Gestion de la crise sanitaire (Conclusions de la CMP)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle l'examen des conclusions de la commission mixte paritaire chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi rétablissant et complétant l'état d'urgence sanitaire.

Discussion générale

M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé.  - Je souhaiterais une suspension de séance de cinq minutes.

Mme Éliane Assassi et Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Déjà ?

M. le président.  - Cette suspension est de droit.

La séance, suspendue à 20 h 50, reprend à 21 h 15.

Rappel au Règlement

M. Pierre Ouzoulias.  - Nous avons vécu une semaine très dure pour la démocratie parlementaire. Personne, même vous, monsieur le ministre, ne peut être satisfait de la façon dont nous avons délibéré - et on nous remet, quelques minutes avant la séance, un texte sur lequel nous allons devoir nous prononcer en aveugle.

Certes, il y a urgence, et nous la comprenons. Mais ce texte touche aux libertés fondamentales. Il aurait fallu que le Sénat disposât de suffisamment de temps pour répondre à l'obligation constitutionnelle d'intelligibilité des débats. Vous allez saisir le Conseil constitutionnel. Nous verrons si cette obligation a été respectée.

M. le président.  - Acte est donné de votre rappel au Règlement.

Discussion générale (Suite)

M. Philippe Bas, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire .  - (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC) C'est un parcours bien chaotique qui, je l'espère, s'achève ce soir.

Nous avons parcouru ces sentiers escarpés avec une seule idée en tête : la responsabilité.

La situation sanitaire de notre pays est inquiétante, avec une quatrième flambée épidémique, différente, plus grave même si pour l'heure moins meurtrière, justifiant que des mesures d'exception soient de nouveau prises, pour donner aux autorités sanitaires des pouvoirs exceptionnels.

Nous sommes prêts à les autoriser, non sans conditions, non sans incertitudes, non sans inquiétudes.

Le passe sanitaire, l'isolement, la vaccination de certaines catégories de personnels sont très contraignants pour nos compatriotes. Les garanties de succès ne sont en outre pas assurées ; mais nous pensons qu'il faut donner un coup d'arrêt à la flambée de cette crise sanitaire. Si le dispositif ne suffit pas, il faudra alors passer à des mesures plus contraignantes.

Nous avons longuement discuté avec les représentants de l'Assemblée nationale. Nous sommes parvenus à un accord sur tous les points... Ce n'était pas gagné d'avance.

Nous avons veillé à ce que les contraintes imposées aux Français ne dépassent pas le strict nécessaire.

Ayons l'humilité de dire que nous ne sommes pas sûrs d'avoir atteint l'équilibre. De ce fait, nous serons extrêmement vigilants. C'est pourquoi nous voulons, chaque semaine, une évaluation de l'efficacité des dispositions que nous vous avons autorisées à prendre ; nous voulons que le Parlement se prononce par une loi s'il faut prolonger ce dispositif après le 15 novembre ou si de nouvelles mesures de contrainte sont nécessaires pour juguler l'épidémie avant cette date.

Grâce à cet accord, le Gouvernement et les autorités sanitaires auront des moyens d'action. Nous souhaitons que ces dispositions réussissent et sommes mobilisés pour faire oeuvre de pédagogie vis-à-vis des Français. Ce n'est pas la peur du gendarme qui assurera le succès de ces mesures, mais l'esprit de responsabilité de nos compatriotes, leur compréhension des enjeux, leur volonté de se protéger eux-mêmes et leurs proches.

Cette quatrième vague n'est heureusement pas accompagnée d'une hausse exponentielle des personnes en soins critiques ou des décès.

Voilà ce que je voulais vous dire en préambule du débat de ce soir. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP)

M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé .  - Anticiper et agir ensemble : voilà ce que je retiens de ces jours et de ces nuits de débat, de cette nouvelle après-midi de travail pour trouver un consensus efficace et juste qui permettra au Gouvernement de disposer de nouveaux moyens d'agir sur l'épidémie.

C'est à l'issue d'un travail parlementaire très exigeant qu'un compromis a été trouvé entre députés et sénateurs pour envisager l'avenir.

Notre démocratie a toujours prouvé qu'elle savait trouver des solutions pour protéger nos concitoyens.

M. Pascal Savoldelli.  - Démocratie, pas vraiment !

M. Olivier Véran, ministre.  - Ce projet de loi comporte des dispositions nouvelles.

Le 15 novembre, nous ne pourrons plus poursuivre avec le passe sanitaire sans revenir devant le Parlement.

Le passe sanitaire pourra être étendu aux mineurs à partir du 30 septembre. Il concernera le public à l'intérieur et à l'extérieur, sans notion de jauge.

S'agissant des centres commerciaux, le Gouvernement déposera un amendement qui est le fruit de vos discussions : le préfet sera habilité à imposer un passe sanitaire dans les grands centres commerciaux si la situation sanitaire l'exige, avec des garanties d'accès de la population aux biens et services en toutes circonstances.

Concernant les établissements devant demander le passe sanitaire, vous avez prévu une mise en demeure puis une fermeture administrative de quinze jours, et enfin une sanction pénale, gradation qui tranche avec la volonté initiale du Gouvernement

Vous avez introduit une notion intéressante : les soignants ayant reçu une première injection avant le 15 septembre disposeront d'un délai supplémentaire pour achever leur parcours vaccinal jusqu'au 15 octobre, pour donner le maximum de chances à la mobilisation collective.

Vous avez revu le régime des sanctions en cas de manquement à ces obligations avec la suspension des fonctions et l'interruption de la rémunération qui prennent fin dès que les justifications sont apportées. Le licenciement ne sera pas la règle en cas de non-respect de l'obligation vaccinale : en revanche, le salarié devra prendre tous ses congés, puis une mise en congés sans solde de deux mois sera prononcée, période au-delà de laquelle le congé sans solde sera poursuivi - là où nous prévoyions un licenciement.

Mais nous parlons là de la fin 2021, et je n'ose imaginer que d'ici là nous n'ayons pas obtenu l'immunité collective. Nous visons 50 millions de primo-injections, sur une cible de 52 millions de personnes.

Sur l'isolement, vous avez demandé une évaluation par l'assurance maladie. L'ARS vérifiera le non-respect de l'isolement avant de saisir, si besoin, les forces de l'ordre. Le Gouvernement vous suivra sur ce point.

Enfin, l'Assemblée nationale a prévu l'accord d'un seul parent pour la vaccination d'un mineur de plus de 12 ans. Le Sénat a proposé qu'un adolescent de 16 à 18 ans puisse se faire vacciner sans accord parental. Après vérification, nous entérinons cet accord, qui simplifiera la vaccination des plus jeunes.

Je ne reviens pas sur les avancées concernant les mineurs non accompagnés ou relevant de l'aide sociale à l'enfance.

J'espère un vote le plus large possible du Sénat puis de l'Assemblée nationale pour que nous disposions des moyens qui nous permettront d'anticiper et d'agir ensemble. (M. Claude Malhuret applaudit.)

Mme Vanina Paoli-Gagin .  - Nous sommes à un moment déterminant de la crise sanitaire. Les précédents couvre-feux et confinements se justifiaient par l'absence de vaccins.

Mais le variant Delta, dont la contagiosité est supérieure de 60% au virus original, change la donne. Sachant que 50% des adultes n'ont pas un schéma vaccinal complet, les hôpitaux risquent d'être submergés dès la fin de l'été.

Le vaccin protège des formes graves de la maladie. Se faire vacciner relève de la responsabilité individuelle mais aussi collective.

Le passe sanitaire est une étape supplémentaire vers l'immunité collective. L'obligation vaccinale des soignants est indispensable pour protéger les plus vulnérables.

Je salue les membres de la CMP qui sont parvenus un compromis.

Nous saluons la suppression des licenciements votée par le Sénat et l'application du passe sanitaire aux mineurs, voulue par l'Assemblée nationale.

Moins de 50 % des personnes contaminés respectent l'isolement. Nous approuvons les nouvelles mesures en la matière.

Le passe sanitaire s'appliquera jusqu'au 15 novembre. Faire société, est avant tout un exercice de responsabilité. La plupart des Français sont prêts à faire des efforts proportionnés et partagés.

La liberté est une valeur centrale pour notre groupe. Refuser la vaccination, c'est mettre en danger les autres et contraindre la liberté collective. Il faut donner corps aux valeurs de liberté, d'égalité et de fraternité.

Le groupe INDEP votera les conclusions de la CMP. (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP, UC et Les Républicains)

M. Guillaume Gontard - Tout ça pour ça ! Après quatre jours et quatre nuits, nous terminons avec un texte très proche de celui du Gouvernement. Certes, le Sénat a obtenu la suppression des licenciements et la fin du passe sanitaire au 15 novembre.

Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales.  - Ce n'est pas rien !

M. Guillaume Gontard.  - Cela reste bien maigre. Le Conseil d'État a eu plus d'influence sur la copie gouvernementale que les assemblées.

Monsieur le ministre, vous n'avez siégé que quelques heures au Sénat et la ministre déléguée s'est murée dans le silence hier soir.

Rien n'a changé depuis le premier confinement, où le Parlement ne siégeait pas, sinon en extrême urgence pour donner les pleins pouvoirs au Gouvernement. Le covid est le symptôme d'une Vème République agonisante. Le général de Gaulle voulait remplacer le pouvoir des partis par celui des hauts fonctionnaires. Il a plus que rempli cet objectif !

Votre bilan, c'est aussi votre méthode. Vous avez refusé de lever le moindre gage, refusé l'obligation vaccinale universelle proposée par le groupe SER. Vous ne voulez pas non plus confier à l'assurance maladie une vaste campagne d'information et de sensibilisation sur la vaccination. Quand le ferez-vous ? Quelles mesures dans les quartiers populaires et les déserts médicaux ? Pourquoi avoir tant tardé ? Si les doses manquent, il faut le dire.

Le passe sanitaire est injuste pour tous ceux qui n'étaient pas prioritaires pour se faire vacciner : les jeunes, les publics éloignés socialement ou géographiquement de la vaccination. Plutôt que de réinstaurer les jauges dans les lieux publics, vous imposez une mesure discriminatoire et liberticide.

Le dispositif est inapplicable et inefficace et va entraîner des fraudes massives. La peur du gendarme n'est pas une solution.

Le virus continue de circuler partout dans le monde car vous refusez la levée des brevets sur les vaccins. Emmanuel Macron n'a pas profité de son passage à Tokyo pour avancer sur ce sujet, mais il a eu le temps de donner des leçons à nos compatriotes depuis l'autre bout du monde.

Le GEST ne votera pas ce texte issu de la CMP.

M. Olivier Véran, ministre.  - Quelle surprise.

M. Martin Lévrier .  - (Applaudissements sur le banc de la commission ; Mme Micheline Jacques applaudit également.) Nous devons faire preuve de responsabilité face à un virus qui mute. Les rapporteurs ont construit un texte efficace et protecteur. Ce texte protège la population tout en maintenant au maximum l'activité sociale.

La liberté individuelle s'inscrit au sein d'une liberté collective. Nous ne montons pas les Français les uns contre les autres, nous les responsabilisons.

Ce texte renforce les mesures de freinage. Quelle autre solution protège les citoyens à court terme ? Certains prônent le vaccin obligatoire pour tous - mais la finalisation des schémas vaccinaux prend plusieurs semaines ! Il faut privilégier la pédagogie ; cela ne se fait pas en un jour.

Le passe sanitaire est une troisième voie, déjà prévue par la loi du 31 mai. Le Premier ministre est habilité à le mettre en place ; il peut y mettre fin si la situation ne le justifie plus. En tout état de cause, la mesure est encadrée dans le temps, puisqu'elle prendra fin au 15 novembre.

La qui a maintenu le mécanisme de sanctions administratives en cas de non-respect de l'obligation de contrôle par l'employeur, très adapté à la situation des ERP, et est revenue sur plusieurs limitations introduites au Sénat qui rendaient le passe sanitaire inopérant.

Le projet de loi prévoit enfin la vaccination des personnels de santé au contact des plus vulnérables. Mais une obligation sans sanction n'a qu'une faible portée. (M. Philippe Bas, rapporteur, approuve.) Nous approuvons le dispositif proposé pour les salariés ayant reçu une dose.

Le texte est à la hauteur de la situation, alors que les contaminations s'envolent sur tout le territoire. Les mesures sont proportionnées et nécessaires. Le temps nous est compté. Le RDPI votera les conclusions de la commission mixte paritaire. (Applaudissements sur quelques travées du groupe UC et du groupe Les Républicains)

Mme Véronique Guillotin .  - L'épidémie repart vite, menaçant de nous prendre de vitesse. Face à ce terrible constat, nous n'avons pas d'autre choix que d'agir fort.

J'entends les arguments sur l'atteinte aux libertés, mais j'estime pour ma part que le passe sanitaire peut être un passeport pour une liberté retrouvée. Sans mesures fortes, un nouveau confinement ne pourra être évité.

Nous sommes engagés dans une course contre la montre contre le variant Delta, particulièrement contagieux ; grâce à la vaccination de masse, il est possible de la gagner.

La vaccination obligatoire pour tous pourrait être une solution, mais sa mise en place serait complexe.

Je salue l'équilibre trouvé en CMP. L'extension du passe sanitaire aux mineurs et aux espaces extérieurs paraît raisonnable, même si je comprends nos collèges qui souhaitaient les en exempter. Les jeunes, s'ils sont moins symptomatiques, sont bien transmetteurs du virus.

L'assouplissement des sanctions vis-à-vis des restaurateurs et des employés va dans le bon sens, de même que la suppression de la possibilité de licenciement.

Par ailleurs, le maintien de l'autorisation donnée aux mineurs de plus de 16 ans de se faire vacciner sans l'accord de leurs parents, suggérée par Mme Rossignol, est une excellente décision.

Le texte de la CMP est équilibré ; grâce à nos deux rapporteurs, le dispositif final est plus protecteur des libertés.

Je souscris pleinement à l'obligation vaccinale pour les soignants. Cette obligation, à laquelle ils sont déjà soumis pour l'hépatite B, est justifiée par les risques auxquels ils sont exposés et par sa dimension altruiste.

Il faut aussi continuer à faire preuve de pédagogie.

Je voterai les conclusions de la CMP, car si le passe sanitaire n'est certainement pas l'unique solution, c'est un outil indispensable. (Applaudissements sur les travées de l'Union Centriste et du groupe Les Républicains ; M. Martin Lévrier applaudit également.)

Mme Éliane Assassi .  - Après Pierre Ouzoulias, je m'élève avec force contre la violence faite au Parlement. Le Gouvernement veut faire passer en force et dans la précipitation un texte pourtant lourd de conséquences.

Il faut dire que le Gouvernement a sorti l'artillerie lourde en matière de libertés publiques. Le Sénat a amélioré le dispositif, mais la CMP n'a retenu son travail qu'avec parcimonie.

Suspendre la rémunération des salariés soumis au passe sanitaire conduira dans la plupart des cas à une rupture brutale du contrat. Nous refusons l'instrumentalisation de la crise sanitaire pour porter atteinte aux droits sociaux ! Les sanctions pénales ne sont pas moins insupportables.

Des atteintes graves sont portées aux libertés publiques, dénoncées par un nombre croissant de nos concitoyens, en plus du Défenseur des droits et de la CNIL. Nous saisirons le Conseil constitutionnel conjointement avec le groupe SER, en particulier sur l'isolement contraint sur simple communication d'un pharmacien, la suspension de rémunération et le non-respect du secret médical. Nous refusons ces excès insensés qui conduiront au contrôle de tous par tous.

Le Président de la République prend le peuple à contrepied en le faisant passer des jours heureux aux jours contraints. C'est pourtant la persuasion qui permettra d'accélérer la vaccination. Pour cela, il faut non pas une surveillance généralisée, mais une véritable politique de santé publique.

Nous avons besoin d'unité, de confiance. Cessez de culpabiliser et d'infantiliser nos concitoyens ! Votre responsabilité est de les mobiliser et de les convaincre. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)

M. Hervé Marseille .  - (Applaudissements sur les travées de l'Union Centriste, ainsi qu'au banc des commissions.) Je me réjouis du succès de la CMP et je remercie ceux qui y ont contribué, à commencer par le rapporteur Philippe Bas.

En l'absence d'accord, que n'aurions-nous entendu ? L'opinion aurait été choquée.

Oui, ce projet de loi porte atteinte aux libertés de chacun dans son quotidien. Il est d'autant plus regrettable que nous ayons dû travailler dans des conditions peu satisfaisantes, même si elles sont liées au contexte.

Nous aurions pu nous contenter d'affirmer des positions. Nous avons préféré faire face aux difficultés, en accompagnant le Gouvernement. Nous espérons ne pas nous être trompés.

Le Sénat a été entendu sur de nombreux points. En particulier, la suspension du contrat de travail est préférable au licenciement.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Exactement !

M. Hervé Marseille.  - De même, il vaut mieux recourir à la police administrative qu'à des sanctions pénales.

Quand le Gouvernement veut bien travailler avec le Sénat, nous trouvons collectivement des solutions. Nous ne sommes pas des empêcheurs de gouverner - ou de réviser la Constitution - en rond.

Dans la situation difficile que nous connaissons, ce front collectif est important. Le Parlement doit être entendu. Le Gouvernement doit s'appuyer sur les femmes et les hommes de bonne volonté qui le composent, dans l'intérêt national !

Nous voterons le texte issu de la CMP. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains ; M. Martin Lévrier applaudit également.)

Mme Marie-Pierre de La Gontrie .  - Nous achevons dans le chaos l'examen de ce texte, qui lui-même répond au chaos provoqué par l'épidémie.

Nous avons travaillé dans des conditions extrêmement difficiles, sans doute mal travaillé. Nous avons manqué de recul pour apprécier des mesures graves, attentatoires aux libertés et parfois assumées comme telles. Le Parlement doit pouvoir légiférer dans des conditions décentes.

Au bout du compte, la majorité présidentielle a su utiliser les progrès du Sénat, qui a sensiblement amélioré le projet de loi, pour en partager la responsabilité. La droite et la majorité En Marche sont désormais coresponsables de la politique menée. D'ailleurs, M. Marseille vient de se livrer à une offre de services suffisamment claire.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - On prend de la hauteur...

M. Vincent Capo-Canellas.  - Propos politicien !

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Il n'est pas défendu de faire de la politique, surtout quand on est élu. C'est d'ailleurs ce qui s'est passé tous les jours derniers.

Des améliorations ont été apportées, sur l'initiative notamment du rapporteur Bas. Je pense en particulier à la suppression du licenciement.

Malheureusement, la CMP a rétabli le passe sanitaire dans les lieux de plein air. Il est vrai que le rapporteur n'était personnellement pas favorable à leur exemption...

Nous nous réjouissons en revanche que l'accord d'un parent suffise pour vacciner un enfant et que les jeunes aient droit à la démarche vaccinale dès 16 ans.

Reste que les difficultés originelles demeurent. Pour notre part, nous avons défendu -  hors la présence du ministre...  - l'obligation vaccinale générale. Nous regrettons que la question n'ait pas été examinée à fond, alors même que beaucoup ont affirmé que cet horizon devrait être prochainement fixé.

En parfaite cohérence avec nos positions, nous voterons contre un texte inacceptable à nos yeux et saisirons le Conseil constitutionnel.

Mme Chantal Deseyne .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ainsi que sur quelques travées du groupe UC ; Mme la présidente Deroche applaudit également.) Au terme de quelques nuits blanches à l'Assemblée nationale et au Sénat, un accord équilibré est sorti d'une commission mixte paritaire âpre. Je salue la sagesse de ses membres, qui ont pris leurs responsabilités face à la reprise épidémique.

Par son travail de très grande qualité, le rapporteur de la commission des lois a assuré la conciliation des libertés publiques et des mesures nécessaires pour juguler la circulation du virus. La plupart de ses solutions ont été retenues par la CMP.

La commission des affaires sociales a assoupli le calendrier de l'obligation vaccinale : les soignants bénéficieront d'une période complémentaire d'un mois, pour que le 15 septembre ne soit pas un couperet.

Les deux commissions ont veillé à proportionner les sanctions, notamment en supprimant le licenciement. Il était inenvisageable de pénaliser aussi lourdement les personnes non vaccinées et de faire peser sur les employeurs le poids de cette décision. La suspension du contrat de travail devrait suffire à convaincre les réticents.

La commission des affaires sociales a eu à coeur de renforcer l'expertise médicale et scientifique sur laquelle se fonde la décision publique. Ainsi, le décret sur la mise en oeuvre de l'obligation vaccinale sera pris après avis de la Haute Autorité de santé ; de même, celle-ci sera consultée avant sa suspension.

Je me félicite de l'extension de l'autorisation d'absence pour les personnes accompagnant un mineur ou un majeur protégé à un rendez-vous de vaccination. Le conseil scientifique a rappelé l'importance de la vaccination des adolescents pour la maîtrise de l'épidémie.

Je vous invite à adopter ce texte pour retrouver, nous l'espérons, une maîtrise durable de la situation sanitaire. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC, ainsi qu'au banc de la commission ; M. Martin Lévrier applaudit également.)

La discussion générale est close.

Discussion des articles

ARTICLE PREMIER

M. le président.  - Amendement n°1, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 13

Rétablir le f dans la rédaction suivante :

« f) Sur décision motivée du représentant de l'État dans le département lorsque leurs caractéristiques et la gravité des risques de contamination le justifient, les grands magasins et centres commerciaux, au-delà d'un seuil défini par décret, et dans des conditions garantissant l'accès des personnes aux biens et services de première nécessité ainsi, le cas échéant, qu'aux moyens de transport ;

M. Olivier Véran, ministre.  - Le Gouvernement souhaite que le préfet puisse imposer la présentation du passe sanitaire à l'entrée des grands magasins et centres commerciaux -  le seuil de 20 000 mètres carrés est évoqué. L'accès aux biens et services de première nécessité et, le cas échéant, aux moyens de transport sera garanti. Mieux vaut mettre en oeuvre cette mesure, si la situation sanitaire l'exige, plutôt que de fermer ces centres.

M. François-Noël Buffet, président de la commission des lois.  - La commission des lois a besoin de se réunir. Je demande une brève suspension de séance.

La séance, suspendue à 22 h 10, reprend à 22 h 15.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - C'est une procédure constitutionnelle non usitée depuis plusieurs décennies qui est utilisée aujourd'hui. Après accord entre les députés et les sénateurs en commission mixte paritaire, chers collègues, vous ne pouvez plus amender le texte. Par dérogation, le Gouvernement a, lui, le droit de présenter un amendement au texte issu de la CMP. Nous avons aussi le droit de le rejeter.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Absolument.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Un dialogue a eu lieu entre le rapporteur et le Gouvernement ; celui-ci a accepté de changer son texte pour tenir compte de nos observations.

Nous avons décidé en CMP -  confirmant le vote du Sénat  - que le passe sanitaire ne serait pas exigé dans les grands complexes commerciaux, où de nombreux commerces de toute taille s'agencent autour de galeries qui ressemblent à des rues. Certains de ces centres commerciaux sont installés à Paris dans des enceintes où se trouvent des stations de métro ou RER ; d'autres sont dans des gares. Le sujet est complexe.

La dangerosité de la déambulation dans ces galeries est équivalente à celle de la déambulation dans une voie piétonne très fréquentée. C'est pourquoi nous restons fermes sur le principe : pas de passe sanitaire dans les galeries des grands complexes commerciaux.

Mais le Gouvernement veut que, par exception à ce principe, quand le port du masque et les gestes barrières ne suffisent pas à assurer les conditions de sécurité sanitaire, on puisse aller jusqu'à réclamer le passe sanitaire.

Je me suis senti au pied du mur mais je me suis fait un devoir d'examiner cette demande, dans l'intérêt collectif. J'ai proposé à la commission des lois de donner un avis favorable à cet amendement, car sa rédaction est très restrictive. Il ne peut affecter la circulation des usagers des transports collectifs, et ne s'appliquera que dans des circonstances d'une particulière gravité, justifiant un arrêté pris sur la base d'un décret, qui fixera un seuil de surface minimale. Enfin, et c'était indispensable, le passe sanitaire ne pourra être exigé pour l'approvisionnement en produits alimentaires et de première nécessité.

Monsieur le ministre, vous avez accepté ces éléments. Notre avis est donc favorable. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur le banc de la commission ; Mme Nassimah Dindar applaudit également.)

L'amendement n°1 est adopté.

À la demande des groupes SER, CRCE et Les Républicains, les conclusions de la CMP, modifiées par l'amendement du Gouvernement, sont mises aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°170 :

Nombre de votants 341
Nombre de suffrages exprimés 324
Pour l'adoption 195
Contre 129

Le Sénat a adopté.