SÉANCE

du mercredi 13 janvier 2021

50e séance de la session ordinaire 2020-2021

présidence de M. Gérard Larcher

Secrétaires : Mme Françoise Férat, Mme Martine Filleul.

La séance est ouverte à 15 heures.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Questions d'actualité

M. le président. - Au nom du Sénat, je tiens à vous adresser mes voeux, monsieur le Premier ministre, à vous-même ainsi qu'aux membres du Gouvernement.

J'adresse également mes voeux à mes collègues et aux collaborateurs du Sénat.

Je formule des voeux pour notre pays et pour tous nos compatriotes, pour que nous puissions ensemble traverser et surmonter la crise sanitaire, qui impose tant de souffrances, de sacrifices et de discipline.

Notre vocation est de contribuer collectivement à vaincre cette crise en préservant la démocratie qu'incarne le Parlement.

L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.

Stratégie vaccinale (I)

Mme Laurence Cohen .  - Après le fiasco des masques et des tests, les Français sont inquiets de la stratégie vaccinale du Gouvernement, compte tenu des retards pris. Pourtant la mise sur le marché de plusieurs vaccins et bientôt du traitement mis au point par l'Institut Pasteur de Lille ravive l'espoir. La formidable performance des chercheurs s'est hélas accompagnée d'une course effrénée des grands laboratoires pour toucher le jackpot.

Agnès Pannier-Runacher a annoncé la construction de trois sites de production en France. Il était temps. Quand allez-vous obliger Sanofi à participer à cet effort collectif et à arrêter de supprimer des emplois de recherche et développement ? À quand une licence d'office pour produire les vaccins à prix coûtant et les mettre dans le domaine public ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE, ainsi que sur plusieurs travées du groupe SER)

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargée de l'industrie .  - La mise sur le marché de vaccins efficaces à plus de 90 %, ce qui est exceptionnel, est un grand espoir. Des doses ont été préréservées par la France et l'Union européenne depuis avril : pas moins de six contrats nous assurent un accès direct aux vaccins.

Dès juin, nous avons également lancé un appel à projets de capacity building pour produire en France et en Europe. Nous sélectionnons les sites les plus productifs, ayant les meilleures capacités.

L'Union européenne a préréservé 600 millions de doses auprès de Pfizer, qui seront livrées cette année. Sanofi, pour sa part, a investi 600 millions d'euros pour une usine de vaccins d'ici deux ans. Je salue son action pour accompagner la montée en puissance du vaccin. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Mme Laurence Cohen. - Sanofi n'est pas un petit laboratoire : il a le savoir-faire, les moyens, les chercheurs. Qu'il cesse donc de licencier !

Vous avez refusé notre proposition d'un pôle public du médicament. Il est encore temps de changer d'avis ! (Sourires)

Écoutez les signataires de la pétition « Pas de profit sur la pandémie ». Nous demandons la levée du secret des affaires pour faire la transparence sur les contrats signés avec Big Pharma, et exigeons que les vaccins et traitements contre la pandémie soient un bien public mondial. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST)

Baromètre de l'action publique

Mme Patricia Schillinger .  - (Applaudissements sur les travées du RDPI) Alors que la crise sanitaire frappe notre pays, la situation de chaque territoire demeure unique. Une même mesure nationale n'aboutit pas au même résultat partout sur le territoire, d'où un manque de visibilité pour nos concitoyens.

Restaurer la confiance dans l'État et les politiques publiques est essentiel. Un pilotage efficace et une transparence accrue constituent la clé de voûte d'une démocratie qui fonctionne.

Le Président de la République a promis de placer son action sous le signe de la transparence. Le baromètre de l'action publique a été présenté ce matin en Conseil des ministres. (« Ah ! » sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Bruno Sido.  - On est sauvés !

Mme Patricia Schillinger. - Pouvez-vous nous présenter ce nouvel outil ? Comment contribue-t-il à la promesse de transparence portée par le chef de l'État ? (Applaudissements sur les travées du RDPI)

M. François Patriat.  - Très bien !

M. Marc Fesneau, ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement et de la participation citoyenne .  - Depuis plus trois ans, vous avez adopté de nombreuses lois. Nous faisons en sorte que les réformes prioritaires trouvent une traduction concrète dans le quotidien des Français.

La transformation de l'action publique est plus que jamais une priorité. Le baromètre présenté ce matin par Mme Amélie de Montchalin sera accessible sur le site internet du Gouvernement. Il permettra de suivre la mise en oeuvre de vingt-cinq réformes prioritaires, grâce à des indicateurs chiffrés dans huit domaines dont la transition énergétique, la santé, le travail, etc. Les données seront disponibles département par département en open data et réactualisées trimestriellement. Vous pourrez voir ce qui avance plus ou moins vite.

Cet outil contribuera à renforcer la confiance de nos concitoyens et d'accélérer la transformation concrète de l'action publique au service des territoires et des citoyens. (M. François Patriat applaudit.)

Mme Patricia Schillinger. - J'espère que les territoires s'en saisiront. (On ironise sur les travées du groupe Les Républicains.)

Stratégie vaccinale (II)

M. Patrick Kanner .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) L'épidémie nous impose humilité devant un virus évolutif et responsabilité pour soutenir les politiques sanitaires lorsqu'elles sont présentées sur la base d'informations objectives.

C'est en responsabilité que nous devons envisager la campagne vaccinale.

Dès novembre, nous appelions le Gouvernement à mettre en place un plan clair, net et précis de vaccination, à la suite des conclusions du Conseil scientifique du 9 juillet.

Vous disiez être dans l'action, vous n'étiez que dans la réaction. Vous avez été mis dos au mur après la polémique déclenchée par le Président de la République lui-même. Ce retard a un coût économique, social et humain.

Le manque d'anticipation et la lenteur assumée doivent laisser la place à une mobilisation générale, en association plus étroite avec les élus locaux. Faites confiance à l'intelligence des territoires plutôt qu'aux consultants privés, déployez enfin les centres de vaccination, arrêtez un calendrier précis. Il n'y a même pas de campagne de communication !

Comment allez-vous rattraper votre retard, lié à votre manque d'anticipation, pour gagner la course contre la montre face aux variants ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

M. Jean Castex, Premier ministre - Monsieur le président, bonne et heureuse année ! Au nom du Gouvernement, je vous adresse tous nos voeux pour la Haute Assemblée et pour la France en cette période difficile.

Merci au président Kanner de sa question, qui fait suite à celle de Mme Cohen. La France, et il faut s'en réjouir, n'a pas à rougir de sa stratégie globale de lutte contre cette pandémie. (Vives protestations à droite ; applaudissements sur les travées du RDPI)

Échec de la stratégie de tests, dit Mme Cohen ? Faites donc la comparaison avec nos voisins européens ! (On se récrie à droite.) Je ne nie pas les difficultés - il y en a eu partout - mais la France est aujourd'hui parmi les pays qui testent le plus et le mieux !

M. Olivier Paccaud. - Bref, nous sommes toujours les meilleurs !

M. Jean Castex, Premier ministre. - Pas moins de 84 % des résultats sont obtenus en moins de 24 heures. (Nouvelles exclamations à droite) Nous avons les taux d'incidence et de positivité parmi les plus bas d'Europe. Voilà les faits.

Nous avons confiné avant les autres, certes sans l'accord du Sénat, en préservant Noël et l'activité économique de décembre. (Protestations à droite) Vous verrez les chiffres du dernier trimestre...

M. Olivier Paccaud.  - Tout va bien !

M. Jean Castex, Premier ministre.  - Ne nous autoflagellons pas.

M. Olivier Paccaud.  - C'est de l'autosatisfaction !

M. Jean Castex, Premier ministre.  - Non, ce sont des faits ! Les Français qui ont fait les efforts nécessaires sont largement responsables de cette situation.

Mme Laurence Rossignol. - (Notant que le Premier ministre ne se tourne que vers la droite de l'hémicycle.) Vous êtes censé répondre à M. Kanner...

M. Jean Castex, Premier ministre.  - Nous menons une action déterminée. Quel pays fait mieux ? Citez-moi un pays où tout va bien, nous nous y rendrons !

Certes les drames, les dégâts sont considérables, mais calmons le jeu. Nous sommes ici dans la Chambre de la sérénité... (Exclamations à droite)

La stratégie vaccinale vous a été présentée ici. Cas contact, je n'ai pu être présent mais j'ai été avantageusement remplacé par le ministre de la Santé. Cette stratégie n'a pas changé : suivant les recommandations de la Haute Autorité de Santé, nous priorisons les personnes les plus vulnérables au virus, qui sont le plus susceptibles de se retrouver en réanimation.

Soyons fiers de nos établissements de santé, de tous les personnels qui ont joué un rôle majeur depuis mars !

Nous avons commencé par le plus difficile : les résidents en Ehpad et USLD. Vous le savez, il faut prendre des précautions pour recueillir le consentement de ces personnes.

M. Laurent Duplomb.  - Un document de 45 pages !

M. Jean Castex, Premier ministre.  - Cela prendra plusieurs mois. (Exclamations à droite) On ne juge pas un match de 90 minutes à la deuxième seconde.

La stratégie vaccinale, qui monte en charge, fait appel aux territoires. Mais nous avons des délais de livraison, des conditions de conservation qui font que ces vaccins ne peuvent être distribués en pharmacie, comme nous le souhaiterions. (Exclamations à droite)

Les choses se font dans l'ordre, en impliquant les acteurs locaux. L'enjeu, c'est de susciter l'adhésion d'un maximum de concitoyens. Ce n'est pas acquis. Celle-ci s'accroît, tant mieux.

À compter de lundi, la vaccination sera ouverte aux plus de 75 ans ; il faudra plusieurs semaines pour vacciner ces 5 millions de personnes.

M. Jean-François Husson.  - C'est bien ce que nous vous disons !

M. Jean Castex, Premier ministre.  - Inutile donc de nous interpeller dès la première semaine... (Vives exclamations à droite)

J'ai toujours dit la vérité, y compris pour prendre des mesures difficiles que vous n'avez pas approuvées. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

M. Patrick Kanner.  - Nous vous demandons d'anticiper. Des vaccins stockés et non injectés, c'est le reconfinement assuré, et à la clé un drame économique.

Le 9 janvier, à Tarbes, vous disiez que la politique sanitaire est une politique d'État. Vous avez raison. Votre responsabilité devant les Français est immense. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

Fractures territoriales et espérance de vie

M. André Guiol . - Une série d'études de l'Association des maires ruraux de France indique que l'espérance de vie d'un rural est inférieure de deux ans à celle d'un citadin. L'accès aux soins hospitaliers y est aussi inférieur de 20 %, sans doute une conséquence du manque de généralistes...

Il faut mieux intégrer les associations d'élus dans les instances de santé. Nous connaissons les mesures prises par le Gouvernement : l'augmentation du numerus clausus, qui n'aura d'effet que dans dix ans ; la nouvelle organisation de travail des jeunes médecins, qui affecte leur disponibilité ; la création de maisons de santé pluridisciplinaires, freinée par l'obligation de disposer de deux médecins. Pourquoi ne pas suspendre provisoirement cette obligation, en s'appuyant sur des infirmiers ? Ce serait une solution concrète, rapide et peu onéreuse. (Applaudissements sur les travées du RDSE)

M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé . - (« Ah ! » à gauche) Les problèmes d'accès aux soins dans les territoires ruraux ont en effet un impact sur l'espérance de vie en bonne santé. Cette situation est inacceptable, même si elle n'est pas nouvelle.

Nous avons supprimé le numerus clausus qui était une aberration. Nous étions 3 500 dans ma promotion de 1998 ; aujourd'hui, ils sont 10 000 étudiants en formation.

Il y a des solutions : les téléconsultations, dont le nombre est passé de 10 000 à un million par semaine pendant le confinement, les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS), l'exercice regroupé dans les maisons de santé pluridisciplinaires. La règle est en effet qu'il y ait deux médecins pour assurer une certaine stabilité mais la maison peut être créée, sans financement, avec un seul médecin. Je prendrai cependant une ordonnance pour donner du temps afin de recruter un second médecin ultérieurement. (Mme Patricia Schillinger applaudit.)

M. André Guiol. - Une fois n'est pas coutume, la réponse me satisfait.

Malaise des étudiants (I)

Mme Monique de Marco .  - (Applaudissements sur les travées du GEST) Une étudiante de Gironde, Léa, m'écrit : « À un moment clé de ma vie, il m'est impossible de me projeter. Seule derrière un écran sans vie depuis des mois, je me sens abandonnée par mes aînés. »

Un tiers des étudiants montrent des signes d'anxiété et de dépression, liée à l'isolement prolongé et à une vie sociale réduite à peau de chagrin. La réouverture des universités était annoncée pour janvier, mais n'a finalement pas eu lieu

Les consignes sont données tardivement et sans concertation. Les étudiants et les enseignants se sentent oubliés, sacrifiés.

Faisons preuve d'imagination ! N'est-il pas possible d'organiser des cours en présentiel, avec des jauges adaptées, pour rompre l'isolement et redonner espoir ? Il faut recruter davantage de psychologues, mettre en place un chèque Santé, répondre à la précarité avec un moratoire sur les loyers dans les résidences universitaires, augmenter les aides, recruter des assistantes sociales et élargir le RSA aux moins de 25 ans, y compris aux étudiants.

Quelles mesures concrètes envisagez-vous face à la détresse des étudiants ? (Applaudissements sur les travées du GEST, ainsi que sur plusieurs travées du groupe SER)

Mme Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation .  - Nous nous préoccupons chaque jour - parce que le sujet est éminemment interministériel - de l'avenir de notre jeunesse.

Sur le campus du Crous à Pessac, vous avez vu comme moi la détresse de certains étudiants, mais aussi l'engagement exceptionnel du personnel des Crous, des services de santé et des étudiants eux-mêmes.

Les cours reprennent très progressivement en présentiel, dans la concertation. Depuis décembre, nous travaillons à ce qu'un nombre croissant d'étudiants puisse bénéficier de cette reprise, car l'enseignement est avant tout une relation humaine.

Le Premier ministre a annoncé le doublement du nombre de psychologues dans les établissements d'enseignement supérieur, et le Crous recrute soixante assistantes sociales. Nous avons créé 22 000 emplois étudiants dans les universités pour compenser la perte des petits jobs. Nous essayons d'apporter des réponses pragmatiques et concrètes. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Accord sur le Brexit

M. Dany Wattebled .  - (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP) Quelque 1 246 pages dans la langue de Shakespeare, le 24 décembre : l'accord sur le Brexit est un miracle de Noël, grâce au travail de Michel Barnier et de son équipe, que je salue.

Après 47 ans de vie commune, 4 ans et demi de divorce et une pension alimentaire inconnue, nous devons appliquer l'accord et faire avec ses limites. De nombreuses questions restent en suspens.

Dans les Hauts-de-France, on s?interroge sur ce qui attend le secteur de la pêche à la fin de la période de transition, en 2026. Quels seront les effets sur nos pêcheurs, à court terme et après 2026 ?

On constate des pénuries dans les rayons des supermarchés britanniques, nos produits n'ayant pu être livrés. Anticipez-vous des difficultés dans le transport de denrées ?

Quid du protocole d'accord sur les services financiers promis pour mars 2021 ? Notre divorce est loin d'être achevé. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP)

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères .  - C'est finalement un bon accord, inattendu, qui a été conclu au terme de négociations extrêmement difficiles. On craignait ne pas trouver d'accord sur la pêche, le Royaume-Uni y voyant un symbole de sa souveraineté retrouvée. Or nous avons préservé notre accès aux eaux britanniques et diminué les quotas de 25 % alors que les Britanniques exigeaient 80 %.

Il reste quelques points techniques à régler sur la bande des six à douze milles ou les îles anglo-normandes, et à appréhender l'horizon de juin 2026. Nous avons les outils pour prendre des mesures de sauvegarde, de rétorsion ou de compensation en cas de difficultés. Nous aurons en outre un levier supplémentaire avec la négociation des accords sur l'énergie, ce qui devrait garantir une stabilité relative.

S'agissant des services financiers, l'Union européenne a conservé sa capacité de délivrer unilatéralement, au cas par cas, des équivalences financières.

Nous savions que l'approvisionnement des commerces britanniques serait problématique. S'ajoute la situation sanitaire catastrophique en Angleterre - dont vous devriez vous informer avant de dresser des comparaisons hasardeuses avec la France ! (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Stratégie vaccinale (III)

M. Fabien Genet . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Face aux malades du Covid, à l'isolement, à la menace du variant britannique, au risque de reconfinement, nous ne sommes pas d'humeur à polémiquer.

Mais nous, parlementaires, ne sommes pas tirés au sort de manière anonyme et irresponsable ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur certaines travées du groupe SER) Nous rendons des comptes à nos concitoyens et relayons leurs interrogations.

À vous entendre, monsieur le ministre, tout va très bien. Pourquoi, alors, n'y a-t-il pas plus de Français vaccinés ? Pourquoi pas 20 % comme en Israël, 2 millions comme au Royaume-Uni ou même 500 000 comme en Allemagne ? Parce que vous avez choisi « un rythme de promenade en famille », pour citer le Président de la République !

Heureusement, le dévouement des soignants, l'engagement des préfets et des élus locaux offrent désormais un espoir sur le terrain, et ma commune de Digoin va accueillir un centre de vaccination.

Néanmoins, des inquiétudes persistent.

Pourquoi les pharmaciens ne peuvent-ils participer à la campagne vaccinale, au sein des centres de vaccination ? Pourquoi ne pas rendre la vaccination obligatoire pour les personnels des Ehpad, comme c'est le cas pour l'hépatite B ? Au lieu de chercher à convaincre les incertains, commençons par vacciner les volontaires qui sont nombreux et impatients ! (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé . - Je ne dis pas que tout va bien. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains) J'aimerais pouvoir le dire, plutôt que de décompter chaque jour les décès, les hospitalisations, les contaminations...

Personne ne nie les difficultés de mise en place d'une telle logistique - tous les pays y sont confrontés. Je pense notamment à l'Allemagne et à ses vaccinodromes où l'on fait la queue pendant quatre heures, que la presse allemande ne s'est pas privée de critiquer... Personne n'est parfait.

Je salue le travail de tous les soignants qui vaccinent, dans les hôpitaux, les cliniques, les Ehpad, dans des conditions parfois difficiles... Hier, nous avons vacciné 50 000 personnes. Notre rythme n'a rien à envier aux autres pays.

Je compte sur les pharmaciens, le jour où nous aurons un vaccin plus simple à conserver. Nous ne nous passerons pas de leur savoir-faire. Nous sommes capables de vacciner cinq millions de personnes en une semaine.

La Haute Autorité de santé nous demande de commencer par vacciner les personnes les plus vulnérables. Si nous ne le faisions pas, vous pourriez à bon droit nous le reprocher. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Malaise des étudiants (II)

M. Pierre-Antoine Levi . - Les étudiants sont en situation de détresse face à l'isolement et à la fermeture des universités.

Le 9 janvier dernier, un étudiant de Lyon 3 s'est défenestré de sa résidence universitaire. Même geste désespéré hier soir, d'une étudiante, toujours à Lyon. L'immense majorité des étudiants considèrent que l'enseignement s'est dégradé ; les cours en distanciel deviennent insupportables. Nous sommes au bord d'un décrochage massif qui risque d'entraîner de nombreux autres gestes de désespoir.

Le président de Lyon 3, Éric Carpano, l'a bien souligné : « La fermeture des universités, les cours à distance, l'arrêt des activités sportives, culturelles et festives ont favorisé l'isolement et la détresse psychologique. » La situation économique a plongé les plus fragiles dans la précarité.

Les étudiants veulent un cap. Il est invraisemblable de laisser les gens s'entasser dans le métro et de fermer les amphis, même avec le port du masque. Il en va de la qualité de leurs études, de la reconnaissance de leur diplôme sur le marché du travail, et surtout de leur santé physique et mentale.

Quelles réponses concrètes apportez-vous aux étudiants en détresse ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC)

Mme Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation . - J'adresse toutes mes pensées aux familles, amis, communautés, camarades des étudiants qui commettent ces gestes, dont les causes sont multiples.

Je rends un hommage appuyé aux enseignants qui travaillent d'arrache-pied pour que les cours aient lieu et pour accompagner leurs étudiants.

Nous n'avons pas fermé les universités pendant le deuxième confinement. Les salles de ressources sont ouvertes sur rendez-vous.

Depuis début janvier, pour les plus fragiles, il y a reprise des cours par groupe de dix. Nous envisageons un élargissement que nous examinerons vendredi prochain avec les conférences des présidents d'universités et des directeurs d'établissements.

Les plus fragiles sont les nouveaux entrants, les étudiants en situation de handicap et les étudiants internationaux qui se retrouvent seuls sur notre sol. Le retour sur le lieu de l'enseignement est très important pour l'avenir pédagogique mais aussi psychologique des étudiants. Nous travaillons pour faire de nouvelles propositions en ce sens.

M. Pierre-Antoine Levi. - Ces pistes d'action sont insuffisantes, les faits le montrent. Il y a urgence. Les étudiants ne doivent pas être sacrifiés. Il y va de l'avenir de notre jeunesse ! (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains)

Lutte contre la haine en ligne

Mme Patricia Demas .  - Pendant que le monde entier effaré découvrait l'envahissement du Capitole, un autre évènement non moins important se produisait : les comptes du président des États-Unis étaient supprimés sur internet.

Certains ont eu pour premier réflexe de s'en réjouir et de saluer la décision des Gafam.

Mais cette censure doit, à y regarder de plus près, nous amener à réfléchir à l'état des libertés publiques et à la menace que font désormais peser ces multinationales sur la liberté d'expression. (Murmures sur les travées du groupe SER)

Laisser à des entreprises privées le soin de censurer ou non sur la toile est une atteinte grave à la démocratie. Il faut réguler la liberté d'expression mais par la loi et la justice, par les pouvoirs publics...

M. David Assouline.  - C'est le rôle du Parlement qui doit faire la loi !

Mme Patricia Demas. - Il est vrai que nos législations sont inopérantes sur internet ; les fake news se multiplient et envahissent les réseaux sociaux.

Mais comment une entreprise peut-elle décider de ce qui peut ou non se dire ? Le Gouvernement s'est exprimé sur le besoin d'inventer de nouvelles formes de supervision démocratique : qu'entendez-vous par là ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargée de l'industrie . - On peut se réjouir de la réaction des plateformes, mais elle crée en effet un précédent. D'abord, elle met en valeur le rôle des réseaux sociaux dans la vie démocratique. Par cette action, ces plateformes reconnaissent de facto leur responsabilité sur le contenu posté. Cela nous donne un levier pour agir. Enfin, cela pose la question des règles du jeu sur les réseaux sociaux.

Au niveau européen, nous nous sommes emparés du sujet. Le Président de la République et Cédric O sont proactifs sur le Digital Services Act, présenté récemment par les commissaires Margrethe Vestager et Thierry Breton.

Au législateur de fixer les règles du jeu et à la justice de contrôler leur application.

Mme Patricia Demas. - Il y a urgence. Passons des paroles aux actes ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Malaise des étudiants (III)

Mme Sylvie Robert . - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) La situation des jeunes, et notamment des étudiants, est très préoccupante. Plusieurs évènements tragiques ont émaillé ces dernières semaines. La confusion et l'absence de perspectives engendrent angoisse et mal-être. La précarité augmente et la détresse psychologique est alarmante, en dépit de l'investissement des enseignants et du Crous.

Il y a risques de décrochage, en plus de la démotivation, en raison de parcours chaotiques.

Les étudiants ont été les oubliés de la conférence de presse du 7 janvier. Quelles perspectives leur offrez-vous, madame la ministre ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

Mme Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation . - Le 7 janvier, nous n'avons pas parlé des étudiants car la décision avait été prise avant, afin que dès le 4 janvier, des groupes de dix soient accueillis dans les établissements...

M. Jean Castex, Premier ministre. - Oui, je l'avais dit avant.

Mme Frédérique Vidal, ministre. - J'ai entendu la polémique sur la date de la circulaire, mais nous avons travaillé en amont.

Les examens se sont déroulés en présentiel pour 20 % d'entre eux, quand les enseignants ont estimé que c'était indispensable. Il est hors de question que l'on puisse prétendre que les diplômes auraient moins de valeur en 2020 ou 2021 !

Nous allons accompagner le retour des étudiants car l'enseignement est avant tout une relation humaine. Les étudiants ont besoin de revoir leurs professeurs et ceux-ci ont besoin de retrouver leurs étudiants. (Quelques applaudissements sur les travées du groupe RDPI)

Mme Sylvie Robert. - On a beaucoup demandé aux jeunes. Il faut des mesures d'urgence, notamment dans l'accompagnement. Oui, il y a urgence à ce que votre Gouvernement ait un vrai discours en direction de la jeunesse, pour lui tracer des perspectives ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

Lutte contre la délinquance en zone rurale

M. Bruno Rojouan . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Monsieur le ministre de l'Intérieur, nos campagnes sont de moins en moins paisibles. En 2020, les violences ont augmenté de 8 % en zones rurale et périurbaine, alors qu'elles baissaient de 50 % en zone urbaine. Coups et blessures : plus 10 % ! Séquestrations : plus 15 % ! Règlements de comptes et homicides : plus 15 % ! Viols : plus 18 % ! Les comportements se radicalisent.

Illustration de cette dégradation, le 23 décembre 2020, trois gendarmes intervenant pour des violences conjugales se sont fait abattre dans un hameau du Puy-de-Dôme, département voisin du mien.

Cet échec, ce n'est pas seulement celui de l'ancien monde, c'est aussi le vôtre, monsieur le ministre. Entendez la détresse de nos concitoyens et des élus ruraux ! L'urgence n'est plus à d'hypothétiques expérimentations. Il faut des actes concrets et rapides.

Comment analysez-vous cette nouvelle délinquance qui gangrène nos territoires et que comptez-vous faire pour la combattre ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur . - Je partage votre émotion en évoquant les trois gendarmes abattus.

Mais votre lecture n'est pas celle de mon ministère. Les zones de gendarmerie ne se superposent pas entièrement avec les zones rurales. Elles regroupent 51 % de la population et 95 % du territoire. Mais 70 % des statistiques que vous évoquez relèvent de zones urbaines.

Certes, la délinquance augmente davantage en zone de gendarmerie, mais elle est surtout due aux violences conjugales et intrafamiliales et aux refus d'obtempérer lors de contrôles routiers - un toutes les vingt minutes en zone de gendarmerie, un toutes les trente minutes en zone de police, ce qui a entraîné la moitié des morts en service l'an dernier - et aux séquestrations.

Dans le même temps, les cambriolages ont baissé de 40 % en zone de gendarmerie, tout comme les faits attentatoires au monde agricole, qui restent importants mais diminuent sur la majeure partie du territoire.

L'année 2020 a été très particulière, ce qui relativise la lecture des statistiques.

Monsieur le sénateur, soyez assuré de la continuité de la lutte contre la délinquance, en lien avec l'autorité judiciaire. (Quelques applaudissements sur les travées du RDPI)

Rave-party en Ille-et-Vilaine

Mme Françoise Gatel . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Monsieur le ministre de l'Intérieur, une rave-party lunaire s'est tenue dans le charmant petit village de Lieuron, en Ille-et-Vilaine, où 2 500 « teufeurs » de France, de Belgique, d'Angleterre et d'Espagne se sont rassemblés.

C'était une rave-party interdite mais très bien organisée, payante, avec entrée filtrée, stands de vente de stupéfiants, de nourriture et d'alcool.

Les conditions sanitaires étaient une vraie provocation, sans compter le risque de sécurité : un véhicule de gendarmerie a été brûlé, trois gendarmes ont été agressés. Agir est difficile, certes, et critiquer plus aisé. Merci, monsieur le ministre d'avoir sifflé la fin de la partie, et bien géré cette fin.

Mais comment donc 2 500 personnes ont-elles pu s'y rendre sans être le moins du monde inquiétées ? Pourquoi la gendarmerie n'a-t-elle pu infiltrer l'organisation pour anticiper et agir en amont ?

Certains Français partis skier en Suisse ont été verbalisés et placés en quarantaine. Pourquoi les 2 500 teufeurs ont-ils pu se disperser en France et y disperser le virus ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC)

M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur . - Ce n'étaient pas des teufeurs, mais des délinquants ! (Exclamations à droite)

Selon la loi, tout rassemblement de plus de 500 personnes, non autorisé, est illégal. Il y a eu 2 000 verbalisations, 15 arrestations, 4 mises en examen, 2,5 tonnes de matériel saisies, dont 15 murs de sons. Une information judiciaire a été ouverte.

Certes, je n'ai pas souhaité envoyer les paras contre des jeunes gens de 15 à 25 ans, comme certains boutefeux sur les réseaux sociaux le réclamaient. J'ai préféré clôturer le site, sans qu'il n'y ait de blessé ni de décès.

Je rappelle que 225 personnes ont été verbalisées sur le site pour consommation de stupéfiants. L'ordre républicain a été tenu.

Des réseaux de communication parallèles empêchent le ministère de l'Intérieur d'intervenir. Cela nous choque pour une rave-party mais aussi pour des rassemblements de black blocks. Le Sénat pourra s'y pencher prochainement car je demanderai au Parlement, sous l'autorité du Premier ministre, les moyens de renseignements pour activer les forces de l'ordre dans des conditions acceptables.

Article 30 de la proposition de loi relative à la sécurité globale (I)

Mme Laurence Muller-Bronn .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) La nuit du 31 décembre, à Boofzheim en Alsace, un jeune homme a eu la tête arrachée en manipulant un tir d'artifice. Il ne s'agissait pas de délinquants qui visent la force publique, mais de jeunes gens qui s'inscrivent dans une tradition festive ancrée en Alsace, de plus en plus décriée par les habitants, les autorités et les secours. J'ai été alertée par les maires qui, malgré les interdictions, font face, chaque année, à des débordements. Les réglementations successives n'ont pas évité les accidents.

Il faut des sanctions réellement dissuasives, comme le prévoit l'article 30 de la proposition de loi relative à la sécurité globale.

Il faut interdire les feux d'artifice sans la présence d'un professionnel agréé, notamment dans les contrats de location de salle. Toute transgression doit être assimilée à un délit, avec amende forfaitaire et inscription au casier judiciaire. Je déposerai un amendement en ce sens lors de l'examen au Sénat.

Pourquoi ne pas réserver l'usage des feux de divertissement aux seuls professionnels, comme c'est déjà le cas pour les mortiers ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur .  - Je partage votre émotion après le décès de ce jeune homme et j'adresse mes condoléances à ses parents et à la commune. Je pense aussi aux policiers et aux gendarmes qui sont parfois attaqués au mortier, comme cet été à Champigny-sur-Marne. La proposition de loi relative à la globale crée un délit puni de six mois d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende ; elle pénalisera l'utilisation, mais aussi la vente, y compris via internet, qui est un problème que nous devons suivre attentivement.

Les questions du protoxyde d'azote, sujet cher à Valérie Létard, et des rodéos urbains pourraient aussi être intégrées dans le texte, si le Sénat le souhaite, car nous travaillerons, une fois de plus, en co-construction. Le Gouvernement donnerait un avis favorable à de tels amendements. (Applaudissements sur quelques travées du RDPI et du groupe Les Républicains)

M. Marc-Philippe Daubresse.  - Très bien !

Politique industrielle

Mme Florence Blatrix Contat . - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) La crise sanitaire a souligné notre défaillance dans des secteurs productifs cruciaux. Je pense à la pénurie de masques, de gants, de matériels pour les professionnels de santé, en début de pandémie.

En octobre, on comptait trente plans de licenciement par semaine ; 657 ont été déployés entre le 6 mars et le 22 novembre, et le pire est à venir. Entendu ce matin par la commission des affaires économiques, Patrick Artus évoque un « bain de sang ». Pourtant rien n'a été exigé des entreprises qui reçoivent des milliards d'euros.

Michelin va supprimer 2 300 emplois, General Electric menace 800 emplois pendant que son PDG s'octroie un bonus de 47 millions de dollars ! Nous avons besoin d'un État stratège pour réduire notre dépendance industrielle.

Madame la ministre, quelle est votre feuille de route nationale et européenne ? Quelle est votre stratégie concernant l'avenir des Chantiers de l'Atlantique ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargée de l'industrie . - Le Président de la République a fait de la reconquête industrielle un marqueur de son action, après un million d'emplois industriels détruits entre 2000 et 2016.

Depuis, en 2017, 2018 et 2019, les créations d'emplois ont repris grâce à une politique déterminée et efficace. Nous agissons, avec le Président de la République et Bruno Le Maire. L'industrie est l'une des priorités du plan de relance, avec 35 milliards d'euros sur les 100 milliards.

Il y a des conditions : nous accompagnons les entreprises qui produisent et investissent en France. Nous accompagnons 800 entreprises avec 800 millions d'euros en échange de projets concrets. Et 6 500 entreprises seront accompagnées dans la numérisation.

Nous agissons avec les filières et les entreprises ; c'est ainsi que nous créerons à nouveau des emplois industriels.

Stratégie vaccinale (IV)

Mme Françoise Dumont . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Dans son désormais habituel point du jeudi soir, le Premier ministre a annoncé la liste des départements soumis au couvre-feu à 18 heures dès dimanche.

Le Var était exempté. Mais samedi, coup de théâtre : il y était intégré, avec la Drôme...

M. Jean Castex, Premier ministre. - Eh oui !

Mme Françoise Dumont. - Le nombre de vaccinés piétine - un million à la fin du mois ; 15 millions, les plus fragiles, à l'été, alors que l'Angleterre atteindra ce seuil à la mi-février ! Hier, seules 2 925 doses avaient été distribuées dans le Var, pour 1 076 000 habitants.

Vous maintenez les élus dans le flou sur les livraisons, sans tenir compte de leurs mains tendues. (M. le Premier ministre le conteste.)

Les touristes auront peur de se rendre dans les territoires les plus touchés. L'économie du Var, deuxième département touristique de France, sera mise à mal. Votre lenteur pourrait signer l'acte de décès de ce secteur si les chiffres de vaccination ne sont pas bons.

Pourquoi ne pas vous appuyer sur les élus locaux et l'intelligence des territoires pour fixer un objectif de vaccination plus ambitieux pour l'été ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé . - Venez avec moi sur le terrain, vous verrez que les élus locaux, de tout bord, sont souvent plus contributeurs qu'on le dit à Paris, y compris dans le Var ! Je pense en particulier aux territoires du Haut-Var, où je me suis rendu récemment pour rencontrer la cellule de coordination départementale. Un maire recrute des médecins, un autre met à disposition des véhicules pour transporter des personnes âgées isolées vers un centre de vaccination. Ils me demandaient s'ils avaient le droit de le faire ; je leur ai répondu que nous ne sommes pas si jacobins qu'il faille demander une autorisation aux autorités nationales !

M. Jean Castex, Premier ministre. - Heureusement !

M. Olivier Véran, ministre. - Il y a un décalage entre ce que vous percevez et ce que nous construisons sur le terrain. Vous pouvez participer aux cellules départementales ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains)

La répartition des doses de vaccins se fait au prorata de la population. Seule entorse à ce principe, les 50 000 premières doses du vaccin Moderna qui sont destinées au Grand-Est, à la Bourgogne Franche-Comté et aux Alpes-Maritimes, les territoires les plus touchés.

Je serai bientôt à Troyes pour rencontrer M. Baroin. Je suis en contact permanent avec l'AMF, l'ARF, l'ADF et France urbaine. J'étais récemment en conversation avec M. Rottner pour évoquer les modalités d'intervention des régions, en parfaite harmonie avec l'État, au service de nos concitoyens. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Avenir de l'usine de nickel du Sud en Nouvelle-Calédonie

M. Jean-François Longeot . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) J'associe à cette question mon collègue Gérard Pouadja. En Nouvelle-Calédonie, à la suite de la réduction de l'écart de voix entre indépendantistes et non indépendantistes, Vale a décidé de vendre son usine du Sud. La situation s'est enflammée et rappelle les heures graves des années 1980. L'État doit intervenir au plus haut niveau afin d'instaurer un dialogue ouvert pour la reprise de l'usine.

La situation semble avoir évolué car le Gouvernement s'impliquerait plus fortement. Une prise de contrôle temporaire de l'État au capital de Vale serait une bonne piste pour obtenir un consensus politique et industriel. En dépendent le maintien de 3 000 emplois, la paix civile, l'activité économique, mais aussi le dialogue politique entre indépendantistes et non indépendantistes, essentiel dans le cadre de la préparation du troisième référendum d'autodétermination prévu par l'accord de Nouméa.

Comment le Gouvernement entend-il organiser l'implication de l'État dans le dossier de reprise de l'usine du Sud ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC)

M. Jean Castex, Premier ministre . - Je suis directement ce dossier, avec le concours actif de Sébastien Lecornu. Le nickel est en effet un secteur hautement stratégique. L'usine de Vale est en cours de cession, un seul repreneur est en lice. L'État intervient déjà massivement avec 500 millions d'euros de prêts, des garanties et des défiscalisations.

Ce projet de reprise a conduit à des troubles très graves début décembre. La réponse des forces de l'ordre et de la justice a été claire et très bien conduite. Il y a eu cependant, malheureusement, des dégradations. Certains, pourtant indépendantistes, ont demandé la nationalisation de l'usine ! Ils ont aussi bloqué une seconde usine, celle de SLN (Société Le Nickel), dont l'État est actionnaire minoritaire via Eramet, qui est désormais au bord de la faillite : 10 000 emplois y sont menacés.

Nous recherchons toujours la voie du dialogue. Le ministre de l'outre-mer a passé trois semaines en Nouvelle-Calédonie à l'automne. Le sujet du nickel était sur la table des négociations et de l'échéancier.

En novembre et en décembre, l'État a avancé des propositions pour faire évoluer l'offre de l'entreprise. Les discussions se poursuivent.

Mais pour pouvoir dialoguer, il faut réunir les conditions du dialogue et l'on ne dialogue pas sous la menace. La paix civile n'est pas négociable. Les décisions de justice pour condamner les casseurs doivent être respectées et appliquées.

Tout le monde doit se tenir autour de la table. Nous devons résister à la tentation de se référer aux années 1980 : trente années de rééquilibrage sont passées par là. Aujourd'hui, la moitié de la population du Caillou a moins de 30 ans !

Il ne s'agit pas de revenir sur le passé mais d'inventer une solution politique nouvelle pour l'avenir de la Nouvelle-Calédonie dans la République. Vous pouvez compter sur l'engagement du Gouvernement. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

La séance est suspendue à 16 h 30.

présidence de Mme Nathalie Delattre, vice-présidente

La séance reprend à 16 h 45.