SÉANCE

du mardi 28 septembre 2021

5e séance de la 3e session extraordinaire 2020-2021

présidence de Mme Pascale Gruny, vice-président

Secrétaires : Mme Françoise Férat, M. Joël Guerriau.

La séance est ouverte à 9 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Questions orales

Mme le président.  - L'ordre du jour appelle 35 questions orales.

Suppression de la JDC pour les Français établis hors de France

Mme Hélène Conway-Mouret .  - La journée de la défense et de la citoyenneté (JDC) a été supprimée pour les jeunes Français établis hors de France dans le contexte de la pandémie, ce que je déplore.

À leur dix-huitième anniversaire, les jeunes Français sont convoqués à la JDC pour s'informer de leurs droits et devoirs de citoyens, ainsi que du fonctionnement de nos institutions. En raison de la pandémie, cette journée est actuellement organisée en ligne pour les jeunes résidant en France.

Alors que le certificat de participation à la JDC est requis pour s'inscrire aux examens et concours, mais aussi pour passer le permis de conduire, les jeunes Français établis à l'étranger se retrouvent dans une situation absurde : faute de pouvoir suivre cette journée dans leur pays de résidence, ils doivent s'acquitter à leurs frais de cette obligation en France, alors que des frontières restent fermées.

Une attestation provisoire est prévue, permettant notamment de s'inscrire aux concours, mais il faut prendre des mesures pour adapter les modalités de la JDC. Comment va-t-elle être organisée, notamment dans les pays où la situation sanitaire est fortement dégradée ?

M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État, chargé du tourisme, des Français de l'étranger et de la francophonie .  - Comme ancien rapporteur pour avis de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation », je suis particulièrement sensible à cette question. La JDC fait partie des remèdes contre le délitement, souvent déploré, de la cohésion nationale ; il faut absolument la préserver. Elle est aussi créatrice de droits pour nos jeunes, leur permettant notamment de passer des examens.

Nous travaillons activement à la mise en place d'une solution en ligne pour les Français établis hors de France. Le dispositif sera fonctionnel d'ici quelques semaines.

Parallèlement, il me paraît indispensable qu'une version présentielle de cette journée continue d'être proposée là où vivent d'importantes communautés françaises - je pense en particulier à Londres, Genève ou Bruxelles. Comptez sur moi pour insister sur ce point auprès de nos postes.

Plus largement, nos jeunes compatriotes résidant à l'étranger doivent avoir accès aussi à d'autres dispositifs d'engagement, à l'instar des séjours de cohésion. Tous les jeunes Français doivent bénéficier des mêmes droits !

Mme Hélène Conway-Mouret.  - La mise en place prochaine de la JDC en ligne pour les Français de l'étranger est une bonne nouvelle. Il faut répondre aux inquiétudes des familles, dont le lien avec la France est très fort, en particulier sur l'accès des jeunes aux concours.

Conséquences des fermetures de classes ou d'écoles pour les communes

M. Jean Hingray .  - Jules Ferry a construit un édifice « qui n'a rien à craindre de l'avenir, tant que la démocratie française restera consciente et soucieuse de ses devoirs », lisait-on en 1896 dans la Revue pédagogique. Madame la secrétaire d'État, êtes-vous consciente et soucieuse de ce qui se passe dans nos villages ?

Des classes ferment sans consultation des maires, suscitant l'émoi des familles et des élus. Voilà un an, pourtant, le Gouvernement avait annoncé qu'il n'y aurait aucune fermeture de classe sans accord du maire.

Les hussards de la République ne ménagent pas leur peine pour maintenir un enseignement de qualité et promouvoir l'égalité des chances. Les suppressions de classe ou d'école portent préjudice à ces objectifs et posent de nombreuses difficultés juridiques, organisationnelles et budgétaires. Qu'advient-il des bâtiments qui perdent leur destination ou des contractuels, comme les agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles (Atsem), avec lesquels les collectivités territoriales sont engagées ?

Envisagez-vous un moratoire sur les fermetures ? À défaut, quelles mesures d'accompagnement allez-vous proposer aux maires pour compenser les conséquences de vos décisions unilatérales ?

Mme Nathalie Elimas, secrétaire d'État, chargée de l'éducation prioritaire .  - Le Gouvernement a fait de l'école élémentaire sa priorité, pour consolider les apprentissages fondamentaux. Malgré la forte baisse des effectifs, nous n'avons jamais cessé d'augmenter les moyens du premier degré : depuis 2017, 9 000 postes en plus pour 300 000 élèves en moins.

Dans les Vosges, on compte 20,5 élèves par classe, contre 22,2 en moyenne nationale ; c'est donc une situation favorable. Cette année, malgré une baisse des effectifs de plus de 500 élèves, aucun poste n'a été supprimé, en sorte que ce taux d'encadrement progressera encore.

Depuis 2019, aucune école n'a été fermée sans accord du maire, conformément à l'engagement du Président de la République. En outre, nous avons décidé, exceptionnellement, qu'aucune classe ne fermerait en 2020, compte tenu du contexte sanitaire.

Nous échangeons avec les élus locaux et apprécions chaque situation. La carte scolaire se fait en concertation avec les maires, dans un esprit de dialogue constructif.

M. Jean Hingray.  - Vous égrenez des chiffres, mais les réalités du terrain sont autres. Je vous invite, ainsi que M. Blanquer, à venir dans les Vosges pour vous en rendre compte concrètement.

Usine marémotrice de la Rance et tarification verte

Mme Sylvie Robert .  - Voilà quelques années, j'ai posé une première question orale sur le désenvasement de la Rance. Depuis, la situation s'est encore aggravée, affectant tant l'attractivité touristique des communes que la biodiversité. Il est urgent d'agir !

Depuis 2019, la Commission européenne est favorable à la revalorisation au tarif « énergie renouvelable » de l'énergie produite par l'usine marémotrice de la Rance (UMR).

Toutefois, le ministère de l'environnement considère que la création d'une fiscalité écologique spécifique sur cette production n'est pas la meilleure option à court terme et renvoie au plan de gestion des sédiments. Pourtant, l'article L. 211-2 du code de l'énergie reconnaît clairement l'énergie marémotrice comme renouvelable...

Le concessionnaire, EDF, veut faire perdurer l'équipement, mais le projet de réorganisation dit Hercule, actuellement suspendu, pourrait affecter le passage en tarification verte de l'énergie produite. L'UMR pourrait être classée parmi les barrages hydroélectriques plutôt que les énergies renouvelables, ce qui compliquerait les investissements à réaliser pour désenvaser la Rance.

Quelle est la position du Gouvernement sur ce dossier ? Allez-vous soutenir le passage de l'énergie produite par l'UMR en tarification verte, en cohérence avec le code de l'énergie ?

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État, chargée de la biodiversité .  - Un programme de recherche est mené avec EDF pour comprendre le phénomène de sédimentation et identifier des solutions ainsi que des actions préventives. Les conclusions en seront connues en 2023.

L'usine de la Rance produit une énergie pleinement renouvelable. Mais la concession confiée à EDF depuis 1966 n'arrivera à échéance qu'en 2043 ; d'ici là, le droit des concessions ne permet pas de modifier substantiellement l'équilibre économique du contrat. Je rappelle que la France fait déjà l'objet de deux mises en demeure par la Commission européenne.

Cette question est tout à fait indépendante d'une éventuelle réorganisation du groupe EDF.

Il faut poursuivre les travaux en cours pour trouver une solution pérenne.

Mme Sylvie Robert.  - La classification en énergie verte lèverait un frein important. Les maires, la Région Bretagne, tous les acteurs sont mobilisés. Cet engagement mérite que le Gouvernement s'y intéresse.

Moyens de l'OFB dans les Alpes-Maritimes

Mme Dominique Estrosi Sassone .  - Alors que les services de l'Office français de la biodiversité (OFB) dans les Alpes-Maritimes devraient compter dix-sept inspecteurs de l'environnement, seuls huit fonctionnaires à temps plein et un à mi-temps y travaillent. Ce demi-effectif affecte les missions de police de l'environnement et de surveillance de la biodiversité dans un espace couvrant les milieux aquatique, terrestre et maritime.

Les inspecteurs doivent se rendre auprès des éleveurs après une attaque de loup pour établir le constat de dommages, mission précédemment confiée à des ouvriers forestiers formés par les inspecteurs de l'environnement de l'ancien Office national de la chasse et de la faune sauvage.

Les agents de l'OFB ne sont pas assez nombreux pour réaliser l'ensemble des constats, alors que la prédation est intense dans le département. Les allers-retours vers les zones d'estive ou de pâturage représentent parfois plusieurs heures de marche.

Sur les 30 milliards d'euros du plan de relance dédiés à l'environnement, combien iront à l'OFB dans les Alpes-Maritimes ? Entendez-vous instaurer le téléconstat attendu par les éleveurs, mais aussi par les inspecteurs obligés de se déplacer dans des zones reculées ?

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État, chargée de la biodiversité .  - Nous sommes attachés au renforcement des moyens de l'OFB. En interne, un travail a été mené sur les fonctions support pour préserver la présence sur le terrain.

Même si les attaques de loup ont diminué dans les Alpes-Maritimes en 2020 (Mme Dominique Estrosi Sassone le conteste), il faut offrir aux éleveurs la plus grande réactivité possible, tout en allégeant la charge des inspecteurs.

Un constat déclaratif est à l'étude, et nous examinons avec le préfet coordonnateur du plan loup les modalités d'un constat à distance, qui restent à fiabiliser.

Des agents ont été recrutés pour faciliter les constats auprès des inspecteurs. Plus généralement, aucun opérateur lié à la biodiversité ne verra son schéma d'emplois baisser en 2022.

Mme Dominique Estrosi Sassone.  - Hélas, vous n'augmentez pas les effectifs, déjà insuffisants, dans les Alpes-Maritimes. Il est urgent de passer au constat déclaratif. La défense du pastoralisme passe par des moyens supplémentaires, et l'État doit répondre présent.

Retards de traitement des dossiers « MaPrimeRénov' »

M. Gilbert Roger .  - Je m'inquiète des nombreux retards dans le traitement des dossiers « MaPrimeRénov' ». Des ménages, parfois très modestes, ayant obtenu l'accord de l'Agence nationale de l'habitat (ANAH) pour le financement d'une nouvelle chaudière ou de travaux d'isolation, ne voient les fonds arriver que six mois, voire un an, après le chantier.

Certains sont obligés de contracter un crédit pour faire face. D'autres sont contraints de retarder le paiement des travaux à l'entreprise. Ces difficultés affectent l'efficacité de la politique de rénovation énergétique.

Comment comptez-vous améliorer le traitement des dossiers et accélérer les paiements aux ménages ?

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État, chargée de la biodiversité .  - Saluons le succès sans appel de « Ma Prime Rénov' » : grâce à la mobilisation de l'ANAH, 500 000 dossiers ont été déposés depuis le 1er janvier, et nous visons les 800 000 pour la fin de l'année.

Le taux de réponse de l'ANAH atteint désormais 90 %. Déjà, 438 000 dossiers ont été traités.

Les retards, marginaux, ne concernent que 1 % des dossiers. Une task force a été mise sur pied pour traiter ces cas de manière spécifique et résoudre la plupart d'entre eux en quinze jours ouvrés.

M. Gilbert Roger.  - Oui, « Ma Prime Rénov' » est un excellent dispositif. Mais il est important que le traitement et le paiement soient rapides. Compte tenu de ce que je constate sur mon territoire, je doute fort que les retards ne concernent que 1 % des dossiers.

Évolution du boulevard périphérique parisien

Mme Catherine Dumas .  - Quelque 1,2 million de véhicules empruntent quotidiennement le boulevard périphérique parisien, central dans la mobilité et l'attractivité économique de toute la métropole. Une évolution de la gouvernance de cet axe majeur s'impose.

On connait les projets de la mairie de Paris pour créer un « boulevard urbain » : vitesse réduite à 50 kilomètres-heure, voie de gauche réservée à l'autopartage et aux transports en commun, installation de carrefours, de passages piétons et de pistes cyclables, voire de commerces. D'après une étude réalisée à l'automne dernier, les usagers du périphérique, qui sont loin d'être tous parisiens, y sont très majoritairement hostiles.

Compte tenu de l'importance de cette voie pour une population bien plus large que celle de Paris intra-muros, n'est-il pas opportun d'envisager une autorité partagée sur cette ceinture périphérique, la plus empruntée d'Europe ?

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État, chargée de la biodiversité .  - Le périphérique, connecté aux axes desservant la banlieue et la province, reçoit un trafic composite.

La responsabilité en revient à la mairie de Paris, mais l'État est consulté pour avis sur les mesures touchant à la circulation. Il peut émettre des prescriptions en vue de fluidifier le trafic, s'agissant notamment des véhicules de sécurité et de secours.

À ce jour, le préfet de police de Paris n'a été destinataire que d'un plan d'aménagement de 20 kilomètres pour la future voie olympique.

Je partage votre souci de la concertation. Le préfet de région a installé une conférence stratégique sur les mobilités routières, associant l'État et les collectivités territoriales. Il s'agit par exemple d'encourager le covoiturage et de développer les transports en commun. Dans ce cadre, la région peut émettre des souhaits.

Nous appelons de nos voeux des échanges sereins.

Mme Catherine Dumas.  - Il est nécessaire de faire évoluer la gouvernance du boulevard périphérique. Je suis à la disposition de M. Djebbari pour en parler.

Prévention des inondations en zone rurale

Mme Cathy Apourceau-Poly .  - Depuis quelques années, les effets du dérèglement climatique s'accentuent. Les zones rurales sont particulièrement touchées, mais souvent ignorées.

Le Pas-de-Calais n'est pas épargné, qui voit se succéder inondations et sécheresses, en particulier dans la vallée de la Conche. L'artificialisation des sols est souvent en cause. Plus largement, dans la ruralité, le pilotage fait défaut et les moyens manquent.

Dans certains territoires, une majorité d'agriculteurs ne sont pas propriétaires de leurs terres. Quant aux maires, ils n'ont pas toujours le pouvoir d'entreprendre les travaux nécessaires.

Les acteurs travaillent isolément, les techniciens sont compétents mais mal coordonnés, les élus volontaires mais dépourvus de moyens.

Pour une prévention efficace, il faut un chef d'orchestre. Le maire est le plus à même de jouer ce rôle, mais les communes ont été dépossédées de la compétence urbanisme au profit des EPCI.

Quels moyens comptez-vous donner aux élus locaux pour agir ?

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État, chargée de la biodiversité .  - Les collectivités territoriales disposent de plusieurs leviers pour agir en prévention des inondations, avec le soutien de l'État.

D'abord, il y a les programmes d'actions de prévention des inondations (PAPI). Ensuite, nous avons accru le fonds Barnier de 56 % cette année, jusqu'à 205 millions d'euros. Une nouvelle augmentation, de 30 millions d'euros, est prévue pour 2022.

Dans les Hauts-de-France, nos services sont pleinement mobilisés. Une information sur les différents financements disponibles sera fournie.

Ce n'est pas un problème de moyens, mais de mobilisation des outils en place et de coordination.

Agences locales de l'énergie et du climat

M. Michel Savin .  - La fragilité du statut fiscal des agences locales de l'énergie et du climat (ALEC) menace leur pérennité.

Créées par la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, les ALEC accompagnent les collectivités territoriales et leurs groupements dans la prise en compte des questions énergie-climat dans leur domaine de compétence. Plus de 22 millions d'habitants sont couverts par une telle structure.

L'article 165 de la loi Climat et résilience a sécurisé leur statut juridique, mais l'absence de statut fiscal entraîne des aberrations. Ainsi, les collectivités territoriales doivent acquitter la TVA sur les subventions versées à ces organismes. Certaines ALEC sont menacées de redressement fiscal.

La fédération Flame, qui réunit les ALEC, réclame un statut proche de celui des agences d'urbanisme. Un rescrit fiscal permettrait de lever les doutes sur le régime applicable. Quand le Gouvernement va-t-il avancer sur cette question ?

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État, chargée de la biodiversité .  - Les ALEC accomplissent un travail remarquable, en réseau, pour promouvoir la transition énergétique et enrichir l'expertise des territoires.

Leur statut juridique vient d'être renforcé par l'article 165 de la loi Climat et résilience. La Flame a salué cette avancée.

Sur le plan fiscal, les ALEC obéissent au droit commun : seules les contreparties pour des services à titre onéreux fournis par des opérateurs économiques sont soumises à la TVA. Ces structures peuvent bénéficier d'exonérations au titre de leurs activités non lucratives lorsqu'elles se constituent en associations.

M. Michel Savin.  - Vous n'avez pas répondu à ma question. Les ALEC font face à un blocage incompréhensible. La moitié du chemin a été parcourue : ne restons pas au milieu du gué !

Tribunaux au bord de l'implosion

M. Jean-Baptiste Blanc .  - Cavaillon est le théâtre d'une véritable guerre urbaine, sur fond de trafics de drogue. Pas un jour sans rafales de kalachnikov... Il faut agir fort et vite !

Compte tenu de la gravité de la situation, nous devons conforter l'ensemble de la chaîne police-justice.

Les quatre cabinets d'instruction du département sont au bord de l'implosion. Le tribunal correctionnel explose, du fait des procédures tentaculaires de trafics de stupéfiants, tandis que la cour d'assises siège de façon quasi-permanente.

Le procureur de la République s'est plaint du manque de moyens. On ne lutte pas contre des trafics de cette importance avec des moyens sous-dimensionnés !

Je salue le travail des magistrats, qui luttent avec acharnement contre un fléau qui pénalise au premier chef les habitants, majoritairement paisibles, de ces quartiers gangrenés. Mais l'épuisement moral gagne.

Il faut accroître les moyens de la justice sur le temps long et pour l'ensemble de la chaîne pénale. Pour Avignon, cela signifie concrètement la mise en place d'un cinquième pôle instructeur et la nomination de deux magistrats au tribunal correctionnel et d'un magistrat au pôle criminel.

Le Gouvernement a déclaré vouloir mener une guerre totale contre la drogue, mais les moyens doivent suivre.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice .  - Le Gouvernement, sous l'autorité du Président de la République et du Premier ministre, mène une action résolue pour donner à la justice les moyens dont elle a besoin.

Le budget de mon ministère a augmenté de 8 % cette année et augmentera d'autant l'année prochaine, pour atteindre 9 milliards d'euros. Plus de 2 000 emplois ont été créés en quelques mois. Nous atteignons le seuil historique de 9 000 magistrats - 700 de plus qu'au début du quinquennat.

La juridiction d'Avignon compte trente-huit magistrats. Les effectifs ont augmenté, hors magistrats, de 16 %.

Le 29 juillet dernier, la demande d'un nouveau cabinet d'instruction a été formulée dans le cadre du dialogue de gestion. J'ai reçu les chefs de juridiction à la Chancellerie. Nous sommes en train d'examiner cette demande.

D'ores et déjà, je vous annonce qu'un poste supplémentaire, auprès du parquet général de Nîmes, renforcera cette cour d'appel ; il pourra être affecté, en tant que de besoin, au parquet d'Avignon.

M. Jean-Baptiste Blanc.  - Je vous remercie de prendre la mesure de la situation. Quelque chose se joue sur mon territoire dont nous devons tous appréhender la portée.

Centre de détention de Muret

Mme Brigitte Micouleau .  - Le Sénat s'apprête à examiner le projet de loi pour la confiance dans l'institution judiciaire. Je me suis particulièrement intéressée à son titre III, relatif au travail pénitentiaire.

En la matière, de nombreuses mesures seront prises par voie réglementaire.

Si l'utilité sociale du travail en prison n'est plus à démontrer, celui-ci ne concerne que 28 % des détenus. Le garde des Sceaux a annoncé vouloir porter ce taux à 50 % en deux ans.

Le centre de détention de Muret, en Haute-Garonne, permet à 80 % de sa population carcérale d'être éligible au travail, dans le cadre d'ateliers d'excellente qualité qui offrent aux détenus formation, accompagnement et préparation à la sortie.

Les ordonnances devront être écrites de façon collégiale. Le service de l'emploi pénitentiaire doit proposer six sites pilotes pour participer à leur rédaction. Compte tenu de l'exemplarité de son modèle, le centre de détention de Muret en fera-t-il partie ?

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice .  - Souffrez que je fasse durer le suspense...

Le travail en détention est essentiel, mais la situation est dégradée : de 50 % dans les années 2000, le taux de détenus qui travaillent est passé à moins de 30 %.

Je ne ménage pas mes efforts pour convaincre les chefs d'entreprise. Le travail en prison, c'est bon pour les patrons, pour les détenus et pour la société tout entière. C'est pourquoi le projet de loi que je m'apprête à vous présenter prévoit la création d'un contrat de travail spécifique.

Cinq sites pilotes vont participer à une expérimentation. J'ai le plaisir de vous annoncer que le centre de Muret en fera partie, compte tenu de l'engagement sans faille de ses agents et de sa direction sur le sujet.

Mme Brigitte Micouleau.  - Je vous remercie pour cette réponse argumentée, qui confortera les acteurs du centre de Muret.

Moyens de fonctionnement des tribunaux de commerce

M. Yannick Vaugrenard .  - Les juges des tribunaux de commerce alertent sur la situation budgétaire de leurs juridictions.

Les moyens de fonctionnement sont insuffisants. En 2016, le président du tribunal de commerce de Paris déplorait un budget annuel de fonctionnement de 12 000 euros. Constat partagé au tribunal de commerce de Nantes, avec une allocation de fonctionnement de seulement 8 000 euros en 2020 !

Cette situation entrave le bon exercice de la justice, pourtant essentiel en période de crise sanitaire. Les juges, bénévoles, sont parfois amenés à mettre la main à la poche pour assurer le fonctionnement...

Un effort national de 1 million d'euros suffirait à résoudre les questions du quotidien. Le ministère de la justice voit son budget croître de 8 % : de quelle augmentation les tribunaux de commerce pourront-ils bénéficier ?

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice .  - Je rends hommage aux juges consulaires, qui exercent leur fonction de façon bénévole, comme les conseillers des prud'hommes.

L'augmentation du budget de la justice est inédite depuis trente ans. Ces moyens supplémentaires seront consolidés dans le budget 2022. Les tribunaux de commerce en bénéficieront évidemment.

Pour le tribunal de commerce de Nantes, les dépenses de fonctionnement soutenues à la mi-septembre sont en hausse de 6 %, à 33 000 euros. Le budget 2022 garantira ce niveau de soutien.

Par ailleurs, le Conseil national des tribunaux de commerce travaille à un guide budgétaire, pour que les présidents de tribunal connaissent mieux la procédure d'octroi des moyens de fonctionnement.

M. Yannick Vaugrenard.  - Je vous remercie pour cette réponse, de nature à satisfaire le tribunal de commerce de Nantes.

Suppression de la double tenue du registre d'état civil

M. Yves Détraigne .  - Les communes sont désormais dispensées d'élaborer un double des registres d'état civil, à condition de justifier de conditions de sécurité renforcées nécessaires à la bonne tenue et la sécurisation des données.

En réponse à une question écrite déposée au Sénat, la Chancellerie a expliqué en 2017 qu'un arrêté devrait parfaire le cadre légal. Or il semble qu'aucun arrêté n'ait été publié à ce jour...

La suppression de la tenue du second registre papier est-elle applicable en l'état ? Sinon, quand publierez-vous le texte réglementaire manquant ?

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux .  - Afin de simplifier la tâche des communes, la loi de modernisation de la justice du XXIe siècle a ouvert la possibilité de supprimer le double des registres, à condition que les communes disposent d'un traitement automatisé. Le décret d'application du 6 mai 2017 renvoie à un arrêté, en cours de préparation, afin d'en préciser les modalités. Je pense à la mise à jour des données en moins de 24 heures ou à la présence d'un hébergement des données sur un site distinct. L'État veut alléger les obligations des maires mais en toute sécurité. L'arrêté sera publié dans un délai d'un an, après consultation des communes et des éditeurs services informatiques.

M. Yves Détraigne.  - Je vous remercie pour cette réponse qui éclairera les communes.

Soutien aux radios locales indépendantes

M. Philippe Mouiller .  - La pandémie a mis les radios locales indépendantes ou associatives dans une situation financière délicate, malgré le fonds d'aide à la diffusion hertzienne et le crédit d'impôt temporaire de 15 % en faveur des diffuseurs.

Ces radios n'ont pas souhaité mettre leur personnel en chômage partiel, pour maintenir du lien social dans les territoires. Leurs recettes publicitaires ont fondu durant la crise sanitaire, mais leurs charges sont restées les mêmes, voire ont augmenté en raison des nouvelles contraintes techniques liées aux règles sanitaires.

Certaines attendent le versement du fonds de soutien à l'expression radiophonique, vraisemblablement en décembre, après la réunion de la commission compétente, alors qu'elles l'espéraient au printemps.

Pour soutenir le déploiement du digital audio broadcasting (DAB+) en France qui nécessitera plusieurs millions d'euros d'investissement, les radios locales sollicitent en outre la création d'une nouvelle aide, sans quoi leur survie est menacée.

Quelles mesures comptez-vous prendre afin de préserver un paysage radiophonique dense et pluraliste ?

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la Culture .  - Les médias locaux, dont les radios, ont joué un rôle de premier plan dans la crise sanitaire. Les radios commerciales locales ont été accompagnées par mon ministère via le fonds de soutien à l'expression radiophonique (FSER) et le crédit d'impôt au profit des diffuseurs audiovisuels pour leurs dépenses dans la création.

Les radios associatives n'ont pas été épargnées, même si elles sont moins dépendantes de la publicité. Pour elles, les crédits du FSER ont été portés à 32 millions d'euros en 2021, soit une augmentation de 1,25 million d'euros. L'adaptation du versement des subventions a été saluée. Aucune anomalie n'a été signalée dans le calendrier de versement pour Radio Gâtine ou Radio Val d'or, par exemple.

Le FSER 2022 augmentera encore de plus de 1 million d'euros, à 33,1 millions d'euros, pour accompagner la mise en oeuvre du DAB+.

Le marché publicitaire des radios a retrouvé son niveau d'avant-crise et la dynamique pour le second semestre est positive. C'est pourquoi les dispositifs exceptionnels n'ont pas vocation à être reconduits. Pour l'adaptation du FSER, nous ferons le bilan en fin d'année.

M. Philippe Mouiller.  - Je vous remercie. J'attire néanmoins votre attention sur la question de trésorerie.

Marché du livre à l'heure du numérique

M. Jean-Marie Mizzon .  - Le marché du livre est en pleine mutation. Le numérique et la pandémie ont entraîné bien des bouleversements dans les habitudes des Français en matière de lecture, avec des conséquences sur le monde de l'édition. La lecture est toujours plébiscitée, mais près de 400 000 titres sont disponibles sur support numérique : ordinateur, liseuse, smartphone.

Les achats de livres numériques ont explosé durant l'épidémie. Le nombre de téléchargements et les ventes de livres numériques ont été multipliés par sept, le nombre d'ebooks commandés a été multiplié par quinze. La lecture directe sur un ordinateur, elle, a été multipliée par trois, ce qui représente plus de 800 000 livres numériques. Enfin, la plupart des plateformes de vente de livres numériques ont enregistré des hausses d'activités allant jusqu'à 200 %. Quelle politique comptez-vous mener afin d'éviter que les libraires ne soient lésés ?

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la culture .  - La crise sanitaire a engendré une hausse au moins temporaire du développement du livre numérique, que le ministère de la culture accompagne par la loi sur le prix unique du livre numérique de 2011, un soutien au prêt numérique en bibliothèque et un plan stratégique pour développer une offre de livres numériques nativement accessibles aux personnes en situation de handicap.

Le Centre national du livre (CNL) propose trois aides pour le développement de services numériques structurants, le soutien à la publication de livres numériques, et le développement du livre audio.

Le livre imprimé représente cependant toujours 95 % des ventes en volume. Le confinement ayant eu un impact sur les ventes, le CNL, les directions régionales d'action culturelle (DRAC), en liaison avec les organismes de gestion collective et les collectivités territoriales, ont apporté pendant la crise sanitaire des aides variées : 677 auteurs ont reçu 2,26 millions d'euros d'aides d'un fonds d'urgence ; les éditeurs ont reçu 440 aides pour un montant total de 4 millions d'euros ; les libraires plus de 15 millions d'euros au titre de la compensation des pertes d'exploitation et un fonds de modernisation a déjà engagé 9 millions d'euros sur les 12 millions prévus en leur faveur.

Il faut y ajouter les mesures transversales qui ont aussi bénéficié au livre.

M. Jean-Marie Mizzon.  - Les initiatives sont nombreuses, mais le ressenti sur le terrain n'est pas à l'avenant. Puisse l'avenir vous donner raison !

Travailleurs et vétérans des essais nucléaires

Mme Angèle Préville .  - Les 300 000 vétérans qui ont participé aux essais nucléaires bénéficient désormais de la médaille de la défense de la Nation avec agrafe « essais nucléaires ». Ils sont toutefois nombreux à souffrir de lourdes séquelles ; leurs enfants et petits-enfants également. Depuis Hiroshima et Nagasaki, nous savons que les descendants des personnes irradiées peuvent souffrir de stérilité, de malformations, de cancers.

L'État ne doit-il pas leur assurer un suivi médical ? Moralement, nous devons assumer les conséquences des décisions prises par le passé. La France a déjà beaucoup attendu pour accorder à ceux qui l'ont servie la reconnaissance de la Nation. Quand prendrez-vous en compte les demandes des vétérans ?

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée, chargée de la mémoire et des anciens combattants .  - Le décret du 29 janvier 2021 crée une nouvelle agrafe « essais nucléaires » pour honorer ceux qui ont participé au développement de notre force de dissuasion nucléaire. Fin août, 1 145 personnes avaient reçu cette médaille ; elles seront bientôt 1 415. L'État reconnaît donc ce qu'il doit à ces femmes et à ces hommes.

En tant que médecin, j'invite à aborder les questions épidémiologiques avec précaution : attention aux comparaisons hasardeuses et catastrophistes.

L'Inserm a publié en 2021 une expertise collective sur la Polynésie française qui conclut qu'aucun effet transgénérationnel n'est attesté à ce jour chez l'homme, tout en recommandant un suivi attentif.

La Commission internationale de protection radiologique a programmé une expertise pour 2025, le comité scientifique des Nations Unies prévoit une étude des effets des rayonnements ionisants pour 2028, avec la participation des experts de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire. Nous avons tenu une table ronde à la demande du Président de la République avec nos compatriotes polynésiens ; le président-directeur-général de l'Inserm y a apporté des réponses.

Attention, surveillance, reconnaissance : voici les principes de notre politique.

Mme Angèle Préville.  - Il convient d'assumer nos responsabilités et de reconnaître ce que nous devons à ces personnes.

Règles de calcul de la DGF

M. Hervé Maurey .  - Malgré des demandes répétées, les règles de répartition de la dotation globale de fonctionnement (DGF) sont toujours aussi injustes : elles varient du simple au double entre communes rurales et urbaines. Des études ont pourtant démontré que les charges des communes de petite taille sont sous-estimées.

Le Sénat a proposé un amendement très modérée en 2020, retoqué à l'Assemblée nationale à la demande du Gouvernement. Pourtant, tout le monde reconnaît qu'il faut revoir la règle. Or le projet de loi de finances pour 2022 est muet sur le sujet. Allez-vous y remédier ?

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée, chargée de la mémoire et des anciens combattants .  - Je sais le Sénat attentif à ces questions, mais le coefficient logarithmique part du principe que les communes ont d'autant plus de charges qu'elles ont d'habitants - constat partagé sur le terrain.

En 2021, les communes urbaines ont reçu 166 euros par habitant, contre 160 pour les communes rurales. Ces dernières reçoivent en effet, en plus de la DGF, 1,8 milliard d'euros au titre de la dotation de solidarité rurale (DSR) - abondée de 95 millions d'euros en 2022, ce qui fera un total d'augmentation de 455 millions d'euros pour tout le quinquennat - mais aussi 1,46 milliard d'euros au titre de la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) - soit 5,2 milliards sur tout le quinquennat, contre 3,5 milliards sous le précédent.

M. Joël Giraud a suggéré à l'Association des maires ruraux de France de faire des propositions en concertation avec les autres associations d'élus, car on ne peut réformer la DGF que dans un esprit de consensus et de façon coordonnée. Les travaux du groupe de travail se poursuivront en 2022.

M. Hervé Maurey.  - Votre réponse me surprend : vous suggérez que la différence est justifiée, alors que jusqu'à présent, les gouvernements successifs reconnaissaient le problème. Les maires ruraux apprécieront ! Vous nous annoncez que la réflexion continue l'année prochaine, comme chaque année. Nous avons le sentiment d'être menés en bateau ; le Sénat y reviendra dans le prochain PLF.

Cumul d'une pension d'invalidité avec une indemnité d'élu local

Mme Valérie Boyer .  - Nous assistons impuissants au blues des maires, indice d'un malaise dans notre démocratie. Une élue de la commune dont j'ai été maire perçoit une pension d'adulte handicapée, soumise à condition de ressources ; son indemnité d'élu est prise en compte dans ce calcul et peut être cumulée à ces prestations, dans la limite du dernier salaire annuel moyen perçu.

Ainsi, un élu en situation d'invalidité ou de handicap ne pourra jamais toucher plus que le montant de son dernier salaire annuel moyen, alors même qu'un élu en mesure de conserver une activité professionnelle complète pourra cumuler revenus et indemnités de fonction, sans aucune limite !

Cela n'incite pas les personnes en situation d'invalidité ou de handicap à s'engager dans la vie politique.

Cumuler une pension d'invalidité et une indemnité de fonction n'est pas interdit ; le cumul est même implicitement autorisé lors des six premiers mois de la reprise d'une activité. Mais en pratique, l'addition des deux conduit souvent l'intéressé à dépasser le plafond, le contraignant de fait à renoncer à l'une ou à l'autre. Qu'allez-vous faire contre cette injustice ?

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée, chargée de la mémoire et des anciens combattants .  - La règle s'applique à tous les revenus d'activité. Près de 31 % des bénéficiaires d'une pension d'invalidité travaillent. Il faut mettre fin à cette désincitation ; aussi les règles de calcul ont-elles été assouplies dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020.

La pension d'invalidité ne sera réduite que de moitié au-delà du seuil, ce qui maintient un gain financier. Les dispositions réglementaires seront prises au printemps 2022.

Mme Valérie Boyer.  - C'est une amélioration, mais la situation reste discriminatoire par rapport à un élu à la retraite ou au chômage.

Exportations massives de grumes vers l'Asie

Mme Marie Evrard .  - La filière bois a des difficultés d'approvisionnement en matières premières. Le chêne, le hêtre, les résineux et le douglas du Morvan sont concernés. En cause, les exportations de bois brut vers la Chine. Au point que le bois de construction devient difficile à trouver dans le Morvan !

Cette situation s'amplifie avec la décision de la Russie de bloquer ses exportations de grumes et de sciage auprès de son client principal, l'Asie.

L'industrie française du sciage et de la deuxième transformation est donc en grand danger avec le ralentissement de ces activités, alors que la reprise économique est là. À cela s'ajoute le gâchis écologique que constitue l'exportation de grumes en Asie, qui annule le bénéfice de la captation de carbone par le bois.

La filière bois occupe une place importante dans le Morvan ; comment allez-vous la soutenir et sécuriser ses approvisionnements?

M. Cédric O, secrétaire d'État, chargé de la transition numérique et des communications électroniques .  - La filière bois doit relever plusieurs défis : faire face au changement climatique pour accroître la résilience, mais aussi faire face aux pénuries.

La consommation de bois a augmenté de 10 % en un an, ce qui, ajouté aux restrictions d'exportations de certains pays, crée des tensions sur les scieries et les industries. La capacité de nos industries à être présente sur un marché du bois de construction en plein essor est une question de souveraineté.

Le Gouvernement a saisi la Commission européenne à laquelle il a demandé des mesures de sauvegarde. Le Premier ministre a demandé à l'Office national des forêts (ONF) de privilégier au maximum les contrats avec des scieries françaises pour éviter l'exportation à la suite d'enchères.

Le plan de relance apportera un soutien de 100 millions d'euros à la filière, en plus des 200 millions d'euros déjà prévus, mais aussi 150 millions d'euros pour le renouvellement forestier en amont - soit le reboisement de 45 000 hectares - et 50 millions d'euros pour la modernisation des industries de transformation du bois en aval.

Enfin, pour assurer l'avenir à long terme de cette filière d'importance nationale, le Premier ministre a demandé aux ministres Denormandie, Pannier-Runacher et Abba d'organiser à l'automne des assises de la forêt et du bois.

Mme Marie Evrard.  - Merci pour votre réponse attendue par les territoires ruraux.

Avenir de Sanofi à Vertolaye dans le Puy-de-Dôme

M. Éric Gold .  - Le projet de cession du site de Sanofi de Vertolaye dans le Puy-de-Dôme à la société EUROApi consiste à créer, à partir de 2022, une nouvelle entité rassemblant les activités commerciales et de développement de principes actifs pharmaceutiques de Sanofi, et six de ses sites de production en Europe. Cette vente à la découpe laisse craindre le démantèlement futur du groupe et un recul de son empreinte industrielle en France. Les salariés sont inquiets, compte tenu de l'état des sites français, malgré les annonces rassurantes, début septembre, sur l'ouverture d'un bâtiment consacré à la production d'hormones.

Avec 630 CDI, 100 à 150 contrats divers, soit mille emplois au total en comptant les partenaires, l'enjeu est majeur, pour le territoire mais aussi pour la capacité de la France à produire des médicaments et à éviter les pénuries.

Le Président de la République a annoncé en juin un investissement de 7 milliards d'euros pour l'innovation en santé. Il doit servir à soutenir nos établissements déjà installés en France.

Pouvez-vous nous rassurer sur l'avenir de ces sites, notamment celui de Vertolaye ?

M. Cédric O, secrétaire d'État, chargé de la transition numérique et des communications électroniques .  - La crise sanitaire a rappelé l'importance de la souveraineté sanitaire. Il nous faut des industries fortes. Sanofi a annoncé, le 24 février 2020, avoir vendu six sites européens, dont deux en France.

La société issue de cette opération, EUROApi, vise à devenir le leader européen de la production de principes actifs, derrière le Suisse Lonza, grâce à un large portefeuille de produits, des normes de qualité élevées, des prix compétitifs, des capacités industrielles et technologiques de pointe en Europe et un réseau commercial présent dans plus de 80 pays.

Le Gouvernement a demandé plusieurs garanties : les employés de Sanofi sur le territoire français se verront garantir 1 500 emplois sur les 3 200 salariés de la nouvelle entité, Sanofi gardera son siège social à Paris et restera un actionnaire de référence avec 30 % du capital.

Les 800 collaborateurs de Vertelaye apporteront toutes leurs compétences. Un nouveau site sera construit d'ici 2023, pour un investissement de 40 à 60 millions d'euros. D'ici 2025, un plan d'investissement de 190 millions d'euros y sera mis en oeuvre.

Le Gouvernement demeure attentif à la stratégie de Sanofi sur le territoire national.

M. Éric Gold.  - Les emplois doivent être préservés dans le Puy-de-Dôme.

Revalorisation salariale de l'aide à domicile

Mme Else Joseph .  - Le secteur de l'aide à domicile a été injustement oublié du Ségur de la santé. Cela a pu mettre en difficulté les départements qui avaient pris les devants. Heureusement, depuis, des mesures ont été prises, dont une revalorisation de 15 % au 1er octobre 2021 pour les salariés des services d'aide et d'accompagnement à domicile (SAAD) et des services de soins infirmiers à domicile (Ssiad)

L'État participe à hauteur de 200 millions d'euros par an. Mais il faut plus que du saupoudrage. Il faut rendre la profession attractive à long terme. Quelles mesures pérennes et durables pour le secteur ?

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée, chargée de l'autonomie .  - Cela faisait longtemps que les aides à domicile, notamment dans le secteur associatif, attendaient une revalorisation de leur salaire : elles n'atteignaient le SMIC qu'au bout de dix-sept ans d'ancienneté ! Ce métier noble mérite plus de reconnaissance et j'ai obtenu dès mon arrivée le financement de la prime Covid, que seuls quinze départements avaient versée. Elle a désormais été versée dans tous les départements.

À l'avenir, des dizaines de milliers de recrutements seront nécessaires pour accompagner le souhait de nos concitoyens de vivre à domicile le plus longtemps possible. La revalorisation des rémunérations était indispensable. Les dépenses des départements seront compensées à hauteur de 50 %, puis de 70 %. Nous devons également accompagner le secteur privé.

Le Premier ministre a annoncé jeudi dernier que le projet de loi de financement de la sécurité sociale proposerait la création d'un tarif horaire minimum de 22 euros de l'heure, garanti par un financement pérenne de l'État. Je suis pleinement engagée en faveur des aides à domicile.

Mme Else Joseph.  - Je n'en doute pas, mais les conseils départementaux s'inquiètent. Dans les Ardennes, le coût est estimé à 910 000 euros d'ici la fin de l'année. La compensation de l'État est annoncée, mais on connaît la chanson : elle ne s'élèvera qu'à 50 % en 2022. Dans les Ardennes, le reste à charge sera de 6 millions d'euros, pour un budget de 400 millions d'euros.

Indemnisation de perte d'activité des médecins de montagne

Mme Sylviane Noël .  - Quelque 300 médecins généralistes exercent dans les stations de sports d'hiver françaises et répondent aux besoins de soins des populations, notamment la traumatologie liée à la pratique des sports d'hiver.

Cette spécificité nécessite un plateau technique adapté en radiologie, échographie, en médecine d'urgence, en petite chirurgie, faisant de ces cabinets médicaux de véritables cliniques de proximité qui évitent d'encombrer les services d'urgences des hôpitaux en vallée. Cela représente des frais fixes très élevés, pour une activité soumise à une forte saisonnalité.

Or la non-ouverture des domaines skiables durant l'hiver 2020-2021 a engendré pour eux une perte de chiffre d'affaires de l'ordre de 58 %.

Sous la pression des élus de la montagne, le Gouvernement a corrigé au printemps 2021 le dispositif d'indemnisation des médecins. Mais les caisses primaires d'assurance maladie (CPAM) ne semblent pas avoir été informées du changement de méthode de calcul, privant les médecins de montagne des compensations promises. Il y a urgence à définir ces critères de calcul auprès des CPAM dans les meilleurs délais.

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée, chargée de l'autonomie .  - Le dispositif d'indemnisation de la perte d'activité (DIPA) a été créé en avril 2020 pour compenser la perte d'activité des professionnels. Le Gouvernement l'a réactivé pour les professionnels de santé en zone de montagne du 1er décembre 2020 au 30 avril 2021 afin de tenir compte de la fermeture des remontées mécaniques.

Le dispositif est conçu en deux temps : une avance sur la base d'un calcul provisionnel d'abord, puis une régularisation, une fois le montant définitif de l'aide connu. Les paramètres seront communiqués en amont aux professionnels et aux CPAM.

Mme Sylviane Noël.  - Merci. Espérons une application rapide pour répondre aux inquiétudes de ces professionnels de santé indispensables à la vitalité de nos stations et de nos territoires de montagne, dont la population peut être multipliée par dix en hiver.

Lutte contre les effets psychologiques et psychiatriques de la crise sanitaire

Mme Brigitte Lherbier .  - La crise sanitaire a eu un impact délétère sur la santé psychologique de nos compatriotes. Le Président de la République l'a reconnu et a annoncé la mise en place de dix consultations gratuites chez un psychologue pour les mineurs âgés de 3 à 17 ans qui le souhaitent.

Cette mesure utile ne devrait pas se limiter aux seuls mineurs.

Certains pays voisins ont imaginé des solutions efficaces pour lutter contre ce mal-être. En Suisse, des infirmières psychiatriques sont envoyées au domicile des personnes vulnérables par des psychiatres pour évaluer les effets de la crise sanitaire sur la santé mentale de leurs patients.

En France, de telles consultations psychiatriques pourraient être prévues et comptabilisés comme des soins, afin que les infirmières soient rémunérées en conséquence.

Le Gouvernement entend-il mettre en place de telles mesures ?

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée, chargée de l'autonomie .  - La santé mentale est une préoccupation centrale du Gouvernement, comme en témoignent les assises en cours, qui seront conclues par le Président de la République.

Près d'un quart des Français souffre de problèmes de santé mentale, dès le plus jeune âge : 15 % des 15-20 ans ont besoin d'un suivi. Tel est le lourd tribut de la crise. Les passages aux urgences et les hospitalisations ont augmenté et les états anxieux et dépressifs se sont accrus.

La campagne d'information « En parler, c'est déjà se soigner » a été lancée dès le mois d'avril 2021 pour lutter contre la stigmatisation et favoriser le recours aux soins comme à la prévention.

Les dispositifs en oeuvre pendant la crise ont montré l'importance de la prévention et de la prise en charge en amont. Des mesures sont expérimentées, notamment d'écoute.

Les assises ont vocation à aller plus loin pour en finir avec ce tabou.

Mme Brigitte Lherbier.  - Le département du Nord est particulièrement touché : 19 % des habitants des Hauts-de-France souffrent de dépression, soit quatre points de plus que la moyenne nationale. Il faut utiliser en renfort les infirmières libérales en les incitant à intervenir en santé mentale. Les soins à domicile évitent l'aggravation de l'état dépressif.

Traitement de la maladie de Charcot à titre compassionnel

Mme Émilienne Poumirol .  - La sclérose latérale amyotrophique (SLA), dite maladie de Charcot, a été décrite il y a plus de 156 ans et touche des dizaines de milliers de personnes à travers le monde, dont 2 000 personnes diagnostiquées annuellement en France.

Malgré les recherches sur les microbiotes intestinaux et l'action de l'association Tous en selles contre la SLA (TECS), qui étudie le lien entre l'axe cerveau-intestin et la SLA, il n'existe aucun traitement curatif et la maladie reste mortelle.

La transplantation de matières fécales consiste à transplanter les bonnes bactéries d'une personne saine à une personne malade, afin de repeupler son microbiote. Cette mise en oeuvre est possible, son utilisation a déjà été approuvée. Les patients vivent ainsi dans de meilleures conditions de confort.

Les traitements à titre compassionnel sont réservés aux situations rares et graves, en l'absence de traitement : c'est le cas de la SLA. Il faudrait l'accord de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM).

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée, chargée de l'autonomie .  - Nous sommes attentifs au développement de nouvelles thérapies, dont les premiers résultats donnent espoir.

Plusieurs essais cliniques ont été autorisés par l'ANSM, notamment pour la maladie de Crohn, mais pas pour la maladie de Charcot. Plusieurs projets sont en cours d'instruction dans le cadre de l'appel à projet de BPIFrance, mais ils ne concernent pas non plus cette maladie.

La réforme de l'accès précoce et compassionnel, qui entrera en vigueur avant la fin de l'année, permettra à l'ANSM d'autoriser l'utilisation d'un médicament dans une indication thérapeutique donnée. Nous avançons donc à grands pas.

Mme Émilienne Poumirol.  - J'entends que des études sont en cours, notamment sur la maladie de Crohn, mais il faudrait y inclure la maladie de Charcot.

Oubliés du Ségur de la santé

Mme Chantal Deseyne .  - Les négociations du Ségur ont oublié certains professionnels, notamment ceux des établissements publics autonomes d'Eure-et-Loir qui ne bénéficient pas du complément de traitement indemnitaire (CTI). Ils relèvent pourtant de la fonction publique hospitalière et sont restés pleinement mobilisés pendant la pandémie. C'est inéquitable et injustifié. Cela risque de conduire à des situations de concurrence entre établissements, préjudiciable à la qualité des accompagnements.

Comptez-vous réparer cette injustice dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 et étendre le CTI à l'ensemble des catégories de personnels du secteur social et médico-social ?

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée, chargée de l'autonomie .  - Le Ségur de la santé est la réponse au sous-investissement chronique dans nos établissements de santé. C'est une rupture historique, attendue depuis longtemps. Nous avons étendu les accords à plusieurs catégories de professionnels, notamment ceux des Ehpad, à la suite de la mission Laforcade.

La revalorisation salariale est intervenue au 1er juin 2021 pour les établissements adossés à un hôpital ou un Ehpad ; elle interviendra au 1er octobre 2021 pour les établissements autonomes.

Certains secteurs ont besoin d'une remise à plat complète : pour eux, le CTI n'est pas la bonne réponse. En outre, des discussions sont parfois nécessaires avec les collectivités territoriales. Le Gouvernement est attaché à apporter une réponse pérenne et équitable à l'ensemble des professionnels.

Mme Chantal Deseyne.  - Le Ségur a permis des avancées. La revalorisation financière par le CTI reste importante, même s'il ne constitue pas l'unique levier disponible. Comment justifier des différences de traitement liées au type d'employeur ?

Traitement de l'algie vasculaire de la face

Mme Frédérique Puissat .  - J'appelle votre attention sur l'accès au traitement et le remboursement des anticorps monoclonaux pour les patients souffrant d'algie vasculaire de la face.

Je salue deux personnes présentes en tribunes qui en sont atteintes et se mobilisent fortement.

Je sais le ministre et docteur Véran très sensible à cette question : le 10 juin dernier, il a saisi l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) en vue d'une recommandation temporaire d'utilisation.

Avez-vous reçu une réponse ? La prise en charge sera-t-elle totale, comme c'est déjà le cas dans quatorze pays européens ?

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée, chargée de l'autonomie .  - Cette douloureuse maladie reste insuffisamment diagnostiquée. Différents traitements sont actuellement pris en charge, de première ou seconde intention, de recours, mais aussi des alternatives non médicamenteuses. La Haute Autorité de santé (HAS) recommande que la prise en charge par la solidarité nationale soit réservée aux seuls patients atteints de migraine sévère en échec.

La commission de la transparence de la HAS a considéré que l'amélioration du service médical rendu (ASMR) n'était que de niveau V : son remboursement ne peut donc être envisagé qu'en cas d'économies démontrées dans les coûts de traitement.

Les prétentions tarifaires extrêmement élevées de l'industrie ont fait échouer les négociations et ce traitement n'est donc toujours pas inscrit sur la liste des médicaments remboursables. Les négociations reprendront si le laboratoire se montre plus ouvert et présente des résultats tangibles.

Mme Frédérique Puissat.  - La temporalité est différente pour les patients, car c'est une maladie particulièrement invalidante.

Les parlementaires sont aux côtés du Gouvernement pour aboutir à une reconnaissance temporaire d'utilisation.

Coût réel des vaccins et tests antigéniques

M. Michel Canévet .  - Nous venons de connaître une pandémie extrêmement grave aux incidences sanitaires et financières lourdes. On peut se réjouir de la vaccination de plus de 70 % des Français, mais combien ont coûté ces vaccins ? Le prix du Pfizer serait passé de 15,5 à 19,5 euros ; celui du Moderna de 19 à 21,5 euros. Et combien ont coûté les 138 millions de tests réalisés ? Les sources varient, de 27 à 54 euros l'unité : le flou est total.

Quel est le coût réel des vaccins et des tests ? Comment sont-ils financés ? Beaucoup de collectivités territoriales se sont engagées : quelle compensation obtiendront-elles ?

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée, chargée de l'autonomie .  - Le coût de l'absence de soins sera difficile à évaluer... De mars 2020 à fin août 2021, 135 millions de tests de dépistage ont été réalisés, dont 95 millions de tests PCR au coût unitaire de 43,89 euros - assorti d'un bonus si le résultat était délivré en moins de douze heures. Sur les 14,8 milliards d'euros de dépenses exceptionnelles de l'Assurance maladie, 6,2 milliards ont concerné les tests. Cette prise en charge cessera le 15 octobre, sauf pour les mineurs, les personnes vaccinées ou sur prescription médicale.

Le coût de la campagne de vaccination pour l'Assurance maladie devrait s'élever à 1,5 milliard d'euros en 2021. Les achats de vaccins ont fait l'objet de contrats entre Santé publique France et les laboratoires, mais je ne dispose pas de chiffres consolidés.

Les collectivités territoriales ont grandement contribué à la réussite de ces campagnes. Leurs surcoûts, et non leurs coûts, seront compensés.

M. Michel Canévet.  - Il est important que la transparence soit faite et que les négociations avec les laboratoires permettent d'obtenir des prix réduits. Les tests de confort ne peuvent plus être gratuits.

Vaccination de proximité

M. Pierre Ouzoulias .  - La carte de la vaccination est celle de la pauvreté : les communes populaires sont celles qui ont les taux de vaccination les plus faibles. Ma ville de Bagneux a consacré 400 000 euros à son centre de vaccination ; elle n'a perçu de l'État qu'une aide symbolique de 76 000 euros.

Beaucoup de populations demeurent rétives à la vaccination, surtout celles dont la vie sociale se limite à la subsistance : les mesures coercitives comme le passe sanitaire sont sans effet sur elles.

Je salue la vaccination de proximité réalisée à Bagneux, place Dampierre, par les bénévoles de la Croix-Rouge. Quelque 111 personnes y ont été vaccinées, dont 39 primo-vaccinations. La vaccination est mieux acceptée quand c'est votre voisin qui vous la propose.

Comment comptez-vous encourager cette vaccination de proximité ?

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée, chargée de l'autonomie .  - J'ai moi-même visité de nombreux centres de vaccination. Les collectivités ont été au rendez-vous.

La campagne vaccinale évolue : nous devons désormais effectuer les rappels tout en poursuivant la primo-vaccination, notamment des plus précaires. Leur taux de vaccination a doublé pendant l'été, passant de 22 à 40 %.

Pour mieux les atteindre, nous avons développé « l'aller vers » : supports en vingt-trois langues, vaccination sans rendez-vous, visites systématiques dans les hébergements d'urgence, navettes et vaccibus... Quelque trois millions de SMS ont été adressés aux personnes bénéficiaires de la complémentaire santé solidarité, leur proposant un numéro coupe-file.

Nous devons poursuivre nos efforts. Les agences régionales de santé (ARS) travaillent avec les collectivités territoriales, dans la dentelle, pour identifier les personnes non vaccinées et adapter notre réponse.

M. Pierre Ouzoulias.  - Vous utilisez le « nous », mais en l'espèce, c'est la mairie de Bagneux et la Croix-Rouge qui ont oeuvré ! Comment l'État les aide-t-il ? Vous me détaillez un programme, mais j'aurais voulu une réponse sur ce qui se fait déjà. Car oui, la vaccination de proximité est essentielle.

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée.  - La ville de Bagneux sera aidée comme les autres.

Psychiatrie

Mme Isabelle Raimond-Pavero .  - La crise sanitaire a touché tous les secteurs de la santé et plus particulièrement celui de la psychiatrie. C'est un enjeu de santé majeur : une personne sur cinq sera un jour atteinte d'une maladie psychique.

Le confinement et les difficultés économiques et sociales ont accru les symptômes dépressifs, anxieux et les addictions.

Avant même la crise sanitaire, le contrôleur général des lieux de privation de liberté déplorait des services psychiatriques débordés.

Avec la crise, de nombreuses structures extra-hospitalières ont fermé ; les patients ont subi des restrictions excessives à leurs droits, ils furent nombreux à renoncer à leurs soins.

Alors que les Assises de la santé mentale et de la psychiatrie se déroulent actuellement, quelles mesures concrètes pour ce secteur ?

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée, chargée de l'autonomie .  - Ces Assises seront conclues par le Président de la République, signe de l'importance que nous leur accordons. J'ai moi-même conclu les travaux d'hier et ai été impressionnée par la qualité des interventions.

La crise a mis en exergue les difficultés de la psychiatrie, mais notre engagement à est antérieur. Conformément à la feuille de route de la santé mentale et de la psychiatrie, une dotation annuelle de financement de 100 millions d'euros a été accordée aux établissements publics psychiatriques en 2020 et 2021 ; les appels à projets nationaux lancés en 2019 par le fonds d'innovation en psychiatrie et en pédopsychiatrie, reconduits en 2020 et 2021, ont permis la création de lits, en particulier pour les mineurs, dans les territoires les plus dépourvus ; les centres médico-psychologiques (CMP) et les maisons de santé pluridisciplinaires ont été renforcés en psychologues. Notre engagement est constant.

Coût des centres de vaccination municipaux dans les Alpes-Maritimes

M. Philippe Tabarot .  - Depuis un an et demi, les collectivités locales sont à pied d'oeuvre pour protéger nos concitoyens : elles ont été exemplaires. Pourtant, elles sont bien absentes des discours du Président de la République.

Elles ont pallié les manques d'un État amorphe, d'abord pour les masques puis pour les campagnes de tests et de vaccination. Mais elles auront été saignées durant ce quinquennat déconnecté des territoires.

Les élus locaux ont été au rendez-vous, notamment dans les Alpes-Maritimes, pour augmenter les capacités des centres de vaccination au gré des annonces gouvernementales. L'État s'était engagé à compenser, mais la compensation promise, quand elle existe, est loin de couvrir les coûts réels : c'est tout juste un pourboire.

Le Président de la République est plus prompt à ouvrir le carnet de chèques qu'à honorer ses dettes. Quand entendrez-vous la colère des maires, ces supplétifs bien utiles, mais que vous asphyxiez ?

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée, chargée de l'autonomie .  - Merci pour cette question sans intention polémique... Je suis particulièrement respectueuse des collectivités territoriales, dont j'émane. Elles ont joué un rôle déterminant et collectif.

La compensation a fait l'objet d'une concertation au printemps, et a été admise par l'ensemble des parties prenantes. La mise à disposition de personnel et de locaux par les collectivités territoriales se fait à titre gratuit, au titre de leur contribution à l'effort national. En revanche, l'État prend en charge le personnel supplémentaire, ainsi que les achats de matériel.

Nous venons de lancer une campagne de rappel vaccinal pour les plus de 65 ans et les personnes à risque. Les ARS ajustent le maillage des centres de vaccination, en lien avec les élus et les professionnels de santé. La troisième dose pour toute la population n'est, à ce jour, ni actée ni écartée.

Nous continuerons à faire appel aux collectivités territoriales qui le souhaitent ; elles connaissent les conditions financières de leur intervention.

M. Philippe Tabarot.  - Votre réponse est théorique. Certaines collectivités territoriales ont été contraintes d'embaucher, sans remboursement. À Vallauris et à Grasse, l'aide de l'État, c'est zéro ; au Cannet, c'est à peine 10 %... N'abandonnez pas les communes qui s'engagent !

Inégalités d'accès aux soins dans l'Aude

M. Sebastien Pla .  - Littoral ou arrière-pays, ville ou campagne, partout dans mon département je constate un manque de professionnels de santé et d'équipements, une désertification médicale croissante. Les élus se démènent, créant des maisons de santé, recrutant des médecins, réclamant des moyens supplémentaires - un scanner à Limoux -, allant jusqu'à financer l'hélicoptère du SAMU !

Faute d'offre médicale suffisante en soins de ville comme en soins hospitaliers, la patientèle fuit vers Toulouse et Montpellier. L'acquisition d'un scanner renforcerait pourtant l'attractivité nécessaire à l'installation de nouveaux professionnels de santé.

Nos concitoyens réclament un traitement équitable. Les élus locaux ne peuvent tout régler, ni se substituer à l'État.

Que comptez-vous faire pour répondre aux enjeux urgents dans l'Aude ?

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée, chargée de l'autonomie .  - La baisse régulière du nombre de médecins depuis 2010 devrait se poursuivre jusqu'en 2025 dans de trop nombreux territoires, y compris le mien. C'est un problème structurel dont la résolution passe par un panel de solutions, adaptées à chaque territoire.

La formation des médecins prend du temps. D'ici 2025, 15 % de médecins supplémentaires seront formés. L'exercice coordonné est un fort levier d'attractivité. Il faut également libérer du temps médical : c'est pourquoi nous créons, dans un premier temps, 4 000 postes d'assistants médicaux pour aider les médecins dans les tâches administratives et déployons 400 médecins généralistes dans les territoires prioritaires.

Les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) sont aussi une réponse structurelle et rapide. À Tuchan, deux médecins généralistes ont rejoint la maison de santé. À Narbonne, la CPTS du Grand Narbonne a vu le jour et deux maisons de santé pluridisciplinaires ont ouvert dans les quartiers prioritaires de la ville. À Limoux, la demande de scanner formulée par l'hôpital sera considérée avec bienveillance. À Capendu, l'Ehpad sera conforté.

M. Sebastien Pla.  - Merci pour votre réponse précise, mais 400 généralistes pour tout le territoire, c'est peu.

On ne peut laisser fuir la patientèle vers Toulouse et Montpellier. Le désert médical continue à avancer...

Propagande électorale

M. Bernard Buis .  - Les envois des documents de propagande électorale ont suscité bien des mécontentements. Lors des élections départementales et régionales de juin 2021, de nombreuses voix, notamment des maires, se sont élevées pour s'indigner du fiasco de la distribution des plis.

Malgré le développement du numérique, les Français restent attachés à la réception et à la lecture des bulletins de vote et des professions de foi. Les déboires de cette distribution ont pu inciter certains de nos concitoyens à rester chez eux.

Dans la Drôme, en 2017, les mêmes difficultés avaient été déplorées. Il faut revoir tout le système. Pourquoi ne pas confier la mise sous pli et la distribution aux préfets de département, qui pourraient s'appuyer sur les communes chefs-lieux de canton pour gagner en proximité et en qualité ?

À la veille des grands rendez-vous électoraux de 2022, il est temps d'agir.

Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée, chargée de la citoyenneté .  - L'abstention aux scrutins des 20 et 27 juin ne peut être imputée à ces seuls dysfonctionnements, certes intolérables. Dans la Drôme, ils découlent d'une double défaillance : celle du routeur Koba pour la mise sous pli et celle du distributeur Adrexo.

Le marché avec Adrexo a été résilié le 13 août. Un marché passé en urgence avec La Poste permettra un acheminement sécurisé pour les élections partielles jusqu'au 31 décembre, puis un marché pérenne sera passé, suivant les conclusions du rapport de la commission des lois du Sénat du 21 juillet.

Par ailleurs, la mise sous pli sera réinternalisée par les préfectures, avec possibilité de délégation à des communes volontaires.

M. Bernard Buis.  - Espérons que cela règle enfin les problèmes que nous avons connus.

Lutte contre les escroqueries

M. Stéphane Demilly .  - Chaque année, quelque deux millions de nos concitoyens reçoivent des courriers, mails et SMS frauduleux les incitant à communiquer leurs données personnelles ou bancaires ; 300 000 sont victimes chaque année de ces techniques de phishing ou hameçonnage.

Avec la crise, ces attaques se sont multipliées : faux sites d'attestations de déplacement, ventes fictives de masques, arnaques à la livraison de colis... L'hameçonnage est désormais pratiqué à très grande échelle, avec la constitution d'un véritable écosystème cybercriminel.

Pour quelques centaines d'euros, vous pouvez acquérir des millions d'adresses de messagerie et de numéros de téléphone ! Des méthodes prêtes à l'emploi sont également disponibles en ligne.

Quels moyens sont mis en place pour lutter contre ce fléau ?

M. Philippe Tabarot.  - Bravo !

Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée, chargée de la citoyenneté .  - Nos forces de sécurité sont pleinement mobilisées : un réseau de 2900 enquêteurs formés aux investigations sur internet a été constitué ; nous comptons plus de 700 primo-intervenants et plus de 460 investigateurs en cybercriminalité ; un commandement de gendarmerie dans le cyberespace a été créé ; dix mille enquêteurs sont formés aux cybermenaces.

En mai 2021, des plateformes du dark web francophone, comme la Main noire et French Deep Web, ont été démantelées. La plateforme Pharos, désormais ouverte 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, a reçu 68 041 signalements d'escroquerie au premier semestre 2021, sur un total de 130 490 signalements. La plateforme téléphonique Info Escroqueries a traité plus de 25 786 appels.

Une nouvelle plateforme, baptisée Thésée, simplifiera les démarches des particuliers, renforcera le traitement judiciaire des escroqueries en ligne et facilitera le démantèlement des réseaux.

Il faut enfin citer le site cybermalveillance.gouv.fr, destiné à guider les victimes.

M. Stéphane Demilly.  - Une campagne de communication grand public à la télévision serait utile, en particulier pour informer nos aînés.

Insuffisance des effectifs de gendarmerie dans l'Ain

M. Patrick Chaize .  - Les effectifs de gendarmerie dans l'Ain sont insuffisants. Les moyens doivent être adaptés au besoin de sécurité de la population : l'Ain, en forte croissance démographique, a gagné 40 postes en quatre ans, mais une cinquantaine de postes sont non pourvus ! De plus, les ressources budgétaires de la réserve opérationnelle sont épuisées depuis septembre : tout renfort est donc exclu.

La région Auvergne-Rhône-Alpes devrait bénéficier de l'affectation d'environ 70 militaires en sortie d'école, mais cela ne permettra pas de pourvoir les 50 postes vacants dans l'Ain...

Comment le Gouvernement compte-t-il remédier à cette situation et permettre aux unités de gendarmerie aindinoises de retrouver des effectifs adaptés aux réalités locales ?

Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée, chargée de la citoyenneté .  - La sécurité de nos concitoyens est l'une des grandes priorités de ce quinquennat. Dès 2017, le plan présidentiel a prévu la création de 10 000 postes de policiers et militaires d'ici à 2022.

Dans l'Ain, entre 2017 et 2020, les effectifs de gendarmerie, renforcés de 41 postes, ont augmenté plus vite que la population ; le taux de criminalité a baissé et le taux d'élucidation a augmenté.

Il est vrai cependant que des tensions existent sur la réserve opérationnelle, particulièrement mobilisée depuis l'attentat de Nice du 29 octobre 2020.

Le 14 septembre, le Président de la République a annoncé, lors de la clôture du Beauvau de la sécurité, une augmentation historique du nombre de réservistes opérationnels de la gendarmerie, qui sera porté à 50 000.

M. Patrick Chaize.  - Créer des postes, c'est bien ; les pourvoir, c'est mieux ! Dans l'Ain, il n'y a aucun réserviste disponible. Il faut y mettre les moyens, tout de suite.

M. Philippe Tabarot.  - Bravo !

Abattoir de Forges-les-Eaux

Mme Agnès Canayer .  - Le monde de l'élevage est un acteur de la relance économique.

Le plan Abattoirs a été annoncé en juillet 2021 dans le prolongement du dispositif France Relance. Il inclut 123 projets de modernisation. Mais ce plan est trop restrictif pour les abattoirs nouveaux ou en situation de réouverture, comme celui de Forges-les-Eaux.

Fermé depuis 2011 à la suite du départ de l'entreprise Bigard, il devrait rouvrir d'ici à la fin de l'année 2021, avec un fort soutien local, à commencer par celui du maire récemment décédé.

Mais le numéro d'agrément est toujours en attente auprès de la direction départementale de la protection des populations.

De plus, dix ans après sa fermeture, sa remise en fonctionnement est conditionnée à la mise à disposition de postes de fonctionnaires techniciens vétérinaires chargés de l'inspection sanitaire et du bien-être animal en abattoir. Or celle-ci tarde aussi...

L'abattoir de Forges-les-Eaux sera-t-il inclus dans le plan Abattoirs, et ces fonctionnaires seront-ils bientôt mis à disposition ?

M. Julien Denormandie, ministre de l'agriculture et de l'alimentation .  - J'attache une importance cruciale à notre réseau d'abattoirs dans nos territoires, soutien de notre production locale. Aussi ai-je demandé des fonds spécifiques dans le plan de relance.

Je sais le Président du Sénat attaché au dossier de Forges-les-Eaux. L'exploitant de cet abattoir a demandé un agrément sanitaire le 22 juillet. L'instruction se poursuit et l'agrément devrait être attribué avant la fin 2021. Les procédures de recrutement des techniciens vétérinaires seront prochainement engagées. Le dossier de l'établissement, déposé le 25 juin au titre du plan Abattoirs, sera examiné avec bienveillance.

Je vous redis mon entière mobilisation sur le sujet. Soyons fiers de nos abattoirs.

Mme Agnès Canayer.  - Cet abattoir est très attendu dans le pays de Bray. Les acteurs locaux sont fortement investis. Nous serons très attentifs à une ouverture selon le calendrier prévu.

Agriculture de montagne et future PAC

M. Jean-Yves Roux .  - Nous venons de voter une proposition de loi pour une juste rémunération des agriculteurs ; il faudrait que votre action européenne soit en cohérence.

La nouvelle PAC, c'est demain. Notre agriculture de montagne est essentielle, mais très fragile.

Ce modèle agricole suppose plus que jamais un engagement majeur des politiques publiques européennes ciblées sur la préservation des exploitations à forte valeur ajoutée environnementale. Il repose aussi sur le maintien des aides couplées, de l'éligibilité des surfaces agropastorales aux aides surfaciques, de l'aide aux jeunes agriculteurs, ainsi que sur le maintien d'aides à la modernisation des bâtiments.

L'indemnité compensatoire des handicaps naturels (ICHN) doit être renforcée et ciblée sur l'élevage, pour rémunérer à leur juste valeur les services environnementaux rendus par les exploitations herbagères et les surfaces pastorales. Enfin, nous avons besoin d'outils de gestion des risques climatiques performants et mutualisés.

Qu'allez-vous proposer dans le plan national pour sauvegarder l'agriculture et l'élevage de montagne ?

M. Julien Denormandie, ministre de l'agriculture et de l'alimentation .  - Notre culture de montagne, nos élevages de montagne font partie de notre identité et du modèle agricole français. Soyez assuré que je soutiens avec force cette agriculture de montagne, notamment dans les enceintes européennes.

La PAC est un outil essentiel, mais la juste rémunération des agriculteurs est encore plus importante - c'est tout l'objet du projet de loi EGalim 2.

L'ICHN est une demande très forte de nos agriculteurs de montagne ; elle sera maintenue en montant - 1,1 milliard d'euros par an - et en ciblage. Dès 2023, l'État apportera 108 millions d'euros par an, en sus de la PAC, pour atteindre cette enveloppe.

Sur les paiements couplés, nous avons obtenu gain de cause, et l'enveloppe globale est maintenue.

Il y a aussi des nouveautés, sur les protéines, sur la réforme de l'IGB. Nous maintenons l'éligibilité des surfaces pastorales, nous ferons des annonces sur la gestion des risques...

Soyez assurés de mon soutien !

M. Jean-Yves Roux.  - Je sais que vous êtes un fervent défenseur des territoires ruraux et de l'agriculture de montagne, nous l'avons constaté à Corbières lors de la manifestation des Terres de Jim.

La séance est suspendue à midi trente.

présidence de Mme Laurence Rossignol, vice-présidente

La séance reprend à 14 h 30.