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Table des matières
Supplétifs de statut civil de droit commun
Mme Geneviève Darrieussecq, secrétaire d'État auprès de la ministre des armées
Baisse des dotations horaires globales et impact dans les collèges ruraux
M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse
Stages d'observation pour les élèves de moins de 14 ans
M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse
État de catastrophe naturelle et fissurations de maisons
M. Laurent Nunez, secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur
Attribution à Saint-Martin et à Saint-Barthélemy d'une préfecture de plein exercice
M. Laurent Nunez, secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur
Effectifs de police à Aix-en-Provence
M. Laurent Nunez, secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur
Risque de tsunami et alerte descendante
M. Laurent Nunez, secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur
Activités du parti « Égalité et justice »
M. Laurent Nunez, secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur
M. Laurent Nunez, secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur
Impact du Brexit sur la flotte de pêche normande
Malaise des personnels de l'hôpital public
Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé
Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé
Avenir de la protection maternelle et infantile
Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé
Prise en charge des détresses respiratoires par les médecins généralistes
Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé
Stages des jeunes élèves de l'enseignement agricole
Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé
Ordonnance sur la coopération agricole
Mme Christine Lanfranchi Dorgal
Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé
Entreprises adaptées dans la région des Hauts-de-France
Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé
Avenir du programme européen Leader
Établissements à objet social et recensement des logements sociaux
Couverture numérique dans l'Aude
La mobilité dans la métropole Aix-Marseille-Provence
Indemnités de fonction des exécutifs des syndicats intercommunaux et mixtes
Vétusté du parc immobilier de Montréjeau
Hébergement des travailleurs saisonniers
Taux réduit de TVA pour la filière équine
Transports en Seine-Saint-Denis
Équipement des motrices de la SNCF
M. Olivier Jacquin, en remplacement de M. Jean-Marc Todeschini
Desserte de Tenay-Hauteville et de Virieu-le-Grand-Belley
Trajets Die-Gap ou Die-Valence sur la ligne Paris-Briançon
Chasse aux colombidés et aux sangliers en Dordogne
Abandon du projet d'autoroute A831
Hommage aux deux soldats morts au Burkina Faso
M. Gérard Larcher, président du Sénat
Cour de justice de la République
Élections - Ouverture du scrutin
Pour une école de la confiance (Procédure accélérée)
M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse
M. Max Brisson, rapporteur de la commission de la culture
Cour de justice de la République
Pour une école de la confiance (Procédure accélérée - Suite)
M. Jean-Michel Blanquer, ministre
Mme Jacqueline Eustache-Brinio
Pour une école de la confiance (Procédure accélérée - Suite)
Discussion des articles (Suite)
ARTICLE PREMIER BIS B (Supprimé)
Ordre du jour du mercredi 15 mai 2019
SÉANCE
du mardi 14 mai 2019
88e séance de la session ordinaire 2018-2019
présidence de M. Thani Mohamed Soilihi, vice-président
Secrétaires : M. Daniel Dubois, Mme Annie Guillemot.
La séance est ouverte à 9 h 30.
Le procès-verbal de la précédente séance est adopté.
Questions orales
M. le président. - L'ordre du jour appelle 35 questions orales.
Supplétifs de statut civil de droit commun
Mme Marta de Cidrac . - Je souhaite attirer votre attention sur la situation ubuesque que connaissent actuellement les supplétifs de statut civil de droit commun.
Consécutivement à l'adoption de plusieurs amendements à l'Assemblée nationale et à la publication de la loi de finances pour 2019, un certain nombre de supplétifs de statut civil de droit commun vous ont écrit pour connaître les modalités pratiques de mise en place de la mesure adoptée. La réponse les a étonnés : en effet, il leur était indiqué qu'ils devaient prendre contact avec le service de l'Office national des anciens combattants et des victimes de guerre (ONACVG) de leur département de résidence. Ils l'ont fait aussitôt, mais les services départementaux de l'ONACVG leur ont indiqué qu'ils n'avaient reçu aucune instruction de la part du secrétariat d'État pour traiter les demandes d'allocation de reconnaissance effectuées par les supplétifs de statut civil de droit commun entre le 4 février 2011 et le 19 décembre 2013.
Les associations de rapatriés s'interrogent sur cette situation et se demandent s'il y aurait une volonté délibérée de la part de l'administration de temporiser, voire de ne pas appliquer la mesure adoptée par le Parlement. II est regrettable que ces mesures votées ne soient pas suivies d'effet, d'autant que les personnes concernées ont plus de 80 ans et sont pour la plupart de santé précaire.
Comptez-vous agir afin que des instructions claires et rapides soient données aux services départementaux de l'ONACVG et au bureau central des rapatriés et que le versement de l'allocation de reconnaissance sous forme de rente annuelle aux vingt-six personnes concernées soit effectif le plus rapidement possible ?
Mme Geneviève Darrieussecq, secrétaire d'État auprès de la ministre des armées . - Le législateur a réservé un traitement différent aux supplétifs de droit commun et à ceux de droit local du fait des conditions d'accueil particulièrement difficiles de ces derniers.
Toutefois, le Conseil constitutionnel a reconnu la possibilité aux harkis de droit commun de bénéficier de l'allocation de reconnaissance sous réserve qu'ils en aient fait la demande entre le 5 février 2011 et décembre 2013 et, en cas de refus, qu' ils aient engagé une procédure contentieuse.
Dès l'adoption de la loi de finances 2019 prévoyant le transfert de 106 000 euros pour le traitement de la situation des supplétifs de droit commun, j'ai demandé à l'ONACVG d'examiner la situation individuelle de l'ensemble des personnes qui nous ont été signalées. Ainsi, une association nous avait signalé 74 personnes. Sur cette liste, Il apparaît que 25 personnes, et non 26, correspondent à des supplétifs de droit commun : trois d'entre elles sont décédées et les 22 autres n'ont juridiquement pas le droit à une allocation de reconnaissance car elles n'ont pas fait de demande entre 2011 et 2013. Seules sept personnes sont allées en justice et elles ont été déboutées.
Mais comme les parlementaires et le Gouvernement souhaitent venir en aide à ces harkis de droit commun, j'ai demandé à l'ONACVG de contacter chaque personne pour les intégrer dans les dispositifs d'aide sociale. Aujourd'hui, six personnes n'ont pas souhaité donner suite, sept personnes n'ont pas exprimé de besoin particulier, six personnes sont déjà accompagnées par le service d'action sociale de l'ONACVG et continueront de l'être, une personne est reçue cet après-midi pour étudier son dossier et deux autres se sont vues attribuer 3 000 euros.
Ces dossiers ne peuvent donc être traités que par l'action sociale de l'ONACVG : les traitements sont individuels et nous y serons attentifs.
Baisse des dotations horaires globales et impact dans les collèges ruraux
M. Bernard Delcros . - Dans le Cantal, la dotation en heures d'enseignement pour les collèges ruraux prévue pour la rentrée 2019 diminue de 200 heures alors que le nombre d'élèves est stable. Le nouveau mode de calcul de la dotation pénalise ces collèges.
Par exemple, au collège d'Allanche, alors que la forte mobilisation de l'équipe éducative autour d'un projet adapté à ce territoire, a permis d'augmenter les effectifs de 50 % en 3 ans, la dotation en heures d'enseignement baisse de 9 % entre 2018 et 2019, et ce, malgré une nouvelle augmentation des effectifs pour la rentrée prochaine. L'explication donnée est plus qu'inquiétante : alors que ce collège compte quatre divisions, la dotation 2019 est calculée sur la base de trois divisions, puis complétée par un ajustement horaire.
Ce nouveau mode de calcul appliqué aux petits collèges les affaiblit considérablement : des élèves de deux niveaux différents regroupés dans un même cours, des équipes pédagogiques déstructurées, éclatées sur deux ou trois établissements, une qualité de service parfois dégradée, le découragement des enseignants, l'incompréhension des parents.
Les collèges ruraux mettent en oeuvre une offre éducative d'excellence et les résultats au brevet, bien supérieurs à la moyenne nationale, le démontrent.
Ces petits collèges doivent conserver leurs moyens pour maintenir la qualité de l'offre éducative et continuer à remplir leur mission essentielle au coeur des territoires hyper-ruraux.
Maintiendrez-vous les heures d'enseignement des collèges ruraux lorsque les effectifs seront stables ?
M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse . - Ce sujet s'inscrit dans le cadre du soutien que nous devons à l'éducation nationale en milieu rural, cher au président de la République. L'école primaire contribue à la vitalité du monde rural et ses taux de réussite sont supérieurs à la moyenne nationale.
Pour les collèges, la question est un peu différente, car ils ne réussissent pas toujours aussi bien que pour le primaire. L'intérêt des élèves vaut par le taux d'encadrement : dans le Cantal, le taux est particulièrement élevé. À Allanche, il est de 1,81 alors qu'en REP+, il se monte à 1,45.
Oui, nous devons avoir une stratégie d'attractivité pour renforcer les effectifs d'élèves et soutenir ces collèges, non seulement par le taux d'encadrement, mais des projets innovants et qualitatifs.
Le recteur de Clermont-Ferrand est attentif à la situation de tous ces collèges d'environ 70 élèves - Allanche, Condat, Pierrefort et Pleaux.
M. Bernard Delcros. - On ne peut comparer les dotations entre établissements avec le seul ratio du nombre d'heures par élève : que les élèves soient 15 ou 25 par classe, le besoin d'enseignement est le même partout. Il faut 29 heures par division, quel que soit le nombre d'élèves ! Nous comptons sur vous pour maintenir les dotations et un service éducatif de qualité.
Stages d'observation pour les élèves de moins de 14 ans
Mme Françoise Férat . - Monsieur le ministre, la disposition législative concernant les stages d'observation rendus possibles pour les élèves de moins de 14 ans n'est pas appliquée.
Un amendement que j'avais déposé à l'article 19 de la loi du 5 septembre 2018 autorise désormais les élèves de moins de 14 ans à effectuer leur stage d'observation lié aux objectifs de l'éducation nationale dans les entreprises, comme leurs camarades de plus de 14 ans. Avant, seules les administrations pouvaient les accueillir.
Puisque ce stage d'observation vise à faire découvrir aux élèves le monde professionnel et économique, à explorer les métiers et les formations et à développer ses connaissances, il était pertinent d'ouvrir le champ des possibilités et d'élargir la tenue de ces stages d'observation dans toute entreprise aux élèves inscrits en 3e et 4e, même âgés de moins de 14 ans.
Bien que cette disposition ait été votée, de nombreux témoignages démontrent que des chefs d'établissement ne sont pas informés de cette évolution législative et n'autorisent pas l'accueil de ces élèves dans les entreprises. Les parents plébiscitent pourtant cette mesure de bon sens que vous aviez acceptée, tout comme la Ministre du travail
Il ne manque plus qu'une étape : informer les principaux de collège. Quand comptez-vous adresser une circulaire aux chefs d'établissement, aux DASEN et aux recteurs ?
M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse . - La séquence d'observation de cinq jours en milieu professionnel est obligatoire pour tous les élèves de 3e. Elle se déroule dans les entreprises, les associations, les administrations, les établissements publics ou les collectivités territoriales dans les conditions prévues par le code du travail.
Nous avons créé une base de données offrant des milliers de stages notamment aux élèves issus de milieux défavorisés n'ayant pas le réseau familial leur permettant de trouver un stage. Je remercie tous ceux qui y contribuent.
Cette séquence d'observation a changé beaucoup de choses pour nos élèves, même s'il faut aller encore plus loin. Elle les sensibilise au monde professionnel ; nous élargissons cette possibilité aux élèves de moins de 14 ans. Le 1er janvier 2019, l'article 19 de la loi du 5 septembre 2018 est entré en vigueur. Nous avons envoyé le 4 avril 2019 une note aux recteurs, DASEN et principaux de collège qui rappelle la législation et la règlementation sur les séquences d'observation en milieu professionnel pour les élèves de 4e et de 3e. Cette note répond à votre attente. Un projet de décret modifiant le code de l'éducation précisera les conditions d'accueil des mineurs de moins de 16 ans en milieu professionnel. Je sensibiliserai les recteurs à la question que vous soulevez.
Mme Françoise Férat. - Merci de ces propos rassurants. Ces stages permettent d'approcher au plus près les métiers. L'orientation des élèves est terriblement importante.
État de catastrophe naturelle et fissurations de maisons
M. Jean-Pierre Decool . - Avec l'été approchent des épisodes de forte chaleur. Appréciées, elles peuvent être aussi redoutées. Les maires du Nord, à l'été 2018, ont reçu de nombreuses plaintes pour des maisons fissurées. Ils ont passé beaucoup de temps pour obtenir pour leurs communes une reconnaissance de catastrophe naturelle. Ces maires et leurs concitoyens ont déposé des demandes auprès des compagnies d'assurance. Peu d'entre eux soupçonnaient que ces fortes chaleurs auraient tant de conséquences sur leurs bâtiments.
En parant au plus pressé, les occupants des édifices sinistrés ont dressé des poutres de soutènement pour consolider les façades, et installé des bastaings pour renforcer les murs. J'ai à l'esprit le montant d'un devis s'élevant à 57 000 euros pour remettre en état une maison de taille modeste dans une commune rurale.
Sans assurance, c'est la certitude de devoir renoncer au patrimoine constitué durant une vie de labeur. Certaines maisons devront être reconstruites alors même qu'elles n'ont pas été payées totalement. Pour bénéficier des assurances, la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle est nécessaire.
Les communes qui ont connu l'été dernier un épisode de sécheresse bénéficieront-elles de l'état de catastrophe naturelle ? Quand seront-elles fixées sur leur sort ? Nos concitoyens, et les élus locaux qui les accompagnent, attendent beaucoup de cette procédure. Ils attendent d'autant plus que celle-ci dure trop longtemps, dans des conditions nébuleuses, qu'il conviendrait de rendre plus claires et plus transparentes.
Votre collègue secrétaire d'État auprès du Ministre de la transition écologique et solidaire, Emmanuelle Wargon, répondait il y a quelques semaines à une question orale de notre collègue Serge Babary. Elle disait que « la simplification de la procédure aboutira dans les prochaines semaines » et que l'un des objectifs était de « rendre la mise en oeuvre plus lisible ». Où en sommes-nous de cette réflexion ?
M. Laurent Nunez, secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur . - Un épisode de sécheresse-réhydratation des sols a touché le territoire métropolitain au cours du second semestre 2018, notamment dans le nord-est du pays. Au 1er mars 2019, plus de 3 300 demandes communales de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle au titre de la sécheresse 2018 ont été déposées dans 68 préfectures, notamment dans le quart nord-est du pays.
Pour décider de la reconnaissance d'une commune en état de catastrophe naturelle, l'autorité administrative se prononce sur l'intensité anormale de l'agent naturel à l'origine des dégâts et non sur l'ampleur des dégâts. Ensuite, compte tenu de la cinétique lente qui caractérise l'aléa sécheresse et des connaissances scientifiques disponibles à ce jour, deux critères cumulatifs caractérisent son intensité : une condition géotechnique et une condition de nature météorologique.
Ce modèle permet à l'autorité administrative d'instruire les demandes sur le fondement de données techniques présentant les mêmes qualités et de s'assurer d'une égalité de traitement des dossiers.
L'instruction effective des dossiers déposés en 2018 interviendra au cours du printemps 2019, Météo-France et les services de l'État ayant été sensibilisés à la nécessité de traiter dans des délais raisonnables ces demandes.
S'agissant de la simplification de la procédure, elle aboutira dans les prochaines semaines : les nouveaux critères seront d'ailleurs utilisés dès cette année pour analyser les demandes au titre de l'épisode de sécheresse-réhydratation des sols de 2018. Ces travaux poursuivent deux objectifs : la prise en compte de l'amélioration des connaissances scientifiques relatives au phénomène, notamment les modalités techniques de traitement des données météorologiques permettant d'établir le niveau d'humidité des sols superficiels par Météo-France ; et rendre plus lisibles pour les responsables communaux et les sinistrés les critères mis en oeuvre.
Cette réforme améliorera la qualité des critères tout en les rendant plus simples et compréhensibles.
M. Jean-Pierre Decool. - Merci de cette simplification. Pour plus de transparence et de clarté, les décisions devraient être prises au niveau départemental.
Attribution à Saint-Martin et à Saint-Barthélemy d'une préfecture de plein exercice
M. Guillaume Arnell . - À la suite de la réforme de 2007, Saint-Martin et Saint-Barthélemy sont devenues des collectivités d'outre-mer au sens de l'article 74 de la Constitution de 1958, la sous-préfecture de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy est devenue préfecture, placée depuis 2009 sous la responsabilité d'un préfet délégué, lui-même rattaché au préfet de Guadeloupe.
Mais, malgré cette transformation, les moyens humains, financiers et administratifs sont restés ceux de la sous-préfecture, voire même ont régressés. Les services de l'État qui préexistaient ont été rattachés au préfet, par le biais de conventions, sans augmentation de moyens et la préfecture n'a bénéficié d'aucun des moyens budgétaires normalement affectés à son nouveau statut.
Les préfets délégués successifs ont fait valoir, à plusieurs reprises, l'étroitesse des moyens mis à leur disposition et les risques encourus : pas de cabinet du préfet, pas de cellule communication, un contrôle de légalité difficile à exercer, des services déconcentrés insuffisants notamment sur les questions de santé, d'urbanisme et d'environnement.
Suite aux demandes réitérées par les élus, certaines évolutions ont été mises en oeuvre, dont en 2016, la modification du poste de secrétaire général de la préfecture, assuré par un membre du corps préfectoral. Pendant huit ans le préfet avait été le seul membre du corps préfectoral.
L'ouragan Irma a démontré les limites de la préfecture déléguée de Saint-Martin et Saint-Barthélemy, tant dans le domaine de la gestion de l'anticipation de la crise, qu'en situation post-crise.
Notre situation institutionnelle avec un préfet délégué à compétence territoriale est unique en France. Ainsi, Saint-Pierre-et-Miquelon - 6 000 habitants - et Wallis et Futuna - 14 000 habitants - sont des préfectures de plein exercice et ont à leur tête un préfet depuis de nombreuses années.
Or Saint-Barthélemy et Saint-Martin, avec respectivement 10 000 et 35 000 habitants, reçoivent en haute saison touristique plus de 100 000 personnes pour la première et plus de 250 000 pour la seconde.
En outre, l'île de Saint-Martin étant binationale, le préfet est confronté à des problèmes qui ne sont pas exactement celles de la Guadeloupe : immigration clandestine, travail clandestin, fraudes multiples. Alors même que les législations et réglementations de Sint-Maarten rendent l'action des services d'État chargés de la sécurité particulièrement délicate.
Pour toutes ces raisons, l'État doit faire évoluer ses services et modifier les décrets de 2009 pour que la préfecture de Saint-Martin et Saint-Barthélemy ne soit plus une préfecture « déléguée » et que le préfet soit de plein exercice.
M. Laurent Nunez, secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur . - À la suite des évolutions institutionnelles qu'ont connues ces collectivités en 2007, l'organisation administrative des services de l'État a fait l'objet d'une adaptation significative visant à renforcer leur autonomie vis-à-vis de la préfecture de Guadeloupe, sans pour autant renoncer à son appui. Cette adaptation s'est traduite au plan juridique par la transformation de la sous-préfecture des îles-du-Nord en une préfecture regroupant les antennes des services déconcentrés, administrée par un préfet agissant par délégation du préfet de la Guadeloupe. Cette transformation et l'organisation actuelle résultent de deux décrets du 24 juillet 2009 : celui relatif aux pouvoirs du représentant de l'État, à l'organisation et à l'action des services de l'État à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin et celui relatif aux services de la préfecture de Saint-Barthélemy et Saint-Martin.
Dans ce cadre, bien que le préfet délégué agisse par délégation du préfet de la Guadeloupe, il assure la direction effective des services. L'organisation en place répond avant tout à une logique opérationnelle : le préfet délégué dispose des services de la préfecture de Saint-Barthélemy et Saint-Martin, conçue comme une structure souple et intégrée, disposant de moyens propres, mais capable de mobiliser les services de l'État en Guadeloupe pour certaines missions exigeant une expertise ou une compétence rare. Par ailleurs, la circulaire du Premier ministre du 24 juillet 2018 incite les préfets de région à développer la mutualisation et le regroupement de services. Le dédoublement des services à Saint-Barthélemy et Saint-Martin irait à l'encontre de l'objectif de rationalisation recherché et la proximité des deux territoires avec la Guadeloupe ne plaide pas en ce sens.
Enfin, l'organisation actuelle pour l'accompagnement des populations et des collectivités prodiguée par l'État donne satisfaction. Elle a ainsi permis, à la suite de l'ouragan Irma, de renforcer les moyens dédiés à la reconstruction, mais aussi à la prévention et à la gestion d'une crise éventuelle. Elle a également permis la reconstruction des locaux hébergeant les services de la préfecture de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin.
Nous serons très attentifs au renforcement de ces moyens si cela s'avérait nécessaire.
Effectifs de police à Aix-en-Provence
Mme Sophie Joissains . - Les effectifs de police sur la ville d'Aix-en-Provence - que vous connaissez bien - travaillent en flux tendus depuis plusieurs années, et sont aujourd'hui confrontés à de lourdes augmentations de charges.
La capacité de la prison d'Aix-Luynes vient d'être doublée : prête à accueillir 2 000 détenus, elle est devenue le troisième centre pénitentiaire de France.
La cour d'appel d'Aix-en-Provence, deuxième de France, a dû ouvrir une quatrième session d'assises en urgence.
Ces charges sont exceptionnelles et se traduisent par une mobilisation croissante des effectifs de police, ce qui diminue d'autant le nombre d'agents exerçant des missions de voie publique. Le chiffre des cambriolages augmente et connaît un pic jamais vu ces dernières semaines.
Chaque jour ouvré, la CSP d'Aix-en-Provence mobilise 35 fonctionnaires pour assurer les différentes charges judiciaires. Une vingtaine de postes sont nécessaires pour l'extraction et la réintégration des détenus en maison d'arrêt, une dizaine en police d'audience, ainsi que six officiers de police judiciaire spécialisés dans le contentieux lié à la maison d'arrêt.
L'augmentation des charges liées à la prison de Luynes se traduit aussi par une explosion du nombre des transferts sanitaires et gardes de détenus à l'hôpital. Il est maintenant courant que deux détenus soient gardés simultanément avec 4 à 6 agents mobilisés en permanence.
Des renforts substantiels sont cruciaux pour assumer la sécurité judiciaire, gérer correctement le quotidien du centre pénitentiaire et assurer normalement les missions sur la voie publique ; bref, la sécurité quotidienne des habitants.
Ainsi, il n'y a pas aujourd'hui plus de policiers sur la voie publique aixoise que sur celle de Salon, soit seulement un tiers des habitants d'Aix.
J'alerte le ministère depuis juin 2018, des dysfonctionnements lourds sont à craindre.
Cette demande d'effectifs supplémentaires est urgente. Qu'avez-vous prévu de faire ?
M. Laurent Nunez, secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur . - À Aix, comme ailleurs, les moyens doivent tenir compte des charges pesant sur les services - par exemple, la proximité d'un centre pénitentiaire.
Ainsi, l'effectif cible fixé pour les services territoriaux de la sécurité publique a pris en compte, lors des mutations de 2018, l'extension du centre pénitentiaire d'Aix-Luynes. Ces contraintes s'accroissent depuis l'ouverture en janvier 2019 d'une quatrième section de la cour d'assises et du doublement des capacités d'accueil du centre pénitentiaire l'année dernière. Cette charge de travail judiciaire impose régulièrement de mobiliser diverses unités du commissariat, au détriment des capacités opérationnelles de voie publique.
Face à cette problématique, nous agissons pour permettre aux forces de l'ordre de se recentrer sur leurs missions prioritaires. Nous intensifions notamment les efforts pour supprimer les tâches indues ou encore alléger la procédure pénale. Les ministères de l'intérieur et de la justice travaillent ensemble pour une répartition plus rationnelle des tâches. S'agissant d'Aix-en-Provence, la situation va s'améliorer dans les mois à venir. Les missions de transfèrement, de garde dans les locaux des juridictions et de présentation de détenus aux magistrats seront reprises par les services du ministère de la justice, ce qui permettra de redéployer des policiers sur la voie publique. Toutefois, les services de police d'Aix continueront d'assurer certaines tâches liées à la cour d'assises et au centre pénitentiaire. La question des effectifs va donc conserver toute son importance.
À ce jour, cette circonscription bénéficie d'un nombre de gradés et de gardiens de la paix conforme à son effectif de référence, soit 232 agents du corps d'encadrement et d'application. C'est 10 de plus que fin 2016. Prise dans son ensemble, cette circonscription de police dispose d'un effectif de 313 agents, contre 306 fin 2016.
Des efforts restent certainement nécessaires et nous veillerons, dans le cadre des mouvements de mutation 2019, aux renforts nécessaires à la police nationale pour faire face aux sujétions que font peser sur elle le fonctionnement des juridictions et du centre pénitentiaire. Je puis vous assurer de mon attention toute particulière sur cette circonscription que, comme vous l'avez rappelé, je connais bien.
Mme Sophie Joissains. - Merci. Ma demande est déjà ancienne. Les cambriolages ne cessent de croître. Il faut davantage de policiers sur le terrain, notamment dans les quartiers prioritaires.
Risque de tsunami et alerte descendante
M. Roland Courteau . - À la suite des recommandations que j'avais formulées dans le cadre de l'Opecst sur le risque de tsunami sur les côtés françaises, le Centre national d'alerte aux tsunamis (Cenalt) est opérationnel depuis 2012 et couvre la Méditerranée occidentale et l'Atlantique Nord-Est.
L'alerte montante vers les autorités en charge de la sécurité civile fonctionne bien, mais elle est insuffisante pour ce qui est de l'alerte descendante vers les populations, les communes et les préfectures. Les délais de transmission de l'information sont en effet trop longs, d'autant que la multiplication des intermédiaires aggrave la situation.
Une autre fragilité concerne la sensibilisation et l'éducation des populations les plus exposées, en cas d'alerte... Comment les alerter ? Haut-parleurs, panneaux lumineux ? La ville de Cannes s'est équipée, mais c'est un cas unique sur notre littoral. L'État disposerait de 5 000 sirènes pour couvrir les plages PACA et Languedoc-Roussillon. Pourquoi attendre ?
Les Antilles, Mayotte et La Réunion paraissent démunies en matière d'alerte. Le Cenalt devrait les couvrir, d'autant que la dépense se monterait à quelques milliers d'euros.
Nos concitoyens acceptent de moins en moins de ne pas être protégés alors que des dispositifs d'alerte pourraient sauver des vies humaines.
M. Laurent Nunez, secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur . - Exposée au risque tsunami, la France a mis en place des mécanismes d'alerte et d'anticipation qu'il convient d'améliorer constamment. La cinétique très rapide du phénomène tsunami nécessite donc une réaction tout aussi rapide de la chaîne d'alerte qui implique le centre national d'alerte aux tsunamis, le centre opérationnel de gestion interministérielle des crises, les services déconcentrés de l'État, les services d'incendie et de secours ainsi que les collectivités territoriales.
Pour tester et améliorer l'efficacité de nos procédures, des exercices sont régulièrement organisés : quinze depuis mars 2017. La totalité des messages d'alerte émis par le Cenalt a été relayée par le Cogic en moins de dix minutes, à la seule exception de l'exercice du 5 novembre 2018 au cours duquel l'envoi du message d'alerte est intervenu 30 minutes après.
M. Roland Courteau. - C'est cela qui est grave !
M. Laurent Nunez, secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur. - La récurrence de ces exercices doit précisément permettre d'identifier les points de procédure à améliorer. II semble néanmoins nécessaire de raccourcir encore le délai entre l'alerte montante du Cenalt vers le Cogic et l'alerte descendante vers tous les acteurs. Une réflexion collective est ainsi engagée afin d'optimiser l'alerte descendante.
L'extension des missions du Cenalt à l'alerte descendante est inscrite à l'ordre du jour de son prochain comité de pilotage prévu ce mois-ci.
S'agissant des moyens d'alerte des populations, 1 865 sirènes sont installées et raccordées au logiciel de déclenchement, soit près de 75 % des 2 500 sirènes cibles au titre de la première phase de déploiement qui s'achèvera en 2021.
L'alerte est multicanale et fait intervenir les médias, les collectivités territoriales, les partenaires et, à l'avenir, la téléphonie mobile. Nous développons également des mesures de sensibilisation et d'information des populations : un guide pédagogique, relatif à l'alerte et aux mesures de protection en cas de tsunami, a ainsi été diffusé aux préfectures le 22 février 2019.
Enfin, s'agissant de l'opportunité d'étendre les missions du Cenalt à l'outre-mer, je précise que la mission d'alerte aux tsunamis outre-mer est déjà assurée par des systèmes d'alerte internationaux.
M. Roland Courteau. - Nos dix millions de kilomètres carrés de zones économiques exclusives (ZEE) disent notre vulnérabilité et exigent d'améliorer notre système d'alerte descendante. Je ferai part de votre réponse à l'Opecst. Le phénomène est rare, mais dévastateur. Gare, quand il survient !
Activités du parti « Égalité et justice »
M. Pierre Ouzoulias . - Très récemment, à propos du génocide des Arméniens, le président de la République de Turquie, M. Erdogan déclarait : « Le déplacement en Anatolie orientale des gangs arméniens et de leurs partisans, qui ont massacré le peuple musulman, y compris les femmes et les enfants, est la mesure la plus raisonnable qui puisse être prise dans une telle période ». Le Parlement de la République française, le Parlement européen et de nombreux parlements à travers le monde ont reconnu officiellement le génocide des Arméniens.
En France, le Parti qui se donne pour nom Égalité et justice, relais officieux du Parti de la justice et du développement (AKP) du président Erdogan, défend au grand jour la négation du génocide arménien et j'ai déjà saisi votre ministère sur ces actions odieuses et condamnables. Investi dans les dernières élections législatives et maintenant dans les futures élections municipales, le Parti Égalité et justice demande aussi officiellement un moratoire sur la laïcité, soit la suspension d'un des principes constitutifs de notre République. En cela, il développe en France le programme de son inspirateur turc qui promeut en Turquie et partout en Europe un islam politique rétrograde, anti-laïque et anti-occidental.
Plusieurs membres du Gouvernement avaient dénoncé les ingérences d'un grand pays européen dans le déroulement de la campagne présidentielle. À quelques mois du scrutin de mars 2020, quelles mesures entendez-vous prendre pour que le Parti Égalité et justice ne concoure pas aux tentatives d'immixtion du gouvernement turc et du Parti de la justice et du développement dans les futures élections municipales françaises ?
M. Laurent Nunez, secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur . - Je partage votre crainte quant à toute ingérence étrangère dans notre système démocratique lors des prochaines élections municipales. Toutefois, en matière électorale, plusieurs principes juridiques s'imposent à tous, et en premier lieu aux pouvoirs publics. Tout d'abord, le pluralisme des courants de pensée et d'opinion est le corollaire de la démocratie, et cette notion a été consacrée comme objectif à valeur constitutionnelle par le Conseil constitutionnel avant même son inscription à l'article 4 de la Constitution par la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008.
Ensuite, le principe en matière électorale est la liberté de se porter candidat. Un citoyen, dès lors qu'il remplit les conditions pour se présenter à l'élection, ne peut être déclaré inéligible en l'absence de texte. L'exigence démocratique impliquant une très grande liberté de candidature, l'inéligibilité s'apprécie strictement : elle n'existe pas sans texte pas plus qu'elle ne saurait exister au-delà des textes applicables. Ce principe trouve sa mise en oeuvre lors de la candidature. Pour les élections municipales, les conditions d'éligibilité se résument ainsi : avoir 18 ans révolus, justifier d'une attache avec la commune où le candidat se présente et n'être pas privé de toute capacité électorale. En outre, rien n'impose au candidat lors du dépôt de sa candidature, de mentionner le soutien qu'il reçoit d'une formation politique, quelle qu'elle soit, et s'il le fait, cette affirmation ne peut justifier à elle seule un refus d'enregistrer une candidature. Une fois l'élection acquise, dans le cadre d'un contentieux électoral, l'éligibilité peut être contestée devant le juge administratif.
Le Gouvernement est attaché à notre système démocratique et il veillera à ce que ses principes soient préservés.
Mais nous ne sommes pas naïfs : nous savons que des risques d'ingérences étrangères existent. Aussi, c'est la mission du Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale et des services de renseignement intérieur de détecter puis de répondre aux ingérences étrangères, quelle que soit leur nature. Vous connaissez notre détermination pour détecter ces ingérences.
M. Pierre Ouzoulias. - Merci. J'entends vos engagements. Je continuerai à défendre la laïcité et à rendre honneur à la mémoire des Arméniens victimes du génocide turc.
Titres d'identité
M. Olivier Paccaud . - S'il y a bien une demande qui rythme nos campagnes, c'est la volonté d'un retour des services publics de proximité, c'est-à-dire des services à peu de distance, proche dans le temps. Or tel n'est pas le cas pour la délivrance des titres d'identité.
Il n'y a pas si longtemps, chaque citoyen pouvait effectuer des démarches dans sa mairie. Désormais, dans l'Oise, ce service est concentré dans 27 communes sur 679. Dès lors, ce service bloque par son volume et ses délais, coûte cher aux mairies d'accueil et occasionne une dépense en temps comme en carburant pour les Français qui doivent se déplacer.
Cette mesure n'aura donc fait que des mécontents. Les élus locaux voient un service leur échapper alors qu'ils n'avaient rien demandé. Les communes équipées reçoivent certes, une compensation pouvant atteindre jusqu'à 12 130 euros annuels, mais cette somme s'avère nettement inférieure au coût réel de la prestation imposée. Tous les élus évoquent une dépense de fonctionnement supérieure à 30 000 euros par an ! Dans quasiment tous les cas, la mairie doit déléguer au moins un agent à temps plein pour assumer cette mission.
La non-compensation réelle et totale des frais supportés par une collectivité consécutifs à une décision unilatérale de l'État ne peut qu'alimenter le procès de son désengagement territorial.
Cette technologie, dont la vertu serait de sécuriser les documents, n'est vécue ni comme un atout, ni comme une simplification, mais bien comme une contrainte.
Au défaut de réattribuer à chaque municipalité le traitement des dossiers de renouvellement des titres d'identité, l'État envisage-t-il de dédommager de façon plus équitable les communes réquisitionnées comme station d'enregistrement ?
M. Laurent Nunez, secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur . - La réforme de la délivrance des cartes nationales d'identité a prévu la dématérialisation des échanges entre les mairies et les centres d'expertise et de ressources titres qui instruisent les demandes.
Le recueil d'informations biométriques pour l'établissement du titre impose leur transmission par des lignes dédiées et sécurisées, installées dans les communes équipées en dispositifs de recueil (DR).
La sensibilité des données à caractère personnel et la nécessité de prévenir les tentatives de falsification des titres ont imposé de restreindre le nombre des dispositifs ainsi que le nombre des personnels habilités à les traiter.
Dans ce cadre, 3 526 DR ont été déployés et chaque année, environ 250 stations de plus le sont. En concertation avec les élus locaux, les préfets ont décidé de l'attribution entre les communes de leurs départements de ces nouveaux dispositifs, en s'assurant qu'elle s'accompagne d'une offre de service pérenne à tous les usagers du département.
Ces matériels et les réseaux sécurisés auxquels ils sont raccordés ont un coût. L'équipement et les frais d'installation d'une station représentent environ 10 000 euros, tandis que le coût de fonctionnement est évalué à 16 000 euros par an, compte non tenu du coût des personnels qui les opèrent.
S'agissant du délai de délivrance des titres, les mairies dotées de DR doivent s'engager à proposer une bonne qualité de service.
Dans l'Oise, le taux d'utilisation des 46 dispositifs de recueil implantés n'est, pour l'année 2018, que de 55 % des capacités nominales, pour un délai moyen de rendez-vous de 22 jours, identique au délai moyen national.
Le Gouvernement continuera à optimiser le réseau de DR en 2019 en examinant, en collaboration avec les maires, les sites qui pourraient justifier d'être équipés.
Le dispositif prévoit aussi des pré-enregistrements en ligne et des dispositifs mobiles peuvent être déployés en mairie. Enfin, chaque préfecture et sous-préfecture peuvent venir en aide aux usagers qui en font la demande.
M. Olivier Paccaud. - Merci pour cette réponse technique. À Beauvais, il m'a fallu trois mois et non 22 jours ; j'en ai moi-même fait l'expérience. Et vous n'avez pas répondu, par ailleurs, sur la compensation des coûts aux communes.
Impact du Brexit sur la flotte de pêche normande
M. Didier Marie . - Le Brexit inquiète la filière pêche. Sans accord, les conséquences seraient terribles à Cherbourg, Grandville, Le Havre, Dieppe, Le Tréport.
Madame la ministre, comment le Gouvernement entend-il servir les calendriers et soutenir la filière ?
Mme Amélie de Montchalin, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargée des affaires européennes . - Le Gouvernement a une conscience aigüe des craintes du secteur. Près de 500 navires, dont 180 navires normands employant plus de 1 200 marins, sont concernés, qui dépendent de l'accès aux eaux britanniques. En Normandie, 10 % des navires en dépendent à plus de 30 %. À la criée de Cherbourg, 54 % des prises proviennent des eaux britanniques. La filière entière est concernée, outre la seule activité de pêche.
D'où notre détermination à obtenir un Brexit ordonné pour maintenir l'accès aux eaux britanniques jusqu'au 31 décembre 2020 ou 2022.
Le 10 avril dernier, les chefs d'État et de Gouvernement ont donné une nouvelle échéance à octobre 2019, aux Britanniques.
Nous préparons la négociation d'un nouvel accord de pêche pour réévaluer les quotas, multilatéral.
Avec Didier Guillaume, nous travaillons activement pour protéger les pêcheurs.
M. Didier Marie. - La filière est fragile : aléas climatiques, coût du carburant... au point que nombre d'artisans pêcheurs ont dû cesser leur activité. Merci de votre détermination.
Malaise des personnels de l'hôpital public
M. Bernard Fournier . - Je veux attirer l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé concernant le malaise insupportable des personnels de l'hôpital public. Si la concertation lancée à l'occasion du plan « ma santé 2022 » a fait naître beaucoup d'espoir auprès des hospitaliers, des sujets majeurs ont en revanche été éludés. La révision indispensable de certains périmètres de groupements hospitaliers de territoire n'est pas abordée. La réorganisation impérative des organismes d'État est totalement absente. L'impulsion attendue pour répondre à l'urgence, tant en termes de choc d'attractivité médicale pour les carrières hospitalières que d'investissements pour la transformation, n'a pas été engagée. Mais surtout, qu'est-il prévu à court terme en réponse au malaise hospitalier actuel ? Visiblement rien... La résignation des personnels se transforme progressivement en colère, tant ils sont attachés à leurs valeurs qui se trouvent bafouées par la désintégration de l'hôpital public vécue au quotidien. Un plan d'urgence de mesures transitoires doit être mis en oeuvre pour sauver l'hôpital public, qui ne peut plus répondre aux carences du système avec de moins en moins de moyens. La lutte contre les gaspillages doit aussi débuter sans attendre. Celle-ci doit s'appuyer sur une analyse de la pertinence des pratiques médicales et soignantes. Il faut envoyer un signal politique fort et surtout concret à l'ensemble des professionnels hospitaliers de plus en plus exaspérés, avant d'atteindre le point de non-retour. Quelles sont les intentions du Gouvernement sur ces enjeux majeurs pour l'avenir de l'hôpital public et de notre système de santé ?
Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé . - Le Gouvernement a pris des mesures importantes pour répondre aux besoins et aux tensions que vit le personnel hospitalier et qui ne datent pas d'aujourd'hui.
Concrètement, nous avons augmenté les tarifs hospitaliers, pour la première fois depuis dix ans, et attribué des moyens pérennes notamment aux services de psychiatrie. La stratégie « Ma santé 2022 » et le projet de loi Santé comportent de nombreuses mesures pour mieux valoriser la qualité dans les soins ; développer les activités hospitalières de proximité ; mieux accompagner les professionnels de santé tout au long de leur carrière.
Une stratégie nationale de qualité de vie au travail a également été lancée, avec un observatoire des bonnes pratiques et la mise en oeuvre d'un réseau de médiateurs.
Un groupe de travail sera consacré à l'encadrement et à la valorisation des équipes. Certains métiers particulièrement exposés, comme les aides-soignantes, seront valorisés. Des actions locales seront mises en oeuvre dans le cadre des clusters sanitaires et médico-sociaux visant à l'amélioration de la qualité de vie au travail par des dispositifs simples et efficaces pensés avec les équipes de terrain.
Notre engagement est total pour accentuer en ce sens la stratégie « Ma santé 2022 ».
M. Bernard Fournier. - Merci. Nous serons très attentifs aux actions que vous proposerez.
Avenir de la phagothérapie
M. Yannick Vaugrenard . - La phagothérapie a été inventée à Paris il y a cent ans. Elle consiste en l'utilisation de phages - virus capables de tuer des bactéries multirésistantes - pour le traitement d'infections bactériennes, mais a quasiment disparu en France en raison de l'avènement des antibiotiques, jugés plus pratiques et plus efficaces. Pourtant, dès que l'usage des antibiotiques s'est répandu dans les années 1960 à 1980, les praticiens et les chercheurs ont constaté que les bactéries peuvent se transformer de manière à pouvoir survivre à l'assaut d'un ou de plusieurs antibiotiques.
Avec 125 000 infections par an et 5 500 décès, la France est le sixième pays européen le plus affecté après l'Italie, la Grèce, la Roumanie, le Portugal et Chypre.
Aujourd'hui, des patients se retrouvent en impasse thérapeutique à cause d'infections résistantes.
Or la phagothérapie peut être utilisée pour de nombreuses pathologies comme les infections urinaires, les staphylocoques dorés, les maladies nosocomiales...
Un premier comité scientifique spécialisé temporaire (CSST) « phagothérapie » avait déjà été réuni à l'Agence nationale de sécurité des médicaments et des produits de santé (ANSM) en mars 2016. Il avait dressé un état des lieux des impasses thérapeutiques et définit un cadre de mise à disposition précoce des bactériophages pour des utilisations compassionnelles, c'est-à-dire pour une médecine personnalisée. Mais celle-ci était beaucoup trop restrictive.
En novembre 2018, le Gouvernement a annoncé le lancement d'un programme prioritaire de recherche de 40 millions d'euros pour lutter contre la résistance aux antibiotiques et en février 2019, l'ANSM a annoncé la création d'un nouveau CSST « phagothérapie - retour d'expérience et perspectives ». Si ces initiatives vont dans le bon sens, des inquiétudes demeurent quant à la conclusion de ces travaux.
Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé . - La résistance aux antibiotiques représente un enjeu majeur de santé publique. La phagothérapie pourrait se montrer utile, mais ses produits ne disposent pas d'autorisation de mise sur le marché.
Depuis 2016, quinze patients en ont bénéficié, à titre compassionnel, dans un établissement de santé et avec un accompagnement personnel de l'ANSM. La sécurité des bactériophages doit encore être démontrée. Le CSST « phagothérapie » y travaille. Des essais cliniques et des études de recherche seront prochainement lancés en France, sur de nouvelles préparations de bactériophages anti-Pseudomonas et anti-Staphylococcus, qui devraient être mises à disposition par le biais d'autorisation temporaire d'utilisation (ATU), nominatives également courant 2019.
L'équipe de l'hôpital Percy a réalisé une première mondiale pour l'évaluation des bactériophages, grâce aux financements de l'Union européenne.
Il est essentiel de mettre en place un réseau de recherche et d'expertise ainsi que de production répondant aux « bonnes pratiques de fabrication » (BPF) afin de permettre une collaboration européenne et internationale sur ce défi de santé.
En attendant les conclusions définitives du CSST du 21 mars 2019, la France reste porteuse de cette recherche de pointe.
M. le président. - Je vous invite, madame la ministre, à veiller au respect du temps imparti dans vos prochaines réponses.
M. Yannick Vaugrenard. - Merci pour votre réponse précise. Il est urgent de développer la recherche dans ce domaine pour lutter contre la résistance aux antibiotiques. J'aimerais être destinataire des conclusions du CSST.
Avenir de la protection maternelle et infantile
Mme Laure Darcos . - Par la voie d'une disposition - à laquelle le Sénat s'était fermement opposé - introduite dans la loi pour un État au service d'une société de confiance, le Gouvernement s'apprête à bousculer - j'utilise ce terme à dessein - par ordonnance les règles encadrant la création et le fonctionnement des modes d'accueil de la petite enfance.
Il a en effet prévu qu'une des autorités concernées par la petite enfance puisse prendre tout ou partie des actes nécessaires à l'implantation, au développement, au maintien et au financement des modes d'accueil du jeune enfant. Bref, il s'agira de désigner un chef de file, le cas échéant l'organisme débiteur des prestations familiales. De nombreux élus de mon département, l'Essonne, m'ont fait part de leur scepticisme, voire de leur défiance, vis-à-vis d'un guichet administratif unique, dont la mise en oeuvre figurera parmi les missions de ce chef de file, et qui déresponsabilisera les administrations concernées en leur retirant leur pouvoir de décision.
Si la question de la simplification des démarches mérite d'être posée, il y a lieu, toutefois, de s'interroger sur l'articulation de cette réforme et des maisons de service au public, baptisées France Service par le président de la République. Quel sera le rôle futur des départements, notamment pour l'agrément et le contrôle des établissements d'accueil du jeune enfant ? Comment sécuriser les responsabilités, pénales en particulier, portées par le président du conseil départemental et le médecin responsable du service départemental de protection maternelle et infantile ?
Le Gouvernement peut-il nous apporter des assurances ?
Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé . - En effet, par l'article 50 de la loi du 10 août 2018, le Parlement a autorisé le Gouvernement à prendre par ordonnance des mesures de simplification et d'assouplissement du cadre normatif des modes d'accueil du jeune enfant. L'objectif est de stimuler le développement de l'offre d'accueil, en dépit de la multiplicité des intervenants. Le Gouvernement a prévu d'expérimenter le guichet unique, afin de simplifier les procédures. Les porteurs de projet déposeront leur dossier auprès d'une seule autorité compétente.
La concertation préalable qui s'est tenue entre septembre 2018 et janvier 2019 visait une simplification et un renforcement de la qualité de l'accueil. Une consultation technique déterminera les autorités organisatrices des guichets uniques et territoires pilotes.
Par ailleurs, une mission a été confiée à la députée Michèle Peyron sur les politiques de protection maternelle et infantile en juillet 2018. Les services de PMI seront confortés dans leur rôle de prévention, et leurs missions, par rapport à celles des CAF, seront clarifiées.
Mme Laure Darcos. - Nous craignons que les CAF ne se déplacent pas sur le terrain, comme le font les bus de PMI qui sillonnent le département, en particulier le sud de l'Essonne. Les familles et les Associations des assistantes maternelles doivent être rassurées.
Prise en charge des détresses respiratoires par les médecins généralistes
M. Pierre Médevielle . - Les bronchodilatateurs pour inhalation sont des médicaments à prescription restreinte, réservée aux médecins spécialistes en pédiatrie et pneumologie.
Dans les territoires ruraux, dont certains relèvent des zones d'action prioritaires dans le zonage arrêté par l'Agence régionale de santé, mais aussi en situation d'urgence que ce soit dans les territoires ruraux ou urbains, certains médecins généralistes sont confrontés à la prise en charge des détresses respiratoires. Or l'application des textes réglementaires leur interdit la prescription de ce type de bronchodilatateurs. Quand on connaît l'efficacité et l'importance de l'aérosolthérapie, et la difficulté d'accès aux soins dans les déserts médicaux, cette procédure n'est pas adaptée.
Une évolution de la réglementation régissant la prescription de l'aérosolthérapie est-elle envisageable afin de permettre aux médecins généralistes de prendre en charge des patients en détresse respiratoire ?
Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé . - La prescription de ces médicaments est certes restreinte mais l'AMM autorise une utilisation en urgence par tout médecin intervenant en situation d'urgence ou dans le cas d'une structure d'assistance médicale mobile ou de rapatriement sanitaire, ainsi que par un médecin généraliste qui dispose de ces médicaments dans son cabinet dans sa trousse d'urgence.
M. Pierre Médevielle. - Les aérosols sont particulièrement efficaces et préférables aux injections, de telle sorte que de nombreux médecins généralistes, de mon territoire mais aussi au-delà, souhaiteraient pouvoir les prescrire.
Stages des jeunes élèves de l'enseignement agricole
Mme Dominique Vérien . - La loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel a modifié l'article L. 4153-1 du code du travail afin de permettre aux élèves de l'enseignement général durant les deux derniers niveaux de l'enseignement des collèges d'effectuer des stages d'observation dans des entreprises.
Avant cette réforme, la loi prévoyait déjà la possibilité pour les élèves d'effectuer un stage au collège, mais l'ancienne rédaction de l'article du code du travail limitait cette possibilité aux enfants de plus de 14 ans. La nouvelle rédaction ne prenant pas en considération l'âge mais le niveau scolaire de l'élève, elle l'ouvre désormais à des enfants de moins de 14 ans.
Cette mesure, très intéressante, permet aux élèves de se confronter à la réalité de la vie active et de s'orienter le plus tôt possible. Mais il est regrettable qu'elle ne s'applique qu'à l'enseignement général. Les jeunes de moins de 14 ans des maisons familiales rurales, par exemple, en sont privés. Ils pourraient intégrer, par ce biais, des organismes plus adaptés à leur projet professionnel.
Le Gouvernement compte-t-il y remédier ?
Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé . - Je vous prie d'excuser l'absence de M. Didier Guillaume, retenu au Conseil européen. La réforme ne s'applique pas dans l'enseignement agricole pour favoriser la santé et la sécurité au travail des jeunes dans le secteur agricole. Le nombre d'accidents a baissé de 40 % entre 2002 et 2012 chez les jeunes de moins de 25 ans dans ce secteur.
Cependant, les élèves de moins de 14 ans dans l'enseignement agricole peuvent réaliser des visites d'observation pour découvrir l'environnement économique et professionnel en lien avec les référentiels de formations et dans le cadre de sorties scolaires. Il n'est pas envisagé de leur permettre de réaliser des stages en milieu professionnel.
Mme Dominique Vérien. - Votre réponse reflète une méconnaissance des réalités de l'enseignement agricole qui ne se limite pas aux travaux agricoles ! On demande parfois à des élèves qui pourraient entrer en maison familiale rurale de redoubler dans une école qui ne leur convient pas avant de pouvoir faire un stage dans le seul secteur qui les intéresse.
Ordonnance sur la coopération agricole
Mme Christine Lanfranchi Dorgal . - Dans le Var, on compte 72 coopératives, unions et sociétés d'intérêt collectif agricole (SICA) et 72 coopératives d'utilisation du matériel agricole (CUMA) dans cinq filières. Elles réalisent 338 millions d'euros de chiffre d'affaires et emploient 1 080 salariés équivalents temps plein.
Au niveau national, trois agriculteurs sur quatre adhèrent au moins à une coopérative. Cela montre la confiance qu'ils placent dans ce modèle économique. En la gouvernant et en étant actif en son sein, ils se protègent mais protègent aussi les plus fragiles d'entre eux, tout en maintenant une ruralité vivante sur tous les territoires.
Je m'inquiète de la décision du Gouvernement de changer ce modèle, en assimilant le contrat coopératif à un contrat commercial. En agissant ainsi, on nie les valeurs, l'esprit et les fondements des coopératives. Les « financiariser » revient à rompre le sain équilibre entre l'associé coopérateur et sa coopérative.
Pourquoi vouloir à tout prix changer ce qui fonctionne et ce qui fédère ?
Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé . - La loi EGalim vise à ramener des revenus aux producteurs en renouvelant en profondeur le cadre de la contractualisation. Nous y avons travaillé avec Coop de France, le Haut Conseil de la coopération agricole (HCCA) et les syndicats agricoles.
L'ordonnance du 24 avril 2018 ne vise pas à briser le modèle coopératif à la française, mais au contraire à le renforcer. C'est le plus abouti pour les producteurs ; il doit être préservé. Le principe « un homme - une voix » doit être assuré et le modèle responsabilisé, que ce soit pour le versement de ristournes ou de dividendes. La transparence de l'information des membres des coopératives, ainsi que leur responsabilisation, doivent également être garanties. Les conditions de sortie de la coopérative doivent être transparentes et proportionnées. Enfin, les instances spécifiques à la coopération agricole que sont le HCCA et le médiateur ont été revisitées. Ainsi, le modèle sera préservé.
Mme Christine Lanfranchi Dorgal. - Le ressenti sur le terrain est bien différent. Les agriculteurs sont inquiets. Avec ces ordonnances, nous reculons en abandonnant des pans entiers de notre identité. Écoutez donc le monde agricole et laissez-lui son outil !
Entreprises adaptées dans la région des Hauts-de-France
Mme Sabine Van Heghe . - La loi de finances pour 2019 a diminué les crédits pour les entreprises adaptées et la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel va imposer un plafond de 75 % du nombre de travailleurs en situation de handicap aidés en 2022. Les entreprises adaptées ne sont donc plus incitées à accueillir des personnes en situation de handicap ni à renouveler ces emplois, mais à embaucher des personnes sans reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH). Les entreprises adaptées des Hauts-de-France s'opposent au quota de sorties vers les entreprises dites classiques, qui va à l'encontre des réalités économiques des territoires. Le choix de baisser les crédits pour inciter à l'inclusion dans le milieu ordinaire est un pari risqué.
Non seulement, les personnes porteuses d'un handicap psychique ou intellectuel, les plus éloignées de l'emploi, ne seront plus embauchées par les entreprises adaptées mais les entreprises dites classiques n'auront pas nécessairement les moyens de les accueillir. Des personnes en situation de handicap vont donc se retrouver au chômage. Les entreprises adaptées des Hauts-de-France souhaitent que soit revu à la hausse le taux de plafond du nombre de travailleurs en situation de handicap aidés pour continuer à accueillir les publics les plus éloignés de l'emploi. Elles désirent aussi le maintien de l'aide aux investissements et le respect du parcours des travailleurs en situation de handicap qui ne souhaitent pas tous aller vers le milieu « ordinaire ».
Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé . - La Délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle (DGEFP) et le cabinet de Sophie Cluzel ont beaucoup échangé avec les représentants des entreprises adaptées.
Nous accompagnons les entreprises adaptées vers un modèle plus ouvert et plus inclusif.
L'État accompagne le développement de l'emploi, pour doubler, en 2022, le nombre de personnes handicapées embauchées dans les entreprises adaptées : 80 000 contre 40 000 aujourd'hui.
Nous voulons réaffirmer la vocation économique et sociale de ces entreprises, et innover pour développer l'emploi, afin de baisser le taux de chômage, trop élevé, des personnes handicapées - 19 % - soit deux fois plus que le reste de la population active.
Aucun objectif de quota de sortie ne sera fixé à des entreprises adaptées.
Le plafonnement sera porté à 75 % du nombre total de salariés de l'entreprise adaptée d'ici 2022.
Ce n'est pas une aide systématique qui serait versée automatiquement à chaque embauche d'une personne handicapée. Il s'agit évidemment de ne mettre personne au chômage. Les aides de l'État vont augmenter. Les profils vont se diversifier et s'enrichir. Un accompagnement spécifique est prévu si besoin. Les crédits consacrés à cette politique ne vont pas diminuer mais au contraire augmenter pour atteindre 500 millions d'euros en 2022, contre 390 millions d'euros en 2018.
Mme Sabine Van Heghe. - Soit, mais je le répète : faire peser sur les personnes handicapées la double peine handicap-chômage est incompréhensible et inadmissible.
Avenir du programme européen Leader
Mme Frédérique Puissat . - À la fin 2018, sur les 700 millions d'euros prévus par le programme Leader, la France pointait à l'avant-dernière place devant la Slovaquie en termes de paiement, et n'a programmé que 10 % de son enveloppe.
Plus de 5 000 dossiers sont en attente au niveau national, ce retard étant dû non pas à l'Europe mais bien à des dysfonctionnements et des tracasseries franco-français, ce qui compromet de nombreux projets pourtant nécessaires au bon fonctionnement des territoires ruraux. Aussi, quelles sont les simplifications et les améliorations que le Gouvernement envisage de mettre en oeuvre afin d'éviter les retards et les blocages qui pénalisent les projets en cours, en raison du risque de perte d'une part importante de ces fonds européens ?
Le 7 mars, Maryse Carrère posait quasiment la même question à Didier Guillaume, dont la réponse ne fut guère rassurante, exprimant ses inquiétudes sur le décroisement des aides.
Quel est l'échelon le plus pertinent ? National selon le ministre, mais les conseils régionaux sont inquiets des programmes Osiris et de l'Agence de services et de paiement (ASP) qui semblent plutôt être des freins.
Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales . - Cette situation, portant sur 700 millions d'euros entre 2014-2020 pour des projets en milieu rural, ne peut en effet rester en l'état.
Cette enveloppe est mise en oeuvre par des groupes d'action locale (GAL) sous la responsabilité, depuis 2014, des conseils régionaux qui ont sélectionné 340 projets dont ils ont en charge l'instruction. L'État produit les outils informatiques.
J'ai reçu le président des GAL, jeune élu des Côtes-d'Armor. Depuis mars 2018, l'État a renforcé son rôle de facilitateur. Il a fourni des outils informatiques et a réuni le groupe de travail entre l'ASP et les régions. Un programme de formation est prévu. Je regrette que certaines régions n'y participent pas.
Le retard relève des régions, compétentes sur ces programmes, mais l'État doit travailler avec elle pour les financements Leader aux projets. En toute hypothèse, se renvoyer la responsabilité ne sert à rien. Il faut simplifier les responsabilités, notamment sur la future PAC, afin de ne pas se retrouver dans une semblable situation.
Mme Frédérique Puissat. - Oui, il ne faut pas jouer au jeu de s'accuser mutuellement. Nous devons faire preuve de pragmatisme. J'espère que le Premier ministre abordera ce sujet avec les présidents de région.
Établissements à objet social et recensement des logements sociaux
Mme Jocelyne Guidez . - J'attire votre attention sur la prise en compte d'établissements ayant un objet social dans le recensement des logements sociaux. La loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU), en particulier son article 55, oblige les communes à disposer d'un nombre minimum de ces logements. Ce nombre est proportionnel au parc résidentiel. De plus, les obligations de production de logements sociaux ont été accentuées par la loi du 18 janvier 2013. Désormais, les communes de plus de 3 500 habitants appartenant à des agglomérations ou intercommunalités de plus de 50 000 habitants comprenant au moins une commune de plus de 15 000 habitants doivent disposer de 25 % de logement social, en regard des résidences principales, d'ici à 2025. En cas de retard chaque commune concernée fait l'objet d'un prélèvement annuel sur ressources. Selon les cas, une majoration des pénalités financières peut même être décidée.
Que certaines structures ayant un objet social ne soient pas comptabilisées au titre de la loi SRU demeure regrettable. C'est le cas des centres recevant des personnes handicapées, telle la maison Valentine dans l'Essonne, ou encore des logements à loyer et charges accessibles que défend l'association « solidarités nouvelles pour le logement ». Comptabiliser ces biens locatifs en logements sociaux, ce serait envoyer un message de confiance aux élus ; cela favoriserait ces projets sociaux. Qu'en pense le Gouvernement ? Que fera-t-il pour aider les collectivités territoriales à faire face à leurs obligations croissantes ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales . - En imposant à certaines communes de disposer d'un taux minimal de logements sociaux, l'article 55 de la loi SRU vise à développer une offre de logements locatifs sociaux bien répartis sur le territoire, pérennes, et accessibles de façon universelle à tous les ménages modestes. Pour assurer la pérennité du caractère social de ces logements, leur décompte est fondé sur l'agrément en logement locatif social conventionné à l'APL ou, dans le parc privé, sur le conventionnement social ou très social ANAH.
Je soutiens sans réserve le développement de toutes les structures d'accueil et d'hébergement d'urgence et provisoire qui répondent à des besoins spécifiques, notamment ceux des personnes handicapées. Mais c'est bien l'engagement conventionnel, sur moyen ou long terme, qui garantit la pérennité de l'affectation du logement à des ménages modestes.
Plus de deux millions de nos concitoyens attendent un logement social. Le Gouvernement n'est pas favorable à l'intégration des hébergements et logements non conventionnés dans le décompte de la loi SRU. Je réaffirme mon souhait de voir les communes s'engager fermement dans le conventionnement.
Couverture numérique dans l'Aude
Mme Gisèle Jourda . - Depuis plus de quinze ans, des dysfonctionnements chroniques du réseau internet et téléphonique, tant fixe que mobile, affectent Plaigne, Pécharic-et-le-Py et Villautou.
Ces communes audoises, qui comptent 204 habitants, répartis sur 2 565 hectares collinaires, dépendent du même répartiteur situé à Plaigne. Depuis 2004, l'opérateur lui-même reconnaît que les liens cuivre en amont de ce répartiteur sont obsolètes et défectueux.
Je vous fais grâce de la liste de toutes les réparations de fortune qui ont été effectuées pour en arriver à celle de 2017 où les liens cuivre sont réparés quand il aurait fallu installer la fibre. Que ne l'a-t-on pas fait ? Orange, à qui a été confiée la mission de service public, renvoie vers le conseil départemental et son schéma directeur d'aménagement numérique. Disons la vérité : les défauts de connexion sont récurrents et ne se limitent pas aux microcoupures liées à la saturation du réseau.
Au désespoir des élus et des habitants, la situation s'est considérablement dégradée depuis le début de l'année.
L'autorité de régulation des communications électroniques et des postes, l'Arcep, a été saisie. Comment résoudre de façon pérenne le problème de ces communes et de toutes celles qui sont frappées par la fracture numérique ? Des recours juridiques existent-ils pour que les opérateurs assument les responsabilités qui leur incombent ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales . - Le Gouvernement s'est engagé à assurer la couverture du territoire en haut débit en 2020 et en très haut débit en 2022.
Le noeud de raccordement de Plaigne, établi dans le cadre d'un partenariat public-privé de l'ancienne région Languedoc-Roussillon avec Orange, dispose d'un lien de collecte en cuivre avec un fort taux d'occupation, ce qui explique les mauvais débits constatés. Cette infrastructure, identifiée comme prioritaire par le syndicat Audois d'énergies et du numérique, devrait prochainement être raccordée par un lien de fibre optique. Par ailleurs, l'Arcep, le 23 octobre 2018, a mis en demeure Orange de respecter son obligation de qualité de service.
Plaigne, Pécharic-et-le-Py et Villautou sont inscrites au New Deal mobile. Les travaux pour les communes de Plaigne et Pécharic-et-le-Py sont réalisés par le Syaden avec un soutien financier de l'État. La commune de Villautou figure dans l'arrêté du 4 juillet 2018, qui crée une obligation de couverture par les opérateurs ; là aussi, les travaux sont en cours.
Vous le voyez, le Gouvernement est déterminé à améliorer la desserte numérique des territoires.
La mobilité dans la métropole Aix-Marseille-Provence
Mme Anne-Marie Bertrand . - La mobilité est un enjeu majeur. La pertinence de l'agenda des transports de la métropole Aix-Marseille-Provence est reconnue par l'État. Ces projets sont prêts à être déployés, seuls manquent les moyens financiers. Les besoins recensés atteignent 3,5 milliards d'euros d'ici 2025 et 12 milliards d'euros sur les vingt prochaines années.
Les Bouches-du-Rhône soutiennent ce projet auquel sont consacrés 300 millions d'euros au titre du plan départemental 2016-2020, dont plus de 80 % sont déjà engagés. Mme Martine Vassal, présidente du département et de la métropole Aix-Marseille-Provence, a demandé à plusieurs reprises à l'État de doter ce territoire d'un levier fiscal, inspiré de celui qui soutient le Grand Paris Express. La création de cet outil peut-elle être espérée prochainement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales . - Le 13 mars dernier, Pierre Dartout, préfet de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, préfet des Bouches-du-Rhône, a remis un rapport au Premier ministre sur l'avenir de la métropole d'Aix-Marseille-Provence et son éventuelle fusion avec le département.
L'approfondissement de la politique des transports s'inscrit naturellement dans le prolongement de la réflexion en cours sur l'avenir de la métropole, que le Premier ministre m'a d'ailleurs demandé de conduire. Une fois la réflexion achevée, le Gouvernement examinera, avec les collectivités, les réponses à apporter aux besoins de transports et les modalités de financement.
Mme Anne-Marie Bertrand. - Il serait dommage de passer à côté d'investissements qui conjuguent enjeux économiques, environnementaux et sociaux.
Il nous tarde de savoir si la fusion entre métropole et département se fera. Le climat actuel est très tendu...
Indemnités de fonction des exécutifs des syndicats intercommunaux et mixtes
M. André Reichardt . - L'article 42 de la loi NOTRe a supprimé la possibilité de verser des indemnités de fonction aux présidents et vice-présidents des syndicats intercommunaux « dont le périmètre est inférieur » à celui d'une communauté ou d'une métropole. Idem pour les présidents et vice-présidents des syndicats mixtes associant exclusivement des collectivités territoriales et des EPCI.
La suppression de ces indemnités, qui pose difficulté, a été reportée au 1er janvier 2020 par la loi du 23 mars 2016 relative à l'exercice des mandats. La date butoir approche, le problème demeure d'autant que la taille des EPCI a augmenté depuis le redécoupage de 2017.
Les élus locaux s'investissent au quotidien afin de maintenir un service de proximité, notamment en matière scolaire et de gestion forestière. Ils exercent déjà leurs fonctions de maire ou d'adjoint de manière désintéressée, compte tenu de la faiblesse des indemnités dans une commune de petite taille. Cette différence de traitement risque de les décourager. Quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales . - Durant le grand débat national, les élus locaux ont soulevé les difficultés posées par cette évolution. Dans certains cas, l'extension du périmètre syndical n'est pas envisageable. On peut imaginer un syndicat constitué en matière d'éducation scolaire qui n'aurait pas vocation à s'étendre à toute l'intercommunalité d'autant que cette intercommunalité a été élargie.
Avec la rationalisation de la carte intercommunale, le nombre de syndicats a baissé de 35 %, soit une baisse de 4 % par an, entre 2010 et 2019.
Si l'on établit un lien entre le premier fait et le second, on peut considérer que la situation a déjà évolué positivement. Nous pouvons désormais apprécier l'opportunité de maintenir ces indemnités ou de les moduler. Renforcer le statut des élus locaux, le président de la République a fait des annonces à ce sujet le 25 avril, est essentiel pour encourager nos concitoyens à se présenter aux élections municipales de 2020.
Personnellement, je suis favorable à l'évolution des textes existants, dans les meilleurs délais.
M. André Reichardt. - Merci pour votre réponse. Il y a urgence. Je déposerai une proposition de loi pour faciliter la tâche du Gouvernement... (Mme la ministre sourit.)
Parole de l'État à Lure
M. Michel Raison . - Madame la ministre, il s'agit de la parole de l'État. Vous avez annoncé, lors de votre venue en Haute-Saône le 18 mars 2019, vingt emplois supplémentaires pour les services fiscaux de Lure. Soit il s'agit de création d'emplois ; soit ce n'est que du vent car M. Darmanin, le 20 mars, lui, a annoncé une délocalisation d'agents des finances publiques des métropoles vers le monde rural ; soit la disparition de la trésorerie du centre hospitalier pourrait entraîner un recyclage des fonctionnaires des services des finances vers Lure. Nous espérons que ce soit le premier scénario, le confirmez-vous ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales . - Merci de me donner l'occasion de préciser les choses. Je souhaite que Lure soit le lieu d'expérimentation de l'action qui sera conduite demain par l'Agence nationale de la cohésion des territoires, l'ANCT.
À Lure, je me suis entretenue longuement avec les élus et les parlementaires - et, monsieur le sénateur, vous vous êtes montré, comme toujours, très actif. Le Gouvernement a décidé de ne pas y reconstruire la maison d'arrêt, je sais que les élus le vivent mal.
Maintenant, il faut regarder l'avenir. Ils peuvent compter sur l'État pour appuyer leurs projets. Je leur ai proposé d'élaborer un contrat de cohésion territoriale. Je m'apprête à signer dans les prochains jours une lettre de mission au préfet de la Haute-Saône afin qu'il engage un dialogue avec les élus et les acteurs du territoire pour l'élaborer. Ce contrat pourra porter sur la revitalisation de la ville de Lure, le développement industriel et économique du bassin et tout autre sujet souhaité au plan local.
Le Gouvernement est déterminé à accompagner ce territoire dans une nouvelle étape dès lors que cela est souhaité par les élus locaux.
M. Michel Raison. - Le maire de Lure travaille déjà avec le préfet sur le contrat de cohésion territoriale.
Pour les vingt postes dans les services fiscaux, il s'agit donc de redéploiements, ce n'est pas ainsi que les choses avaient été présentées initialement...
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Ah si !
Vétusté du parc immobilier de Montréjeau
Mme Brigitte Micouleau . - Le parc immobilier, tant privé que social, du centre ancien de la ville de Montréjeau en Haute-Garonne, est dans un état catastrophique. Le maire a lancé une alerte auprès des parlementaires et des autorités préfectorales, je me fais son relais.
Des immeubles menacent de s'effondrer. Le maire a pris, ces dernières années, de nombreux arrêtés de péril. Les propriétaires restent introuvables, la ville se trouve contrainte de procéder à l'exécution de travaux d'office. Une procédure de déclaration d'utilité publique a également été lancée afin de pouvoir faire démolir les bâtiments les plus dangereux.
À cette situation s'ajoute le renoncement total des bailleurs sociaux. La résidence des Pyrénées est à l'abandon.
Quel appui l'État peut-il apporter à une municipalité dont les capacités financières sont faibles ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales . - Vous avez raison de souligner les difficultés de cette commune, où l'on dénombre 30 signalements de logements indignes. Le taux de logements habités en résidence principale potentiellement indignes, et cela ne tient pas compte des logements vacants, s'élève à 14 % - en majorité des logements construits avant 1948, occupés par des ménages modestes.
Un objectif de renouvellement de 18 logements a été fixé dans le cadre de l'opération programmée d'amélioration de l'habitat 2018-2020, réalisée avec le soutien de l'Agence nationale de l'habitat, l'ANAH. C'est deux fois plus que les objectifs de l'opération 2015-2017.
Pour amplifier ce mouvement, les collectivités pourraient aussi activer une opération de revitalisation des territoires telle que prévue par l'article 198 de la loi ELAN et demander à bénéficier de subventions de l'ANAH lorsqu'elles se substituent aux propriétaires pour réaliser des travaux.
Julien Denormandie s'est fait le porteur et le garant de la réhabilitation des logements les plus dégradés et de la lutte contre l'habitat indigne, les travaux du député Guillaume Vuilletet enrichiront la réflexion sur ce sujet.
Mme Brigitte Micouleau. - Toulouse Métropole, avec « Ma Copro bouge », accompagne des copropriétés fragilisées. Bastia, Creil, Rennes et Lille ont défini des stratégies et élaboré des opérations programmées de réhabilitation. Les petites communes, comme Montréjeau, n'ont, elles, pas les moyens d'intervenir.
Hébergement des travailleurs saisonniers
Mme Nathalie Delattre . - En Gironde, comme dans tant d'autres départements, les travailleurs saisonniers ont du mal à se loger. Les exploitations, qui les hébergeaient autrefois, ne le peuvent plus à cause des normes de sécurité et d'accessibilité qui nécessitent des travaux coûteux.
Lors de l'examen de la loi ELAN, j'ai lancé un débat en proposant, à l'article 52 ter, d'étendre le dispositif de diagnostic et de concertation en matière de logement des travailleurs saisonniers dans les communes touristiques aux communes non touristiques, à la demande de celles-ci. Si ma proposition n'a pas abouti, elle a fait consensus sur la nécessité d'obtenir des résultats concrets et rapides sur cette question primordiale.
Les élus locaux voient des personnes loger pendant plusieurs semaines sous des tentes, au beau milieu de la campagne, sans eau ni électricité, ou encore des familles entières dormir dans leur voiture.
Il ne s'agit pas d'une question relevant purement du cadre de relations de travail privées. Prise en charge de la rénovation des logements vétustes et désertés en zone rurale, réquisition de camping dédié aux travailleurs mais aussi identification des normes, européennes comme françaises, qui n'autorisent plus les exploitations à loger les travailleurs saisonniers, l'État doit donner l'impulsion.
Les territoires, chacun avec leurs moyens, et ils sont souvent bien différents, se sont mis en quête de solution. Que fera l'État pour les aider ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales . - Le Gouvernement est très conscient du problème. L'État doit assumer son rôle, naturellement, mais les employeurs ne sont pas totalement déliés de toute responsabilité.
La loi Montagne de 2016, qui ne s'applique certes pas en Gironde, prévoit une obligation d'établir un diagnostic dans les communes touristiques pour élaborer un plan d'action.
Début 2019, la commission permanente du Conseil national de la montagne a créé un groupe de travail sur ce sujet, piloté par le Commissariat général à l'égalité des territoires. Il fera des propositions de mesures et d'actions concrètes.
Des communes non touristiques peuvent être concernées par ce problème de logement des travailleurs saisonniers. Les services de l'État sont évidemment à leur disposition pour examiner les conditions dans lesquelles elles peuvent bénéficier de cette expérience acquise ou développer des programmes adaptés.
Des outils spécifiques peuvent être mobilisés, tels le bail mobilité ou la garantie Visale pour le parc privé ou encore, dans le parc social, les foyers-soleil.
Donner l'impulsion, c'est bien le rôle de l'État. Évidemment, nous travaillerons en étroite collaboration avec les collectivités territoriales.
Statut des élus locaux
Mme Chantal Deseyne . - Depuis plusieurs semaines, avec mes collègues d'Eure-et-Loir, nous sillonnons les routes de notre département pour aller à la rencontre des élus. Le statut de l'élu revient souvent dans les discussions. Le sujet a toujours intéressé le Sénat, en témoigne le rapport de sa délégation aux collectivités territoriales. Je déposerai prochainement une proposition de loi pour répondre aux craintes qui se sont exprimées.
J'ai écouté attentivement le discours du président de la République de clôture du grand débat : le statut de l'élu local y figurait aussi en bonne place. Matignon a annoncé une réforme avant les élections municipales de 2020. Chacun est prêt à y travailler, j'espère un dialogue bienveillant entre le Gouvernement, l'Assemblée nationale et le Sénat.
Quel est l'agenda retenu ? Quelles sont les pistes envisagées par le Gouvernement ? Quelle place sera faite au Sénat dans ces travaux ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales . - Rassurez-vous, je travaille en étroite collaboration avec la délégation aux collectivités territoriales du Sénat - j'ai encore participé à une réunion ici même, la semaine dernière, avec le président Bockel.
En matière de statut de l'élu, on ne part pas de rien. Mais les règles ne sont pas toujours connues ou appliquées. Suppression des cotisations employeur sur les cotisations de retraite supplémentaires des élus, revalorisation des barèmes de remboursement des frais engagés au titre du mandat, clarification des dispositions relatives à la protection sociale des élus, tout cela a été fait. Je les cite exprès parce que ces mesures relèvent du niveau réglementaire. Cela ne nous a pas empêchés de les travailler avec la délégation aux collectivités territoriales du Sénat. L'amendement du sénateur Charles Guené sur la fraction représentative des frais d'emploi, qui permet de déduire du revenu imposable une part des indemnités, a également contribué à revaloriser les élus.
Le président de la République a réaffirmé l'an dernier, puis le 25 avril, l'intention du Gouvernement de proposer un statut de l'élu digne de ce nom. Ce chantier doit effectivement aboutir avant les élections municipales.
Mme Chantal Deseyne. - Je remercie Mme la ministre. Elle qui a été maire d'une commune dans le département voisin du mien, a beaucoup travaillé sur ce sujet...
Taux réduit de TVA pour la filière équine
M. Jean Bizet . - Le retour au taux normal de TVA sur la filière équine a eu des effets sociaux et économiques désastreux.
Le moment est venu de revenir sur ce sujet. La Commission européenne envisage de modifier la directive du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée. Elle préconise la coexistence de deux taux réduits d'au moins 5 % et d'un autre taux réduit entre 0 et 5 %, elle propose également de rendre la main aux États membres quant au choix des secteurs pouvant bénéficier de taux réduits.
La filière équine a été lourdement pénalisée par la condamnation de la France en 2012. Le modèle français de « cheval partagé », si j'ose dire, rend accessible la pratique de l'équitation sans la contrainte de posséder un cheval. Depuis 2014, la mise à disposition du cheval est taxée à 20 %.
Peut-on, comme notre voisin irlandais, établir clairement que l'élevage, l'entraînement et l'utilisation en loisir des chevaux sont des activités agricoles et sociales qui peuvent bénéficier à ce titre d'un taux réduit de TVA ?
Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire . - Veuillez excuser l'absence de Mme Pannier-Runacher.
La Cour de justice de l'Union européenne, par un arrêt du 5 mars 2012, a condamné la France mais aussi l'Allemagne, l'Autriche, les Pays-Bas et l'Irlande. En dépit de nos démarches, nous n'avons pas obtenu de taux réduit pour les activités d'enseignement. En revanche, le taux de TVA a été abaissé à 5,5 % à certaines prestations effectuées par les centres équestres.
Nous ne pouvons pas nous satisfaire de la situation actuelle. La France soutiendra la possibilité d'appliquer plus largement un taux réduit dans la filière équine. Mais pour l'heure, on ne saurait méconnaître le droit européen sans risquer de se voir infliger, à coup sûr, une lourde amende.
M. Jean Bizet. - Merci de votre réponse. Puisse la France tenir bon sur cette activité socialement importante.
Transports en Seine-Saint-Denis
M. Fabien Gay . - Il y aurait beaucoup à dire sur la discrimination que subit le beau département de la Seine-Saint-Denis en matière d'accès aux transports.
L'inauguration des nouvelles stations de la ligne 12 est sans cesse reportée. Idem pour les lignes 15, 16 et 17 - sauf pour Le Bourget, JO oblige ! Mais pour ce qui est de désenclaver le territoire, on repassera.
Pour le million d'usagers quotidien du RER B, c'est la galère, une source permanente de stress qui affecte tant la vie familiale que professionnelle - certains employeurs refusent de recruter des salariés qui seront régulièrement en retard !
Les solutions existent : rehausser les ponts pour permettre des rames à deux étages, doubler le tunnel Châtelet-Gare du Nord, finir le bouclage Charles-de-Gaulle-Mitry pour fluidifier le trafic. Mais il n'y a pas d'argent, répond la SNCF. Il y en aurait encore pour huit ans d'attente, huit ans de galère !
Le CDG Express, ce train pour les riches que vous voulez pour mieux privatiser ADP, ne transportera, lui, que 20 000 usagers. Vous avez lancé les travaux alors que la concertation avec les élus et les citoyens n'est pas achevée et vous envoyez les CRS déloger les citoyens qui se mobilisent... Ce n'est pas sérieux. Il faut un moratoire sur les travaux du CDG Express, sans quoi la concertation ne sera que poudre aux yeux. Pendant ce temps, les habitants de la Seine-Saint-Denis galèrent, et cela suffit ! (M. Olivier Jacquin applaudit.)
Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire . - Je partage votre appréciation sur ce beau département, où j'ai travaillé quatre ans.
Le projet du CDG Express est indispensable pour renforcer le lien entre le centre de Paris et l'aéroport, vital pour l'attractivité de la capitale, première destination touristique d'Europe. Les accès par le RER D et les autoroutes A1 et A3 sont saturés.
Le Gouvernement a signé, le 11 février, le contrat de concession avec ADP, SNCF Réseau et la Caisse des dépôts et consignations pour lancer les travaux.
Cela ne se fera pas au détriment des transports du quotidien, qui restent notre priorité, avec un investissement de 530 millions d'euros, dont 190 millions d'euros pour le RER B et ses 850 000 voyageurs quotidiens. Il bénéficiera de l'enveloppe de 1,3 milliard d'euros du contrat de plan État-Régions ; 300 millions lui ont été attribués. Les travaux vont se poursuivre en 2019 avec la régénération des caténaires et l'optimisation du découpage électrique de la partie nord de la ligne. D'ici 2025, le matériel roulant sera renouvelé et un nouveau système d'exploitation, plus fiable, mis en place.
Les transports du quotidien constituent bien une priorité !
Équipement des motrices de la SNCF
M. Olivier Jacquin, en remplacement de M. Jean-Marc Todeschini . - M. Jean-Marc Todeschini est aux Invalides pour l'hommage à nos soldats ; je m'associe à sa question, qui concerne aussi mon département.
Au 1er janvier 2020, les machines qui ne seront pas équipées du système européen de contrôle des trains ne pourront plus passer les frontières, notamment du Luxembourg.
On a affirmé aux élus régionaux que les 25 rames que compte la flotte du TER reliant Nancy et Metz à Luxembourg, qui véhicule 12 000 voyageurs chaque jour, étaient rendues aptes à circuler au Luxembourg. Or à ce jour, la seule rame équipée n'est pas homologuée, deux sont en cours d'équipement et 22 sont en attente de travaux, de deux mois pour chaque rame. Seule une vingtaine des 200 agents de conduite ont été formés, à huit mois de l'échéance.
Le manque d'anticipation de la SCNF et de la région Grand Est nous conduit droit au désastre. Allez-vous demander au gouvernement luxembourgeois un délai supplémentaire ? Nos voisins pourront-ils nous aider à mettre aux normes nos machines ? Une rupture de charge en gare de Thionville détournerait les usagers frontaliers du seul mode de transport propre qui leur est proposé. Ce ne serait pas admissible.
Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire . - SNCF Mobilités a engagé en 2016 le projet d'équipement des rames concernées, dont l'achèvement était initialement prévu le 30 juin 2021 date limite fixée par l'Administration des chemins de fer luxembourgeoise pour circuler sous couvert du système existant.
Après l'accident ferroviaire de Dudelange en février 2017, celle-ci a avancé au 31 décembre 2019 la fin de ce système dérogatoire. SNCF Mobilités a alors optimisé son programme industriel, raccourcissant la durée d'un an, au 30 juin 2020. Les formations des agents de conduite se déroulent comme programmé.
Malgré cette accélération, seule la moitié des rames sera équipée au 1er janvier 2020. Si à cette date le système de sécurité ferroviaire luxembourgeois est définitivement désactivé, le plan de transport entre Nancy, Metz et Luxembourg devra être modifié, obligeant de nombreux voyageurs transfrontaliers à changer de train à Thionville.
Mme Borne a écrit à son homologue luxembourgeois pour appuyer la demande de la SNCF et de la région Grand Est de maintenir opérationnel, à titre dérogatoire, le système actuel jusqu'à juin 2020. Les autorités luxembourgeoises sont en train d'examiner cette demande.
Desserte de Tenay-Hauteville et de Virieu-le-Grand-Belley
M. Patrick Chaize . - Le projet de suppression d'arrêts en gare de Tenay-Hauteville et de Virieu-le-Grand - Belley, dans l'Ain, inquiète. Les dessertes seraient en effet réduites à compter de 2019 au motif d'un problème de ponctualité sur le tronçon lié aux travaux à Lyon-Part-Dieu. Cela ne serait pas sans conséquence pour les étudiants et les actifs qui empruntent régulièrement le train pour Lyon et Genève. Déjà, ces deux gares ont perdu leur guichet en 2013 et 2014.
La solution du remplacement par des bus n'acceptable que si elle est temporaire. Il est impératif de tenir compte des besoins de désenclavement des territoires ruraux. Une modification des dessertes porterait atteinte au droit à la mobilité. Le train est élément structurant pour l'Ain !
L'offre de transports publics est déterminante pour l'avenir de nos territoires. Mme Borne n'a-t-elle pas dit refuser qu'il y ait des zones blanches en matière de transports ?
Face aux menaces qui pèsent sur les gares de Tenay-Hauteville et de Virieu-le-Grand-Belley, que compte faire le Gouvernement ?
Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire . - Ces deux gares sont desservies uniquement par des TER. Autorité organisatrice, la région Auvergne-Rhône-Alpes est donc seule compétente pour définir l'offre ferroviaire, horaires compris. L'État n'intervient pas, même si la ministre des transports lui a fait part des difficultés soulevées par la nouvelle offre.
L'horaire 2019 a fait l'objet d'une concertation entre la région, SNCF Réseau et SNCF Mobilités ; les adaptations des dessertes des gares de Tenay-Hauteville et Virieu-le-Grand-Belley ont été instruites collégialement et validées par la région. Les modifications prévues ne concernent que les TER Lyon-Genève, en raison de nouvelles contraintes : travaux à Lyon-Part-Dieu, cadencement en gare de Genève.
L'ouverture des gares n'est pas remise en cause. Elles continueront à être desservies par les TER reliant Chambéry et Ambérieu. Pour les voyageurs du quotidien, trains ou autocars assureront des correspondances à Ambérieu ou à Culoz.
Trajets Die-Gap ou Die-Valence sur la ligne Paris-Briançon
M. Bernard Buis . - Élu de la vallée de la Drôme, j'attire votre attention sur l'impossibilité d'effectuer des trajets Die-Gap ou Die-Valence sur la ligne Paris-Briançon. Alors que les travaux de rénovation de cette ligne ont été financés par la région et le département, il est incompréhensible que le train ne puisse être utilisé pour du cabotage bien qu'il s'arrête dans la gare. À Die, on peut descendre en arrivant de Paris mais pas monter pour aller à Briançon ; de même à Veynes et Gap. À Briançon, on peut monter pour aller à Paris, mais pas descendre à Valence... De plus, certains week-ends de forte affluence, ce train ne s'arrête pas à Die !
Il semble aberrant d'investir sur une ligne sans autoriser le cabotage. J'ai saisi Guillaume Pépy - sans succès. Le Gouvernement peut-il intervenir auprès de la SNCF pour revenir à la situation antérieure, afin de desservir réellement le territoire et rendre le train attractif ?
Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire . - Je partage votre incompréhension. Les services du ministère vont se rapprocher des régions concernées afin de mettre en place le conventionnement adéquat. Toutefois, le train ne dispose que d'une seule voiture à sièges inclinables. Dans les autres, ce sont des couchettes : les voyageurs ne peuvent y être dérangés en cours de parcours.
Les horaires sont conçus pour répondre à la demande des voyageurs longue distance d'arriver tôt dans les villes desservies. Compte tenu des travaux d'infrastructures et des circulations connexes, seules des adaptations marginales pourront être envisagées.
M. Bernard Buis. - Peu de personnes sont effectivement concernées, mais je pense notamment aux lycéens allant de Die au lycée de Gap.
Éolien flottant
Mme Maryvonne Blondin . - Hasard du calendrier, ce sujet fait l'objet d'un article du Canard enchaîné de cette semaine et d'un article dans Ouest France aujourd'hui.
La France a été le premier pays à se lancer dans l'éolien flottant, mais quinze ans après, aucun projet n'est encore sorti de l'eau. L'Allemagne, elle, va produire 5,3 GW en 2020, l'équivalent de cinq à six centrales nucléaires !
Malgré l'affichage, rien ne bouge. Les difficultés sont administratives, financières, juridiques ; surtout, l'ambition gouvernementale manque. Sur le terrain, les professionnels se sont lancés, soutenus par les élus locaux. En novembre, les présidents des régions littorales ont estimé insuffisant le volet énergie marine de la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE). Les projets de parc dans lesquels ils ont investi sont retardés, au risque de reporter encore la transition énergétique.
Les six régions littorales métropolitaines ont élaboré une contre-proposition ambitieuse. Quelles mesures le Gouvernement compte-t-il prendre pour soutenir l'éolien flottant, mais aussi l'hydrolien ?
Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire . - La loi fixe l'objectif de 40 % d'électricité renouvelable dans le mix énergétique d'ici 2030. Les énergies marines renouvelables devront y concourir.
Le Gouvernement souhaite en priorité développer l'éolien en mer posé et flottant, filières les plus matures. Le gisement est important, la production d'énergie est plus régulière qu'à terre et ces technologies sont créatrices d'emplois. La PPE prévoit l'attribution par l'État d'un projet par an. Le Gouvernement lancera deux appels d'offres commerciaux d'éolien flottant en Bretagne et en Méditerranée ; c'est une première en Europe. Nous visons une capacité installée de 4,7 GW à 5,2 GW en 2028.
L'enjeu est de lancer le stade industriel de cette filière. La France a un avantage compétitif que nous souhaitons conserver. Mais l'installation de parcs en mer est coûteuse. Il est donc prévu de mettre d'abord en oeuvre deux projets commerciaux afin d'enclencher la baisse des prix et d'augmenter les volumes au fur et à mesure.
M. de Rugy saisira la Commission nationale du débat public préalablement au lancement de l'appel d'offres.
La mobilisation des régions est un signal fort et essentiel au succès de l'éolien flottant. L'État jouera aussi pleinement son rôle.
Chasse aux colombidés et aux sangliers en Dordogne
M. Bernard Cazeau . - La Fédération départementale des chasseurs de Dordogne a alerté les pouvoirs publics sur l'obsolescence des arrêtés ministériels pris pour les colombidés et les sangliers. Un arrêté du 11 août 2006 bloque à deux niveaux la poursuite des oiseaux voyageurs : la distance entre installations et la date de fin de la période de migration. Or le Périgord connaît une expansion du pigeon ramier, espèce nuisible qui s'attaque aux cultures. Il serait souhaitable de n'autoriser une installation qu'à 500 mètres d'une installation existante, contre 300 mètres actuellement, et de repousser la fin de la période de migration du 20 au 30 novembre.
Le report in extremis de l'interdiction réglementaire de la chasse au sanglier du 28 février au 31 mars a fait l'objet d'âpres négociations entre le préfet et la fédération départementale de la chasse. Que ce soit en matière de production agricole, de sécurité routière ou de dégradation des territoires, les sangliers sont particulièrement destructeurs et dangereux. Dans le Périgord, ils disposent d'un biotope particulièrement favorable. Des habitations en zone péri-urbaines sont victimes de dégradations.
Lors de l'examen du projet de loi portant création de l'Office français de la biodiversité (OFB), le Sénat a souhaité améliorer la lutte contre les dégâts des grands gibiers. Le préfet fixe un nombre minimum et maximum d'animaux à prélever. L'article 3 prévoit des quotas et une rectification du plan de chasse en cas d'augmentation des dégâts.
Le Gouvernement compte-t-il modifier la réglementation relative à ces deux espèces ?
Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire . - Le Gouvernement est pleinement engagé dans la lutte contre les dégâts de grand gibier et la maîtrise des populations.
Le projet de loi créant l'OFB interdit notamment le nourrissage et incite financièrement les chasseurs à prévenir les dégâts.
La prolongation de la période de chasse en battue en mars fait l'objet d'une concertation nationale avec les chasseurs et les agriculteurs. Une décision sera prise avant la prochaine saison de chasse.
En Dordogne, les propriétaires peuvent faire usage de leur droit de destruction à tir du sanglier en mars pour prévenir des dégâts agricoles ; il y a été classé comme espèce susceptible d'occasionner des dégâts.
Un arrêté de 2006 a encadré la chasse des colombidés en Dordogne, mais nous allons étudier avec la plus grande attention votre proposition qui semble aller dans le bon sens.
Abandon du projet d'autoroute A831
M. Didier Mandelli . - Le projet d'autoroute A831, de 64 kilomètres, devait relier Fontenay-le-Comte et Rochefort afin de désengorger les routes entre la Vendée et la Charente-Maritime. Objet d'un large consensus des élus départementaux et régionaux, il a obtenu, en 2011, l'autorisation du Premier ministre de l'époque - puis a été mis en stand-by. En 2015, la déclaration d'utilité publique (DUP) n'était pas prolongée ; Manuel Valls, alors Premier ministre, s'était engagé à soutenir une alternative à l'autoroute et avait confié une mission au préfet de la région Nouvelle-Aquitaine - dont les propositions n'ont pas fait l'objet d'un accord.
Le projet est au point mort. Le Gouvernement peut-il de nouveau s'en saisir et proposer des études et un accompagnement financier ? Il y a eu des engagements forts de l'État...
Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire . - La DUP de l'A831 est arrivée à échéance le 13 juillet 2015. Un important travail a alors été engagé, sous l'égide du préfet de région, pour proposer des scenarii alternatifs autour d'un réaménagement du réseau départemental existant. Un projet de protocole a été finalisé en juillet 2016, mais les élus ont refusé de le signer, jugeant insuffisante la participation de l'État - un quart du financement des études, tout de même - et exigeant une mise à 2x2 voies sous statut autoroutier. D'où un blocage du dossier.
À la suite du rapport Rol-Tanguy sur les mobilités du Grand Ouest, les réflexions ont continué. Le contrat d'avenir pour la région Pays de la Loire constitue un schéma global et cohérent de développement du territoire. En le signant le 8 février dernier, le Gouvernement a réaffirmé l'engagement de l'État dans l'élaboration d'un projet alternatif à l'A831 pour faciliter les déplacements entre Nantes et La Rochelle.
M. Didier Mandelli. - J'appelle de mes voeux la reprise des discussions avec les collectivités locales. Les financements ne doivent pas se limiter aux études !
Mesures pour les outre-mer
Mme Victoire Jasmin . - Le vendredi 1er février 2019, à l'Élysée, j'ai participé au grand débat national avec le président de la République. Cette énième consultation, dont l'opportunité et la méthode étaient discutables, faisait clairement doublon avec les Assises de l'outre-mer lancées il y a moins d'un an. Les enjeux sont connus de tous et l'on attend maintenant des mesures concrètes !
Après plusieurs mouvements de grève générale, l'impatience est légitime. Les ultramarins veulent des réponses en matière d'emploi, de pouvoir d'achat, de développement durable et surtout de santé et de qualité de vie dans ces territoires éloignés et exposés aux risques climatiques et environnementaux.
Il est urgent de repenser le maillage de l'offre de soins, d'éviter les pertes de chance, d'améliorer les conditions travail des professionnels de santé et de renforcer l'attractivité médicale des zones sous-dotées.
Depuis l'incendie du CHU de Guadeloupe, les difficultés s'accumulent : problèmes de trésorerie, d'approvisionnement, sur l'imagerie... En attendant le nouveau CHU prévu en 2022, quelles mesures spécifiques aux outre-mer sont envisagées à la suite du grand débat national et dans le projet de loi Santé ?
Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire . - Le grand débat s'inscrit dans le prolongement des Assises de l'outre-mer, au cours desquelles 25 000 citoyens ultramarins se sont exprimés.
Écoute, décision et transparence, voilà nos maîtres mots. Nous agissons en pilotant une réforme audacieuse des aides économiques pour rendre territoires ultramarins plus attractifs ; 700 millions d'euros seront consacrés à la formation professionnelle.
La santé et la solidarité font l'objet d'une attention particulière. Plusieurs centaines de postes de médecin et 6 500 places de crèche seront créées, ainsi qu'un fonds de lutte contre les addictions.
S'agissant de l'environnement, près de 70 millions d'euros sont déployés dans le cadre du Plan Eau dans les départements ultramarins. Plus globalement, Annick Girardin a lancé la Trajectoire Outre-mer 5.0.
Le grand débat national et les Assises sont le socle des ambitions nouvelles et fortes pour l'emploi, la santé, la biodiversité et le climat. Cette feuille de route sera déployée dans les prochains mois.
M. le président. - Merci à ceux qui étaient présents ce matin. Nous n'avons pas pu assister à l'hommage rendu aux Invalides à nos soldats morts pour la France, mais toutes nos pensées vont vers eux.
La séance est suspendue à 12 h 40.
présidence de M. Gérard Larcher
La séance reprend à 14 h 40.
Hommage aux deux soldats morts au Burkina Faso
M. Gérard Larcher, président du Sénat . - (Mmes et MM les sénateurs ainsi que le ministre se lèvent.) Deux militaires, le Premier maître Cédric de Pierrepont et le Premier maître Alain Bertoncello, officiers mariniers au sein du commandement des opérations spéciales, ont tragiquement trouvé la mort au Sahel, au cours d'une mission qui a abouti à la libération de quatre otages, dont deux de nos compatriotes, détenus par un groupe de terroristes, qui ont sauvagement assassiné leur guide béninois.
Au nom du Sénat tout entier, je tiens à saluer le courage de ces deux militaires, qui ont donné leur vie pour sauver celle des otages et à qui la Nation tout entière a rendu un hommage solennel ce matin autour du président de la République.
Nous adressons nos pensées émues à leurs familles, à leurs proches, à leurs frères d'armes.
Ce tragique dénouement nous rappelle l'engagement résolu de nos forces armées, que je tiens à saluer en votre nom à tous, pour lutter contre le terrorisme et pour assurer, partout dans le monde, la protection de nos concitoyens et des valeurs que nous avons en partage.
Je vous invite à observer un moment de recueillement en hommage à nos deux soldats. (Mmes et MM. les Sénateurs, ainsi que le ministre, observent un moment de recueillement.)
Cour de justice de la République
Élections - Ouverture du scrutin
M. le président. - L'ordre du jour appelle le scrutin pour l'élection d'un juge titulaire et d'un juge suppléant à la Cour de justice de la République.
Il va être procédé dans les conditions prévues par l'article 86 bis du Règlement au scrutin secret pour l'élection à la Cour de justice de la République.
Ce scrutin se déroulera dans la salle des Conférences et la séance ne sera pas suspendue durant les opérations de vote.
Une seule délégation de vote est admise par sénateur.
Je remercie nos collègues Daniel Dubois et Annie Guillemot, secrétaires du Sénat, qui vont superviser ce scrutin.
Les juges à la Cour de justice de la République nouvellement élus seront immédiatement appelés à prêter serment devant le Sénat.
Je déclare ouvert le scrutin pour l'élection d'un juge titulaire et d'un juge suppléant à la Cour de justice de la République. Il sera clos dans une demi-heure.
Pour une école de la confiance (Procédure accélérée)
M. le président. - L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, pour une école de la confiance.
M. Jean-Pierre Sueur. - Le scrutin se tient pendant que le ministre parle.
Discussion générale
M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse . - Je tiens d'abord à m'associer à l'hommage que vous venez de rendre, monsieur le Président, aux deux héros de la Nation dont je suggère que des établissements scolaires puissent prendre le nom, comme je l'avais fait pour le colonel Arnaud Beltrame. Il est très important que l'exemple de ces hommes soit donné à nos jeunes, car ils incarnent la défense des valeurs de notre République.
Depuis des années, notre école souffre d'une difficulté à réduire les inégalités sociales, ce qui obère les chances de s'insérer dans la vie professionnelle. Plus de 20 % des élèves ne maîtrisent pas les savoirs fondamentaux à l'issue de l'école primaire, et près de 23 % des jeunes sont au chômage. Nous nous interrogeons sur les raisons de ce phénomène.
Nous avons l'impérieuse nécessité de combattre ces chiffres et cette réalité sociale qui révèlent un sentiment de relégation, avec une constance d'airain.
Depuis deux ans, ma priorité absolue et constante est l'école primaire qui joue un rôle emblématique car c'est par elle que tout commence pour l'élève comme pour la République. C'est par une politique d'élévation résolue du niveau, de justice sociale et d'équité territoriale que nous hisserons l'école française parmi les meilleures du monde, ce qu'elle a su être.
Nous ferons de la France une grande puissance éducative.
Ce projet de loi ne résout pas tous les problèmes mais creuse le sillon sur lequel nous travaillons depuis deux ans.
Pour l'école primaire, nous avons divisé par deux les classes de CP et de CE1 dans les territoires les plus défavorisés. Quelque 190 000 élèves bénéficient déjà de conditions particulières en élémentaire. Ce sera 300 000 élèves à la rentrée prochaine. Nous appuierons une politique pédagogique renouvelée, pour de meilleures pratiques et une meilleure acquisition des savoirs fondamentaux.
Nous renforçons l'évaluation en CP et en CE1 pour mesurer les progrès individuels et collectifs de nos élèves.
Nous investissons massivement dans le primaire avec la création de 2 300 postes pour consolider les REP, REP+ (réseau d'éducation prioritaire) et l'école rurale.
Ce projet de loi s'inscrit dans notre priorité éducative rappelée par le président de la République le 25 avril. Il a notamment annoncé le dédoublement des grandes sections en REP, la fin de la fermeture d'écoles sans l'accord du maire et la limite à 24 élèves maximum en grande section, CP et CE1 partout en France. L'éducation est donc le coeur du projet de société que nous portons.
J'espère que nos débats rectifieront les erreurs et mensonges colportés sur ce projet de loi apparus entre l'examen à l'Assemblée nationale et au Sénat. Discutons sur des bases réelles. Nous pouvons avoir des points de vue différents mais discutons du projet de loi et non des rumeurs.
L'article premier ne vise ainsi en aucun cas à museler les professeurs, comme cela a été dit. Il rappelle à ceux qui veulent être fonctionnaires leurs droits et leurs devoirs. Il rappelle surtout le respect de la communauté éducative par les familles.
L'article 2 ter ne supprime pas la visite médicale à 6 ans ; c'est tout l'inverse : il avance à 3 ans la première visite pour un parcours de santé renforcé de tous les enfants.
C'est un projet de loi profondément social qui crée les conditions d'une véritable ascension sociale par l'éducation.
À l'article 14, il n'a jamais été question de remplacer des enseignants par des étudiants. C'est tout l'inverse. Cette mesure profondément sociale qu'est la préprofessionnalisation concernera des étudiants boursiers qui recevront 700 euros par mois pour l'aide aux devoirs, en plus de leur bourse, et non pour remplacer les professeurs, mais bien pour les seconder.
Puissent nos débats rétablir des vérités simples.
M. Éric Bocquet. - Nous ne savons pas lire, nous n'avons pas été à l'école !
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. - Ne contribuons pas à la désespérance qui va contre le progrès social. (Exclamations sur les bancs du groupe CRCE, tandis qu'on applaudit sur quelques bancs du groupe LaREM.)
Le premier levier pour le progrès effectif de tous les élèves est le primaire, notamment la maternelle. C'est là qu'il est possible d'attaquer les inégalités à la racine. J'ai entendu dire que le Gouvernement voulait supprimer les écoles maternelles : c'est faux ! (Nouvelles exclamations sur les mêmes bancs) C'est une grande fierté pour moi d'appartenir à un Gouvernement à qui le président de la République nous a demandé de nous inscrire dans la lignée des grandes lois républicaines sur l'obligation scolaire avec l'obligation d'instruction dès 3 ans. Nous ne voulons pas supprimer la maternelle !
Mme Éliane Assassi. - Nous non plus !
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. - Depuis la fin du XIXe siècle, il n'y avait eu aucun avancement de l'âge de la scolarité obligatoire. Or la maternelle est un moment décisif pour la maîtrise des savoirs fondamentaux. L'apprentissage du vocabulaire, l'éveil de la sensibilité aux arts, le développement psychomoteur et affectif, la socialisation par le respect des règles et par le jeu, l'amour du travail bien fait sont fondamentaux pour une école de la confiance, une école du bonheur.
La formation obligatoire de 16 ans à 18 ans est essentielle mais a été peu évoquée, mais il s'agit aussi d'une dimension sociale essentielle.
Mme Éliane Assassi. - Vous voyez !
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. - J'espère trouver une approbation sur vos bancs.
La formation des professeurs est un autre levier essentiel. Aujourd'hui, elle est trop hétérogène. Ce n'est plus possible. Appliquons le principe d'égalité, en créant les Instituts nationaux supérieurs du professorat et de l'éducation (Inspé). Le changement de nom est important. C'est un cadre d'excellence, commun, proche de la recherche, qui est créé. Nos professeurs doivent avoir le droit à l'expérimentation. C'est la marque de notre confiance à l'égard des femmes et des hommes qui travaillent au plus près des réalités et de la diversité des territoires.
Libérer, protéger, unir sont les clés de voûte de ce texte. Il n'y a pas d'expérimentation réussie sans évaluation. Nous approfondirons la culture de l'évaluation pour un système pionnier du XXIe siècle.
Nous aurons une vision complète grâce au Conseil d'évaluation de l'école (CÉÉ) L'autoévaluation responsabilisera tous les acteurs.
L'école demeure le visage de la République, celui du progrès et de l'avenir.
Nos élèves doivent maîtriser le français et les langues étrangères pour être de leur temps et de leur espace.
Aujourd'hui, l'enseignement international est souvent réservé aux familles privilégiées, dans des écoles privées. Nous allons l'ouvrir vers l'Europe et le monde. Ce sera complémentaire d'autres politiques européennes, comme les échanges Erasmus qui doivent se multiplier aussi bien pour les élèves que pour les professeurs.
Grâce à ce projet de loi, l'école de la République reste fidèle à sa mission ; c'est la maison commune de toute la jeunesse de France. Elle doit apporter à tous la même chance de réussir et la même envie de saisir cette chance.
Il revient à l'État d'assurer la protection de tous ses enfants. Si la liberté d'instruction est un droit fondamental, nous devons contrôler la qualité des enseignements qu'ils reçoivent.
Par ce texte nous faisons pleinement confiance aux territoires, nous devons les aider à expérimenter et à innover. Nous n'écarterons aucune organisation qui pourrait aider les territoires. Nous devons aider plus ceux qui ont besoin de plus : c'est ce que nous faisons pour l'éducation prioritaire, pour l'école rurale et pour l'outre-mer. Un rectorat de plein exercice sera ainsi créé à Mayotte qui a tant besoin du soutien de la communauté nationale.
Cette politique d'équité s'adresse particulièrement aux élèves les plus fragiles, dont les élèves en situation de handicap. J'en termine par ce point, essentiel à mes yeux. Le défi à relever est immense, même si beaucoup a été fait depuis les années 2000. Notre ambition est de prendre en charge tous les enfants le plus rapidement possible après diagnostic.
Nous mettons en place le levier inédit d'un grand service public d'une école inclusive.
Nous voulons une amélioration visible dès la rentrée prochaine par un recrutement de 80 000 accompagnants, sur tout le territoire ; ces personnes seront formées avant la rentrée. Nous voulons que les accompagnants se sentent appartenir pleinement à la communauté éducative, notamment par la signature de contrats de trois ans, renouvelables une fois, pouvant déboucher sur des CDI. Donnons cette espérance aux élèves et aux familles.
Ce projet de loi a l'ambition de permettre à l'école d'être le lieu de tous les possibles, premier outil de la justice sociale. L'école de la confiance est une aspiration sociale profonde pour plus de liberté, d'unité et de protection.
Notre société française est trop défiante. Enclenchons le cercle vertueux de la confiance en nous basant sur des textes exacts dans un esprit de progrès et de discussion.
M. Rachid Temal. - Nous sommes sauvés !
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. - Notre philosophie de la confiance converge avec la philosophie de la démocratie parlementaire, en proposant et en faisant confiance au lieu d'imposer. L'abaissement de la scolarité obligatoire et la formation de 16 ans à 18 ans sont des acquis fondamentaux, mais ce ne sont pas les seuls de ce texte. Au centre de ce texte se trouvent les professeurs, sans lesquels rien n'est possible.
Je suis fier de présenter un texte qui porte une politique ambitieuse donnant à nos enfants des racines et des ailes (On ironise sur les bancs du groupe CRCE.) pour une société de liberté, d'égalité et de fraternité. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, Les Indépendants et UC)
M. Max Brisson, rapporteur de la commission de la culture . - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Que n'a-t-on entendu sur le sort réservé à ce projet de loi par notre commission, qui aurait saqué, mis au lance-flammes...
Nous avons porté un regard critique sur ce projet de loi, qui peut nous le reprocher ? Mais c'était pour l'améliorer, le compléter et le densifier. Nous avons déploré que la méthode fasse fi de la concertation et du dialogue social, comme tout ce qui concerne l'établissement public local d'enseignement des savoirs fondamentaux (EPLESF), l'école inclusive ou les multiples habilitations à légiférer par ordonnances.
Vous voulez une école plus juste, certes, mais ce projet de loi est incomplet. En abaissant l'âge de l'instruction obligatoire à 3 ans, vous proposez une avancée démocratique que l'école n'avait pas connue depuis les lois fondatrices de Jules Ferry, mais ce progrès est symbolique puisqu'il ne concernera que 2 % d'une classe d'âge. Cette mesure emblématique est, pour l'essentiel, une mesure d'adaptation. Hormis en Guyane et à Mayotte où son application se heurtera à de grandes difficultés, cette mesure n'aura pas de réel impact sur les autres territoires français : la loi ne fait que suivre le mouvement de la société.
Les autres dispositions de ce texte sont d'importance variable, alors qu'un volet a été oublié : les mesures relatives à la gestion des ressources humaines sont en effet absentes du texte, alors qu'il s'agit d'un levier majeur, de même que les dispositions relatives au métier d'enseignant. Nos professeurs ne se sentent plus écoutés ni considérés. Or la valeur de l'école se mesure aussi au moral des enseignants.
Notre école, celle de la République, méritait plus. Il y a urgence. Les évaluations se succèdent et les acquis de nos élèves se dégradent. L'échec scolaire est de plus en plus précoce, et il ne se réduit pas. Plus grave, la promesse de l'école républicaine n'est pas remplie : notre système est l'un des plus inégalitaires des pays développés. Vous connaissez ces problèmes. La commission était résolument et raisonnablement critique, mais tout aussi constructive.
Le Sénat est attaché à la qualité de la loi ; il est ouvert, pragmatique, conscient des diversités locales.
Notre commission a voulu un débat digne de notre école, sujet politique source de divergences mais aussi de convergences. Pas moins de 141 amendements de presque tous les groupes ont construit un texte plus équilibré et plus abouti, portant la voix des territoires jusqu'alors trop négligée. La commission a amélioré le texte, en réécrivant l'article premier, en réaffirmant l'autorité des professeurs et le respect qui leur est dû par les élèves et les familles. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe Les Républicains)
La commission a été attentive à l'application de l'obligation d'instruction à partir de 3 ans, en pérennisant la dérogation accordée aux jardins d'enfants qui pourront continuer à accueillir les enfants de 3 à 6 ans.
Elle a modifié l'article 4 pour assurer la juste compensation des communes qui soutenaient déjà des écoles maternelles privées sous contrat.
À l'article 5, elle a donné aux familles des garanties de contrôle équitable. Elle a renforcé les modalités d'une école inclusive.
Se faisant l'écho de l'incompréhension suscité par l'article 6 quater, elle l'a supprimé. Un amendement de M. Grosperrin le rétablit en renforçant les garanties données aux élus locaux, aux enseignants, aux directeurs et aux parents.
Votre commission a approuvé le principe de l'évaluation des établissements et de l'instauration du conseil de l'évaluation de l'école (CÉÉ) à l'article 9. Elle a néanmoins revu la composition de l'instance. Enfin, elle en a renforcé l'indépendance vis-à-vis du ministre : son président sera nommé par le chef de l'État, les six personnalités qualifiées seront nommées par les présidents des assemblées parlementaires et la durée du mandat sera portée à six ans afin de dépasser les alternances politiques.
Comblant les lacunes, nous avons renforcé des mesures de gestion de ressources humaines avec, outre le renforcement de la formation initiale durant les trois premières années de carrière, une obligation de formation continue des enseignants en dehors des heures de classe, la création d'un statut de directeurs d'école, l'association des chefs d'établissement aux affectations qui concernent leurs établissements. Dans les établissements les plus difficiles, les enseignants les plus chevronnés et les plus motivés devront être nommés.
Notre commission a supprimé l'article 17. On ne peut donner de blanc-seing sur l'organisation des rectorats. Le Gouvernement a joué le jeu et inscrit dans la loi les dispositions de l'ordonnance prévue.
Notre commission a amendé fortement et amélioré ce texte, qui sera encore débattu et enrichi dans l'hémicycle.
J'espère un débat digne, riche ; l'école le mérite ; les professeurs nous regardent. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC)
Le scrutin pour l'élection d'un juge titulaire et d'un juge suppléant à la Cour de justice de la République est clos.
Question préalable
M. le président. - Motion n°1, présentée par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
En application de l'article 44, alinéa 3, du Règlement, le Sénat décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale en première lecture, pour une école de la confiance (n°474, 2018-2019).
M. Pierre Ouzoulias . - Peu de temps après votre nomination, vous avez déclaré : « L'école n'a pas besoin d'une nouvelle loi à chaque alternance politique. Elle peut se gouverner autrement ». Vous avez tenu parole en transformant profondément l'organisation, les finalités et le fonctionnement de l'Éducation nationale en transformant considérablement l'enseignement professionnel, le baccalauréat, le lycée et les programmes. De toutes ces réformes, notre Haute Assemblée n'a pas eu à connaître, hormis dans le cadre des débats qu'elle a elle-même convoqués. Très récemment, Monsieur Pierre Mathiot déclarait à propos de la réforme du baccalauréat : « C'est une réforme qui est lourde, structurelle, et qui concerne un secteur qui n'a pas été réformé depuis un demi-siècle ». Il eut été légitime que le Sénat vous entendît sur les finalités d'un changement aussi radical.
À ces bouleversements majeurs, s'ajoutent les restrictions considérables imposées à l'accès à l'enseignement supérieur par la loi Orientation et réussite des étudiants que votre collègue continue de nous présenter comme une remédiation strictement technique au recours illégal au tirage au sort.
Progressivement, parents et enseignants comprennent que toutes ces réformes font système et que, loin d'être dictées par des nécessités pratiques, elles sont inspirées par une pensée politique globale que vous n'assumez pas. Parents et enseignants mesurent, de plus en plus, le décalage qui existe entre les déclarations officielles et la réalité. Cette distorsion entretient du doute, de l'inquiétude et finalement de la suspicion. Élus de terrain, nous avons mesuré combien la défiance était grande envers des mesures dont nos concitoyens perçoivent qu'elles sont dictées par des objectifs dont on leur cache le dessein. Vous avez parlé de bobards, Monsieur le ministre, nous percevons surtout de l'incompréhension, du soupçon et de la méfiance.
Cette loi aurait pu être l'occasion d'une déclaration sur vos intentions politiques véritables. Notre commission a considéré qu'elle était, tout au contraire, bavarde, peu lisible et confuse. Je partage les critiques exprimées par notre rapporteur. L'objet de cette loi était de rétablir la confiance entre le corps enseignant, son ministère et les parents. Je crains qu'elle n'entretienne davantage la défiance. Enfin et surtout, alors que nous dressons le constat commun d'une école incapable de corriger les inégalités sociales d'accès au savoir, votre projet est dépourvu de l'ambition de mobiliser les ressources de la nation pour rebâtir une éducation nationale au service de l'émancipation, du développement humain et de l'égalité des droits politiques.
Nous aurions pu ensemble réaliser, pour le XXIe siècle, la généreuse utopie que Condorcet esquissait ainsi, en 1792 : « Assurer [a? tous les individus de l'espèce humaine] la facilité de perfectionner son industrie, de se rendre capable des fonctions sociales, auxquelles il a droit d'être appelé, de développer toute l'étendue de talents qu'il a reçus de la nature ; et par là établir, entre les Citoyens, une égalité? de fait, et rendre réelle l'égalité politique reconnue par la loi ».
Nonobstant certaines dispositions qui auraient pu être mises en oeuvre par la voie réglementaire, l'objet législatif principal de ce texte est de satisfaire l'annonce présidentielle de l'abaissement de l'âge de la scolarisation obligatoire à trois ans. Les maires ont vite compris qu'elle se réaliserait grâce à la contribution des finances municipales. Historiquement, cette loi apparaît comme l'extension, jusqu'à cet âge, des mesures pécuniaires de la loi du 31 décembre 1959, dite loi Debré. Toutefois, son manque d'ambition l'en distingue absolument. La loi Debré portait à 16 ans la scolarité obligatoire. Cette extension s'accompagna d'un programme massif de recrutement d'enseignants. Dans le même temps, de 1960 à 1969, la taille moyenne des classes des écoles primaires publiques fut réduite de 30 à 26 élèves, ce qui imposa l'embauche de 4 000 instituteurs pendant ces dix années.
Alors que la dépense publique est aujourd'hui considérée comme un abject vice par la doxa libérale, Louis Cros, haut fonctionnaire du ministère de l'éducation nationale, expliquait ainsi, en 1961, les nécessités d'un investissement massif de l'État gaullien dans l'enseignement : « Pour la première fois dans l'histoire, les aspirations idéalistes et les nécessités pratiques en matière d'enseignement ont cessé de se contredire. En France, [...] les exigences de la prospérité et de l'équilibre économique s'ajoutent maintenant aux raisons de justice et d'égalité sociales pour rendre nécessaire, en même temps que désirable, l'instruction la plus développée possible pour le plus grand nombre possible d'enfants. [...] la France a besoin de développer toutes ses ressources intellectuelles. Sinon elle deviendrait un pays intellectuellement sous-développé, qui maintiendrait artificiellement une économie anachronique à coup de subventions économiques, ou d'indemnités de chômage quand des générations plus nombreuses parviendront à l'âge d'homme ».
Près de soixante ans plus tard, nous pourrions dresser le même constat et nourrir la même ambition. L'accélération du progrès technique, la révolution du numérique et la quantité exponentielle d'informations que nous devons traiter tous les jours exigeraient que notre enseignement franchisse une nouvelle étape. Ne serait-il pas temps de prolonger l'enseignement obligatoire jusqu'à la majorité ? C'était l'une des préconisations du plan conçu, à la Libération, conformément au programme de gouvernement du Conseil national de la Résistance, par Paul Langevin et Henri Wallon. Combien de temps nous faudra-t-il encore pour réaliser cette élévation supplémentaire de la durée d'instruction ou de formation pour celles et ceux qui, trop nombreux, la quittent toujours, sans diplôme, à 16 ans ?
Certes, votre projet instaure une obligation de formation pour les jeunes âgés de 16 à? 18 ans, mais cette mesure est symbolique. L'abaissement de l'âge de la scolarisation à 3 ans l'est tout autant en France métropolitaine. Il demandera toutefois un véritable effort pour être appliqué dans les Outre-mer et sur ce point nous attendons de votre Gouvernement des engagements fermes et précis.
Ce qui caractérise ce texte, c'est son manque d'ambition pour l'école et l'accumulation de mesures techniques, souvent discutables, ne peut cacher cette vacuité. Elle est d'autant plus décevante que, dans le même temps, le Président de la République annonçait, le 25 avril dernier, un plan d'investissement massif en faveur de l'école. Les promesses donnent le vertige : dédoublement de 6 000 classes supplémentaires, limitation à 24 du nombre d'élèves dans toutes les classes de la grande section de maternelle au CE1, revalorisation du métier de professeur, moratoire pour la fermeture des classes... Pour assurer seulement le dédoublement des classes, dans son programme, le candidat Emmanuel Macron avait estimé à 12 000 postes le besoin de recrutement.
Nous ne doutons pas de la volonté du Président de la République d'honorer rapidement ses engagements. Votre collègue en charge de l'enseignement supérieur et de la recherche a lancé une grande concertation dont les conclusions fourniront la matière d'une grande loi de programmation pluriannuelle de la recherche qui sera présentée au Parlement avant la fin de l'année. Pour satisfaire les ambitions du président de la République en faveur de l'école nous vous proposons la même méthode.
C'est l'objet de cette motion tendant à opposer la question préalable : nous donner collectivement le temps de préparer ensemble, avec tous les acteurs de l'éducation, la grande loi dont l'école de la République a besoin pour, selon les mots de Condorcet, « contribuer [au] perfectionnement général et graduel de l'espèce humaine ; dernier but vers lequel toute institution sociale doit être dirigée ». (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE et sur quelques bancs du groupe SOCR)
M. Philippe Mouiller. - Le groupe Les Républicains s'opposera à cette motion. Certes, nous avons noté les faiblesses du projet de loi, pour ne pas dire son absence de contenu. Monsieur le Ministre, vous aviez d'ailleurs déclaré, au début du quinquennat, qu'il n'y aurait pas de loi Blanquer, que vous-même n'en ressentiez pas la nécessité.
Avec ce texte, le Gouvernement fait surtout acte de communication en envoyant plusieurs messages symboliques. L'abaissement à 3 ans de la scolarisation obligatoire ne concernera qu'une infime proportion d'enfants, puisque beaucoup sont déjà scolarisés dès 3 ans. Le principe d'une formation obligatoire entre 16 et 18 ans est un voeu pieux qui ne règle en rien le problème crucial de la déscolarisation. Le reste du projet de loi consiste en diverses mesures sans grande cohérence entre elles.
Reste que notre commission de la culture, et je salue le travail de grande qualité de Max Brisson, a largement amélioré le texte. Elle a introduit de la souplesse dans l'application du principe de scolarisation à 3 ans et garantit la compensation pour toutes les communes ; elle a complété le chapitre dédié à l'école inclusive pour un meilleur accompagnement des élèves en situation de handicap ; elle a rassuré parents, enseignants directeurs et élus locaux en supprimant l'article 6 quater, introduit sans concertation préalable à l'Assemblée nationale. La commission a également traité des sujets qui ne figuraient pas dans le projet de loi sur lesquels nous appelons à légiférer de longue date : le statut des directeurs d'établissements ou encore la formation continue. Je m'arrête là car la liste est longue : les 141 amendements adoptés redessinent le texte.
Il serait dommage de faire fi de ce travail en renvoyant un texte inachevé et bancal à l'Assemblée national. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)
M. Max Brisson, rapporteur. - L'avis est évidemment défavorable. L'école de la République appelle l'union de tous les efforts, et non la clôture des débats. Cette motion remettrait en cause les fruits de notre travail collectif.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. - Il y a quelque chose de paradoxal à vouloir balayer le travail du Sénat quand l'on souhaite que les assemblées se saisissent des grands problèmes de l'éducation.
L'éducation relève, en effet, d'une hiérarchie des normes un peu particulière qui mériterait discussion. En revanche, l'on ne peut pas me reprocher de ne pas être venu devant le Sénat expliquer mes grandes réformes. Certes, c'était à votre initiative mais toujours avec ma très bonne volonté.
Des choses importantes ont été faites depuis deux ans, avez-vous affirmé. J'y vois une sorte d'hommage. (Sourires)
J'avais dit qu'il n'y aurait pas une loi Blanquer, c'est exact, mais resituons ces propos dans leur contexte. Je confirme que je ne vois pas la nécessité d'une loi en début de mandat, qui porterait le nom du ministre, qui prétendrait tout changer. Deux ans ont passé, cette loi règle certains problèmes, d'autres l'ont été avant, d'autres sont encore à résoudre - la question de ressources humaines, notamment, qui ne relève pas de la loi, ce qui n'empêche pas d'en discuter avec vous.
Cette loi est respectueuse des assemblées. Je m'étonne qu'on me reproche d'avoir accepté des amendements à l'Assemblée nationale. J'y suis venu les mains ouvertes, comme je viens devant vous. L'inspiration vient de la droite comme de la gauche, notamment sur le dispositif de formation de 16 à 18 ans qui constitue une première étape dans la direction du plan Langevin-Wallon auquel vous avez fait une référence heureuse. Je m'étonne d'ailleurs qu'il ait été aussi discuté. Dire que ce dispositif n'a aucune portée n'apporte rien au débat.
Je suis certain que ces journées de discussion amélioreront substantiellement le texte, avis défavorable. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs des groupes RDSE et UC)
M. Antoine Karam. - J'ai passé quarante ans à enseigner ; j'ai vu de multiples tentatives de réformes, d'où qu'elles viennent, avorter. À chaque fois, on nous expliquait qu'il était urgent d'attendre, que les acteurs n'étaient pas prêts. Cette réforme est différente, il y a une véritable volonté de changer les choses, de manière cohérente, et dans un esprit constructif. Le devoir d'exemplarité, par exemple ; nous y sommes très attachés. Un enseignant ne doit pas arriver en retard, ne pas partir plus tôt, porter une tenue vestimentaire correcte. Idem pour les parents, ils ne doivent pas venir régler leurs comptes à l'école, parce qu'il y a un petit conflit... Chacun doit balayer devant sa porte.
L'instruction obligatoire à 3 ans, ce n'est pas symbolique pour 25 % des enfants de Mayotte et 30 % des enfants de Guyane. Les communes de l'intérieur, comme les communes du littoral, seront accompagnées pour construire, selon des normes dérogatoires, les locaux qui manquent. Le groupe LaREM votera contre. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM ; M. Jean-Marc Gabouty applaudit également.)
La motion n°1 n'est pas adoptée.
Discussion générale (Suite)
M. Stéphane Ravier . - (Mouvements divers) Le texte aurait dû être fondamental ; il est décevant. Même pas de nouveau monde ! On y retrouve les dérives des idéologues déracinés du ministère de l'Éducation nationale. Foin de la transmission de l'héritage et de la culture, on privilégie la « société inclusive » à l'intégration dans la société, tout un symbole de la disparition d'une vision globale de la communauté du bien commun et de la Nation.
École de la confiance ? La confiance ne se décrète pas, elle se mérite ; et rien dans ce texte ne la favorisera. L'élève n'est pas l'égal du maître. On se souvient tous de cette vidéo d'un professeur braqué par un élève avec une arme qui s'est révélée factice et du hashtag #pasdevague.
Rien sur la sécurité à l'école, évidemment. Ouvrez une école et vous fermerez une prison, disait Victor Hugo. Ce sont les professeurs qui sont désormais incarcérés dans leur classe, isolés derrière les barreaux de la violence venue des quartiers ethniques (M. Philippe Dallier s'indigne.) dans l'indifférence de leur ministre de tutelle.
Rien dans ce texte non plus sur l'immigration !
M. Rachid Temal. - Ça faisait longtemps !
M. Stéphane Ravier. - L'instruction obligatoire à 3 ans ? Un pur gadget, qui sera payé par les collectivités territoriales. Résultat : en marche vers toujours plus d'échec et un communautarisme exacerbé.
Mme Éliane Assassi. - Ben voyons !
Mme Françoise Laborde. - C'est Mme Assassi qui a le mot de la fin !
M. Laurent Lafon . - (Applaudissements sur les bancs du groupe UC) L'examen de ce texte marque l'aboutissement d'un important travail préparatoire - et j'en remercie le rapporteur et la présidente Catherine Morin-Desailly.
Le déchaînement de passions qu'entraîne souvent un texte sur l'Éducation nationale a encore eu lieu. C'est dire l'extrême sensibilité des acteurs et leur attachement au système actuel qui, s'il ne les satisfait pas, leur semble protecteur.
Ce texte, par sa portée limitée, ne méritait sans doute pas l'ampleur des réactions qu'il a suscitées. L'instruction obligatoire à 3 ans ne sera pas une révolution en métropole. Le problème du financement par les communes semble avoir été mal pris en compte, le rapporteur y a apporté heureusement une réponse satisfaisante.
Un Conseil d'évaluation de l'école remplacerait le Conseil national d'évaluation du système scolaire, le Cnesco. La commission a, là aussi, apporté une réponse à la crainte d'une mainmise accrue du ministère sur l'organisme. Le groupe UC, quant à lui, considère que nous manquons de recul sur le fonctionnement d'une instance qui n'a que trois ans pour justifier une transformation aussi brutale.
Ce texte appelle encore à une meilleure prise en compte du handicap, un meilleur accompagnement et une sensibilisation des élèves. Nous nous réjouissons que l'école soit rendue plus inclusive. Les pôles inclusifs d'accompagnement localisé, les PIAL, suscitent cependant quelques inquiétudes.
Les établissements publics des savoirs fondamentaux sont la mesure la plus controversée. La commission a supprimé, à l'unanimité, l'article 6 quater. La maladresse avec laquelle ce dispositif a été introduit et l'absence d'étude d'impact le justifiaient. D'autant que cet épisode vient après des fermetures de classes et d'écoles, agressives ou mal comprises ces dernières années. Le rapport Mathiot-Azéma devait apaiser les tensions, nous travaillons également avec Jean-Yves Roux à un rapport sur le même sujet et voici que l'article 6 quater avive les craintes. La confiance ne s'impose pas, elle se construit par le dialogue et la pédagogie.
Les suites données à ce texte sont également sources d'interrogation. Le président de la République a fait des annonces qui se télescopent avec certains des aspects de ce projet de loi.
Enfin, le droit à l'expérimentation aurait pu concerner des champs plus larges, notamment sur le plan administratif. Quand la moindre évolution de l'éducation nationale peut provoquer des réactions parfois irrationnelles, la solution repose sur davantage de confiance placée dans les initiatives locales. L'intitulé de ce projet de loi prendrait ainsi tout son sens. (Applaudissements sur les bancs du groupe UC, ainsi que sur quelques bancs du groupe LaREM)
Cour de justice de la République
Résultat du scrutin
M. le président. - Voici le résultat du scrutin pour l'élection d'un juge titulaire et d'un juge suppléant à la Cour de justice de la République :
Nombre de votants : 271
Suffrages exprimés : 242
Majorité absolue des suffrages exprimés : 122
Bulletins blancs : 27
Bulletins nuls : 2
Ont obtenu :
Mme Catherine Troendlé, titulaire : 242 voix
Mme Muriel Jourda, suppléante : 242 voix
Ces candidates ayant obtenu la majorité absolue des suffrages exprimés, elles sont proclamées juges à la Cour de justice de la République. (Applaudissements)
Prestation de serment
M. le président. - Mme Catherine Troendlé, juge titulaire, et Mme Muriel Jourda, juge suppléante, à la Cour de justice de la République vont être appelées à prêter, devant le Sénat, le serment prévu par l'article 2 de la loi organique du 23 novembre 1993 sur la Cour de justice de la République.
Voici la formule du serment : « Je jure et promets de bien et fidèlement remplir mes fonctions, de garder le secret des délibérations et des votes, et de me conduire en tout comme un digne et loyal magistrat. »
Mme Catherine Troendlé, juge titulaire, se lève et prête serment.
Mme Muriel Jourda, juge suppléante, se lève et prête serment.
Acte est donné par le Sénat du serment qui vient d'être prêté devant lui.
présidence de M. Jean-Marc Gabouty, vice-président
Pour une école de la confiance (Procédure accélérée - Suite)
Discussion générale (Suite)
Mme Colette Mélot . - L'école n'est plus ce qu'elle était ; ce n'est pas de la nostalgie, c'est un constat. L'école n'est plus ce qu'elle était, les enfants, les parents et les enseignants non plus. Il faut donc inventer l'école de demain et nous ne pouvons qu'adhérer à la vision républicaine du ministre d'une école de l'excellence et de la bienveillance, qui donne priorité à la lutte contre les inégalités.
Ce texte s'inscrit dans les grandes lois républicaines. Après la loi Ferry de 1882, loi de 1936 rendant l'instruction obligatoire jusqu'à 14 ans, loi de 1959 portant le seuil à 16 ans, vient cette loi qui rend l'instruction obligatoire dès 3 ans et prévoit une obligatoire de formation ou d'activité pour les 16-18 ans.
Quand 97 % des enfants de 3 ans sont déjà scolarisés, nous transformons simplement une liberté d'instruction précoce, déjà largement diffusée en France, en obligation légale. Ne seront concernés que 26 000 enfants, quand l'échec scolaire en touche 100 000. Au grand dam des élus locaux, le projet de loi initial ne prévoyait pas de pleine compensation des charges occasionnées pour les communes. Cette exigence a été introduite par la commission de la culture du Sénat, à l'initiative de notre rapporteur, Max Brisson, dont je salue la qualité du travail. Nous nous félicitons également des aménagements d'assiduité prévus durant la première année d'école maternelle.
L'école française garde cette particularité de s'organiser collégialement dans un système éducatif partout ailleurs très centralisé. Cette question agite les débats depuis bien longtemps avec l'apparition des établissements publics de l'enseignement primaire. La commission a créé un lien hiérarchique entre professeurs d'école et directeur. En réalité, les directeurs ont surtout besoin d'un véritable statut - cela mérite un texte à part, qui doit faire l'objet d'une concertation.
La première finalité de l'école est d'aider les jeunes à trouver un métier, une place dans la société, qui correspondent le plus possible à leurs aspirations individuelles. Plus d'efforts sur l'éducation dans le monde d'aujourd'hui, c'est moins de chômage dans le monde de demain. Après l'acquisition des savoirs fondamentaux, la maîtrise des langues étrangères est un autre cheval de bataille. Nous devons tout mettre en oeuvre pour améliorer la qualité de l'enseignement, les conditions de travail des enseignants et favoriser la réussite des élèves.
Deuxième finalité de l'école, forger un certain sens de la citoyenneté en proposant un terreau de valeurs, un cadre, afin que chacun puisse exercer ses responsabilités en toute indépendance, en évitant le piège de la désinformation.
Enfin, il appartient à l'école de sensibiliser les élèves aux défis du XXIe siècle que sont la préservation de l'environnement et la protection du modèle démocratique - nous vous proposerons des amendements.
Le groupe Les Indépendants ne croit pas à un grand soir de l'éducation ; ce que nous souhaitons, c'est faire évoluer les résultats du système éducatif. Nos progrès en tant que Nation dépendent de nos progrès en matière d'éducation, comme le disait John Fitzgerald Kennedy. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Indépendants)
M. Antoine Karam . - Je veux d'abord adresser un message de soutien aux familles et à la communauté éducative du collège Gran Man Difou de Maripasoula en Guyane, endeuillées par le suicide d'une jeune aide-documentaliste. Ce drame rappelle douloureusement le phénomène de suicides qui touche depuis trop longtemps nos concitoyens amérindiens et contre lequel l'école a sans nul doute un rôle fondamental à jouer.
Ce projet de loi est un marqueur de la politique engagée par le Gouvernement en faveur d'une élévation du niveau général des élèves et d'une école plus juste.
Dégradation des performances et des acquis, décrochage scolaire et inégalités, notre école doit relever de nombreux défis. Ce texte ne saurait à lui seul y répondre, parce que tout ne relève pas de la loi. En revanche, il s'inscrit dans une politique plus vaste, ambitieuse.
Depuis son adoption à l'Assemblée nationale, de vives inquiétudes se sont exprimées parfois en raison d'imprécisions réelles, le plus souvent à cause de rumeurs et de contre-vérités dangereuses. Le dialogue, que le ministre a engagé avec tous les acteurs, se poursuivra dans cet hémicycle pour les apaiser.
Incohérent, symbolique, inutile, disent certains... Ce texte est, surtout, social. Certes, 98 % des moins de 3 ans sont déjà scolarisés mais les 2 % restants ? La promesse républicaine doit être tenue pour tous les Français. Plus de 25 000 enfants supplémentaires rejoindront les bancs de la maternelle à la rentrée prochaine, dont respectivement 3 400 et 3 800 en Guyane et à Mayotte. Loin d'être symbolique, cette mesure constitue un défi colossal pour ces deux territoires. Malgré l'engagement réel de l'État, les communes guyanaises et mahoraises ne seront pas en mesure d'accueillir tous les enfants en septembre prochain. Les expériences de double vacation sont une première réponse mais ce n'est pas suffisant. À Saint-Laurent-du-Maroni, il faudrait construire une nouvelle école tous les neuf mois pour répondre à la pression démographique. Il faut donc donner plus de souplesse aux élus dans la construction d'infrastructures, notre rapporteur l'a bien compris.
Ce texte est social encore avec l'obligation de formation ou d'activité pour tous les jeunes de 16 à 18 ans, le renforcement de l'attractivité du métier de professeur avec le pré-recrutement et de l'école inclusive, via les PIAL notamment.
Dans le prolongement de ces mesures, le projet de loi porte de nouveaux outils pour les territoires. C'est le cas avec la création d'un rectorat de plein exercice à Mayotte et la réforme des instances de dialogue locales. C'est aussi le cas avec la création d'établissements publics locaux d'enseignement international, les Eplei, et les établissements publics locaux d'enseignement des savoirs fondamentaux, les EPLESF.
Je salue le travail de la commission qui a abordé ce texte avec pragmatisme. Notre groupe prendra part aux débats, en disant son attachement à certains principes. L'exemplarité, d'abord. Notre commission a réécrit l'article premier en conservant cette notion qui nous semble essentielle. Loin d'être un instrument pour museler les enseignants, cet article rappelle ce qui fonde la relation entre le maître et l'élève.
La libre administration des collectivités territoriales, ensuite. C'est à ce titre que certaines communes avaient fait le choix de participer à la prise en charge partielle des dépenses de fonctionnement des classes maternelles privées. C'est au nom de ce même principe que nous proposerons de supprimer la pleine compensation versée par l'État à ces communes.
Le dialogue social, encore. Notre commission a souhaité avancer sur le statut des directeurs d'école, en plaçant les enseignants sous leur autorité. Si nous sommes naturellement favorables à un statut, ce lien hiérarchique est loin de faire l'unanimité parmi les directeurs eux-mêmes. Ce statut doit être le fruit d'un dialogue avec les syndicats.
L'innovation territoriale, enfin. Notre commission a envoyé un signal fort en supprimant l'article 6 quater créant les EPLESF. Nous espérons trouver une rédaction qui rassure tous les acteurs.
Les nombreuses sollicitations dont nous avons fait l'objet témoignent des attentes des Français. Soyons à la hauteur pour tous nos enfants. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)
Mme Céline Brulin . - Je continue de trouver curieux le nom de ce projet de loi. Une école de la confiance conforterait le lien entre l'école et la commune, ces deux piliers de la République, auxquels nos concitoyens sont d'autant plus attachés qu'ils se sentent abandonnés et voient leur territoire se vider des services publics. Or vous tentez, monsieur le ministre, de briser ce lien, d'accélérer les regroupements, de créer des établissements XXL éloignés, avec des chefs d'établissement missionnés pour gérer des moyens financiers et des ressources humaines.
La commission a fort heureusement supprimé l'article 6 quater. C'est que la méfiance naît de l'expérience. Sur le terrain, les appels à considérer l'échelon intercommunal comme la nouvelle maille de l'organisation scolaire se multiplient. On enjoint de signer des conventions. Le Sénat, assemblée des territoires, ne peut pas demeurer sourd à cette inquiétude.
Une école de la confiance lutterait contre les inégalités. Or la création des établissements publics locaux d'enseignement international tourne le dos à cet objectif. Vous entérinez une école à deux vitesses alors que la colère gronde en France.
Une école de la confiance accompagnerait les communes dans la mise en place de l'instruction obligatoire à 3 ans. Les conséquences de cette mesure ne seront pas totalement compensées et l'école privée sera le grand gagnant. L'école obligatoire jusqu'à 18 ans serait bien plus efficace que l'obligation de formation ou d'activité prévue par le texte. Ce sera un comble si elle se traduit par une recherche d'emploi.
Une école de la confiance donnerait une formation, un statut et un salaire décent aux accompagnants des enfants handicapés. La mutualisation des moyens va à l'encontre de cela. Les rentrées sont de plus en plus chaotiques pour les élèves handicapés et leurs familles.
Interdire aux enseignants la moindre critique envers l'Éducation nationale est contraire au rôle citoyen des professeurs, qui forment des futurs citoyens.
Le remplacement du Cnesco par un organe qui n'aurait plus pour mission d'évaluer les politiques éducatives et dont la majorité des membres seraient nommés par vous-même participe de la même logique.
Un ministre qui voudrait regagner la confiance commencerait par tenir compte de la contestation qui s'exprime depuis des semaines. II traduirait les orientations données par le président de la République après le grand débat. Invoquer la confiance ne suffit pas à masquer la réalité d'un projet ultralibéral.
La confiance, c'est répondre à la promesse d'une école qui réduise les inégalités et fasse réussir le plus grand nombre. (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE)
Mme Maryvonne Blondin . - (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR) Le président de la République a dit qu'il y avait toujours quelque chose d'éminemment politique, au sens le plus noble et le plus profond, lorsqu'on parlait d'éducation. Cela est vrai, l'école constitue le fondement même de notre société, le creuset de la République et de ses valeurs.
Ce projet de loi détricote les acquis de la loi de 2013 et impose de nouveaux changements alors que l'évaluation des précédents n'a pas encore eu lieu. Les enseignants tentent désespérément de vous alerter sur la dégradation de leurs conditions de travail et de leur pouvoir d'achat, les violences quotidiennes auxquelles ils font face, leurs difficultés avec la hiérarchie. Ce texte ne leur apporte pas de réponse. Rien sur les ressources humaines, le bien-être du personnel, quand la confiance passe aussi par la responsabilité de l'employeur des 800 000 acteurs de l'éducation.
Le recours aux ordonnances témoigne de la volonté de limiter le débat parlementaire. La confiance ne se décrète pas dans un article de loi, a fortiori quand cette dernière suscite la défiance des principaux intéressés. Les enseignants ont toujours su adapter leur pédagogie aux évolutions de la société, faites-leur confiance.
Ce projet de loi entraînera des changements profonds dans notre système éducatif. Décrit comme fourre-tout, il interroge sur votre politique éducative. En réalité, votre projet est l'autonomie des établissements, la concurrence, l'évaluation et une école à deux vitesses dans un système libéral.
Quelle plus-value ce texte apporte-t-il ? La confiance qui lie nos concitoyens et l'école ne sera restaurée que quand les moyens seront fournis pour lutter contre tous les déterminismes. Nous devons garantir aux plus vulnérables la possibilité de se hisser aux meilleurs de leurs capacités et donner à tous l'envie et le plaisir d'aller à l'école. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR et sur quelques bancs du groupe CRCE)
Mme Mireille Jouve . - (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE) La communauté éducative, les élus locaux et les parents d'élèves sont inquiets. Leur angoisse n'est pas toujours fondée, elle n'est sans doute pas étrangère à l'insuffisance de la concertation et du dialogue. Les attentes des Français sont intactes, six ans après la loi de 2013. Les études PISA le montrent, l'évolution de notre système éducatif est inquiétante.
L'attractivité du métier d'enseignant est un levier essentiel. Rien dans ce projet de loi pour le renforcer alors que vous aviez, monsieur le ministre, qualifié le rapport Laborde-Brisson sur l'attractivité du métier d'enseignant d'inspirant. Notre commission a repris plusieurs de leurs préconisations : l'inscription de l'obligation de formation continue de tous les professeurs vient donc très opportunément enrichir ce texte. Le dispositif de préprofessionnalisation ouvert aux assistants d'éducation est également une bonne chose à condition que son objet ne soit pas détourné.
Le RDSE se félicite des mesures grâce auxquelles l'abaissement de la scolarité obligatoire à 3 ans ne pèsera pas sur les communes. Le principe de « qui faisait quoi avant » n'était pas équitable. Il ne fallait pas aider seulement le tiers des communes qui ne soutenaient pas financièrement les maternelles privées. Je salue la rédaction de la commission qui met tout le monde à égalité.
Une autre réforme scolaire ne sera pas sans conséquences financières pour nos communes. Il s'agit de l'extension aux grandes sections de maternelle du dédoublement des classes en REP ainsi que le plafonnement à 24 élèves à l'horizon 2022 des effectifs, hors REP, des classes de grande section de maternelle, de CP et de CE1. Cela signifie l'ouverture de 10 000 classes supplémentaires. Le 30 avril, le secrétaire d'État à la jeunesse m'a répondu, en substance, que je devais me réjouir. Je me réjouis mais cela n'empêche pas que nous ne voulons pas d'un État qui engage des réformes qui engagent surtout les autres, sans consultation préalable.
Nous souscrivons pleinement à l'abaissement à 3 ans de l'instruction obligatoire, même si sa portée sera limitée, pourvu qu'on précise, comme nous l'avons obtenu, que ce soit au plus près du domicile. Nous défendrons également que soit pris en compte le rythme biologique des élèves en petite section et pérenniserons les jardins d'enfants.
Poser une obligation d'éducation et de formation de 3 à 18 ans est une bonne chose mais les conditions dans lesquelles a été introduite cette disposition, par voie d'amendement et sans étude d'impact, la réduiront à l'état de symbole.
Les conditions d'exercice et d'encadrement de l'instruction en famille ont fait l'objet d'une attention particulière de notre commission. Nous veillerons à ce que ce recours, souvent précieux, ne soit pas dévoyé.
Il aurait fallu une évaluation du dispositif si important de l'EPSF. Les craintes sont nombreuses, notamment sur les regroupements forcés en zone rurale.
Nous nous réjouissons que le rapporteur ait renforcé l'indépendance et la pluralité du conseil d'évaluation de l'école.
La précarité professionnelle des accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH) n'est pas acceptable.
De la même manière qu'une réforme par ordonnance de la carte académique n'est plus adaptée, compte tenu du contexte, il faut associer tous les acteurs à une réforme des conseils départementaux de l'Éducation nationale et des conseils académiques de l'Éducation nationale. Nous continuerons donc à plaider pour la suppression de l'article 18. (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE)
M. Jacques Grosperrin . - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Les ministres de l'Éducation nationale se succèdent - près de cent sous la Ve République - et ne se ressemblent pas. Un, Pompidou, est devenu président de la République ; d'autres, Fillon ou Jospin, Premier ministre ; d'aucuns sont devenus académiciens, d'autres sont déjà oubliés...
Monsieur Blanquer, vous qui disiez préférer les petits matins aux grands soirs, cette réforme portera votre nom. Alors que vous faisiez jusque-là un parcours sans faute, l'annonce du président de la République sur la scolarisation dès 3 ans vous a obligé - peut-être trop rapidement - à écrire ce projet de loi. Au Sénat de le rectifier.
On a décrété l'instruction obligatoire à 3 ans, qui concerne déjà 97,5 % des élèves, sans se soucier des incidences financières pour les collectivités locales.
Berthoin, Savary, Jospin, Fillon, les lois se succèdent et ne se ressemblent pas. Parlera-t-on un jour de la loi Blanquer ? L'avenir le dira.
Les évaluations, elles, se succèdent et se ressemblent. TIMSS, sur les maths et les sciences, PISA : 25e sur 70 en 2012, la France est désormais à la 26e place. Les élèves français ont des résultats insatisfaisants aux évaluations. Je sais que vous en êtes conscient, que vous y travaillez, avec le dédoublement des classes.
L'article premier n'est pas normatif, le Conseil d'État l'a rappelé. Surtout, il risque de mettre en cause les enseignants au lieu de les soutenir, alors que 58 % déclarent avoir déjà subi insultes, bousculades ou agressions !
L'article 3 est surtout un outil de communication du président de la République, sachant que la formation professionnelle existe déjà.
L'article 10 transforme les ESPÉ en Inspé. Espérons surtout un changement dans le recrutement, le fonctionnement et la méthode...
L'article 6 quater a nourri les rumeurs et les fausses informations. Nous proposerons de le réécrire, pour plus de sécurité.
Nombre de rapports, dont celui de l'Assemblée nationale, prônent les regroupements, une meilleure liaison école-collège. Il faut un cadre juridique, d'où mon amendement qui insiste sur le volontariat, des collectivités territoriales comme de la communauté éducative. Les établissements en expérimentation demandent cette évolution, mais il faudra une délibération unanime de la collectivité locale, du conseil d'administration du collège et des conseillers de l'école. Enfin, il faut maintenir un directeur dans chaque école. C'est indispensable pour renouer la confiance avec les élus, les enseignants et les parents. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)
M. Stéphane Piednoir . - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Oscar Wilde disait que « Le seul moyen de se débarrasser d'une tentation, c'est d'y céder ». Vous confortez cette maxime, alors que vous disiez qu'il n'y aurait pas de loi Blanquer. La politique est ainsi faite... Il s'agit de concrétiser la promesse du candidat Macron de l'instruction obligatoire à 3 ans. Cela fera de nous les champions européens en matière de précocité de l'instruction, certes, mais on ne prend pas des mesures pour battre des records !
Le rythme d'un enfant de 3 ans n'est pas toujours adapté à la journée scolaire qui commence parfois à 7 h 30 pour s'achever à 18 heures. La cellule familiale doit rester le premier éducateur de l'enfant.
On généralise à l'ensemble du territoire national, sans tenir compte des conséquences pour les communes. Les élus locaux s'inquiètent de cette nouvelle charge.
Comme tout texte sur l'école, ce projet de loi a hystérisé le débat public. L'article 6 quater a donné lieu à des interprétations parfois malheureuses, parfois peu objectives. Le rapporteur, dont je salue le travail, a su entendre les craintes et a supprimé cet article qui risquait d'être le cheval de Troie de regroupements non désirés, tout en laissant une large place à l'expérimentation.
Quel est le but de la formation obligatoire jusqu'à 18 ans, prévue à l'article 3 bis ? Si le jeune n'est ni dans un établissement scolaire, ni en formation, ni au travail, où est-il ? La réponse est connue. À quoi servira cette mesure ? Allez donc la faire respecter dans certains quartiers...
M. Michel Savin. - Absolument.
M. Stéphane Piednoir. - Surtout en confiant la mission de contrôle aux petits bras musclés de nos missions locales ! J'aurais préféré que les 100 millions d'euros en année pleine aillent à des dispositifs qui ont fait leurs preuves, comme les écoles de la deuxième chance. (M. Michel Savin approuve.)
La pratique des assistants d'éducation est à encourager, mais attention à ne pas les transformer en système de remplacements. (Mme Maryvonne Blondin renchérit.)
L'article premier d'une loi en donne le ton. La notion d'exemplarité, très imprécise, suscite la défiance. Je préfère le terme de neutralité. Je vous proposerai de modifier l'intitulé en « projet de loi pour une école de la confiance et du respect », à l'heure où les agressions se multiplient.
Que les organisations syndicales commencent par respecter les directives de leur ministre de tutelle, qui a indiqué clairement que l'écriture inclusive n'était pas acceptable. (Marques d'approbation à droite et au centre) Sur ce point, je vous rejoins, Monsieur le Ministre : revenons aux fondamentaux sur le vocabulaire et la grammaire ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)
Mme Marie-Pierre Monier . - (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR) Nous ne partageons pas la même vision de l'école de la République, Monsieur le Ministre. Votre réforme du lycée augmente les inégalités territoriales, de même que la réforme de Parcoursup, les rythmes scolaires à la carte ou les suppressions de postes, alors que les 60 000 postes créés sous le quinquennat précédent compensaient à peine les suppressions sous Nicolas Sarkozy.
Une école de la confiance ? Votre loi suscite plutôt inquiétude, angoisse et défiance. Vous mettez à mal notre école, sans concertation avec les parents ou la communauté éducative, sans évaluation de ce qui a été fait. Freinons le train incessant des réformes !
Ce projet de loi est un patchwork. Vous ne proposez pas une vision politique, mais comptable, de l'éducation. Votre objectif ? Trouver des professeurs moins chers, réduire le nombre de directeurs d'école.
Certaines mesures sont positives, comme un meilleur contrôle de l'instruction en famille ou l'instruction obligatoire à partir de 3 ans - mais pas au détriment des communes !
Nous nous inquiétons du remplacement du Cnesco par un CÉÉ dont les membres seront essentiellement désignés par le ministère.
Sous couvert d'expérimentation, vous mettez les établissements en concurrence en autorisant des différences en nombre d'heures par matière. Autre choix comptable : confier des missions d'enseignement aux assistants d'éducation dès la L2.
Nous saluons la suppression à l'unanimité de l'article 6 quater. Ne le réintégrons pas dans le texte sous une autre rédaction. La création d'EPLESF renforcera les inégalités, alors que les fermetures de classes dans les écoles rurales mettent à mal le lien social.
La portée de certains articles a été aggravée en commission, avec la détérioration des conditions de travail et de formation des enseignants.
L'école de la République doit être le lieu de l'émancipation individuelle et collective, de l'acquisition des savoirs, de la formation de citoyens éclairés, responsables et libres.
L'article premier fait planer une suspicion injuste sur les enseignants, alors qu'ils ont besoin de reconnaissance, de respect, de revalorisation, de moyens, bref de confiance.
Vos choix sont cohérents et clairs. Cela rappelle l'attaque menée contre le système scolaire entre 2007 et 2012, à laquelle vous aviez pris part. Vous faites l'éloge de l'employabilité, de la performance à tout prix, de l'individualisme. Ce texte ne répond pas à l'exigence d'égalité. À travers nos amendements, nous ferons des propositions pour l'améliorer. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOCR et CRCE)
M. Olivier Paccaud . - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Plusieurs d'entre nous avons croisé, avant d'entrer dans cet hémicycle, le regard d'albâtre de Jules Ferry. Moi aussi, je crois aux forces de l'esprit ! Le titre de ce projet de loi doit l'interpeller à tout le moins. L'école de la confiance ? Nous sommes filles et fils de l'école de la République, qui depuis 1880 a sonné le carillon d'une révolution silencieuse, permettant à tous d'espérer une progression sociale à travers la réussite scolaire. L'instruction publique a été le serviteur de l'égalité des chances. École, méritocratie et République sont intimement liées.
Or la confiance entre les Français et leur école est fissurée. L'exode massif vers l'école privée n'est pas dû à une fièvre religieuse ! Dans l'esprit de bien des parents, l'école privée d'aujourd'hui est tout simplement l'école publique d'hier. Celle de l'autorité et du respect du maître, de la valorisation des efforts.
M. David Assouline. - N'importe quoi !
M. Olivier Paccaud. - Mal payé, peu considéré, le professorat n'attire plus ; des mouvements comme les stylos rouges ou le #pasdevague illustrent la grogne qui monte.
Loin d'être une grande loi sur l'école, ce texte est un fourre-tout, sans vision. La baisse de l'âge l'instruction obligatoire à trois ans, en vigueur quasiment partout en métropole, est un coup de communication. Transformer les ESPÉ en Inspé n'est pas faire preuve d'une imagination débordante.
La version issue de l'Assemblée nationale a créé craintes et polémiques : décapitation du père et de la mère dans les formulaires, créations des obscurs EPLESF. J'ai rarement vu texte plus mal écrit. « Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement, Et les mots pour le dire arrivent aisément ». Ces vers de Nicolas Boileau sont à méditer ! (M. le ministre sourit.)
Max Brisson a mené un travail de Titan pour améliorer le texte, notamment sur l'école inclusive, les jardins d'enfant, l'affirmation du rôle du directeur d'école.
Espérons un débat fertile et une oreille attentive du ministre.
L'école de la République a besoin d'un nouveau souffle, d'une vraie loi de refondation traitant de la formation des enseignants, de leur affectation, de leur statut, de la place de l'école dans les territoires. Nous ne sommes plus au temps des hussards noirs de la République, mais il nous faut tenter de ressusciter une confiance disparue. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)
M. Jean-Michel Blanquer, ministre . - Je ne répondrai pas à chacun mais je veux éclaircir quelques points.
Débattons de bonne foi du contenu réel du texte. Il n'y a aucune intention cachée, nos intentions sont claires et affichées. Oui, nous sommes dans une société de défiance, du soupçon. Que chacun fasse sa propre introspection en se demandant s'il n'y contribue pas un peu.
Il y a un an, j'ai écrit un livre sur les réformes que nous menions ; j'y écrivais qu'une loi viendrait.
Les intentions de cette loi sont celles qui sont affichées. Vous pouvez être contre, mais ne contribuez pas à cette société du soupçon.
Il est absurde de critiquer, au nom de je ne sais quelles intentions cachées, des mesures que vous préconisiez vous-mêmes. La gauche voulait l'instruction obligatoire à trois ans, mais d'une autre manière ? Je ne vois pas la différence... À entendre les propos de certains, je me suis dit que décidément, la critique est aisée mais l'art est difficile !
Idem à droite. Vous avez eu l'honnêteté de rappeler que l'école du socle, l'école fondamentale du plan Langevin-Wallon sont nos inspirations.
Vous caricaturez, alors que nous mettons en oeuvre des objectifs que vous avez poursuivis, que nous ouvrons des portes que les gouvernements précédents n'ont pas ouvertes.
Nous ne serons pas d'accord sur tout. Mais pourquoi Jean-Pierre Chevènement aurait-il salué les mesures de ce texte s'il créait une école ultralibérale ? Pourquoi des académiciens soutiennent-ils les savoirs fondamentaux ? Pour éviter de participer à la société du soupçon, ne lisons pas des intentions cachées dans ce texte : mes intentions sont claires, elles sont exprimées dans l'exposé des motifs, dans la politique transparente que nous menons.
C'est vrai, la confiance ne se décrète pas, elle se crée. C'est un enjeu collectif auquel j'essaie d'apporter ma pierre, en espérant enclencher un cercle vertueux. Les sociétés qui vont bien sont celles qui font confiance à leur école, sans plaquer sur elle le clivage gauche-droite.
« Votre conception n'est pas la nôtre », dites-vous ? Je n'en suis pas si sûr. Nous avons tout à gagner à nous rapprocher pour construire une école pour tous. Vouloir une école maternelle qui crée les conditions de l'égalité, une école inclusive, une souplesse tenant compte des territoires, une école qui instruise et éduque, qui collabore avec les parents n'est ni de droite ni de gauche.
Je ne discuterai pas du point de savoir si c'est une grande ou une petite loi. Je ne considère pas que cette loi refondera le système scolaire. Mais si une grande loi se mesure au nombre de critiques, Jules Ferry a fait une très grande loi ! Relisez donc les débats de l'époque !
Lorsqu'il a instauré l'instruction obligatoire à 6 ans, beaucoup d'enfants étaient déjà scolarisés grâce à François Guizot et Victor Duruy. (M. David Assouline s'exclame.) Il a donné un cadre juridique et psychologique à l'école de la République. C'est notre intention, en abaissant l'âge à 3 ans. Les 25 000 enfants qui seront nouvellement scolarisés ne sont pas tous à Mayotte ou en Guyane ; j'ai le souvenir d'un enfant de l'Orne arrivé en CP à 6 ans avec un vocabulaire extrêmement faible.
Citons, parmi les bénéfices induits, la visite médicale à 3 ans pour tous. Nos seules intentions sont l'élévation du niveau général et la justice sociale. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs du groupe UC)
La discussion générale est close.
Discussion des articles
ARTICLE PREMIER
M. Jean-Marc Boyer . - La confiance doit répondre à des principes fondamentaux, dont le respect dû par les écoliers à leur maître. Je remercie M. Brisson de l'avoir rappelé.
Deuxième principe, la proximité. Les EPLESF éloignent du territoire, rompent le lien entre le maire et le directeur, menacent les écoles rurales. J'ai eu la chance d'aller à l'école de mon village, dans une classe unique. La proximité n'a pas de prix !
Je salue l'engagement du président de la République de ne pas fermer d'école. Ne fermons pas de classes. Vous êtes venu dans le Puy-de-Dôme, vous avez constaté la richesse de l'école primaire, la vitalité du collège rural. L'église est au centre du village, l'école au centre de la commune et l'élève au centre de l'école communale ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)
Mme Jacqueline Eustache-Brinio . - Depuis trente ans, la place de l'enseignant dans sa classe a été affaiblie. Ils n'osent plus bouger ! S'il est important de rappeler aux enseignants leurs engagements, rappelons aussi aux parents leur place au sein de l'école et aux enfants que la parole d'un adulte est différente de la leur. L'école de la République est un lieu merveilleux de mixité sociale, c'est une chance. Il est temps de redonner un cadre à l'institution, de redonner confiance aux enseignants en leur apportant le soutien dont ils ont besoin. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)
M. Maurice Antiste . - Ce projet de loi est compliqué dans sa construction ; élaboré sans concertation, il regroupe des mesures disparates. Pourtant, il bouleverse le système éducatif. Il est aussi compliqué dans son esprit.
Censé être le socle d'une école de confiance, il fait l'unanimité contre lui chez les enseignants et nombre de parents d'élèves.
Je veux évoquer le désespoir de nombre d'enseignants nés outre-mer, parachutés dans l'Hexagone malgré les besoins dans leur académie d'origine : 839 ETP dont 278 dans le premier degré et 561 dans le second degré ont été affectés dans l'Hexagone. Il faudra refondre le système des mutations, notamment pour les primo titulaires.
Mme Sylvie Robert . - En 2007, un opuscule de Yann Algan et Pierre Cahuc démontrait combien la France était une société de défiance, impactant notre modèle social. En 2012, ils l'imputaient à l'obsession des classements et au fonctionnement pyramidal de notre système qui entraine une fragmentation horizontale. En 2018, 65 % des Français considèrent que l'école ne garantit plus l'égalité des chances.
Oui, il faut créer une spirale positive de la confiance, mais comment le faire alors que l'on instille la défiance dès l'article premier ? Quelle en est d'ailleurs la portée normative ? Vous avez choisi de rappeler le devoir de réserve des enseignants, suscitant doute et incompréhension. Tout le monde désire un autre climat.
Le lien de confiance qui lie les familles et les élèves au service public de l'éducation implique l'écoute et l'apaisement. Retirons cet article pour calmer les craintes et nous concentrer sur l'essentiel. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR ; M. Pierre Ouzoulias applaudit également.)
M. David Assouline . - Ne vous en déplaise, Monsieur le Ministre, il y a dans ce texte beaucoup de faux-semblants. Comme beaucoup de vos collègues ministres, vous faites croire que vous avez inventé l'eau chaude. (M. Jean-François Husson s'amuse.)
Or vous vous réappropriez les concepts de vos prédécesseurs, à commencer par Vincent Peillon qui avait pris des mesures importantes...
M. Jacques Grosperrin. - On a vu le résultat !
M. David Assouline. - Par exemple, l'idée que tout commence par l'école primaire : plus de maîtres que de classes, avait dit Vincent Peillon. Vous dédoublez les classes, mais en vidant le dispositif précédent de son sens et en y prenant les maîtres !
Si la confiance commence par la défiance à l'article premier, c'est mal parti. Vous dites préférer l'action aux lois bavardes mais la vôtre commence par une déclaration non normative !
Certes, les professeurs doivent être exemplaires - comme tout fonctionnaire ! Si vous voulez qu'ils soient respectés, cessez donc de dénigrer la fonction publique et de l'affaiblir. J'ai encore entendu tout à l'heure que l'école publique serait moins bien que l'école privée... Disons que l'Éducation nationale est exemplaire, et donnons aux professeurs les moyens suffisants pour qu'ils soient respectés ! (Mme Sophie Taillé-Polian applaudit.)
Mme Marie-Noëlle Lienemann . - Oui, il faut un préjugé positif de confiance dans une société républicaine. Le problème, c'est que la confiance doit s'étayer sur des faits et que les mots n'en pallient pas l'absence.
La comparaison entre les intentions et les pratiques administratives actuelles attestent de ce manque de confiance - je pense aux syndicalistes ayant dit leur opposition à Emmanuel Macron, hors du temps scolaire, qui ont été réprimandés par leur hiérarchie, voire sanctionnés. Or nous avons besoin de citoyens respectueux qui s'assument ; ils ne sauraient être des sous-citoyens.
Si l'on veut avoir confiance dans les enseignants, il faut revaloriser leur statut et leur rémunération. Les enseignants français sont payés 40 % de moins que leurs homologues allemands ! Or il n'y a pas d'école efficace sans rémunération décente de ceux qui la font vivre.
La corrélation est directe entre la rémunération et la réussite scolaire.
M. le président. - Il faut conclure.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. - Dans un monde où l'argent est la principale valeur, on ne peut valoriser des enseignants sous-payés ! (Marques d'approbation sur quelques bancs à gauche)
M. Patrice Joly . - Une école de la confiance suppose un dialogue continu entre les acteurs. Elle doit être tournée vers le monde, être un lieu d'épanouissement, ouvrir un avenir prometteur ; elle ne doit pas inspirer de craintes, de doutes, de suspicions, d'inquiétudes - je songe aux PIAL pour les enfants en situation de handicap.
Au contraire, l'école de la confiance doit apaiser, sécuriser. Elle doit répondre aux besoins spécifiques de chaque territoire ; or en zone rurale, les fermetures se multiplient, qui s'ajoutent à celles des services publics et à la réduction des emplois aidés. Sans parler du temps de transport de certains enfants en zone rurale, jusqu'à une heure par jour en grande section ! Ces territoires sont les oubliés de la République.
Enfin, en dépit des intentions, on ne voit pas comment vous comptez améliorer les relations entre les équipes enseignantes et les familles. (Mme Marie-Pierre Monier applaudit.)
Mme Angèle Préville . - L'article premier met en doute l'engagement des professeurs alors que nous vivons une crise des vocations ! L'engagement des professeurs va de soi, et se concrétise tout au long de leur carrière. Cette mention est inutile, vraiment.
Que voulez-vous obtenir des professeurs qu'ils ne fassent déjà ? Et ils ne touchent que 1 500 euros par mois nets.
De quoi l'exemplarité est-elle le nom ? C'est, en l'état, à la fois vague et stigmatisant... Que visez-vous ? La tenue, le vocabulaire, le comportement, l'engagement en dehors de l'école ? Faut-il formater les professeurs ? Qu'ils soient lisses, sans personnalité ? Je pense pour ma part que non, car ce sont les personnalités qui savent insuffler aux élèves l'envie d'apprendre. Enseigner est une alchimie humaine qui ne peut se décréter.
Je conseille à chacun de suivre un enseignant pendant une journée : c'est le plus beau métier du monde mais il est complexe, s'exerce devant un public sans concession et oblige à se remettre en question. Il exige une foi chevillée au corps - et c'est une professeure qui vous le dit ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SOCR)
M. Jean-Pierre Grand. - Le Conseil d'État s'est interrogé sur la portée normative de cet article, considérant que si ces dispositions expriment certaines valeurs incontestables de l'école républicaine, elles ne produisent par elles-mêmes aucun effet de droit et réitèrent des obligations générales qui découlent du statut des fonctionnaires.
Sur le fond, cet article insinue que les parents ne respecteraient pas l'école à laquelle ils contribuent par leur parole et leur engagement. Tenter d'imposer ce respect est le meilleur moyen de ne pas l'obtenir.
Les syndicats enseignants voient dans le devoir d'exemplarité un objectif de contrôle de la parole enseignante y compris en-dehors du service et sur les réseaux sociaux.
Supprimons cet article polémique, qui jette inutilement l'opprobre sur tous.
M. le président. - Amendement identique n°121, présenté par Mme Brulin et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Mme Céline Brulin. - Il est étonnant que le premier article de ce projet de loi vise à encadrer la liberté d'expression des personnels de l'Éducation nationale, alors que les pressions administratives sur certains fonctionnaires de l'Éducation nationale se multiplient. Cela n'augure pas d'un débat serein.
Nous avons auditionné il y a peu des enseignants victimes de violence qui avaient participé au mouvement #pasdevague. Eux ont une confiance absolue en l'éducation comme réponse à la violence et regrettent parfois l'absence de soutien de leur hiérarchie. C'est par le soutien à ces personnels et par l'accompagnement que nous recréerons la confiance.
Enfin, les réticences du Conseil d'État devraient suffire à justifier la suppression de cet article.
M. le président. - Amendement identique n°198 rectifié bis, présenté par MM. Dallier et Bonhomme, Mmes Bories et Canayer, MM. Daubresse, de Nicolaÿ et del Picchia, Mmes Delmont-Koropoulis, Deromedi, Estrosi Sassone, Garriaud-Maylam et Giudicelli, M. Houpert, Mme Imbert, M. Laménie, Mme Lamure, M. D. Laurent, Mme Lavarde, M. Lefèvre, Mmes Malet et Micouleau, MM. Savary, Segouin et Charon, Mmes de Cidrac et Di Folco, MM. B. Fournier et Gremillet, Mme Lanfranchi Dorgal et MM. Pellevat, Pointereau, Sido, Bouloux et Bonne.
M. Philippe Dallier. - Monsieur le ministre, votre texte suscite beaucoup de controverses, de bonne ou de mauvaise foi. Pour avoir rencontré de nombreux enseignants, directeurs d'école et parents d'élèves de ma commune, je peux témoigner que les tensions suscitées par cet article sont vives.
Le Conseil d'État l'a dit : il n'est pas normatif. Nous ferons oeuvre utile en ne votant que des dispositions claires. Même réécrit par la commission, cet article inquiète. Supprimons-le et concentrons-nous sur l'essentiel, à savoir les objectifs poursuivis par votre texte et qui peuvent nous rassembler.
M. Jean-Pierre Sueur. - C'est plein de bon sens !
M. Pierre Ouzoulias. - Très bien !
M. le président. - Amendement identique n°269 rectifié, présenté par Mme Monier et les membres du groupe socialiste et républicain.
Mme Marie-Pierre Monier. - Cet article, même réécrit en commission, n'a aucune portée normative et n'est n'ailleurs assorti d'aucune sanction en cas de non-respect. Le problème des incivilités à l'école est pourtant réel et elles sont en recrudescence. J'ai été choquée par la détresse des enseignants que nous avons auditionnés. Une déclaration de principe n'a aucune chance de résoudre les situations conflictuelles ; les termes employés risquent même d'envenimer les choses.
M. Max Brisson, rapporteur. - Avis défavorable à défaut d'un retrait. Je précise que la commission a revu la rédaction de cet article.
La communauté éducative regarde nos débats. J'ai du mal à imaginer que les enseignants puissent ne pas être exemplaires. Ce sont les premiers adultes que les enfants rencontrent après leurs parents : ceux que j'ai rencontrés étaient des modèles, c'est pourquoi je suis devenu professeur à mon tour.
D'aucuns font référence à la campagne #pasdevague. Ils devraient soutenir le texte de la commission qui rappelle l'autorité du professeur et le respect qui lui est dû. L'exemplarité nourrit le respect dû à l'autorité.
M. David Assouline. - Et inversement !
M. Max Brisson, rapporteur. - Rappelons que tous doivent respect au professeur qui incarne l'institution, qui incarne l'école de la République. Dans une classe, tout ne se vaut pas : le respect de l'adulte par l'enfant est une valeur incontournable. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains, UC, Les Indépendants et sur quelques bancs du groupe RDSE)
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. - Le rapporteur a dit avec éloquence ce que je m'apprêtais à vous dire. Je reconnais bien volontiers que la rédaction du Sénat apporte une amélioration, en ajoutant ce terme d'autorité.
Profitons de ce débat pour lever les éventuels malentendus. Permettez-moi de lire l'article, au-delà de la première phrase.
La deuxième phrase n'est jamais commentée. Or elle est la plus importante : « ce lien implique le respect des élèves et de leurs familles à l'égard des professeurs, de l'ensemble des personnels et de l'institution scolaire. »
C'est très significatif ! Le coeur de cet article est une réponse positive au mouvement #pasdevague ; j'ai dit en arrivant, donc avant ce mouvement, que jamais je ne m'inscrirais dans la philosophie « pas de vague » - étant moi-même professeur et enfant de professeur, cela m'attriste que l'on puisse me soupçonner de ne pas respecter les professeurs, alors que bien évidemment, avant même ce mouvement, j'ai placé le respect des professeurs et de leur dignité au coeur même de mon action. Il est donc logique de le retrouver ici, en tête du texte.
Je rejoins Mme Lienemann sur la rémunération des enseignants, sujet sur lequel le président de la République lui-même a fait des annonces lors de sa conférence de presse.
Bref, n'entretenons pas les malentendus ! Cet article ne vise pas à accentuer le devoir de réserve des professeurs, mais à améliorer le respect des professeurs et à accentuer le respect que nous leur devons.
Le jour où j'ai rejoint ce métier, j'ai senti que le devoir d'exemplarité définissait la fonction - et c'est le cas de toute la fonction publique. Lorsque l'on devient fonctionnaire, l'on prend conscience qu'il y a quelque chose de plus haut que soi : le service de la République, ce qui implique l'exemplarité. Je serais très heureux que cet article devienne à présent une conviction partagée. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Les Indépendants)
M. Laurent Lafon. - J'ai lu et relu ce premier article sorti de l'Assemblée nationale, pour le trouver confus. La réécriture de la commission va dans le bon sens, qui réaffirme le devoir de respect qui jamais n'avait été si clairement exprimé. Je voterai la version de la commission. (Applaudissements sur les bancs du groupe UC)
M. Alain Marc. - Certes, cet article n'a pas de portée normative, mais on ne peut laisser penser que le respect est facultatif. Il est au contraire nécessaire dans l'acte éducatif. Sur le terrain, nous constatons l'importance du respect des parents d'élèves pour le maître également. Il était important de le redire. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes UC et Les Républicains)
M. Jean-Pierre Grand. - Le débat, voilà la beauté du Parlement ! Et ce beau mot de respect est, Dieu merci, omniprésent dans notre société, qu'il s'applique à la police, aux élus, aux enseignants... Le rapporteur et le ministre m'ont convaincu : je retire mon amendement.
L'amendement n°2 est retiré.
M. David Assouline. - Je ne suis toujours pas convaincu de la nécessité de cet article, mais l'explication du ministre était utile.
Reste que l'article premier de ce texte n'est pas normatif.
Je me réjouis d'entendre des paroles fortes sur l'exemplarité liée à la fonction d'enseignant et le respect de l'institution scolaire laïque, de l'école de la République, qui ne furent pas toujours émises sur tous les bancs. (Exclamations à droite)
Eh oui, je sais que certains d'entre vous ou de vos prédécesseurs ont beaucoup manifesté pour l'école privée. (Même mouvement) Je suis très content de constater aujourd'hui l'unanimité du respect pour l'école publique. (Murmures à droite)
Ce n'est pas lui rendre service que d'écrire une loi bavarde à cet endroit. On doit prendre en compte le sentiment des professeurs qui se sont sentis remis en cause par l'article premier. On débattra par ailleurs de la restauration de l'autorité. Je ne pense pas que cela passe par une telle proclamation à l'article premier.
Mme Samia Ghali. - Monsieur le Ministre, vous avez vous-même dit ne pas être compris. Peut-être faudrait-il inverser la première et la deuxième phase ? J'ai vu, dans certains quartiers, les parents d'élèves soutenir activement les enseignants, peut-être pour la première fois, parce qu'ils ont bien compris que remettre en cause leur autorité leur enlève le respect qui leur est dû.
Sans le militantisme, au sens noble, de certains enseignants, il n'y aurait plus d'école dans certains quartiers. Ce sont les enseignants qui souvent alertent sur les problèmes des quartiers et protègent ainsi les enfants et leurs parents. N'allons pas les pointer du doigt au détour d'un tel article, ce qui risquerait d'aggraver leurs difficultés !
M. Pierre Ouzoulias. - Nous avons commencé le débat sur la rationalité et la légistique. Ce qui est sorti de l'Assemblée nationale était illisible. Ce qui a été ajouté est tautologique. De quelle exemplarité s'agit-il ? Devons-nous consacrer deux heures à une tautologie ?
La commission a éliminé des amendements que nous avions présentés parce qu'elle estimait, avec toute l'autorité du rapporteur, qu'ils relevaient du règlement. N'est-ce pas aussi le cas de cet article déclaratif et symbolique ? Si nous voulons faire une bonne loi, non bavarde, conformément à la tradition du Sénat, suivons la proposition de M. Dallier, de désencombrer la loi, en rejetant cet article uniquement pour des raisons légistiques.
Mme Marie-Pierre Monier. - Exemplarité, pour un enseignant, qu'est-ce que cela signifie ? Ne pas fumer, ne pas boire, ne pas montrer qu'il ou elle vit avec quelqu'un du même sexe ? Ne pas faire part de ses opinions politiques ? (Murmures à droite)
M. André Reichardt. - Évidemment ! (On renchérit sur les mêmes bancs.)
Mme Marie-Pierre Monier. - Je parle de ce qui se passe à l'extérieur de la classe ! Les enseignants sont inquiets, voyez ceux qui manifestent dehors, en ce moment même ! Enlevons-donc les mentions d'exemplarité et d'engagement !
Mme Sophie Taillé-Polian. - Depuis le début de la mandature, il y a déjà eu trois textes sur la confiance, soit un par an en moyenne ; confiance dans la vie politique - avec les résultats que l'on peut constater - puis entre l'État et la société - avec guère plus de succès - et voici la cuvée 2019 : l'école ! (Sourires sur certains bancs du groupe SOCR)
Ne faut-il pas, plutôt, traiter la confiance de la façon dont Pierre Desproges parlait de l'amour ? (Sourires) Il disait qu'il y a ceux qui en parlent et ceux qui en donnent des preuves... (Même mouvement) Retirez l'article premier qui n'a que très peu de portée normative, à moins que la définition de l'exemplarité soit apportée plus tard. Le personnel de l'Éducation nationale craint de ne plus pouvoir s'exprimer sur les conditions d'exercice des métiers. Le premier pas vers la confiance est de supprimer cet article n'ayant que très peu de portée normative. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)
M. Rachid Temal. - Ce que vous tentez d'inscrire est déjà dans la loi. Pourquoi y revenir ? S'il y a incompréhension, il faut clarifier les choses. Retirez-donc cet article !
J'étais persuadé que c'est parce qu'ils étaient professeurs que les individus étaient respectés. Là, c'est par leur comportement individuel. La sagesse dicte de retirer cet article. Dans sa forme actuelle, il jette le doute sur le travail de ces fonctionnaires, essentiels à la République.
M. Christian Manable. - Je partage les avis exprimés sur la plupart des bancs de cet hémicycle. Enseignant pendant 35 ans, j'ai été choqué par le mot « exemplarité ». Il a une connotation d'ordre moral que je ne souhaite pas connaître. Le terme est superfétatoire. Les enseignants sont par définition exemplaires, du fait de leur engagement au service de l'école de la République. L'on peut même employer à leur propos le beau mot de vocation. Ce n'est hélas pas le cas de tous ceux qui sont en lien avec les enfants.
M. Philippe Dallier. - Ce n'est pas parce que j'ai déposé cet amendement que je ne considère pas qu'il y a un devoir d'exemplarité ni de besoin de respect, mais nos débats montrent qu'il y a confusion et interrogations, même après réécriture par la commission. À quoi bon ?
Supprimons cet article déclamatoire. (Marques d'approbation sur les bancs des groupes SOCR et CRCE)
M. Jean-Pierre Sueur. - Le débat est riche et répétitif. (Sourires) Je lis l'article premier : « Par l'engagement et leur exemplarité, les personnels de la communauté éducative contribuent à l'établissement du lien de confiance qui doit unir les élèves et leur famille au service public de l'éducation ». À un élève qui écrirait une telle phrase, j'écrirais : « pesant, ampoulé ». Qu'apporte cette phrase ?
M. Philippe Dallier. - Rien !
M. Jean-Pierre Sueur. - Dans « L'Argent » de 1913, Charles Péguy écrit « Nos jeunes maîtres étaient beaux comme des hussards noirs. Sveltes ; sévères ; sanglés. Sérieux, et un peu tremblants de leur précoce, de leur soudaine omnipotence. »
Et de poursuivre : « ces hussards noirs étaient des enfants de la République. Ces instituteurs étaient sortis du peuple, ils faisaient corps avec le peuple. » Point, à la ligne ! Tout n'a-t-il pas déjà été dit en 1913, ce qui rend inutiles ces phrases contournées dont nous discutons depuis deux heures ? (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes SOCR et CRCE)
Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture. - On voit à quel point ce débat montre que les enseignants sont la clé de voûte. J'ai moi-même enseigné vingt ans. Cela ne me dérange pas qu'il soit écrit dans la loi que les adultes soient exemplaires. Dans nos classes, nous sommes des guides. Le professeur peut servir d'exemple, c'est la définition même de l'adjectif « exemplaire » dans Le petit Larousse. Là est le coeur de sa mission. On lui doit le respect. Lors de nos auditions sur le phénomène #pasdevague, on nous a dit combien le manque de respect était pesant. Alors, certes, c'est déclaratif, ce n'est pas normatif, mais il y a des contextes où il faut savoir affirmer un principe fort.
Nous avons tous défendu, à l'article premier de la loi relative à la liberté de création, à l'architecture et au patrimoine (LCAP), des éléments non normatifs sans problème, au terme d'un beau débat.
Mme Annie Guillemot. - Je veux revenir aux propos de Samia Ghali Certains pourraient prendre très mal cet article premier. Il y a déjà une déontologie de la fonction publique. Pourquoi en rajouter spécifiquement pour les enseignants ? Pourquoi pas pour chacun ? Le ministre de l'Intérieur, en ce moment, est-il exemplaire ? (Expressions dubitatives sur certains bancs des groupes SOCR et CRCE)
Beaucoup de professeurs sont intervenus après les propos du président de la République à la jeunesse indienne : « Never respect the rule ! ». Était-ce exemplaire ? (« Très bien ! » sur les bancs du groupe SOCR)
M. Jean-Claude Tissot. - Je ne suis pas professeur, je suis simplement paysan. Et maire d'une commune rurale, où j'ai côtoyé plusieurs enseignants et directeurs ou directrices qui donnent de leurs temps, y compris le week-end et pendant les vacances, naturellement. Il n'est nul besoin de le préciser. Je voterai cet amendement.
M. Olivier Paccaud. - Y a-t-il des mots tabous, que l'on ne peut prononcer, que l'on ne doit pas écrire ? Dans la version de l'Assemblée nationale, il n'y avait pas le mot « autorité ». Je sais gré au rapporteur de l'avoir réintroduit. L'autorité est indispensable pour la transmission du savoir.
Sur l'exemplarité, notre débat est byzantin ! L'immense majorité des enseignants est exemplaire, oui, à part l'inévitable brebis galeuse. On peut le dire, mais on ne devrait pas l'écrire ? L'exemplarité, c'est adopter un comportement qui ne suscite pas la critique ; enseignants, élus, parents doivent l'être... Je voterai cet amendement.
Mme Éliane Assassi. - Inscrivons-le alors dans la Constitution ! Pas seulement pour les professeurs, mais aussi pour le Gouvernement, qui doit être exemplaire pour tous les citoyens !
M. Jean-Pierre Sueur. - Oui, pourquoi pas ? « Les Français sont exemplaires »...
Mme Angèle Préville. - Cette phrase s'apparente plutôt à un conseil aux professeurs, d'exemplarité, et n'a pas à ce titre sa place dans la loi.
Mme Françoise Cartron. - J'ai été enseignante pendant vingt ans en ZEP. Je prends ce mot comme : « l'enseignant est un exemple », encore plus dans ces quartiers. Je revois des élèves qui me disent tout ce que j'ai pu leur apporter. Je prends ce mot comme un encouragement à ce métier de vocation.
J'entends l'inquiétude mais aussi la demande des enseignants d'être appuyés face aux parents d'élèves.
Cet article marche sur ces deux pieds et apporte dignité et responsabilité. (M. François Patriat applaudit.)
À la demande de la commission, les amendements identiques nos121, 198 rectifié bis, 269 rectifié sont mis aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°99 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 339 |
Pour l'adoption | 111 |
Contre | 228 |
Le Sénat n'a pas adopté.
M. Rachid Temal. - C'est formidable, la démocratie !
M. le président. - Amendement n°254 rectifié bis, présenté par Mme Eustache-Brinio, MM. Bazin et Karoutchi, Mme Gruny, M. Charon, Mme Thomas, M. de Nicolaÿ, Mme Chain-Larché, M. Bonhomme, Mme Deromedi, M. Danesi, Mme Deseyne, M. Laménie, Mme Lassarade, M. Pierre, Mme Garriaud-Maylam, M. Vogel et Mme Bonfanti-Dossat.
Alinéa 2
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Art. L. 111-3-1. - Dans le respect de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, les personnels de la communauté éducative assurent la transmission des savoirs fondamentaux aux élèves. L'accomplissement de cette mission implique la confiance des élèves et de leur famille à l'égard des enseignants et le respect de leur autorité au sein des établissements scolaires. »
Mme Jacqueline Eustache-Brinio. - Cet amendement reprend une partie des débats.
De la modification d'une sanction prise à l'encontre d'élèves tricheurs sous la pression de leurs parents au suicide d'un enseignant après une plainte déposée par les parents pour violences aggravées sur mineur pour avoir attrapé par le bras un élève qui gênait le passage, sans oublier les vingt instituteurs s'étant succédé en cinq mois dans une classe en zone REP+ : ce sont des exemples parmi tant d'autres de la remise en cause constante de l'autorité des enseignants par les élèves et leur famille.
Cet amendement affirme l'autorité des enseignants dans les établissements scolaires, condition nécessaire à l'exercice de leur profession et à l'accomplissement de leurs missions au sein de l'école de la République.
Je propose une rédaction différente de l'alinéa 2, en repartant de la loi du 13 juillet 1983.
M. le président. - Amendement n°270 rectifié, présenté par Mme Monier et les membres du groupe socialiste et républicain.
Alinéa 2
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Art L. 111-3-1. - Dans le respect de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, les personnels de la communauté éducative contribuent à l'établissement du lien de confiance qui doit unir les élèves et leur famille au service public de l'éducation. Ce lien implique le respect entre les membres de la communauté éducative et celui des élèves et de leur famille à l'égard de l'institution scolaire. »
Mme Marie-Pierre Monier. - L'article premier entame mal le processus, jetant la défiance sur le personnel de l'Éducation nationale. Supprimons ces termes litigieux au profit d'une rédaction conforme au respect mutuel entre les membres de la communauté éducative.
M. le président. - Amendement n°433 rectifié, présenté par Mmes Jouve et Laborde, MM. Roux, Castelli, Corbisez, Arnell, Artano et Cabanel, Mme M. Carrère, M. Collin, Mme Costes et MM. Dantec, Gabouty, Guérini, Labbé, Menonville et Vall.
Alinéa 2
Remplacer les mots :
L'engagement et l'exemplarité des
par les mots :
Dans le respect de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, les
Mme Mireille Jouve. - Cet amendement supprime la référence aux notions d'engagement et d'exemplarité qui manquent de précision et ont suscité l'inquiétude des enseignants quant à leur portée juridique réelle. Il réintroduit la référence à la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.
Inutile de susciter la défiance, alors que cet article n'a pas de portée normative, comme le soulignait le Conseil d'État dans son avis sur le projet. Pour répondre aux enseignants, il faut davantage prendre en compte le phénomène #pasdevague. La création d'un médiateur a été ajournée, de même que le plan de lutte contre les violences à l'école annoncé pour la rentrée prochaine.
M. le président. - Amendement n°221 rectifié, présenté par M. Piednoir, Mme Deroche, M. Grosperrin, Mmes Thomas et Chain-Larché, MM. Paccaud, Kennel et Karoutchi, Mmes Procaccia et Garriaud-Maylam, MM. Panunzi, Saury, de Nicolaÿ, Bonhomme et Détraigne, Mme Deromedi, MM. Moga, Kern, Meurant, Bascher, Maurey et Savin, Mme Perrot, MM. Laménie, Chevrollier et H. Leroy, Mme Lamure, MM. Pointereau et Revet, Mme de Cidrac et MM. Pellevat, Rapin et Gremillet.
Alinéa 2
Après le mot :
nationale
insérer les mots :
, en particulier au regard de leur obligation de neutralité,
M. Jacques Grosperrin. - La notion d'exemplarité du personnel de la communauté éducative est une notion vaste et abstraite qui peut installer un climat de défiance vis-à-vis de ces derniers.
Cet amendement précise que l'exemplarité attendue des enseignants s'entend plus précisément et plus particulièrement au regard de l'obligation de neutralité qu'ils se doivent de respecter.
Cette obligation de neutralité vise aussi l'expression des opinions politiques et religieuses.
M. Michel Savin. - Très bien !
M. le président. - Amendement n°227, présenté par M. Karam et les membres du groupe La République En Marche.
Alinéa 2
Remplacer le mot :
unit
par les mots :
doit unir
M. Antoine Karam. - Cet amendement renforce la portée normative de l'article. L'importance du devoir d'exemplarité des professeurs a été rappelée dans une décision du 24 avril 2019 du Conseil d'État qui a rejeté une demande de sursis à l'exécution de l'arrêt de la Cour administrative d'appel en raison de « l'exigence d'exemplarité » qui incombe aux enseignants dans leurs relations avec des mineurs.
À l'Assemblée nationale ou en commission, certains collègues ont déploré le manque de portée normative de cet article.
M. le président. - Amendement n°65 rectifié ter, présenté par MM. A. Marc, Bignon, Chasseing, Wattebled, Decool et Malhuret.
Alinéa 2
Compléter cet alinéa par les mots :
, qui est formalisé et signé
M. Alain Marc. - M. Dallier craignait un article premier déclaratoire. Formalisons ce respect par un engagement signé. Une telle signature concrétise un engagement, alors que la notion de respect a tendance à s'estomper.
M. le président. - Amendement n°387 rectifié, présenté par MM. Cabanel, Artano et A. Bertrand, Mme M. Carrère, MM. Castelli, Corbisez, Gabouty, Gold et Guérini, Mme Guillotin et MM. Labbé, Léonhardt, Menonville, Roux et Vall.
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Tout apport à la communauté éducative et à la vie citoyenne, dans le respect du secret professionnel et du devoir de discrétion professionnelle, participe de cet engagement et de cette exemplarité. Dans l'engagement citoyen, la libre expression hors du cadre professionnel est un droit fondamental, dans les limites fixées par la loi. »
M. Henri Cabanel. - Cet amendement reconnaît et garantit le rôle de l'enseignant dans la cité au-delà du seul exercice professionnel.
De même que les partenaires des établissements d'enseignement participent de la communauté éducative, le personnel de l'Éducation nationale participe à la vie citoyenne.
Plusieurs enseignants ont appelé l'attention des parlementaires sur des dispositions du projet qu'ils estiment contestables. Cette lecture critique participe des prérogatives des citoyens et ne contrevient pas en soi aux obligations des fonctionnaires.
Pourtant, dans l'Hérault, un enseignant également adjoint au maire, qui s'est exprimé publiquement pour appeler les sénateurs à exercer leur esprit critique sur ce projet de loi, a été convoqué par le Directeur académique qui l'aurait réprimandé. Il a reçu une lettre le rappelant à l'ordre. Si ce document n'est pas présenté par son auteur comme une sanction, son versement au dossier individuel de l'intéressé risque de nuire à sa carrière et risque d'intimider tous les membres de l'Éducation nationale.
L'appel à l'analyse critique participe de l'exemplarité de l'engagement citoyen et républicain.
M. Max Brisson, rapporteur. - Je comprends les préoccupations de Mme Eustache-Brinio compte-tenu des événements survenus dans son département, que nous avons encore tous en mémoire.
Mais les garanties du ministre et de la commission devraient satisfaire son amendement. Le personnel de l'Éducation nationale transmet les savoirs fondamentaux, certes, mais son rôle va bien au-delà ! Retrait ou avis défavorable à l'amendement n°254 rectifié bis.
Avis défavorable à l'amendement n°270 rectifié. Vous remplacez l'autorité par le lien entre les membres de la communauté éducative. Le respect est dû au professeur.
Avis défavorable à l'amendement n°433 rectifié pour les mêmes raisons.
Je partage l'intention de M. Piednoir, mais la précision introduite par son amendement n'est pas utile et pourrait être réductive. L'exemplarité est plus riche que la neutralité. Le Conseil d'État a réaffirmé cette obligation dans un cas de pédophilie extrascolaire. Retrait ou avis défavorable.
Je ne suis pas persuadé de l'intérêt de l'amendement n°227. Le lien de confiance existe ; écrire qu'il « doit unir » laisserait à penser le contraire : avis défavorable.
La précision de l'amendement n°65 rectifié ter n'est pas nécessaire. Retrait ou avis défavorable.
Monsieur Cabanel, je comprends votre intention sur la liberté d'expression hors du cadre professionnel, comme tout fonctionnaire. La justice administrative y est attentive. Ne remettons pas en cause le fragile équilibre de sa jurisprudence, subtile et protectrice des agents de l'Éducation nationale, qui doivent faire preuve de retenue, comme tout fonctionnaire, même en dehors du service. Avis défavorable à l'amendement n°387 rectifié.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. - Avis défavorable à l'amendement n°254 rectifié bis pour les mêmes raisons que le rapporteur. Cet amendement est satisfait par la commission.
Avis défavorable aux amendements nos270 rectifié et 433 rectifié.
Sur l'obligation de neutralité, retrait ou avis défavorable à l'amendement n°221 rectifié.
Avis favorable à l'amendement n°227 qui renforce la portée normative de l'article.
Avis défavorable aux amendements nos65 rectifié ter et 387 rectifié qui n'apportent rien de plus.
M. François Bonhomme. - Je ne suis pas étonné de ce débat. Depuis 20 ans, l'école est l'instrument d'intégration le plus malade.
L'autorité des professeurs reposait sur leurs connaissances et leur capacité de transmission. Cette autorité a été effritée notamment en raison du numérique considéré comme un totem à la suite d'une lecture erronée de la modernité. Les enseignants sont de plus en plus considérés comme des prestataires de services, les élèves comme des clients.
Cette fragilisation de l'autorité s'est aggravée. Plus les élèves sont connectés, moins ils sont attentifs.
La philosophe Simone Weil nous alertait déjà sur l'importance de l'attention. Les réflexes priment la réflexion, les passions la raison. Lisez, Monsieur le Ministre, Bruno Patino sur La civilisation du poisson rouge. Nous avons besoin de rétablir l'autorité.
L'amendement n°254 rectifié bis n'est pas adopté.
M. David Assouline. - La perte d'autorité du professeur... Cet article de la loi permettrait de la restaurer ? Nous sommes dans une société consumériste qui valorise l'argent, la compétition des uns contre les autres.
Je me souviens de mes années d'école. Moi, je rêvais d'être professeur d'histoire-géographie, les autres aviateurs. Quand j'étais professeur, les élèves voulaient être footballeur pour gagner de l'argent. (Sourires à droite) Le professeur que j'étais en gagnait très peu : c'était un looser... (On ironise sur les mêmes bancs.) Je ne parle pas de moi ! (Sourires)
Les professeurs souffrent de ne pas être considérés, alors que les instituteurs étaient le personnage central dans le village. Pourquoi n'écririons-nous pas à l'article premier : « La République honore et apporte sa confiance » aux professeurs ?
Que diriez-vous si une loi demandait l'exemplarité aux policiers ? Vous diriez qu'on les suspecte !
Ayez la même attitude à l'égard des professeurs.
L'amendement n°270 rectifié n'est pas adopté, non plus que les amendements nos433 rectifié, 221 rectifié et 227.
M. Alain Marc. - Le respect dû aux professeurs figurera-t-il dans le règlement intérieur de l'école que signeront les parents d'élèves ? Il faut que les parents des élèves s'engagent en début d'année à respecter les professeurs. Je retire mon amendement si l'on m'assure que ce sera bien le cas dans toutes les écoles de France.
M. Max Brisson, rapporteur. - Le règlement intérieur d'un établissement s'inspire largement de la loi votée. Il ne reprend pas tel quel la loi mais globalement, via la circulaire signée par le ministre.
M. Alain Marc. - Je le retire mais je doute que les parents examinent ensuite le code de l'éducation.
L'amendement n°65 rectifié ter est retiré.
M. Henri Cabanel. - MM. le rapporteur et le ministre, vos arguments ne m'ont pas convaincu. Le professeur dont j'ai cité l'exemple s'est exprimé dans un lieu public et non dans son établissement. Pour autant, il a été réprimandé. La confiance ne se décrète pas ; elle se tisse.
Dans certains cas, il y a deux poids, deux mesures. Twitter est aussi public. Un des députés de la majorité, professeur des universités et avec le logo de son université derrière lui, y a fait l'apologie de votre liste aux élections européennes. A-t-il été réprimandé comme l'enseignant de l'Hérault ? Jusqu'où va la neutralité d'un professeur de faculté ?
M. Jean-Marc Boyer. - Exact !
Mme Marie-Pierre Monier. - L'article 6 de la loi Le Pors de 1983 était clair : il garantissait la liberté d'opinion des fonctionnaires. Or le professeur a été réprimandé alors qu'il s'est exprimé en dehors de sa classe. Le groupe socialiste soutient l'amendement n°387 rectifié.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. - Tout ce dont vous parlez se passe sous le régime juridique actuel, correspondant à la loi de 1983. Nous sommes dans un État de droit. Vous avez à juste titre une certaine révérence pour cette loi ; elle n'est pas très différente de celle-ci. L'émetteur a son importance dans la réception : on ne doit pas exciper de son titre lorsqu'on émet une opinion.
Élus, vous avez une grande liberté d'opinion, comme les syndicalistes. En revanche, vous ne pouvez exciper de votre titre lors de vos propos. L'inspecteur d'académie n'a fait que rappeler ce devoir. Il n'a pas sanctionné. Il est vrai qu'on oublie souvent les règles de base. Envoyer une lettre à quelqu'un ne me semble pas excessivement autoritaire. Nous voulons tous que les droits et devoirs de l'école de la République soient rappelés. Nous sommes choqués des insultes sur les réseaux sociaux. Sans excès d'autoritarisme, on rappelle les exigences de la loi.
Mme Annie Guillemot. - Souvent, quand un élu prend la parole, le journaliste indique sa fonction. Certains professionnels de santé - dont le père du ministre du logement - qui dépendent de la fonction publique hospitalière, se sont offusqués de l'attitude du Gouvernement à l'égard des gilets jaunes et ont signé une pétition. Seront-ils sanctionnés ? Y aura-t-il deux poids, deux mesures ?
L'amendement n°387 rectifié n'est pas adopté.
L'article premier est adopté.
La séance est suspendue quelques instants.
ARTICLES ADDITIONNELS
M. le président. - Amendement n°469 rectifié bis, présenté par MM. H. Leroy, Meurant, Courtial, Laménie et Grosdidier.
Après l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 111-3 du code de l'éducation, il est inséré un article L. 111-3-... ainsi rédigé :
« Art. L. 111-3-.... - Le respect des élèves à l'égard des professeurs et du personnel est une valeur fondamentale qui doit être observée à tout moment. À ce titre, le règlement intérieur des établissements scolaires fixe les conditions dans lesquelles les élèves doivent se lever lorsqu'un professeur rentre dans une salle de classe. »
M. Henri Leroy. - Le respect est une valeur fondamentale. Cet amendement impose aux élèves de se lever lorsqu'un professeur accède à une salle de classe, dans des conditions définies par le règlement intérieur des établissements scolaires.
M. Max Brisson, rapporteur. - L'article premier satisfait ce que demande la première phrase de votre amendement. En outre, la loi n'a pas à se mêler des conditions dans lesquelles les élèves se lèvent... Cela relève du règlement intérieur de l'établissement. Retrait ou avis défavorable.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. - Même avis.
Mme Catherine Troendlé. - Ce n'est en effet pas du domaine de la loi, mais il est bon de rappeler l'importance du respect, manifesté à l'entrée du professeur ou de tout autre adulte dans la classe. Cette petite piqûre de rappel dans le débat n'est pas inutile.
Mme Samia Ghali. - J'ai connu l'époque où c'était naturel de se lever à l'entrée d'un adulte dans la classe. Hélas, aujourd'hui, c'est plutôt de faire asseoir les élèves qui devient difficile. En outre, cette mesure imposerait aux enseignants de faire la police, ce qui ferait peser sur eux une pression supplémentaire : les enfants ne sont plus les mêmes que par le passé. Je suis sensible à de telles mesures, mais elles ne sont guère applicables et risqueraient même d'être contre-productives.
M. Henri Leroy. - Le code de l'éducation mentionne la notion de respect, mais n'en donne aucune application concrète. Cet amendement permettrait d'avoir un début d'exécution : les professeurs ne sont pas les égaux des élèves, ils doivent incarner l'autorité. Se lever à l'arrivée du professeur est une marque de respect à l'égard de celui qui diffuse le savoir. Or ce n'est pas une obligation aujourd'hui, monsieur le ministre. Si vous ne souhaitez pas l'inscrire dans la loi, êtes-vous prêt à rédiger une circulaire dans ce sens ?
Mme Catherine Troendlé. - C'est vraiment important !
L'amendement n°469 rectifié bis n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°101 rectifié quater, présenté par MM. Retailleau, Babary, Bascher et Bazin, Mmes Berthet et A.M. Bertrand, MM. Bizet, Bonhomme et Bonne, Mme Bories, MM. Bouchet, Bouloux et J.M. Boyer, Mme Bruguière, MM. Calvet et Cambon, Mme Chain-Larché, MM. Chaize et Charon, Mme Chauvin, MM. Courtial, Cuypers, Dallier, Danesi, Darnaud et Daubresse, Mmes Delmont-Koropoulis, Deroche, Deromedi, Deseyne et Di Folco, M. Dufaut, Mme Dumas, M. Duplomb, Mmes Duranton, Estrosi Sassone et Eustache-Brinio, MM. B. Fournier et Frassa, Mme Garriaud-Maylam, MM. Genest, Gilles et Ginesta, Mme Giudicelli, MM. Gremillet et Grosperrin, Mme Gruny, MM. Guené, Houpert et Huré, Mme Imbert, MM. Joyandet, Karoutchi, Kennel et Laménie, Mmes Lamure, Lanfranchi Dorgal et Lassarade, M. D. Laurent, Mme Lavarde, MM. Lefèvre, Le Gleut et Leleux, Mmes Lopez et Malet, M. Mayet, Mme M. Mercier, M. Meurant, Mme Micouleau, MM. Milon et de Montgolfier, Mme Morhet-Richaud, MM. Morisset, Mouiller et de Nicolaÿ, Mme Noël, MM. Nougein, Pellevat, Pemezec, Perrin, Piednoir, Pierre, Pointereau et Priou, Mmes Procaccia, Puissat et Raimond-Pavero, MM. Raison, Rapin, Reichardt, Revet, Saury, Savary, Savin, Schmitz et Sol, Mmes Thomas et Troendlé et MM. Vial et Vogel.
Après l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le code de l'éducation est ainsi modifié :
1° Au troisième alinéa de l'article L. 131-6, après le mot : « éducation », sont insérés les mots : « , en application de l'article L. 131-8, » ;
2° L'article L. 131-8 est ainsi modifié :
a) Au troisième alinéa, après le mot : « sanctions », sont insérés les mots : « administratives et » ;
b) Les avant-dernier et dernier alinéas sont remplacés par sept alinéas ainsi rédigés :
« L'autorité de l'État compétente en matière d'éducation saisit sans délai le président du conseil départemental du cas des enfants pour lesquels un avertissement est intervenu en vue de la mise en place d'un contrat de responsabilité parentale ou de toute autre mesure d'accompagnement que le président du conseil général pourrait proposer aux familles en application de l'article L. 222-4-1 du code de l'action sociale et des familles.
« Elle communique trimestriellement au maire la liste des élèves domiciliés dans la commune pour lesquels un avertissement tel que défini au présent article a été notifié.
« Les informations communiquées au maire en application du présent article sont enregistrées dans le traitement prévu à l'article L. 131-6.
« Dans le cas où, au cours d'une même année scolaire, une nouvelle absence de l'enfant mineur d'au moins quatre demi-journées sur un mois est constatée en dépit de l'avertissement adressé par l'autorité de l'État compétente en matière d'éducation, cette dernière, après avoir mis les personnes responsables de l'enfant en mesure de présenter leurs observations, et en l'absence de motif légitime ou d'excuses valables, saisit le directeur de l'organisme débiteur des prestations familiales qui suspend immédiatement le versement de la part des allocations familiales dues au titre de l'enfant en cause, calculées selon les modalités prévues à l'article L. 552-4-1 du code de la sécurité sociale. Le directeur de l'organisme débiteur des prestations familiales informe l'autorité de l'État compétente en matière d'éducation ainsi que le président du conseil départemental de la date de mise en oeuvre de cette suspension. Il informe les personnes responsables de l'enfant de cette décision et des dispositifs d'accompagnement parental auxquels elles peuvent avoir recours.
« Le versement des allocations familiales n'est rétabli que lorsque l'autorité de l'État compétente en matière d'éducation a signalé au directeur de l'organisme débiteur des prestations familiales qu'aucun défaut d'assiduité sans motif légitime ni excuses valables n'a été constaté pour l'enfant en cause pendant une période d'un mois de scolarisation, éventuellement interrompu par des vacances scolaires, depuis le mois au titre duquel le versement des allocations familiales a été suspendu.
« Le rétablissement du versement des allocations familiales est rétroactif. Si, depuis l'absence ayant donné lieu à la suspension, une ou plusieurs nouvelles absences de quatre demi-journées par mois sans motif légitime ni excuses valables ont été constatées, à la demande de l'autorité de l'État compétente en matière d'éducation et après que les personnes responsables de l'enfant ont été mises en mesure de présenter leurs observations, aucun versement n'est dû au titre du ou des mois au cours desquels ces nouvelles absences ont été constatées.
« La suspension des allocations familiales ne peut prendre effet qu'à une date permettant de vérifier sous deux mois la condition de reprise d'assiduité définie aux deux alinéas précédents. » ;
3° L'article L. 131-9 est complété par les mots : « , sauf dans le cas où elle a sollicité du président du conseil départemental la mise en oeuvre d'un contrat de responsabilité parentale. »
II. - Après l'article L. 552-4 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 552-4-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 552-4-1 - En cas de manquement à l'obligation d'assiduité scolaire, le directeur de l'organisme débiteur des prestations familiales suspend, sur demande de l'autorité de l'État compétente en matière d'éducation, le versement de la part des allocations familiales due au titre de l'enfant en cause, selon les modalités prévues à l'article L. 131-8 du code de l'éducation. Le rétablissement des allocations familiales s'effectue selon les modalités prévues à ce même article. Les modalités de calcul de la part due au titre de l'enfant en cause sont définies par décret en Conseil d'État. »
III. - Le code de l'action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° L'article L. 222-4-1 est rétabli dans la rédaction suivante :
« Art. L. 222-4-1 - Lorsque le président du conseil départemental est saisi par l'autorité de l'État compétente en matière d'éducation en cas d'absentéisme scolaire, tel que défini à l'article L. 131-8 du code de l'éducation, il peut proposer aux parents ou représentants légaux du mineur concerné la signature d'un contrat de responsabilité parentale.
« Ce contrat rappelle les obligations des titulaires de l'autorité parentale. Son contenu, sa durée et les modalités selon lesquelles il est procédé à la saisine du président du conseil départemental et à la conclusion du contrat sont fixés par décret en Conseil d'État. Ce décret fixe aussi les conditions dans lesquelles les autorités de saisine sont informées par le président du conseil départemental de la conclusion d'un contrat de responsabilité parentale et de sa mise en oeuvre.
« Lorsqu'il constate que les obligations incombant aux parents ou au représentant légal du mineur n'ont pas été respectées ou lorsque, sans motif légitime, le contrat n'a pu être signé de leur fait, le président du conseil départemental peut :
« 1° Saisir le procureur de la République de faits susceptibles de constituer une infraction pénale ;
« 2° Saisir l'autorité judiciaire pour qu'il soit fait application, s'il y a lieu, de l'article 375-9-1 du code civil.
« Lorsque le contrat n'a pu être signé du fait des parents ou du représentant légal du mineur, le président du conseil départemental peut également leur adresser un rappel de leurs obligations en tant que titulaires de l'autorité parentale et prendre toute mesure d'aide et d'action sociales de nature à remédier à la situation. » ;
2° L'article L. 262-3 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La part des allocations familiales dont le versement fait l'objet d'une mesure de suspension ou de suppression en application de l'article L. 131-8 du code de l'éducation demeure prise en compte pour le calcul du revenu de solidarité active. »
M. Jacques Grosperrin. - Cet amendement lutte contre l'absentéisme scolaire, en prévoyant notamment la possibilité d'effectuer une retenue sur les allocations familiales versées aux parents d'élèves de moins de 16 ans.
En effet, la Direction de l'évaluation, de la prospective et de la performance (DEPP) du ministère de l'Éducation nationale a évalué, en mars 2018, le nombre d'élèves absentéistes à 250 000. Elle relève également que de septembre 2017 à mai 2018, dans les établissements publics du second degré, 5,6 % des élèves ont été absents de façon non justifiée quatre demi-journées ou plus par mois, en moyenne. Ce taux d'absentéisme a crû en moyenne de 0,7 point pour l'ensemble des établissements par rapport à l'année 2016-2017. Le taux d'absentéisme moyen annuel est de 3,2 % dans les collèges, de 6,8 % dans les lycées d'enseignement général et technologique et de 18,3 % dans les lycées professionnels. En outre, l'absentéisme est plus élevé dans les établissements socialement défavorisés.
L'amendement fait de la responsabilisation des parents, éducateurs de leur enfant, un élément clé de la lutte contre l'absentéisme.
La sanction administrative, qui se veut plus dissuasive que punitive, est rendue nécessaire par l'insuffisance du dispositif mis en place à la suppression de la loi Ciotti de 2010. La loi de 2013 se limitait à renforcer le dialogue parents-établissements et à prévoir un personnel référent. L'évolution croissante de l'absentéisme impose de nouveaux outils.
M. le président. - Sous-amendement n°500 rectifié à l'amendement n°101 rectifié quater de M. Retailleau, présenté par M. Lafon et les membres du groupe Union Centriste.
Amendement n° 101 rectifié quater, alinéa 11
Remplacer le mot :
saisit
par les mots :
peut saisir
M. Laurent Lafon. - La mesure ne doit pas être systématique, mais elle doit être possible : à l'autorité administrative responsable sur le terrain d'estimer son opportunité, notamment après avoir rencontré les parents.
M. Max Brisson, rapporteur. - L'amendement reprend les dispositions de la loi Ciotti de 2010, abrogée en grande partie par la loi de 2013. Il prévoit un contrat de responsabilisation familiale et, en dernier recours, la suspension des allocations familiales.
Comme l'abaissement de l'instruction obligatoire à 3 ans, et peut-être même davantage, il s'agit d'une mesure de justice sociale car l'absentéisme concerne d'abord les élèves les moins favorisés. Avis favorable au sous-amendement et à l'amendement.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. - Formation des professeurs et relation parents-école sont les deux facteurs les plus importants pour la réussite d'un système scolaire. Une bonne relation entre les parents et l'école est donc essentielle pour rétablir la confiance. De ce point de vue, la France ne se classe pas très bien. C'est pourquoi nous misons sur le concept de la co-éducation entre l'école et les parents.
Responsabiliser les parents au moyen d'un contrat, pourquoi pas, mais nous gagnerions à replacer cet aspect dans le contexte plus large de la réflexion sur la lutte contre les violences scolaires, qui aboutira pour la rentrée prochaine. C'est dans ce cadre que nous reviendrons sur l'absentéisme. C'est pourquoi j'émets un avis défavorable.
M. Alain Marc. - Je voterai l'amendement ainsi sous-amendé.
Pourquoi l'absentéisme ? Voilà la vraie question. Pour corriger le problème et celui des inégalités, il faut mettre l'accent sur le primaire, car c'est de là que tout part. Je voterai l'amendement sous-amendé, qui permet de décider au cas par cas de la suspension, ou non, des allocations.
M. David Assouline. - Le retour du serpent de mer... La gauche au pouvoir est revenue sur la loi Ciotti.
Quand on est moins idéologue que pragmatique, on sait que ce type de mesure ne résout rien. Ce n'est pas en tapant au portefeuille des familles qu'on règlera le problème de l'absentéisme.
Vous avez peut-être lu ces enquêtes récentes révélant que de plus en plus d'enfants quittaient l'école pour rejoindre les effectifs des plateformes numériques qui emploient des livreurs à vélo : c'est l'ubérisation de la société !
Arrêtons de croire que cet amendement résoudra comme par miracle le problème de l'absentéisme.
Mme Samia Ghali. - J'interviens le coeur serré pour combattre cet amendement qui fait peur et témoigne d'une réelle incompréhension de ce qui se passe sur le terrain. Ce n'est pas en retirant les allocations que l'on règlera la question de l'absentéisme. L'article 371-1 du code civil est très clair sur l'autorité parentale. On sanctionnerait avec cet amendement les mamans seules qui peinent à joindre les deux bouts. Et jamais, on ne rappelle à leurs responsabilités les pères qui sont le plus souvent absents.
D'où je viens, beaucoup ont été élevés grâce aux allocations familiales, et heureusement. Les allocations familiales ont permis à de nombreux jeunes de poursuivre leurs études et de s'en sortir.
Les retirer, c'est accroître la fracture et envoyer les jeunes auprès des dealers et de l'école de la rue ! Cet amendement est dangereux. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)
M. Jean-Pierre Grand. - Dans mon département habite une importante population gitane : lui expliquer l'importance de mettre leurs enfants à l'école n'est pas toujours facile. Beaucoup de progrès ont été faits. C'est pourquoi je trouve cet amendement sous-amendé intéressant car il fait preuve de discernement, mot qu'il faudrait apprendre dès la maternelle.
Mme Claudine Lepage. - Je rejoins totalement Mme Ghali. La co-responsabilisation des parents et de l'école est un concept intéressant, mais cela ne suffit pas. Comment soutenir, monsieur le rapporteur, que la suppression des allocations est une mesure sociale, alors qu'il n'y a rien de plus antisocial au contraire ? Vous risqueriez de précariser encore un peu plus des familles, des mamans seules, qui n'en ont vraiment pas besoin.
M. Rachid Temal. - Une partie de nos collègues est attachée à cette idée depuis longtemps, c'est vrai...
Mais l'absentéisme à l'école est un échec collectif. Il faut chercher à accompagner les familles plutôt que de leur mettre la tête sous l'eau ! Sortons du dogmatisme et travaillons collectivement pour lutter contre les difficultés, les inégalités dès le plus jeune âge. Essayons de voir comment accompagner les familles pour éviter l'absentéisme. Quant à parler à ce propos de justice sociale... les bras m'en tombent, monsieur le rapporteur.
Mme Françoise Cartron. - Je suis l'auteur de la loi qui a aboli la loi Ciotti, parce qu'elle n'avait apporté aucun résultat significatif : entre 2011 et 2012, il y a eu 619 suppressions d'allocations familiales dont seulement 142 ont été rétablies. Dans 77 % des cas, les enfants n'étaient pas retournés à l'école. Cette mesure n'était ni efficace, ni dissuasive.
L'absentéisme est de moins de 1 % en primaire, mais de 15 % à 18 % en lycée professionnel, en raison d'une mauvaise orientation. Comment feront les parents pour obliger leur enfant de 16 ans ou 17 ans à se lever pour aller à l'école le matin ? Pourquoi sont-ils absents en lycée professionnels : parce qu'ils ont été orientés par défaut.
En 3e, l'absentéisme croît à partir du deuxième trimestre, lorsque l'enfant anticipe une orientation subie.
La suppression des allocations familiales ne résoudra rien contrairement à une réponse d'orientation. Je voterai contre cet amendement. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM)
Mme Sylvie Goy-Chavent. - Je parlerai, sans dogmatisme, de mon expérience. J'ai été vingt ans enseignante en lycée professionnel en ZEP. D'abord, les parents se rendent très rarement à l'école : si j'en ai vu une vingtaine à l'approche des conseils de classe, c'est bien le bout du monde ! Il faut mettre les parents face à leurs responsabilités. Ensuite, certains parents m'ont dit inscrire leurs enfants en CAP pour percevoir les allocations. (On se récrie sur les bancs du groupe SOCR.) C'est la vérité, je l'ai entendu ! Permettre leur suppression lorsqu'il y a des abus est une bonne solution.
Même avec la loi Ciotti, la suppression des allocations n'allait pas de soi.
Mme Françoise Laborde. - La violence scolaire est très importante. Il faudra la traiter à part. La suppression des allocations familiales fragiliserait les plus faibles. On a eu du recul sur la loi Ciotti et on a vu qu'elle ne servait à rien.
Le rejet que l'on fait en outre peser sur les épaules des enfants ne pourrait que les entraîner dans un cercle vicieux. Merci, monsieur le ministre, pour votre avis défavorable.
Mme Marie-Pierre Monier. - Mme Cartron n'a fait preuve d'aucun dogmatisme, qui a cité des chiffres très précis.
En 2010-2013, j'étais enseignante. L'absentéisme était, et reste, un problème multifactoriel. Le non-versement ne changera les choses qu'à la marge.
En outre, cet amendement stigmatise les plus pauvres. Il est le contraire d'une mesure sociale. Je voterai contre.
M. Pierre Ouzoulias. - Le 17 octobre 2014, l'hebdomadaire La Vie titrait : « Catholiques et communistes unis contre la modulation des allocations familiales ».
Bien qu'il ne nous en reste plus beaucoup, il nous reste au moins un dogme au parti communiste (On s'amuse.) : celui de l'universalité des allocations familiales - que les socialistes ont accepté de soumettre à condition de ressources.
Corroborant les propos de Pierre Laurent, monseigneur Bernard Podevin, quant à lui, estimait que l'on risquait à nouveau de diviser la famille sans que la mesure ne produise une efficacité réelle.
Comme en 2014, je vous demande de nous retrouver sur l'universalité des allocations et sur la défense de la famille.
M. Jacques Bigot. - Nul besoin de cet amendement : tout est déjà dans les lois, à condition que l'on s'en donne les moyens. Lorsque les enfants ne vont pas à l'école, les parents ne respectent pas leurs obligations liées à l'autorité parentale qui figurent dans le code civil. Des mesures d'assistance éducative sont possibles, sauf que nous n'en avons pas les moyens. Lorsque vous êtes confrontés à des adolescents en difficulté, vous vous rendez compte le plus souvent qu'il y a eu des problèmes lors de la petite enfance. C'est à ce moment-là qu'il faut agir. Mais la justice est encombrée, les psychologues scolaires débordés, voilà la réalité !
Vous vous faites plaisir par cet amendement rappelant la loi Ciotti mais vous ne réglez rien. Faisons preuve de responsabilité.
Mme Annie Guillemot. - Moi aussi, et bien que socialiste, je suis favorable à l'universalité des allocations familiales !
Face à une grande concentration de familles en difficulté on manque de moyens, de médecins scolaires, de psychologues. Je parle d'expérience, ayant été maire de Bron.
Nous avons déjà eu ce débat et savons que cet amendement n'est pas la bonne solution.
Le sous-amendement n°500 rectifié est adopté.
L'amendement n°101 rectifié quater, sous-amendé, est adopté et devient un article additionnel.
La séance est suspendue à 19 h 30.
présidence de Mme Catherine Troendlé, vice-présidente
La séance reprend à 21 h 30.
Communication
Conférence des présidents
Mme la présidente. - Les conclusions adoptées par la Conférence des présidents, réunie ce jour, sont consultables sur le site du Sénat. Elles seront considérées comme adoptées en absence d'observation d'ici la fin de la séance.
Pour une école de la confiance (Procédure accélérée - Suite)
Discussion des articles (Suite)
ARTICLE PREMIER BIS AA
M. Robert Laufoaulu . - La prise en compte des inégalités territoriales dans la répartition des moyens du service public de l'éducation est une avancée importante. Wallis et Futuna souffre de son éloignement et de son isolement ; avec les coûts d'importation, matériel pédagogique, outils ou matériaux de construction coûtent 30 % à 50 % plus cher qu'en métropole. Certains locaux ne répondent plus aux normes de sécurité, matériels et outils manquent. Les conséquences sont désastreuses sur les résultats scolaires, notamment dans l'enseignement technique et professionnel. En 2017, les élèves du CAP mécanique n'ont ainsi pas pu réaliser la partie pratique de leur formation. L'enseignement à Wallis et Futuna, qui est de la responsabilité financière de l'État, a besoin de moyens. Nous comptons sur vous. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Indépendants)
Mme Céline Brulin . - Le lien historique entre l'école et la commune conserve toute sa pertinence. L'échelon intercommunal, en revanche, n'est guère adapté, a fortiori avec les EPCI XXL créés par la loi NOTRe. À l'issue du grand débat, le président de la République s'est engagé à ce qu'aucune école ne ferme sans l'aval du maire. C'est déjà le cas : le conseil municipal a le dernier mot, mais encore faut-il que l'école dispose d'un poste d'enseignant, ce qui n'est pas du ressort de la commune ! On ne regagnera la confiance des élus locaux qu'en montrant que l'on met la commune au coeur de la carte scolaire.
M. Hervé Maurey . - Je me réjouis de l'introduction de l'article premier bis AA qui prend en compte la dimension territoriale, trop souvent ignorée par les politiques publiques. Une école est un facteur d'attractivité pour un territoire, or en milieu rural, seule une commune sur deux dispose d'une école. En dix ans, d'après le ministère lui-même, plus de 8 000 écoles ont fermé !
Il est bon que le maire soit consulté sur la fermeture d'une école ; encore faut-il qu'il ait la liberté de ne pas l'accepter. Or on flèche les investissements pour favoriser les regroupements : certains syndicats intercommunaux à vocation scolaire (Sivos) sont privés de DETR si les écoles sont réparties sur plusieurs communes !
Le dédoublement des classes ne doit pas non plus se faire, comme c'est le cas actuellement, au détriment des territoires ruraux. (M. le ministre le conteste.) Les maires sont très attachés à leur école et y consacrent des moyens colossaux au regard de leurs capacités.
Mme la présidente. - Amendement n°317 rectifié, présenté par Mme S. Robert et les membres du groupe socialiste et républicain.
Au début
Ajouter un paragraphe ainsi rédigé :
.... - À la première phrase du deuxième alinéa de l'article L. 111-1 du code de l'éducation, après le mot : « école », sont insérés les mots : « d'expliquer et ».
Mme Sylvie Robert. - « Faire partager » les valeurs de la République ne se décrète pas. Les partager implique d'abord de les expliquer aux élèves. Elles seront ainsi mieux comprises, appropriées et acceptées.
M. Max Brisson, rapporteur. - Le code de l'éducation nationale fixe comme mission à l'école de faire partager aux élèves les valeurs de la République. Comment faire partager sans expliquer ? D'ailleurs, c'est le rôle de l'enseignement moral et civique dans le primaire. Votre amendement est donc satisfait : retrait, sinon avis défavorable.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. - Je partage pleinement votre volonté de défendre l'école primaire rurale. Ce texte, comme les moyens que nous y consacrons, témoigne de notre engagement. À chaque rentrée, nous créons des postes à l'école primaire, pour dédoubler les classes en REP et REP+ mais aussi pour défendre les classes rurales.
Il n'y a jamais eu aussi peu de classes rurales fermées en France depuis dix ans. Le président de la République s'est engagé à ce qu'aucune école rurale ne ferme sans l'aval du maire.
Mais la démographie doit être considérée. Chaque année, manquent à l'appel 40 à 50 000 enfants, essentiellement en zone rurale. Cela entraîne des conséquences en chaîne, qu'il faut modérer mais on ne saurait nier le phénomène. Une stratégie de rebond démographique s'impose dans ces territoires et l'école, si elle est attractive, peut y contribuer - je l'ai constaté récemment en visitant un regroupement pédagogique près de Saint-Omer.
La défense de l'école primaire rurale passe par le dialogue avec les maires et les élus locaux ; c'est la consigne donnée aux inspecteurs. Les moyens suivent, le taux d'encadrement augmente.
Soyons toutefois honnêtes. Si une école perd des élèves quand une autre en gagne, il serait absurde de ne pas rééquilibrer le nombre de classes. À défaut, nous créerions des iniquités entre écoles. En Lozère, il y a 14 élèves par classe, de la petite section au CM2 ! Preuve que nous défendons l'école primaire rurale.
À force de faire croire qu'il y aurait de la malveillance à son encontre, nous créons de la désespérance. Pour créer les conditions d'un rebond démographique dans les territoires ruraux, mieux vaut faire envie que pitié... Je souhaite une union nationale pour défendre l'école rurale, plutôt qu'une désinformation qui nourrit le cercle vicieux de la défiance.
Madame Brulin, il n'y a jamais d'école sans poste d'enseignant.
Enfin, avis défavorable à l'amendement n°317 rectifié, satisfait. Le renforcement de l'EMC, qui fait partie des attentes exprimées lors du grand débat, suppose d'expliciter les valeurs de la République mais aussi de proposer aux élèves des occasions d'engagement. Nous multiplions les projets en ce sens.
L'amendement n°317 rectifié n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°6 rectifié quater, présenté par M. Mouiller, Mmes L. Darcos et Deromedi, M. Sol, Mme Morhet-Richaud, MM. D. Laurent et Daubresse, Mme de la Provôté, M. Morisset, Mme Malet, M. Vogel, Mme Puissat, MM. Kern et Guerriau, Mmes Bories, Noël, Raimond-Pavero et Deseyne, M. Segouin, Mme de Cidrac, M. Forissier, Mme Lassarade, M. Frassa, Mme Richer, M. Priou, Mme Lanfranchi Dorgal, M. B. Fournier, Mme Lavarde, M. Vaspart, Mme Bruguière, M. Nougein, Mmes Billon et Chauvin, MM. Canevet et Piednoir, Mmes M. Mercier, Ramond, Micouleau et Thomas, MM. Lefèvre, Bazin, de Nicolaÿ et Charon, Mme Dumas, MM. Laménie, Perrin et Raison, Mmes Estrosi Sassone et Garriaud-Maylam, MM. Moga, Le Gleut, Revet, Decool, Chasseing et Détraigne, Mme Guidez, M. Mayet, Mme Lherbier, MM. Grosperrin, Babary et Bonhomme, Mme Doineau, M. Capus, Mme Deroche, MM. Gilles, Meurant et L. Hervé, Mme Canayer et MM. Pellevat, Rapin, Gremillet et Bouloux.
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
.... - La même seconde phrase du cinquième alinéa de l'article L. 111-1 du code de l'éducation est complétée par les mots : « , et d'inclusion ».
M. Philippe Mouiller. - L'article L. 111-1 du code de l'éducation énumère les principes généraux de l'éducation. Je propose d'y ajouter l'inclusion, condition nécessaire à une véritable égalité des chances. Le symbole est essentiel.
M. Max Brisson, rapporteur. - Je partage votre souci et connais votre engagement, mais depuis la loi du 8 juillet 2013, l'article L. 111-1 traite déjà de l'inclusion scolaire de tous les enfants sans distinction. Votre amendement est satisfait : retrait.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. - Même avis.
L'amendement n°6 rectifié quater est retiré.
L'article premier bis AA est adopté.
ARTICLES ADDITIONNELS
Mme la présidente. - Amendement n°229 rectifié, présenté par Mme Cartron et les membres du groupe La République En Marche.
Après l'article 1er bis AA
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la sixième phrase du premier alinéa de l'article L. 111-1 du code de l'éducation, après le mot : « établissements », sont insérés les mots : « publics et privés ».
Mme Françoise Cartron. - Cet amendement réaffirme l'objectif de mixité sociale dans les établissements, qu'ils soient publics ou privés. Les inégalités sociales font partie des difficultés auxquelles se heurte l'école. Or la mixité sociale est facteur d'insertion et de réussite de tous les élèves, scolaire, comportementale ou citoyenne. Tous les établissements doivent y prendre leur part.
Mme la présidente. - Amendement n°360 rectifié bis, présenté par Mmes M. Filleul et Taillé-Polian.
Après l'article 1er bis AA
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La sixième phrase du premier alinéa de l'article L. 111-1 du code de l'éducation est complétée par les mots : « scolaires publics et privés ».
Mme Martine Filleul. - Tous les établissements doivent se sentir concernés par l'objectif de mixité sociale. La République s'impose à tous ! Ces deux types d'établissements sont financés par l'État, ils doivent travailler dans le même sens.
M. Max Brisson, rapporteur. - Avis défavorable à ces deux amendements qui portent atteinte à la liberté d'organisation des établissements privés. Des dispositifs incitatifs existent déjà pour encourager ceux-ci à diversifier leur recrutement.
Nous y reviendrons lorsque nous examinerons l'amendement de Laurent Lafon.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. - Sur le fond, je partage votre objectif, mais il figure déjà dans la loi, puisque l'article L. 442-20 du code de l'éducation précise que l'article L. 111-1 s'applique aux établissements d'enseignement privé.
La mixité sociale fait partie des objectifs qui leur sont fixés et fait l'objet d'un dialogue constructif avec les représentants de l'enseignement privé sous contrat. Nous avançons, votre amendement est satisfait.
Mme Françoise Cartron. - Je préfère la réponse du ministre à celle du rapporteur ! Effectivement, l'enseignement catholique n'est pas fermé à l'idée de prendre sa part à l'objectif de mixité sociale. Je maintiens toutefois mon amendement.
L'amendement n°229 rectifié n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°360 rectifié bis.
ARTICLE PREMIER BIS A
Mme la présidente. - Amendement n°122, présenté par Mme Brulin et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Supprimer cet article.
M. Pierre Ouzoulias. - L'histoire de La Marseillaise est complexe, polyphonique : chant de guerre, chant révolutionnaire... Chacun se l'approprie selon sa culture personnelle, sa tradition politique. Personnellement, je ne peux la chanter sans penser à ceux qui l'entonnèrent sur les Champs-Élysées, le 11 novembre 1940. Se trouvaient parmi ces résistants de la première heure, des gaullistes, des communistes, des socialistes ; plusieurs connaîtront la déportation et la mort. Ils incarnaient l'esprit de la Résistance et notre attachement collectif à la République, au-delà de nos origines et de nos sensibilités.
Aujourd'hui, ce chant est le plus souvent entendu par les jeunes dans les enceintes sportives. Comment restituer par une affiche sa valeur symbolique et sa profondeur historique ? L'enseignement de La Marseillaise figure dans les programmes ; les enseignants n'ont pas besoin de cet affichage obligatoire pour être pleinement investis dans leur mission d'éducation civique. Faisons-leur confiance pour trouver les mots et les circonstances capables d'en évoquer toutes les dimensions.
M. Max Brisson, rapporteur. - Sensible au premier couplet de notre collègue, je pensais qu'il allait soutenir cet article ! Il s'agit d'une mesure symbolique dont je n'exagère pas la portée, mais les symboles ont de l'importance lorsqu'ils participent d'une forme de reconquête républicaine. Son coût sera négligeable, voire nul pour les collectivités : il s'agira d'une affichette placardée dans les salles de classes.
Avis défavorable.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. - Avis défavorable, justement parce que je partage vos propos, monsieur Ouzoulias ! Pour avoir vécu à l'étranger, en Amérique latine notamment, je suis toujours frappé que la place des symboles nationaux - le drapeau et l'hymne - ne fasse polémique qu'en France. Devoir ferrailler sur ces questions est pour moi objet de tristesse.
Le sujet semble toutefois plus consensuel depuis 2015, du moins dans la société. J'ai notamment souvenir d'un groupe de collégiens de REP+ de Montpellier, issus de l'immigration, qui m'avaient spontanément chanté La Marseillaise après une discussion informelle. Une telle scène n'aurait sans doute pas été possible quelques années auparavant.
Sans doute est-il naturel d'avoir besoin de sentir qu'on appartient à la nation dans laquelle on vit, cette nation française dont nous sommes si fiers. Nous ne devrions pas nous diviser sur de tels sujets.
Je constate que cet article a fait polémique ; pour moi, la présence quotidienne de la République sous les yeux des élèves est positive. La question du coût est marginale : nous pouvons imprimer une telle affiche pour un coût modique, comme nous l'avons fait pour la charte de la laïcité. L'afficher en classe n'a rien de vertical, de comminatoire ou d'offensant. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe Les Républicains)
M. Pierre Ouzoulias. - Je ne voudrais pas que La Marseillaise et le drapeau soient réduits à un attirail de plus dans la salle de classe, une affiche parmi les autres ! Laissons la liberté pédagogique à l'enseignant. (Mouvements à droite) N'en faisons pas quelque chose de banal !
Combien de couplets de La Marseillaise comptez-vous afficher ? Pour ma part, c'est le septième que je préfère : le couplet des enfants.
« Nous entrerons dans la carrière « Quand nos aînés n'y seront plus ; « Nous y trouverons leur poussière « Et la trace de leurs vertus. « Bien moins jaloux de leur survivre « Que de partager leur cercueil « Nous aurons le sublime orgueil « De les venger ou de les suivre. » (M. le ministre apprécie.)
Je retirerai mon amendement si vous vous engagez à l'afficher également. (Sourires)
Mme Françoise Gatel. - Rassurez-vous, je ne chanterai pas La Marseillaise, même si elle le mériterait. J'apprécie l'esprit brillant de M. Ouzoulias, mais ne partage pas sa chute. Les enfants ont aussi besoin d'images pour apprendre, et l'affichage de La Marseillaise va dans le bon sens. La sensibilisation à la communauté démocratique, c'est aussi montrer que l'école de la République est un lieu particulier, celui où l'on vit ensemble. Je ne voterai donc pas cet amendement.
L'amendement n°122 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°271 rectifié, présenté par Mme Monier et les membres du groupe socialiste et républicain.
Alinéa 2
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Art. L. 111-1-2. - Dans des conditions fixées par décret, une séance de sensibilisation aux symboles de la Nation est effectuée dans les établissements du premier et du second degrés, publics ou privés sous contrat, afin d'expliquer les raisons de la présence de l'emblème national de la République française, le drapeau tricolore, bleu, blanc, rouge, du drapeau européen ainsi que des paroles de l'hymne national qui est obligatoire dans chacune des salles de classe de ces établissements. »
Mme Marie-Pierre Monier. - Nous nous interrogeons sur la dimension pédagogique d'une telle mesure. Se borner à afficher les symboles républicains dans la classe est un peu abrupt ; pour en faire mesurer toute l'importance, il faudrait, lors d'une séance annuelle, en début d'année par exemple, expliquer le sens et l'histoire de ces symboles.
Mme la présidente. - Amendement n°188, présenté par Mme Brulin et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Alinéa 2
Après le mot :
rouge,
insérer les mots :
la devise de la République « Liberté, Égalité, Fraternité », le principe de la Ve République « Gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple »,
M. Pierre Ouzoulias. - Madame Gatel, à votre contact, j'apprends vite ! (Sourires) Cet amendement va dans votre sens puisqu'il propose de faire figurer sur la devise de la République, « Liberté, Égalité, Fraternité », et le principe de la République, énoncé à l'article 2 de la Constitution : « le gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple ». Une forme de populisme qui devrait vous convenir ! (Sourires ; Mme Françoise Gatel rit de bon coeur.)
Mme la présidente. - Amendement n°98 rectifié bis, présenté par M. Paccaud, Mme Berthet, M. J.M. Boyer, Mme Chain-Larché, MM. Charon, Cuypers, Daubresse et Decool, Mme Deromedi, MM. Dufaut et Duplomb, Mmes Duranton, Eustache-Brinio, Garriaud-Maylam, Goy-Chavent et Gruny, MM. Houpert et Huré, Mme Imbert, MM. Karoutchi et Laménie, Mme Lanfranchi Dorgal, MM. Lefèvre et H. Leroy, Mme M. Mercier, M. Meurant, Mme Morhet-Richaud et MM. Pellevat, Pemezec, Pierre, Rapin, Revet, Saury, Sido et Vogel.
Alinéa 2
Après le mot :
européen
insérer les mots :
, la devise de la République
M. Olivier Paccaud. - La devise républicaine, « Liberté, Égalité, Fraternité », a toute sa place sur cette affiche. Notre République a quatre emblèmes : le drapeau, Marianne, l'hymne national et la devise, sans conteste le symbole le plus citoyen. La République a des couleurs, mais elle a aussi des valeurs, qu'il revient à l'école d'inculquer.
Mme la présidente. - Amendement n°236, présenté par M. Malhuret, Mme Mélot et MM. Bignon, Capus, Chasseing, Decool, Fouché, Guerriau, Lagourgue, Laufoaulu, A. Marc et Wattebled.
Alinéa 2
1° Remplacer la seconde occurrence du mot :
des
par les mots :
de tous les
2° Supprimer les mots :
sous contrat
Mme Colette Mélot. - Cet amendement étend l'obligation d'affichage du drapeau tricolore, du drapeau européen et des paroles de l'hymne national dans les classes aux établissements du premier et du second degré privés hors contrat. Les valeurs et symboles de la République concernent l'ensemble des élèves et de la communauté éducative ; la République doit s'imposer à tous.
Mme la présidente. - Amendement n°199 rectifié bis, présenté par MM. Dallier et Bonhomme, Mme Canayer, MM. Daubresse, de Nicolaÿ et del Picchia, Mmes Delmont-Koropoulis, Deroche, Deseyne, Estrosi Sassone et Garriaud-Maylam, M. Houpert, Mme Imbert, MM. Karoutchi et Laménie, Mmes Lamure et Lavarde, M. Lefèvre, Mme Micouleau, MM. Piednoir, Savary, Savin, Segouin, Vaspart et Charon, Mmes de Cidrac et Di Folco, M. B. Fournier, Mme Lanfranchi Dorgal et MM. Pellevat, Sido et Bonne.
Alinéa 2
Remplacer les mots :
du premier et du second degrés
par les mots :
d'enseignement élémentaire et du second degré
M. Philippe Dallier. - Je m'interroge sur la pertinence de cet affichage dans les classes de maternelle, où les enfants ne savent pas encore lire... Par ailleurs, monsieur le ministre, quelle forme prendront in fine les affichettes, combien coûteront-elles et qui paiera ?
Mme la présidente. - Amendement n°73 rectifié ter, présenté par MM. A. Marc, Bignon, Chasseing, Wattebled, Decool et Malhuret.
Alinéa 2
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Une séance explicative par an est dispensée à partir du cours élémentaire deuxième année.
M. Alain Marc. - La seule présence des drapeaux et des paroles de l'hymne national ne saurait parler aux enfants si leur sens ne fait pas l'objet d'une explication.
M. Max Brisson, rapporteur. - Cet affichage est important, et je n'imagine pas qu'un professeur omette d'expliquer à sa classe la portée de ces symboles. Inutile de prévoir dans la loi une telle séance explicative, d'autant qu'il existe déjà dans les programmes d'EMC un volet relatif aux symboles de la République. Évitons les injonctions permanentes, les journées de ceci ou de cela, laissons les professeurs appliquer les programmes !
Monsieur Ouzoulias, la formule de Lincoln tient à l'organisation des pouvoirs, tandis que notre devise renvoie aux valeurs de la République ; aussi serais-je favorable à l'amendement n°98 rectifié bis et défavorable à l'amendement n°188.
L'amendement n°236 a été longuement débattu en commission. J'y vois pour ma part une entrave à la liberté d'organisation des établissements hors contrat, qui ne relèvent pas du service public de l'éducation. En 2013, le législateur avait choisi de limiter l'affichage obligatoire de la devise aux seuls établissements publics ou privés sous contrat. Retrait ou avis défavorable.
Je comprends les interrogations de Philippe Dallier, mais dès lors que l'on abaisse l'âge de l'instruction obligatoire à 3 ans, familiariser les enfants de maternelle aux valeurs de la République peut s'entendre, voire faire l'objet d'une très belle leçon ! Avis défavorable à l'amendement n°199 rectifié bis. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe Les Républicains)
Défavorable à l'amendement n°73 rectifié ter, satisfait : la séance d'explication sur les symboles de la République existe déjà dans les programmes d'EMC à partir du CE2.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. - Je me réjouis de l'esprit d'unité qu'affichent ces amendements qui ne se distinguent qu'au plan des modalités, pas du principe.
L'amendement n°271 rectifié sera satisfait par les textes d'application : retrait ou avis défavorable.
Les symboles de la République sont au nombre de quatre. M. Ouzoulias propose d'ajouter l'article 2 de la Constitution : gare au risque inflationniste ! Avis favorable à l'amendement n°98 rectifié bis, défavorable à l'amendement n°188, aussi sympathique soit-il.
Les établissements hors contrat doivent faire l'objet d'une plus grande intégration à la République. C'est l'esprit de la loi Gatel que vous avez votée, et de l'action que je mène. Une école, même hors contrat, n'est pas hors de la République.
Mme Françoise Gatel. - Très bien.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. - Avis favorable, donc, à l'amendement n°236, qui ne me paraît pas contraire à la liberté de l'enseignement. Ces établissements sont déjà tenus de respecter un certain nombre d'obligations.
Comme le rapporteur, je considère que l'amendement n°199 rectifié bis ne serait pas cohérent avec l'abaissement de l'âge de l'instruction obligatoire : retrait ou avis défavorable.
Retrait ou avis défavorable à l'amendement n°73 rectifié ter, qui sera également satisfait.
Mme Dominique Vérien. - Monsieur le ministre, merci de votre avis sur l'amendement n°236. La loi Gatel vise à faire respecter les valeurs de la République dans toutes les écoles, même hors contrat. L'État tente de fermer les écoles ayant dévié des exigences républicaines. Il est normal de rappeler symboliquement que l'école s'inscrit dans la République. Je voterai cet amendement.
M. Laurent Lafon. - Il serait bon que notre assemblée arrête une position sur la distinction entre établissement privé sous contrat et hors contrat. Avec mon amendement n°251, je proposerai de ces derniers une lecture purement juridique : créés légalement, contrôlés par l'État, dispensant une instruction obligatoire, définie par le code de l'éducation, je ne vois rien qui s'oppose à ce qu'ils soient soumis aux mêmes obligations que les autres. Bref, je rejoins le point de vue du ministre.
Mme Sonia de la Provôté. - Les enfants de ces établissements ne sont pas moins que les autres des enfants de la République, en effet. Les fondamentaux de la République ne sont pas négociables.
Mme Angèle Préville. - L'affichage des symboles de la République dans les salles de classe est une bonne chose. Je regrette toutefois qu'il ne s'agisse pas d'un vrai drapeau, qui pourrait être réalisé par les élèves eux-mêmes. L'hymne, à mon sens, devrait être chanté par les élèves.
Mme Françoise Laborde. - Le groupe RDSE votera l'amendement n°236. Les enfants sont des citoyens en devenir : ils doivent tous s'approprier la devise de la République à laquelle nous proposerons bientôt d'ajouter la laïcité...
M. Philippe Dallier. - Je retire mon amendement n°199 rectifié bis. Nous avons renoncé au drapeau pour des questions de coût. Pour les mêmes raisons, l'affiche devrait être uniformisée au niveau national.
M. Max Brisson, rapporteur. - Lors des débats sur la loi Gatel, que j'ai soutenue, comme en commission sur le projet de loi, j'ai rappelé la liberté d'enseignement des établissements hors contrat. Les établissements publics et privés sous contrat font partie du service public de l'éducation et sont soumis à l'obligation d'instruction. Ne mettons pas les écoles hors contrat sur le même plan, nos concitoyens risqueraient de s'y tromper.
Par ailleurs, je ne suis pas sûr que cet amendement soit conforme à la Constitution. (Mme Marie-Noëlle Lienemann approuve ; on applaudit sur quelques bancs des groupes CRCE et SOCR.)
Mme Céline Brulin. - Nous partageons l'analyse juridique du rapporteur.
M. Alain Marc. - Vous évoquez les écoles privées hors contrat mais quid des enfants instruits dans leur famille ? Ces symboles doivent-ils figurer dans les logements ?
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. - L'Éducation nationale a déjà produit des affiches en grande quantité et à ses frais pour la Charte de la laïcité. L'affiche prévue par le projet de loi serait la même sur l'ensemble du territoire.
Quant au débat sur l'affichage dans les écoles hors contrat, je ne partage pas l'analyse du rapporteur. Je suivrais son raisonnement s'il s'agissait de la façade de l'établissement, où un affichage risquerait effectivement d'introduire une confusion entre établissements hors contrat et sous contrat, qui ne sont pas soumis aux mêmes obligations. Ce serait une erreur même du point de vue de la République, à mon sens. Mais cela n'est pas le cas d'une affiche présente dans toutes les classes, compte tenu des obligations relatives aux valeurs de la République et à l'apprentissage du socle commun inscrites dans le code de l'éducation. Ce serait très sain et cela ne me semble pas poser de problème constitutionnel.
L'amendement n°271 rectifié n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°188.
L'amendement n°98 rectifié bis est adopté.
Après une épreuve à main levée, réputée douteuse, l'amendement n°236, mis aux voix par assis et levé, n'est pas adopté.
L'amendement n°199 rectifié bis est retiré.
L'amendement n°73 rectifié ter n'est pas adopté.
L'article premier bis A, modifié, est adopté.
ARTICLES ADDITIONNELS
Mme la présidente. - Amendement n°237, présenté par M. Malhuret, Mme Mélot et MM. Bignon, Capus, Chasseing, Decool, Fouché, Guerriau, Lagourgue, Laufoaulu, A. Marc et Wattebled.
Après l'article 1er bis A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la première phrase de l'article L. 111-1-1 du code de l'éducation, les mots : « sous contrat » sont supprimés.
Mme Colette Mélot. - Cet amendement étend l'obligation d'affichage du drapeau tricolore et du drapeau européen sur la façade des écoles et des établissements d'enseignement du second degré aux établissements scolaires privés hors contrat.
M. Max Brisson, rapporteur. - M. le ministre a évoqué précédemment les façades des établissements scolaires. Les écoles privées hors contrat répondent seulement de l'obligation d'instruction mais ne relèvent pas du service public de l'Éducation nationale. Évitons les confusions ! Retrait ou avis défavorable.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. - Il faut distinguer la façade et la salle de classe. Sur la façade, on indique la présence d'un service public ; dans la classe, il s'agit d'un outil pédagogique et éducatif.
Pour un établissement privé hors contrat, la présence obligatoire des symboles de la République sur la façade constituerait en quelque sorte un abus : il ne s'agit pas d'une école de la République, donc ce n'est souhaitable, ni point de vue de l'école, ni de celui de la République.
Mme Françoise Laborde. - Il est dommage que l'amendement n°236 n'ait pas été discuté à la suite de celui-ci... Peut-être que plus de collègues se seraient levés. C'est un coup raté ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UC et RDSE et sur quelques bancs du groupe Les Républicains)
L'amendement n°237 est retiré.
Mme la présidente. - Amendement n°251 rectifié, présenté par MM. Lafon et Henno, Mmes Vullien et de la Provôté, M. Laugier, Mme Billon, MM. Kern, Capo-Canellas, Janssens et Mizzon, Mme Vermeillet, MM. Prince et Moga et Mme Saint-Pé.
Après l'article 1er bis A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la seconde phrase de l'article L. 111-1-1 du code de l'éducation, les mots : « les locaux des mêmes écoles et établissements » sont remplacés par les mots : « toutes les écoles et tous les établissements ».
M. Laurent Lafon. - J'ai entendu les arguments du rapporteur et du ministre sur l'amendement précédent.
L'amendement n°251 rectifié est retiré.
Mme la présidente. - Amendement n°285 rectifié bis, présenté par Mme Monier et les membres du groupe socialiste et républicain.
Après l'article 1er bis A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la seconde phrase de l'article L. 111-1-1 du code de l'éducation, les mots « est affichée » sont remplacés par les mots : « et la charte de la laïcité à l'école sont affichées ».
Mme Marie-Pierre Monier. - L'article L. 111-1-1 du code de l'éducation prévoit l'affichage de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen des 26 et 27 août 1789 dans les établissements scolaires. Nous souhaitons qu'il en soit de même pour la Charte de la laïcité à l'école.
Parfois, malgré les mesures prises, le principe de laïcité qui implique la liberté de conscience, de croire ou de ne pas croire et d'exprimer ses opinions dans les limites imposées par l'ordre public reste en effet abstrait. La charte pourrait en faciliter la compréhension par les élèves.
Mme la présidente. - Amendement identique n°420 rectifié bis, présenté par Mme Laborde, MM. Arnell, Artano et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Castelli, Collin et Corbisez, Mme Costes, MM. Gabouty et Gold, Mmes Guillotin et Jouve et MM. Labbé, Menonville, Requier, Roux et Vall.
Mme Françoise Laborde. - La laïcité est indissociable des principes figurant dans notre devise. Elle est garante de nos libertés individuelles et de nos valeurs communes.
Les articles 13, 14 et 15 peuvent être « dérangeants » pour les écoles privées, mais il est important de connaître les règles et après tout, ces établissements reçoivent de l'argent de l'État, ce qui ne les « dérange » nullement... En outre, au moins les douze premiers articles pourraient être affichés dans ces établissements.
M. Max Brisson, rapporteur. - L'affichage de la charte est déjà obligatoire dans les écoles publiques depuis une circulaire de Vincent Peillon du 6 septembre 2013. Je suis défavorable à cet affichage dans les écoles privées sous contrat.
Il s'agit seulement d'un outil pédagogique interne à l'Éducation nationale, qui ne saurait être mis sur le même plan que la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, par exemple. Avis défavorable aux amendements nos285 rectifié bis et 420 rectifié bis.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. - J'ai une certaine révérence pour cette charte. Il arrive que l'on me soupçonne de vouloir effacer ce qui existait avant moi, c'est faux. La Charte de la laïcité constitue un progrès indéniable. Je suis toujours très attentif à sa présence, lorsque je visite des écoles.
Je souscris toutefois aux arguments du rapporteur présentés à l'appui de sa demande de retrait sur le statut de ce document et sur le caractère particulier de l'enseignement privé sous contrat.
Nous pourrions toutefois en discuter avec ses représentants, qui seraient sans doute d'accord pour faire certaines choses, j'y suis prêt. Mais je ne pense pas qu'on doive leur imposer par la loi l'obligation d'afficher la Charte de la laïcité dans sa forme actuelle. Avis défavorable aux deux amendements, probablement anticonstitutionnels par ailleurs.
Mme Christine Prunaud. - La République est aussi représentée par la défense de la laïcité, qui ne nie ni la liberté de conscience, ni la liberté de croire ou de critiquer - Nous avions laissé les panneaux d'une exposition sur la laïcité dans une école des Côtes-d'Armor, à Lamballe, en la laissant libre d'en supprimer. Cela dépend beaucoup des directions et des enseignants, mais il ne faut, s'agissant des valeurs républicaines, rien s'interdire.
Qu'il s'agisse de la religion catholique ou de toute autre, ne craignons pas de valoriser, partout, le principe de laïcité.
Les amendements identiques nos285 rectifié bis et 420 rectifié bis ne sont pas adoptés.
Mme la présidente. - Amendement n°123, présenté par Mme Brulin et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Après l'article 1er bis A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de l'éducation est ainsi modifié :
1° Aux premier, troisième et cinquième à dernier alinéas de l'article L. 312-15, les mots : « enseignement moral et » sont remplacées par le mot : « éducation » ;
2° Au premier alinéa de l'article L. 131-1-1, les mots : « son sens moral » sont supprimés.
M. Pierre Ouzoulias. - Cet amendement ne remet bien sûr pas en cause la notion de morale. L'éducation doit être portée par la famille et par l'école et il me semble que la morale est davantage du ressort de la famille. L'école, pour sa part, apprend la citoyenneté. Elle a un devoir de neutralité.
M. Max Brisson, rapporteur. - La lettre adressée aux instituteurs par Jules Ferry sur la loi du 28 mars 1882 et l'enseignement de la morale est particulièrement parlante : « il a paru tout naturel que l'instituteur en même temps qu'il apprend aux enfants à lire et à écrire leur enseigne aussi ces règles élémentaires de la vie morale qui ne sont pas moins universelles que celles du langage et du calcul ». Soyons-lui fidèles ! Avis défavorable.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. - Je me situerai aussi dans la lignée de Jules Ferry, s'agissant de l'enseignement moral et civique. Des réformes comme celle de Jean-Pierre Chevènement en 1985 l'ont utilement amélioré. L'école doit faire tendre les enfants vers le Vrai, le Beau et le Bien. À cet égard, les sciences, les arts et la culture, mais aussi l'enseignement du respect d'autrui, ont tout autant leur place au coeur de l'école de la République.
M. Jean-Yves Leconte. - Je suis assez étonné de cette référence à Jules Ferry, passé de mode sur un certain nombre de points - je songe au racisme ou à la colonisation.
Le Bien, le Vrai, ce n'est pas réductible à la raison ; c'est aussi le doute, l'esprit critique. À une ère d'individualisme exacerbé, c'est la capacité à faire société, à faire collectif, qui importe. Et cela exige moins de morale que d'esprit critique.
M. Pierre Ouzoulias. - Nous débattons en quelque sorte à fronts renversés... Il est amusant de constater que la neutralité de l'école est défendue dans ce canton de l'hémicycle, alors qu'elle est souvent prônée dans les cantons d'en face. L'école porte une éducation citoyenne, civile, qui n'a pas grand-chose à voir avec la morale, laquelle revient à la famille. Mais ce débat philosophique, qu'il était bon d'ouvrir ici, ne s'éteindra pas avec le rejet de notre amendement.
Mme Samia Ghali. - Nombre d'enfants peinent aujourd'hui à distinguer le bien du mal. Or c'est la première distinction que j'ai apprise, à l'école publique, moi qui ai grandi dans un bidonville ! Rappelons-le aux enfants et nombre de problèmes seraient réglés.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. - Le Bien, le Mal, semblent des absolus lorsque nous les évoquons.
Or ils dépendent des lois du pays comme des valeurs et des convictions de chacun. Les deux doivent être distingués. Mieux vaut enseigner les valeurs de la République ainsi que le respect d'autrui, car au bien, au mal, on fait dire ce que l'on veut - souvenez-vous de « l'axe du mal » combattu par George W. Bush... L'école, au contraire, doit enseigner des valeurs universelles de respect d'autrui. Je regrette que l'on ait beaucoup caricaturé la pensée des uns et des autres en utilisant ces notions à tort et à travers. Enseignons des notions dotées d'une valeur en soi ! (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE)
M. Olivier Paccaud. - Monsieur le ministre, vous êtes ministre de l'éducation nationale, pas de l'instruction publique, titre abandonné dans les années 1920 avant d'être brièvement repris par le régime de Vichy.
L'école doit enseigner le bien et le mal, les interdits et les obligations. À en entendre certains, bien et mal semblent relatifs. Je ne le crois pas ; les notions remontent au Décalogue tout simplement ! Même si certains peinent à le reconnaître, nous avons des racines judéo-chrétiennes, car telle est la réalité historique, même si d'autres sédiments sont venus ensuite s'y ajouter.
M. Jean-Pierre Leleux. - J'irai dans le même sens. Certains termes aiguisent les débats... « Théorie de l'action humaine soumise au devoir et ayant pour but le bien », m'indique mon dictionnaire à l'entrée « bien et mal ». Cela me semble la moindre des choses à inculquer à nos enfants. Je ne voterai pas l'amendement.
L'amendement n°123 n'est pas adopté.
ARTICLE PREMIER BIS B (Supprimé)
Mme la présidente. - Amendement n°321 rectifié, présenté par M. Antiste et les membres du groupe socialiste et républicain.
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Après l'article L. 111-1-1 du code de l'éducation, il est inséré un article L. 111-1-... ainsi rédigé :
« Art. L. 111-1-.... - La présence d'une carte de la France et de chacun de ses territoires d'outre-mer est obligatoire dans chacune des salles de classe des établissements du premier et du second degrés, publics ou privés sous contrat.
« Un décret précise les modalités d'application du présent article. »
M. Maurice Antiste. - Cet amendement réinscrit dans la loi l'article premier bis B adopté à l'Assemblée nationale et supprimé en commission de la culture du Sénat.
Les populations d'outre-mer qui représentent entre 2,5 millions et 3 millions d'individus, sont tout simplement ignorées !
Apprenons aux élèves que la France ne se limite pas à l'Hexagone et à la Corse.
Mme la présidente. - Amendement n°361, présenté par Mme Lienemann.
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Après l'article L. 111-1-1 du code de l'éducation, il est inséré l'article L. 111-1-... ainsi rédigé :
« Art. L. 111-1-.... - La présence d'une carte de France et de chacun de ses territoires d'outre-mer est obligatoire dans chacune des salles de classe des établissements du premier et du second degrés, publics ou privés sous contrat accueillant des cours d'histoire ou de géographie. Un décret précise les modalités d'application du présent article. »
Mme Marie-Noëlle Lienemann. - Cela semble le B-A-BA que d'afficher une carte du territoire national dans les salles d'histoire et de géographie. Une circulaire ou un décret précisera les choses.
Mme la présidente. - Amendement n°190 rectifié, présenté par M. Antiste, Mme Jasmin, MM. Lurel, Montaugé, Daudigny, J. Bigot, Temal et Kerrouche et Mmes Lepage et Conway-Mouret.
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Après l'article L. 111-1-1 du code de l'éducation, il est inséré un article L. 111-1-... ainsi rédigé :
« Art. L. 111-1-.... - Les territoires français d'outre-mer sont obligatoirement représentés sur chaque carte de France affichée dans les salles de classe des établissements du premier et du second degrés, publics ou privés sous contrat.
« Un décret précise les modalités d'application du présent article. »
M. Maurice Antiste. - Il s'agit d'un amendement de repli.
Mme la présidente. - Amendement n°231, présenté par M. Karam et les membres du groupe La République En Marche.
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Après l'article L. 111-1-1 du code de l'éducation, il est inséré un article L. 111-1-... ainsi rédigé :
« Art. L. 111-1-.... - Toute carte de la France affichée dans une salle de classe d'établissement du premier et du second degrés doit représenter les territoires français d'outre-mer. »
M. Antoine Karam. - Je me souviens de la carte physique - au recto - et administrative - au verso - qui se trouvait dans ma salle de classe, lorsque j'étais adolescent. Je l'ai retrouvée ensuite quand je suis devenu enseignant ! Elle était limitée à l'Hexagone et à ses 90 départements : l'outre-mer n'y figurait pas ! Or ce sont, nous, les outre-mer qui donnons à la France sa dimension universelle. Résultat : certains croient que la Guyane est une île !
M. Max Brisson, rapporteur. - Et si nous faisions confiance aux professeurs ? La loi doit-elle préciser tout ce qu'ils doivent faire jusqu'à l'emplacement de ce qui est affiché en classe ? J'ai longtemps enseigné la géographie.
Oui, Madame Lienemann, les professeurs d'histoire-géographie affichent des cartes, oui, les professeurs de maths ou de physique affichent des tables de conversion. À préciser trop les choses, il n'y aura plus de place sur les murs !
M. Jacques Grosperrin. - Il existe maintenant des tableaux interactifs !
M. Max Brisson, rapporteur. - Une carte est un document pédagogique et notre pays chérit la liberté pédagogique. Avis défavorable à tous ces amendements.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. - Je suis également sensible au risque inflationniste des affichages dans les salles de classe, comme je suis soucieux que la France soit représentée dans son entièreté sur les cartes. M. Karam connaît en outre ma sensibilité ultramarine. Retrait des amendements nos321 rectifié, 361 et 190 rectifié. Avis favorable à l'amendement n°231.
M. Maurice Antiste. - Je ne demande pas que toutes les salles de classe affichent une carte de France, mais que les cartes présentées reflètent toutes les facettes de notre territoire. Quand on sait que 90 % de la biodiversité française se situe outremer ou que la France doit sa deuxième place mondiale en termes d'espace maritime à nos territoires ultramarins, on ne peut comprendre que les cartes se limitent à l'Hexagone. Quelle frilosité ! Alors, oui, la représentation du territoire national a de l'importance !
M. Alain Marc. - Ici, nous faisons la loi. Or une telle mesure relève à l'évidence du pouvoir réglementaire. Reste qu'elle est importante : comment expliquer l'hommage aux Invalides qui fait l'actualité du jour sans planisphère ?
De plus, nous avons perdu le sens des coordonnées depuis que nous nous reposons sur le GPS ! Outil formidable, mais qui conduit beaucoup d'utilisateurs à ignorer la direction dans laquelle ils s'engagent, en tapant juste le nom de leur destination sur leur écran. En tant qu'ancien enseignant, cela me choque !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. - Cette mesure n'est pas plus réglementaire que La Marseillaise ! Enfant, j'ai dû l'apprendre par coeur. Elle figurait d'ailleurs au programme du certificat d'études.
Le drapeau français est bien connu des jeunes, surtout ceux qui suivent la Coupe du monde ! (Sourires) Le territoire français, en revanche, cela est moins certain. Je n'étais pas professeure d'histoire-géographie, mais de physique-chimie.
La géographie explique une partie de notre histoire et nos territoires d'outre-mer y ont une grande part. Savoir se situer dans un ensemble territorial est essentiel pour forger une identité.
M. Michel Magras. - Je ressens exactement la même chose que M. Antiste. Je vis très mal le fait d'être considéré comme un Français de l'étranger, alors que le nom de mon territoire est inscrit dans la Constitution française ! Je veux bien admettre que certains de ces amendements soient imprécis. Mais ne pas voter celui de M. Karam serait totalement inadmissible. Je le ferai à titre personnel. (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE)
M. Antoine Karam. - Vous êtes un excellent avocat ! Si je défends cet amendement, c'est parce que nous avons été trop longtemps oubliés ! Il a fallu que l'on grave dans le marbre de la loi que l'esclavage est comme un crime contre l'humanité, que nous avons commémoré il y a quelques jours dans le Jardin du Luxembourg, pour que l'on enseigne l'histoire de nos territoires... Et l'on confond encore, à La Poste, la Guyane avec la Guinée !
Je ne demande pas une carte dans chaque salle de classe, mais une représentation complète de la France, au moins dans les salles d'histoire-géographie.
Mme Françoise Laborde. - Je voterai cet amendement. Imaginez une carte représentant la France amputée de la Corse ou de Belle-Île ! Tout le monde crierait au scandale ! En tant que sénateurs qui protégeons les territoires, nous devons défendre l'outre-mer.
M. Robert Laufoaulu. - Recevant ici il y a une quinzaine d'années le président de l'Assemblée territoriale de Wallis et Futuna, j'ai entendu un haut responsable du Sénat lui demander s'il venait bien des alentours de La Réunion... J'étais gêné...
Heureusement, la connaissance de nos territoires progresse - je le constate par exemple en prenant le taxi.
M. Jacques Grosperrin. - Ces amendements n'ont en réalité rien de commun. Celui de M. Karam est différent ; il concerne la représentation de la France : là où il y a une carte de France, il ne peut pas ne pas y avoir l'outre-mer. Pour ma part, je le voterai. On ne peut ignorer des territoires qui font notre richesse.
Mme Samia Ghali. - Je le voterai également, bien sûr. Il est d'une grande justesse. Si nous n'affichions que la Guyane dans les classes guyanaises, les réactions seraient nombreuses ! Cet amendement est utile.
M. Olivier Paccaud. - L'amendement d'Antoine Karam est sage. Je puis toutefois lui assurer, comme ancien professeur d'histoire-géographie, que l'immense majorité des cartes présentées en classe affichent non seulement l'Hexagone, mais aussi nos belles possessions d'outre-mer qui sont la France. Mais je voterai toutefois l'amendement.
M. Laurent Lafon. - Dans le flot des amendements examinés ce matin en commission, j'ai voté contre l'amendement de M. Karam. En réalité, il est de bon sens et je le soutiendrai.
M. Max Brisson, rapporteur. - Le débat sert à faire avancer les opinions. J'ai réagi tout à l'heure comme ancien professeur d'histoire-géographie que je demeure... pour moi, la carte était un document pédagogique. Bien sûr qu'il convient d'illustrer la France avec tous ses territoires ! Dès lors, je propose un avis de sagesse. (Applaudissements sur tous les bancs)
L'amendement n°321 rectifié n'est pas adopté, non plus que les amendements nos361 et 190 rectifié.
L'amendement n°231 est adopté.
L'article premier bis B est ainsi rétabli.
(Applaudissements sur tous les bancs)
ARTICLE PREMIER BIS C
Mme la présidente. - Amendement n°406, présenté par le Gouvernement.
Alinéa 2
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Art. L. 511-3-1. - Aucun élève ne doit subir, de la part d'autres élèves, des faits de harcèlement ayant pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions d'apprentissage susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité ou d'altérer sa santé physique ou mentale. »
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. - Cet amendement consacre juridiquement la lutte contre le harcèlement scolaire, phénomène ancien à l'école, presque anthropologique, encore aggravé par le cyberharcèlement, qui continue hors de l'école.
Nous avons pris plusieurs mesures de sensibilisation. La formation des professeurs doit l'intégrer. Il y a ici un sujet moral, même si le terme déplaît à certains : harceler autrui, ce n'est pas bien... La lutte contre le harcèlement doit bénéficier d'une base juridique renforcée.
Mme la présidente. - Sous-amendement n°489 à l'amendement n°406 du Gouvernement, présenté par M. Grand.
Amendement n° 406, alinéa 3
Supprimer les mots :
, de la part d'autres élèves,
M. Jean-Pierre Grand. - L'amendement du Gouvernement limite le harcèlement scolaire à celui entre les élèves.
Or le harcèlement peut, hélas, être le fait d'un enseignant, d'un personnel ou d'un parent d'élève, d'où ce sous-amendement.
M. Max Brisson, rapporteur. - La commission a réécrit le texte de l'Assemblée nationale sur ce sujet pour le simplifier. Le Gouvernement propose une nouvelle rédaction, également claire : sagesse sur l'amendement n°406.
Les autres faits de harcèlement relèvent, monsieur Grand, du droit pénal. Avis défavorable sur le sous-amendement n°489.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. - Je partage l'analyse du rapporteur : avis défavorable sur le sous-amendement n°489. Les actions répréhensibles des mineurs et celles des adultes ne peuvent être mises sur le même plan.
Le sous-amendement n°489 est retiré.
Mme Maryvonne Blondin. - La lutte contre le harcèlement scolaire est essentielle. Où en est le plan Violences scolaires, monsieur le ministre ?
Mme Samia Ghali. - Cet amendement est intéressant et utile. Et cela nous ramène à la morale, j'y insiste car les élèves qui harcèlent n'ont pas toujours le sentiment de mal agir. Parfois, pourtant, le harcèlement aboutit à des drames - un adolescent, dans mon entourage, n'en pouvant plus, s'est pendu. Pourtant, une plainte avait été déposée et ses parents l'avaient accompagné au commissariat, alors que l'école avait fait son travail en accompagnant cet enfant. La police et la justice doivent également mieux prendre en compte la parole de ces enfants en souffrance. Ce texte devrait dépasser les portes de l'école.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. - Il faut une vision complète et cohérente en matière de lutte contre les violences scolaires. En novembre dernier, un premier train de mesures a été pris, notamment pour permettre à l'institution de réagir plus rapidement, avec le signalement des faits et la simplification des conseils de discipline.
Certains sujets sont de nature interministérielle et impliquent la justice, la police et les affaires sociales. Une concertation est en cours pour aboutir à la rentrée 2019 à des dispositions réglementaires s'agissant de la sécurité devant les établissements, de la co-responsabilisation des familles et de la création de structures consacrées aux élèves poly-exclus.
L'amendement n°406 est adopté.
L'article premier bis C, modifié, est adopté.
ARTICLES ADDITIONNELS
Mme la présidente. - Amendement n°322 rectifié, présenté par Mme Rossignol et les membres du groupe socialiste et républicain.
Après l'article 1er bis C
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La deuxième phrase du premier alinéa de l'article L. 312-16 du code de l'éducation est complétée par les mots : « et sensibilisent les élèves aux violences sexistes et sexuelles ».
Mme Marie-Pierre Monier. - Les séances d'information et d'éducation à la sexualité dispensées dans les écoles, les collèges et les lycées doivent permettre de faire reculer les violences sexistes et sexuelles afin de véritablement contribuer à la lutte contre ces violences et de promouvoir une vision égalitaire entre les femmes et les hommes.
Selon l'IFOP, l'âge moyen du visionnage du premier film pornographique est de 14,5 ans, mais les enfants dès l'âge de 11 ans sont exposés à des contenus pornographiques en ligne, ce qui génère des traumatismes. D'après certains psychiatres, le visionnage d'une vidéo pornographique à 7 ans ou 8 ans est un traumatisme analogue à un viol.
Il s'agit d'expliquer que les comportements nuisibles notamment dans les vidéos pornographiques sur internet, sont des actes de violence. Face à la diffusion de ces images et leur visionnage par des enfants et adolescents de plus en plus jeunes, les établissements scolaires sont des lieux privilégiés pour lutter contre la reproduction des violences sexistes et sexuelles.
Alors que les images et vidéos pornographiques qui diffusent une image dégradée de la femme banalisent les violences sexistes et sexuelles, les établissements scolaires doivent les combattre et contribuer à l'apprentissage d'un comportement dans le respect des autres et de soi.
Mme la présidente. - Amendement n°320 rectifié, présenté par Mme Rossignol et les membres du groupe socialiste et républicain.
Après l'article 1er bis C
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le premier alinéa de l'article L. 542-3 du code de l'éducation, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Au moins une séance annuelle d'information et de sensibilisation les violences faites aux femmes et sur la lutte contre les violences sexistes et sexuelles est inscrite dans l'emploi du temps des élèves des écoles, des collèges et des lycées. »
Mme Victoire Jasmin. - Les lieux d'enseignement sont des places privilégiées pour sensibiliser chacun aux violences sexistes et sexuelles. Je vous recommande la lecture du dossier de l'Express sur le sexisme à l'école : « Silence dans les rangs ».
Afin que les violences soient détectées et combattues, il est nécessaire d'éduquer les élèves dès le plus jeune âge. Donnons la possibilité aux jeunes filles de connaître les recours possibles.
Cette sensibilisation à l'école leur permettra de repérer ces violences faites aux femmes et de prévenir les équipes pédagogiques et administratives.
M. Max Brisson, rapporteur. - Ces questions sont importantes. À l'école, certaines représentations doivent effectivement être déconstruites. Dès l'école primaire, l'éducation sexuelle évoque la lutte contre les violences sexistes et sexuelles en application d'une circulaire du 12 septembre 2018. L'article L. 121-1 du code de l'éducation évoque également cette question et prévoit la sensibilisation des personnels enseignants. Ces deux amendements me semblent donc satisfaits. Appliquons les programmes. Je ne suis pas favorable à ce que la loi prescrive une séance annuelle alors qu'elle peine à répondre à toutes les injonctions, notamment pour l'éducation à la sexualité dont l'obligation de proposer trois séances annuelles est déjà peu appliquée. Demande de retrait ou avis défavorable.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. - Le sujet est sérieux et votre diagnostic juste.
Le Gouvernement est déterminé à lutter contre les violences sexuelles et sexistes. Les bases réglementaires figurent déjà au code de l'éducation et la circulaire du 12 septembre 2018 vise à l'effectivité des trois séances d'éducation sexuelle prévues chaque année.
L'extension de l'accès à la pornographie dès le plus jeune âge est préoccupante. En interdisant les téléphones portables à l'école et au collège, nous luttons - partiellement - contre ce phénomène.
De même, nous lançons des campagnes pour lutter contre le cyberharcèlement à connotation sexuelle. Nous devons certes aller plus loin. La base législative existe pour ce faire, d'où mon avis défavorable.
Mme Marie-Pierre Monier. - Je précise que ces amendements sont proposés par Mme Rossignol. On ne peut se contenter du droit existant quand on entend que les trois séances annuelles d'éducation à la sexualité ne sont pas réalisées ! Le nombre de femmes victimes de violences a encore augmenté cette année. On ne peut se contenter de l'existant ; il y va du respect de la race humaine !
L'amendement n°322 rectifié n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°320 rectifié.
L'article premier bis D demeure supprimé.
Mme la présidente. - Amendement n°384 rectifié bis, présenté par Mmes Rossignol, Jasmin, Bonnefoy et Féret, M. Vaugrenard, Mmes Guillemot et Meunier, MM. M. Bourquin et Daudigny, Mmes Van Heghe et Tocqueville, MM. Tissot et Lalande, Mme Conway-Mouret, MM. Temal et Duran, Mmes Conconne, Perol-Dumont et Monier et MM. Lurel, Kerrouche, Jacquin, J. Bigot, Manable, Marie et P. Joly.
Après l'article 1er bis D
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la deuxième phrase du deuxième alinéa de l'article L. 111-1 du code de l'éducation, après le mot : « humains », sont insérés les mots : « en particulier de l'égalité entre les femmes et les hommes, ».
Mme Marie-Pierre Monier. - Cet amendement précise les dispositions générales du code de l'éducation en y ajoutant clairement l'égalité entre les femmes et les hommes. Il permet d'une part de renforcer l'effectivité de la formation obligatoire des personnels éducatifs à l'égalité entre les filles et les garçons, les femmes et les hommes ; d'autre part de garantir le caractère transversal et intégré de l'enseignement de l'égalité des sexes ; et enfin de doter la grande cause du quinquennat de leviers supplémentaires d'action à l'intention des jeunes générations.
M. Max Brisson, rapporteur. - Le code de l'éducation donne déjà pour mission au service public de l'éducation de faire acquérir à tous les élèves le respect de l'égale dignité des êtres humains, de la liberté de conscience et de laïcité, ce qui inclut l'égalité entre les hommes et les femmes. Retrait ?
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. - L'égalité entre les femmes et les hommes est en effet une mission fondamentale de l'école, rappelée aux articles L. 121-1 et L. 312-17-1 du code de l'éducation. Cette exigence est mise en oeuvre dès la formation initiale des enseignants au sein des ESPE. Ces objectifs trouvent une déclinaison concrète dans le texte cadre que nous allons prolonger pour la nouvelle période 2019-2024. La base législative existe donc.
Mme Marie-Pierre Monier. - Je suis élue et membre de la délégation aux droits des femmes depuis 2014. Toutes les auditions auxquelles nous avons procédé ont révélé que la déconstruction des stéréotypes de genre doit avoir lieu aussi tôt que possible : l'école est le lieu idéal. Pourquoi ne pas inscrire clairement cette obligation dans le code de l'éducation ?
L'amendement n°384 rectifié bis n'est pas adopté.
ARTICLE PREMIER BIS EA
Mme la présidente. - Amendement n°35 rectifié, présenté par MM. Grand et Gremillet.
Compléter cet article par les mots :
et après le mot : « citoyen », sont insérés les mots : « ou de citoyenne »
M. Jean-Pierre Grand. - Défendu.
Mme la présidente. - Amendement identique n°232, présenté par Mme Cartron et les membres du groupe La République En Marche.
Mme Françoise Cartron. - Dès lors que l'on parle à cet article d'« homme et de femme », il faut indiquer « de citoyen et de citoyenne ».
M. Max Brisson, rapporteur. - Le masculin ayant valeur de neutre en français, cet ajout nuirait à la lisibilité de la loi. Avis défavorable sur ces deux amendements identiques.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. - Sagesse. (On ironise sur certains bancs.)
Mme Françoise Cartron. - Le féminin nuirait en quelque sorte à la force du masculin, monsieur le rapporteur ? Je n'ose entendre cela !
M. Max Brisson, rapporteur. - Ce n'est pas ce que j'ai dit !
Mme Françoise Cartron. - Je maintiens, en tout cas, mon amendement.
Mme Victoire Jasmin. - Vous le voyez, monsieur le ministre, il y a encore beaucoup à faire pour l'égalité entre les femmes et les hommes, même pour les adultes ! Les propos du rapporteur me sidèrent !
M. Jean-Pierre Grand. - Le ministre nous a appelés à la sagesse sur ces amendements. Je vous invite, pour ma part, à une très grande sagesse !
M. Max Brisson, rapporteur. - Ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit : je n'ai fait que rappeler les règles de la langue française...
Mme Marie-Pierre Monier. - Je conseille un petit livre intitulé Non, le masculin ne l'emporte pas sur le féminin ! Il n'y a aucun obstacle à féminiser certains mots et certains métiers. Il faut donc rajouter « citoyenne ».
Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, les amendements identiques nos35 rectifié et 232, mis aux voix par assis et debout, sont adoptés.
(Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)
Mme la présidente. - Amendement n°323 rectifié, présenté par Mme Rossignol et les membres du groupe socialiste et républicain.
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
.... - Après la deuxième phrase du deuxième alinéa de l'article L. 111-2 du code de l'éducation, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Il les sensibilise également sur la nécessaire préservation de leurs environnements. »
Mme Françoise Férat. - La mobilisation internationale des lycéens et lycéennes Youth for climate démontre une véritable attente des élèves en matière de transition écologique.
Cet amendement intègre la dimension environnementale dans le partage des valeurs de la République comme mission première du service public de l'éducation. Les dispositions du code de l'éducation sont ainsi enrichies de la notion de respect et de préservation de l'environnement, au même titre que la dignité des êtres humains. Placer la préservation de l'environnement au même niveau de valeur que la dignité humaine est un symbole fort envoyé aux élèves et à leurs familles.
M. Max Brisson, rapporteur. - La sensibilisation à l'environnement et au développement durable est déjà prévue à l'article L. 312-19 du code de l'éducation. Nous proposerons de retenir la rédaction proposée ultérieurement à l'amendement n°353 par Hervé Maurey. Retrait ?
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. - Le 15 mars, à l'occasion de la mobilisation des jeunes pour le climat, nous avons organisé une consultation des élèves sur ces enjeux. Ce fut une initiative très fructueuse, qui s'est soldée le 4 avril par une réunion du comité national de la vie lycéenne. Nous allons proposer aux collégiens et lycéens de s'engager sur les projets environnementaux qui les intéressent. Des collèges et des lycées sont aujourd'hui engagés dans des démarches environnementales : la facture énergétique des établissements peut ainsi être diminuée par deux ! Nos 12 millions d'élèves peuvent contribuer à la sauvegarde concrète de l'environnement.
Reste que l'amendement est satisfait par le code de l'éducation : avis défavorable.
L'amendement n°323 rectifié n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°388 rectifié ter, présenté par Mme Préville et M. J. Bigot.
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - Après la deuxième phrase du deuxième alinéa de l'article L. 111-2 du code de l'éducation, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Elle favorise également l'éducation manuelle. »
Mme Angèle Préville. - Je vais vous parler d'un enseignement qui a complètement disparu : l'éducation manuelle. Tout enfant a droit à une éducation manuelle car c'est un levier puissant pour comprendre, apprendre, progresser et se construire. Le cerveau et la main sont en effet liés depuis l'aube de l'humanité. Comment un élève qui n'a pas la chance d'avoir des parents bricoleurs ou artisans saurait-il qu'il pourrait aimer cela et en faire son métier ? De tels enseignements manquent à notre système, surtout à une époque où nos enfants sont accrochés à leurs écrans. Ils structurent la personnalité, favorisent l'organisation et la patience. Un élève qui s'épanouit dans une activité manuelle à l'école ne s'en trouvera que plus à l'aise dans les autres matières. Ces cours d'éducation manuelle manquent aujourd'hui cruellement car ils permettraient à nos élèves de s'orienter en toute connaissance de cause.
M. Max Brisson, rapporteur. - Il est vrai que le cursus scolaire ne fait pas assez de place à l'intelligence de la main, même dans l'enseignement professionnel. Mais je doute qu'il faille l'inscrire à cet article du projet de loi, ou que cela puisse se traduire concrètement. Retrait ou avis défavorable.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. - Je partage votre position, madame la sénatrice. Retrouver le sens de l'éducation manuelle est un enjeu important pour notre système scolaire, y compris dans l'enseignement professionnel, dont une réforme importante va entrer en vigueur à la rentrée.
Recevant les meilleurs ouvriers de France à la Sorbonne, puis à l'Élysée, le président de la République l'a redit récemment. Les sections d'enseignement général et professionnel adapté (SEGPA) disposent du matériel permettant la pratique d'activités manuelles, mais il est peu utilisé par les établissements. Avis favorable : la référence à l'éducation manuelle dans le code de l'éducation est à ce jour effectivement insuffisante.
Mme Angèle Préville. - Il ne faudra pas en rester aux incantations, et offrir aux enfants l'expérience de la réalisation d'un projet, ce qui leur permettra de faire la découverte de belles choses - couleurs, formes, matières.
Kant disait « car c'est dans le problème de l'éducation que git le grand secret de la perfection de la nature humaine ».
Mme Marie-Noëlle Lienemann. - C'est une très ancienne carence que pointe Mme Préville. Notre système d'enseignement fait trop peu le lien entre la théorie et la technique appliquée.
M. Olivier Jacquin. - Anthony, salarié dans la ferme que je dirige, a été massacré par le système scolaire et a subi son orientation. Il a pourtant l'intelligence de la main, le goût du travail bien fait et un grand potentiel. Je soutiendrai donc cet amendement.
Mme Pascale Bories. - Je voterai l'amendement. Il est important de développer cet apprentissage si l'on veut susciter des vocations professionnelles. Certains chefs d'entreprises peinent à embaucher ! Redonnons le goût des activités manuelles dans le primaire et le secondaire.
L'amendement n°388 rectifié ter est adopté.
(Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)
L'article premier bis EA, modifié, est adopté.
Les conclusions de la Conférence des présidents sont adoptées.
Mme la présidente. - Nous avons examiné 43 amendements. Il en reste 351.
Prochaine séance aujourd'hui, mercredi 15 mai 2019, à 14 h 30.
La séance est levée à minuit et demi.
Jean-Luc Blouet
Direction des comptes rendus
Annexes
Ordre du jour du mercredi 15 mai 2019
Séance publique
À 14 h 30 et le soir
Présidence : M. Philippe Dallier, vice-président M. Thani Mohamed-Soilihi, vice-président
Secrétaires : Mme Françoise Gatel - M. Michel Raison
- Suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, pour une école de la confiance (procédure accélérée) (texte de la commission, n°474, 2018-2019).
Analyse des scrutins publics
Scrutin n°99 sur les amendements identiques nos121, présenté par Mme Céline Brulin et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, 198 rectifié bis, présenté par M. Philippe Dallier et plusieurs de ses collègues, et 269 rectifié, présenté par Mme Marie-Pierre Monier et les membres du groupe socialiste et républicain, tendant à supprimer l'article premier du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, pour une école de la confiance.
Résultat du scrutin
Nombre de votants :341
Suffrages exprimés :339
Pour :111
Contre :228
Le Sénat n'a pas adopté
Analyse par groupes politiques
Groupe Les Républicains (144)
Pour : 2 - M. Philippe Dallier, Mme Christine Lanfranchi Dorgal
Contre : 141
N'a pas pris part au vote : 1 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat
Groupe SOCR (73)
Pour : 73
Groupe UC (51)
Pour : 1 - Mme Anne-Catherine Loisier
Contre : 50
Groupe LaREM (23)
Contre : 23
Groupe RDSE (23)
Pour : 19
Contre : 1 - M. Franck Menonville
Abstentions : 2 - M. Guillaume Arnell, Mme Nathalie Delattre
N'a pas pris part au vote : 1 - M. Jean-Marc Gabouty, Président de séance
Groupe CRCE (16)
Pour : 16
Groupe Les Indépendants (12)
Contre : 12
Sénateurs non inscrits (6)
Contre : 1
N'ont pas pris part au vote : 5 - Mmes Christine Herzog, Claudine Kauffmann, Fabienne Keller, MM. Jean Louis Masson, Stéphane Ravier
Conférence des présidents
La Conférence des présidents a pris acte, en application de l'article 6 bis du Règlement, de la demande de création d'une mission d'information sur la sous-utilisation chronique des fonds européens en France (demande du groupe Les Indépendants - République et Territoires).
Semaine réservée par priorité au Gouvernement
Mercredi 15 mai 2019
À 14 h 30 et le soir
- Suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, pour une école de la confiance
Jeudi 16 mai 2019
À 10 h 30
- Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à l'entrée en fonction des représentants au Parlement européen élus en France aux élections de 2019
À 15 heures
- Questions d'actualité au Gouvernement
À 16 h 15 et le soir
- Suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, pour une école de la confiance
Semaine réservée par priorité au Gouvernement
Mardi 21 mai 2019
À 15 heures
- Explications de vote des groupes sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, pour une école de la confiance
De 16 heures à 16 h 30
- Scrutin public solennel, en salle des Conférences, sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, pour une école de la confiance
À 16 h 30
- Proclamation du résultat du scrutin public solennel sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, pour une école de la confiance
À 16 h 45
- Questions d'actualité au Gouvernement
À 17 h 45 et le soir
- Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant création d'une taxe sur les services numériques et modification de la trajectoire de baisse de l'impôt sur les sociétés
Mercredi 22 mai 2019
À 14 h 30 et le soir
- Désignation des vingt-et-un membres de la mission d'information sur la sous-utilisation chronique des fonds européens en France
- Conclusions des commissions mixtes paritaires sur le projet de loi organique portant modification du statut d'autonomie de la Polynésie française et sur le projet de loi portant diverses dispositions institutionnelles en Polynésie française
- Suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant création d'une taxe sur les services numériques et modification de la trajectoire de baisse de l'impôt sur les sociétés
- Projet de loi relatif à la modernisation de la distribution de la presse (procédure accélérée)
Jeudi 23 mai 2019
À 10 h 30, à 14 h 30 et le soir
- 2 conventions internationales examinées selon la procédure d'examen simplifié :
=> Projet de loi autorisant l'approbation de l'accord-cadre relatif à la coopération en matière de sécurité sanitaire entre le Gouvernement de la République française et la Principauté de Monaco et de l'accord relatif à la coopération en matière de transfusion sanguine entre le Gouvernement de la République française et la Principauté de Monaco
=> Projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République d'Arménie relatif à l'emploi des membres de la famille des agents des missions officielles de chaque État dans l'autre
- Suite du projet de loi relatif à la modernisation de la distribution de la presse (procédure accélérée)
Semaine de contrôle
Lundi 27 mai 2019
À 16 heures et le soir
- Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, pour la conservation et la restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris et instituant une souscription nationale à cet effet (demande du Gouvernement)
Mardi 28 mai 2019
À 14 h 30
- Débat sur l'avenir du cinéma français (demande du groupe Les Républicains)
À 16 h 45
- Questions d'actualité au Gouvernement
À 17 h 45 et le soir
- Débat sur l'avenir de l'enseignement professionnel (demande du groupe Les Républicains)
- Éventuellement, suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, pour la conservation et la restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris et instituant une souscription nationale à cet effet (demande du Gouvernement)
Mercredi 29 mai 2019
À 14 h 30
- Débat sur le thème : « La lutte contre la fraude à la TVA transfrontalière » (demande du groupe RDSE)
- Débat sur le thème : « Le cannabis, un enjeu majeur de santé publique » (demande du groupe CRCE)
Semaine réservée par priorité au Gouvernement
Lundi 3 juin 2019
À 15 heures et le soir
- Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à l'organisation et à la transformation du système de santé
Mardi 4 juin 2019
À 9 h 30
- Questions orales
À 14 h 30 et le soir
- Suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à l'organisation et à la transformation du système de santé
Mercredi 5 juin 2019
À 14 h 30 et le soir
- Suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à l'organisation et à la transformation du système de santé
Jeudi 6 juin 2019
À 10 h 30
- Suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à l'organisation et à la transformation du système de santé
À 15 heures
- Questions d'actualité au Gouvernement
À 16 h 15 et le soir
- Suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à l'organisation et à la transformation du système de santé
Semaine sénatoriale
Mardi 11 juin 2019
À 15 heures
- Explications de vote des groupes sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à l'organisation et à la transformation du système de santé
De 16 heures à 16 h 30
- Scrutin public solennel, en salle des Conférences, sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à l'organisation et à la transformation du système de santé
À 16 h 30
- Proclamation du résultat du scrutin public solennel sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à l'organisation et à la transformation du système de santé
À 16 h 45
- Questions d'actualité au Gouvernement
À 17 h 45 et le soir
- Explications de vote puis vote sur la proposition de loi visant à permettre aux conseillers de la métropole de Lyon de participer aux prochaines élections sénatoriales, présentée par M. François-Noël Buffet et plusieurs de ses collègues (demande de la commission des lois)
- Proposition de loi visant à améliorer la lutte contre l'habitat insalubre ou dangereux, présentée par M. Bruno Gilles et plusieurs de ses collègues (demande du groupe Les Républicains)
Mercredi 12 juin 2019
- Débat sur le bilan de l'application des lois (en salle Clemenceau), à 8 heures
De 14 h 30 à 18 h 30
(Ordre du jour réservé au groupe CRCE)
- Proposition de loi créant un statut de l'élu communal, présentée par M. Pierre-Yves Collombat et plusieurs de ses collègues
- Proposition de loi visant à instaurer un droit effectif à l'accès à l'énergie et à lutter contre la précarité énergétique, présentée par M. Fabien Gay, Mme Éliane Assassi et plusieurs de leurs collègues
À 18 h 30 et le soir
- Proposition de loi portant adaptations législatives aux spécificités des territoires d'outre-mer soumis à une pression migratoire importante, présentée par M. Roger Karoutchi et plusieurs de ses collègues
- Éventuellement, suite de la proposition de loi visant à améliorer la lutte contre l'habitat insalubre ou dangereux, présentée par M. Bruno Gilles et plusieurs de ses collègues (demande du groupe Les Républicains)
Jeudi 13 juin 2019
À 10 h 30
- Proposition de résolution visant à clarifier et actualiser le Règlement du Sénat, présentée par M. Gérard Larcher, Président du Sénat
- Éventuellement, suite de la proposition de loi visant à améliorer la lutte contre l'habitat insalubre ou dangereux, présentée par M. Bruno Gilles et plusieurs de ses collègues
- Éventuellement, suite de la proposition de loi portant adaptations législatives aux spécificités des territoires d'outre-mer soumis à une pression migratoire importante, présentée par M. Roger Karoutchi et plusieurs de ses collègues
De 14 h 30 à 18 h 30
(Ordre du jour réservé au groupe RDSE)
- Proposition de loi visant à instituer un médiateur territorial dans certaines collectivités territoriales, présentée par Mme Nathalie Delattre, M. François Pillet et plusieurs de leurs collègues
- Proposition de loi relative à l'accès effectif et direct des petites et moyennes entreprises à la commande publique, présentée par MM. Jean-Marc Gabouty, Jean-Claude Requier et plusieurs de leurs collègues
À 18 h 30 et le soir
- Éventuellement, suite de l'ordre du jour du matin
Semaine réservée par priorité au Gouvernement
Mardi 18 juin 2019
À 14 h 30 et le soir
- Sous réserve de sa transmission, projet de loi de transformation de la fonction publique (procédure accélérée)
Mercredi 19 juin 2019
À 14 h 30 et le soir
- Sous réserve de sa transmission, suite du projet de loi de transformation de la fonction publique (procédure accélérée)
Jeudi 20 juin 2019
À 10 h 30
- 2 conventions internationales examinées selon la procédure d'examen simplifié :
=> Sous réserve de sa transmission, projet de loi autorisant l'approbation de l'accord-cadre sur la coopération sanitaire transfrontalière entre le Gouvernement de la République française et le Conseil fédéral suisse et de l'accord-cadre entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Grand-Duché de Luxembourg sur la coopération sanitaire transfrontalière
=> Sous réserve de son dépôt, projet de loi autorisant l'approbation du protocole entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République d'Arménie portant application de l'accord signé à Bruxelles le 19 avril 2013 entre l'Union européenne et la République d'Arménie concernant la réadmission des personnes en séjour irrégulier
- Sous réserve de sa transmission, nouvelle lecture de la proposition de loi portant création d'une Agence nationale de la cohésion des territoires et conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi organique relative à la nomination du directeur général de l'Agence nationale de la cohésion des territoires et modifiant la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution
- Sous réserve de sa transmission, suite du projet de loi de transformation de la fonction publique (procédure accélérée)
À 15 heures
- Questions d'actualité au Gouvernement
À 16 h 15 et le soir
- Sous réserve de sa transmission, suite du projet de loi de transformation de la fonction publique (procédure accélérée)
Semaine réservée par priorité au Gouvernement
Mardi 25 juin 2019
À 14 h 30
- Sous réserve de sa transmission, suite du projet de loi de transformation de la fonction publique (procédure accélérée)
À 16 h 45
- Questions d'actualité au Gouvernement
À 17 h 45
- Débat à la suite de la réunion du Conseil européen des 20 et 21 juin 2019
Le soir
- Sous réserve de sa transmission, suite du projet de loi de transformation de la fonction publique (procédure accélérée)
Mercredi 26 juin 2019
À 14 h 30 et le soir
- Suite de la proposition de loi visant à clarifier diverses dispositions du droit électoral et de la proposition de loi organique visant à clarifier diverses dispositions du droit électoral, présentées par M. Alain Richard et les membres du groupe La République en Marche
- Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, visant à préserver les intérêts de la défense et de la sécurité nationale de la France dans le cadre de l'exploitation des réseaux radioélectriques mobiles
Éventuellement, jeudi 27 juin 2019
À 10 h 30, à 14 h 30 et le soir
- Sous réserve de sa transmission, suite du projet de loi de transformation de la fonction publique (procédure accélérée)