SÉANCE
du mercredi 27 octobre 2021
12e séance de la session ordinaire 2021-2022
présidence de M. Gérard Larcher
Secrétaires : M. Jacques Grosperrin, Mme Victoire Jasmin.
La séance est ouverte à 15 heures.
Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.
Questions d'actualité
M. le président. - L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.
Notre séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur notre site internet.
Chacun sera attentif au respect des uns et des autres et à celui du temps de parole.
Indemnité inflation et bouclier tarifaire
M. Stéphane Piednoir . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe UC) Je m'interroge. Agenda électoral ou effet du réchauffement climatique ? Cette année, Noël tombe en octobre. (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains) Dans la droite ligne du « quoi qu'il en coûte » jupitérien, pas une journée sans annonce gouvernementale dûment accompagnée d'un chèque. Chèque énergie, bouclier tarifaire, indemnité inflation : en deux mois, ce sont près de 12 milliards d'euros de dépenses qui viennent s'ajouter à un déficit public de plus de 3 000 milliards, soit 45 000 euros par Français.
Ces mesures sont sans doute bienvenues dans les foyers qui gèrent leur budget à l'euro près, mais les Français ne sont pas dupes. Vous n'éteindrez pas le mécontentement à coups d'aides ponctuelles. Les Français sont lucides sur la bombe à retardement que représente le poids de la dette.
Le Gouvernement a-t-il une stratégie en matière de dépenses publiques ? Plus difficile, comment compte-t-il assainir les comptes publics ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
M. Olivier Dussopt, ministre délégué, chargé des comptes publics . - Vous m'interrogez sur la réaction du Gouvernement face à la hausse du prix de l'énergie. Nous l'assumons totalement. Outre le chèque énergie de 100 euros pour 5,8 millions de foyers fragiles, le bouclier tarifaire, accepté par l'Assemblée nationale, limite la hausse des tarifs de l'électricité à 4 % pour cet hiver et plafonne le prix du gaz à son niveau d'octobre.
Tout Français gagnant moins de 2 000 euros nets par mois percevra l'indemnité inflation de 100 euros sans avoir à la demander. Il s'agit de soutenir le pouvoir d'achat des ménages face aux tensions inflationnistes liées à la reprise mondiale.
Nous avons fait le choix du « quoi qu'il en coûte », qui s'est traduit par un déficit public de 9,1 % en 2020. En 2022, il sera limité à 5 %. Nous craignions que la dette atteigne 120 % du PIB. Ce sera finalement 114 %, grâce à la qualité et à la force de la reprise : nous avons revu les prévisions de croissance à 6,5 %.
C'est par la croissance, la richesse produite que nous amortirons la dette. (Applaudissements sur les travées du RDPI)
M. Stéphane Piednoir. - Monsieur le ministre des déficits publics (applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains), vous ne répondez pas à ma question. Les deux derniers quinquennats ont été marqués par des renoncements coupables, sur la réforme de l'État, sur la politique énergétique... Vous ne proposez aucune solution de long terme ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
Rapport RTE et avenir du mix énergétique français
M. Jean-Pierre Moga . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Lundi dernier, le Gestionnaire du Réseau de transport d'électricité (RTE) a publié son étude prospective proposant six scénarios de mix électrique pour parvenir à la neutralité carbone en 2050. Espérons que le Gouvernement ne tardera pas à prendre des décisions.
Les six scénarios de RTE se fondent sur la stratégie nationale bas carbone, qui prévoit une baisse de 40 % des besoins énergétiques français d'ici 2050 - c'est énorme.
RTE mise sur une croissance de 1,3 % à partir de 2030, soit une hausse du PIB de 30 % d'ici 2050. Dans ces conditions, pour tenir l'objectif de baisse de la consommation, nous devrions gagner 70 % d'efficacité énergétique. C'est colossal ! Est-il plausible de revenir au niveau de consommation de la fin des années 1960 ? Comment y parvenir concrètement ? Quelles décisions avez-vous prévu de prendre ? (Applaudissements sur les travées des groupes UC et INDEP)
Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée, chargée du logement . - Ce rapport très important trace plusieurs chemins pour atteindre la neutralité carbone, tout en maîtrisant la facture des Français. Il fait suite à deux ans de concertation.
Il est fondé sur une constante : une baisse de la consommation de 40 % d'ici 2050. Nous allons décarboner notre mode de vie, sortir de notre dépendance au fossile, électrifier nos usages : en fonction de notre degré de réindustrialisation et de l'évolution des modes de vie, la consommation d'électricité va augmenter de 15 à 60 % d'ici 2050 selon les scénarios. Nous allons donc consommer moins d'énergie, mais plus d'électricité.
L'objectif d'une baisse de 40 % est ambitieux, mais il est dans la ligne des trajectoires européennes. Nous agissons. Deux exemples : la rénovation thermique des bâtiments grâce à MaPrim'Rénov avec 800 000 dossiers en 2021 et les aides au renouvellement du parc automobile, avec 400 000 bonus écologiques et 860 000 primes à la conversion.
M. Bruno Belin. - Pas une fois le mot « nucléaire »...
M. Jean-Pierre Moga. - Le nucléaire est une partie de la solution, non un problème. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP) Nous devons défendre notre modèle au niveau européen, notamment concernant la taxonomie.
Comptez sur la commission des affaires économiques du Sénat pour faire des propositions pragmatiques afin d'assurer notre avenir énergétique. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, Les Républicains, INDEP et du RDSE)
Harcèlement scolaire (I)
M. Fabien Gay . - (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE) Le 5 octobre dernier, la jeune Dinah, 14 ans, s'est suicidée. Sa famille a toute notre solidarité. C'est un drame pour la République et un échec collectif. Il ne doit pas se reproduire.
Quatorze ans, c'est un âge où la socialisation est fondamentale ; un âge particulièrement fragile.
Au parquet de Mulhouse d'apporter des réponses quant à la responsabilité de ce drame, mais il semble que Dinah ait été victime, comme 700 000 élèves, de harcèlement scolaire. Les victimes ont beaucoup de mal à parler, par peur des représailles. Elles doivent être accompagnées, trouver une oreille attentive.
Le programme de lutte contre le harcèlement à l'école, dit pHARe, porte-t-il ses premiers résultats ? Suffira-t-il ? Il est vital d'enrayer la disparition progressive des personnels médico-sociaux dans les établissements.
Sans aucun doute, les raisons de ces violences sont complexes, mais la banalisation des discours de haine, de l'intolérance et du racisme déteint partout, y compris à l'école et sur les réseaux sociaux.
L'éducation de nos enfants, leur émancipation est fondamentale. Ils sont notre avenir. (Applaudissements des travées du groupe CRCE jusqu'à celles du groupe Les Républicains)
M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports . - Je salue la dignité avec laquelle vous abordez ce sujet grave. Le suicide des adolescents est devenu un problème de société, comme le harcèlement scolaire.
Le plus important est la prévention. Je souscris à vos propos : nous sommes collectivement responsables du climat de notre société. Les adultes donnent l'exemple ; ils doivent être formés.
La loi pour l'école de la confiance a inclus la prévention du harcèlement dans la formation initiale des professeurs ; nous la systématisons également dans la formation continue. C'est l'objet du programme pHARe. Il prévoit aussi la formation des élèves, qui seront des ambassadeurs contre le harcèlement dans chaque établissement.
Des expérimentations ont eu lieu l'année dernière, inspirées des pays scandinaves et des meilleures pratiques mondiales. Les premiers résultats sont très encourageants.
Ces actions sont efficaces ; il faut aussi agir contre le cyber-harcèlement. Il faut aller plus loin et je suis ouvert aux propositions. (Applaudissements sur les travées du RDPI ; Mme Françoise Gatel applaudit également.)
Harcèlement scolaire (II)
M. Xavier Iacovelli . - Elle avait 14 ans. Elle était harcelée en raison de son orientation sexuelle. Après deux années d'humiliations, elle a mis fin à ses jours, comme dix-huit autres victimes de harcèlement scolaire depuis le début de l'année. Elle s'appelait Dinah.
Le harcèlement scolaire touche 700 000 élèves. Aucun mot n'apaise la douleur de perdre un enfant, mais nous pouvons agir pour qu'une telle tragédie ne se reproduise pas.
Le cyber-harcèlement accentue ce phénomène, sur ces réseaux sociaux où tout est permis, où rien n'est grave, où l'on oublie l'humain.
Le Gouvernement agit : je pense au programme pHARe, avec ses 10 000 élèves « ambassadeurs ». Je pense à la loi de 2019 et la directive du 30 septembre dernier, visant à mieux accompagner les élèves transgenres, qui a donné lieu à des caricatures malheureuses.
La réponse passe par la formation de la communauté éducative, mais aussi par un partenariat avec les acteurs associatifs qui se mobilisent pour prévenir, sensibiliser, libérer la parole afin de rompre l'insupportable chaîne du silence.
Quelle sera la réponse du Gouvernement pour endiguer ce phénomène qui détruit des vies ? (Applaudissements sur les travées du RDPI)
M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports . - Il faut actionner plusieurs leviers.
Le cyber-harcèlement est un phénomène international. Lorsque la France présidait le G7, elle a fait de ce sujet un enjeu mondial, avec une conférence internationale à l'Unesco ; la prochaine a lieu au Mexique dans quelques jours.
Nous devons faire pression sur les plateformes de réseaux sociaux. J'ai convoqué leurs dirigeants il y a trois semaines, avant ce drame, pour leur demander de prendre leurs responsabilités. L'interdiction aux moins de 13 ans doit être effective. Les algorithmes doivent être revus pour éviter l'addiction. Les signalements de contenus haineux doivent être suivis d'une réaction rapide des plateformes. Enfin, la réglementation nationale et internationale doit évoluer. J'ai demandé des propositions.
Nous serons extrêmement exigeants. C'est l'intérêt de tous que les plateformes agissent rapidement ; leurs dirigeants, qui sont eux-mêmes parents, en sont conscients. Nous avançons. (Applaudissements sur les travées du RDPI)
Harcèlement scolaire (III)
Mme Sabine Van Heghe . - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Ma question a déjà été abordée, car elle nous touche toutes et tous. Dinah allait avoir quinze ans, elle voulait être présidente de la République, elle avait l'avenir devant elle. Elle est la dix-neuvième victime cette année du harcèlement scolaire, en raison de son orientation sexuelle, de sa couleur de peau et de ses bonnes notes.
La mission d'information sur le harcèlement scolaire que j'ai présidée et dont Colette Mélot était rapporteure a proposé 35 mesures claires et immédiatement applicables. Les moyens doivent être renforcés. Les adultes, notamment les personnels médico-sociaux, doivent être présents pour écouter les enfants et détecter les signaux faibles.
L'inaction des réseaux sociaux est inadmissible : ce devra être une priorité de la présidence française de l'Union européenne. Il est urgent de stopper ce fléau. Quels moyens d'envergure allez-vous déployer ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; Mme Cathy Apourceau-Poly applaudit également.)
M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports . - Je salue le travail de la mission d'information que vous avez présidée, ainsi que le rapport de Mme Colette Mélot.
M. Emmanuel Capus. - Très bien !
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. - Je suis tout à fait ouvert à vos 35 propositions, que j'approuve, ainsi qu'à celles du député Erwan Balanant comme à tout ce qui peut nous faire progresser.
Nous ne partons pas de zéro. Depuis dix ans, un travail important a été mené. Le Président de la République a annoncé la généralisation des maisons d'adolescents dans tous les départements, et un meilleur suivi psychologique, grâce à des consultations gratuites.
Le phénomène est mondial. Tous les pédiatres voient monter le malaise des adolescents, notamment lié aux confinements, même si nous sommes moins touchés que d'autres.
Nous faisons preuve de volontarisme. Le programme pHARe fait de la France un avant-poste sur la question. Les recteurs sont mobilisés. Les équipes d'intervention extérieure des rectorats seront étoffées, les établissements seront évalués sur le climat scolaire.
Enfin, la solution passe aussi par l'engagement des collégiens dans des causes d'intérêt général. (Applaudissements sur les travées du RDPI ; M. Emmanuel Capus applaudit également.)
Usage des pesticides dans les zones agricoles
M. Henri Cabanel . - (Applaudissements sur les travées du RDSE) Santé Publique France et l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) ont annoncé le lancement d'une vaste étude pour évaluer l'exposition aux pesticides des riverains d'exploitation viticole. Qu'apportera-t-elle ? En juin dernier, l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) a confirmé le lien entre l'exposition professionnelle aux pesticides et six pathologies graves.
Que ferons-nous de ces chiffres qui vont jeter l'opprobre sur les agriculteurs ?
Comment l'Anses - juge et partie, car elle autorise la mise sur le marché de ces produits - diffusera-t-elle ces éléments à charge, qui placent les paysans sur le banc des accusés, alors qu'ils n'utilisent que des produits autorisés ? De fait, la filière viticole s'inscrit dans des démarches durables avec différents labels : bio, Terra Vitis, Vignerons engagés, Demeter... (Applaudissements sur les travées du RDSE et sur plusieurs travées du groupe Les Républicains)
M. Julien Denormandie, ministre de l'agriculture et de l'alimentation . - Cette étude va durer trois ans : les résultats sont attendus en 2024. Comme toute étude scientifique, elle se doit d'être objective, neutre et rigoureuse. Il ne s'agit en aucun cas de jeter l'opprobre sur une profession.
D'abord, ce serait terriblement injuste : les produits utilisés sont validés par l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA), puis leur mise sur le marché est autorisée par l'Anses. Ils sont donc autorisés par les autorités sanitaires.
Ensuite, ce ne serait pas conforme à la réalité. En France, la surface en culture biologique a doublé depuis 2017. Le nombre d'exploitations passées en haute valeur environnementale (HVE) a été multiplié par vingt depuis 2017. Les produits CMR1, les plus dangereux, ont été réduits de 93 %. Et certains disent que l'agroécologie ne serait pas une réalité sur le terrain ?
La science est là pour éclairer, pour progresser, jamais pour caricaturer. Telle devra être la ligne de conduite lors de la publication des résultats en 2024. (Applaudissements sur les travées du RDPI et sur quelques travées du groupe INDEP)
M. Henri Cabanel. - Nous sommes inquiets des interprétations qui seront faites de cette étude. Après la pandémie, après le gel du 8 avril qui va réduire les récoltes de 30 %, les viticulteurs n'ont pas besoin d'être montrés du doigt. (Applaudissements sur les travées du RDSE)
Concentration dans les médias
Mme Sophie Taillé-Polian . - (Applaudissements sur les travées du GEST) À six mois d'une échéance électorale majeure, la situation des médias est extrêmement préoccupante. (M. Roger Karoutchi approuve.)
La loi de 2018 sur le secret des affaires, puis la loi Sécurité globale ont entravé le travail des journalistes.
La concentration des médias entre les mains de quelques milliardaires s'accélère, poussant les Français à chercher l'information ailleurs, au risque de nourrir le complotisme. Où ? Notamment sur les réseaux sociaux, eux-mêmes aux mains de quelques milliardaires, et dont les algorithmes sont incontrôlables, comme l'ont montré les Facebook Files.
Nous nous attendions, madame la ministre, à ce que vous souteniez les salariés d'Europe 1, mais vous avez préféré vanter la fusion de TF1 et de M6, tandis que le Président de la République débarquait brutalement la directrice de l'Autorité de la concurrence, trop peu encline à laisser faire ce projet...
À l'heure du bilan, qu'avez-vous fait pour protéger l'indépendance éditoriale et lutter contre la concentration des médias, et ainsi assurer un débat public apaisé ? (Applaudissements sur les travées du GEST, du groupe CRCE et sur plusieurs travées du groupe SER)
Mme Roselyne Bachelot, ministre de la culture . - C'est vrai, on constate un phénomène de concentration dans les médias. L'apparition des grandes plateformes numériques et des réseaux sociaux y participe.
Nous avons besoin de champions nationaux forts pour investir dans la création française et européenne, mais toujours en veillant au respect du pluralisme et à la diversité de l'offre.
Nous avons pour cela des autorités administratives indépendantes, comme l'Autorité de la concurrence et le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA). Mais les textes de régulation sont anciens et lacunaires : seule la diffusion hertzienne et papier est prise en compte.
Avec Bruno Le Maire, nous avons mandaté nos inspections respectives afin de réfléchir à des instruments de régulation plus adaptés pour faire face à ces évolutions. Nous allons nous doter d'outils. (Applaudissements sur les travées du RDPI)
Voix à gauche. - Quand ?
Mme Sophie Taillé-Polian. - Je reste sur ma faim. Nous avons besoin d'une presse libre et diverse. L'intérim de la directrice de l'Autorité de la concurrence est assuré par une personne qui sera décorée de la Légion d'honneur par le Président de la République. Assurons déjà l'indépendance de ces autorités !
Ciblons les aides publiques sur la presse indépendante : elle a besoin de nous, et la démocratie a besoin d'elle. (Applaudissements sur les travées du GEST et sur quelques travées du groupe SER)
Stratégie européenne « Farm to Fork »
M. Franck Menonville . - La stratégie Farm to Fork, déclinaison du pacte vert pour l'Europe, vise, à horizon 2030, à porter à 25 % la part de l'agriculture biologique, à diminuer de 50 % l'utilisation de produits phytosanitaires et à réduire de 10 % la surface cultivée.
Les effets négatifs de cette stratégie sont patents mais la Commission européenne maintient sa ligne, sans étude d'impact.
On estime la perte de production entre 15 à 20 %, ce qui affectera le revenu des agriculteurs. L'Europe, d'exportatrice, deviendrait importatrice net ! Le comble, c'est que l'effet sur le changement climatique serait minime...
Ces propositions font fi de la situation géopolitique ; c'est un renoncement stratégique qui sacrifierait soixante ans de politique agricole commune. La crise sanitaire a pourtant mis en exergue le besoin d'autonomie et les risques de pénurie.
L'agriculture doit poursuivre sa mutation sans brutalité, en mobilisant la recherche et l'innovation. Quelle ligne allez-vous défendre au niveau européen pour garantir durablement notre souveraineté alimentaire ? (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP et Les Républicains)
M. Julien Denormandie, ministre de l'agriculture et de l'alimentation . - Dans ma vision de la politique, il n'y a jamais de renoncement, toujours une volonté d'action. (« C'est beau ! » sur les travées du groupe SER)
L'étude de la Commission européenne appelle un réveil des consciences. Cette nouvelle politique agricole commune va très loin : baisse de 13 % de la production, hausse de 20 % des importations. Les deux tiers des émissions de CO2 que l'on réduira en Europe seront réimportées ! Où est le sens ? (Applaudissements sur quelques travées au centre et à droite)
Le second réveil des consciences est de rappeler la finalité de notre agriculture, à savoir son rôle nourricier. L'Europe doit continuer à assumer ce rôle, pour sa souveraineté et pour le reste du monde, dans un contexte de réchauffement climatique.
Avec Clément Beaune, nous allons nous battre pour que l'étude d'impact soit réalisée, pour les clauses miroir et la réciprocité des échanges. La ligne est claire, il n'y aura pas de renoncement ! (Applaudissements sur les travées du RDPI et du groupe INDEP)
Ski et passe sanitaire
Mme Alexandra Borchio Fontimp . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Monsieur le secrétaire d'État chargé du tourisme, après avoir annoncé à Chambéry, le 30 septembre dernier, que les remontées mécaniques seraient accessibles cet hiver sans passe sanitaire ni limitation du nombre de personnes, vous avez changé de pied il y a quelques jours à Paris, expliquant qu'aucune décision sur le passe n'était prise...
Vous illustrez ainsi le « en même temps » cher à votre majorité, mais quel Jean-Baptiste Lemoyne devons-nous croire ? (Marques d'amusement sur les travées du groupe Les Républicains) Vous vous étiez engagé à apporter des réponses claires avant la mi-octobre !
Aujourd'hui, alors que la saison a démarré, les professionnels ne connaissent toujours pas les conditions d'accès aux remontées mécaniques ; ils sont désabusés, et les maires avec eux.
Les Alpes-Maritimes, département dont je suis l'élue, comptent sept stations de ski, dont certaines se remettent à peine de la tempête Alex. Elles veulent savoir où vous en êtes - si seulement vous le savez vous-même.
Rappelons que le ski est un sport d'extérieur : les skieurs sont bien plus éloignés les uns des autres qu'on ne l'est sur une plage ou dans une rame de métro... (On renchérit à droite.)
Le tourisme hivernal, qui attend cette saison pour rebondir, est las de vos atermoiements et de votre manque d'anticipation - ce sont, décidément, les éléments caractéristiques de la gestion de crise du Gouvernement.
Préférez-vous annoncer vos décisions aux intéressés quelques heures avant leur mise en application ? Ce ne serait pas la première fois...
Une bonne fois pour toutes, rassurez-nous sur l'avenir de nos stations de ski ! (Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Vincent Delahaye applaudit également.)
M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État, chargé du tourisme, des Français de l'étranger et de la francophonie . - Vous rassurer, naturellement : dix-huit mois, le Gouvernement agit sans relâche pour que le tourisme français reste debout.
Pour la montagne, nous avons mis en place, sous l'égide du Premier ministre, un plan d'urgence de 6 milliards d'euros en faveur des remontées mécaniques et des commerces, sans oublier les moniteurs. Par ailleurs, le plan Avenir montagne prévoit 300 millions d'euros d'investissements. (Murmures à droite)
J'en arrive à l'objet précis de votre question. (On ironise à droite.) Je crains, madame la sénatrice, que vous ne m'ayez écouté attentivement ni lors du congrès des domaines skiables de France, où vous n'étiez d'ailleurs pas, ni il y a quelques jours devant les élus et les acteurs de la montagne, avec qui j'ai à coeur d'entretenir un dialogue nourri.
Des stations ont ouvert - Tignes, Les Deux Alpes. À ce stade, le protocole ne prévoit pas de passe sanitaire. Mais, je l'ai toujours dit, nous devons rester attentifs à l'évolution de la situation sanitaire. Le passe sanitaire est un outil qui permet le maintien de certaines activités, comme on l'a vu l'été dernier.
À la demande des professionnels, nous menons une consultation. Nous leur apporterons de la visibilité dans les premiers jours de novembre.
Nous n'avons qu'un mot d'ordre : réussir la saison, pour que la montagne française soit de retour cet hiver !
Mme Alexandra Borchio Fontimp. - Je regrette que vous n'ayez pas rassuré clairement nos stations. Ma question simple appelait une réponse simple ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
Avenir de la papeterie Chapelle-Darblay
M. Didier Marie . - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Le 15 octobre dernier, le groupe finlandais UPM a annoncé son intention de céder la papeterie de Chapelle-Darblay, en Seine-Maritime.
L'affaire n'est pas locale : ce site est la dernière usine française en mesure de produire du papier 100 % recyclé. Sa capacité de recyclage se monte à 480 000 tonnes par an, soit la collecte effectuée auprès de 24 millions de Français.
Le projet retenu par UPM, celui du groupement Samfi-Paprec, prévoit l'abandon de l'activité de recyclage et l'hypothétique mise en place d'une unité de production d'hydrogène.
Or une offre alternative, présentée par Veolia et Fibre Excellence, prévoit la production de 400 000 tonnes de cartons d'emballage ; elle a été écartée, alors qu'elle préserverait le site industriel et recréerait 250 emplois. Ce projet d'économie circulaire cohérent, qui emprunterait la voie fluviale, a le soutien des syndicats comme des élus.
La métropole Rouen Normandie entend faire valoir son droit de préemption, pour sauvegarder l'outil industriel. Comment le Gouvernement compte-t-il appuyer cette démarche ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; M. Éric Bocquet applaudit également.)
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée, chargée de l'industrie . - Bruno Le Maire et moi-même suivons ce dossier avec la plus grande attention. Et une boussole : recréer le plus grand nombre possible d'emplois industriels à la Chapelle-Darblay, qui en comptait 228 il y a deux ans.
Grâce à notre mobilisation, le site a été maintenu en état depuis sa fermeture, le temps que des repreneurs soient trouvés. Deux solutions ont émergé, portées par deux grands groupes français ; c'est une bonne nouvelle.
L'entreprise UPM a choisi l'offre de Samfi-Paprec plutôt que celle déposée il y a deux semaines - portée, à ce stade, par Veolia seule. Nous regrettons qu'UPM n'ait pas retardé sa décision pour réexaminer en détail les deux offres.
Le droit de préemption est une compétence de la métropole Rouen Normandie. Nous serons au rendez-vous pour accompagner toute solution de nature à maximiser le nombre d'emplois recréés au service de notre transformation environnementale.
Nous l'avons déjà fait dans le secteur du papier-carton, en trouvant une solution pour le site Fibre Excellence de Tarascon ou encore en sécurisant le site d'Alizay. Nous le ferons aussi pour Chapelle-Darblay, comme je l'ai répété ce matin au président de la métropole Rouen Normandie. (Applaudissements sur les travées du RDPI)
M. Didier Marie. - Depuis l'arrêt des machines, 480 000 tonnes de papier ont été envoyées à l'étranger, incinérées ou enfouies. Le Président de la République a fait de l'économie circulaire une priorité du plan France 2030 : le Gouvernement doit passer des paroles aux actes en appuyant l'initiative de la métropole Rouen Normandie ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER)
Dysfonctionnement de Bloctel
M. Hugues Saury . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Le démarchage téléphonique peut confiner au harcèlement. Pour y échapper, plus de quatre millions de foyers ont recours à Bloctel, pour environ onze millions de numéros. Si le dispositif est parfois critiqué car aisément contournable, treize milliards d'appels ont été bloqués depuis son lancement, en 2016.
La Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) a lancé un appel d'offres pour renouveler la concession. Avec cinq mois de retard, la société Wordline a été choisie pour les cinq prochaines années.
Le service est resté inaccessible, puis dégradé - et le sera jusqu'en novembre -, avec des conséquences fâcheuses : inscription impossible, recrudescence des appels intempestifs, impossibilité pour les entreprises d'identifier les numéros qui leur sont interdits, ce qui les expose à de lourdes sanctions.
Comment expliquer ces négligences ? Quand le service opérera-t-il de nouveau de manière fiable ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Stéphane Demilly applaudit également.)
M. Alain Griset, ministre délégué, chargé des petites et moyennes entreprises . - Le Gouvernement est déterminé à protéger les consommateurs dans leur vie quotidienne, en particulier contre les sollicitations téléphoniques indésirables, un désagrément majeur. Je suis conscient de l'attente des Français à cet égard.
Un nouveau prestataire a été récemment choisi, pour améliorer le service. Depuis le 1er octobre, il propose des fonctionnalités élargies à un coût nettement réduit, notamment pour les petites entreprises.
Les travaux de modernisation ont eu une incidence temporaire sur le service, mais les consommateurs inscrits sur Bloctel sont toujours restés couverts. Tout est revenu à la normale depuis bientôt trois semaines. (M. François Bonhomme le conteste.) Depuis deux jours, il est à nouveau possible de protéger de nouveaux numéros.
La DGCCRF informe en toute transparence les associations de consommateurs et les entreprises du secteur de l'avancée des travaux. Elle est pleinement mobilisée pour faire cesser les démarchages abusifs.
M. François Bonhomme. - La fiche du ministre date de 2017 !
M. Hugues Saury. - Après la distribution des tracs électoraux, Bloctel : deux appels d'offres lancés par le Gouvernement dont nos concitoyens ont eu à pâtir. Cela révèle un défaut de pilotage politique autant que des lourdeurs administratives. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
Respect des normes par les plateformes de vente en ligne
M. François Bonneau . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Le 15 octobre dernier, la DGCCRF a publié un rapport accablant sur la conformité aux normes françaises et européennes des produits vendus sur les principales plateformes en ligne : 60 % des produits testés présentent une anomalie et 32 % sont même dangereux - treize adaptateurs électriques sur quinze font courir un risque de choc électrique...
La DGCCRF a fait retirer ces produits de la vente, mais c'est une goutte d'eau dans un océan d'impunité... Serions-nous impuissants à protéger nos concitoyens ?
Le problème est aussi économique, car la concurrence entre les charlatans online et les commerçants de nos territoires est déloyale ; ces derniers paient loyers, taxes et charges sociales et respectent les normes. Fragilisés par la crise sanitaire, nos commerces ne doivent plus être exposés à une concurrence qui menace la sécurité des consommateurs en nous inondant de produits dangereux !
Quelles mesures concrètes le Gouvernement compte-t-il prendre pour que les produits vendus en ligne soient soumis aux mêmes normes que ceux vendus dans nos magasins ? Allez-vous imposer des sanctions dissuasives ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur plusieurs travées du groupe Les Républicains)
M. Alain Griset, ministre délégué, chargé des petites et moyennes entreprises . - La sécurité des produits est un enjeu majeur de protection des consommateurs.
Visitant récemment, avec Cédric O, des services de la DGCCRF, j'ai découvert un véritable musée des horreurs : bijoux de fantaisie contenant des métaux lourds, chargeurs de téléphone susceptibles de déclencher un incendie, peluches dangereuses pour les enfants.
Les places de marché en ligne sont une formidable opportunité pour nos PME, mais elles facilitent aussi l'accès à notre marché à des vendeurs implantés dans des pays extraeuropéens et pas toujours au fait des normes applicables sur notre territoire.
Le Gouvernement est engagé pour faire évoluer les règles européennes auxquelles ces opérateurs sont soumis. À la faveur de la présidence française de l'Union européenne, nous allons oeuvrer pour que la spécificité des places de marché en ligne soit prise en compte, notamment dans le cadre du Digital Services Act et de la directive sur la sécurité générale des produits.
Il n'y a pas de raison de tolérer en ligne ce que nous n'accepterions jamais dans les commerces physiques ; c'est une question d'équité. Ce sujet sera au coeur des Assises du commerce, en décembre.
La DGCCRF fait preuve d'une vigilance constante pour faire retirer les produits dangereux. Le Gouvernement est déterminé à avancer vite et fort pour mieux protéger les consommateurs. (M. André Gattolin applaudit.)
M. François Bonneau. - Il faut agir vite, car les produits non conformes sont de plus en plus nombreux. N'attendons pas que des accidents graves se produisent ! (Applaudissements sur les travées du groupe UC)
Prévention des feux de forêt
M. Jean Bacci . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Le Gouvernement vient de lancer les assises de la forêt et du bois. Dans ce cadre, la biodiversité est un enjeu primordial et la décarbonation, une des principales orientations budgétaires.
Malheureusement, la lutte contre les incendies semble avoir été oubliée, alors que les conséquences des méga-feux sont considérables. Dans le Var, cet été, 7 000 hectares ont été ravagés en quatre jours - ce qui représente 325 000 tonnes de CO2, autant que les émissions de l'agglomération marseillaise pendant six mois !
Il importe de développer les actions de prévention des collectivités territoriales par une nouvelle réglementation et un financement complémentaire de l'État. Or le projet de loi de finances pour 2022 ne semble pas à la hauteur, au contraire : 500 emplois vont être supprimés à l'Office national des forêts et 30 millions d'euros seront retirés aux communes forestières d'ici à 2025.
Alors que la guerre du feu requiert des moyens aériens importants, notre flotte de Canadair est vieillissante ; son renouvellement est possible dans le cadre d'une commande collective. L'Europe pourrait se doter d'une flotte d'appui aux pays méditerranéens, avant que des territoires plus septentrionaux soient eux aussi touchés, du fait du réchauffement climatique. J'ai attiré l'attention du président de la commission du développement régional du Parlement européen sur cette nécessité.
Le Gouvernement est-il prêt à intégrer la question des feux dans les assises de la forêt ? Entend-il soutenir les collectivités territoriales dans leurs actions de prévention ? Enfin, dans le cadre de la présidence française de l'Union européenne, la mise en place d'une flotte européenne de bombardiers d'eau sera-t-elle envisagée ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État, chargée de la biodiversité . - Les Assises de la forêt et du bois viennent d'être lancées par Julien Denormandie, Agnès Pannier-Runacher et moi-même. La question des feux de forêt y sera bien entendu abordée.
Mais nous n'avons pas attendu ces assises pour agir contre les incendies. Une campagne de prévention a été lancée cet été - n'oublions pas que neuf feux sur dix sont la conséquence d'un comportement individuel.
Avec le ministre de l'Intérieur, nous renforçons les moyens de détection. Avec le ministre de l'agriculture, nous travaillons à rendre plus effectives les obligations légales de débroussaillement et à cartographier la végétation forestière en fonction de sa sensibilité.
Nous attendons des assises qu'elles travaillent sur la résilience des forêts face au changement climatique, qui laisse craindre des épisodes de feu plus nombreux et plus violents. En particulier, les bâtiments agricoles doivent être rendus plus résistants au feu.
Enfin, comme vous l'avez souligné, une coopération internationale est nécessaire, surtout avec le déplacement des incendies vers le Nord. (M. François Patriat applaudit.)
Risque d'ingérences étrangères et référendum en Nouvelle-Calédonie
M. Mickaël Vallet . - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Monsieur le Premier ministre, un chapitre politique majeur s'écrit en Nouvelle-Calédonie.
À la suite des accords de Matignon et Nouméa, signés par Michel Rocard et Lionel Jospin, deux référendums se sont tenus ; la Nouvelle-Calédonie a montré son attachement à la République française.
Le troisième référendum, prévu le 12 décembre prochain, se tiendra dans un contexte international et régional tendu.
Au plan international, les opérations de déstabilisation électorale se multiplient depuis quelques années - songez au référendum d'indépendance en Écosse ou à la dernière élection présidentielle états-unienne. Ce sont là des maux mondiaux qu'on ne peut ignorer.
Au plan régional, l'Indopacifique est en proie à de très fortes tensions. Ne doutons pas que l'ensemble des puissances régionales s'intéressent au scrutin référendaire de très près.
Quelle est votre appréciation des risques d'ingérences étrangères et comment comptez-vous y faire face pour garantir la légitimité du scrutin ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER)
M. Sébastien Lecornu, ministre des outre-mer . Vous avez raison : les circonstances ont bien changé depuis 1988 - à l'époque, la guerre froide avait peu d'implications dans le Pacifique sud. Quant aux accords de Nouméa, ils ont été conclus dans un contexte où c'est plutôt la Polynésie française qui attirait l'attention, du fait de nos essais nucléaires.
Lors du deuxième référendum, 9 000 voix seulement séparaient le oui et le non. La question des ingérences et manipulations, étatiques ou autres, est donc particulièrement prégnante.
Les préparatifs se poursuivent en vue du scrutin du 12 décembre : sécurisation des bureaux de vote, mise à jour des listes électorales, ouverture de bureaux délocalisés.
Le contexte sanitaire reste une inconnue ; des mesures de freinage sont en cours, et nous surveillons la situation quotidiennement.
S'agissant des ingérences, notre vigilance se porte notamment sur le dossier du nickel et d'éventuelles instrumentalisations des antivax. De manière moins conventionnelle, nous surveillons aussi l'espace numérique, notamment avec la cellule VigNum - nous en tirerons les enseignements pour l'élection présidentielle.
Je me tiens à la disposition du Sénat pour de plus amples précisions. (Applaudissements sur les travées du RDPI)
M. Mickaël Vallet. - Merci pour votre réponse. Nous sommes tous conscients que ce scrutin doit être irréprochable pour que la souveraineté des électeurs soit respectée. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)
Loup
Mme Martine Berthet . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Je regrette l'absence de Mme Pompili, à qui cette question était destinée.
La colère gronde chez les éleveurs ; ils essaient de se faire entendre, mais en vain.
Une chose est sûre : nos éleveurs ne pourront revivre une saison comme celle qu'ils viennent de connaître, avec des attaques de loup incessantes sur des territoires de plus en plus étendus.
M. Loïc Hervé. - Très bien !
Mme Martine Berthet. - En plus des brebis et chèvres, vaches et veaux sont pris pour cibles par le prédateur, mais aussi chevaux, ânes et chiens.
Parfois, les éleveurs doivent achever eux-mêmes le travail du loup sur des animaux qu'ils ont élevés avec soin... Est-ce là du bien-être animal, du bien-être au travail ?
L'entêtement du Gouvernement à gaspiller de l'argent public en indemnisations est incompréhensible. Protéger quoi qu'il en coûte une espèce au détriment de nombreuses autres - plus un seul mouflon en Haute-Maurienne - est un contresens écologique.
Alors que la loi Climat et résilience vise à favoriser la consommation locale et durable, ce que nous voulons aussi, vous empêchez nos éleveurs de produire laitages et viandes.
Les demandes des éleveurs sont simples : comptage contradictoire des loups, responsabilité en justice de l'État et autorisations systématiques de tirs de défense en zone de présence permanente. Quand les entendrez-vous ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur plusieurs travées du groupe UC)
M. Loïc Hervé. - Très bien !
Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État, chargée de la biodiversité . - Avec Barbara Pompili, je suis pleinement mobilisée pour assurer l'équilibre entre la préservation d'une espèce protégée et les activités pastorales indispensables à nos territoires. Nul n'ignore les incidences des prédations ; nous mesurons combien elles sont marquantes pour les éleveurs.
Nous devons agir avec raison et le triple souci de nos éleveurs, de nos territoires et de la biodiversité. Dans le cadre du plan national, les comités départementaux prévoient des mesures au plus près du terrain, de l'effarouchement aux prélèvements éventuels.
Parce que les comportements des prédateurs, la topographie et les types d'élevages sont très variables, il nous faut un dispositif agile. (Murmures à droite et au centre ; plusieurs sénateurs du groupe Les Républicains imitent le cri du loup.)
Les premiers résultats sont là : la prédation s'est stabilisée cette année, voire a légèrement reflué.
M. Loïc Hervé. - C'est faux !
Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État. - L'État est présent auprès des éleveurs pour indemniser leurs pertes. En réponse à la demande du Président de la République, nous allons ouvrir le sujet du comptage, car nous devons nous accorder sur des données objectivées. Il faut aussi des clarifications sur les chiens de troupeau. (Murmures prolongés à droite et au centre ; plusieurs sénateurs du groupe Les Républicains imitent derechef le cri du loup.)
Nous voulons avancer rapidement. Julien Denormandie s'est récemment rendu en Haute-Savoie sur ce sujet.
M. le président. - Il faut conclure, madame la secrétaire d'État.
Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État. - Le préfet coordonnateur a insisté auprès des préfets compétents sur la nécessité de maintenir le pastoralisme, tout en assurant la préservation d'une espèce essentielle à l'équilibre des écosystèmes.
Mme Martine Berthet. - Ces promesses n'ont que trop duré. Il y a urgence à protéger nos éleveurs, nos AOP et IGP, nos paysages et notre économie touristique. Il faut protéger l'ensemble de notre biodiversité et non une seule espèce, qui compte plus à vos yeux que la détresse de nos éleveurs ! (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; plusieurs sénateurs du groupe UC applaudissent également.)
Prévention de l'insuffisance cardiaque
Mme Évelyne Perrot . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Ma question s'adressait au ministre de la santé, mais je suis ravie de la poser à Mme la ministre déléguée.
Une page de la presse locale de mon département m'a interpellée. Elle rapporte que l'insuffisance cardiaque est la première cause d'hospitalisation après 65 ans.
Ce mal insidieux doit être dépisté le plus tôt possible, car, non traité, il est mortel dans un cas sur deux. Pas moins de 1,4 million de personnes sont concernées, soit autant que pour la maladie d'Alzheimer. Aujourd'hui, on meurt plus d'une insuffisance cardiaque que du cancer du sein. Les femmes sont plus touchées que les hommes.
Chaque année, 160 000 personnes sont hospitalisées pour insuffisance cardiaque aigüe, et on déplore 70 000 décès. Pourtant, le grand public ignore encore largement cette affection.
Il est urgent d'organiser un dépistage précoce, de créer une filière de soins spécifique et de communiquer sur les signes de cette maladie. Bref, de faire de la lutte contre l'insuffisance cardiaque une priorité de santé publique.
Après le plan Alzheimer et le plan cancer, à quand le plan insuffisance cardiaque ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC)
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée, chargée de l'autonomie . - Vous avez raison : l'insuffisance cardiaque est un enjeu majeur de santé publique.
Nous y travaillons depuis quelques années, notamment pour identifier les pathologies menant à une insuffisance cardiaque.
Notre politique de prévention repose sur la maîtrise des risques. Ainsi, la stratégie nationale de santé 2018-2022 et le plan national Priorité prévention prévoient des mesures pour contenir les facteurs de risque - soutien à l'activité physique, amélioration de la lutte contre le tabac, réduction de la consommation de sel.
Nous menons aussi une politique de repérage et de prise en charge précoces des pathologies cardiaques. Le repérage du risque cardiovasculaire est intégré à la formation continue des soignants. Nous soutenons un programme expérimental de l'AP-HP pour une meilleure coordination des intervenants. Je n'oublie pas le projet « As du coeur », destiné à développer l'activité physique adaptée chez les insuffisants cardiaques.
Par ailleurs, nous lancerons prochainement une mission sur les mobilités actives.
M. le président. - Il faut conclure, madame la ministre déléguée.
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. - L'attention du Gouvernement ne s'est jamais relâchée, et nous comptons continuer à agir.
Mme Évelyne Perrot. - Il faut travailler à une meilleure connaissance des symptômes par le grand public. Je remercie le docteur Jérôme Costa pour son article dans la presse locale, qui a contribué à sensibiliser la population. (Applaudissements sur les travées du groupe UC)
La séance est suspendue à 16 h 20.
présidence de M. Roger Karoutchi, vice-président
La séance reprend à 16 h 30.