examen du PLF, qui n'ont pas été retenues ; deuxièmement, l'apprentissage dans la fonction publique territoriale ; troisièmement, la dette de l'Unédic, qui est liée aux frontaliers, ne doit pas se creuser davantage.
Pour être véritablement fiers de cette loi, il nous faut un éclaircissement sur ces trois points. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mmes Élisabeth Doineau et Véronique Guillotin applaudissent également.)
M. Pierre Médevielle . - (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe UC) Les voyages, c'est la découverte, l'inconnu. Nous connaissons tous un jeune qu'une mobilité Erasmus a fait grandir.
Ce programme a permis à de nombreux jeunes de gagner en autonomie. La loi de 2018 a été la première pierre pour ouvrir la mobilité aux alternants ; mais les freins restent forts, malgré le développement de l'apprentissage au cours du quinquennat, qui a largement contribué à la baisse du taux de chômage. Terminer ses études en ayant acquis une expérience professionnelle est une force.
Nous devons continuer à soutenir ce dispositif. Actuellement, le contrat est mis en veille durant la période de mobilité. Dans ce cas, l'employeur est libéré de toutes ses obligations, ce qui inquiète l'apprenti et son CFA - sauf pour les mobilités de moins de quatre semaines. Il existe également des freins financiers, car la prise en charge diffère entre opérateurs. Enfin, autre frein : la méconnaissance de cette possibilité de séjour à l'étranger.
Cette proposition de loi y remédie en supprimant la limite de quatre semaines pour les mises à disposition et la durée minimum de six mois pour effectuer une mobilité. Les CFA pourront souscrire des conventions de partenariat, ce qui va dans le bon sens. Le texte rend obligatoire la prise en charge par les Opco des cotisations sociales liées à la mobilité des apprentis. Sans doute serait-il nécessaire de procéder à une véritable harmonisation entre les Opco, mais ce texte est un premier pas.
L'apprentissage est une force, Erasmus est une chance. Il faut les concilier. Le groupe INDEP soutient pleinement l'esprit de la proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du RDPI et sur quelques travées du groupe Les Républicains)
Mme Élisabeth Doineau . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur plusieurs travées du groupe Les Républicains ; Mme Véronique Guillotin applaudit également.) Je me réjouis de voir inscrite cette proposition de loi à l'ordre du jour.
Jean Arthuis, combattant acharné en faveur de l'apprentissage et des idéaux européens, n'est pas étranger à ce texte, ni à ma présence à la tribune...
Je remercie la rapporteure Patricia Demas de sa rigueur et de sa sensibilité.
Lors de son discours à la Sorbonne en 2017, le Président de la République avait pour objectif que la moitié d'une classe d'âge ait effectué un séjour dans un pays européen. Or on compte 10 000 Erasmus+ pour 837 000 contrats d'apprentissage, et seulement 933 départs d'alternants selon le rapport de Sylvain Maillard : la marge à la progression est immense.
Ce texte lève des freins et apporte dynamisme, flexibilité et simplification.
Dynamisme : un séjour à l'étranger permet d'acquérir de nouvelles compétences, alors que 60 % des jeunes issus d'un lycée professionnel sont sans emploi six mois après leur sortie. La mobilité s'inscrit pleinement dans les prérogatives de l'Union européenne. Permettons à ces jeunes d'en profiter : l'Europe appartient à tous. Le référent mobilité est pertinent.
Flexibilité, ensuite : facilitons le séjour des apprentis à l'étranger. La proposition de loi crée un droit d'option : la mise à disposition permettrait à l'entreprise de conserver ses responsabilités vis-à-vis des jeunes, tout en les sécurisant, ce qui favorise le sentiment d'un destin commun européen.
Simplification, enfin : celle-ci ne signifie pas déconvention. En effet, la proposition de loi supprime l'obligation d'une convention individuelle de mobilité si une convention de partenariat existe entre le CFA et l'organisme étranger.
Ce texte fait de la démocratisation de la mobilité une priorité. C'est une véritable avancée politique. Saisissons cette chance : le groupe UC le votera sans réserve. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, Les Républicains, du RDSE et du RDPI)
Mme Anne Souyris . - (Applaudissements sur les travées du GEST) Je salue cette proposition de loi. Le programme Erasmus a profité à 13 millions de jeunes. Mais il reste inégalitaire : les apprentis représentent 28,5 % des étudiants et 10 % des bénéficiaires d'Erasmus. Ce texte lève des obstacles administratifs, ce qui est une bonne chose. Nous croyons en l'Europe : le GEST le votera.
Il faut toutefois un soutien financier renforcé aux étudiants. Tel était le sens de notre proposition de loi visant à créer une allocation autonomie universelle d'études, qui, malheureusement, n'a pas été adoptée. Toutefois, elle a ouvert le débat : nous devons travailler sur le sujet au Sénat. Mais le Gouvernement doit faire de même, compte tenu du peu de réponses apportées par Sylvie Retailleau.
Les séjours longs à l'étranger s'adressent surtout aux plus favorisés. Je salue le rapport demandé à l'article 3 par le groupe écologiste à l'Assemblée nationale : nous y verrons plus clair sur les aides financières réservées aux apprentis. Il faut augmenter les bourses de mobilité, sans quoi nous laisserons les trois quarts des étudiants à nos frontières. Qui sait, peut-être le Gouvernement utilisera-t-il à ces fins les 160 millions d'euros prévus pour le service national universel ? Ce serait un usage plus raisonnable des deniers publics...
Le programme Erasmus est une chance : tous les jeunes doivent en bénéficier, quelle que soit leur condition sociale. Comme le dit Mme Doineau, la marge de progrès est immense. Cette année à l'étranger serait salutaire, alors que nous vivons un moment de repli. (Applaudissements sur les travées du GEST ; Mme Élisabeth Doineau applaudit également.)
Mme Silvana Silvani . - Ce projet est très positif, car il est une alternative à la logique de marché de l'Union européenne : j'ai nommé Erasmus. Cet outil d'émancipation et de brassage culturel est l'antithèse des discussions en cours sur le projet de loi Immigration...
Cette proposition de loi me met mal à l'aise : selon une députée du même groupe que son auteur, l'exécutif offre un plateau d'argent à l'extrême droite.
Le communiqué de France universités est clair : une « caution retour » condamnerait les étudiants hors Union européenne à se détourner de la France. Pourtant, ils sont indispensables à notre industrie. Ce « en même temps », combiné à la facilitation du séjour à l'étranger des apprentis, est profondément contradictoire.
Vous démantelez l'enseignement professionnel public pour répondre aux demandes du patronat. Avec la réforme Attal, des jeunes de 15 ans sont formés aux métiers les plus pénibles, à 2,80 euros par heure.
Certes, ce texte a le mérite d'améliorer l'accès à Erasmus, mais nous ne sommes pas dupes : la réforme de la voie professionnelle, qui cautionne la ségrégation sociale, avec des exécutants mal payés d'une part, et les métiers requérant des études supérieures et moins accessibles, d'autre part.
Je suis réservée sur le tout apprentissage, au coût abyssal : 5,9 milliards pour France Compétences en 2022. Ce système est peu favorable aux jeunes et nombre de jeunes sortent sans diplôme. Comme le souligne Gilles Moreau, l'apprentissage n'accueille que 30 % de filles et peu de jeunes issus de l'immigration. C'est pourquoi nous nous abstiendrons.
Nous sommes bien sûr favorables à la mobilité des jeunes en Europe, mais aussi ailleurs. Cela dit, nous préférerions un renforcement de la voie professionnelle, notamment de l'enseignement des langues, pertinent pour un déplacement à l'étranger, et privilégierions une aide à la mobilité au mécanisme complexe qui nous est proposé. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K)
Mme Véronique Guillotin . - (Applaudissements sur les travées du RDSE ; Mme Élisabeth Doineau applaudit également.) Infatigable défenseur de la mobilité des apprentis en Europe, Jean Arthuis dit que les apprentis doivent aussi aller à la rencontre du monde. Créé en 1987, Erasmus est l'un des symboles de la construction européenne, avec près de 600 000 départs chaque année.
Mais les apprentis, qui y ont théoriquement droit depuis 1995, n'en bénéficient que trop peu, les législations de l'apprentissage différant selon les pays. Les freins sont aussi financiers - au-delà de quatre semaines, l'apprenti perd son salaire -, académiques et psychologiques, avec la peur de mal maîtriser la langue.
La proposition de loi lève certains obstacles. Avec une immersion de plusieurs mois, les apprentis gagnent en confiance. Comme le dit Thierry Marx, la mobilité offre une clef sur le monde. Elle permet d'acquérir des compétences transversales, des savoir-faire et des savoir-être.
Jadis, l'apprentissage était considéré comme une voie de garage. Il pâtit encore d'une mauvaise image, même si les choses s'améliorent. Donner à ces jeunes les moyens de partir leur apporte une valeur ajoutée indéniable. Selon le rapport de l'Igas, les pertes de salaires limitent la mobilité. Cela n'a pas lieu en Allemagne ou au Danemark.
Le texte assouplit l'obligation d'une convention individuelle de mobilité en cas d'existence préalable d'une convention de partenariat. Il permet aux apprentis de bénéficier d'une couverture sociale minimale. La limite d'âge de 29 ans, pour les apprentis de l'Union européenne, est levée.
Peu d'apprentis luxembourgeois effectuent une mobilité en France, notamment dans la zone frontalière. Je regrette que le flux aille dans un seul sens, de la France vers le Luxembourg. Or nos entreprises auraient beaucoup à apporter aux apprentis luxembourgeois - je pense à Renault, à Batilly, et à Le Bras Frères, qui restaure le toit de Notre-Dame.
Ce texte est une étape importante, mais il faudra poursuivre les efforts, notamment sur les financements ou sur la pérennisation des référents mobilité. Le RDSE le votera. (Applaudissements sur les travées du RDSE, du RDPI et du groupe UC ; Mme Anne-Marie Nédélec applaudit également.)
La proposition de loi est définitivement adoptée.
(Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. - Je remercie Patricia Demas pour la qualité de son travail.
Il revient au Gouvernement et aux organisations professionnelles de faire vivre cette proposition de loi. Il faut généraliser les référents mobilité. Les jeunes apprentis doivent être informés de cette chance. Rendez-vous dans un an ou deux pour que la commission fasse le bilan de l'application de cette loi. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du RDPI, ainsi que sur des travées du groupe UC)
M. Michel Savin. - Très bien !
La séance est suspendue quelques instants.