Améliorer le système de santé par la confiance et la simplification (Nouvelle lecture)
M. le président. - L'ordre du jour appelle la discussion en nouvelle lecture de la proposition de loi, adoptée avec modifications par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification.
Discussion générale
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie . - Nous examinons en nouvelle lecture ce texte majeur qui concrétise les engagements du Ségur de la Santé. Nous le devons aux soignants qui sont particulièrement mobilisés. Leur engagement n'a jamais faibli. Le Ségur, ce sont des sommes sans précédent, des revalorisations ambitieuses, un plan d'investissement sans pareil pour l'ensemble du système de santé - sanitaire, médico-social, et numérique - qui s'est ouvert le 9 mars dernier.
Les revalorisations ont été signées à Matignon le 13 juillet et étendues au médico-social le 16 février dernier. Les négociations se poursuivent pour rendre ces métiers plus attractifs. Il n'y aura pas d'oubliés du Ségur !
Le Ségur a aussi été l'occasion de partager un diagnostic. Nous n'avons éludé aucun sujet.
Certains apports de la Haute Assemblée ont été conservés par l'Assemblée nationale, mais celle-ci a rétabli un équilibre avec l'ordonnance relative aux groupements hospitaliers de territoire (GHT), présentée en conseil des ministres le 17 mars dernier. Les commissions médicales d'établissement et de groupement sont ainsi revues selon les préconisations du rapport Claris. De même, le rôle et la place du service dans les hôpitaux sont revalorisés.
Cette proposition de loi répond à une revendication ancienne : une plus grande liberté d'organisation interne des établissements à la main des acteurs locaux. La crise a montré que les collectifs de soins savent s'organiser sans attendre un feu vert venu d'en haut. Si les communautés sont d'accord pour adapter l'organisation, pourquoi les en empêcher ?
Ce texte fait progresser la démocratie hospitalière en faisant siéger au directoire des représentants des personnels non-médicaux, des étudiants en santé et des usagers. C'est une liberté donnée aux acteurs et un gage de confiance.
Le Gouvernement s'est engagé fortement dans la lutte contre le mercenariat de l'intérim médical qui désorganise les hôpitaux et met à mal leurs finances. Le texte permet une bonne fois pour toutes au comptable public de rejeter tout paiement qui dépasserait le plafond réglementaire.
Le Ségur a aussi avancé sur l'extension du champ de compétences des sages-femmes, des masseurs-kinésithérapeutes, des orthophonistes et des ergothérapeutes. C'est un choix de confiance et d'efficacité.
Notre système de santé ne relèvera les défis auxquels il fait face qu'en rompant avec les querelles de chapelle et les pré-carrés. Nous ouvrons ainsi aux infirmiers spécialisés l'accès aux pratiques avancées, afin de reconnaître leurs compétences.
Je me réjouis de voir revenir ici le Ségur de la Santé et je salue tous ceux qui lui donneront la force d'une promesse tenue.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales . - (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC) Le rapporteur Alain Milon était tenu de partir, je vous lis ce qu'il voulait vous dire.
Cette proposition de loi, dont nous avions regretté le manque d'ambition et le caractère décousu, laisse un goût d'inachevé. Elle peine à répondre aux attentes du Ségur - faire confiance et simplifier.
La CMP réunie le 2 mars n'est pas parvenue à un accord. La navette a toutefois confirmé certains de nos apports. Nous avons convergé pour rejeter le bénévolat individuel ou pour autoriser les professionnels hospitaliers des établissements de santé privés d'intérêt collectif (Espic) à maintenir des dépassements d'honoraires.
Sur la gouvernante hospitalière, les députés ont retenu la distinction que nous avions opérée entre les fonctions de chef de service et de chef de pôle, ainsi que l'association des commissions de soins infirmiers au projet d'établissement.
Mais trop de divergences nous opposent. C'est surtout à la publication, il y a quinze jours, des deux ordonnances sur les GHT et sur l'attractivité des carrières que nous devons les rejets systématiques par les députés de nos propositions. Curieuse façon de légiférer.
Nos articles sur l'élaboration d'un projet territorial de santé visant à structurer l'offre ont ainsi été écartés. De même, malgré l'ambition revendiquée de traduire dans la loi les recommandations du Ségur, il n'y aura pas de participation accrue des personnels paramédicaux à la direction de l'établissement ou de plus grande représentativité de la commission des soins infirmiers.
Nous avons en revanche été surpris par la résurrection de l'article 8 bis, que nous avions supprimé. Les députés chargent la commission des affaires sociales du Sénat de désigner le sénateur appelé à siéger au conseil de surveillance de l'hôpital de sa circonscription. C'est inapplicable sur le fond - et, sur la forme, pour le moins discourtois.
Comme vous, nous souhaitons lutter contre l'intérim médical, mais l'idée d'un contrôle de légalité par le comptable public après l'engagement de la dépense est bancale : les intérimaires contesteraient ce défaut de paiement devant les tribunaux administratifs, et gagneraient. Mieux vaut faire figurer ces dépenses au compte financier de l'établissement afin que l'ARS empêche une dépense irrégulière dès le stade de l'engagement. L'avenir dira si nos craintes étaient justifiées.
Je veux enfin relayer les craintes des étudiants de première année, confrontés, à l'approche des épreuves de sélection pour l'entrée en deuxième année, aux redoublants de la Paces de l'année dernière, pour un nombre de places inchangé.
Les chiffres progressivement arrêtés par les universités confirment que l'engagement de ne pas pénaliser les étudiants primants n'a pas été tenu. Et les réponses de Mme Vidal sont plus qu'évasives... Ce n'est pas faute de vous avoir alerté.
Pour l'heure, la commission appellera à voter la motion opposant la question préalable. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Bernard Jomier applaudit également.)
Mme Laurence Cohen . - Le Président de la République a annoncé hier de nouvelles mesures contre la pandémie et le Sénat examine une proposition de loi visant à améliorer la situation du système de santé. Or celui-ci souffre plus que jamais du manque de lits et de personnels.
Les soignants sont épuisés ; les médecins alertent sur le risque de tri des patients en réanimation mais aussi sur les déprogrammations qui entraînent des pertes de chance.
Notre groupe ne cesse de dénoncer les coupes budgétaires qui sont responsables de la situation.
Cette proposition de loi, déconnectée de la réalité des hôpitaux, n'est pas à la hauteur. Pire, en renforçant l'autonomie des hôpitaux et des GHT, elle contribue à affaiblir notre système de santé. La création à Saint-Ouen d'un hôpital-cathédrale pour remplacer les hôpitaux Bichat et Beaujon détruira 400 lits et 1 200 emplois ! Il aurait fallu moderniser les hôpitaux existants et en construire un nouveau !
L'élargissement des missions des psychologues de l'Éducation nationale est inopportun : il faut recruter et revaloriser.
Les orthophonistes demandent de longue date l'accès direct aux soins orthophoniques afin de fluidifier les parcours de soins. Nous regrettons que le Gouvernement ait reculé face à la pression de certaines corporations, alors que la mesure avait été largement approuvée par le Sénat.
Enfin, il est urgent de promouvoir la lutte contre les comportements sexistes, racistes et homophobes à l'hôpital. D'après une étude du 18 mars 2021, un tiers des étudiants en médecine ont été victimes de harcèlement sexuel - dans neuf cas sur dix, de la part de leur supérieur !
Autant de raisons pour nous opposer à cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE et du GEST)
Mme Élisabeth Doineau . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Madame la ministre, j'aurais aimé partager votre satisfaction, mais lors de la CMP, j'étais mal à l'aise. Il y a bien des oubliés du Ségur ! Pas une semaine ne passe sans qu'en Mayenne, nous ne soyons interpellés par ceux qui n'ont pas bénéficié des mêmes revalorisations que leurs confrères.
En première lecture, le texte a été profondément remanié. Quelques heures encore avant la CMP, nous étions sollicités par de nombreux insatisfaits.
Mon groupe a approuvé le Ségur de la santé mais dénoncé ses oublis. Cette proposition de loi, qui en est la traduction non budgétaire, n'atteint que partiellement son objectif.
Je salue les avancées sur les sages-femmes, mais nous ne pouvons pas étendre leur champ de compétences sans améliorer leur statut qui est hybride, mi-médical, mi-paramédical. Il y a eu quatre journées de mobilisation en 2021, les 26 janvier, 10 et 24 février, 8 mars. Les sages-femmes sont à bout. Elles attendent des mesures concrètes sur les effectifs, le statut et la rémunération. Des négociations conventionnelles doivent s'ouvrir. Je souhaite que le rapport de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) permette des avancées lors du PLFSS.
Je regrette que les deux chambres n'aient pu s'entendre. L'Assemblée a rétabli son texte de première lecture alors que le Sénat avait adopté des mesures constructives.
Je redis mon malaise et ma perplexité. Je partage l'analyse de notre rapporteur Alain Milon sur le résultat de la CMP. Dans ces conditions, poursuivre le débat n'aurait pas de sens. Le groupe UC votera la motion tendant à opposer la question préalable.
Nous serons attentifs aux efforts budgétaires en direction du personnel et aimerions connaître les conclusions du rapport Laforcade.
Nous n'acceptons pas qu'il y ait des oubliés et des frustrés du Ségur ! (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur quelques travées du groupe Les Républicains)
M. Jean-François Longeot. - La messe est dite !
M. Bernard Jomier . - Le contexte est marqué par la crise sanitaire. Il y a un an, les Français applaudissaient spontanément le personnel soignant. Après une année difficile et un grand dévouement, celui-ci imaginait une reconnaissance, mais le Président de la République lui a demandé de nouveaux efforts hier soir.
Cette proposition de loi est insuffisante et opère même des rétropédalages. Elle ne répond qu'à une infime partie des besoins et pas toujours de la bonne façon. Cela explique l'opposition d'une écrasante majorité des organisations syndicales et professionnelles.
Nous avons légiféré dans la précipitation. Malgré l'importante contribution du Sénat, l'Assemblée nationale a, pour l'essentiel, rétabli son texte. Réaffirmer le rôle du chef de service dans la gouvernance hospitalière est certes pertinent mais au final, ce texte ne propose pas de changement de cap.
Les enseignements de la crise n'ont pas été tirés et l'on ne tient toujours pas compte des attentes des soignants.
Le 17 mars, le Président de la République a signé deux ordonnances déclinant la loi du 24 juillet 2019, l'une sur les GHT, l'autre sur l'attractivité des carrières médicales hospitalières. En juillet 2019, le Parlement avait donné sa confiance pour légiférer après concertation - or les organisations syndicales dénoncent des ordonnances écrites à marche forcée... Les professionnels rejettent massivement le résultat des négociations.
Quelle crédibilité accordez-vous au Parlement ? Le groupe SER avait déposé une motion de renvoi en commission en première lecture. Il attendait une loi à la hauteur.
Poursuivre le débat n'est pas utile, aussi, nous voterons la motion tendant à opposer la question préalable. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)
Mme Colette Mélot . - Cette proposition de loi réunit un ensemble de mesures non budgétaires issues du Ségur de la santé. Je regrette l'échec de la CMP, lié notamment aux divergences sur l'intérim médical, la gouvernance hospitalière et la création d'une profession médicale intermédiaire.
Plusieurs apports du Sénat ont été supprimés. C'est dommage. La navette a toutefois enrichi le texte sur les compétences des sages-femmes ou des masseurs-kinésithérapeutes. Les orthophonistes et ergothérapeutes pourront adapter des prescriptions médicales.
Je partage l'avis d'Alain Milon sur l'article premier relatif à la nouvelle profession médicale intermédiaire.
La création de la plateforme numérique d'accès aux droits pour les personnes en situation de handicap est une avancée importante, qui pourrait être étendue aux personnes âgées dépendantes. Je regrette que l'amendement de M. Chasseing en ce sens n'ait pas été adopté.
Notre groupe ne votera pas la motion, souhaitant poursuivre les discussions.
Mme Raymonde Poncet Monge . - En première lecture, nous avons pointé les inquiétudes et déceptions des professionnels de santé, malgré un début de rattrapage des écarts de rémunération.
Le Gouvernement, incapable de tirer les leçons de la crise sanitaire, continue à fermer des lits hospitaliers. L'hôpital militaire Desgenette de Lyon ferme ses urgences alors que son service de médecine aurait pu accueillir des malades de la covid-19 ne nécessitant plus de réanimation, à quelques encablures de l'hôpital public Édouard-Herriot, saturé. La casse continue !
Le Sénat avait supprimé des articles unanimement contestés, que l'Assemblée nationale a rétabli. Les acteurs locaux craignent une intégration hospitalière au service d'économies budgétaires et non d'un maillage territorial efficient.
L'Assemblée nationale valide la suppression de la concertation interne préalable à la nomination du chef de service demandée par la majorité sénatoriale mais n'a pas l'audace d'expérimenter l'élection de ce même chef de service par ses pairs.
Les dispositions sur l'intérim médical ne s'attaquent pas à ses causes, liées au décrochage salarial, ni aux abus constatés. C'est une défausse du Gouvernement.
Le comble est atteint quand on constate que l'accord des deux chambres sur l'orthophonie a été mis à bas par un amendement de dernière minute du Gouvernement, qui veut supprimer l'accès direct. Quelle impéritie ! Nous condamnons le fond et la forme.
Le GEST ne voit pas l'intérêt de poursuivre l'examen du texte et votera la question préalable. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE)
Mme Nicole Duranton . - « Les plus grands artistes sont ceux qui possèdent le don de simplification à l'usage des autres », écrit Claude Lelouch. Cela est vrai aussi en matière de politiques publiques.
La simplification est nécessaire pour que chaque soignant puisse effectuer sa mission au mieux. Nous l'avons vu pendant la crise, pour désengorger les services. J'ai écrit au ministre de la Santé pour l'appeler à pérenniser la télémédecine remboursée.
Ce texte, traduction des mesures non budgétaires du Ségur, a été enrichi par le Sénat en première lecture - je salue le travail d'Alain Milon et de la commission des affaires sociales.
Certains de nos apports ont été maintenus à l'Assemblée nationale, notamment l'article 7 bis B sur l'interopérabilité des systèmes d'information dans les GHT et l'article 14 bis A sur les référents handicaps.
L'Assemblée nationale est revenue sur des suppressions opérées par le Sénat, que notre groupe avait regrettées : rapport sur la création d'une profession intermédiaire, lutte contre les dérives de l'intérim, projet managérial. Une motion tendant à opposer la question préalable a été déposée. Il serait toutefois regrettable d'arrêter là nos échanges.
Cette proposition de loi présente de nombreuses avancées, comme les 754 millions d'euros d'investissements supplémentaires pour les soignants d'ici 2022, l'extension des compétences des sages-femmes et des masseurs-kinésithérapeutes, la lutte contre l'intérim médical, ou encore la prise en compte des étudiants dans l'élaboration du projet social. Le RDPI y est favorable et votera contre la question préalable. (Applaudissements sur les travées du RDPI)
Mme Maryse Carrère . - À la suite de l'échec de la CMP le 2 mars, l'Assemblée nationale a rétabli son texte et l'a complété à la marge.
Concernant le statut des sages-femmes, l'Assemblée nationale a décidé de déroger au respect du parcours de soins centré sur le médecin traitant, qui devait, pour nous, demeurer le principe.
Le Sénat avait exclu la présence d'étudiants au conseil d'administration de l'hôpital. L'Assemblée nationale l'a rétablie et nous nous en réjouissons.
L'Assemblée nationale a aussi rétabli son dispositif de lutte contre l'intérim médical, qui place les directeurs hors de toute gestion. Ils sont ainsi protégés.
Je salue le maintien de plusieurs de nos propositions, notamment sur l'extension des compétences de certaines professions - ergothérapeutes, orthophonistes, kinésithérapeutes - ou sur le rôle des pharmacies et des laboratoires, notamment dans la vaccination.
Nous avions proposé d'autoriser les dépassements d'honoraires pour les praticiens des Espic. Cela n'a été retenu que pour ceux qui pratiquaient déjà au 24 juillet 2019, date de promulgation de la loi relative à la transformation du système de santé. On crée de nouvelles inégalités, cette fois au sein des Espic.
Ce texte répond insuffisamment aux ambitions du Ségur. Toutefois il contribue à la remédicalisation de la direction de l'hôpital. Nous pourrions l'améliorer.
Aussi, la grande majorité du groupe RDSE s'abstiendra sur la question préalable. (Applaudissements sur les travées du RDSE)
Mme Corinne Imbert . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Après une CMP rapide en raison de profondes divergences entre les deux chambres, nous ressentons de la déception. Mais elle n'est rien à côté de celle des soignants, qui s'engagent sans faille.
Cette proposition de loi partait d'une bonne intention. Quoi de plus consensuel que la santé ? Vous avez pourtant réussi à fédérer tous les acteurs contre vous.
Le calendrier, trop serré, a empêché l'élaboration d'un texte complet. Je dénonce la méthode employée par le Gouvernement et sa majorité lors de la deuxième lecture à l'Assemblée nationale, qui a supprimé nos apports et rétabli des articles que nous avions supprimés.
Quelques petits points de convergence demeurent. L'amendement autorisant les biologistes à vacciner, voté au Sénat, a été rétabli.
Le Gouvernement est revenu en séance publique sur l'accès direct aux orthophonistes, pourtant adopté par les deux chambres en CMP. Je regrette cette méthode irrespectueuse des commissions.
Les difficultés structurelles de notre système de santé ne sont en rien résolues. Les sujets sont reportés à l'examen de textes hypothétiques, créant du désespoir.
Le bien vieillir ? Un projet de loi sur le grand âge et l'autonomie dont l'attente sera bientôt plus longue que l'âge des personnes concernées.
La différenciation territoriale en matière d'accès aux soins ? Un projet de loi 4D dont le titre futuriste cache votre capacité à résorber les difficultés du quotidien.
Ni la méthode, ni le texte ne nous satisfont. Cette proposition de loi n'est pas à la hauteur. C'est un rendez-vous manqué. Le groupe Les Républicains votera la motion opposant la question préalable. (Applaudissement sur les travées du groupe Les Républicains)
La discussion générale est close.
Question préalable
M. le président. - Motion n°18, présenté par M. Milon, au nom de la commission des affaires sociales tendant à opposer la question préalable
Considérant, d'une part, que si un accord est intervenu entre les deux assemblées sur plusieurs articles de la proposition de loi visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification, des points de désaccord importants subsistent sur des aspects aussi décisifs que le refus par l'Assemblée nationale d'une territorialisation de l'offre de soins hospitaliers plus attentive à l'expression des besoins directs des acteurs locaux de santé ou encore sa réticence à reconnaître à la commission des soins infirmiers la qualité d'organe représentatif des personnels paramédicaux de l'hôpital ;
Considérant, d'autre part, les problèmes réels que soulève l'article 8 bis introduit en nouvelle lecture à l'Assemblée nationale, qui charge la commission des affaires sociales du Sénat d'une mission difficilement réalisable de recensement exhaustif de l'ensemble des établissements publics de santé et de désignation, sur des critères non définis, du sénateur qui pourra siéger au conseil de surveillance de leur établissement principal, cette dernière notion ne renvoyant par ailleurs à aucune réalité juridique déterminée ;
Considérant également qu'aucune disposition du droit en vigueur ne s'opposant à ce qu'un parlementaire sollicite du président du conseil de surveillance de n'importe quel établissement public de santé sis dans sa circonscription le droit de siéger ponctuellement ou non audit conseil de surveillance, le Sénat s'engage à proposer la suppression du présent article 8 bis à la faveur d'un prochain véhicule législatif ;
Considérant enfin les doutes que continuent d'inspirer au Sénat, malgré son intention louable, l'article 10 sur la lutte contre le recours abusif à l'intérim médical et les risques élevés de contentieux que suppose un transfert au comptable public d'un contrôle de légalité d'une dépense d'intérim déjà engagée par l'établissement ;
Le Sénat décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur la proposition de loi visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification, adoptée par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission . - La commission des affaires sociales a déposé une motion pour manifester l'opposition du Sénat à ces dispositions.
Nous ne rejetons pas toutes les mesures de cette proposition de loi mais prenons acte de l'incompatibilité des positions des deux assemblées.
Le grand espoir du Ségur de la santé a été cruellement déçu. La nette aggravation de la situation sanitaire nous invite à adapter nos discussions à la gravité des enjeux. C'est pourquoi nous vous invitons à voter cette question préalable.
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. - Je regrette cette motion qui nous empêche de poursuivre nos riches débats, notamment sur l'ouverture des compétences des professionnels.
Nous voulons faire confiance aux professionnels et leur laisser le temps pour mettre en place les organisations votées. Les hôpitaux de proximité sont une réponse à vos demandes.
L'article 10 prévoit le contrôle des dérives de l'intérim médical, qui sont un fléau. Nous ne pouvons laisser peser cette responsabilité importante sur le directeur d'établissement, qui ne peut que répondre à la demande du professionnel. Désormais, le plafond s'appliquera à tous et aucune dérogation ne sera possible. C'est une disposition puissante, un engagement fort.
Les sages-femmes ont obtenu la prescription d'arrêts de travail sans limite de durée, un élargissement de la liste des médicaments prescriptibles et peuvent adresser leurs patientes à un médecin spécialiste.
Je pense aussi aux masseurs-kinésithérapeutes et aux orthophonistes.
Ces réformes sont largement attendues par les professionnels de santé. J'émets donc un avis défavorable à la motion.
Mme Laurence Cohen. - Lors de la première lecture, le CRCE avait déposé une motion opposant la question préalable, que vous n'avez pas votée. Le destin du texte nous donne raison...
Dans cette motion, il y a des considérants avec lesquels nous ne sommes pas en désaccord.
Cette proposition de loi affaiblit le système de santé. Cela vient aussi des budgets successifs de la sécurité sociale, des restrictions qui mettent à genoux les hôpitaux - et que nous refusons de voter chaque année. La situation actuelle en est la conséquence. Ayons de la suite dans les idées au lieu de se plaindre ! C'était vrai pour Mme Bachelot, Mme Touraine, Mme Buzyn, et M. Véran.
Les politiques d'austérité menées depuis vingt ans nuisent gravement à la santé publique. Nous voterons cette question préalable. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE)
M. René-Paul Savary. - Nous voulions discuter de cette proposition de loi, mais quand on voit la façon dont notre travail a été traité, on s'interroge. Nous avons été considérablement déçus. La loi portait un titre prometteur, qui nous a piégés : confiance et simplification. En écoutant les organisations, nous avons vu que la confiance n'était pas au rendez-vous. Ni la simplification.
Le groupe Les Républicains votera cette question préalable.
La motion n°18 opposant la question préalable est adoptée et la proposition de loi est rejetée.
La séance est suspendue pour quelques instants.