SÉANCE
du mardi 24 janvier 2023
48e séance de la session ordinaire 2022-2023
présidence de M. Alain Richard, vice-président
Secrétaires : Mme Françoise Férat, M. Joël Guerriau.
La séance est ouverte à 9 h 30.
Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu intégral publié sur le site internet du Sénat, est adopté.
Les conclusions de la Conférence des présidents sont adoptées.
Questions orales
M. le président. - L'ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.
Politique agricole commune et pastoralisme
M. Jean-Jacques Michau . - De nombreuses organisations, dont les chambres d'agriculture, s'inquiètent des effets du plan stratégique national (PSN) de la politique agricole commune (PAC) sur le pastoralisme.
L'exploitation collective des surfaces d'altitude - dites d'estive - est une particularité de l'agriculture de montagne. Les surfaces d'estive doivent être ventilées entre chaque éleveur transhumant pour les aides surfaciques.
Monsieur le ministre, je vous remercie d'avoir entendu la demande du monde pastoral concernant la répartition du versement de l'écorégime. Mais le plafonnement des surfaces ligneuses, via un critère de chargement plancher proposé à 0,2 unité gros bétail (UGB) par hectare, est inadapté aux territoires pastoraux. Sur les seules Pyrénées, plus de 26 000 hectares seraient écrêtés, soit une perte de 7,3 millions d'euros par an.
Le Gouvernement entend-il limiter l'application de ce critère aux seules surfaces fourragères herbeuses afin de protéger l'élevage pastoral ?
M. Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire . - Rappelons d'abord les avancées obtenues, notamment concernant les critères d'admissibilité des surfaces, finalement maintenus à un niveau inchangé. Nous avons également obtenu que l'ensemble de l'écorégime s'applique sur toutes les surfaces pastorées par l'exploitant.
En réponse aux griefs de la Commission européenne, il a été décidé de mettre en place, pour l'admissibilité, un critère de chargement à 0,2 UGB par hectare. Ce critère concernera uniquement les prairies composées majoritairement de ligneux, arbres, arbustes ou buissons dans 38 départements du sud de la France, ainsi que les surfaces en chênaies et châtaigneraies dans la zone Causses-Cévennes et en Corse.
Nous avons trouvé un bon équilibre. Les surfaces éligibles restent les mêmes, et l'on y inclut les surfaces collectives en pastoralisme. Ce taux de chargement donne du crédit à notre démarche auprès de la Commission européenne.
Filière des huiles essentielles de lavande
Mme Marie-Arlette Carlotti . - La filière des huiles essentielles de lavande a besoin de soutien, particulièrement en Provence où la concurrence est extrêmement forte, au regard du changement climatique. Les sénateurs l'ont réaffirmé le 5 juillet 2022, en votant une proposition de résolution en ce sens.
Depuis 2006, la filière française s'est adaptée pour se conformer au règlement européen Reach, mais la Commission européenne a entrepris de le réviser. Elle classerait les huiles essentielles comme produits chimiques dangereux.
Cette révision condamnerait toute une filière à des normes trop strictes qu'elle ne pourrait assumer, mettant en péril de nombreuses productions qui font la renommée de la Provence et font rayonner la France.
Où en est le Gouvernement des discussions sur la révision du règlement Reach ? Monsieur le ministre, vous engagez-vous à soutenir une économie qui pourrait s'effondrer si l'huile essentielle de lavande était classée comme substance chimique dangereuse ? C'est une activité agricole et artisanale séculaire.
M. Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire . - Vous avez bien raison de défendre la filière lavande, dont je sais l'importance économique et symbolique pour toute une partie du territoire. Je salue votre implication et celle du Sénat.
Nous avons fait valoir notre position sur le règlement Reach. La Commission a reporté le travail à fin 2023, ce qui nous laisse le temps d'étayer notre réponse. Nous souhaitons que la filière lavande soit traitée à part.
Le 18 janvier, une proposition de la Commission sur le règlement CLP sur la classification, l'étiquetage et l'emballage des produits chimiques, a été transmise aux États membres. La France est en train de l'analyser de manière précise. Sa rédaction laisse entrevoir un dialogue possible sur des dispositions spécifiques à la lavande.
La filière souffre par ailleurs de problèmes sanitaires, climatiques et hydriques, et de concurrence. Nous y travaillons.
Je ferai des propositions sur le volet phytosanitaire, le volet économique et la révision de la réglementation européenne.
Gestion de la compétence eau et assainissement
M. Jean-Jacques Panunzi . - L'obligation de transfert aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) de la compétence eau et assainissement a été introduite par la loi NOTRe en 2015, pour les communautés d'agglomération au 1er janvier 2020 et les communautés de communes au plus tard au 1er janvier 2026. La loi Engagement et proximité a assoupli cette contrainte en autorisant la délégation de tout ou partie de ces compétences. La loi 3DS maintient l'échéance du 1er janvier 2026, mais impose un débat sur le sujet, après quoi une convention pourra lier la communauté de communes et les communes.
Les conseillers municipaux ne veulent pas de ce transfert. Les coûts d'entretien des réseaux ne sont pas les mêmes en zone rurale et en agglomération. Comment une intercommunalité peut-elle gérer de façon efficiente ce type de difficultés ? Ne pas comprendre cette situation, c'est être hors-sol.
Dans un esprit pragmatique, le Sénat a voté le 23 février 2017 un texte équilibré du président Bruno Retailleau, qui rend le transfert facultatif. Quelle est la position du Gouvernement ? Soutiendra-t-il ce texte du Sénat lors de son examen à l'Assemblée nationale ?
Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité . - Le Gouvernement est pleinement engagé dans la poursuite du transfert des compétences eau et assainissement, qui répond aux enjeux actuels et à venir.
Près de 11 000 services gèrent l'eau potable et plus de 12 000, l'assainissement collectif. Cet émiettement est un facteur d'inefficacité.
Le passage à l'échelon intercommunal permet de disposer de services ayant la taille critique, pour assurer un service durable à un coût maîtrisé, en générant des économies d'échelle.
Ce transfert a fait l'objet de nombreux ajustements. Ainsi, la date de transfert obligatoire a été repoussée du 1er janvier 2020 au 1er janvier 2026 pour les communautés de communes. Il est également possible pour une intercommunalité de déléguer cette compétence à une ou plusieurs communes.
Le Gouvernement ne souhaite pas revenir sur ce transfert. Le Comité national de l'eau a d'ailleurs souligné le besoin de stabilité de la législation sur le sujet.
Transfert du réseau routier national aux départements
M. Jérôme Bascher . - Dans les Hauts-de-France, le préfet de région a demandé aux départements de se prononcer avant la fin de l'année sur le transfert des routes nationales à leur profit, mais aucun élément chiffré n'a été fourni.
Le département de l'Oise est le seul de la région à s'être prononcé favorablement. Pourra-t-il récupérer la compétence ? Il reprendrait une centaine de kilomètres de routes nationales sur cent cinquante. Nous voudrions des éléments techniques.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité . - La loi 3DS prévoit le transfert d'une partie des routes et autoroutes non concédées aux départements et métropoles volontaires. Elle permet aussi aux régions volontaires d'expérimenter ce transfert.
Le droit à compensation des collectivités territoriales bénéficiaires de ce transfert sera calculé à partir d'une moyenne des dépenses d'investissement constatées sur cinq ans, et des dépenses de fonctionnement sur trois ans.
Le décret relatif aux périodes de référence est en cours de signature, après avoir reçu un avis favorable de la commission consultative sur l'évaluation des charges (CCEC).
Les collectivités, via les préfets, ont reçu dès juillet 2022 des éléments pour estimer leur droit à compensation. Mais, pour un transfert au 1er janvier 2024, le montant définitif sera calculé à partir des budgets exécutés 2021-2023 côté fonctionnement et 2019-2023 côté investissement.
Enfin, la direction générale des infrastructures, des transports et des mobilités (DGITM) prépare un projet de décret précis sur le calcul du droit à compensation. Différents critères bâtiront un droit à compensation au plus près des besoins réels de l'infrastructure, tout en maintenant des règles homogènes au niveau national. Ce décret devrait être publié au premier trimestre 2023.
M. Jérôme Bascher. - Le département de l'Oise est le seul de la région à être preneur de routes nationales. L'État doit accorder ce transfert aux départements qui le souhaitent, et non uniquement à la région. Ce ne doit pas être tout ou rien. La loi 3DS est une loi de différenciation.
Avenir des communes
Mme Christine Herzog . - M. Pierre Moscovici, premier président de la Cour des comptes, a déclaré, en présentant le rapport du 26 octobre 2022 : « Il ressort d'une façon générale et unanime que le sort de l'avenir des communes semble décidé. La dotation globale de fonctionnement, la célèbre DGF, va devoir aller vers les intercommunalités en sa totalité. On se dirige donc vers une inéluctable collectivité territoriale à part entière et à fiscalité propre. »
Ce rapport ne tarit pas d'éloges sur le bien-fondé de l'intercommunalité.
Les maires, aujourd'hui, sont des assistantes sociales face aux malheurs en tout genre, avec toujours moins de compétences et de moyens. Ils en sont rendus à rechercher l'implantation de parcs éoliens ou photovoltaïques pour collecter les petits 20 % de l'imposition forfaitaire des entreprises de réseaux (Ifer), malgré les nuisances.
La France compte 34 950 communes et 1 250 EPCI.
Que prévoit le Gouvernement pour l'avenir des maires et des communes françaises ?
Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité . - Ce rapport, réalisé à la demande du Sénat, propose de verser la DGF au seul niveau des EPCI et de leur laisser la possibilité de décider de sa répartition. Il aborde aussi la place des communes dans notre organisation institutionnelle et territoriale.
Christophe Béchu a déclaré à la commission des lois du Sénat qu'il était totalement hostile au transfert de la DGF aux intercommunalités. Je vous le confirme moi-même.
La loi de finances pour 2023 a abondé la DGF des communes de 320 millions d'euros, dont 200 millions pour les communes les plus rurales et les plus fragiles. Depuis 2017, l'engagement du Président de la République de stabiliser la DGF du bloc communal a été tenu, après cinq années de forte baisse.
En outre, le Gouvernement a créé des aides pour les collectivités, face à la crise sanitaire et à l'inflation.
Nous n'opposons pas communes et EPCI.
L'intercommunalité a fait ses preuves dans de nombreux domaines. Elle est un vecteur de solidarité financière et territoriale importante. C'est un formidable instrument lorsque les élus cherchent le consensus.
Constructions illégales en zones protégées
M. Didier Rambaud . - Nombre de communes sont confrontées à des installations sauvages sur les zones protégées. Les auteurs de ces infractions se savent la plupart du temps à l'abri des sanctions, du fait des contraintes légales et budgétaires des collectivités.
La loi Engagement et proximité a ajouté aux sanctions pénales un mécanisme administratif de traitement des infractions aux règles d'urbanisme. Toutefois, cette procédure se heurte à de multiples obstacles. Certaines communes pensaient avoir trouvé la parade en préemptant des terrains sensibles lors d'une vente, mais désormais ces terrains sont loués avec un bail emphytéotique, non soumis à publicité foncière.
À l'heure du zéro artificialisation nette (ZAN), les élus locaux demandent au Gouvernement de s'assurer d'un traitement diligent de ces dossiers. Les délais sont tels qu'un dossier pour déboisement illégal n'est toujours pas jugé quand le terrain est totalement construit et habité. Les dommages sont souvent irréversibles et il est pratiquement impossible de déloger un foyer installé.
Comment soutenir les collectivités pour que la loi soit respectée ?
Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité . - Aux outils que vous avez cités, monsieur le sénateur, s'ajoutent les documents d'urbanisme, qui facilitent l'identification et donc la verbalisation des implantations illégales.
La surveillance foncière des secteurs protégés peut s'opérer dans le cadre des déclarations d'intention d'aliéner (DIA) transmises aux communes en cas de vente de terrain. En effet, la tâche est plus difficile en cas de bail emphytéotique.
Une partie de la solution peut résider dans la limitation de l'accès aux réseaux, le raccordement à l'électricité, à l'eau, au gaz ou au téléphone étant interdit pour les constructions illégales.
L'outil pénal ne doit pas être négligé. Des protocoles de travail existent entre les services déconcentrés de l'État et les parquets, afin d'accompagner techniquement les maires.
La loi de 2019 a instauré un mécanisme administratif rapide à la main des élus locaux, afin de régulariser, sous astreinte, les constructions illégales. L'astreinte perd de son efficacité en cas d'insolvabilité de l'intéressé, mais elle concerne toute personne responsable des travaux, y compris un entrepreneur.
Les services locaux de l'État, enfin, peuvent assister les communes.
Si le problème est prégnant, des solutions efficaces existent.
Moyens d'action des collectivités face à la désertification médicale
Mme Patricia Schillinger . - Difficultés à trouver un médecin traitant, retards de prise en charge, renoncements à des soins : voilà ce que l'on rencontre dans les collectivités frappées par la désertification médicale. Malgré leurs moyens limités en matière de santé, elles sont nombreuses à prendre des initiatives, comme nous l'avons montré avec Philippe Mouiller dans notre rapport « Les collectivités à l'épreuve des déserts médicaux ».
Des politiques incitatives favorisent ainsi l'installation de médecins, en particulier le versement d'indemnités d'hébergement et de transport pour les étudiants stagiaires. Mais, selon l'article L. 1511-8 du code général des collectivités territoriales, ces indemnités ne peuvent être versées qu'aux étudiants de troisième cycle de médecine générale. Or il faut aussi attirer des spécialistes. Le code ignore la réalité des parcours des étudiants qui réalisent des stages avant le troisième cycle. Ces aides constituent un levier efficace pour attirer de jeunes médecins.
Le Gouvernement est-il prêt à élargir les compétences des collectivités et à ouvrir le bénéfice de ces aides aux étudiants de spécialité, avant le troisième cycle ?
Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité . - Pour favoriser l'installation des professionnels de santé dans les zones sous-denses, les collectivités peuvent leur octroyer des aides à l'investissement ou au fonctionnement, ainsi que faire bénéficier les stagiaires d'indemnités d'étude et de projet professionnel ou d'indemnités de logement et de déplacement.
Le Gouvernement est favorable à l'extension du bénéfice de ces indemnités aux étudiants de troisième cycle d'études spécialisées de médecine. En revanche, étendre leur bénéfice à tous les étudiants de médecine ne nous semble pas pertinent, car les stages des deux premiers cycles sont réalisés en zone urbaine.
Enfin, le Gouvernement réfléchit à l'extension du bénéfice de ces indemnités aux étudiants de pharmacie et de maïeutique.
Doublement de la RN2 entre Laon et Avesnes-sur-Helpe
M. Antoine Lefèvre . - Promis par le Président de la République en novembre 2018 lors de la signature du pacte Sambre-Avesnois-Thiérache, le doublement de la RN2 mettait un terme à quarante ans d'atermoiements sur cet axe majeur reliant le Bassin parisien à la Belgique.
Mais une décision ministérielle du 8 novembre 2022 indique que la portion entre Marle et Avesnes-sur-Helpe ne bénéficiera pas du classement en route express limitée à 110 kilomètres par heure. Les acteurs économiques et les élus, dont la patience n'est pas récompensée, ont le sentiment de recevoir une proposition au rabais de la part de l'État.
Le paysage bocager de la Thiérache doit être préservé, mais il paraît possible de prolonger ce statut de route express entre Marle et Vervins, où l'activité économique mérite d'être irriguée.
La concertation doit se poursuivre. Dans quels délais la déclaration d'utilité publique sera-t-elle publiée, et quelle réponse sera apportée aux partisans d'une extension en voie rapide de la portion destinée à être limitée à 90 kilomètres par heure ?
Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité . - Le ministre chargé des transports a retenu le principe de l'aménagement homogène de la RN2 entre Laon et Avesnes-sur-Helpe, confirmant l'engagement de l'État pour ce territoire.
Le statut de route express implique de nombreuses contraintes sur l'artificialisation des sols et les émissions de CO2. Afin de concilier les divers enjeux et en accord avec la concertation du public en 2022, une approche différenciée en fonction des tronçons a été retenue.
Le statut express augmenterait l'emprise agricole du tracé entre Marle et Vervins alors que le trafic sur cette voie est faible. Le faible gain de temps engendré ne semble pas justifier un tel aménagement.
Les études se poursuivront sur l'ensemble de l'itinéraire, pour aboutir à une nouvelle concertation avec le public. La déclaration d'utilité publique pourrait être publiée à l'horizon 2025, sous réserve de consensus.
M. Antoine Lefèvre. - Les activités sont nombreuses entre Marle et Vervins. Cela fait cinquante ans que l'on évoque ce dossier, il est important de désenclaver la Thiérache.
Accidents ferroviaires dans les Ardennes
Mme Else Joseph . - Les accidents ferroviaires sont trop nombreux dans les Ardennes. À Donchery, un père de famille et sa fille ont été percutés par un train de marchandises. Une enquête pour homicide involontaire est en cours, mais les faits sont inquiétants : système de signalisation défaillant, passerelle pour piétons vétuste ne laissant pas d'autre choix que de traverser les voies. Le maire avait pourtant alerté depuis des années...
Cet accident tragique illustre l'entretien défaillant des structures ferroviaires. Depuis juin 2021, trois graves accidents ont eu lieu dans mon département. En guise de réponse, la SNCF se défausse sur les communes, qui n'ont ni les moyens ni les compétences pour sécuriser les voies. Les maires n'osent même plus demander de moyens de peur de voir leur gare supprimée. Voilà où on en est en France en 2023 !
En 2013, à la suite de l'accident de Brétigny, le plan Vigirail devait assurer la maintenance des voies. Je ne cherche pas à surfer sur un drame humain, mais qu'envisagez-vous pour qu'il soit mis fin à ces défaillances ? À quelle fréquence les contrôles sont-ils réalisés ? Il faut mettre la pression sur la SNCF pour que les travaux demandés depuis des années soient réalisés. N'attendons pas un drame supplémentaire.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité . - La sécurité ferroviaire est au coeur des préoccupations de tous les acteurs, Gouvernement, gestionnaires d'infrastructure, entreprises ferroviaires, Établissement public de sécurité ferroviaire.
Les accidents sur les passages à niveau sont rares, mais souvent très graves. L'État s'est engagé en 2019 dans un plan d'action ambitieux pour améliorer la sécurité des passages à niveau. Cette dernière relève de la sécurité routière, car 98 % des accidents sont dus à des comportements à risques des usagers de la route. Les circonstances de chaque accident sont spécifiques, et les enquêtes permettront de déterminer les causes des événements que vous évoquez.
Je réaffirme l'engagement du Gouvernement à ne pas transiger sur l'effort de modernisation de notre réseau ferroviaire, pour lequel le contrat de performance entre l'État et SNCF Réseau est historiquement élevé. Nous irons plus loin, en lien avec les préconisations du Conseil d'orientation des infrastructures.
M. le président. - Je vous remercie de veiller au respect de votre temps de parole, madame la ministre.
Mme Else Joseph. - Ces accidents sont récurrents dans les Ardennes. Nous en avons assez des grandes communications, il faut des actes, car nous parlons de drames humains. La SNCF n'a fait aucun geste envers la famille.
Modification des horaires de train Paris-Limoges
M. Christian Redon-Sarrazy . - Fin novembre, la SNCF a modifié les horaires de la ligne POLT, entre Paris, Orléans, Limoges et Toulouse, coupant la liaison entre l'ancienne région Limousin et la capitale une partie de la matinée, avec de lourdes conséquences pour les entreprises locales et les usagers.
Le déraillement d'un train de marchandises a arrêté le trafic pendant huit jours ; avec le givre, la dégradation du service a été inédite. Depuis trente ans, les usagers de cette ligne subissent modifications d'horaires, suppressions de trains, retards systématiques, accidents à répétition. Le groupe Legrand, une des seules entreprises du CAC 40 ayant son siège en province, a évoqué un départ. Le porcelainier Bernardaud fait état de conséquences sur son développement. De nombreuses entreprises signalent des pertes de chiffre d'affaires.
Assumez-vous une telle catastrophe pour nos territoires ? À court terme, la SNCF s'est engagée à améliorer significativement le fonctionnement des trains pendant l'hiver. Mais les usagers attendent le rétablissement des quatorze allers-retours existant jusqu'en 2015, la desserte des gares intermédiaires, le développement du fret et des trains de nuit. Pouvez-vous assurer que les délais annoncés seront tenus, et que de nouvelles rames seront livrées, pour engager la modernisation et mettre Limoges à deux heures et demie de Paris ?
Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité . - Je partage votre constat. L'enquête sur le déraillement d'un train de fret à Issoudun en décembre dernier est toujours en cours, et je remercie la SNCF de son travail.
La réduction du trafic de la ligne Paris-Limoges-Toulouse est due au faible nombre de locomotives racleuses mises à disposition par SNCF Réseau pour traiter le givre, malgré le concours de SNCF Intercités.
Le ministre chargé des transports a exprimé son exigence au gestionnaire d'infrastructure, qui devra revoir son parc de locomotives racleuses l'hiver prochain, dans l'attente des nouvelles rames Oxygène qui circuleront dès 2025.
Au-delà de ces problèmes saisonniers, le Gouvernement a demandé à la SNCF des actions concrètes pour améliorer le service sur cette ligne primordiale. Un groupe de travail technique réunira trimestriellement l'État, le groupe SNCF, le monde économique et associatif ainsi que les parlementaires et élus du territoire pour évaluer ces actions. Le ministre chargé des transports participera à la première réunion de ce groupe de travail à Limoges fin février.
M. Christian Redon-Sarrazy. - Nous attendons de vrais engagements, et non les annonces que la Première ministre actuelle avait faites à Limoges il y a quelques années. Pour moderniser la ligne, il faut d'ores et déjà commander de nouvelles rames.
Travaux sur la ligne Paris-Orléans-Limoges-Toulouse
M. Daniel Chasseing . - De l'Île-de-France à l'Occitanie en passant par le Centre-Val de Loire et la Nouvelle-Aquitaine, la ligne POLT, colonne vertébrale de plus de vingt départements, structure la vie économique de ces territoires. Mais encore faut-il que des trains y roulent !
Le déclassement de cette ligne pénalise l'économie de ces régions, notamment pour l'ancien Limousin. J'ai interrogé le Gouvernement à plusieurs reprises sur ce sujet, et je salue le remarquable travail de l'association « urgence ligne POLT ».
Cette ligne a été délaissée, car un TGV était envisagé entre Limoges et Poitiers. De manière plus réaliste, il faut rétablir les performances passées de la ligne, parmi les plus rapides de France dans les années 1980.
Nous refusons fermement que le POLT finisse sa course à Limoges, délaissant le nord du Lot et la Corrèze. Nous regrettons le report à 2025 des nouvelles rames annoncées à Limoges par Mme la Première ministre, alors ministre des transports.
Madame la ministre, l'État est le garant de l'égale répartition des chances entre les territoires de notre République, une et indivisible. Comment s'assure-t-il que la SNCF alloue à la ligne POLT les ressources nécessaires ? (Mme Nathalie Delattre applaudit.)
Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité . - Le Gouvernement porte une attention particulière à l'axe stratégique que représente la ligne POLT, qui va bénéficier d'investissements significatifs : l'État finance à hauteur 450 millions d'euros l'arrivée d'un nouveau matériel roulant, et les deux tiers du programme de modernisation de la ligne, à hauteur de 257 millions d'euros, le tiers restant étant apporté par les régions.
Par ailleurs, SNCF Réseau finance des travaux de régénération jusqu'en 2025 pour un montant total de 1,6 milliard d'euros. La trajectoire de ces travaux est tenue, près de la moitié de l'enveloppe étant dépensée.
SNCF Réseau déploie son plan grand froid dès le mois de novembre pour limiter les impacts liés au froid. En 2022-2023, le nombre de trains racleurs déployés a augmenté de 50 %. D'autres techniques de dégivrage, comme le réchauffage de la caténaire ou le décalage des circulations, sont aussi utilisées.
Le ministre chargé des transports a demandé à la SNCF la constitution d'un groupe de travail trimestriel pour améliorer la qualité de service. Le Gouvernement est engagé pour l'amélioration du service de la ligne. La suppression des dessertes au sud de Limoges n'est pas envisagée.
Rétablissement de la ligne Lille-Mulhouse
Mme Anne-Catherine Loisier . - La ligne Lille-Mulhouse, qui dessert notamment la métropole de Dijon et la vallée de Montbard, est suspendue depuis deux ans. Or ce trajet permettait aux entreprises d'être en lien avec l'Europe par le biais de Lille ou de l'aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle. Des modèles économiques dépendent de cette ligne, dont la fermeture définitive ne peut être acceptée par les chefs d'entreprise, qui ont demandé à la région Bourgogne-Franche-Comté de défendre leurs intérêts.
La Fédération nationale des associations d'usagers des transports s'est mobilisée pour faire examiner le rétablissement de l'offre entre Mulhouse, Marne-la-Vallée, Roissy-Charles-de-Gaulle et Lille, et la création d'un aller-retour supplémentaire reliant la Belgique, Roissy, Dijon, Besançon et la Suisse.
La SNCF invoque le manque à gagner lié à la crise sanitaire. Pour autant, le déficit de la ligne n'est pas avéré en dehors des périodes de crise. En revanche, le frein pour le développement international de ces entreprises est bien réel. Quelles sont les intentions du Gouvernement quant au rétablissement de cette ligne ?
Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité . - Le TGV Lille-Mulhouse, exploité librement par SNCF Voyageurs, enregistrait en 2019 un taux d'occupation de moins d'un tiers, et accusait un déficit élevé. Cette liaison a été suspendue en 2020 en raison de la crise sanitaire. Depuis, la tendance structurelle de baisse du trafic professionnel a encore accentué le déséquilibre financier.
SNCF Voyageurs est consciente des difficultés rencontrées par les clients, mais doit concilier gains de performance et développement des territoires. Des échanges ont déjà été engagés par SNCF Voyageurs avec les acteurs locaux. Le dimanche, un aller-retour supplémentaire entre Paris et Montbard a été créé depuis décembre 2022 ; en semaine, le trafic sur cette ligne restera inchangé en 2023, avec quatre allers-retours quotidiens.
La qualité de l'offre de la Bourgogne depuis et vers Paris permet de proposer plusieurs alternatives en correspondance. Les échanges se poursuivent en vue d'identifier une solution.
Mme Anne-Catherine Loisier. - Dijon est la seule métropole de France à ne pas bénéficier d'un accès à un hub international, et le préjudice est réel pour tout le département.
Conséquences de l'inflation sur les projets des collectivités locales
M. Pierre-Antoine Levi . - L'inflation a d'importantes conséquences sur les projets d'investissements locaux finançables au titre de la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) et de la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL). Communes et intercommunalités risquent de ne plus faire aboutir certains projets, faute de compenser le différentiel entre les montants initiaux et actualisés.
Or ces projets sont parfois vitaux pour les petites communes et nos territoires ruraux. La commune d'Orgueil avait obtenu 640 000 euros de financement sur un projet d'environ 820 000 euros. Compte tenu de l'inflation et de la relance du marché initial revenu infructueux, le surcoût des travaux a atteint 44 % et le reste à charge est passé de 180 000 à 480 000 euros. Cette augmentation de 300 000 euros n'est pas tenable !
Ces communes devront renoncer à leurs projets stratégiques. En parallèle, la préfecture du Tarn-et-Garonne aurait rendu 1 million d'euros de DETR non consommée.
Ne serait-il pas possible de redéployer les crédits annuels non consommés sur l'appel à projets suivant dans une dotation complémentaire destinée aux dossiers subissant d'importants surcoûts, ou d'intégrer les surcoûts générés par l'inflation dans la part subventionnable de la DETR et de la DSIL lorsque celle-ci n'est pas à son maximum ?
Quels moyens le Gouvernement prévoit-il pour soutenir l'investissement local dans ce contexte inflationniste ?
Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité . - En 2023, le soutien de l'État à l'investissement local est particulièrement élevé : 2 milliards d'euros en autorisations d'engagement et 4 milliards d'euros avec le fonds vert. Son soutien financier atteint jusqu'à 80 % des financements publics. Le fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) est mobilisé à hauteur de 16 % en moyenne, sur la base du montant définitif des dépenses éligibles.
En principe, il n'est pas possible d'augmenter les taux de subvention DETR ou DSIL figurant dans l'arrêté attributif, pour une bonne gestion budgétaire. Cela vaut aussi pour les projets connaissant des surcoûts en cours de réalisation.
Cependant, si le projet peut être scindé en plusieurs tranches distinctes, il est envisageable d'octroyer une nouvelle subvention correspondant à une nouvelle tranche ne portant pas sur la même assiette. Les deux dotations sont également cumulables, il est donc possible de solliciter l'autre.
Enfin, selon le décret du 8 avril 2020, le préfet peut déroger et modifier le taux de la subvention attribuée, à bon escient, en s'assurant d'un risque réel d'abandon du projet, et ce malgré l'absorption par le titulaire du marché d'une part de la hausse du coût. La puissance publique ne doit pas supporter seule l'intégralité de la hausse des prix.
La quasi-totalité des crédits mis à disposition des préfectures sont consommés chaque année. Selon le principe d'annualité budgétaire, les crédits sont ouverts uniquement sur l'année en cours, et les redéploiements ne s'effectuent qu'au sein d'un même exercice. Seules quelques dizaines de milliers d'euros - sur 2 milliards d'euros d'autorisations d'engagement - non consommées sont reportées en totalité sur l'exercice suivant.
M. Pierre-Antoine Levi. - En 2022, plus de 1 million d'euros de DETR non consommés ont été rendus, alors qu'ils auraient pu être redéployés sur le territoire, et notamment pour qu'Orgueil puisse revitaliser son centre-bourg.
Entretien des digues
M. Jean-Baptiste Blanc . - Caderousse, petit village du Vaucluse, est protégé par ses digues d'enceinte de 1856, classées monument historique. Constituées de pierres jointées, elles jouent encore un rôle majeur, ayant résisté aux crues successives, notamment celles de 2002 et 2003. Elles sont classées « ouvrage intéressant la sécurité publique » par l'arrêté préfectoral du 30 janvier 2006.
Malgré des travaux et un entretien réguliers, la structure se fragilise en raison de la prolifération des algues et des arbustes dans les joints, au risque de ne plus jouer son rôle protecteur.
Depuis le 1er juillet 2022, l'utilisation des produits phytosanitaires est interdite aux personnes publiques en vertu de la loi Labbé du 6 février 2014. La direction régionale de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt (Draaf) a estimé que le gestionnaire de l'ouvrage, donc la communauté de communes, devait « mettre en oeuvre des modalités alternatives » pour désherber avec des moyens thermiques, mécaniques ou de biocontrôle.
Nous sommes conscients des enjeux écologiques, et l'utilisation des produits phytosanitaires doit être raisonnée et limitée dans le temps et dans l'espace. Mais les alternatives actuelles ne permettent pas de traiter efficacement.
Des dérogations sont possibles en cas de danger sanitaire grave mettant en péril la pérennité du patrimoine historique. Le risque d'inondation n'entre-t-il pas dans ce cadre ?
Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité . - L'utilisation des phytosanitaires est interdite depuis le 1er janvier 2017 pour l'entretien des espaces verts, voiries et promenades.
Le Draaf a refusé la demande de dérogation du maire. Pour appliquer cette dérogation prévue à l'article L. 253-7 du code rural, il convient d'abord d'examiner les méthodes alternatives. Le brûlage est efficace pour lutter contre le maintien des racines dans les interstices des pierres.
J'ai demandé au directeur de l'eau et de la biodiversité d'examiner comment le plan Ecophyto pourrait être mobilisé pour soutenir le traitement de tout ou partie des remparts. Je vous invite à prendre contact avec le ministère de la transition écologique pour déterminer les conditions précises d'un tel soutien.
Vétusté des réseaux d'eau
Mme Nathalie Delattre . - Selon l'Office français de la biodiversité (OFB), environ 1 milliard de mètres cubes d'eau potable sont perdus chaque année, soit l'équivalent de 300 000 piscines olympiques. Alors que les sécheresses sont importantes, nous devons préserver cette ressource : sans eau, point de vie. Il faut donner aux collectivités locales les moyens de rénover les réseaux, parfois de véritables passoires.
À Langoiran, en Gironde, l'indice linéaire de perte représente 7 200 litres d'eau perdus chaque jour par kilomètre, soit 762 000 litres par jour sur l'ensemble du réseau ; et cela empire depuis 2012 !
Dans le Blayais, les pertes sont considérables. Le syndicat des eaux rénove cependant les canalisations, notamment celles en fonte qui sont la cause des eaux rouges, pour plus de 1,5 million d'euros entre 2022 et 2023 ; un coût rédhibitoire. Sans accompagnement de l'État, les communes pourront difficilement réaliser ces travaux, essentiels pour l'environnement. Quelles aides financières le Gouvernement envisage-t-il ? Le fonds vert aurait été une formidable opportunité, mais il ne semble pas être prévu pour cela.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité . - Le 29 septembre, un premier chantier de planification de la préservation de la ressource en eau a été lancé. La concertation a mobilisé les comités de bassin, le Comité national de l'eau (CNE) et les collectivités et aboutira fin janvier à un plan Eau collectif, avec une ambition politique commune autour de ces enjeux.
Dans le cadre du plan de relance, les agences de l'eau ont engagé 250 millions d'euros d'aides en 2021 en matière d'eau et d'assainissement, notamment pour la modernisation du réseau d'eau potable, la mise aux normes des stations de traitement, la rénovation des réseaux d'assainissement, le déraccordement des rejets d'eaux pluviales, et l'hygiénisation des boues d'épuration. Ces crédits renforcent les 4,5 milliards d'euros d'aides des onzièmes programmes d'intervention des agences, dans la lignée des engagements pris lors des Assises de l'eau.
En 2022 et 2023, deux relèvements respectifs de 100 millions d'euros du plafond de dépenses des agences ont renforcé l'appui aux collectivités. Le second accompagne les investissements des collectivités confrontées à une rupture ou un risque de rupture d'approvisionnement en eau potable l'été dernier.
Dans la loi de finances rectificative pour 2022, une dotation supplémentaire de 50 millions d'euros, ciblée sur les territoires fragiles ou les situations critiques, a été accordée aux agences de l'eau et à l'OFB pour lutter contre les fuites. Elle complète les « Aqua Prêts » de la Banque des territoires, dont le taux compétitif et l'échéance permettent d'accompagner tous les services publics d'eau et d'assainissement.
En 2016 et 2020, l'Agence de l'eau Adour-Garonne a accordé 615 000 euros d'aides pour le renouvellement des réseaux d'eau potable au syndicat des eaux du Blayais, qui a réalisé un diagnostic de réseau, effectué une sectorisation, et mis en place une modulation de pression. Le rendement du réseau atteint désormais 82,8 %.
Dépôt d'arme des policiers municipaux
M. Christian Bilhac . - Un policier municipal est obligé de déposer son arme dans le coffre du poste de police dans lequel il exerce. J'ai été interpellé par le maire de Cazouls-lès-Béziers. Face à la pénurie de sapeurs-pompiers, les policiers municipaux renforcent les effectifs des centres de secours. Mais le diable se niche dans les détails : selon l'article 114-5 de l'arrêté du 6 juin 2006 portant règlement général d'emploi de la police nationale, « le fonctionnaire de police est responsable en tout temps, en tous lieux et en toutes circonstances de son arme individuelle, pour autant que celle-ci n'ait pas été déposée à l'armurerie ou en un lieu sécurisé. » Ainsi, le policier municipal serait obligé de déposer son arme au commissariat et de procéder aux obligations administratives avant de se rendre à la caserne pour changer d'uniforme et intervenir, alors que l'urgence est là...
L'installation d'un coffre-fort sécurisé dont le seul dépositaire serait ce policier municipal serait-elle conforme à l'arrêté ? Envisagez-vous sinon d'assouplir la réglementation ?
Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité . - L'arrêté cité concerne la police nationale et non les policiers municipaux, qui relèvent de l'arrêté R.511-32 du code de sécurité intérieure. Celui-ci dispose que hormis lors du service ou en formation, les armes doivent être déposées « dans un coffre-fort ou une armoire forte, scellés au mur ou au sol d'une pièce sécurisée du poste de police municipale ». Être par ailleurs sapeur-pompier volontaire ne constitue pas une raison suffisante pour se soustraire à cette obligation. C'est un gage de sécurité important, et les casernes des Sdis ne sont pas conçues pour répondre aux mêmes exigences que les commissariats. Par conséquent, le Gouvernement n'envisage pas de modifier la réglementation.
M. Christian Bilhac. - Il manque des sapeurs-pompiers volontaires en milieu rural, et les casernes des Sdis ne sont pas souvent attaquées. Une telle dérogation faciliterait le secours aux victimes.
État de la flotte de Canadair
Mme Françoise Dumont . - Le dérèglement climatique accentue les besoins pour endiguer les départs de feux de forêt, afin d'éviter de nouveaux mégafeux. Les Canadair sont un outil indispensable. Le 7 mai 2020, la Direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC) a demandé à la Direction générale de l'armement (DGA) de lancer un marché d'acquisition de deux bombardiers d'eau amphibies. Ces appareils devaient être financés par le programme européen visant la création d'une réserve de sécurité civile européenne (RescEU) à hauteur de 90 % - désormais 100 %. Deux avions supplémentaires pouvaient être commandés sur fonds propres de la DGSCGC.
Le 28 octobre 2022, le Président de la République a annoncé le renouvellement intégral de la flotte de Canadair, qui passerait également de douze à seize appareils, dont les deux du programme RescEU, « d'ici la fin du quinquennat ».
Au-delà des effets d'annonce, il manque des autorisations d'engagement dans la loi de finances pour 2023 afin de financer ces Canadair. Le calendrier ambitieux est contradictoire avec les propos du ministre de l'intérieur et les réponses de la DGSCGC au dernier questionnaire budgétaire, qui prévoyaient un renouvellement dans le courant de la décennie 2030.
Pourriez-vous nous préciser l'état actuel de la flotte de Canadair, le nombre de commandes passées et les dates de livraison, les commandes envisagées et les avions déjà livrés, ainsi que les mesures que le Gouvernement envisage pour augmenter substantiellement les capacités de notre flotte aérienne pour lutter contre les feux de forêt ?
Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité . - La France a su anticiper le dérèglement climatique pour mieux gérer les crises. La flotte des douze Canadair est indispensable, et est renforcée par le mécanisme de protection civile de l'Union (MPCU) et le programme RescEU. À terme, douze avions constitueront cette flotte européenne commune à la France, l'Espagne, l'Italie, la Croatie, la Grèce et le Portugal, et cofinancée par l'Union, auxquels s'ajouteront dix appareils acquis en propre par certains de ces États.
La DGSCGC a demandé deux avions amphibies bombardiers d'eau à la DGA, sur la base d'un cofinancement validé par la Commission. Deux avions supplémentaires pourraient être acquis sur fonds propres de la DGSCGC, portant à seize le nombre d'appareils.
Le 28 octobre, le Président de la République a annoncé la modernisation de la flotte de Canadair et l'acquisition de quatre aéronefs supplémentaires, la portant à seize.
Après des négociations engagées en raison du retard de la société De Havilland Canada, le projet a été débloqué et la chaîne de production des nouveaux avions a été lancée. Le glissement du calendrier de livraison reste encore à déterminer.
La France dispose de trois Beechcraft pour la reconnaissance et la coordination et une flotte d'avions Dash pour le guet et l'attaque des feux naissants. Le huitième et dernier appareil sera livré au premier semestre 2023. Par ailleurs, nous négocions avec la Commission pour compléter cette flotte avec deux hélicoptères lourds bombardiers d'eau de 4 000 litres, finançables par le programme RescEU.
Dans le cadre du renouvellement de la flotte d'hélicoptères EC145 de la sécurité civile, la DGSCGC veut équiper les nouveaux appareils en capacité de largage d'eau de 800 à 1 000 litres.
M. le président. - Quarante-trois questions orales sont inscrites à notre ordre du jour : les derniers orateurs devront prendre la parole à 12 h 45 si tout le monde, et notamment madame la ministre, laisse glisser son temps de parole en milieu de matinée. C'est particulièrement discourtois envers nos collègues. Il n'est pas difficile, dans un cabinet ministériel, de répéter une réponse - elles sont toutes écrites ! - pour vérifier qu'elle tient en deux minutes.
Renouvellement des papiers d'identité des rapatriés d'Algérie
Mme Valérie Boyer . - Les rapatriés d'Algérie rencontrent des difficultés pour renouveler leurs papiers d'identité. Il y a quelques jours, Chrystel, habitante de Loire-Atlantique, déjà détentrice d'une carte d'identité, devait prouver qu'elle était bien française pour la renouveler. Issue d'une famille de pieds-noirs, elle doit demander, en plus de son extrait de naissance, celui de ses grands-parents et parents au ministère des affaires étrangères et leurs actes de mariage. Ce cas n'est pas isolé, il m'est arrivé d'être dans cette situation troublante et même absurde.
En décembre 2020, le préfet de la Sarthe expliquait que pour renouveler leurs pièces d'identité, les Français nés en Algérie avant la proclamation de l'indépendance en 1962 pouvaient recevoir des demandes de pièces complémentaires.
Fille et petite-fille de Français d'Algérie, je partage leur incompréhension et leur tristesse. Sylvie, dans l'Eure, a vécu cette situation comme une humiliation à sa famille obligée de quitter l'Algérie en catastrophe, une insulte envers son père qui a combattu dans l'armée française. Pourquoi leur faire vivre une nouvelle humiliation ?
Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité . - Les rapatriés d'Algérie disposant de la nationalité française doivent parfois prouver leur nationalité à l'occasion du renouvellement de leur titre. Or une fois que la nationalité française a été prouvée, et que le titre est périmé depuis moins de cinq ans, les pièces du dossier demeurent dans le fichier des titres électroniques sécurisés (TES) : il n'est pas besoin de renouveler ces éléments. En revanche, lorsque le titre est échu depuis plus de cinq ans, il faut prouver sa nationalité, car ces éléments ne sont plus conservés dans le fichier TES, et parfois les titres produits sont contrefaits.
Des consignes très strictes seront repassées pour les rapatriés d'Algérie disposant de la nationalité française.
Mme Valérie Boyer. - Je suis consternée. En 2008, le ministère de l'intérieur avait précisé que « lors du renouvellement de leur carte nationale d'identité ou de leur passeport, les rapatriés d'Algérie n'ont pas à produire de certificat de nationalité française. » Or vous venez de nous expliquer que l'inverse perdure...
Contrôle des prix à Wallis-et-Futuna
M. Mikaele Kulimoetoke . - J'ai déjà demandé au mois de juillet dernier une adaptation du dispositif de l'aide au fret pour Wallis-et-Futuna et la création d'un service de contrôle des prix. Alors que 18 % de notre population est salariée, l'indice des prix à la consommation avait augmenté de 4,6 % à la fin 2022. Le commerçant qui achète un container d'eau minérale doit payer cinq fois son prix d'achat pour l'amener de la métropole à Wallis. Le prix des produits s'envole de manière incontrôlable, car il dépend de compagnies maritimes qui ont le monopole de la desserte. À cela s'ajoute le laxisme des autorités qui tolèrent depuis 2017 l'application par la chefferie coutumière d'une taxe non réglementaire de 18 % sur les produits de première nécessité.
De plus, la banque de l'île, la BWF, asphyxie l'économie en facturant des frais exorbitants, en refusant d'ouvrir des comptes ou en les clôturant abusivement.
L'État est-il prêt à créer un service de contrôle des prix et à cofinancer l'achat d'un bateau exploité par le territoire pour le fret et le transport des passagers ?
Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité . - Le territoire a bénéficié dans la loi de finances rectificative pour 2022 d'une aide alimentaire exceptionnelle. À cela s'ajoute un accord de modération des prix signé la même année, comprenant un bouclier qualité prix qui s'applique à 83 produits de grande consommation, en vigueur dans 18 points de vente. Cela a été rendu possible par les efforts des opérateurs économiques, et notamment du principal importateur grossiste, qui ont accepté de réduire leurs marges.
Nous comptons poursuivre ces efforts en nous inspirant du Oudinot du pouvoir d'achat lancé dans les Drom pour obtenir la contribution de nouveaux opérateurs, notamment les acteurs du fret.
Concernant le coût de l'énergie, Wallis-et-Futuna bénéficie de la compensation du service public de l'électricité (CSPE) et, à ce titre, des tarifs réglementés de vente de l'électricité, ainsi que du bouclier tarifaire.
Réseaux d'éducation prioritaire en zones rurales fragiles
M. Olivier Rietmann . - La définition de la carte de l'éducation prioritaire s'appuie principalement sur l'indice de position sociale (IPS), qui prend notamment en compte la catégorie socioprofessionnelle des parents, les conditions matérielles de vie ou encore les pratiques culturelles dont bénéficie l'élève. Parmi les critères, figure également la concentration de faibles revenus des élèves résidant dans les quartiers prioritaires.
Or la pauvreté est moins densément concentrée, mais tout aussi présente, dans les zones rurales. Il faut prendre en compte la géographie sociale. Il y a, certes, une allocation progressive des moyens pour les établissements écartés du réseau REP, mais nous sommes loin des moyens - dédoublement des classes, primes pour le personnel d'éducation notamment - accordés à ce réseau. Quand les écoles des secteurs ruraux pauvres bénéficieront-elles des mêmes moyens que celles des villes ?
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État chargée de la jeunesse et du service national universel . - Vous êtes élu d'un territoire qui ressemble au mien. Dans le prolongement de l'excellent rapport des sénateurs Laurent Lafon et Jean-Yves Roux sur les nouveaux territoires de l'éducation, nous devons nous appuyer sur les collectivités territoriales pour mieux tenir compte de l'isolement de certains territoires. Des contrats locaux d'accompagnement ont été expérimentés dans trois académies dès la rentrée 2021. Des moyens supplémentaires sont également prévus dans le cadre des territoires éducatifs ruraux.
Grâce au volontarisme des élus locaux, en particulier dans votre territoire, ces mesures ont été étendues dès la rentrée 2022 à dix académies.
Citons également l'école ouverte, les vacances apprenantes, les cordées de la réussite. Mais l'égalité des chances, c'est aussi l'accompagnement des élus locaux qui veulent maintenir une classe ouverte. La réforme de la carte scolaire, qui date de 2014, est le rendez-vous à ne pas manquer.
M. Olivier Rietmann. - Madame la ministre, les choses sont simples : 70 % d'élèves n'ont pas droit aux avantages de la REP uniquement parce qu'ils sont dans les territoires ruraux, à cause du critère de concentration de la pauvreté. Supprimez ce critère.
Séjours scolaires
M. Cédric Vial . - Les séjours éducatifs « classe de neige ou de découverte » donnent du sens aux apprentissages par le contact direct avec un nouvel environnement. Or si les réservations reprennent après le covid, les difficultés d'organisation demeurent. Ainsi, la procédure d'autorisation est longue et fastidieuse. Une fois le dossier finalisé par l'enseignant, il faut attendre jusqu'à trois mois pour obtenir l'autorisation qui est, de plus, régulièrement refusée sans justification par les directions des services départementaux de l'éducation nationale (DSDEN).
En 2019, avant la crise covid, une circulaire pour simplifier la procédure d'autorisation était en préparation. À ce jour, elle n'est toujours pas parue. Le Gouvernement va-t-il procéder à cette simplification ?
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État chargée de la jeunesse et du service national universel . - Je connais votre engagement pour faire découvrir aux élèves le magnifique territoire de la Savoie. Nous avons commencé à réduire les délais. Il faut en effet aider les enseignants, et je m'engage à vos côtés pour permettre à un maximum de jeunes de partir au ski ou à la montagne.
Le ministère de l'éducation nationale a créé un catalogue national des structures d'hébergement, pour faire gagner du temps aux enseignants. Nous avons aussi labellisé les transporteurs : il est important que ceux-ci parlent français et sachent accompagner des jeunes. Il faut simplifier l'organisation, mais aussi promouvoir les voyages scolaires auprès des familles.
Notre objectif est que l'autorisation soit délivrée au moins deux semaines avant le départ quand la demande est déposée dans le même département, et trois semaines dans le cas contraire.
M. Cédric Vial. - Je ne doute pas de votre implication, mais nous avons besoin d'aides concrètes et de directives claires. Le refus provient beaucoup plus souvent du Dasen (directeur académique des services de l'éducation nationale) du département d'accueil que de celui du département de départ.
Carte scolaire en Haute-Vienne
Mme Isabelle Briquet . - La carte scolaire en préparation annonce une rentrée compliquée en Haute-Vienne. L'académie de Limoges devrait rendre 23 postes dans le premier degré, 18 dans le second. Nous avons déjà subi 11 suppressions de postes et 25 suppressions de classes. Fin 2022, il y a eu jusqu'à 100 classes sans enseignant.
Dans ces conditions, comment mettre en place le dédoublement dans les grandes sections ? Compte tenu des demandes ministérielles récurrentes, de l'impossibilité d'y répondre sur le terrain et du constat que je viens d'évoquer, ne pensez-vous pas qu'un moratoire sur la fermeture de classes s'impose ? Comment peut-on améliorer la qualité du service de l'Éducation nationale avec une baisse des moyens humains ?
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État chargée de la jeunesse et du service national universel . - L'Éducation nationale prend acte d'une tendance démographique qui est malheureusement à la baisse, moins 500 000 élèves d'ici à 2027. Malgré cela, le Gouvernement a fait le choix de limiter les baisses d'emplois à 0,19 %, soit 2 000 emplois.
Dans la Haute-Vienne, on compte 2 378 élèves en moins entre 2017 et 2022, mais 54 emplois en plus, soit 21,7 élèves par classe en moyenne, contre 23,4 en 2017.
La carte scolaire sera l'occasion, avec les élus, de porter un regard spécifique et plus juste sur votre territoire. Vous pouvez compter sur la mobilisation du ministre pour porter un regard individualisé sur les territoires.
Mme Isabelle Briquet. - Je vous remercie, mais votre réponse recèle une contradiction. La Haute-Vienne, ce sont 63 élèves en moins, mais pour 247 écoles, les chiffres ne sont pas si importants. Dans le même temps, il y a eu le dédoublement des CP, des CE1, et maintenant des grandes sections, avec des moyens insuffisants. L'encadrement dans mon département est inférieur à la moyenne nationale. Répondez à la détresse des enseignants et au désarroi des parents.
Retraite progressive et arrêts maladie longs
M. Michel Savin . - Le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2020 a limité les indemnités journalières pouvant être touchées par les personnes cumulant emploi et retraite.
Or il semble que les caisses primaires d'assurance maladie (CPAM) appliquent également cette mesure aux salariés en situation de retraite progressive. Ces derniers, quand ils sont en situation d'arrêt maladie prolongé ou d'arrêts répétés, ne touchent plus de salaire ni d'indemnités maladie. Parfois, les CPAM ont réclamé tardivement les indemnités indues, contraignant les personnes concernées à prendre précipitamment leur retraite.
Au moment de repousser l'âge de la retraite, le Gouvernement prévoit-il de modifier l'article L. 323-2 du code de la sécurité sociale pour en exclure les retraités progressifs ? Cette modification pourrait-elle avoir un effet rétroactif ?
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État chargée de la jeunesse et du service national universel . - La LFSS 2020 limite à soixante jours la durée de perception des indemnités journalières en cumul emploi-retraite. Le projet de loi qui sera présenté lundi exclut les assurés en retraite progressive de ce dispositif. Cette mesure s'inscrit dans l'objectif d'amélioration et de généralisation des dispositifs de transition entre l'activité et la retraite. Le ministre du travail et moi-même nous tenons à votre disposition pour apporter les éventuels compléments d'information nécessaires.
M. Michel Savin. - Nous veillerons à ce que la modification figure bien dans le texte. Vous n'avez pas répondu sur l'effet rétroactif : des centaines de milliers de personnes se trouvent en difficulté à cause de cette disposition.
Calcul des retraites agricoles
Mme Monique Lubin . - La loi du 3 juillet 2020 qui porte à 85 % du Smic la retraite des chefs d'exploitation agricole ayant effectué une carrière complète est entrée en application le 1er novembre 2021. Or des retraités agricoles me font savoir que la Mutuelle sociale agricole (MSA) prend en compte la bonification pour enfant dans le calcul des revenus, ce qui réduit considérablement la portée de la loi. Que compte faire le Gouvernement ?
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État chargée de la jeunesse et du service national universel . - Vous faites référence à l'écrêtement du complément différentiel de retraite obligatoire. Nous sommes particulièrement attachés aux conditions de vie de nos agriculteurs, c'est pourquoi le Gouvernement a défendu en 2020 et 2021 les revalorisations des retraites agricoles votées par votre assemblée.
Ce complément porte les droits des non-salariés agricoles à un montant minimal, tout en tenant compte des autres pensions personnelles perçues par l'assuré. Ainsi, si la somme des pensions personnelles et du complément différentiel dépasse 85 % du Smic net agricole, le complément est réduit à due concurrence du dépassement. Les bonifications pour enfant sont ainsi prises en compte dans ce calcul. Le mouvement de revalorisation des petites pensions se poursuivra dans la réforme des retraites.
Mme Monique Lubin. - La revalorisation ne vient pas du Gouvernement, puisqu'elle a été introduite par la proposition de loi Chassaigne ! Pourquoi pénaliser ceux qui ont eu des enfants ? C'est le monde à l'envers. J'espère que dans ce texte auquel vous trouvez tant de vertus, vous corrigerez cela...
Postes à horaires atypiques dans la fonction publique territoriale
M. Pierre Médevielle . - Les fonctionnaires territoriaux à la retraite qui souhaitent travailler dans le secteur public ne peuvent le faire après 67 ans pour les générations nées à partir de 1955, sauf statut particulier.
Or de nombreuses collectivités territoriales peinent à recruter des agents pour des missions à horaires atypiques, tels que le transport scolaire - une heure le matin, une heure l'après-midi, quatre jours par semaine. Serait-il possible, en l'absence d'autres candidats, d'envisager un recrutement dérogatoire de fonctionnaires retraités de plus de 67 ans ?
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État chargée de la jeunesse et du service national universel . - À Nantes aussi, nous rencontrons des difficultés de recrutement quand les horaires sont atypiques...
Nous devons garantir la continuité du service public tout en respectant les garanties statutaires.
Stanislas Guerini et Dominique Faure travaillent actuellement, en coordination avec les employeurs territoriaux, sur l'attractivité de l'emploi public en envisageant des évolutions de l'accès, des parcours, des rémunérations et des conditions de travail.
Notre réforme des retraites prévoit un recul de l'âge limite à 70 ans pour les agents publics. Cela devrait répondre en partie à votre préoccupation.
Prise de rendez-vous pour les demandes de visas
M. Yan Chantrel . - Depuis quelques années, les prises de rendez-vous sont externalisées à des prestataires privés, d'où des inégalités de traitement qui nuisent à l'image de notre pays.
Les demandes de visas des conjoints de ressortissants français, autrefois gratuites, sont désormais soumises à des frais parfois importants au regard du niveau de vie local, notamment en Asie ou en Afrique. Ces prestataires privés offrent même des services additionnels sous les vocables trompeurs d'« offre premium » ou « VIP » à des prix exorbitants. Ces pratiques, qui peuvent laisser croire, à tort, à un traitement prioritaire, sont intolérables.
Enfin, sont apparues des officines qui préemptent les créneaux auprès du prestataire pour les revendre à des prix abusifs. La pénurie qu'elles provoquent à dessein laisse penser aux demandeurs qu'elles sont le seul recours pour obtenir un rendez-vous.
Que compte faire le Gouvernement pour mettre fin à ces dérives, voire à ces escroqueries, et pour rétablir l'égalité de traitement des demandeurs de visa ?
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État chargée de la jeunesse et du service national universel . - Pour avoir vécu longtemps au Maroc, je connais la problématique...
Les visas pour les conjoints de Français sont délivrés gratuitement : en cas d'externalisation, seuls les frais de service sont à régler au prestataire. Les conjoints de Français sont prioritaires. Dans la majorité des pays, des créneaux de rendez-vous sont clairement identifiés et ils peuvent déposer leur demande sans rendez-vous.
Si la règle est que les demandeurs ne peuvent être accompagnés, les postes consulaires peuvent faire des exceptions. Des consignes ont été passées pour qu'ils fassent preuve de souplesse s'agissant des conjoints de Français.
Des mesures ont été prises contre la préemption de rendez-vous par les officines - prépaiement des frais de service, blocage des adresses IP récurrentes - mais le recours à une intermédiation pour les démarches administratives est très répandu dans certains pays, et n'y est souvent pas illégal.
M. Yan Chantrel. - J'apprécie votre volonté d'agir ; je suis disponible pour travailler avec vous sur ce sujet.
Calcul de la dotation globale de fonctionnement
M. Philippe Bonnecarrère . - Labastide-de-Lévis, commune fort honorable du Tarn de près de mille habitants, a perçu en 2022 une dotation globale de fonctionnement (DGF) difficilement explicable : 58 euros par habitant. J'ai envoyé à Bercy un tableau qui fait apparaître un écart d'un à six entre Labastide et la commune de son intercommunalité ayant eu le plus haut niveau de DGF. La commune la moins dotée après elle perçoit le double !
Nous avons eu beaucoup de mal à obtenir des réponses. Une réponse récente - qui ne convient pas du tout - met en avant les revenus dans la commune, mais sans justificatif, ainsi que les valeurs locatives, dont le Gouvernement sait bien qu'elles sont obsolètes. En résumé, nous avons le sentiment d'une profonde injustice. Pourriez-vous apporter une réponse constructive à cette commune ?
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État chargée de la jeunesse et du service national universel . - Il ne faut pas laisser s'installer des ressentis d'injustice : c'est notre pacte social qui est en jeu.
En 2022, le potentiel financier par habitant de la commune est passé de 753 à 809 euros, en grande partie à cause de la modification de la répartition de l'enveloppe de compensation de l'intercommunalité : à partir de 2022, celle-ci a en effet reversé 5,8 millions d'euros à ses communes membres. La DGF de Labastide est ainsi passée de 66 591 euros à 56 195 euros. La commune dispose depuis 2022 d'un niveau de ressources fiscales réelles et potentielles globalement supérieur à la moyenne de sa strate, avec 809 euros par habitant contre 757. La commune a donc subi en 2022 un écrêtement de sa dotation forfaitaire, mais ce mécanisme, suspendu par la loi de finances pour 2023, ne l'affectera pas cette année.
Je me tiens évidemment à votre disposition pour plus d'informations.
M. Philippe Bonnecarrère. - Je ne suis pas convaincu par l'argument relatif à l'agglomération : nous ne constatons pas d'effets homogènes sur toutes les communes membres.
Quand une équation aboutit à un résultat absurde, soit la formule n'est pas bonne, soit les données ne le sont pas. C'est ce qu'il faudrait vérifier.
Financement du service public d'élimination des déchets
M. Louis-Jean de Nicolaÿ . - Les communes et leurs groupements ont le choix entre trois modes de financement du service public d'élimination des déchets : le budget général, la redevance d'enlèvement des ordures ménagères (Reom) et la taxe d'enlèvement des ordures ménagères (Teom). Alors que la redevance est calculée en fonction de l'importance du service rendu, la taxe, perçue avec la taxe foncière, varie en fonction de la valeur locative cadastrale du bien, comprenant les garages, les emplacements de parking et les piscines, dont l'utilisation n'entraîne généralement pas d'ordures ménagères. Des bacs et collectes de ceux-ci sont prévus même pour ces locaux, avec un coût non négligeable.
Pourquoi ne pas envisager une exonération pour les contribuables dont la propriété n'est pas source de déchets ?
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État chargée de la jeunesse et du service national universel . - Je vous apporterai une réponse complémentaire par écrit. Vous avez noté, à juste titre, que les biens non habités comme les garages étaient pris en compte dans le calcul de la Teom, celle-ci étant une imposition et non une redevance. C'est la contrepartie de la simplicité de la Teom pour les collectivités.
Afin d'encourager la réduction et le tri des déchets, une tarification incitative peut être instaurée par l'introduction d'une part variable qui dépend de la quantité et de la nature des déchets - part qui serait donc nulle pour les locaux ne produisant pas de déchets.
Plusieurs mesures encouragent cette tarification. L'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) fournit ainsi expertise, conseil et aide financière aux collectivités locales.
Plan de fermeture du réseau téléphonique en cuivre
Mme Laurence Garnier . - L'arrivée de la fibre optique justifie un plan de fermeture du réseau téléphonique en cuivre en deux temps : une transition jusqu'en 2025, puis une fermeture de 2026 à 2030.
Ce plan pose deux questions aux élus des communes, et notamment au syndicat d'énergie de Loire-Atlantique (Sydela) : qu'en est-il des services d'urgence et des lignes téléphoniques qui utilisent aujourd'hui le réseau cuivre, comme les gymnases, la téléalarme pour les personnes âgées, les ascenseurs ou les centres de traitement des appels d'urgence ? Même si les communes peuvent être propriétaires d'infrastructures passives comme des fourreaux, est-ce bien Orange qui procédera à ses frais au retrait des câbles sans impact financier pour les communes ?
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État chargée de la jeunesse et du service national universel . - Orange a présenté son plan d'extinction du réseau cuivre. Celle-ci est bénéfique notamment pour des raisons écologiques, la fibre étant trois fois moins énergivore que le cuivre.
La transition doit cependant s'accompagner des garanties nécessaires de disponibilité, de qualité, et de prix abordable.
Vous avez même parlé de cas particuliers tels que la téléassistance pour les personnes âgées. Certains services sont déjà compatibles avec la voix sur IP et donc avec Internet.
L'ensemble des fédérations ont été informées dès 2015 du programme de fin du réseau téléphonique commuté (RTC). Les solutions sont donc clairement identifiées aujourd'hui : soit une migration sur la fibre, soit la technologie GPRS/GSM.
Une circulaire a rappelé aux préfectures qu'elles devaient veiller à une information la plus transparente possible auprès des élus locaux et de nos concitoyens.
Mme Laurence Garnier. - Vous m'avez rassurée sur le premier volet, mais vous ne m'avez pas répondu sur le financement du démantèlement du réseau et la charge financière éventuelle pour les communes.
Déploiement de la fibre
M. Jean-Raymond Hugonet . - Le plan France Très Haut Débit (FTHD) fête ses dix ans. Si le déploiement de la fibre a incontestablement progressé, les dysfonctionnements sont légion. Dans l'Essonne, nous sommes raccordés à 93 %, mais dans la pratique, les interventions sont bâclées, les armoires de connexion dégradées, les déchets de chantier abandonnés...
En cause : la multiplicité des réseaux et des acteurs ainsi qu'un recours excessif à plusieurs niveaux de sous-traitance. En cas de problème, chacun se renvoie la balle.
Le président de la communauté d'agglomération Paris-Saclay a saisi à deux reprises l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep) sur les dysfonctionnements du réseau THD, dont les dégradations volontaires commises par les sous-traitants. En vain. L'agglomération a donc déposé plainte, et une enquête judiciaire est en cours... depuis bientôt deux ans !
Le déploiement de la fibre doit être mieux encadré et les procédures revues en profondeur. Si l'Arcep n'agit pas, donnons aux collectivités les moyens d'obtenir des réparations ! Comment comptez-vous soutenir les élus et les populations ?
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État chargée de la jeunesse et du service national universel . - En effet, les dysfonctionnements sur la qualité d'exploitation des réseaux fibre pénalisent les usagers. Ils sont dus au rythme très élevé de raccordements annuels, à des réseaux FTTH (Fiber to the home) historiquement mal dimensionnés, notamment dans l'Essonne et au recours à un grand nombre de sous-traitants peu formés.
Face à l'accroissement des signalements, le Gouvernement et l'Arcep ont saisi la filière qui a formulé des propositions d'amélioration : renforcement de la qualité des interventions ; renforcement des contrôles, par la transmission des plannings et des comptes rendus d'intervention ; reprise des infrastructures dégradées. Plusieurs opérateurs ont déjà notifié à l'Arcep un plan de reprise de mille points de mutualisation, correspondant à 450 000 locaux. D'autres sont à prévoir. Dans l'Essonne, les deux opérateurs d'infrastructures, XpFibre et Altitude, se sont engagés à reprendre environ 200 points de mutualisation.
Le Gouvernement veille à la mise en oeuvre et en a confié le contrôle à l'Arcep. Des points de suivi réguliers sont effectués en présence des associations d'élus.
L'annonce d'un droit au très haut débit garantira à l'ensemble de nos concitoyens une connexion de qualité nécessaire aux usages tant personnels que professionnels.
M. Jean-Raymond Hugonet. - Le plateau de Saclay est un cluster d'excellence, il est urgent de mettre fin à ce bricolage !
Cancer du sein et prothèses capillaires
Mme Élisabeth Doineau . - « Octobre rose » illustre la mobilisation contre le cancer du sein - cancer le plus fréquent en France et première cause de décès par cancer chez la femme. Si le programme national de dépistage permet une détection précoce et réduit la mortalité, les traitements demeurent lourds.
Les protocoles de chimiothérapie entraînent une alopécie difficile à vivre pour les patientes, or la prise en charge des prothèses capillaires est lacunaire. J'ai été interpellée par M. Pascal Beau, directeur d'Espace Social Européen, qui rejoint dans cette analyse les élus de l'assurance maladie, des associations de patients, de la Ligue contre le cancer et de la Mutualité française.
Malgré une amélioration depuis 2019, il subsiste un défaut d'information. La difficulté d'accès aux prothèses composées de cheveux naturels et surtout leur coût contraignent les patientes à un renouvellement régulier qui accroît le reste à charge.
Seules 40 % des personnes éligibles bénéficient d'une prise en charge. Selon la Cnam, une prise en charge totale coûterait entre 15 et 20 millions d'euros, à partager entre le régime obligatoire et les complémentaires.
Madame la ministre, quand comptez-vous prendre un acte réglementaire pour inclure les prothèses capillaires dans le panier de soins prothétiques pris en charge à 100 % ? Avez-vous prévu de faire évoluer la nomenclature des prises en charge ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé . - Veuillez excuser François Braun.
Je salue la campagne d'Octobre rose, mais c'est douze mois par an que le ministère de la santé se mobilise contre le cancer du sein !
La prise en charge des prothèses capillaires a été revue en 2019, avec deux catégories : une première sans reste à charge, remboursée à 350 euros ; une seconde avec une prise en charge de 250 euros et un prix limite de vente à 700 euros. L'ancienne nomenclature prévoyait un tarif de remboursement de 76,22 euros TTC, sans prix limite.
Aujourd'hui, 60 % des patientes s'orientent toujours vers des prothèses avec un reste à charge important. Par ailleurs, le taux de recours global reste faible.
Un amendement parlementaire à la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 devrait améliorer la prise en charge. Il s'agira d'abord de mieux connaître la situation et de comprendre le phénomène de non-recours, puis de travailler sur les caractéristiques techniques des prothèses, en lien avec les associations, industriels et distributeurs, pour mieux définir les besoins. Les tarifs et prix limites pourraient alors être revus, afin de mieux calibrer la prise en charge par l'assurance maladie, et le cas échéant par les complémentaires.
Des textes réglementaires devraient être publiés d'ici au deuxième semestre 2023.
Cancers pédiatriques en Loire-Atlantique
M. Yannick Vaugrenard . - Dans un rayon de quinze kilomètres autour de Sainte-Pazanne, en Loire-Atlantique, vingt-cinq enfants ont été atteints de cancers en six ans, sept en sont morts.
En novembre 2019, l'étude menée par l'Agence régionale de Santé (ARS) et Santé publique France confirmait un nombre de cancers pédiatriques élevé. Mais après enquêtes supplémentaires, ces deux agences ont conclu, en septembre 2020, à l'absence de foyer de cancers pédiatriques dans ce secteur...
Permettez-nous de douter de la qualité et de l'objectivité de cette étude. En effet, seuls treize cas sur vingt-deux recensés ont été retenus, les plus de 15 ans ayant été écartés ; des dossiers ont été inversés ; le périmètre géographique retenu était incompréhensible. Cela alimente un climat de défiance vis-à-vis des institutions sanitaires.
La réponse de M. Braun, en date du 3 janvier, à mon courrier de septembre 2022, reprenant uniquement le discours de l'ARS, n'est pas acceptable.
Lorsque le petit Alban en arrive à demander à sa maman « qui doit vivre et qui doit mourir ? », il est urgent de faire toute la lumière, en ordonnant une nouvelle étude bien plus rigoureuse, cohérente et crédible.
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé . - Je comprends votre inquiétude et celle des familles. Les cancers pédiatriques, qui touchent environ 2 500 jeunes patients par an, suscitent un légitime sentiment d'injustice. Le ministère de la santé est mobilisé pour mieux prévenir, soigner et accompagner les malades et leurs proches.
L'ARS et Santé publique France ont déployé des moyens importants pour déterminer la cause de ces cancers pédiatriques dans le pays de Retz. L'analyse statistique spatio-temporelle n'a pas montré d'anomalie épidémiologique locale.
Aussi, une surveillance renforcée des cancers pédiatriques, sur la période 2020-2023, a été engagée dès septembre 2020, en lien avec les CHU d'Angers et de Nantes ainsi que le registre national des cancers de l'enfant.
Le point d'étape de novembre 2022 suggère une situation épidémiologique stable, avec une absence de nouveau cas diagnostiqué depuis juillet 2021. Ces résultats ne conduisent donc pas à reconsidérer la décision prise en 2020 de mettre fin aux investigations. La poursuite de cette surveillance renforcée sera évaluée fin 2023. Nous vous tiendrons informé.
Les préoccupations de la population en matière de santé environnementale sont traduites dans le contrat local de santé de Pornic agglo Pays de Retz, dont le premier axe stratégique vise la promotion d'un environnement favorable à la santé, dans une approche préventive de lutte contre les cancers.
M. Yannick Vaugrenard. - Ce changement de pied de l'ARS et de Santé publique France est incompréhensible pour les familles. Je souhaite être reçu au ministère de la santé avec Mme Laurence Huc, directrice de recherche à l'Inrae et Mme Marie Thibaud, du collectif Stop aux cancers de nos enfants, afin de mettre les choses à plat et éviter les incompréhensions qui peuvent être redoutables.
Déserts médicaux dentaires
M. Stéphane Sautarel . - Les inégalités d'accès aux soins bucco-dentaires touchent tout particulièrement les territoires ruraux. Les mesures incitant les professionnels de santé à s'installer dans les zones sous-dotées sont insuffisantes, voire inopérantes.
L'Observatoire national de la démographie des professions de santé recommandait déjà en 2021 la formation de 7 265 étudiants en odontologie sur 2021-2025. On en est loin... Vous avez annoncé huit nouvelles facs, mais elles n'ont pas de professeurs !
La proposition de loi du Sénat créant une quatrième année d'internat en médecine générale devait conduire les internes à exercer prioritairement dans les zones sous-dotées, mais vous l'avez dévitalisée dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Un tel dispositif aurait pu être utilement étendu aux étudiants en odontologie afin de lutter contre les déserts dentaires. J'imagine que telle n'est pas votre intention, là non plus...
Pourtant, il y a urgence ! La situation ne cesse de se dégrader. Plusieurs territoires, comme le Cantal, sont déjà sinistrés et la démographie, là comme ailleurs, est têtue... Nous ne pouvons attendre que de nouveaux professionnels soient formés en espérant qu'ils viendront s'installer dans les déserts médicaux ! Que comptez-vous faire ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé . - La suppression du numerus clausus traduit la volonté du Gouvernement d'agir sur le long terme. Nous nous attachons à porter les capacités de formation à la hauteur des objectifs démographiques.
Quelque 7 000 à 8 000 chirurgiens-dentistes seront formés sur 2021-2025, soit une hausse de 14 % par rapport à la période précédente. Le Gouvernement a soutenu, en collaboration avec les collectivités territoriales, la création de huit nouveaux sites universitaires, dès la rentrée 2022, à Amiens, Caen, Rouen, Dijon, Besançon, Grenoble, Poitiers et Tours. Ces sites ont été choisis en vue d'orienter les professionnels vers les territoires les plus fragiles.
Cela s'accompagne d'un renforcement de l'offre de soins dentaires des établissements de santé de ces territoires. Des dispositifs complémentaires ont été mis en place, comme le contrat d'engagement de service public, dont le nombre de signataires est passé de 76 à 815 entre 2014 et 2021.
M. Stéphane Sautarel. - Je regrette que votre réponse se borne à rappeler des mesures connues, sans répondre à l'urgence.
Centres d'appels d'urgence
Mme Marie-Pierre Richer . - À la demande du ministre de la santé, les Français ont évité de se rendre aux urgences en première intention. Conséquence directe, le Samu peine à absorber le nombre d'appels au 15 et ne peut répondre en moins d'une minute. Les patients composent alors le 18, également saturé...
Récemment dans le Cher, l'afflux d'appels non urgents au Samu a saturé les lignes du Sdis durant un quart d'heure, l'empêchant de réceptionner les appels du 18. Cela tient à l'indisponibilité des médecins le week-end et à la baisse du nombre de médecins de permanence : plus que deux sur l'ensemble du département le soir et le week-end, contre dix naguère...
La situation est alarmante et risque d'empirer, faute d'opérateurs dans les centres d'appels, de médecins de garde et de généralistes, alors que les urgences sont saturées.
Comment assurer l'accès aux soins au quotidien et, surtout, une réaction rapide en cas d'urgence vitale, si les numéros dédiés ne répondent pas dans les délais ? Quelles sont les mesures d'urgence envisagées ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé . - Les tensions actuelles tiennent à la fois à l'accroissement structurel de l'activité des Samu et à la situation épidémique hivernale.
Pour y répondre, la mission flash sur les urgences a prévu de renforcer les équipes de régulation des Samu par le recrutement d'assistants de régulation médicale (ARM) et la revalorisation des médecins participant à la régulation.
Par ailleurs, la mise en place du service d'accès aux soins (SAS) renforcera les centres 15 à travers une régulation médicale commune des appels. Cela n'interdit pas les solutions d'appui par un centre de réception et de traitement des appels d'un autre département.
Les établissements bénéficient d'un accompagnement financier pour chaque ARM agréé, leur formation n'étant pas financée par les régions. Le ministère a soutenu le déploiement des centres de formation dont le nombre est passé de dix fin 2019 à seize, soit de 400 places à 641. Il est actuellement engagé dans une concertation pour faciliter le recrutement d'ARM et adapter leur formation.
Enfin, un amendement gouvernemental à la proposition de loi Rist consacre la reconnaissance des ARM comme professionnels de santé.
Mme Marie-Pierre Richer. - La situation ne s'est hélas pas arrangée : 27 heures d'attente aux urgences à Bourges, fermeture du Smur une nuit complète, difficulté à rallier des établissements hors du département...
Malgré la pertinence de la plateforme 15/18/112, les Sdis ne peuvent pas être les supplétifs de la crise sanitaire. D'autant que beaucoup de sapeurs-pompiers sont des volontaires. Mes pensées vont aux patients et à tous les intervenants, de plus en plus épuisés.
Statistiques de décès et statut vaccinal covid
Mme Laurence Muller-Bronn . - Depuis plus d'un an, scientifiques et universitaires doivent travailler sur les statistiques des décès et hospitalisations liés au covid, selon le statut vaccinal des personnes, toutes causes confondues. Le ministère n'ayant pas répondu à leur demande d'accès aux données, ils se sont adressés à la Commission d'accès aux documents administratifs (Cada), qui leur a dit que le ministère ne disposait pas de ces données. On croit rêver !
L'assurance maladie possède toutes ces informations, mais la recherche française n'a accès qu'à des données partielles, insuffisantes pour le suivi et la sécurité sanitaires dans notre pays. Il est urgent que les scientifiques des organismes publics investiguent en toute neutralité, sans se limiter aux études des laboratoires pharmaceutiques. Pourquoi une telle rétention de données ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé . - Le ministère de la santé ne dispose pas des statistiques demandées sous la forme réclamée, tout comme pour la grippe. Conformément aux dispositions du code des relations entre le public et l'administration, le ministère a donc demandé à la Cada de déclarer la demande sans objet.
Des informations similaires sont disponibles dans le Système national de données de santé (SNDS), auquel les chercheurs peuvent accéder après avis favorable du Comité éthique et scientifique pour les recherches, les études et les évaluations dans le domaine de la santé (Cesrees) et une autorisation de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil). Ces démarches garantissent la protection des données personnelles, l'intérêt public et la qualité scientifique des projets, conformément à la loi de 2016 de modernisation de notre système de santé. De plus, les chercheurs de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) disposent d'un accès permanent et élargi au SNDS, les exonérant de ces démarches.
Mme Laurence Muller-Bronn. - Comment le ministère peut-il définir les politiques publiques en matière sanitaire s'il ne dispose pas des données scientifiques pertinentes ?
Libre circulation des manipulateurs d'électroradiologie médicale en Europe
Mme Jocelyne Guidez . - Il est nécessaire d'adapter la formation des manipulateurs d'électroradiologie médicale (MEM), pour faciliter leur libre circulation au sein de l'Union européenne et limiter les tensions de recrutement en France. Les délais de rendez-vous s'allongent ; réaliser des examens d'imagerie devient difficile.
Le nombre d'étudiants français n'a cessé de baisser, la politique salariale est peu attirante et la profession reste assez méconnue : en Île-de-France, 6 % des postes sont vacants ; aucune région n'est épargnée.
Faciliter la circulation des MEM diplômés de l'Union européenne vers la France constitue un levier d'amélioration immédiate de la situation. Il faudrait aussi ouvrir une réflexion autour de la création de pratiques avancées pour cette profession paramédicale. Pensez-vous qu'il faille faire évoluer la formation des MEM, pour encourager leur mobilité européenne ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé . - Au 1er janvier, on compte 31 298 MEM ; les effectifs ont augmenté de 12,8 % entre 2012 et 2022. Le passage des instituts de formation sur Parcoursup a contribué à une augmentation du nombre d'étudiants et les indemnités de stage ont été revalorisées.
Ce diplôme correspond à une licence. Pour l'accès et l'exercice d'une profession réglementée, la France reconnaît les qualifications acquises dans un autre État membre, ce qui permet d'exercer en France. En cas de différence substantielle entre les qualifications et la formation exigée dans l'État d'accueil, des mesures de compensation sont possibles, par exemple sous forme de stage. Quoi qu'il en soit, conformément au principe de reconnaissance mutuelle, la reconnaissance des qualifications est automatique.
Mme Jocelyne Guidez. - Votre réponse ne me satisfait que moyennement. Le rapport de 2020 de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) ne va pas dans votre sens.
Urgences psychiatriques du Havre
Mme Céline Brulin . - Il a fallu que les personnels des urgences psychiatriques du centre Pierre-Janet du Havre se perchent sur le toit de l'hôpital ou que leurs collègues du centre hospitalier du Rouvray fassent une grève de la faim pour se faire entendre, il y a quatre ans. Madame la ministre, intervenez avant qu'ils en arrivent à de telles extrémités.
Au Havre, le personnel doit gérer la pénurie. Le centre hospitalier a reçu 25 millions d'euros, mais rien pour les urgences psychiatriques. Quels sont les moyens humains prévus pour l'unité d'accueil et de crise, qui doit ouvrir en avril, et pour les lieux spécialisés en pédopsychiatrie prévus pour septembre ?
On craint le pire : le décret psychiatrie de 2022 entérine des conditions de travail dégradées dès 2023. La spécialisation d'infirmier psychiatrique ne sera pas compensée par la pratique avancée.
Dans le lieu d'accueil spécialisé Unacor, au centre hospitalier du Rouvray, l'engorgement est constant. Des mineurs sont hospitalisés en chambre d'isolement, pour les protéger des adultes. Comment sortir de ce marasme ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé . - Je ne peux pas vous laisser dire que des personnels ont dû se percher sur le toit de l'hôpital pour que l'État s'intéresse à la psychiatrie en France.
Le groupement hospitalier du Havre (GHH) a engagé un travail de fond : une trentaine de postes de soignants ont été créés début 2019 pour les urgences psychiatriques. Un pool de nuit a été constitué. En 2020, 10,7 postes ont été créés pour renforcer la psychiatrie périnatale. En 2021 et 2022, une vingtaine de médecins a rejoint les rangs du pôle de psychiatrie. En 2021, le contrat territorial de santé mentale a financé la création de 19,8 nouveaux postes. À la suite du Ségur de la santé, 18 postes supplémentaires seront créés d'ici à la fin de 2024, dont six en psychiatrie.
Les moyens matériels seront également considérablement renforcés d'ici à 2030, avec 36 millions d'euros d'investissement dans l'infrastructure immobilière de la psychiatrie. Par exemple, le bâtiment de psychiatrie à l'hôpital Flaubert sera livré fin 2023. Enfin, en 2022, le GHH a reçu 63,4 millions d'euros de dotation psychiatrie, dont 57,3 millions d'euros de crédits pérennes, soit une augmentation de 5,7 % par rapport à 2021.
Accès aux soins hospitaliers dans le Jura
Mme Sylvie Vermeillet . - Les difficultés d'accès aux soins hospitaliers sont croissantes dans le Jura. Je vous remercie d'avoir prévu un prochain déplacement dans notre département. À Saint-Claude, après la maternité et la chirurgie, c'est l'hôpital de jour en pédopsychiatrie qui ferme ses portes, alors qu'il accueillait 195 enfants et adolescents en 2021. Avec le départ de l'unique pédopsychiatre, c'est tout un service qui s'arrête. Les familles devront faire une heure et demie de route.
Il faut des moyens exceptionnels. À Champagnole, la ligne de structure mobile d'urgence et de réanimation (Smur) est fermée, faute de médecins jugés conformes. L'urgentiste à temps plein a en effet été mis à pied pour une question de spécialisation. Dans le même temps, à 35 km, la ligne de Smur de l'hôpital de Morez est au bord de la rupture, pour des raisons similaires. Quels moyens transitoires peuvent-ils être mis en oeuvre pour pérenniser les services de soins indispensables au Jura ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé . - Le centre hospitalier spécialisé Saint-Ylie a été contraint de suspendre temporairement l'accueil de son hôpital de jour de pédopsychiatrie, le temps de remplacer le médecin. Ce n'est pas une décision de fermeture définitive. Une solution de prise en charge a été proposée par l'établissement à chaque usager ; les moyens restent inchangés.
Les autres situations évoquées sont le résultat d'un manque de médecins bénéficiant des diplômes nécessaires pour l'exercice de certaines spécialités ; or les réformes structurelles des études de médecine ne se feront sentir sur le terrain que dans quelques années.
L'ARS Bourgogne-Franche-Comté travaille en étroite collaboration avec les partenaires locaux. Par exemple, l'établissement Jura Sud installera une équipe paramédicale de médecine d'urgence (EPMU), pour garantir un temps d'intervention rapide et une prise en charge par une infirmière spécifiquement formée dans l'attente de l'arrivée du Smur. D'autres EPMU seront mises en oeuvre dans la région.
Mme Sylvie Vermeillet. - C'est vrai, l'ARS fonctionne bien. Nous attendons beaucoup de votre visite.
Construction par l'État de bâtiments à Malakoff
M. Pierre Ouzoulias . - L'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) occupait une tour à Malakoff. L'État souhaitait vendre cet îlot, occasion unique de remédier à la coupure territoriale entre Malakoff et Paris. Depuis, le projet du Gouvernement a changé : destruction, puis reconstruction d'un ensemble architectural très imposant, contrairement à vos engagements en matière de transition écologique.
La maire a été tenue à l'écart de l'aménagement de cette parcelle. Elle souhaitait rencontrer les promoteurs, pour mieux intégrer le projet dans la ville ; elle n'a reçu aucune réponse. Le Gouvernement ne peut pas construire au détriment des projets urbanistiques de la mairie. Quand le Gouvernement va-t-il recevoir la maire de Malakoff ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé . - Les ministères chargés des affaires sociales sont engagés dans la démarche de renouvellement de leur schéma pluriannuel de stratégie immobilière (SPSI) d'administration centrale. L'objectif est de rationaliser les occupations, de maîtriser les coûts d'exploitation et de s'inscrire dans une démarche écoresponsable. Attentif aux préoccupations des collectivités territoriales, l'État a fait évoluer son projet initial, tout en respectant les besoins fonctionnels et de sécurité des services des ministères.
Une concertation avec les habitants et les collectivités voisines, menée fin 2021, a aussi permis de faire des propositions. L'État s'est engagé à poursuivre le dialogue, avec la constitution d'un comité de riverains, des réunions publiques et des échanges avec les représentants des collectivités.
Le chantier, qui sera livré début 2027, respectera une charte environnementale, avec un taux de réemploi des matériaux fixé à 80 %.
M. Pierre Ouzoulias. - Il est curieux d'engager une concertation avec la population et de refuser de voir la maire. Elle a envoyé plusieurs courriers au Gouvernement, sans réponse. J'ai compris que vous prenez l'engagement ferme de recevoir la maire dans les plus brefs délais : je vous en remercie.
Dérive tarifaire sur les bornes de recharge des voitures électriques
M. Gilbert Roger . - Les prix pratiqués sur les bornes de recharge pour les voitures électriques, en particulier dans les stations-service ou sur les autoroutes, sont opaques.
Lors du dernier Salon mondial de l'automobile, le Président de la République a annoncé un bouclier tarifaire sur toutes les bornes électriques françaises ; cela va dans le bon sens, pour encourager la transition énergétique et aider les ménages. Mais les prix proposés par des sociétés privées ne sont pas du tout transparents. Des charges sont parfois équivalentes à un plein de gazole !
Le Gouvernement va-t-il prendre les mesures nécessaires à la transparence et à la réglementation des prix de l'électricité sur les bornes de recharge ? Sinon, la conversion à l'énergie électrique pour le transport sera un échec.
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé . - La recharge ouverte au public des véhicules électriques est une activité du secteur concurrentiel : les tarifs sont librement définis par les opérateurs. Ils peuvent dépendre des kilowattheures (kWh) distribués, mais aussi d'autres facteurs - rapidité de la recharge, services annexes. Certains opérateurs appliquent des tarifs progressifs au-delà d'un certain temps, pour éviter les véhicules ventouses qui bloquent l'accès à la borne. Ces tarifs sont transparents : ils sont communiqués via les bornes et les contrats des opérateurs.
La tarification inclut une part d'amortissement des investissements réalisés et des coûts d'exploitation, comme des coûts de supervision, de maintenance et d'énergie. Ainsi, les aménageurs et opérateurs de recharge peuvent, dès lors qu'ils y sont éligibles, bénéficier de l'amortisseur électricité mis en place fin 2022.
Les discussions sont en cours au niveau européen sur le projet de règlement sur le déploiement d'une infrastructure pour carburants alternatifs (Afir), afin de fixer des prix raisonnables, facilement et clairement comparables, transparents et non discriminatoires.
M. Gilbert Roger. - Je suis satisfait de voir que l'Union européenne va pousser le Gouvernement à imposer la transparence à ce secteur.
Surpopulation carcérale au centre pénitentiaire de Bordeaux Gradignan
Mme Laurence Harribey . - Un nouveau record a été battu : 72 836 prisonniers en décembre. Cette mécanique d'incarcération de masse se poursuivra tant que nous ne nous pencherons pas sur l'extension du champ pénal. Il faut une nouvelle ingénierie de la sanction. La création de 15 000 nouvelles places n'y changera rien : on enfermera davantage et le principe de l'encellulement individuel ne sera pas mieux respecté. Le taux d'occupation du centre pénitentiaire de Gradignan est de 200 % ; incidents et accidents s'y multiplient. Après la livraison des nouveaux locaux, ce taux sera encore de 120 %. Que compte faire le Gouvernement ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé . - Veuillez excuser Éric Dupond-Moretti. Le Gouvernement travaille à améliorer les conditions de détention et de travail dans les établissements pénitentiaires. Nous prévoyons 15 000 nouvelles places de prison, dont 50 % seront livrées en 2024. Le nouvel établissement de 600 places qui sera construit à Gradignan réduira le taux de surpopulation carcérale. Les travaux ont débuté en 2021 : un premier bâtiment sera mis en service en 2024, un second en 2026. Le budget alloué aux établissements pénitentiaires s'élève à plus de 130 millions d'euros par an depuis cinq ans, le double de la période précédente.
Je veux rendre hommage aux surveillants pénitentiaires, troisième force de sécurité intérieure, qui font un travail formidable dans des conditions difficiles. Pour renforcer l'attractivité de leur métier, nous avons fusionné des grades et revalorisé l'indemnité pour charges pénitentiaires. Une réforme statutaire est à venir.
Mme Laurence Harribey. - J'avais déjà alerté le garde des sceaux il y a quelques mois, mais, au quotidien, rien n'a changé. Il ne suffit pas de construire des murs. Dans notre rapport consacré aux services pénitentiaires d'insertion et de probation, ma collègue Marie Mercier et moi-même appelons à une refonte de la profession.
Soutien aux armateurs transmanche en délégation de service public
Mme Agnès Canayer . - Les crises sanitaire et énergétique ont affecté le transport transmanche. L'État a soutenu les opérateurs grâce au chômage partiel et à un remboursement des cotisations salariales, dit netwage. Mais les lignes de ferries gérées en délégation de service public (DSP) ne bénéficient pas de ce remboursement. C'est le cas de la ligne Dieppe-Newhaven, déléguée à DFDS Seaways par un syndicat mixte porté par le département de la Seine-Maritime. La prolongation du remboursement pour trois ans a été annoncée dans le cadre du Fontenoy du maritime, mais l'exclusion des DSP a été maintenue. L'absence de soutien de l'État dégrade l'attractivité de ce modèle d'exploitation, alors qu'il serait possible de lever les risques de cumul d'aides au regard des règles européennes. Quelle est la position du Gouvernement ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé . - Veuillez excuser Hervé Berville. Ancienne parlementaire bretonne, je connais bien le netwage. Les compagnies de ferries ont été touchées de plein fouet par la crise sanitaire. Le Gouvernement a répondu présent en 2021 avec cette aide exceptionnelle, reconduite pour trois ans et élargie au transport de marchandises et à la croisière. Les lignes exploitées sous DSP en ont été exclues, car elles reçoivent déjà des compensations de la collectivité délégante. La compagnie DFDS Seaways a bénéficié du soutien de l'État pour ses autres lignes : 8 millions d'euros en 2021 et 1,5 million au premier semestre 2022. Pour lutter contre le dumping social, qui fragilise fortement les entreprises, Hervé Berville travaille à une série de solutions : renforcement des contrôles, socle minimal de conditions sociales, réduction de la concurrence déloyale. L'exclusion des DSP pourra être réexaminée en 2024 en fonction de l'évolution de la situation.
Mme Agnès Canayer. - L'exclusion des DSP fragilise moins la compagnie que le département, principal financeur de cette ligne essentielle pour notre territoire.
La séance est suspendue à 12 h 35.
présidence de M. Gérard Larcher
La séance reprend à 14 h 30.