Questions orales (Suite)
Taxe communale sur les services funéraires
Mme Nadia Sollogoub . - La taxe communale sur les services funéraires a été supprimée par la loi de finances pour 2021. Pour la commune de Guérigny dans la Nièvre, c'est 4 000 euros de recettes en moins. Seules 400 communes prélevaient cette taxe. Le Sénat s'était opposé à sa suppression, en vain : elle a été supprimée au motif de son « incidence fiscale sur les proches des défunts », sans compensation alors que la Cour des comptes avait recommandé une augmentation du prix des concessions funéraires. Après la réforme de la taxe d'habitation, les budgets communaux sont de nouveau fragilisés. Le Gouvernement entend-il compenser cette perte de recettes pour les collectivités territoriales ?
M. Roland Lescure, ministre délégué chargé de l'industrie . - Non, ce n'est pas prévu. Cette taxe a été abrogée, suivant les recommandations de la Cour des comptes sur les taxes à faible rendement. Son produit représentait 0,1 % des recettes de fonctionnement des bénéficiaires, d'où l'absence de compensation. Les communes ont bénéficié de la revalorisation des bases de taxe foncière et des abondements de DGF - 320 millions d'euros en 2023 et en 2024.
Mme Nadia Sollogoub. - J'ai les conclusions de la Cour des comptes sous les yeux : le prix des concessions aurait pu augmenter. Les familles n'ont pas senti les effets de la suppression de la taxe, car le prix des prestations funéraires a augmenté deux fois plus vite que l'inflation. Mais pour les quelques communes qui la percevaient, c'est une grosse perte de ressources.
Fonds vert et dotations d'investissement
M. Laurent Somon . - En 2023, le fonds vert était annoncé à 2 milliards d'euros en autorisations d'engagement et 500 millions en crédits de paiement. En 2024, ce sera respectivement 2,5 milliards d'euros et 1,1 milliard, mais sans que cela figure au tableau récapitulatif des transferts financiers de l'État ou dans le rapport sur la situation des finances publiques locales. Publierez-vous la répartition prévisionnelle de ces crédits ? Des projets du fonds vert pourront-ils à nouveau être versés sur la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR), la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL) ou la dotation de soutien à l'investissement des départements (DSID), et pouvez-vous nous donner un bilan de ces transferts pour l'année 2023 ? Le verdissement de ces dotations représentera 485 millions d'euros en 2024 et la proximité de ces financements avec ceux prévus par le fonds vert est source de confusion. Cette somme doit-elle participer au financement des politiques du fonds d'accélération de la transition écologique dans les territoires en 2024 et à quelle hauteur ? Les collectivités et les membres des commissions DETR ont besoin d'une information précise et exhaustive sur les fonds de dotation d'investissement qui échappent à leurs décisions d'attribution.
M. Roland Lescure, ministre délégué chargé de l'industrie . - Les crédits de paiement utilisés pour le fonds vert ne proviennent pas du verdissement de la DETR, de la DSIL ou de la DSID. Ils ne relèvent d'ailleurs pas du même programme budgétaire. Les dotations d'investissement inscrites au programme 119 sont maintenues à près de 2 milliards d'euros en autorisation d'engagement dans le projet de loi de finances pour 2024, dont le Gouvernement a décidé de renforcer le verdissement : sur la base de la cotation du budget vert de l'État, les projets d'investissement « verts » devront représenter 20 % de la DETR, 30 % de la DSIL, 25 % de la DSID. Ces crédits ne sont pas fléchés vers le fonds vert et demeurent en intégralité portés par les dotations de soutien à l'investissement local au sein de cette mission.
Guichet unique pour la nouvelle année
M. Jean-Baptiste Blanc . - J moins douze : le compte à rebours est lancé. Dans douze jours, les entrepreneurs ne pourront plus faire leurs déclarations via le portail Infogreffe ou sous format papier - procédure de secours demandée dès les premiers dysfonctionnements par la présidente de l'ordre des experts-comptables.
Le guichet unique présenté comme le fer de lance de la simplification administrative par la loi Pacte a connu des débuts tumultueux depuis son lancement le 1er janvier 2023, alimentant les préoccupations légitimes des entrepreneurs, des experts-comptables et des greffiers.
À l'aube de la nouvelle année, formons des voeux, monsieur le ministre : souhaitons que les bugs soient rapidement corrigés, que tous les entrepreneurs du Vaucluse et d'ailleurs puissent aborder cette nouvelle étape de la transition numérique avec confiance, et l'année 2024 soit placée sous le signe de la simplification administrative - la vraie.
Il vous reste donc douze jours pour répondre aux inquiétudes des entrepreneurs et des greffiers, soucieux de maintenir l'assistance offerte par eux pour compenser les failles du guichet unique jusqu'à son entière mise en oeuvre en 2024.
M. Roland Lescure, ministre délégué chargé de l'industrie . - Votre question me permet de compléter la réponse que j'ai faite à la sénatrice Delattre. Les choses s'améliorent : on compte désormais 12 000 déclarations en moyenne par jour - 20 000 à terme -, 2 millions sur l'année. Nous avons toutes les raisons d'être confiants pour 2024. Avec la loi Pacte, les réseaux consulaires, déchargés de la collecte des dossiers, sont devenus un acteur majeur de l'assistance. Leur accès au dossier du déclarant peut parfois s'avérer utile : des solutions de partage d'écran sont disponibles.
M. Jean-Baptiste Blanc. - Je vous invite à prendre au sérieux ce sujet : on me parle de milliers de cas de burn-out chez les greffiers et de milliers d'entreprises qui n'ont pas pu se faire inscrire.
Glacier de la Girose
M. Guillaume Gontard . - Monsieur le ministre, même si vous êtes du plat pays, vous savez que les Alpes se réchauffent deux fois plus vite que le reste de l'hémisphère nord. Les glaciers, véritables biens communs, le subissent de plein fouet avec de nombreuses conséquences sur le cycle de l'eau, le climat et les populations en aval, ainsi que l'ont rappelé plus de cent scientifiques et personnalités dans un appel ayant recueilli 30 000 signatures en quelques jours. Le Président de la République a annoncé dans le discours de clôture du One Planet Polar Summit vouloir « lancer la concertation qui nous permettra d'avoir la totalité de nos glaciers en protection forte. » L'un d'entre eux a besoin urgemment d'une protection forte : celui de la Girose, dans les Hautes-Alpes, dernier glacier français accessible à tous, où l'on projette pourtant de prolonger un téléphérique pour pouvoir skier sur un glacier dont les jours sont comptés - ce qui implique de construire un pylône dessus, donc de détruire son équilibre fragile. Ne devrait-on pas faire de la protection forte du glacier de la Girose la première application de la volonté présidentielle ?
M. Patrice Vergriete, ministre délégué chargé du logement . - Quoique du plat pays, je suis d'accord avec vous : les glaciers, qui représentent environ 10 % de la surface des terres émergées, jouent un rôle majeur dans la séquestration du carbone, le cycle de l'eau ou les habitats du vivant. Or ils disparaissent plus rapidement que prévu. Le Président de la République a souhaité la mise sous protection forte d'ici 2030 des glaciers et écosystèmes postglaciaires, dont près de 60 % sont en protection forte en métropole, contre 100 % outre-mer. Pour atteindre cet objectif, le Gouvernement lancera une initiative copilotée par les préfets de région et les présidents de région, afin de coconstruire la protection des glaciers avec l'ensemble des citoyens et des acteurs des territoires. Ce travail sera prochainement lancé sur le glacier de la Girose afin de faire évoluer le projet pour en minimiser l'impact, voire de proposer une alternative durable.
M. Guillaume Gontard. - Il y a urgence : les pelles mécaniques sont déjà là.
Installations classées pour la protection de l'environnement
M. Michel Canévet . - La France est un grand pays agricole et nous nous réjouissons que le ministère de l'agriculture soit aussi celui de la souveraineté alimentaire. Mais le régime des installations classées confronte beaucoup d'éleveurs à des procédures administratives extrêmement lourdes : à croire que les exploitations agricoles sont des installations Seveso ! Cela génère bien entendu des coûts importants : entre 3 000 et 8 000 euros pour une déclaration et entre 15 000 et 30 000 euros une demande d'autorisation, sans garantie de résultat, tant les contentieux sont nombreux.
Pour assurer effectivement notre souveraineté alimentaire, nous devons accompagner les professionnels dans leurs projets : comment le Gouvernement compte-t-il faciliter la création de nouveaux outils de production et simplifier les procédures relatives aux installations classées ?
M. Patrice Vergriete, ministre délégué chargé du logement . - La réglementation des installations classées agricoles est constante depuis dix ans et transpose strictement le droit de l'Union européenne. Le préfet décide au cas par cas si la demande d'enregistrement d'une installation classée doit faire l'objet d'une évaluation environnementale ou non, selon la sensibilité environnementale du milieu et le cumul des incidences du projet avec d'autres projets d'installation. Des jugements récents annulant des autorisations d'extension d'élevage éclairent la lecture de cette réglementation, notamment en Bretagne, région marquée par la pollution aux nitrates et une concentration importante d'élevage. Les services du ministère ont donc engagé des travaux avec le corps préfectoral et la profession agricole, afin d'identifier les mises à jour pertinentes à apporter aux pratiques existantes.
M. Michel Canévet. - Attention à ce que la législation européenne ne vienne encore réduire le seuil du régime de l'autorisation. La moitié de la volaille consommée en France est importée ! Ce n'est pas acceptable. Il faut de nouvelles installations, avec des règles plus souples et moins de contentieux.
Intercommunalités et aide à la pierre
Mme Agnès Canayer . - Alors que le nombre de constructions de logements neufs n'est pas à la hauteur des besoins, l'aide à la pierre est une solution pour soutenir les programmes immobiliers des bailleurs sociaux. Les intercommunalités qui ont un plan local d'habitat peuvent demander une délégation de compétences dans ce domaine, comme l'ont fait, en Seine-Maritime, la communauté urbaine du Havre, la métropole rouennaise et les communautés d'agglomération de Dieppe et de Caux-Seine. Mais le recrutement, l'instruction des dossiers, le coût du suivi et des assurances ne sont pas compensés. Face à la crise du logement, le Gouvernement compte-t-il aider les collectivités territoriales dans la gestion de ces dossiers ?
M. Patrice Vergriete, ministre délégué chargé du logement . - Dans le cadre des délégations des aides à la pierre, les collectivités se voient attribuer une dotation destinée au financement du parc locatif social et une dotation de l'Agence nationale de l'habitat (Anah) pour les aides à la rénovation énergétique. Au-delà des dotations du Fonds national des aides à la pierre (Fnap), les opérations de logement social bénéficient d'un taux réduit de TVA et d'exonérations de taxes foncières sur les propriétés bâties. D'autres mesures ont été prises : maintien du taux du livret A à 3 % ; prêts à taux bonifié à hauteur de 1 milliard d'euros ; enveloppe des prêts participatifs de la Caisse des dépôts passée de 250 millions d'euros à 400 millions. En outre, la réhabilitation énergétique du parc locatif social bénéficiera de 1,2 milliard d'euros de subventions de l'État sur trois ans, en sus des éco-prêts de la Caisse des dépôts.
La communauté urbaine du Havre-Seine-Métropole a atteint ses objectifs au cours de ces trois dernières années, bonne dynamique portée par un nombre conséquent de prêts locatifs sociaux (PLS). Le projet de loi Logement, qui sera présenté en Conseil des ministres au printemps, devrait aller plus loin dans la décentralisation de la politique du logement.
Mme Agnès Canayer. - Merci pour vos compliments sur la politique du logement au Havre. Mais attention : pour Le Havre-Seine-Métropole, la gestion des aides à la pierre représente six ETP, soit environ 200 000 euros par an. Une réflexion globale sera la bienvenue.
Financement des logements sociaux
M. Laurent Burgoa . - Dans le Gard, des communes ont délivré à des promoteurs des permis de construire pour des programmes de logements comportant un quota de logements sociaux. En raison de la conjoncture économique, les organismes finançant les logements sociaux se sont désengagés ; les promoteurs ont dû se tourner vers des financements classiques pour réaliser ou terminer leurs programmes. De ce fait, les logements ont été acquis principalement par des primo-accédants sous le régime des prêts immobiliers classiques, évinçant les candidats aux logements sociaux.
Les communes refusent alors les demandes, illégales, de permis de construire modificatifs portant suppression des programmes de logements sociaux, et sont menacées de procès par certains promoteurs. Elles sont surtout en difficulté pour remplir leur quota de logements sociaux.
Quelles solutions le Gouvernement prévoit-il pour régler cette situation qui pénalise les communes concernées, les promoteurs et enfin la population en attente de logement social ?
M. Patrice Vergriete, ministre délégué chargé du logement . - Le Gouvernement a pris des mesures fortes pour éviter les désengagements en augmentant la capacité d'investissement des bailleurs sociaux, dans le cadre d'un document d'engagement signé en septembre dernier avec le mouvement HLM, qui prévoit 650 millions d'euros de bonifications d'intérêt pour 8 milliards d'euros de prêts pour le financement des logements sociaux, qui s'ajoutent au maintien du taux du livret A.
Par ailleurs, nous avons voulu préserver la capacité des bailleurs sociaux à orienter leurs investissements sur l'offre nouvelle, en prévoyant 1,2 milliard de subventions sur trois ans pour rénover près de 400 000 logements sociaux.
Les promoteurs doivent respecter les servitudes de mixité sociale inscrites dans la loi et les documents d'urbanisme, et les communes sont tenues de refuser les permis modificatifs portant atteinte à ces exigences. Pour respecter ces servitudes, les promoteurs peuvent se tourner vers d'autres opérateurs, notamment ceux engagés dans des plans d'investissement en logements sociaux par achats de programme en vente en l'état futur d'achèvement (VEFA).
Enfin, les communes déficitaires en logements sociaux voient les pénalités financières minorées à hauteur des dépenses engagées pour le parc social. Ce n'est pas une amende, mais une contribution. (M. Laurent Burgoa en doute.) Il en va ainsi de toutes les subventions et moins-values permettant aux maîtres d'ouvrage d'équilibrer leurs opérations de logements sociaux. En plus d'alléger les sanctions, ces initiatives constituent un levier communal efficace pour garantir la réalisation effective des opérations tout en facilitant l'atteinte d'un équilibre économique.
Pour les reliquats du Fonds national des aides à la pierre (FNAP) de 2023, nous allons au-delà des actions déjà prévues pour atteindre l'équilibre de certaines opérations de promotion.
M. Laurent Burgoa. - Je prends acte de votre réponse, mais les élus attendent une loi de programmation pour une vraie politique du logement. Nous avions l'espoir que vous, ex-maire de Dunkerque, qui maîtrisez parfaitement le sujet, ayez une vision. En parlant de contribution et non d'une amende, vous allez décevoir beaucoup de maires.
Danger des munitions immergées
Mme Annick Billon . - Selon une étude indépendante, le littoral français compte 100 zones de munitions conventionnelles et chimiques, 18 décharges d'explosifs immergés, 59 zones de dépôt, 29 épaves contenant des munitions, pour la plupart issues de largages durant les deux conflits mondiaux, mais également de stockages opérés jusqu'au début des années 2000. Les tests révèlent des taux inédits de TNT et de ses dérivés nocifs.
En 2020, le ministre a répondu que faute d'études scientifiques précises, en raison de risques difficiles à évaluer et d'un état des sols moins dégradé que prévu, aucune recommandation concrète n'avait été prise. En d'autres termes, ce n'est pas une priorité.
Nous avons la preuve que c'est une menace écologique avec des conséquences humaines, environnementales, économiques et sanitaires. Quelles actions le Gouvernement va-t-il rapidement décider pour débarrasser les fonds marins de ces bombes environnementales à retardement ?
M. Patrice Vergriete, ministre délégué chargé du logement . - Le littoral dunkerquois est particulièrement concerné par ce sujet. L'État a engagé depuis plusieurs années des travaux interministériels pour établir une cartographie précise de ces zones et définir la nature de ces munitions. Il recueille aussi les informations scientifiques fiables sur l'évolution de ces munitions en mer, y compris auprès d'autres pays concernés. La modélisation du vieillissement des munitions est combinée avec des observations in situ. Une fois les zones à risque identifiées, nous surveillons l'environnement pour détecter des indices de pollution. L'État s'intéresse à toute étude pour ensuite adapter ses dispositifs de protection.
Mme Annick Billon. - Ma question datait de 2020. Quatre sites ont été identifiés en Vendée. Certains cabinets indépendants ont déjà réalisé des cartographies, gagnez du temps en vous inspirant de ces travaux. Il y a urgence de s'emparer du sujet, car ces munitions sont dangereuses.
Application de la loi Biodiversité du 8 août 2016
M. Michaël Weber . - Depuis 2016, année de la loi Biodiversité, je préside la fédération des parcs naturels régionaux de France qui représentent 17 % du territoire français engagé pour la préservation des patrimoines naturels et culturels.
Pourquoi de nombreux projets, financés par l'État et l'Europe via le programme Life, sont-ils bloqués depuis des années, en contradiction avec les lois et engagements de la France ?
Ainsi, l'autorisation de défrichement sans compensation pour des projets écologiques, prévue par la loi de 2016, n'a pas reçu de décret d'application. Les milieux ouverts, tels que les landes, les tourbières et les prairies arbustives ont une valeur écologique exceptionnelle. C'est peut-être contre-intuitif, mais le reboisement de ces espaces les condamne à s'appauvrir. Pour maintenir ces espaces ouverts et sauvegarder la biodiversité de ces milieux, la dérogation à la compensation est indispensable. Comment expliquer l'absence de décret d'application, sept ans après le vote de la loi ? Je suis convaincu que cette paralysie administrative a pour origine une obstruction politique. Une rumeur affirme que le ministère de l'agriculture bloquerait sciemment la publication du décret. De fait, les directions régionales de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt (Draaf) refusent souvent d'appliquer la loi Biodiversité faute de décret. Quelles sont les raisons d'une telle inertie administrative qui prive d'efficacité un texte salvateur pour nos écosystèmes ?
M. Patrice Vergriete, ministre délégué chargé du logement . - La mosaïque paysagère de nos espaces naturels est une composante de la biodiversité. Rouvrir des espaces anciennement boisés offre des services écosystémiques importants et participe à la restauration des écosystèmes, d'où les dispositions de la loi Biodiversité pour articuler défrichement et protection des forêts menacées par le changement climatique. La loi facilite le défrichement, paradoxe apparent ayant nécessité de longues négociations pour élaborer un projet de décret, qui sera soumis au Conseil d'État début 2024 - je fais taire les rumeurs ! Il interviendra dans un cadre renouvelé pour la gestion forestière : modification des seuils de gestion durable, renouvellement des schémas régionaux de gestion sylvicole, plan ambitieux de renouvellement forestier. Il s'inscrira dans les outils de la stratégie nationale pour la biodiversité afin de restaurer des écosystèmes, en particulier les zones humides.
M. Michaël Weber. - Je me réjouis de cette annonce. Nous serons très attentifs à la rédaction de ce décret, fort attendu.
Assurance des communes
Mme Céline Brulin . - Une à une, les communes voient leurs contrats d'assurance résiliés ou renchéris, avec des franchises hors de prix. Parfois, elles n'ont plus de réponse à leurs appels d'offres, et deux compagnies sont en quasi-monopole.
En Seine-Maritime, Maromme, Saint-Étienne-du-Rouvray et Le Petit-Quevilly sont touchés. Bierville, 300 habitants, a dû batailler pour obtenir un nouveau contrat, en hausse de 50 %. Les compagnies se justifient par des taux de sinistralité trop élevés en raison des émeutes ou du changement climatique, mais les collectivités ne représentent que 1 à 2 % de leur chiffre d'affaires. Certaines communes doivent s'autoassurer, alors que leurs obligations légales assurantielles se sont accrues.
Il faut protéger les communes des résiliations brutales, encadrer les tarifs, veiller à une prise en compte élargie des sinistres entrant dans le cadre des catastrophes naturelles et réfléchir à l'assurabilité des collectivités qui assurent un service public et aménagent le territoire au bénéfice de tous. Une lourde responsabilité pèse sur les épaules des élus locaux, nous ne pouvons pas les laisser seuls.
M. Patrice Vergriete, ministre délégué chargé du logement . - Je partage votre constat. Cette situation résulte de l'augmentation de l'intensité et de la fréquence des événements climatiques en France métropolitaine et dans les outre-mer. Elle se traduit par une hausse importante et durable des coûts d'indemnisation, poussant des assureurs à se retirer du marché des collectivités. Fin septembre, le Gouvernement a conclu un accord avec les assureurs pour généraliser la médiation de l'assurance comme médiateur conventionnel pour les litiges portant sur les contrats des collectivités.
En mai, nous avons lancé une mission sur l'assurabilité des risques climatiques, y compris pour les collectivités, qui devrait rendre ses recommandations au second trimestre 2024.
Mme Céline Brulin. - Je ne doute pas que ses préconisations seront intéressantes, mais les compagnies d'assurances ont un certain nombre d'exigences. L'État devrait se faire entendre pour que le système soit moins injuste.
Éligibilité des travaux dans les gîtes communaux au FCTVA
M. Guillaume Chevrollier . - La loi de finances pour 2021 a instauré l'automatisation du calcul du fonds de compensation pour la TVA (FCTVA), qui s'opère désormais à partir des imputations comptables des dépenses des collectivités locales. Cela a réduit sensiblement les délais pour bénéficier du dispositif, mais exclut certaines dépenses auparavant éligibles. En Mayenne, Saint-Pierre-sur-Erve n'a pas pu disposer du FCTVA pour un projet de travaux dans son gîte. Mon amendement au PLF 2024 pour revenir sur cette exception n'a pas été retenu.
Or le FCTVA est essentiel au tourisme et au patrimoine communal. Les gîtes communaux redynamisent les centres-bourgs et les villages. Le Gouvernement entend-il revenir sur la liste des exceptions visées à l'article L. 1615-1 du code général des collectivités territoriales, en y ajoutant ces dépenses ? Sinon, comment soutiendrez-vous les communes rurales ?
M. Patrice Vergriete, ministre délégué chargé du logement . - Le régime des dépenses d'aménagement des gîtes ruraux avant le 1er janvier 2021 était spécifique. Sous réserve que les collectivités ne puissent déduire la TVA par la voie fiscale, elles pouvaient bénéficier du FCTVA pour leurs dépenses d'investissement, à condition que les gîtes ne soient pas loués plus de six mois par an. Avec l'automatisation du FCTVA, une dépense y est éligible lorsqu'elle est régulièrement enregistrée sur un compte éligible, dont la liste est fixée dans l'arrêté du 30 décembre 2020, sous réserve qu'elle ne soit pas assujettie à la TVA.
Ainsi, les dépenses relatives à la construction ou l'aménagement des gîtes ruraux doivent être enregistrées sur le compte 2 132 « Immeubles de rapport », qui n'a pas été retenu dans l'assiette d'éligibilité au FCTVA. Néanmoins, lorsque ces dépenses sont enregistrées sur le compte 2 313 « Constructions », les dépenses pourront ouvrir au bénéfice du FCTVA dans la mesure où ce compte n'est pas subdivisé entre bâtiments publics et immeubles de rapport.
M. Guillaume Chevrollier. - Merci pour ces précisions techniques. Nous avons besoin de soutien financier. Le FCTVA est un dispositif maîtrisé par les élus. Il faut l'adapter, le simplifier et stabiliser les dispositifs pour qu'ils soient mieux utilisés par nos élus.
Tarifs de l'eau
M. Hervé Reynaud . - Face aux sécheresses à répétition, le schéma directeur d'eau potable de Loire Forez agglomération a permis de mettre en oeuvre les travaux les plus urgents dès 2023, afin de sécuriser la distribution d'eau. Mais les agriculteurs qui ne bénéficient pas de l'eau du canal du Forez restent très tributaires du réseau public d'eau potable - idem pour de nombreux établissements médico-sociaux.
Or l'agence de l'eau Loire-Bretagne va conditionner les subventions à une progressivité des tarifs - l'objectif est louable. Ainsi, la dégressivité appliquée dans les communes de montagne ne peut être maintenue par Loire Forez agglomération, au risque de perdre ces subventions, qui sont vitales.
Les prix vont donc augmenter fortement pour tous les usagers. Les forages privés vont se généraliser. Il faut des dispositifs appropriés. Les agriculteurs voient leurs activités menacées, les collectivités seront pénalisées.
M. Patrice Vergriete, ministre délégué chargé du logement . - Le Plan Eau a un objectif de sobriété - moins 10 % de prélèvements d'ici à 2030. Il faut donc une mobilisation de l'ensemble des usagers, y compris des agriculteurs. L'agence Loire-Bretagne a mis en place des accords de résilience, déclinaison territoriale du plan Eau. Certaines collectivités sont accompagnées ; en contrepartie, les contrats reposent sur des engagements de transferts de compétences d'ici à 2026, de fin des tarifs dégressifs et d'actions d'accompagnement des usagers.
Loire Forez exerce la compétence eau potable depuis 2020 et a mis en place une convergence des prix sans dégressivité à l'horizon de 2026. Ainsi, l'accord de résilience ne mentionne pas un engagement supplémentaire en matière de tarification. La convergence sans dégressivité est une décision antérieure.
L'accord porte sur divers travaux de sécurisation, d'interconnexions et de protection des captages, pour 5,438 millions d'euros, avec 2,924 millions d'euros d'aides de l'agence.
M. Hervé Reynaud. - Tant d'injonctions contradictoires, qui pénalisent des démarches vertueuses !
Collège rural de Corlay
M. Ronan Dantec . - En mars dernier, la Première ministre a affirmé la volonté du Gouvernement de généraliser les territoires éducatifs ruraux (TER). La carte scalaire est un enjeu vital pour nos territoires. Elle doit assurer à tous un équitable accès à l'éducation.
À Corlay, situé dans une zone de revitalisation rurale, la fermeture du collège public Pier An Dall, décidée hier par le conseil départemental, entraîne une très forte opposition. Prise sans concertation, cette décision est injustifiée : le coût d'un nouveau collège sera très important ; le collège de Corlay a de bons résultats, remarquables étant donné la sociologie du territoire ; enfin, les effectifs sont en hausse, et continueront de croître. Rien ne justifie cette décision.
L'État doit encore confirmer le vote du conseil départemental, le préfet annonçant son arrêté en mars. Soutenez un moratoire sur la fermeture du collège, et inscrivez-le dans le réseau des TER !
M. Patrice Vergriete, ministre délégué chargé du logement . - En matière d'enseignement du second degré, le conseil départemental arrête la localisation des établissements et leurs capacités d'accueil, après avis du conseil départemental de l'éducation nationale. Il a la charge des collèges, il en assure la construction et l'entretien. Le conseil départemental des Côtes-d'Armor est donc compétent pour décider d'une fermeture.
Le collège de Corlay accueille environ 70 collégiens, avec un maximum de 80 en 2020. Dans les collèges ruraux du département, le nombre moyen d'élèves par division est de 22,8, contre 24 au niveau national en milieu rural, et 25 pour l'ensemble des collèges.
Les services de l'éducation nationale ont bien pris en compte les spécificités du milieu rural des Côtes-d'Armor.
La chambre régionale des comptes préconise de fermer un ou deux collèges proches, à Corlay ou à Saint-Nicolas-du-Pélem, distants de huit kilomètres. Fragilité des effectifs, manque d'émulation, état du bâti, autant de raisons qui expliquent cette réorientation des élèves vers d'autres établissements.
Le conseil départemental a choisi de maintenir le collège de Saint-Nicolas-du-Pélem, où la reconstruction respectera le zéro artificialisation nette (ZAN).
Élections dans les communes de moins de 1 000 habitants
M. Bruno Belin . - On parle souvent de modernisation de la vie publique et politique. À 27 mois des prochaines élections municipales, il faut avancer.
Le panachage pour les communes de moins de 1 000 habitants est archaïque - il remonte à la IIIe République - et a des conséquences délétères. Avec un scrutin de liste, nous pourrions faire progresser la parité dans les conseils municipaux et les conseils communautaires.
Nous pourrions aussi diminuer le nombre de conseillers dans les petites communes rurales, face à la crise des vocations à venir en 2026 - voyez, en ce moment de Sainte-Barbe, nos difficultés à recruter des pompiers volontaires. Sans doute faudrait-il revaloriser les indemnités de fonction ; l'État doit aider, les budgets locaux sont à sec.
En bref : moderniser, oui, et statut de l'élu - quand ? Je souhaite avoir ce débat dans les mois à venir.
Mme Sabrina Agresti-Roubache, secrétaire d'État chargée de la citoyenneté et de la ville . - La loi du 17 mai 2013 a créé un scrutin majoritaire binominal paritaire pour l'élection des conseillers départementaux et étendu le scrutin de liste paritaire pour l'élection des conseillers municipaux aux communes de 1 000 à 3 500 habitants.
Ainsi, la part des femmes dans les conseils municipaux est passée de 39,9 % en 2014 à 42,4 % en 2020 ; la proportion de femmes maires, de 16,9 % à 19,8 %. Bref, les conseils municipaux se féminisent.
Je comprends votre intention concernant les communes de moins de 1 000 habitants, qui représentent 71 % des communes françaises. Mais la généralisation complète du scrutin de liste pose des questions d'ordre constitutionnel. Le scrutin uninominal majoritaire respecte le principe d'expression pluraliste des opinions politiques. La parité n'a pas été étendue pour respecter le principe de libre candidature, étant donné le faible nombre de candidats. Le Gouvernement poursuit sa réflexion.
Délinquance et hausse des attaques au couteau
Mme Valérie Boyer . - Entre 2015 et 2017, on dénombrait 44 000 victimes d'agression à l'arme blanche, soit 120 par jour. Depuis la suppression de l'Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales en 2020, aucune donnée n'est disponible. Quel déni de réalité ! Le garde des sceaux répète que la France n'est pas un coupe-gorge. Depuis 2021, je demande de manière constante la cartographie, les chiffres et les profils de cette violence, pour en tirer tous les enseignements.
Mme Sabrina Agresti-Roubache, secrétaire d'État chargée de la citoyenneté et de la ville . - En tant que Marseillaise, comme vous, j'ai une pensée pour Alban Gervaise, victime d'une attaque à l'arme blanche, et pour ses enfants.
Je connais votre engagement pour la sécurité des Marseillais et Marseillaises ; j'en ai fait un combat de chaque instant.
Ces attaques à l'arme blanche sont un fléau pour notre société. Attaques terroristes ou liées à des pathologies psychiatriques, le phénomène ne doit pas être sous-estimé. Crépol, Annecy, Arras, Paris nous rappellent cette terrible réalité, mais aussi la réactivité et l'engagement de nos forces de l'ordre et de nos services publics - police, pompiers, soignants, je salue leur dévouement.
Notre détermination est totale. Le Gouvernement renforce la présence visible des forces de l'ordre sur la voie publique et dans les transports en commun, qui sera doublée d'ici à 2030.
La réponse pénale est aussi au rendez-vous : depuis 2017, nous renforçons de manière exceptionnelle les moyens alloués à la justice.
Le phénomène n'est pas simple à qualifier et à quantifier. La statistique institutionnelle agrégée et analysée par les services de la sécurité intérieure ne recense pas en tant que telles les attaques à l'arme blanche, car le code pénal ne permet pas de faire la distinction.
Soyez assurée que nos forces de l'ordre continueront à agir sans relâche sur le terrain pour assurer la sécurité des Français.
Mme Valérie Boyer. - Le phénomène était pourtant quantifiable puisque nous avions des chiffres officiels ! Je n'ai pas eu de réponse à mes nombreuses questions écrites. Notre engagement à lutter contre la délinquance n'est pas à démontrer, mais pourquoi cacher les chiffres ?
Pourquoi ces données ne sont-elles plus disponibles ? Alors que les homicides et les tentatives d'homicide explosent en France, pourquoi ne pas communiquer ces éléments dont on disposait auparavant ? Seule la presse régionale en parle ! La moindre des choses serait de disposer de données précises sur ce phénomène de société, qui dépasse les simples faits divers. Il n'est pas normal de cacher ces statistiques aux Français. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
Information préventive des citoyens
Mme Elsa Schalck . - Le décret du 15 septembre 2023 impose aux maires d'informer les populations sur les risques majeurs et leur prévention. Dès lors, il faut des outils adéquats. Or les maires n'ont pas une connaissance actualisée de la population de leur commune : comment, dans ces conditions, faire parvenir l'information ?
Les maires doivent pouvoir tenir un registre domiciliaire actualisé : les nouveaux arrivants devraient se déclarer en mairie, d'autant que l'on déménage de plus en plus. De nombreux pays européens appliquent cette mesure de bon sens - Allemagne, Italie, Belgique, Espagne.
Ainsi, les maires pourraient mieux exercer leurs missions au quotidien, et anticiper les investissements nécessaires.
Il y va du lien de confiance entre les maires et l'État. Quand allez-vous autoriser les maires de France à disposer d'un outil efficient pour connaître leur population et ainsi mieux l'informer ?
Mme Sabrina Agresti-Roubache, secrétaire d'État chargée de la citoyenneté et de la ville . - L'obligation d'information préventive sur les risques majeurs est souple : le maire a le choix des moyens - affichage, réunions publiques, sites web, réseaux sociaux. Je comprends votre souhait de disposer d'un état des lieux détaillé.
Cependant, le Gouvernement n'est pas favorable à une obligation de déclaration domiciliaire, qui se traduirait par la constitution d'un fichier de données à caractère personnel, à rebours des principes constitutionnels que sont la liberté d'aller et venir et le respect de la vie privée.
Dans une décision du 13 mars 2014, le Conseil constitutionnel demande que la création d'un fichier de données à caractère personnel soit justifiée par un motif d'intérêt général précis et suffisamment important pour s'équilibrer avec la protection des libertés individuelles.
Enfin, une telle obligation créerait des charges importantes pour les communes - délivrance de récépissés, tenue de registres.
Les maires, via les opérations de recensement de l'Insee, ont déjà des informations à disposition.
Augmentation des campements de sans-abri à Paris
Mme Catherine Dumas . - Les Parisiens constatent l'augmentation du nombre de campements de sans-abri, notamment du fait de la fin de la convention entre l'État et les hôtels, liée aux jeux Olympiques et Paralympiques. Il y a donc une pénurie d'hébergements d'urgence et un manque de rotation de places : 4 358 personnes sont sur liste d'attente rien qu'à Paris. Le 115, seul point d'accès, est engorgé.
Les sans-abri vivent dans des conditions indignes, et les Parisiens subissent les nuisances. Le secrétariat général de la ville de Paris doit recueillir l'accord de la personne concernée avant toute expulsion et dresser une liste de « motifs aggravants », mais les critères sont flous. Les maires des arrondissements concernés sont démunis. Le Gouvernement définira-t-il une procédure plus rapide mettant les maires d'arrondissement au coeur des décisions ?
Mme Sabrina Agresti-Roubache, secrétaire d'État chargée de la citoyenneté et de la ville . - Depuis le début de l'année, les services de la préfecture de police ont recensé 276 sites, de la tente isolée à des campements plus importants : 602 tentes et 180 abris ont été dénombrés, occupés par 1 167 personnes. La préfecture de Paris est compétente sur l'hébergement d'urgence. Elle intervient à la demande de l'autorité judiciaire afin de prêter le concours de la force publique pour l'évacuation de campements illicites. Les services de police sont mobilisés pour détecter les nouvelles implantations.
Les conditions de vie comme les problèmes de voisinage ont conduit les services de l'État à placer 5 973 personnes à l'abri, dont 4 251 hommes isolés et 1 271 personnes en famille. Le 20 juin dernier, le Gouvernement a lancé le deuxième plan Logement d'abord, avec 25 000 logements en résidences sociales et foyers de jeunes travailleurs, 30 000 places d'intermédiation locative et 10 000 places de pension de famille.
Mme Catherine Dumas. - Les habitants du XVIIe arrondissement, notamment, subissent des nuisances depuis de nombreux mois. Appuyez-vous sur les maires d'arrondissement.
Cancer comme maladie professionnelle des sapeurs-pompiers
Mme Émilienne Poumirol . - L'émission « Vert de rage » a montré que les sapeurs-pompiers, professionnels comme volontaires, étaient exposés aux retardateurs de flamme, cancérigènes reconnus. Dès 2003, un rapport au ministre de l'intérieur Nicolas Sarkozy recommandait une veille sanitaire. Vingt ans plus tard, aucune étude.
En juin 2022, le Centre international de recherche sur le cancer (Circ) a conclu à un lien avec le mésothéliome et le cancer de la vessie, par exemple. Pourtant, seul le carcinome du nasopharynx est reconnu comme maladie professionnelle, contre 28 cancers différents aux États-Unis et 19 au Canada.
Agnès Buzyn avait annoncé la révision du tableau des maladies professionnelles - sachant que la branche AT-MP est chroniquement excédentaire. Allez-vous enfin reconnaître les maladies professionnelles des sapeurs-pompiers et améliorer la prévention ?
Mme Sabrina Agresti-Roubache, secrétaire d'État chargée de la citoyenneté et de la ville . - L'exposition aux fumées est identifiée et prise en compte. Les sapeurs-pompiers professionnels et volontaires sont soumis régulièrement à une visite d'aptitude. Des travaux sont en cours pour adapter les pratiques médicales au regard du risque de cancer.
Le décret du 5 novembre 2015 instaure le droit à un suivi médical post-professionnel pour les agents publics territoriaux, dont les sapeurs-pompiers professionnels, pris en charge par les services départementaux d'incendie et de secours. Ces derniers ont instauré des mesures de prévention, avec des soutiens de santé et des équipes de protection.
Le Circ, la caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales et la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises effectuent des recherches.
Mme Émilienne Poumirol. - Justement, le Circ a démontré ce lien étroit. Il n'est plus temps de tergiverser, alors que 2 000 pompiers sont concernés. Présidente de Sdis et médecin, je suis en contact avec des personnes atteintes.
Occupations illicites par des gens du voyage
Mme Sylviane Noël . - Au carrefour de la Suisse et de l'Italie, la Haute-Savoie attire des gens du voyage, qui s'installent en toute illégalité. Les conséquences sont catastrophiques, pour le voisinage comme pour les entreprises.
La délivrance aisée de patentes helvétiques par les autorités genevoises est un facteur d'attractivité, avec à la clé travail et plaques d'immatriculation suisses. Cette étrange facilité crée un appel d'air. Le canton de Genève n'ayant aucune obligation de construire des aires d'accueil, contrairement à nos communes, les gens du voyage reviennent chaque soir. Ce serait à nos amis suisses de les loger. Quelles démarches ont été engagées avec la Suisse ?
Mme Sabrina Agresti-Roubache, secrétaire d'État chargée de la citoyenneté et de la ville . - En 2021, le préfet de Haute-Savoie a pris 45 mises en demeure à l'encontre de groupes de gens du voyage installés de manière illicite, 20 en 2022 et 74 en 2023, dont un tiers concerne un seul groupe de 250 caravanes, semi-sédentarisé, bien connu des services, qui sillonne l'arc lémanique.
Le préfet entend s'appuyer sur toutes les dispositions existantes. Les forces de l'ordre contrôlent, saisissent des véhicules et verbalisent, notamment les véhicules immatriculés en Suisse, en collaboration avec les services de police suisse.
Il faut accentuer la coopération avec Genève sur la délivrance et le retrait de patentes. Le sujet a été évoqué ce jeudi 14 décembre lors du Comité régional franco-genevois, coprésidé par la préfète de la région Auvergne-Rhône-Alpes et le président du Conseil d'État de Genève ; il le sera de nouveau au printemps.
Mme Sylviane Noël. - Je m'en réjouis. Le groupe en question ne répond plus à aucune particularité des gens du voyage et ne doit plus avoir ce statut. Il y a un an, en Haute-Savoie, Gérald Darmanin s'était engagé à faire évoluer la loi Besson, avant qu'il y ait un drame.
Circulation des poids lourds dans les villages de l'Oise
M. Édouard Courtial . - Mille : c'est le nombre de camions circulant chaque jour dans certains villages de l'Oise. Les riverains ne supportent plus cette nuisance qu'ils comparent au Grand Prix de Monaco, et demandent des radars, des contrôles pour respecter les déviations, des ralentisseurs.
Le conseil départemental de l'Oise va publier une charte de bonne conduite, mais le trafic emporte des conséquences sur la santé des administrés, du fait de la pollution sonore et atmosphérique ; sur la sécurité routière - accident du 12 décembre dernier à Verberie a provoqué une coupure de courant ; sur la détérioration des infrastructures, dans un contexte budgétaire contraint.
Loin de l'image d'Épinal, on n'entend plus les oiseaux chanter, mais les moteurs vrombir, car certaines entreprises peu scrupuleuses veulent faire des économies de péage. Entendez les élus de ces communes.
Mme Sabrina Agresti-Roubache, secrétaire d'État chargée de la citoyenneté et de la ville . - Le code général des collectivités territoriales permet au maire d'interdire l'accès à certaines voies aux poids lourds, mais la restriction est l'exception : un maire ne peut leur fermer l'agglomération de manière permanente. En revanche, il peut motiver des mesures restrictives, selon des critères non énumérés.
De 2021 à 2023, la gendarmerie a relevé une nette hausse des infractions liées au non-respect des restrictions de circulation dans l'Oise, dont le nombre est passé de 301 à 598. Elle a consacré 1 570 heures à la coordination des transports en 2021, 2 670 heures en 2023.
La vidéoverbalisation permet de constater l'infraction sans interception. Le ministère étend le périmètre des infractions constatables par ce biais aux infractions aux interdictions de circulation, et l'accès au système d'immatriculation des véhicules aux policiers municipaux.
Trimestres de retraite des sapeurs-pompiers volontaires
M. Patrice Joly . - À l'occasion de la loi portant réforme des retraites, le Sénat, unanime, a accordé aux sapeurs-pompiers volontaires trois trimestres supplémentaires à compter de dix années d'engagement, puis, au-delà, un trimestre tous les cinq ans.
Nous marquons ainsi notre reconnaissance envers l'engagement citoyen de ces hommes et de ces femmes qui assument des missions dangereuses au bénéfice de la collectivité, en sus de leur activité professionnelle. La mesure vise également à soutenir le recrutement de volontaires face aux événements climatiques et aux carences sanitaires : sans eux, la sécurité de nos concitoyens ne pourrait être assurée.
En cette période de Sainte-Barbe, les sapeurs-pompiers volontaires s'inquiètent de l'absence de décret d'application, dont il se dit qu'il établirait une distinction entre les volontaires selon qu'ils exercent ou non une activité professionnelle.
Quand le décret sera-t-il publié ? Confirmez-vous que tous les sapeurs-pompiers volontaires, sans exception, en bénéficieront ?
Mme Sabrina Agresti-Roubache, secrétaire d'État chargée de la citoyenneté et de la ville . - Issu d'un amendement transpartisan, l'article 24 de la loi du 14 avril 2023 permet aux sapeurs-pompiers volontaires justifiant d'une durée minimum d'engagement de valider des trimestres de retraite, au titre de la reconnaissance de leur engagement au service de nos concitoyens.
Ainsi, le projet de décret en Conseil d'État permet l'octroi de trois trimestres pour dix ans d'engagement, continus ou non, puis d'un trimestre par tranche de cinq ans d'engagement supplémentaire. Il adapte également la mesure aux régimes des marins et des fonctionnaires.
Après avoir été soumis à l'avis des différentes caisses de retraite, il est en cours d'étude au Conseil d'État, qui devrait rendre son avis demain, mercredi 20 décembre. Sa publication devrait intervenir d'ici à la fin de l'année. La mesure s'appliquera aux liquidations de pensions qui interviendront dès le lendemain de son entrée en vigueur.
M. Patrice Joly. - Vous ne m'avez pas répondu sur une éventuelle distinction en fonction de la situation professionnelle. Consultez-les, rassurez-les, levez les inquiétudes : nous avons besoin d'eux !
Attribution du label Quartier prioritaire de la ville
M. Jean-Baptiste Lemoyne, en remplacement de Mme Dominique Vérien . - Je partage la préoccupation de Dominique Vérien concernant les critères d'attribution des subventions relatives aux quartiers prioritaires de la ville (QPV), notamment quant au seuil de population. Pour rentrer dans le dispositif, il faut que l'aire urbaine ait une population d'au moins 10 000 habitants. Or les élus ne partagent pas toujours l'appréciation de l'Insee !
Le classement en QPV a des conséquences importantes en termes de subventions : pour la ville de Joigny, cela représente 715 000 euros par an. Il a aussi un effet levier auprès d'autres financeurs, comme la région. Or le dernier recensement a fait passer la ville de Joigny sous la barre des 10 000 habitants - non qu'elle ait perdu des habitants, mais parce que nombre d'entre eux ne se sont pas fait recenser. Peut-on espérer une certaine souplesse dans l'appréciation des seuils de population pour éviter de faire sortir la ville de la carte des QPV qui est en cours d'élaboration ?
Mme Sabrina Agresti-Roubache, secrétaire d'État chargée de la citoyenneté et de la ville . - La mise à jour du zonage, qui date de 2014, est en cours de finalisation. Deux décrets seront publiés avant le 31 décembre : un décret méthode, qui définit les modalités particulières des critères prévus par la loi Lamy de 2014, et un décret liste.
Les échanges étroits entre les élus et les préfets, menés tout au long de l'année, ont fait remonter plusieurs sujets, dont celui que vous évoquez. En effet, des habitants ont pu refuser de se faire recenser, ou avoir été temporairement relogés dans une commune voisine le temps de programmes de renouvellement urbain, faisant passer une unité urbaine sous le seuil des 10 000 habitants.
Le décret méthode, qui doit prendre en compte ces situations, est actuellement devant le Conseil d'État ; je ne pourrai vous répondre précisément sur le cas de Joigny qu'une fois son avis rendu. Comptez sur ma détermination pour que le nouveau zonage soit au plus proche de chaque territoire et réponde aux besoins des plus fragiles. Les préfets travailleront étroitement avec les élus et les habitants, dans le cadre de concertations citoyennes. Je vous ferai une réponse écrite précise, dès l'avis du Conseil d'État rendu.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. - Votre prédécesseur s'était engagé à ce qu'on fasse preuve de souplesse. Tant le préfet de département que de région se sont montrés ouverts au maintien de Joigny dans le zonage ; j'espère que cela pourra être concrétisé.
Écoles supérieures d'art territoriales
M. Max Brisson . - Constituées en établissements publics de coopération culturelle (EPCC), les écoles supérieures d'art territoriales délivrent des diplômes nationaux labellisés par le ministère de la culture. Pour autant, l'État ne les finance qu'à hauteur de 10 % en moyenne, avec de grandes variations entre établissements : la moyenne est de 1 960 euros par étudiant, mais certaines écoles touchent moins de 1 000 euros, et sont en grande difficulté. Cette dotation n'a pas évolué depuis douze ans, ce qui représente une baisse de 14 % en euros constants, alors qu'elles font face aux exigences croissantes de l'enseignement supérieur, à l'inflation, à la revalorisation des salaires. Sous-financées, ces écoles ne parviennent plus à équilibrer leur budget.
La ministre de la culture a annoncé en mars dernier une aide d'urgence de 2 millions d'euros, répartie entre les 33 établissements et reconduite dans le dernier projet de loi de finances. Mais cela ne répond ni à la gravité de la situation ni à la question structurelle de la responsabilité de l'État.
Alors que le gouvernement a donné un avis défavorable à l'amendement du Sénat au projet de loi de finances, pourtant défendu par les élus et les professionnels, quelle mesure envisage-t-il pour garantir la pérennité des écoles supérieures d'art territoriales ?
Mme Sabrina Agresti-Roubache, secrétaire d'État chargée de la citoyenneté et de la ville . - Anciennes régies municipales, ces écoles relèvent des collectivités locales et bénéficient d'un soutien financier du ministère de la culture à hauteur d'environ 11 % de leurs ressources. Ce soutien est passé de 16,2 millions d'euros en 2012 à 21 millions en 2022, soit une hausse de 30 % en dix ans.
Afin de répondre aux difficultés dues à l'inflation et, dans certains cas, à la baisse des contributions des collectivités locales, la ministre de la culture a débloqué une aide d'urgence de 2 millions d'euros. L'école de Pau-Tarbes a bénéficié d'une augmentation du soutien de l'État de 42 %.
Rima Abdul-Malak a en outre soclé cette aide dans le budget et décidé un effort supplémentaire de 3 millions d'euros en investissement. Un rapport rendu public a formulé quatre préconisations : revoir la gouvernance en impliquant davantage les régions et les intercommunalités ; cartographier l'ensemble de l'offre de formation artistique, publique et privée ; objectiver la dépense de l'État par étudiant ; mieux faire connaître ces écoles.
À l'appui de ce travail et des rapports de la Cour des comptes et du Haut Conseil de l'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur, ses services élaborent un plan d'action en faveur de ces écoles, dans une logique de dialogue et de concertation.
M. Max Brisson. - Les états généraux de l'enseignement supérieur artistique doivent rapidement se réunir pour fixer de nouveaux équilibres financiers et garantir la pérennité des EPCC. Pour mettre fin aux inégalités entre établissements, pourquoi ne pas mettre en place un forfait fixe par étudiant, au lieu du saupoudrage actuel ?
Pénurie de médicaments
M. Henri Cabanel . - À l'hiver 2022-2023, 75 000 passages aux urgences ont été enregistrés pour des cas de bronchiolite. Depuis septembre, il est possible d'administrer aux bébés un traitement préventif. Malgré la commande de 200 000 doses de Beyfortus, plus aucune dose n'était disponible une semaine après le lancement d'une campagne de communication incitant à la vaccination.
Plus généralement, le nombre de patients se disant confrontés à une pénurie sur un médicament a bondi de 29 à 37 % en une année : amoxicilline, paracétamol, médicaments liés à la cardiologie... Cette situation, qui inquiète légitimement les Français, s'explique notamment par des délocalisations massives de laboratoires pharmaceutiques en quête de rentabilité, et par la concentration quasi monopolistique de la production, certains médicaments n'étant fournis que par une seule entreprise.
Madame la ministre, quand les doses de Beyfortus seront-elles disponibles pour éviter les hospitalisations ? Plus généralement, quelle est votre stratégie pour augmenter les stocks de médicaments ?
Mme Fadila Khattabi, ministre déléguée chargée des personnes handicapées . - En juillet 2023, les autorités françaises ont réservé 200 000 doses de Beyfortus, en prévision des épidémies de l'hiver. La France a été le premier pays à déployer de façon aussi large cet outil de prévention. La campagne d'immunisation des nourrissons contre la bronchiolite a débuté le 15 septembre et a rencontré une forte adhésion de la part des professionnels et des parents. On ne peut que s'en réjouir. Dans un contexte de très forte demande, les discussions avec les laboratoires ont permis de sécuriser 50 000 doses additionnelles pour prolonger la campagne en cours.
Plus généralement, la feuille de route adoptée en 2023 a posé les premiers jalons d'une nouvelle stratégie en matière de prévention et de gestion des pénuries. Le dernier projet de loi de financement de la sécurité sociale contient trois mesures sur le sujet. La première vise à prévenir les ruptures d'approvisionnement à la suite de l'arrêt de commercialisation de médicaments d'intérêt thérapeutique majeur mature. La deuxième limite la vente directe entre les laboratoires pharmaceutiques et les officines et renforce des leviers d'épargne en cas de rupture d'approvisionnement. La troisième élargit les dispositifs de production alternative aux spécialités pharmaceutiques.
En parallèle et à la demande d'Aurélien Rousseau, l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, en lien avec l'Ordre des pharmaciens, a présidé à la signature, le 22 novembre dernier, d'une charte destinée à fluidifier la chaîne de distribution.
M. Henri Cabanel. - La pénurie montre que l'impact de la compagne de communication n'a pas été maîtrisé. Dans l'Hérault, les pharmaciens mènent une action afin que les patients envoient un courrier au Président de la République, en espérant une réponse favorable.
Psychiatrie dans le Loiret
Mme Pauline Martin . - Selon l'observatoire régional de la santé (ORS) du Centre-Val de Loire, le Loiret ne dispose que de 12,7 psychiatres pour 100 000 habitants, contre 15,4 au niveau régional. Sa dotation financière en psychiatrie est de 140 euros par habitant, contre 160 euros au niveau régional et 170 euros au niveau national. L'établissement public de santé mentale (EPSM) Georges Daumézon, qui prend en charge plus de 17 000 patients dans un bassin de population de 600 000 habitants, doit fermer des lits, faute de moyens, notamment en personnels.
Comment répondre aux difficultés de cet établissement et de l'ensemble du département pour mettre fin à cette inégalité criante entre les territoires ? Quelles mesures le Gouvernement compte-t-il prendre pour répondre à la crise de la psychiatrie publique, qui affecte particulièrement l'aide sociale à l'enfance ?
Mme Fadila Khattabi, ministre déléguée chargée des personnes handicapées . - Le Gouvernement a augmenté le nombre de postes d'internes en psychiatrie depuis 2018. La psychiatrie a, en outre, été reconnue en 2022 parmi les spécialités en tension, et le taux d'étudiants hospitaliers de deuxième cycle dans ce service a été augmenté.
Des objectifs ambitieux ont été inscrits dans le projet régional de santé pour les cinq prochaines années : améliorer la formation des professionnels de santé, renforcer l'attractivité du secteur, fidéliser les professionnels, déployer la télémédecine. L'ouverture d'une faculté de médecine à Orléans accroîtra le nombre d'internes en psychiatrie.
Je salue l'engagement des professionnels de l'EPSM Georges Daumézon. Le Gouvernement a soutenu cet établissement, notamment par la mise en place d'une équipe mobile psychiatrie précarité (EMPP) et d'une équipe mobile d'intervention et de crise (Emic) pour enfants et adolescents. Nous avons également renforcé les centres médico-psychologiques (CMP) pour enfants et adolescents.
Mme Pauline Martin. - Il faut une mobilisation générale pour répondre à cet appel au secours !
Maternités dans le Cher
M. Rémy Pointereau . - Le projet régional de santé de la région Centre-Val de Loire risque d'avoir de graves conséquences en matière d'accès aux soins, notamment obstétriques, dans le Cher, car il fait mention de suppressions de maternité inacceptables à Vierzon et Saint-Amand-Montrond. Supprimer une maternité, c'est risquer d'engorger les autres et de mettre en danger les femmes enceintes et leurs bébés. Garantissez le maintien des maternités dans un territoire où le désert médical, tel le Sahara, s'agrandit au fil des années !
Mme Fadila Khattabi, ministre déléguée chargée des personnes handicapées . - Face aux fortes tensions subies par les maternités françaises, le Gouvernement oeuvre pour que les femmes enceintes aient une prise en charge de qualité au plus près de leur domicile, jusqu'à l'accouchement. Si une fermeture ne peut être évitée du fait d'un manque de professionnels de santé, des hébergements non médicalisés sont déployés à proximité des maternités de référence. Nous soutenons aussi la création de centres périnataux de proximité (CPP), qui offrent une large palette de services.
Dans le Cher, quatre maternités sont en activité, dont trois dans les centres hospitaliers de Bourges, Vierzon et Saint-Amand-Montrond et une en clinique, à Bourges. Des équipes complètes de gynécologues et d'anesthésistes sont présentes sept jours sur sept et 24 heures sur 24. Aucune maternité ne sera remise en cause. Notre objectif est de maintenir l'offre existante et d'accompagner les transformations si cela devient nécessaire.
M. Rémy Pointereau. - Vous me rassurez, mais je ne compte plus le nombre d'interventions faites sur le problème de l'accès aux soins, qui relève du droit de vivre ! Il s'agit ici de préserver le droit de naître, qui ne saurait faire l'objet de logiques rentables, même si nous entendons les difficultés liées au manque de personnel. Ne touchons pas au maillage actuel : c'est une question d'égalité devant l'accès à la santé.
Associations d'aide alimentaire
Mme Monique de Marco . - Les associations d'aide alimentaire sont dans une situation dramatique, malgré les mesures prises. En Gironde, le nombre de personnes reçues par le Secours populaire français a augmenté de 10 % en 2023. Les publics concernés sont de plus en plus nombreux. Les Restos du coeur ont distribué 47 % de repas en plus en France cette année.
Dans le même temps, les dotations du soutien européen à l'aide alimentaire (SEAA) ont diminué de 25 % par rapport à 2022. Les montants prévus pour 2024 ne compenseront pas les effets de l'inflation sur les produits alimentaires. Les 1 500 bénévoles des antennes girondines du Secours populaire français, qui se sentent démunis, s'inquiètent de ne pouvoir répondre aux besoins des nouveaux arrivants.
Il faut renforcer les dispositifs européens et nationaux, hors appels à projets, pour garantir aux associations les moyens financiers nécessaires à leur mission d'aide sociale, et mettre en oeuvre des aides spécifiques.
Mme Fadila Khattabi, ministre déléguée chargée des personnes handicapées . - Le Pacte des solidarités, qui vise à garantir à tous l'accès à une alimentation de qualité, se distingue par un engagement financier sans précédent. Un budget exceptionnel de 156 millions d'euros a été alloué par le Gouvernement en 2023 pour soutenir les associations de l'aide alimentaire nationale - les Restos du coeur, le Secours populaire, la Croix-Rouge, les banques alimentaires ; soit plus du double de l'année 2021, dans le cadre du programme « Mieux manger pour tous ». Quelque 66 millions d'euros sont en outre dédiés aux associations locales. Le programme « Mieux manger pour tous » recevra 100 millions d'euros par an d'ici à 2027. Le Gouvernement a par ailleurs sollicité de grandes entreprises pour des dons en nature : les Restos du coeur recevront ainsi une aide équivalente à 2,5 millions d'euros. Il a également obtenu 80 millions d'euros de fonds européens supplémentaires pour la période 2024-2027.
Antennes d'officines pharmaceutiques
M. Jean-Jacques Lozach . - Le décret relatif aux territoires fragiles en matière d'offre pharmaceutique, déterminant pour le lancement de l'expérimentation des antennes d'officines inscrite par le Sénat dans la loi d'accélération et de simplification de l'action publique (Asap) de 2020, se fait toujours attendre. Un seul projet d'antenne de pharmacie, autorisé en octobre 2023 dans les Alpes-Maritimes, n'a pas abouti du fait de plusieurs obstacles juridiques et de difficultés de recrutement.
La proposition de loi visant à améliorer l'accès aux soins par l'engagement territorial des professionnels permettra-t-elle de lever les obstacles identifiés ? Le Gouvernement prévoit-il d'étendre le champ des dérogations et de clarifier le statut juridique des antennes ? Les pharmaciens pourront-ils assurer l'éducation thérapeutique et l'accompagnement des patients, délivrer des conseils et prestations, prescrire et administrer certains vaccins ? La facturation sera-t-elle autorisée dans les antennes pour les pharmaciens adjoints ne disposant pas d'une carte de professionnel de santé (CPS) ?
Mme Fadila Khattabi, ministre déléguée chargée des personnes handicapées . - - Dans le cas où la seule officine d'un village cesse son activité sans avoir trouvé de repreneur, l'agence régionale de santé (ARS) pourra autoriser l'ouverture d'une antenne rattachée à une pharmacie située à proximité. Toutefois, des difficultés juridiques et techniques ont compromis la mise en oeuvre de cette expérimentation, d'où sa réintroduction dans la proposition de loi susmentionnée.
Le champ des dérogations nécessaires sera étendu. Les antennes proposeront l'intégralité des missions réalisées habituellement dans les officines, facturation incluse. L'expérimentation sera prochainement lancée. Elle est à distinguer du décret sur les territoires fragiles, dont une nouvelle version sera présentée début 2024. Les ARS fixeront par arrêté la liste des territoires concernés.
Infirmières libérales en milieu rural dans les Alpes-Maritimes
M. Philippe Tabarot . - Depuis le 1er septembre dernier, les infirmières libérales exerçant dans les vallées de la Roya, de la Bévéra, de la Tinée et de La Vésubie ont cessé d'assurer les prises de sang. Jusqu'ici, elles percevaient 3 euros par prise de sang, du fait d'accords passés avec les laboratoires d'analyse. Or l'État et la sécurité sociale ont mis un coup d'arrêt à ce système.
Leurs conditions de travail sont pourtant difficiles en raison des nombreux kilomètres à parcourir.
Les patients doivent dorénavant se rendre dans des laboratoires ; ceux qui ne peuvent se déplacer subissent des retards.
Le montant des indemnités kilométriques en montagne est inégalitaire. Les indemnités kilométriques entre hameaux séparés à l'intérieur d'une même commune ne sont pas prises en compte. Que comptez-vous faire face à cette situation intenable ?
Mme Fadila Khattabi, ministre déléguée chargée des personnes handicapées . - Un protocole d'accord national signé le 6 mai 2021 prévoit que les partenaires conventionnels peuvent conclure des accords locaux sur les modalités de facturation des indemnités kilométriques. L'accord du 16 juin 2023 augmente par ailleurs de 10 % l'indemnité forfaitaire de déplacement et généralise à partir d'octobre 2023 le bilan de soins infirmiers pour les patients dépendants de moins de 85 ans suivis à domicile.
Dans le cadre d'un travail mené par l'ARS Provence-Alpes-Côte d'Azur et la caisse primaire d'assurance maladie, l'adaptation des horaires de ramassage par les coursiers des laboratoires a été étudiée, ainsi qu'une subvention institutionnelle pour prise en compte de la pénibilité et des contraintes en zone de montagne. Le ministre vous informera de la suite donnée à ces travaux.
M. Philippe Tabarot. - Ce n'est pas suffisant. Ces différences de traitement infondées alimentent la précarité des infirmiers libéraux, pourtant essentiels au bon fonctionnement de notre système de soins, et pénalisent les patients.
Sectorisation du transport d'urgence en Seine-et-Marne
Mme Marianne Margaté . - La sectorisation du transport d'urgence dans le nord-ouest seine-et-marnais, secteur frontalier de trois départements, est totalement inadaptée.
Les communes de Mauregard, Compans, Marchémoret, Villeneuve-sous-Dammartin, Othis, Le Mesnil-Amelot, Dammartin-en-Goële, Villeparisis et Mitry-Mory, soit plus de 60 000 habitants, sont à proximité de l'hôpital de Senlis, dans l'Oise, du centre Robert Ballanger, en Seine-Saint-Denis, et de l'hôpital de Gonesse, dans le Val-d'Oise. Pourtant, les pompiers doivent acheminer les victimes vers d'autres établissements.
Ainsi, à Mitry-Mory, ils sont contraints de solliciter la structure mobile d'urgence et de réanimation (Smur) de Meaux et de transporter la victime à l'hôpital de Jossigny, à plus de 30 kilomètres, alors que l'hôpital Ballanger n'est qu'à 10 kilomètres. Les retards de prise en charge qui en résultent peuvent avoir des conséquences vitales. La volonté de de la victime est ignorée ; la disponibilité des véhicules de secours et des personnels est également affectée.
Élus, représentants des hôpitaux et du Sdis de Seine-et-Marne demandent que les patients soient acheminés vers l'hôpital le plus proche, sans considération de frontières déconnectées des réalités territoriales. La seule préoccupation qui vaille, c'est de sauver des vies ! Le Gouvernement compte-t-il agir en ce sens ?
Mme Fadila Khattabi, ministre déléguée chargée des personnes handicapées . - Les patients de Mitry-Mory sont, en effet, plus proches des établissements de Seine-Saint-Denis que de l'hôpital de Jossigny.
Les urgences des hôpitaux publics et privés de Seine-Saint-Denis ne sont pas fermées aux patients du territoire Roissy-Pays de France : 10 % des patients reçus à Robert Ballanger viennent de Seine-et-Marne, de même que 34 % des patients reçus aux urgences du Vert-Galant, à Tremblay-en-France. Le centre du Raincy-Montfermeil fait actuellement l'objet de travaux qui réduisent la superficie des urgences ; la restriction d'accueil des transports sanitaires est temporaire.
Une réforme majeure de la garde et des transports sanitaires urgents a été engagée en 2022 pour renforcer l'organisation et la réponse des entreprises de transport intervenant à la demande du Samu ; elle est déclinée dans chaque département. Désormais, il y a au moins un véhicule de garde en permanence par secteur. Les secteurs de Jossigny, Meaux et Melun, plus denses, bénéficient d'un second moyen de garde pendant tout ou partie de la journée. Au total, entre neuf et onze ambulances de garde sont à la disposition du Samu 77.
Désengagement de l'État de TZCLD
Mme Amel Gacquerre . - C'est désormais acté : l'expérimentation Territoire zéro chômeur de longue durée (TZCLD) se poursuivra presque normalement en 2024, une nouvelle rassurante pour ce dispositif qui donne des résultats probants sur les 58 territoires habilités. Dans ce cadre, une soixantaine d'entreprises de l'économie sociale et solidaire (ESS) emploient près de 2 200 personnes éloignées de l'emploi.
Ce dispositif a bénéficié, depuis 2016, d'un réel soutien de l'État. Or un premier coup lui a été asséné par la réduction, au 1er octobre dernier, de la participation de l'État au financement de l'emploi des salariés de 102% à 95 % du Smic.
Le financement insuffisant prévu par le projet de loi de finances 2024, de 69 millions d'euros, risquait de stopper net les embauches. Je me réjouis que le Gouvernement l'ait finalement porté à 80 millions d'euros, même si les acteurs de l'insertion chiffrent les besoins à 89 millions.
Pour permettre à cette expérimentation de se développer d'ici à son évaluation en 2026, le Gouvernement s'engage-t-il à rouvrir la discussion l'année prochaine, si les 80 millions d'euros annoncés s'avèrent insuffisants ? Peut-il donner aux territoires concernés de la visibilité en leur garantissant un engagement stable jusqu'en 2026 ?
Mme Fadila Khattabi, ministre déléguée chargée des personnes handicapées . - Le soutien du Gouvernement à l'expérimentation TZCLD est constant. Nous avons soutenu la prolongation de l'expérimentation en 2020 et habilité cinquante nouveaux territoires. Les moyens qui lui sont consacrés seront en nette hausse en 2024 : 11 millions d'euros supplémentaires ont été votés à l'Assemblée nationale, portant l'augmentation totale à plus de 35 millions d'euros, l'une des plus fortes au sein du ministère du travail.
Ce montant paraît suffisant pour assurer une montée en charge ambitieuse du dispositif. Il n'y a pas de recul de l'État. Par ailleurs, deux nouveaux territoires ont été habilités ; l'objectif est d'en habiliter 85 d'ici à la fin de l'expérimentation.
Le rapport définitif du comité scientifique éclairera sur l'utilité du dispositif et la durabilité de son modèle économique.
Subvention au CRJS de Petit-Couronne
M. Didier Marie . - Le centre régional jeunesse et sports (CRJS) de Petit-Couronne, en Seine-Maritime, subit cette année une baisse de 28 000 euros de sa subvention de la Délégation régionale académiques à la jeunesse, à l'engagement et aux sports (Drajes). Ses responsables redoutent sa suppression totale en 2024.
Cette structure majeure au sein de la métropole de Rouen accueille pourtant 150 sportifs dans sept disciplines olympiques. Elle a été sélectionnée comme centre de préparation des jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) de Paris dans ces sept disciplines, du badminton au basketball fauteuil. Elle est, en outre, terre d'accueil de la solidarité olympique.
Malgré la qualité de ce centre, confirmée par le label « Grand Insep » et le passage de champions comme Teddy Riner, son avenir paraît de plus en plus flou. Une nouvelle baisse de sa subvention, voire sa suppression, dégraderait les services qu'il propose et son attractivité.
Ces décisions vont à rebours de la volonté du Gouvernement de faire du sport la grande cause nationale de 2024. Nous devrions soutenir le sport pour toutes et tous, partout ! Pouvez-vous rassurer les sportifs professionnels et bénévoles qui fréquentent le CRJS de Petit-Couronne sur le maintien d'une subvention au niveau des besoins ?
Mme Fadila Khattabi, ministre déléguée chargée des personnes handicapées . - Malgré la restructuration du Creps d'Houlgate, en 2008, l'État a poursuivi son soutien au développement de la haute performance en Normandie. En particulier, trois cadres d'État ont été mis à disposition des sites de Petit-Couronne, Le Havre et Caen. Une subvention moyenne de 70 000 euros par an est versée.
La nouvelle organisation territoriale de l'État liée aux Drajes a conduit à installer en 2022 une maison régionale de la performance. Le ministère des sports y a financé trois postes, pour 230 000 euros, complétés par 14 000 euros de l'Agence nationale du sport (ANS). Au total, près de 400 000 euros sont garantis annuellement pour le sport de haut niveau en Normandie.
En outre, l'ANS accompagne les structures du territoire en matière d'équipements et d'emplois, et les fédérations sportives sont aidées au titre des programmes d'accès au sport de haut niveau.
Avec près de 700 000 euros alloués à la Normandie en 2022, l'État est pleinement mobilisé.
Menaces sur la maternité de Guingamp
Mme Annie Le Houerou . - La maternité de Guingamp est confrontée à une menace persistante de fermeture qui nuit à son attractivité.
Depuis avril dernier, les accouchements sont suspendus pour un an. En dépit des engagements du Président de la République et des ministres successifs pour le maintien d'un centre hospitalier de plein exercice, aucun projet concret n'est envisagé. La population n'accepte pas cette dégradation de l'offre de soins - les élus non plus.
Cette suspension est une violence de plus faite aux femmes et aux enfants. Elle nourrit un sentiment d'abandon au sein de la population la plus vulnérable de Bretagne et aggrave le renoncement aux soins. Depuis, plusieurs femmes ont accouché sur la route : en novembre, Nathalie a accouché de Margaux entre une pizzeria et un garage... La perspective d'accoucher devient une angoisse.
La discussion avec l'ARS est un dialogue de sourds. Il est urgent de sortir de l'impasse et de préparer une solution viable. Allez-vous lever l'incertitude persistante autour de l'avenir de la maternité de Guingamp ?
Mme Fadila Khattabi, ministre déléguée chargée des personnes handicapées . - La situation de cette maternité est bien connue du ministère, qui la suit régulièrement, en liaison avec les professionnels, les élus et l'ARS.
Les accouchements ont été suspendus à compter du 26 avril du fait de risques liés à un manque de professionnels. Les tensions sur les ressources humaines sont en partie liées aux problématiques d'attractivité et à la charge de la permanence des soins. Le Gouvernement apporte des réponses adaptées pour garantir sur tout le territoire la santé maternelle, néonatale et infantile. Un équilibre doit être trouvé entre proximité et sécurité.
À Guingamp, la suspension a été plusieurs fois reconduite pour des raisons de sécurité. L'ARS est pleinement mobilisée pour aider la maternité à reconstituer les équipes nécessaires, mais les difficultés persistent. Le cabinet d'Aurélien Rousseau a organisé hier un temps d'échanges auquel vous-même et de nombreux élus avez participé. (Mme Annie Le Houerou le dément.) Nous poursuivrons dans cette voie pour trouver des perspectives partagées.
Mme Annie Le Houerou. - Si une réunion s'est tenue, c'est sans les élus et les représentants des professionnels et des usagers.
Puisqu'il y a un problème d'attractivité, nous demandons un engagement clair sur la reconstruction, promise, d'un hôpital de plein exercice. Il faut aussi bonifier les rémunérations des soignants. Enfin, dans les établissements en tension, des postes d'interne doivent être ouverts aux futurs médecins, fussent-ils étudiants à l'étranger. Des médecins français qui étudient à l'étranger sont demandeurs...
Organisez une table ronde avec l'ensemble des parties prenantes. Les solutions existent !
La séance est suspendue à midi trente.
Présidence de M. Mathieu Darnaud, vice-président
La séance reprend à 14 h 30.