SÉANCE

du mercredi 16 février 2022

58e séance de la session ordinaire 2021-2022

présidence de M. Gérard Larcher

Secrétaires : Mme Marie Mercier, M. Jean-Claude Tissot.

La séance est ouverte à 15 heures.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Questions d'actualité

M. le président.  - Je salue la présence dans notre hémicycle de Mme Daphné Ract-Madoux, nouvelle sénatrice de l'Essonne. Je lui souhaite la bienvenue dans notre assemblée. (Applaudissements)

L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement. Notre séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur notre site internet. Au nom du Bureau du Sénat, j'appelle chacun d'entre vous au respect des uns et des autres et du temps de parole ; je ne le dis pas comme une litanie hebdomadaire, mais parce que le respect est la marque du Sénat.

Salaires et inflation

Mme Mélanie Vogel .  - (Applaudissements sur les travées du GEST) La progression des salaires sera, cette année, plus faible que l'inflation. Dit plus simplement, les Français s'appauvrissent - du moins, 99 % d'entre eux...

En même temps, les profits des grandes entreprises explosent : 137 milliards d'euros l'année dernière pour les entreprises du CAC 40. En vingt ans, les dividendes qu'elles versent ont augmenté de 269 % !

Hasard ? Fatalité ? Non : c'est le résultat mathématique d'une politique qui encourage la concentration des richesses.

Il y a un domaine où le « en même temps » n'est pas possible : la justice sociale. Il n'y a pas d'argent magique ! On ne peut donc pas, en même temps, enrichir les plus riches et redistribuer...

Le Gouvernement a fait son choix. La suppression de l'ISF, la flat tax, la baisse de l'impôt sur les sociétés, la diminution des aides au logement et des allocations chômage : tout cela, il a pu le faire.

La hausse réelle du SMIC, elle, ne serait pas possible - elle l'est pourtant en Allemagne, en Espagne et jusqu'au Royaume-Uni, dont le gouvernement est ultralibéral. La conditionnalité des aides publiques, le RSA pour les jeunes, le revenu citoyen, le bonus-malus fiscal écologique : impossible aussi, nous dit-on.

La vérité, c'est que c'est possible - si l'on choisit le partage des richesses. Pourriez-vous assumer devant la représentation nationale que, si les salaires ne progressent pas, c'est le résultat de vos choix politiques ? (Applaudissements sur les travées du GEST et sur des travées du groupe SER ; Mme Marie-Noëlle Lienemann et M. Fabien Gay applaudissent également.)

Mme Élisabeth Borne, ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion .  - Le Gouvernement est très attentif au pouvoir d'achat des Français (exclamations à gauche), alors que, partout dans le monde, la flambée du prix de l'énergie et l'inflation inquiètent.

Face à cette situation, nous avons pris très tôt des mesures protectrices : aide de 100 euros pour 6 millions de bénéficiaires du chèque énergie, bouclier tarifaire pour le gaz et l'électricité, indemnité inflation pour 40 millions de Français, augmentation de 10 % des indemnités kilométriques.

Ces mesures représentent au total près de 15 milliards d'euros.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Énorme !

Mme Élisabeth Borne, ministre.  - Les entreprises et les branches doivent aussi entendre les attentes des salariés.

Depuis l'automne, je mène un travail avec la quarantaine de branches dont les minima conventionnels sont inférieurs au SMIC - que, je le souligne, nous sommes un des rares pays à revaloriser automatiquement. Un tiers d'entre elles ont déjà conclu un accord : dans l'hôtellerie-restauration, les salaires ont progressé en moyenne de 16 %. Je suis avec attention les négociations qui se poursuivent.

Par ailleurs, j'invite les entreprises à se saisir de tous les outils de partage de la valeur, comme la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat, prolongée jusqu'au 31 mars prochain. (Murmures à gauche)

Mme Éliane Assassi.  - Tout va bien, alors ?

Mme Élisabeth Borne, ministre.  - La meilleure protection du pouvoir d'achat, ce sont la croissance et l'emploi.

M. Guy Benarroche.  - Quelle croissance ?

Mme Élisabeth Borne, ministre.  - Avec plus d'un demi-million de chômeurs en moins l'année dernière, nous sommes en bonne voie ! (Protestations à gauche ; applaudissements sur des travées du RDPI)

Situation en Iran

M. Joël Guerriau .  - (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP) Mali, Afghanistan, Ukraine : en ce début d'année, les crises ne manquent pas qui nous rappellent l'importance de la diplomatie.

Dans moins d'un mois, l'Iran pourrait disposer des matériaux radioactifs nécessaires à l'arme nucléaire.

L'accord de 2015 prévoyait la surveillance du programme nucléaire, en contrepartie de la réintégration de l'Iran dans les échanges internationaux. Les relations économiques entre nos deux pays ont été particulièrement prometteuses.

Le retrait unilatéral des États-Unis et le retour des sanctions, en 2018, ont conduit à l'accélération du programme nucléaire iranien et à l'engagement d'une coopération au long cours entre Pékin et Téhéran.

Un nouveau cycle de négociations s'est ouvert la semaine dernière. Pouvons-nous espérer une issue favorable ? Le temps presse : l'Iran se rapproche chaque jour de sa bombe. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP)

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères .  - Vous soulignez à juste titre l'importance du nouveau cycle de négociations qui s'est ouvert à Vienne. Le travail est harassant et je salue nos diplomates.

Nous sommes à l'heure de vérité. Si nous voulons le respect par l'Iran de ses engagements de non-prolifération et, en contrepartie, la levée des sanctions américaines, c'est une question de jours. Nous sommes au point de bascule.

Nous avons trouvé avec l'Allemagne, la Grande-Bretagne, la Russie, la Chine et les États-Unis une convergence suffisante pour permettre un accord. Cet accord est à portée de main.

Les Iraniens sont face à un choix très clair : soit ils déclenchent une crise grave, soit ils acceptent un accord respectueux de tous les intérêts, singulièrement du leur.

M. Joël Guerriau.  - La rupture unilatérale des accords par les États-Unis est la cause de cette situation. C'est le même unilatéralisme en Afghanistan. L'Europe doit se doter d'une stratégie propre pour affirmer son indépendance ! (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP ; M. Jean-Marie Vanlerenberghe applaudit également.)

Port de signes religieux dans les compétitions sportives

M. Michel Savin .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Dans quelques heures, le Sénat débattra de nouveau de la proposition de loi sur le sport, qu'il a beaucoup améliorée.

Nous avons un point de désaccord majeur : la place de la laïcité dans le sport, sur laquelle les députés de la majorité et le Gouvernement pratiquent le « en même temps », c'est-à-dire le flou et l'ambiguïté.

Mmes El Haïry et Schiappa ont tenu ces derniers jours des propos contradictoires. Sans parler du ministre de l'économie, qui dit tout et son contraire sur le sujet. La cacophonie est totale, et on ne sait plus qui croire.

Monsieur le Premier ministre, pouvez-vous nous sortir du brouillard ? La France va-t-elle continuer d'appliquer la Charte olympique ? Dites-nous clairement la position du Gouvernement ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; MM. Olivier Cigolotti et Claude Kern applaudissent également.)

Mme Roxana Maracineanu, ministre déléguée, chargée des sports .  - Je vous ai répondu point par point en première lecture sur l'action du Gouvernement contre le séparatisme dans le sport. Je le ferai à nouveau dans quelques instants : j'invite les sénatrices et les sénateurs de votre camp intéressés par le sport à rester dans l'hémicycle. (Exclamations à droite)

M. Jean-François Husson.  - Vous nous faites la leçon ?

M. Arnaud Bazin.  - Et les ministres ?

Mme Roxana Maracineanu, ministre déléguée.  - Ainsi, nous verrons la différence entre obsession et intérêt réel pour le sport !

Le principe de laïcité s'applique dans le sport comme dans toute la sphère publique. Le Parlement l'a encore affirmé il y a six mois.

Le Gouvernement lutte fermement contre le communautarisme et la radicalisation dans le sport.

M. Stéphane Piednoir.  - On le saurait...

Mme Roxana Maracineanu, ministre déléguée.  - C'est nous qui avons imposé le contrat d'engagement républicain à toutes les fédérations sportives.

M. François Bonhomme.  - Ça, c'est du sérieux !

Mme Roxana Maracineanu, ministre déléguée.  - Nous aussi qui avons permis aux préfets de retirer leur agrément aux autorisations ne respectant pas les valeurs de la République.

Le Gouvernement a eu le courage d'agir ; il poursuivra son action résolue jusqu'à la dernière minute de son mandat. (M. Roger Karoutchi s'esclaffe.)

Monsieur Savin, je suis triste pour vous, pour M. Kern, Mme Billon, M. Lozach, Mme Brulin, M. Bacci et M. Dossus, qui sont réellement passionnés de sport ! (Marques d'indignation sur les travées du groupe Les Républicains ; applaudissements sur les travées du RDPI et sur des travées du GEST)

M. Jérôme Bascher.  - Notre passion, c'est la République !

M. le président.  - Il faut conclure, madame la ministre.

Mme Roxana Maracineanu, ministre déléguée.  - Je suis déçue que les grands pontes de votre parti vous aient imposé de balayer d'un revers de main les avancées de ce texte. (Protestations à droite ; applaudissements sur les travées du RDPI)

M. Jean-François Husson.  - Consternant !

M. Michel Savin.  - Je remercie le Premier ministre pour sa réponse... (Marques d'ironie à droite)

Madame la ministre, vous êtes à court d'arguments, car vous savez pertinemment que la loi confortant les principes de la République ne résout rien.

Vous passez par pertes et profits la lutte contre le communautarisme dans le sport. Votre position est ambiguë, pour ne pas dire lâche ! Elle illustre cinq années de présidence bavarde mais impuissante. (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Impact du prix de l'énergie sur les collectivités locales

Mme Daphné Ract-Madoux .  - (Applaudissements sur les travées des groupes UC et INDEP, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains) J'associe Christine Herzog à cette question sur la préservation des ressources des collectivités territoriales.

Monsieur le ministre des comptes publics, lorsque Jean-Michel Arnaud vous a interrogé le 6 janvier dernier, vous avez dégainé la baisse de la taxe intérieure sur la consommation finale d'électricité (TICFE), qui limitera à 4 % la hausse de la facture des collectivités territoriales. Nous nous félicitons de sa prolongation jusqu'à la fin de l'année.

Jusqu'à présent, on observe des hausses de 30 à 300 %. Quand la baisse de TICFE se traduira-t-elle concrètement dans les factures ?

Vous avez fait valoir que les recettes de taxe foncière augmenteraient cette année de 3,4 %. Mais je doute que cela suffise à couvrir les surcoûts auxquels les communes vont être confrontées. Une véritable érosion des finances locales est à craindre, d'autant que les effets de la crise sanitaire sur le bloc communal n'ont pas été intégralement compensés.

Avez-vous évalué précisément l'incidence de l'inflation sur les finances des collectivités territoriales, en recettes et en dépenses ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur quelques travées du groupe Les Républicains)

M. Olivier Dussopt, ministre délégué, chargé des comptes publics .  - Je vous félicite pour votre accession au Sénat et salue la mémoire d'Olivier Léonhardt.

Comme je l'avais indiqué à votre collègue, la baisse de TICFE bénéficiera aux collectivités territoriales. Les plus petites d'entre elles sont éligibles aux tarifs réglementés. Toutes les collectivités territoriales bénéficieront de la modération des prix liée à l'augmentation du volume de l'accès régulé à l'énergie nucléaire historique (Arenh).

La France est l'un des pays qui limitent le plus l'augmentation de la facture énergétique.

L'augmentation de 3,4 % des recettes fiscales des collectivités territoriales est liée à revalorisation des valeurs locatives selon la loi de finances pour 2018.

Depuis le début du quinquennat, nous avons maintenu l'enveloppe globale de la DGF.

Mme Sophie Primas.  - « Globale » !

M. Olivier Dussopt, ministre délégué.  - Nous avons maintenu les dotations d'investissement et prévu un soutien exceptionnel à l'investissement pendant la crise.

Nous sommes le seul pays à avoir mis en place un filet de sécurité pour les collectivités territoriales, qui garantit le maintien de leurs recettes fiscales et domaniales.

Résultat : l'épargne brute et les capacités de financement des collectivités territoriales sont en hausse. Alors que l'État a vu son déficit se creuser, le compte des collectivités territoriales est à l'équilibre et même légèrement excédentaire ! (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Mme Daphné Ract-Madoux.  - Gardons à l'esprit que la meilleure énergie est celle qu'on ne consomme pas. L'État doit être stratège en la matière ! (Applaudissements sur les travées du groupe UC ; M. Daniel Chasseing applaudit également.)

Suppressions de postes et carte scolaire

Mme Marie-Noëlle Lienemann .  - (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE et sur quelques travées du groupe SER) Le Gouvernement s'apprête à supprimer 440 postes d'enseignant au collège et au lycée, ce qui détériorera encore les conditions de scolarité, notamment en zone prioritaire.

En cinq ans, vous avez supprimé 7 900 postes dans le secondaire, où le nombre d'élèves a pourtant augmenté. C'est l'équivalent de 166 collèges !

Votre discours est toujours le même : faire mieux avec moins. Vous l'avez dit aussi pour l'hôpital, avec les résultats que nous voyons...

Dans le secondaire aussi, une dégradation s'observe : fin des cours en demi-classe, non-remplacement généralisé. Car, contrairement à ce que vous prétendez, les postes supprimés n'ont pas été compensés par des heures supplémentaires.

Vous prétextez aussi avoir privilégié le primaire. Mais, pour lutter contre l'échec scolaire, il faut agir tout au long de la scolarité. Au surplus, vous fermez cette année un nombre important de classes primaires.

Vous avez détérioré le service public de l'éducation nationale, décourageant les enseignants et une partie de notre jeunesse. Allez-vous suspendre les suppressions de poste et fermetures de classe ? (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE et SER, ainsi que sur des travées du GEST)

Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État, chargée de la jeunesse et de l'engagement .  - La lutte contre les inégalités passe par l'école : sur cette conviction, nous nous retrouvons.

La démographie scolaire est en baisse. Dans le premier degré, le nombre d'élèves a baissé de 67 000 ; dans le secondaire, de 66 000. En termes arithmétiques, ce sont 4 000 classes que nous aurions dû fermer... Or, entre ouvertures et fermetures, le solde net est nul.

Nous assumons d'investir plus fortement dans le premier degré, pour contrer les inégalités. Nous agissons aussi sur les dimensions périscolaire et extrascolaire. Avec le Grenelle de l'éducation, nous accompagnons les professeurs.

Au total, l'investissement pour l'école et notre jeunesse a augmenté de 13 %, pour atteindre 57 milliards d'euros cette année.

De ce fait, le taux d'encadrement progresse, notamment à travers le dédoublement des classes de CP et CE1 et le plafonnement à 24 élèves au primaire. Dans le secondaire, il n'y a pas de poste en moins devant les élèves, malgré la baisse démographique. En comptant les AESH, 27 000 personnes à temps plein ont été recrutées. (Murmures à droite)

M. le président.  - Veuillez conclure...

Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État.  - Notre objectif, c'est une éducation plus forte pour tous sur tous les territoires ! (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Comme à son habitude, le Gouvernement nous noie sous les chiffres. Ceux-ci sont la plupart du temps inexacts. Et dire que, le 2 mars 2021, M. Blanquer disait que les suppressions de poste ne pouvaient pas éternellement porter sur le secondaire ! Cette année, c'est ce qu'il fait... On ne peut plus vous faire confiance pour relever le défi éducatif ! (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et du GEST ; M. Bruno Belin applaudit également.)

One Ocean Summit

Mme Nadège Havet .  - (Applaudissements sur les travées du RDPI) Si la place de l'océan dans l'agenda politique international reste insuffisante, les dirigeants de cent pays réunis à Brest se sont engagés à agir pour stopper la dégradation des océans. Une délégation sénatoriale participait à ce premier sommet mondial sur le sujet.

Pollution plastique, décarbonation du transport, surpêche : tous les sujets ont été abordés. Des mesures fortes ont été annoncées en faveur de la biodiversité dans toutes les parties du globe - pôles, haute mer, régions côtières. La Polynésie française s'est engagée à créer un réseau d'aires marines protégées d'au moins 500 000 km² - une orientation défendue par notre collègue Teva Rohfritsch, qui travaille sur les fonds marins.

Dans le cadre de la PFUE, il s'agissait de faire de l'Europe le chef de file du futur traité de la haute mer, en cours de négociation depuis 2018. Quel rôle la France joue-t-elle dans ces discussions ? Sommes-nous proches d'un texte commun qui protégera les eaux internationales, pour qu'elles ne soient plus des zones de non-droit écologiques ? (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État, chargée de la biodiversité .  - Je vous remercie pour ce premier bilan du One Ocean Summit, qui a réuni tous les acteurs impliqués au plus haut niveau, dans le cadre de la PFUE et dans la perspective du traité sur les plastiques, du traité BBNJ, dont vous avez parlé, et des discussions de Lisbonne sur l'ODD 14.

Les pays mobilisés à Brest représentent plus de la moitié des zones économiques exclusives mondiales. Ils ont rappelé leur forte détermination pour mieux protéger les océans, mis à mal par l'acidification, les pollutions et la surpêche.

Nous défendons l'objectif de 30 % de zones protégées à l'horizon de 2030, un objectif désormais dépassé par la France, grâce aux nouvelles mesures en Polynésie française et dans les Terres australes et antarctiques françaises. Je m'associe aux félicitations que vous avez adressées au sénateur Rohfritsch.

Notre mobilisation est très forte aussi en matière de lutte contre la pollution aux plastiques. En tant que vice-présidente de l'Assemblée de l'ONU pour l'environnement, je porterai haut l'ambition française et européenne dans cette négociation.

Nous travaillons aussi sur les décharges littorales. Dès 2022, trois premières installations seront soldées dans notre pays.

La France s'affirme ainsi comme chef de file de la protection des océans. (Applaudissements sur des travées du RDPI)

Politique en matière de logement

Mme Viviane Artigalas .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; Mme Cathy Apourceau-Poly applaudit également.) Nous avons alerté le Gouvernement sur le dysfonctionnement du bouclier tarifaire énergétique pour les logements chauffés collectivement au gaz ou raccordés à des réseaux de chauffage urbain. De très nombreux propriétaires et locataires de logements sociaux sont concernés. Pour eux, la facture va être lourde.

En septembre dernier, vous avez tenté de rassurer en annonçant le blocage du prix du gaz pendant l'hiver. De nombreux ménages modestes subissent malgré tout la flambée des prix de l'énergie. Comment imaginer un bouclier tarifaire excluant une grande partie des plus vulnérables ?

Les bailleurs sociaux, déjà malmenés par la réduction du loyer de solidarité, vont être confrontés à une nouvelle fragilisation de leurs locataires. Les travaux de rénovation énergétique risquent d'en pâtir.

Comment comptez-vous résoudre concrètement ce problème précis, et dans quel délai ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur quelques travées du groupe CRCE)

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État, chargée de la biodiversité .  - Face aux hausses de prix, nous avons mis en place, dans l'urgence, le bouclier tarifaire. Il fallait réagir massivement et vite.

En effet, des réponses plus fines doivent être trouvées pour les cas dont vous parlez. Ce travail est en cours, en liaison avec les parties prenantes.

Ces réponses spécifiques feront écho aux mesures déjà prises : revalorisation du chèque énergie, bouclier tarifaire, prime inflation. Sans cette action massive, le prix du gaz, en particulier, aurait flambé de 66 % !

Nous ne négligeons pas les mesures structurelles. MaPrimeRénov' ouvrira la voie à une baisse de la facture énergétique.

S'agissant des publics dont vous avez parlé, des annonces interviendront dans les prochains jours. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Mme Viviane Artigalas.  - Une fois de plus, vous répondez à côté. Pourtant, les solutions existent : la Commission de régulation de l'énergie recommande depuis plus de trois mois la baisse de la fiscalité sur le gaz, et vous auriez pu augmenter de façon différenciée le forfait charges des APL et le chèque énergie.

Les plus touchés par la flambée des prix de l'énergie sont les plus précaires. En particulier les ruraux, qui doivent passer à la pompe plus souvent que les autres. Mais la situation des ménages modestes n'est décidément pas la priorité du Gouvernement ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE, ainsi que sur quelques travées du GEST)

Décret d'application de la loi Climat et résilience

Mme Maryse Carrère .  - (Applaudissements sur les travées du RDSE) La loi Climat et résilience suscite de nombreuses craintes et interrogations au plan local autour de l'objectif de zéro artificialisation nette des sols.

Pour atteindre cet objectif national en 2050, le rythme de l'artificialisation doit être divisé par deux au moins au cours des dix prochaines années. Or concilier cet objectif et les impératifs de la vie quotidienne confine à l'impossible.

Comment expliquer aux 86 communes de la communauté d'agglomération Tarbes-Lourdes-Pyrénées qu'elles ne pourront plus construire pour accueillir de nouvelles populations ?

Le problème est aggravé par la non-publication des décrets d'application. Allez-vous allonger le délai de six mois prévu pour tenir une conférence régionale des SCoT, pour une meilleure préparation territoire par territoire ?

Dans quel délai les principaux décrets d'application de la loi Climat et résilience seront-ils publiés ? Il faut sortir du flou actuel.

Enfin, une vraie différenciation est-elle prévue dans l'application de son article 47 ? Le développement des territoires ruraux ne doit pas être freiné ! (Applaudissements sur les travées du RDSE ; Mmes Frédérique Puissat, Martine Berthet et M. Gérard Longuet applaudissent également.)

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État, chargée de la biodiversité .  - Il est impératif de réduire l'artificialisation, et même de désartificialiser par endroits. Les débats parlementaires ont conduit à l'adoption d'un dispositif équilibré. Rappelons que 5 % des communes sont responsables de 40 % de la consommation d'espace.

L'objectif n'est évidemment pas de ne plus construire, mais de construire mieux. Le respect des terres agricoles et des espaces naturels doit faire l'objet d'une vigilance particulière. Nous devons nous concentrer sur la construction dense.

Pour les dix prochaines années, 140 000 hectares restent mobilisables. Il n'y a donc aucun empêchement.

Tous les territoires n'ont pas les mêmes besoins, ni les mêmes trajectoires passées. Nous en tenons compte, puisque l'objectif de réduction de 50 % s'applique au niveau non pas de la commune, mais de la région. Ainsi, c'est à l'échelle de la région que la communauté d'agglomération Tarbes-Lourdes-Pyrénées est concernée.

Dans la loi 3DS, nous avons allongé, comme vous le demandez, le délai dans lequel les collectivités territoriales pourront organiser la territorialisation.

Trois décrets seront soumis dans quelques jours au Conseil national d'évaluation des normes.

Président ou candidat ?

M. Jean-Marc Boyer .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Depuis 1988, la loi assure la transparence du financement des campagnes électorales et la stricte égalité entre les candidats, les six mois précédant l'élection.

Il ne fait guère de doute qu'Emmanuel Macron sera candidat : les parrainages sont recueillis, affiches et organigramme sont prêts, un site de campagne est en ligne, le QG loué. Et le Président de la République multiplie les déplacements... Ce mélange des genres conduit à utiliser les moyens de l'État pour financer la campagne du président sortant, au mépris des règles.

Les ministres défilent dans nos départements pour porter la bonne parole - dans des circonscriptions où ils seront eux-mêmes candidats.

Mme Frédérique Puissat.  - Exactement !

M. Jean-Marc Boyer.  - Les limites du « en même temps » ne sont-elles pas dépassées ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur plusieurs travées du groupe UC)

M. Olivier Paccaud.  - Et le Premier ministre ne répond pas !

M. Gabriel Attal, secrétaire d'État, porte-parole du Gouvernement .  - Vous semblez considérer qu'un Président de la République qui se consacre à la gestion des affaires du pays plutôt qu'à une possible candidature serait dans l'hypocrisie. (Protestations sur les travées des groupes Les Républicains, SER et CRCE) Je trouve cette critique rétrospective de MM. Sarkozy et Chirac d'une grande violence ! (Applaudissements sur les travées du RDPI)

En 2012, Valérie Pécresse, porte-parole du gouvernement de l'époque, défendait la légitimité du président Sarkozy à agir jusqu'au bout de son mandat. Elle ne saurait avoir changé d'avis. (Applaudissements sur les travées du RDPI ; exclamations sur les travées des groupes Les Républicains et SER)

Mme Sophie Primas.  - Je croyais que c'était le nouveau monde ?

M. Gabriel Attal, secrétaire d'État.  - Pour le reste, les règles sont connues. Il y a un calendrier officiel de campagne et de dépôt de candidatures, avec une date limite fixée au 4 mars. (M. Roger Karoutchi se gausse.)

M. Marc-Philippe Daubresse.  - Ben voyons !

M. Gabriel Attal, secrétaire d'État.  - Souffrez que nous soyons concentrés sur la crise sanitaire, sur la situation économique, sur la crise en Ukraine, aux frontières de l'Europe et au Mali, plutôt que sur la campagne et ses débats sur le « grand remplacement » ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains ; applaudissements sur les travées du RDPI)

M. Jean-Marc Boyer.  - Que le Président gouverne est une chose, qu'il fasse campagne avec l'argent du contribuable, en promettant des milliards au mépris de toute rigueur budgétaire, est indécent. (M. Julien Bargeton proteste.)

Le Président ne peut se cacher plus longtemps derrière la crise sanitaire. Les Français ont droit au débat démocratique, projet contre-projet, avant le premier tour. Il faut tomber les masques et respecter les règles d'équité et de transparence ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur plusieurs travées du groupe UC)

Privatisation de la santé

Mme Émilienne Poumirol .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Le scandale d'Orpea révèle les ravages de la privatisation du secteur de la santé et du médico-social. Une tribune de François Crémieux parue le 9 février dans Le Monde alerte sur le risque de rachat des centres de santé de la Croix-Rouge par le groupe privé Ramsay Santé.

La Croix-Rouge ne poursuit pas de but lucratif ; elle incarne une tradition humaniste et garantit une offre de soin accessible à tous. Ramsay, premier fournisseur de soins privé en France, est un grand groupe à but lucratif pour qui la santé est un investissement qui doit rapporter des dividendes aux actionnaires.

On ne peut se résoudre à voir des centres de santé associatifs repris de la sorte. La santé et le médico-social seront-ils vendus aux grands groupes ? Quel modèle de santé voulons-nous ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé .  - Au-delà de ce que je pense de ces questions, l'État ne peut intervenir dans une relation contractuelle entre deux acteurs privés.

Notre système repose sur deux jambes : public et privé, secteur hospitalier et secteur libéral. Les missions se recoupent et la qualité existe chez tous les soignants.

Je souhaite que le secteur privé non lucratif conserve toute sa place.

Je ne me résous pas à ce que d'immenses groupes privés, portés par des fonds de pension étrangers, rachètent, un à un, des établissements qui font partie du capital social de notre nation. C'est pourquoi nous revalorisons les soignants, avec le Ségur, pour maintenir l'attractivité du secteur public. Le privé lucratif a sa place ; maintenons l'équilibre et donnons aux secteurs public et associatif l'envie de continuer à se déployer. En tant qu'ancien député de l'Isère, je rappelle que c'est à Grenoble qu'ont été créés les premiers centres de santé. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Mme Émilienne Poumirol.  - Vous dites vouloir un équilibre, mais ces cinq dernières années ont vu une dérive vers toujours plus de privé. Vous ne pouvez pas empêcher la vente, mais vous pouvez donner une impulsion en faveur d'un service public efficace. La santé ne doit pas relever du secteur marchand. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

Violences contre les élus

M. Jean-Raymond Hugonet .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Monsieur le garde des Sceaux, le 6 novembre 2019, vous avez publié une circulaire appelant à plus de volontarisme, de fermeté et de célérité dans le traitement judiciaire des violences envers les élus. En septembre 2020, vous en preniez une autre, en rappelant que toute atteinte contre les élus locaux constitue une atteinte au pacte républicain.

Pourtant, ces agressions se multiplient : 1 186 élus ont été pris pour cible dans les onze premiers mois de 2021, dont 162 parlementaires et 605 maires ou adjoints - une hausse de 47 % par rapport à 2020 !

Le maire de Saintry-sur-Seine, Patrick Rauscher est depuis son élection la cible de menaces, insultes et intimidations physiques : toutes les plaintes sont classées sans suite, alors que leurs auteurs sont parfaitement identifiés et connus défavorablement de la police. « S'il devait m'arriver malheur, dit-il, retenez que je regrette que les détracteurs des valeurs de notre République ne soient pas plus inquiétés ».

Quand allez-vous passer des circulaires aux actes ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées des groupes UC et INDEP ; M. Hussein Bourgi applaudit également.)

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice .  - S'en prendre à un élu, c'est s'en prendre à la République tout entière. (Marques d'approbation) Les circulaires - la première n'est pas de moi - appellent les procureurs généraux à plus de sévérité et de célérité et à une meilleure qualification des faits.

On peut se payer de mots, mais les chiffres parlent. Entre 2019 et 2020, le nombre de condamnations pour menaces a doublé ; le taux de prononcé des peines est passé de 52 % à 62 % en un an ; 80 % des condamnations pour violences donnent lieu à des peines d'emprisonnement. Le rappel à la loi, désormais supprimé, et l'avertissement pénal probatoire sont écartés en cas de violences contre des élus.

Des lignes directes entre les élus et les parquets ont été créées. Nous avons mis en place un groupe de travail avec les élus pour une meilleure coordination avec les procureurs. La loi que j'ai portée prévoit que la peine ne peut être réduite en cas de violences contre un élu.

Je répondrai plus précisément mercredi prochain devant votre délégation aux collectivités territoriales. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Attaques de loups

M. Philippe Folliot .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) La protection des espèces vulnérables est une pierre angulaire de notre engagement collectif en faveur de la biodiversité. Mais il y a un loup !

Dans la montagne tarnaise, on recense une centaine d'attaques par an, des dizaines de brebis tuées. Idem en Aveyron, Aude, Hérault, Lozère. Les estives vont commencer, et les éleveurs déplorent la lenteur de l'Office français de la biodiversité (OFB), qui exige des traces d'ADN, des empreintes, etc. Les cheptels sont décimés, et l'expertise de conclure : « loup non écarté » - malgré les preuves manifestes ! Certains loups attaquent non pour manger mais pour tuer ; ils approchent désormais des villages et des bergeries.

Les éleveurs, démunis, ne peuvent défendre leur troupeau, leur travail. L'élevage est en danger, comme nos AOP agneaux de pays, veaux du Ségala, Roquefort. Que comptez-vous faire pour lutter contre ce fléau ? (Applaudissements sur les travées des groupes UC, Les Républicains et INDEP ; M. Alain Richard applaudit également.)

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État, chargée de la biodiversité .  - Merci pour votre question. Nous sommes pleinement aux côtés des éleveurs (marques d'ironie sur les travées du groupe Les Républicains), pour la prévention et en cas de prédation.

Personne n'ignore les alertes. Nous respectons le travail des éleveurs. Il faut préserver les équilibres entre les espaces et les espèces. Des solutions existent, tous les budgets ne sont pas encore consommés. Nous devons développer la présence de chiens à côté des éleveurs. (Exclamations dubitatives sur les travées du groupe Les Républicains)

Le dispositif national se décline dans les territoires. Les préfets-loup sont réactifs quand des fronts de colonisation sont observés, notamment dans le Tarn où quinze attaques ont été identifiées en 2021, six déjà en 2022. Il faut une réponse rapide et ambitieuse.

M. Gérard Longuet.  - Et efficace !

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État.  - Une cellule de veille a été activée et les communes concernées ont été placées en cercle 2. Des subventions sont accordées pour financer chiens de protection et clôtures électrifiées. Un accompagnement technique est mis à disposition des éleveurs, et la direction départementale des Territoires a délivré six autorisations de tirs de défense. (« Paroles, paroles ! » sur les travées du groupe Les Républicains)

Nous sommes aux côtés des éleveurs ; à eux de se saisir des mesures de protection mises en oeuvre. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

M. Philippe Folliot.  - L'engrillagement des campagnes, les patous qui agressent les randonneurs ne sont pas la solution. Non, le loup n'est pas une espèce menacée ! Il est temps d'agir ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, INDEP et du RDSE)

Trajectoire des finances publiques

M. Jérôme Bascher .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) « Bonne nouvelle : les taux d'intérêt remontent », écrit Jean-Marc Daniel. En théorie, oui. Mais pas pour la France, vu l'état de nos finances publiques. Voici dix ans que nos déficits ne cessent d'augmenter, quelle que soit la croissance. (Protestations sur les travées du groupe SER, où l'on invoque l'héritage de Nicolas Sarkozy.)

Depuis dix ans, l'écart se creuse entre la France et l'Allemagne : il est passé de quatre points à quarante !

Êtes-vous aussi inquiets que la Cour des comptes ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Olivier Dussopt, ministre délégué, chargé des comptes publics .  - Les chiffres sont rassurants, en sortie de crise. (On se gausse à droite.)

M. François Bonhomme.  - Ça va bien se passer !

M. Olivier Dussopt, ministre délégué.  - Toujours les mêmes oiseaux de mauvais augure ! (Applaudissements sur les travées du RDPI)

La bonne nouvelle, c'est une croissance à 7 %, un taux d'emploi sans précédent depuis 1969, 650 000 créations d'emplois dans le secteur privé, l'investissement qui repart à la hausse. Cette croissance inespérée permet de réduire les déficits publics plus vite que prévu : il sera inférieur à 7 % en 2021, quand nous craignions 8,2 % ; la dette sera de 103 % au lieu de 120 %. (Mme Sophie Primas ironise.)

Nous faisons le choix du redressement des comptes par la croissance, qui entraîne des recettes. Nous ne faisons pas le choix de la facilité qui consiste à augmenter les impôts, car augmenter les impôts tue la croissance.

En 2011, quand Mme Pécresse était ministre du budget, elle avait augmenté les impôts de 15 milliards d'euros (exclamations à droite) ; nous, nous les baissons de 50 milliards d'euros, moitié pour les ménages, moitié pour les entreprises. (On rappelle l'augmentation de la CSG sur les travées du groupe Les Républicains)

Nous affichons le plus bas taux de prélèvements obligatoires depuis dix ans, après les chocs fiscaux de 2011 et de 2014.

Nous retrouverons l'équilibre par la croissance, comme nous avons tenu les engagements de la France face à l'Union européenne entre 2017 et 2020 (Applaudissements sur les travées du RDPI et du groupe INDEP ; Mme Sylvie Vermeillet applaudit également.)

M. Jérôme Bascher.  - Comme Talleyrand, vous traversez les régimes. Mais contrairement à lui, vous vous consolez, non en vous comparant, mais en vous regardant ! L'Allemagne, la Grèce même, font mieux que nous ! Le FMI s'inquiète de la situation de la France, le rapport de Rexecode souligne que notre industrie décroche. Et je ne parle pas des chiffres du commerce extérieur... Dans quel état laissez-vous la France ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Julien Bargeton.  - Tout ce qui est excessif est insignifiant.

Profits des grandes entreprises

Mme Isabelle Briquet .  - 137 milliards d'euros : ce sont les profits cumulés du CAC 40 en 2021, soit bien plus qu'en 2019. On peut se réjouir de la santé de nos entreprises mais l'ampleur des dividendes pose problème, quand on sait que ces entreprises bénéficient d'aides publiques -  qui se retrouvent dans la poche des actionnaires.

Depuis le début du quinquennat, vous multipliez les cadeaux fiscaux : suppression de l'ISF, flat tax, baisse des impôts de production... Aucune contrepartie n'est demandée aux entreprises, ni sociale ni écologique. Les salariés, les étudiants, les familles sont à la peine, la précarité s'installe, et vous laissez prospérer cette richesse improductive ?

Alors que le pouvoir d'achat des Français ne cesse de s'éroder, n'est-il pas temps de redistribuer les richesses ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

Mme Olivia Gregoire, secrétaire d'État, chargée de l'économie sociale, solidaire et responsable .  - C'est un plaisir de retrouver le Sénat. Je réponds au nom de Bruno Le Maire, à Toulouse avec le Président de la République pour parler politique spatiale. (On ironise à droite.)

Vous parlez de cadeaux fiscaux ; je parle de défense de notre souveraineté, de nos entreprises et de soutien aux salariés.

Oui, nous avons baissé les impôts de production, l'impôt sur les sociétés, transformé le CICE en réduction de charges, réformé le droit du travail, rendu 26 milliards d'euros aux entreprises et autant aux ménages. Vous parlez de cadeaux, je parle d'investissements.

Il est important que les entreprises fassent des bénéfices, que les actionnaires aient un retour sur investissement. Les dividendes rémunèrent le risque. Sans investissement, pas d'emploi, pas de hausse du pouvoir d'achat. (Protestations sur les travées du groupe SER)

Vous parlez de cadeaux ? Durant la crise, nous avons consacré 240 milliards d'euros à la protection de nos entreprises et de nos salariés. Soyons-en fiers.

Sur les 100 milliards d'euros du plan de relance, 72 milliards sont déjà engagés dans les territoires. Des contreparties sont exigées des entreprises, comme la production d'un bilan des émissions de gaz à effet de serre par exemple. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Mme Isabelle Briquet.  - Vous prônez le ruissellement comme outil redistributif, mais le pouvoir d'achat est à sec et la cohésion sociale se fissure. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

Loi EGalim II et crise porcine

M. Laurent Somon .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) À quelques jours du Salon de l'agriculture, les producteurs s'inquiètent des difficultés rencontrées dans les négociations EGalim II - aggravées par la hausse des énergies et des matières premières, et par les nouvelles réglementations qui s'imposent à eux.

En particulier, la filière porcine est en danger - elle perd 25 à 30 euros par porc, le solde déficitaire s'élève à 440 millions d'euros, mettant les exploitations en péril.

Qu'allez-vous faire pour garantir une juste rémunération des producteurs et pour préserver les filières ? Allez-vous agir dans le cadre de la présidence française de l'Union européenne pour une agriculture durable et équitable ?

Quand sortiront les décrets sur l'étiquetage origine France pour promouvoir la qualité française et le produire et transformer local ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe UC)

M. Julien Denormandie, ministre de l'agriculture et de l'alimentation .  - Vous connaissez ma position : la rémunération des agriculteurs est la mère des batailles. Tolérance zéro pour ceux qui ne respectent pas EGalim II.

Depuis le 1er janvier, plus de 250 enquêtes ont été ouvertes. La main du Gouvernement ne tremblera pas !

M. Bruno Sido.  - Très bien !

M. Julien Denormandie, ministre.  - EGalim II ne fait que corriger une loi délétère et mortifère...

Mme Sophie Primas.  - EGalim I ?

M. Julien Denormandie, ministre.  - ... la loi de modernisation de l'économie de 2008, erreur politique majeure. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Pour l'élevage porcin, nous avons lancé un plan de 270 millions d'euros ; 75 milliards d'euros sont déjà débloqués pour 1 700 dossiers déposés, les premiers versements ont été effectués. De mémoire de sénateur, quel plan d'urgence a été déployé avec une telle célérité ?

Le décret sur l'origine des viandes dans les cantines entrera en vigueur au 1er mars, afin de favoriser l'élevage français, l'élevage de vos territoires. (Applaudissements sur les travées du RDPI et sur quelques travées du groupe UC)

M. Laurent Somon.  - Les chèques ne sont que des cataplasmes. Quelle ambition, quel cap pour notre agriculture ? Vous remplacez nos produits du terroir par de la food tech, des steaks de synthèse et des larves de mouche, mais les Français n'en veulent pas. Il faut donner des perspectives aux agriculteurs français, sans quoi ils prendront la clé des champs ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe UC)

Notices rouges d'Interpol

M. Loïc Hervé .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Des États totalitaires font un usage incontrôlé des notices rouges d'Interpol - ces lettres de cachet, non motivées, émises au mépris des droits de la défense, qui servent de base à des détentions arbitraires d'otages judiciaires. ONG et avocats dénoncent ce procédé.

La France, pays des droits de l'Homme, doit se saisir de ce sujet, sachant qu'Interpol a son siège à Lyon.

Notre compatriote Hubert Goutay, homme d'affaires honorablement connu, est ainsi détenu au Maroc depuis octobre 2020 à la suite d'une notice rouge d'Interpol, dans l'attente d'une extradition demandée par le Bénin - pour une affaire sur laquelle il a déjà été entendu.

Comment la France peut-elle agir ? Quelles garanties pouvez-vous apporter à nos ressortissants ?

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères .  - Vous le savez, la compétence territoriale des États pour juger de tout crime et délit commis sur leur territoire, indépendamment de la nationalité de l'auteur, relève d'un principe général du droit international.

Il est cependant vrai que des États abusent des outils d'Interpol contre certains de leurs opposants réfugiés à l'étranger.

Cette organisation s'est saisie du problème que pose cette pratique inacceptable. Je ne peux pas commenter le cas que vous avez cité.

Interpol a mis au point un double filtre pour éviter les abus : au secrétariat général au moment de l'émission de la notice et, en cas de doute, un examen approfondi par la commission de contrôle indépendante.

Les bases de données de documents volés - ou pas - font également l'objet d'un contrôle renforcé. (M. François Patriat applaudit.)

M. Loïc Hervé.  - D'autres de nos compatriotes sont concernés. La neutralité de traitement doit être garantie.

La vigilance du ministre des Affaires étrangères, comme de la Chancellerie, doit être totale sur ce sujet. (Applaudissements sur les travées du groupe UC)

La séance est suspendue à 16 h 20.

présidence de Mme Nathalie Delattre, vice-présidente

La séance reprend à 16 h 35.