SÉANCE
du jeudi 7 octobre 2021
3e séance de la session ordinaire 2021-2022
présidence de M. Georges Patient, vice-président
Secrétaires : Mme Marie Mercier, M. Jean-Claude Tissot.
La séance est ouverte à 10 h 30.
Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.
Questions orales
M. le président. - L'ordre du jour appelle vingt-neuf questions orales.
Création d'une ligue Alsace de tennis
M. Christian Klinger . - Le projet de création d'une ligue de tennis Alsace rencontre des difficultés. Créée après les accords de Matignon et la loi du 2 août 2019, la Collectivité européenne d'Alsace (CEA) a la possibilité, aux termes de son article 5, de créer des ligues sportives à son échelle. La ligue de tennis Alsace aurait dû être créée le 1er septembre et l'actuel président de la Fédération française de tennis (FFT), Gilles Moretton, s'y était déclaré favorable durant la campagne électorale. Mais les nouvelles instances de la FFT ont ensuite rétropédalé et mis fin au projet, alors que plus de 95 % des clubs du Haut-Rhin et 97 % de ceux du Bas-Rhin le soutenaient...
Que faire pour amener la FFT à respecter l'esprit de la loi ?
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État, chargée de la jeunesse et de l'engagement . - Après un large processus démocratique et sous l'impulsion du Premier ministre, la loi du 2 août 2019 a en effet créé la CEA.
Toutefois, les services de l'État restent départementaux. Si des organes infrarégionaux peuvent être créés à l'échelle de la CEA, ils doivent s'articuler avec les services déconcentrés. Le code du sport prévoit une telle dérogation.
La FFT est indépendante. Le ministère des sports avait indiqué qu'il examinerait toute demande motivée adressée par la fédération ; il ne peut que le confirmer.
M. Christian Klinger. - Nous attendons que le Gouvernement intercède auprès de la FFT car la demande émane des clubs à 95 et à 97 %. L'État veille au respect des règles par les fédérations, comme le prévoit l'article L. 111-1 du code du sport.
Éligibilité au Pass'sport
Mme Corinne Imbert . - Le Pass'sport est une allocation de rentrée sportive de 50 euros par enfant dont l'objectif est de financer l'inscription dans une structure sportive. Il s'adresse aux enfants de 6 à 17 ans bénéficiaires de l'allocation de rentrée scolaire ou de l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé. Il permet l'inscription de 5,4 millions d'enfants à une activité sportive.
Cependant, seules les associations volontaires affiliées à une fédération sportive, et dans les quartiers de la politique de la ville, les associations sportives agréées, peuvent y participer. Or, en milieu rural, des associations ne sont pas affiliées à une fédération - je pense au comité sportif départemental des foyers ruraux. Aussi, ces structures se retrouvent exclues de ce dispositif.
Le Gouvernement entend-il rectifier cette situation ?
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État, chargée de la jeunesse et de l'engagement . - Le Pass'sport, co-construit avec le Comité national olympique et sportif français (CNOSF), est une véritable allocation de rentrée sportive et sera reconduit dans le projet de loi de finances 2022, à hauteur de 100 millions d'euros, pour accompagner la reprise d'une activité et lutter contre le fléau de la sédentarité.
Il a été initialement décidé de s'appuyer sur les associations rattachées à une fédération ou présentes dans les quartiers prioritaires de la ville, pour simplifier le fonctionnement.
Même en milieu rural, les associations peuvent s'affilier à une fédération. Celles qui font le choix de ne pas le faire ne peuvent prétendre au bénéfice du Pass'sport.
Cependant le bilan du 15 octobre prochain sera l'occasion de faire évoluer le dispositif.
Mme Corinne Imbert. - Votre réponse me laisse espérer une suite favorable. Ne laissez pas de trous dans la raquette de ce bon dispositif !
Passe sanitaire et entraînements sportifs
Mme Christine Lavarde . - Je regrette l'absence de la ministre des sports qui a pratiqué une discipline impliquant plusieurs entraînements par semaine et beaucoup de matériel. Elle aurait bien compris le problème !
Du Pass'sport au passe sanitaire : depuis juillet, les sportifs doivent présenter leur passe, même pour des activités en plein air.
Le décret du 7 août prévoit que les données ne sont pas enregistrées : il faut donc renouveler le contrôle à chaque séance. Mais les responsables de fédérations ont souligné que les bénévoles ne peuvent pas tout faire !
Jean-Michel Blanquer, le 28 septembre dernier, a fini par déclarer qu'on ne devait présenter le passe qu'une fois. Laquelle de ces deux règles faut-il appliquer ? Le décret où la règle non écrite qui implique la constitution d'un fichier des adhérents déjà contrôlés ?
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État, chargée de la jeunesse et de l'engagement . - Le passe sanitaire, avec le respect des gestes barrières, est le sésame autorisant la pratique sportive sans jauge ni restriction excessive.
Pour assurer la fluidité et l'efficacité, le ministre échange avec le CNOSF et les autres instances concernées. Le contrôle de passe est confié aux bénévoles ou aux professionnels. Les clubs connaissent leurs membres : le pragmatisme doit être de mise s'agissant des adhérents qui ont un schéma vaccinal complet.
Dans les club-houses et les cafétérias des centres sportifs, le passe reste bien entendu applicable comme dans tout le secteur de la restauration. Il sera bientôt demandé aux jeunes sportifs dès douze ans et deux mois ; les tests resteront gratuits pour les jeunes.
Mme Christine Lavarde. - Vous rappelez des éléments connus mais j'aurais souhaité une réponse claire : pourra-t-on dresser une liste des adhérents déjà contrôlés ?
Oubliés du Ségur de la santé (I)
M. Gilbert Bouchet . - Le secteur privé non lucratif représente un grand nombre d'établissements. Les mesures du Ségur de la santé ont été étendues au secteur privé mais sans compensations financières suffisantes pour les organismes de tutelle. La revalorisation des salaires du personnel non médical, à hauteur de 238 euros brut, implique un fort surcoût ; les établissements privés se trouvent en tension sur les ressources humaines ; le personnel cherche à fuir vers le secteur public où les revalorisations sont déjà en vigueur.
En outre, l'évolution des salaires des médecins et la possibilité pour eux d'exercer d'une activité privée dans le public créent une distorsion avec le secteur privé à but non lucratif. Enfin, les professions d'accompagnement des handicapés sont pour la plupart oubliées du Ségur.
Face à cette inquiétude grandissante, quelle aide les établissements privés pourraient-ils espérer ?
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État, chargée de la jeunesse et de l'engagement . - L'attractivité des métiers est le pilier du Ségur, avec 9 milliards d'euros de revalorisation, dans le secteur sanitaire et social, pour les établissements publics et privés.
Toutes ces mesures sont financées dans le cadre de l'Ondam. Dès les accords en juillet 2020, les mesures ont été transposées pour les établissements privés et le personnel non médical, soit plus de 1 million de professionnels.
La mission Laforcade a débouché sur une revalorisation des salaires dans le secteur médico-social privé non lucratif.
Les soignants et accompagnants percevront 183 euros net de plus par mois, à compter du 1er janvier 2022 ; l'impact financier est pris en compte par l'assurance maladie.
En outre, le Gouvernement souhaite que les salariés des établissements médico-sociaux bénéficient dès 2022 de la refonte des grilles indiciaires.
Oubliés du Ségur de la santé (II)
M. Bruno Belin . - On le voit, le compte n'y est pas pour les « oubliés du Ségur ».
Quand les salaires au sein des résidences autonomie seront-ils revalorisés ?
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État, chargée de la jeunesse et de l'engagement . - Le Gouvernement reconnaît l'engagement des personnels. Dans la continuation des travaux de M. Laforcade, les discussions avec les syndicats se poursuivent, avec un protocole signé le 28 mai étendant le complément de traitement indiciaire à tout le personnel soignant, notamment aux auxiliaires de soins, à compter du 9 octobre.
Les professionnels du privé en bénéficieront aux 1er janvier 2022, grâce à un second accord de méthode. Dans les autres secteurs, toute revalorisation doit faire l'objet de nouvelles discussions.
M. Bruno Belin. - Je vous remercie mais je regrette l'absence des ministres chargés du sujet. Je n'ai pas eu ma réponse. Il y a 67 millions d'oubliés du Ségur en France. Car aucune réponse n'a été apportée sur les déserts médicaux ; dans ces endroits, souffrance rime avec patience, madame la ministre.
Je tiens aussi à exprimer ma solidarité avec les sages-femmes : le Gouvernement doit les soutenir. Il y a 800 000 naissances chaque année.
Bracelets anti-rapprochement
Mme Martine Filleul . - Depuis 2019 et la crise sanitaire, violences conjugales et féminicides se multiplient. Le bracelet anti-rapprochement devait être généralisé mais il est rarement imposé au conjoint violent. Ni à Hayange, ni à Mérignac,...
Dans le Nord, 32 seulement sont en service, principalement à Douai. Le ministre de la justice avait pourtant affirmé que les bracelets n'avaient pas vocation « à rester dans les tiroirs ».
Les procureurs demandent des moyens humains supplémentaires. Quand donnerez-vous à la justice les moyens de protéger les femmes victimes, notamment en recrutant des assistants spécialisés et des juristes dédiés ?
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État, chargée de la jeunesse et de l'engagement . - Les violences intrafamiliales sont un véritable fléau. Au 27 septembre 2021, 414 mesures ont été prononcées contre 55 fin mars. Cela ne suffit pas, mais c'est encourageant. Et 426 demandes d'intervention des forces de sécurité ont été enregistrées, après déclenchement de l'alarme. Des crimes ont été évités.
Par une dépêche du 27 mai dernier, le garde des Sceaux a incité les parquets à généraliser le déploiement des bracelets anti-rapprochement. Le téléphone grave danger est une mesure importante également pour la protection des victimes : 2 514 téléphones grave danger ont été distribués ; leur nombre sera porté à 3 000. Les ordonnances de protection sont en constante augmentation.
Le garde des Sceaux a prévu des emplois en plus : 61 juristes-assistants pour trois ans et 106 agents de catégorie A avec des contrats de quatre ans. La détermination du Gouvernement à lutter pied à pied contre ce fléau est sans faille.
Mme Martine Filleul. - Je vous remercie pour ces informations, mais j'aurais souhaité des précisions sur la situation dans le Nord. Nous manquons de moyens et d'informations pour combattre ces violences gravissimes.
Agrément des associations d'aide aux victimes de violences
Mme Laurence Rossignol . - Un véritable loupé est à déplorer dans l'application de la loi du 29 mars 2019. Les textes d'application réservent aux seules associations généralistes l'agrément nécessaire pour assurer l'accompagnement des femmes victimes d'infractions pénales. Les Centres d'Information sur les Droits des Femmes et des Familles (CIDFF), dont c'est la mission depuis 40 ans, se voient refuser l'agrément à cause de cela. Ce loupé légistique sera-t-il réparé au plus vite ?
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État, chargée de la jeunesse et de l'engagement . - Le travail des CIDFF est reconnu, mais il est vrai qu'ils ne peuvent être agréés : le texte réserve la prise en charge aux associations qui sont en mesure d'apporter une prise en charge globale et pluridisciplinaire - ce que vous appelez « généraliste ».
Le garde des Sceaux a demandé à ses services de trouver une solution juridique pour étendre l'agrément à ces centres.
Mme Laurence Rossignol. - Si je comprends bien, les CIDFF pourraient rapidement bénéficier à nouveau de l'agrément. C'est une bonne nouvelle. Je souhaite que le garde des Sceaux nous informe de la parution de la mesure réglementaire pour que nous puissions en informer les associations.
Services d'aide et d'accompagnement à domicile
Mme Anne-Catherine Loisier . - Je tiens à attirer l'attention sur d'autres oubliés du Ségur. Les personnes âgées dépendantes accueillies dans les Ehpad ne représentent que 40 % des bénéficiaires de l'allocation personnalisée à l'autonomie (APA). Les 60 % restants sont pris en charge à leur domicile, sans compter toutes les personnes dépendantes mais non bénéficiaires de l'APA.
Si l'on se félicite des 1,4 milliard d'euros inscrits dans le PLFSS pour 2021 afin de revaloriser les salaires dans les Ehpad, il est difficile de comprendre pourquoi seulement 200 millions d'euros ont été prévus pour les acteurs de l'accompagnement à domicile. Avec un ratio analogue, il faudrait 2,1 milliards !
Les services d'aide et d'accompagnement à domicile (SAAD) sont tributaires des ARS et des conseils départementaux : beaucoup pourraient être contraints à fermer.
Si ce secteur n'est pas encouragé, il risque de ne pas survivre aux tensions actuelles. Une journée d'hospitalisation dans un service général coûte environ 1 200 euros par jour ; pour une personne maintenue à domicile c'est 550 euros par jour.
Comment le Gouvernement entend-il accompagner le secteur stratégique de l'accompagnement à domicile ?
M. Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué, chargé des transports . - Avant le Ségur, il fallait 17 ans d'expérience à ce personnel pour atteindre le Smic. Nous aurons de plus en plus besoin de ces métiers pour répondre à l'aspiration massive de nos concitoyens à vieillir à domicile.
La LFSS a permis d'accompagner la revalorisation historique de 15 %, entrée en vigueur il y a quelques jours. Le coût pour les départements sera allégé de 50 % voire 70 %. Les structures privées commerciales doivent également être accompagnées.
Un tarif plancher sera notamment soumis au Parlement dans le prochain PLFSS, pour valoriser les aides, APA et prestation compensatoire du handicap (PCH), avec un tarif socle de 22 euros par heure.
Il permettra aux SSAD, quel que soit leur statut, de financer les augmentations salariales.
Mme Anne-Catherine Loisier. - Nous serons vigilants sur l'application par les départements.
Démarchage téléphonique et appels frauduleux
Mme Laure Darcos . - Le démarchage téléphonique non sollicité est un fléau, à tel point qu'on n'arrive plus à distinguer les démarcheurs, sans compter la fraude aux numéros surtaxés. Cela confine parfois au harcèlement. La réponse des pouvoirs publics est bien trop faible, l'inscription sur Bloctel inefficace.
La loi du 24 juillet 2020 contre le démarchage téléphonique tarde à produire ses effets, certains décrets n'ayant pas encore été pris.
Pouvez-vous me donner un échéancier de mise en oeuvre et un bilan de la lutte contre ce fléau ?
M. Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué, chargé des transports . - Le code de la consommation interdit le démarchage téléphonique auprès des 4 millions de personnes inscrites sur Bloctel. Le secteur de la rénovation énergétique est particulièrement ciblé.
Le décret qui encadre les horaires d'autorisation de démarchage et la fréquence des appels sera bientôt publié.
La Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) mène une action de contrôle résolue.
En 2020, 1 503 établissements ont été contrôlés, et 108 démarcheurs sanctionnés pour un montant de 4,3 millions d'euros d'amende, soit deux fois plus qu'en 2019.
La mise en oeuvre de Bloctel sera améliorée.
Comptez, madame la sénatrice, sur la mobilisation du Gouvernement.
Mme Laure Darcos. - Il y a encore tellement d'appels... Certains opérateurs importants continuent à démarcher en permanence. Désormais, je bloque systématiquement les numéros commençant par 09. Imaginez la situation pour les plus vulnérables...
Exonérations de taxe pour les agriculteurs en conversion biologique
M. Alain Cazabonne . - J'ai été alerté par le maire d'une commune de 497 habitants, inquiet du manque à gagner lié à l'exonération de taxe foncière pour les agriculteurs en conversion biologique. Bien que cette mesure aille dans le bon sens en encourageant nos agriculteurs à se convertir à l'agriculture biologique, les plus petites communes ne peuvent l'appliquer, compte tenu du manque à gagner.
Le Gouvernement envisage-t-il une compensation pour les communes mettant en place une telle exonération ?
M. Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué, chargé des transports . - L'exonération est un outil incitatif au développement du secteur bio. Elle est prévue à l'article 1395-G du code général des impôts (CGI). La compensation par l'État est exclue : les allègements d'impôts locaux doivent relever en premier lieu des collectivités territoriales, comme l'a souligné la commission des finances du Sénat à propos de l'article 52 de la loi qui prévoit l'exonération.
Lorsque les exonérations et abattements résultent d'une délibération des collectivités territoriales, elles ne sont pas compensées : c'est le principe que nous suivons.
Le Gouvernement incite de son côté à la conversion au bio via le crédit d'impôt prévu par l'article L. 244-quater du CGI, prolongé dans la loi de finances pour 2021.
M. Alain Cazabonne. - Souvent, en matière d'écologie, l'État prend des mesures qui entraînent des difficultés financières sur le terrain. Votre réponse s'apparente à cette formule de Coluche : « Dites-moi ce dont vous avez besoin et je vous dirai comment vous en passer »... (Sourires)
Financement de l'électrification rurale
M. Guillaume Chevrollier . - Le projet de réforme du fonds d'amortissement des charges d'électrification (FACE) nous inquiète.
Territoire d'énergie Mayenne, syndicat mixte fermé qui exerce la compétence d'autorité organisatrice de distribution d'électricité (AODE) craint une réduction du volume total des aides du FACE, alors que le niveau de péréquation prévu pour l'électrification rurale est fortement rationné.
La Mayenne, à dominante rurale, compte seulement 27 communes de plus de 2 000 habitants, avec une densité de population très faible.
Alors que 20 % du financement est laissé à la charge des collectivités maîtres d'ouvrage sur les travaux d'électrification rurale, il est garanti, par la péréquation financière, une égalité dans les coûts d'accès au réseau de distribution d'électricité entre les consommateurs ruraux et les consommateurs urbains.
Or la baisse de la participation de l'État est aggravée par l'instauration d'un lien entre le compte d'affectation spéciale CAS-FACE et le fonds de péréquation de l'électricité (FPE) qui vise à assurer la péréquation de l'électricité des ressources tarifaires au profit de certaines entreprises locales de distribution d'électricité (ELD).
Les élus sont inquiets. Le niveau de la péréquation financière en matière électrique va diminuer, alors qu'il est déjà demandé aux communes rurales un effort fiscal bien supérieur à celui des collectivités urbaines dans ce domaine.
Allez-vous revoir ce projet de réforme et garantir un service électrique de qualité, y compris dans les territoires les plus fragiles ?
M. Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué, chargé des transports . - L'État, avec le CAS-FACE, contribue à la transition énergétique des communes rurales. Le décret du 10 décembre 2020 prévoit un taux de subvention fixé par le ministre dans la limite de 80 % du coût du projet.
Les taux de subvention pour 2022 et les années suivantes pourraient évoluer, mais les études sont en cours et aucune décision n'a été prise.
L'administration veillera à prendre en compte les surcoûts liés à la ruralité. Le Gouvernement a entendu les inquiétudes des communes rurales et n'envisage plus de lien entre FPE et FACE. Le maintien d'aides de 360 millions d'euros par an montre du reste son attachement à une distribution électrique de qualité sur tout le territoire.
Qualité de l'eau
Mme Florence Blatrix Contat . - Un métabolite du S-métolachlore est aujourd'hui utilisé pour le désherbage de nombreuses cultures de printemps dont le maïs et le soja. À partir d'un seuil de 0,1 milligramme par litre dans l'eau, elle est déclarée impropre à la consommation.
Il y a des dépassements réguliers et les collectivités territoriales doivent s'adapter, avec des mesures curatives et préventives.
Qu'envisagez-vous pour restreindre, voire interdire, l'utilisation de ces produits dans les aires de captage ?
Envisagez-vous d'étendre les dérogations pour les collectivités territoriales où le dépassement est faible ?
M. Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué, chargé des transports . - L'eau distribuée dépasse la norme de potabilité dans de nombreux réseaux à cause de la métabolite. La priorité doit être de restaurer la qualité de l'eau à la source.
Plusieurs actions ont été initiées, comme l'encouragement au désherbage mécanique. Des voies de substitution sont explorées, pour des résultats avant la fin de l'année.
Les préfets doivent accompagner plus activement les collectivités territoriales, en mobilisant tous les outils disponibles.
Mme Florence Blatrix Contat. - Je vous remercie. Il faut laisser du temps aux acteurs et les accompagner financièrement.
Poids lourds dans le massif des Vosges
Mme Patricia Schillinger . - Depuis quarante ans, la commune de Bonhomme voit passer près de 500 poids lourds chaque jour ; l'exaspération des riverains est à son comble. Bruit des camions qui montent le col, vibrations, danger, stress : les conséquences sont désolantes pour l'économie locale et l'immobilier ; cette vallée magnifique est prise en otage par le transit routier. Les élus sont démunis. Cela ne peut plus durer.
Il faut maintenant des solutions adaptées et pérennes. Les longs courriers au ministre des Transports, les longs discours et les comités de pilotage n'ont rien donné.
Que va faire le Gouvernement pour que les habitants de la vallée retrouvent leur sérénité ?
M. Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué, chargé des transports . - L'État s'est saisi de ce problème depuis de longues années. Les restrictions de circulation mises en place pour les poids lourds lors de la fermeture du tunnel Maurice Lemaire n'ont pas été levées lors de sa réouverture. La déviation de Châtenois qui sera achevée en 2023 soulagera le volume de circulation sur la D 145 et la commune de Bonhomme. Rediriger le trafic vers la route des crêtes n'est pas adapté, car il faut veiller à ne pas entraver l'activité économique, dont le transport de grumes.
Des mesures concrètes, comme la baisse du péage du tunnel Maurice Lemaire, ont été trouvées par le passé.
Les échanges se poursuivent pour anticiper les futures modalités de franchissement des Vosges.
Mme Patricia Schillinger. - Le projet doit activer le comité de pilotage pour que, sur le terrain, les gens se sentent soutenus.
Offre ferroviaire à destination du Sud-Ouest
Mme Nathalie Delattre . - Avec le Covid, SNCF Voyageurs a perdu 97 % de son chiffre d'affaires sur le TGV au plus fort de la pandémie. À l'heure de la reprise, la densité des flux de mobilité de la SNCF est une question centrale, pour des raisons stratégiques et pour la transition énergétique.
Mais patatras, le train-train n'est pas au rendez-vous : trains bondés par le surbooking, usagers assis par terre, plages horaires réduites... J'en fais l'expérience tous les jours entre Bordeaux et Paris. Les changements de train avec place assise sont pour ainsi dire impossibles le jour même.
La qualité de service de cette ligne, remarquable avant la crise, s'est dégradée. Malgré la forte fréquentation de cette rentrée, il manque la bagatelle de cinq allers-retours quotidiens pour revenir au cadencement de 2019 - toutes les trente minutes. Comment expliquer à des milliers d'Aquitains que la suppression brutale et inexplicable de la liaison aérienne Bordeaux-Orly n'ait pas été suivie d'un report modal sur le train ? Que dire des propos sur le nombre de dessertes quotidiennes promis aux collectivités Elles ont mis la main au portefeuille pour financer cette ligne il y a quelques années, mais SNCF Voyageurs ne se sent plus liée par l'engagement pris par SNCF réseau ; l'État ne tient pas parole.
Cette situation n'est pas tenable. Monsieur le Ministre, comment comptez-vous inverser cette trajectoire et permettre aux usagers de retrouver un niveau de service, en rapport avec le prix souvent très élevé des billets ?
M. Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué, chargé des transports . - L'offre de transport a été fortement perturbée par la crise sanitaire. La SNCF l'a adaptée avec souplesse, toujours de façon temporaire. L'offre sur l'axe Atlantique-Sud-Ouest est calibrée pour répondre aux besoins : à la fin du dernier confinement, elle représentait 50 % d'offre de 2019, dès l'été 2021, c'était 95 % ; sur la liaison Paris-Bordeaux, le retour à 19 allers-retours quotidiens est prévu en 2022.
Concernant l'accès à la gare de Bordeaux, j'ai missionné la préfète de région, qui a déjà commencé à réunir les acteurs locaux et me rendra compte dans les tout prochains jours des pistes d'améliorations identifiées.
Raccordement électrique des parcs éoliens
M. Yves Bouloux . - Le raccordement électrique des parcs éoliens suppose souvent la traversée de plusieurs communes. Or dans l'évaluation environnementale des projets, l'étude sur l'impact du raccordement est bien souvent incomplète, alors que celui-ci n'est pas sans conséquences : outre les nuisances occasionnées par les travaux, il y a le coût pour la collectivité, sans compensation systématique.
L'inquiétude est forte. Les risques pour les personnes et les animaux doivent être évalués, les élus consultés. Comment peut-on prévoir d'enfouir des câbles de 20 000 volts sans étude préalable ? Dans la Vienne, plusieurs communes n'ont eu d'autre choix que de l'interdire.
Comptez-vous tenir davantage compte de l'avis des communes concernées ?
M. Jean-Baptiste Djebbari, ministre chargé des transports . - Le développement des énergies renouvelables, dont l'éolien, est nécessaire pour atteindre nos objectifs climatiques.
Le raccordement électrique des parcs est très encadré. Les éoliennes terrestres sont soumises depuis 2011 à la réglementation des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE) et à une procédure d'autorisation. Leur raccordement fait l'objet d'une consultation des maires et des services.
Les adaptations à venir du réseau de transport de l'électricité sont identifiées par le gestionnaire du réseau de transport d'électricité, RTE, dans le cadre des schémas régionaux de raccordement au réseau, qui sont soumis à évaluation environnementale et font l'objet d'une consultation du public.
Concernant l'éolien en mer, le raccordement est présenté en même temps que le projet lors de la procédure de participation du public, puis fait l'objet d'une autorisation environnementale avec enquête publique.
L'arrêté du 17 mai 2001 précise les contraintes techniques qui s'imposent aux gestionnaires de réseau pour tenir compte des risques sur la santé des personnes et des animaux.
Enfin, l'occupation du domaine public communal, notamment par des câbles, fait l'objet de redevances dont le taux est fixé dans la majorité des cas par le conseil municipal.
La séance est suspendue quelques instants.
Inégalités homme-femme dans l'ancien comté de Dabo
M. Jean Louis Masson . - Dans les communes de l'ancien comté de Dabo, une discrimination flagrante entre hommes et femmes résulte de règles coutumières, confirmées, pendant l'annexion de l'Alsace-Lorraine par l'Allemagne, successivement par la cour d'appel de Colmar et par la cour impériale de Leipzig.
Madame la ministre, je vous ai posé une première question le 19 novembre 2020 à ce sujet, elle est restée sans réponse ; je vous ai posé une question écrite le 5 août 2021, en vain ; cela m'amène à vous poser cette question orale publiée au journal officiel du 30 septembre 2021 - qu'il vous suffit de lire pour comprendre le problème. J'attends maintenant une réponse !
Mme Élisabeth Moreno, ministre déléguée, chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l'égalité des chances . - Ma collaboratrice a répondu à votre message du 26 août dès son retour de vacances le 2 septembre, mais vous ne lui avez pas répondu. Quant aux questions posées au ministre de l'agriculture, je ne pouvais y répondre.
Sur le fond, vous attirez mon attention sur le régime dit du « bois bourgeois » dans les communes de l'ancien comté de Dabo, héritage du droit féodal que le code forestier de 1827 fait perdurer jusqu'à nos jours. Ce régime consiste en la délivrance de tronçons d'arbres résineux par tirage au sort annuel au bénéfice des usagers remplissant des conditions de délivrance datant de l'Ancien Régime, ces derniers ne pouvant être que des hommes - malheureusement, il y a d'autres cas de cet ordre...
Il est effectivement très étonnant que persiste un dispositif qui exclut les personnes de sexe féminin non mariées, puisque seules les veuves peuvent conserver ce droit acquis par leurs maris dans une mesure réduite jusqu'à leur remariage. Ces dispositions portent clairement atteinte au principe de l'égalité des droits entre les femmes et les hommes - vous pouvez imaginer combien j'aurais été heureuse de répondre à votre question. Il apparaît nécessaire de faire évoluer les pratiques : à l'occasion d'une prochaine loi forestière, ces dispositions seront réinterrogées.
M. Jean Louis Masson. - C'est bien à vous que j'ai envoyé ma question écrite, et c'est vous qui avez décidé de la transférer au ministre de l'agriculture. J'ai tenté de contacter votre directrice de cabinet, Mme Martin, ancienne sous-préfète de Sarrebourg, sans succès. Quant à la personne que vous avez mentionnée, je n'ai eu aucun contact avec elle.
Sur le fond, il est stupéfiant que la ministre de l'égalité entre des femmes et les hommes ne fasse rien pour supprimer cette discrimination flagrante, puisque les femmes ne peuvent hériter de ce droit d'affouage ! Renvoyer à une loi ultérieure n'est pas suffisant. Vous n'avez pris aucun engagement !
M. le Président. - Veuillez conclure !
M. Jean Louis Masson. - La France, qui donne des leçons à l'étranger, devrait commencer par balayer devant sa porte !
Stratégies « De la ferme à la table » et « Biodiversité »
Mme Pascale Gruny . - Le Green Deal ou pacte vert suscite de vives inquiétudes chez nos agriculteurs : en renonçant à l'horizon 2030 à 10 % de la surface agricole utile européenne tout en diminuant de 50 % les pesticides, la nouvelle politique agricole commune (PAC) pénalisera immanquablement l'agriculture traditionnelle, entraînera des coûts plus élevés que seuls les consommateurs aisés des grands centres urbains accepteront de payer - les autres devant acheter des produits importés. Elle provoquera une baisse sans précédent de la production : de moins 5 % à moins 15 % selon l'étude d'impact publiée discrètement en plein coeur de l'été par la Commission après plus d'un an de tergiversations.
Le Green Deal annonce donc la fin de la souveraineté alimentaire de notre continent. Comment la France entend-elle empêcher ce désastre et sauver notre modèle agricole traditionnel ?
Mme Élisabeth Moreno, ministre déléguée, chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l'égalité des chances . - Le pacte vert et ses deux stratégies, « De la ferme à la fourchette » et « Biodiversité », comportent un programme de travail pour la Commission avec des objectifs chiffrés à l'horizon 2030. Vous les avez cités. L'étude d'impact - dont je regrette la publication tardive - montre que sans action forte dans le domaine de la politique commerciale, nous risquons une décroissance verte qui n'est dans l'intérêt de personne.
À l'avenir, la Commission devra accompagner chacune de ses propositions d'une étude d'impact : cela est requis par les procédures européennes ; vous pouvez donc être rassurée sur ce point. Si la PAC doit contribuer aux objectifs du pacte vert, Julien Denormandie s'est battu pour que ce soit de manière adaptée et dans le respect des objectifs propres fixés par le traité à cette politique : souveraineté alimentaire et garantie d'un revenu décent aux agriculteurs.
Mme Pascale Gruny. - Merci pour votre réponse, même si je regrette que le ministre ne soit pas là. La souveraineté alimentaire est indispensable à notre souveraineté économique Les produits bio seront plus chers et les agriculteurs n'auront pas de revenus suffisants. Aujourd'hui, des fermes arrêtent le bio parce que les subventions n'arrivent pas - c'est hallucinant ! N'oublions pas que les pesticides sont des médicaments et les nitrates des aliments : la plante peut avoir besoin parfois d'être soignée et nourrie. Préservons notre agriculture !
Contribution supplémentaire des communes forestières à l'ONF
M. Patrice Joly . - La forêt a un rôle central dans la construction de l'identité de notre pays, dans le passé, aujourd'hui et dans l'avenir. C'est un patrimoine naturel aux enjeux économiques, culturels et de loisirs. Sur le plan environnemental, c'est le plus riche des réservoirs de biodiversité, qui assure chaque année l'absorption de 15 % des émissions françaises de carbone.
Aujourd'hui, la filière bois est en crise : changement climatique, invasions de parasites, ou obsession de rentabilité rapide aboutissant à des exportations massives de grumes vers l'Asie et les États-Unis.
Le vicomte de Martignac le disait déjà dans l'exposé des motifs du projet de code forestier de 1826 : « La conservation des forêts est l'un des premiers intérêts des sociétés et, par conséquent, l'un des premiers devoirs des gouvernants. »
Le Gouvernement envisagerait une nouvelle contribution des communes forestières au financement de l'Office national des forêts (ONF), ce qui n'est pas acceptable. Par ailleurs, démanteler le service public forestier en se dépouillant de ses agents et de ses moyens est dangereux : la forêt exige une gestion planifiée et adaptée à la spécificité de chaque milieu. Je vous demande donc de revenir sur ce projet d'augmentation des contributions des communes tout en maintenant les moyens de l'ONF.
Mme Élisabeth Moreno, ministre déléguée, chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l'égalité des chances . - Le Gouvernement est attaché à la pérennité de l'Office national des forêts et entend conserver l'unité de gestion des forêts publiques domaniales et communales. L'État a besoin d'une ONF forte au regard des défis du changement climatique et du potentiel de la forêt pour la production de matériau et l'atténuation du changement climatique.
La gestion durable et multifonctionnelle est au coeur du nouveau contrat entre l'État et l'ONF pour la période 2021-2025. Pour autant, son déséquilibre financier appelle des réponses conjoncturelles mais aussi structurelles. L'État maintient le statut d'établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC) - il n'existe aucun projet de privatisation - mais réaffirme la notion de prise en charge à coût complet de ses missions, quel qu'en soit le commanditaire. L'État revalorise ces missions à hauteur de plus de 12 millions d'euros dès cette année et de 22 millions d'euros en 2024, soit 55 millions d'euros par an.
En complément, le Gouvernement mobilise 60 millions d'euros complémentaires sur trois ans, à raison de 30 millions d'euros en 2021, 20 millions d'euros en 2022 et 10 millions d'euros en 2023 pour soutenir son établissement, en complément des 140 millions d'euros de versement compensateur annuel.
Enfin, le plan de relance prévoit une dotation de 30 millions d'euros à l'ONF pour financer la reconstitution des forêts domaniales atteintes par les crises sanitaires. En contrepartie, l'ONF consent un effort de réduction de ses charges afin d'atteindre l'équilibre financier de l'établissement en 2025.
Financement de la lutte contre la « xylella fastidiosa »
Mme Gisèle Jourda . - Les collectivités territoriales doivent être aidées à lutter efficacement contre la bactérie xylella fastidiosa.
Cette bactérie, présente dans le département de l'Aude, est phytopathogène, transmise et véhiculée par des insectes vecteurs. Conformément aux prescriptions des services de la Direction générale de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt (Draaf) qui ont été pleinement associés, des actions ont déjà été menées par les services de l'agglomération et des communes durant le mois d'avril 2021 sur les périmètres concernés.
Les collectivités audoises sont pleinement mobilisées, mais aucun fonds n'est prévu pour les aides. En effet le programme d'indemnisation du fonds de mutualisation du risque sanitaire environnemental n'est pas ouvert aux collectivités territoriales.
La situation est grave pour ces collectivités : comment comptez-vous les aider ?
Mme Élisabeth Moreno, ministre déléguée, chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l'égalité des chances . - Dans l'Aude, cette bactérie touche douze communes. Des végétaux contaminés et sensibles doivent être éliminés.
L'État indemnise les professionnels concernés et ses services font tout leur possible pour éradiquer rapidement les végétaux qui doivent l'être et sensibiliser les particuliers.
En Occitanie, les foyers nombreux nécessitent parfois des travaux de grande ampleur. Nous explorons de nouvelles pistes pour accompagner les collectivités concernées.
Mme Gisèle Jourda. - Je serai vigilante : les collectivités territoriales n'ont pas accès à ces fonds, or elles ont besoin d'investir !
Autorisations spéciales d'absence
M. Laurent Burgoa . - Les autorisations spéciales d'absence (ASA) ont permis de protéger les agents les plus vulnérables. Mais quid désormais de ceux qui ne peuvent exercer leurs missions en télétravail ? Les dispositions en vigueur prévoient encore de nombreuses exceptions et il semblerait que l'ASA ait vocation à perdurer.
Or faute de personnel, certaines communes doivent désormais sous-traiter leurs travaux tout en continuant à payer leurs agents, sans compensation de l'État.
La vaccination permet-elle de réduire la vulnérabilité de ceux qui bénéficient de l'ASA ? Qu'en est-il si l'agent refuse la vaccination ? Comment vérifier son statut vaccinal ? Quel est le sort des congés non pris : sont-ils perdus ou reportés ? Et quels financements pour les communes ? Un agent, en attente de greffe, s'est ainsi trouvé longtemps en ASA, et non en arrêt maladie ; l'assurance de la collectivité n'a pas fonctionné. Ces questions intéressent les directeurs généraux des services.
Mme Élisabeth Moreno, ministre déléguée, chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l'égalité des chances . - L'amélioration de la situation sanitaire a permis de faire évoluer le dispositif. Il convient désormais de distinguer selon que l'agent vulnérable est sévèrement immunodéprimé ou non.
Dans le premier cas, l'employeur est tenu de le placer en ASA si le télétravail n'est pas possible.
Dans le second cas, il sera placé en ASA si son poste est exposé à une forte densité virale - sans possibilité de télétravail - ou s'il présente une contre-indication à la vaccination.
Dans tous les cas, un certificat médical est requis. Si l'employeur estime l'ASA infondée, il peut saisir le médecin du travail. En revanche, il ne peut pas contrôler le statut vaccinal des agents non soumis à obligation vaccinale.
Les congés non pris peuvent être reportés ou alimenter le compte épargne-temps.
M. Laurent Burgoa. - Je regrette une réaction si tardive : les maires ont encore dû faire face seuls à des situations très tendues.
Avenir du site Renault de Choisy-le-Roi
M. Laurent Lafon . - L'entreprise Renault a confirmé la fermeture de son usine de reconditionnement de pièces détachées de Choisy-le-Roi, pour transférer cette activité à Flins. Le Val-de-Marne perd un site vieux de 70 ans. En lien avec l'Ademe, les collectivités envisagent un grand projet d'économie circulaire. Une étude a été commandée, dont les résultats seront présentés au début de l'an prochain. Mais Renault, toujours propriétaire, reste silencieux sur le devenir du foncier. Comment l'État, actionnaire de Renault, va-t-il accompagner la reconversion du site, sur un territoire labellisé « territoire industriel du futur » ? Comment Renault accompagnera-t-il la dimension foncière de ce projet ?
Mme Élisabeth Moreno, ministre déléguée, chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l'égalité des chances . - Le 25 novembre 2020, Renault a annoncé le déplacement de ses activités de Choisy-le-Roi vers Flins, dans le cadre de son plan de réduction des coûts.
L'État est particulièrement attentif à ce projet et notamment à l'avenir des salariés. Un accord entre Renault et les syndicats, signé le 25 mai 2020, encadre le reclassement des intéressés, la majorité d'entre eux souhaitant être transférés à Flins.
Renault s'est engagé à travailler avec les élus locaux pour la reprise du site de Choisy-le-Roi. Le transfert commencera en décembre et s'achèvera au premier semestre 2022.
M. Laurent Lafon. - L'implication active de l'État et de Renault est nécessaire pour mener à bien ce projet de reconversion.
Garantie jeunes pour les majeurs issus de l'ASE
M. Rémi Cardon . - « Plus aucun jeune de l'aide sociale à l'enfance atteignant sa majorité ne se retrouvera sans solution », disait votre collègue en juillet, au moment de présenter l'automatisation de la garantie jeunes pour les jeunes qui sortent de l'aide sociale à l'enfance (ASE).
Au 31 décembre 2019, 312 000 mineurs relevaient de l'ASE et 1 million de jeunes n'étaient ni en formation ni en emploi - les fameux NEET, not in employment, education or training ; or moins de 100 000 jeunes ont bénéficié de la garantie jeunes en 2020, pour un objectif de 200 000 en 2021.
L'heure est pourtant grave : 1 million de Français ont basculé dans la pauvreté lors de la crise sanitaire et plus d'un jeune sur cinq est au chômage.
D'après les retours de terrain sur le dispositif « un jeune, une solution », de nombreux jeunes, devenant majeurs, sortent de l'ASE sans accompagnement. Je le vois à Amiens.
Vous aviez pourtant une solution universelle, simple et finançable à votre disposition. Le revenu d'engagement est-il un acte manqué ?
Mme Élisabeth Moreno, ministre déléguée, chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l'égalité des chances . - L'accompagnement des jeunes majeurs de l'ASE est une de nos priorités.
Notre stratégie nationale de prévention et de protection de l'enfance a conduit au déploiement de nombreuses mesures, parmi lesquelles l'autonomisation des bourses de l'enseignement supérieur à l'échelon le plus élevé et l'accès prioritaire au logement étudiant.
La signature d'un accord-cadre en faveur d'un accompagnement personnalisé dès l'âge de 17 ans marque la mobilisation de tous les acteurs de l'insertion sociale et professionnelle.
Depuis janvier 2021, la garantie jeunes automatisée accompagne les jeunes à hauteur de 500 euros par mois, sur la base d'un contrat d'engagement cosigné avec la mission locale.
Chaque jeune sortant de l'ASE doit bénéficier d'une solution pérenne et adaptée : c'est le sens de l'amendement adopté à l'Assemblée nationale sur le projet de loi de protection des enfants, qui sera promulgué dans quelques semaines.
M. Rémi Cardon. - Allez dire cela aux jeunes dans la rue ! Que de temps perdu !
Urgences de l'Hôpital Bicêtre
Mme Laurence Cohen . - Avec 60 000 entrées annuelles, le service des urgences du CHU Bicêtre est l'un des plus gros d'Île-de-France. Depuis la démission du chef de service, le docteur Maurice Raphaël, en septembre 2020, onze urgentistes et tous les cadres de santé ont quitté le service, tant les conditions de travail y sont déplorables.
Aujourd'hui, les internes assument des responsabilités qui ne sont pas les leurs. Le rapport de l'ARS n'est pas public et je n'ai pu y accéder. Le service d'accueil et de traitement des urgences (SAU) a perdu son agrément et n'aura plus d'internes en 2022 : il est en danger.
Que comptez-vous faire face à cette situation catastrophique ?
Mme Élisabeth Moreno, ministre déléguée, chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l'égalité des chances . - Une restructuration du CHU, accompagnée par l'ARS, est en cours. Dès novembre 2019, le premier contrat « zéro brancard » a été signé avec l'AP-HP. La feuille de route a été validée, une aide de 500 000 euros a été débloquée et 22 lits de gériatrie aiguë ont été ouverts. Le nouveau chef de service a procédé à des recrutements, ainsi qu'à des changements d'organisation et d'encadrement répondant aux besoins. Un comité de suivi mensuel de l'ARS a été mis en place et un premier point de situation réalisé. Notre soutien est donc très fort.
Pénurie de médecins et classement en zone de vigilance
M. Bernard Bonne . - Dans la Loire, la commune de Saint-Martin-la-Plaine a appris le prochain départ à la retraite de l'un de ses trois médecins généralistes. Les deux autres sont débordés et ne peuvent plus prendre de nouveaux patients.
La commune voudrait participer financièrement à l'installation d'un nouveau médecin ; or le maire a découvert que le classement de sa commune en zone de vigilance par l'ARS ne lui permet pas d'attribuer d'aide au maintien de professionnels de santé : seules les communes classées en zone d'intervention prioritaire y sont autorisées.
Ce classement ne devrait-il pas être revu ? Quelles solutions pour ces élus confrontés à la désertification médicale ?
Mme Élisabeth Moreno, ministre déléguée, chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l'égalité des chances . - Un nouveau zonage devrait être publié d'ici la fin de l'année. Mais l'ARS travaille déjà à restructurer les soins de premier secours, en accompagnant notamment les projets de maisons de santé, y compris dans les zones de vigilance, comme à Saint-Martin-la-Plaine. Une maison de santé y a d'ailleurs été ouverte en juillet 2018.
De plus, l'ARS encourage la maîtrise de stage pour faire découvrir le département aux futurs médecins. C'est ainsi que trois quarts des maîtres de stage ont trouvé un remplaçant, régulier ou occasionnel.
Enfin, l'ARS poursuit la structuration de l'offre sur le territoire : deux communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) ont vu le jour dans la Loire en 2020. Les primo-installations de médecins généralistes dans les zones sous-dotées seront financièrement accompagnées.
M. Bernard Bonne. - L'ARS doit modifier ses critères, car toutes les zones non urbaines vont devenir sensibles. Sans médecin, à quoi sert une maison de santé ? La commune doit pouvoir accompagner financièrement l'installation d'un médecin.
Chirurgie hyper-ambulatoire
Mme Catherine Deroche . - Des chirurgiens orthopédistes ont attiré mon attention sur la prise en charge « hyper-ambulatoire » permise par les nouvelles techniques d'anesthésie.
L'hyper-ambulatoire améliore la qualité des soins et diminue les risques de contagion en réduisant les contacts humains durant le parcours ; cela réduit les coûts des établissements et permet d'optimiser les blocs opératoires.
Alors que la gestion rationalisée de l'hôpital est à l'ordre du jour, quelles sont les intentions du Gouvernement ?
Mme Élisabeth Moreno, ministre déléguée, chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l'égalité des chances . - La pratique ambulatoire est variée : le service de chirurgie ambulatoire d'un établissement de santé qui propose par ailleurs une hospitalisation complète est le modèle le plus répandu. Il existe également des services de chirurgie ambulatoire dans des établissements sans hospitalisation complète. Enfin, le modèle de cabinets de chirurgie ambulatoire reste rare en France, alors qu'il est très répandu aux États-Unis par exemple.
L'évolution des techniques permet en effet des prises en charge hors bloc. C'est à la communauté scientifique de déterminer si l'acte peut se pratique en hyper-ambulatoire. À ce jour, le vecteur idéal pour adapter la réglementation est l'expérimentation article 51.
Mme Catherine Deroche. - C'est là que le bât blesse : les chirurgiens n'obtiennent pas les autorisations article 51, alors que ce serait très bénéfique pour le patient.
Report du recensement et DGF des collectivités
M. Pierre-Antoine Levi . - En raison de la crise sanitaire, l'Insee a reporté le recensement de la population des communes, initialement prévu en 2021, à 2022. Or certaines communes dynamiques ont connu une forte hausse de leur population depuis le dernier recensement, tout particulièrement dans le sud du département du Tarn-et-Garonne, à proximité de Toulouse.
À Pompignan, la population est passée de 1 484 au 1er janvier 2017 à quelque 2 000 habitants, sans augmentation de la dotation globale de fonctionnement (DGF). La commune a même été épinglée pour mauvaise gestion alors qu'elle a investi pour accueillir cette population plus nombreuse.
Quelles mesures compensatoires allez-vous prendre pour pallier le report de ce recensement ?
Mme Nadia Hai, ministre déléguée, chargée de la ville . - La population est le principal critère de répartition des concours financiers de l'État aux collectivités ; elle est évaluée sur la base du recensement de l'Insee, selon des procédures prévues par la loi de 2002 relative à la démocratie de proximité. Ces chiffres sont authentifiés chaque année par décret. C'est la seule évaluation fiable, qui permet d'assurer l'égalité de traitement entre collectivités.
La crise sanitaire a entraîné le report du recensement de 2021 à 2022, à l'exception de Mayotte.
Cependant, l'Insee actualisera les populations globales des communes à la fin de l'année 2021. Ces données permettront le calcul des dotations pour 2022.
M. Pierre-Antoine Levi. - Ces explications, qui m'ont déjà été données, ne satisfont pas les maires des communes concernées, qui subissent des pertes financières lourdes. Les chiffres de l'Insee doivent être revus pour correspondre aux réalités.
Fermetures administratives des régies publiques
M. Jean-Michel Arnaud . - La fermeture administrative des remontées mécaniques a mis les communes de montagne à l'arrêt. Le plan « Avenir montagne » leur a apporté un soutien bienvenu, mais il faut penser à la saison prochaine, qui ne saurait être enrayée par des mesures sanitaires trop restrictives. Je crains également un manque de main d'oeuvre saisonnière.
Quelles mesures sanitaires envisagez-vous d'appliquer ? Le passe sanitaire sera-t-il obligatoire ?
Mme Nadia Hai, ministre déléguée, chargée de la ville . - La gestion en régie permet aux élus locaux d'assurer des services complets et accessibles à bas coût.
Les collectivités, notamment celles qui assument des équipements structurants - piscines, thermes, campings - ont subi des pertes significatives : moins 17 %, contre moins 1,8 % seulement pour la moyenne des recettes communales. Une enveloppe de 203 millions d'euros a ainsi été débloquée et les paiements seront effectués dans la foulée du décret qui sera pris le 19 octobre.
Les régies et sociétés d'économie mixte de remontées mécaniques ont été soutenues comme les entreprises privées. Quant aux services de transport en régie, ils ont reçu 583 millions d'euros d'avances remboursables.
Toutefois, une réflexion sur le devenir de ces régies devra être menée.
M. Jean-Michel Arnaud. - J'avais modifié ma question, eu égard aux assurances reçues sur les régies. Je regrette que vous ne m'ayez pas répondu sur la saison à venir. Le vrai risque n'est pas la fermeture des stations, mais le manque de saisonniers pour les faire fonctionner.
Fontenoy du maritime
M. Dominique Théophile . - Voilà un an commençait le Fontenoy du maritime, destiné à positionner la France parmi les dix premières puissances maritimes mondiales d'ici la fin de la décennie.
À l'issue des Assises de la mer, qui se sont tenues à Nice en septembre dernier, des mesures ont été annoncées sur le verdissement de la flotte, l'amélioration des carrières de marins et l'aide à l'emploi maritime.
Alors que 97 % de notre zone économique exclusive se situe dans les outre-mer, ces annonces étaient très attendues dans nos territoires.
Quel est le calendrier de leur mise en oeuvre ? Quelles seront les retombées en matière d'emplois, de financement et de formation ?
Mme Nadia Hai, ministre déléguée, chargée de la ville . - Une spécialité maritime sera créée au sein du service public de l'emploi, avec 38 implantations territoriales au service des marins, notamment en Guadeloupe, en Martinique et à La Réunion. Trois cents à quatre cents officiers supplémentaires seront formés d'ici 2027 ; le budget de l'École nationale supérieure maritime (ENSM) sera augmenté de 8 millions d'euros et les promotions intégreront une cinquantaine de marins supplémentaires.
La simplification des critères d'éligibilité au suramortissement vert marque un engagement dans la décarbonation du transport maritime.
L'aide à l'emploi maritime est bien entendu ouverte aux compagnies opérant des dessertes ultramarines, comme l'Express des îles au départ de Pointe-à-Pitre.
Enfin, dans le cadre du Plan de relance, 175 millions d'euros seront consacrés au verdissement des grands ports maritimes et ports autonomes, dont 21,3 millions d'euros pour l'outre-mer.
Conservation et valorisation des dolmens
M. Philippe Bonnecarrère . - Le « Dolmen de Saint-Paul », sur la commune de Sainte-Cécile-du-Cayrou dans le Tarn, a été classé monument historique en 1889, mais on ne sait s'il relève de la législation relative aux monuments historiques ou à l'archéologie. Les services concernés se renvoient la réponse.
Quelles doivent être les modalités d'accès ? Un accès - a minima visuel - doit-il être aménagé par le propriétaire privé ?
Mme Nadia Hai, ministre déléguée, chargée de la ville . - Les mégalithes sont, avec les grottes ornées, nos plus anciens monuments historiques.
Le code du patrimoine fixe le régime applicable : le propriétaire privé doit assurer la conservation du dolmen, en sollicitant le cas échéant l'aide financière de la direction régionale des affaires culturelles (DRAC). Les services régionaux de l'archéologie peuvent prescrire une opération archéologique préalable au projet de restauration.
En revanche, rien n'oblige le propriétaire à faciliter l'accès du public au monument. Des échanges sont en cours entre la DRAC, les collectivités territoriales et le propriétaire pour mettre en valeur ce dolmen dans le cadre d'un parcours de randonnée.
M. Philippe Bonnecarrère. - Si je comprends qu'on ne puisse imposer un accès physique, on peut regretter qu'il n'y ait pas au moins une obligation d'accès visuel. Peut-être la réglementation pourra-t-elle évoluer sur ce point ?
La séance est suspendue à 12 h 45.
présidence de M. Roger Karoutchi, vice-président
La séance reprend à 14 h 45.