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Table des matières
Mme Sophie Cluzel, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées
M. Daniel Chasseing, rapporteur de la commission des affaires sociales
Utilisation des caméras mobiles
M. Jean-Pierre Decool, auteur de la proposition de loi
M. Dany Wattebled, rapporteur de la commission des lois
Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur
Mme Jacqueline Gourault, ministre
Équilibre territorial et vitalité de la démocratie locale (Suite)
Discussion des articles (Suite)
ARTICLES ADDITIONNELS après l'article 20 sexies (Suite)
Revitalisation des centres-villes et centres-bourgs
M. Rémy Pointereau, auteur de la proposition de loi
M. Martial Bourquin, auteur de la proposition de loi
M. Jean-Pierre Moga, rapporteur de la commission des affaires économiques
M. Arnaud Bazin, rapporteur pour avis de la commission des finances
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur pour avis de la commission de la culture
M. Jacques Mézard, ministre de la cohésion des territoires
Ordre du jour du jeudi 14 juin 2018
SÉANCE
du mercredi 13 juin 2018
95e séance de la session ordinaire 2017-2018
présidence de M. Vincent Delahaye, vice-président
Secrétaires : M. Éric Bocquet, M. Dominique de Legge.
La séance est ouverte à 14 h 30.
Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.
CMP (Nominations)
M. le président. - J'informe le Sénat que des candidatures ont été publiées pour siéger au sein de l'éventuelle commission mixte paritaire chargée d'élaborer un texte commun sur la proposition de loi visant à garantir la présence des parlementaires dans certains organismes extérieurs au Parlement et à simplifier les modalités de leur nomination.
Ces candidatures seront ratifiées si la Présidence n'a pas reçu d'opposition dans le délai d'une heure prévu par notre Règlement.
Défibrillateur cardiaque
M. le président. - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, relative au défibrillateur cardiaque.
Discussion générale
Mme Sophie Cluzel, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées . - Chaque année, 40 à 50 000 personnes sont victimes d'une mort subite, souvent par infarctus, faute d'avoir bénéficié au bon moment de l'intervention d'une personne qui aurait pu leur sauver la vie en pratiquant les gestes de premiers secours et en relançant le coeur par un choc électrique ou défibrillation le temps que les secours médicaux interviennent.
Chacun d'entre nous peut un jour sauver une vie ou éviter à une personne de lourdes séquelles. La formation aux gestes élémentaires de premiers secours est une priorité du Gouvernement. Si des efforts ont été réalisés, seulement 20 % de la population en a suivi une. Le président de la République a fixé pour objectif de rattraper nos voisins allemands et autrichiens, soit 80 % de personnes formées, dans le programme national de santé publique. Le travail interministériel en cours, piloté par l'Intérieur, en définira les modalités d'application. Une attention particulière sera apportée à la formation des jeunes : dans le premier degré, les élèves apprendront « à porter secours » ; en classe de sixième, « les gestes qui sauvent » ; en classe de troisième, ils suivront la formation « prévention et secours civiques de niveau 1 » (PSC 1) ; dans l'enseignement supérieur, seront organisés un rattrapage des étudiants non formés au PCS 1 et la mise à jour des connaissances de ceux déjà formés.
L'arrêté du 30 juin 2017, cosigné par les ministres de l'intérieur et de la santé, a institué une sensibilisation aux gestes qui sauvent. Le cadre réglementaire est renforcé, le nombre de personnes formées augmente ; il faut dynamiser les initiatives.
Le décret du 4 mai 2007 a déclaré toute personne apte à utiliser un défibrillateur automatisé externe (DAE). Il convient désormais d'en généraliser l'installation dans les établissements recevant du public (ERP) ; l'Académie de médecine en a souligné l'intérêt dans les lieux de passage tels que les gares et les centres commerciaux et les lieux à risque comme les équipements sportifs. L'utilisation du DAE au cours des premières minutes peut porter le taux de survie à 85 %. Il est de 3 à 5 % si rien n'est fait. À l'installation se joint logiquement une obligation de maintenance. Enfin, il convient de mettre en place une base de données permettant la géolocalisation de tous les DAE. Elle doit être accessible aux services de secours mais aussi aux opérateurs publics et privés.
Cette proposition de loi sauvera des centaines de vies. Grâce à elle, la France rattrapera enfin son retard. Je la soutiens pleinement, elle devrait logiquement fédérer tous les élus. (Applaudissements)
M. Daniel Chasseing, rapporteur de la commission des affaires sociales . - En France, le taux de survie après un arrêt cardiaque est de 8 %. Dans notre pays, la ministre l'a rappelé, 40 000 à 50 000 personnes meurent chaque année d'un arrêt cardiaque. Ces décès ne sont pas une fatalité : les travaux scientifiques concluent unanimement que les taux de survie peuvent atteindre 70 à 85 % dès lors qu'une défibrillation est pratiquée dans les deux premières minutes après l'arrêt cardiaque.
La prise en charge des victimes est une lutte contre le temps. Chaque minute perdue représente 10 % de chances de survie en moins, celles-ci devenant pratiquement nulles après dix minutes. La mobilisation des témoins d'une scène d'arrêt cardiaque, le recours au massage cardiaque ainsi que la présence de dispositifs publics de défibrillation constituent des enjeux cruciaux pour le bon fonctionnement de la chaîne de survie quand le SAMU intervient, en moyenne, en dix à quinze minutes. Une étude américaine réalisée dans les années 2000 dans les casinos de Las Vegas a démontré que l'accès à des défibrillateurs permet d'atteindre un taux de survie de 74 %.
Les pouvoirs publics français ne sont pas restés inactifs. Depuis un décret de 2007, l'utilisation des défibrillateurs automatisés externes est ouverte au grand public. Le caractère automatisé des DAE en fait des équipements facilement utilisables par le grand public.
Un arrêté de 2009 a prévu une initiation du grand public à l'utilisation des DAE. L'enjeu demeure cependant d'assurer le passage de ces évolutions dans les pratiques citoyennes. L'insuffisante sensibilisation du grand public aux gestes de premier secours est incontestable, seulement 20 % de la population française a suivi une formation aux gestes de premiers secours. L'implantation de DAE dans les établissements publics et privés repose sur le volontariat ; notre territoire compterait, selon les estimations, 160 000 à 180 000 défibrillateurs en accès public. Si l'obligation de maintenance est le principe, sa mise en oeuvre est rendue difficile par la complexité de leur chaîne de distribution et d'exploitation, sans parler des dégradations dont ils sont souvent la cible.
À l'absence d'obligation d'équipement s'ajoute une absence d'obligation de référencement des appareils implantés. Les témoins d'arrêt cardiaque doivent pouvoir localiser rapidement un défibrillateur fonctionnel. Cette situation est d'autant plus absurde que la plupart de nos concitoyens disposent de smartphones dont la fonction de géolocalisation pourrait sauver des vies. Face à la carence de l'action publique, l'Association pour le recensement et la localisation des défibrillateurs (Arlod), créée en 2008, a mis en place une base de données en ligne mais elle n'est pas exhaustive. Les représentants d'applications mobiles proposent, outre la localisation des défibrillateurs, la géolocalisation de « bons Samaritains » susceptibles de porter assistance à la victime. Leur intervention soulève des problèmes éthiques et juridiques, notamment en termes de responsabilité, qui nécessitent des évolutions réglementaires.
Cette proposition de loi, issue des travaux communs de l'Assemblée nationale et du Sénat, crée, en son article 3, une obligation d'équipement en DAE dans des ERP qui seront définis par décret en Conseil d'État. Quel sera le périmètre des ERP retenu dans le décret en Conseil d'État ? Si la ministre a donné des indications dans son discours, aucune orientation générale n'est donnée dans le texte. Certains lieux où le risque de survenue d'arrêts cardiaques est fort devront impérativement figurer dans la liste : piscines et enceintes sportives, notamment.
Le coût de mise en place est relativement limité au regard du gain potentiel en termes de vies sauvées : il faudrait compter 1 000 à 1 500 euros pour l'acquisition d'un défibrillateur neuf, et 120 euros par an pour en assurer la maintenance. Selon l'assemblée des départements de France et l'association des maires de France, les élus locaux s'inquiètent surtout du nombre d'équipements à installer et de leur lieu d'implantation. Le décret devra ménager des marges de souplesse afin qu'ils puissent appliquer l'obligation selon la configuration de leur territoire.
L'article 3 bis prévoit une base de données nationale ; elle devra, la ministre l'a signalé, être interconnectée avec les logiciels des SAMU et des SDIS.
Je tiens à saluer l'action et la détermination de nos collègues parlementaires du Nord, Jean-Pierre Decool - alors député - et Alex Türk, qui se sont engagés depuis plusieurs années pour faire aboutir ce texte. Ils ont consacré la majeure partie de leur réserve parlementaire à l'équipement en défibrillateurs cardiaques des établissements de leur département, qui en compte plus de 4 000. Je remercie aussi le président Milon de m'avoir confié ce rapport et souhaite que le Sénat adopte ce texte sans modification. Tout doit être fait pour encourager la citoyenneté et la solidarité dans des situations d'urgence. (Applaudissements)
M. Ronan Dantec . - En Loire-Atlantique, dans une petite commune, peu importe laquelle, un adolescent de 16 ans, qui se livrait à sa passion du football, a fait un malaise cardiaque sur un terrain. Il y avait un défibrillateur mais il n'a pas fonctionné et le jeune est mort. Rien ne dit que le DAE lui aurait sauvé la vie, bien sûr, mais cette circonstance a ajouté à la douleur de ses parents et à l'émotion du maire, dont le sérieux ne peut pas être mis en doute.
Cette proposition de loi répond à une attente. L'intérêt du DAE dans les ERP et les enceintes sportives n'est plus à démontrer. Plus l'intervention est rapide, plus le risque de séquelles est faible.
Mme Sylvie Goy-Chavent. - Bien sûr !
M. Ronan Dantec. - En Loire-Atlantique, 740 DAE sont recensés, pour 22 230 ERP ; l'effort à consentir est considérable. L'article 40 nous empêche de prévoir son financement par l'Etat mais ce sujet ne peut pas être passé sous silence.
L'enjeu de la formation aux gestes de premiers secours, Madame la Ministre, est crucial. Si le décès subit d'un sportif de haut niveau fait la une des journaux, le risque d'un arrêt cardiaque est plus élevé chez les pratiquants d'un sport de loisir, ces sportifs du dimanche et tous ces enfants souvent encadrés par des parents bénévoles. Combien parmi ces accompagnants savent utiliser un DAE ? Combien connaissent seulement le protocole à suivre en cas d'accident ? Notre pays accuse un retard considérable dans la formation aux premiers secours. Et, je veux y insister, pouvoir sauver des vies renforcera le sentiment de citoyenneté, chacun se sentant plus responsable de l'autre. Dans le rapport de la mission de préfiguration, Patrick Pelloux et Éric Faure soulignent que moins de 27 % des Français sont formés. Le Gouvernement prévoit de former 80 % de la population à l'aide et aux premiers secours mais il reste des interrogations. Comment se déroulera la formation dans les écoles ? Comment seront formés les bénévoles ?
Le groupe RDSE votera ce texte qui aurait pu être enrichi mais qu'il convient d'adopter conforme pour une entrée en vigueur la plus rapide possible. (Applaudissements)
Mme Brigitte Micouleau . - Chaque année, l'équivalent de la population d'Albi ou de Charleville-Mézières meurt d'un infarctus ; c'est douze fois plus de morts que sur les routes en 2017. Pour une large part, ces décès sont évitables grâce à l'utilisation d'un défibrillateur dans les premières minutes suivant l'arrêt. Certes, chacun est apte à utiliser un DAE depuis 2007 mais notre territoire est insuffisamment équipé en dépit des initiatives publiques et privées. À noter : les TGV Lyria sont systématiquement équipés d'un défibrillateur dans la voiture-bar, signalé dans chacune des voitures.
Obligation d'équipement dans les ERP, création d'une base de données nationale, tout cela va dans le bon sens. Cela étant, chacun connaît cette phrase de Confucius : « quand un homme a faim, mieux vaut lui apprendre à pêcher que de lui donner un poisson ».
M. Charles Revet. - Tout à fait !
Mme Brigitte Micouleau. - Il en est ainsi du DAE : il faut diffuser les techniques d'utilisation des DAE, comme on l'a fait pour les extincteurs, si l'on veut que leur usage passe dans la pratique. La formation devrait être obligatoire, dans le monde scolaire comme professionnel. (Applaudissements)
Mme Patricia Schillinger . - Notre débat porte sur une question de minutes, des minutes qui permettent de sauver des vies menacées par un arrêt cardiaque. À ce jour, la France compte environ 150 000 DAE, dont le déploiement ne repose que sur la bonne volonté des exploitants et dont la localisation est aléatoire malgré l'action remarquable d'associations telles qu'Ajila et son application gratuite « Staying alive ».
Ce texte doit beaucoup à Jean-Pierre Decool. Grâce à lui, les ERP, dont la liste sera précisée par décret, seront obligés de se munir et d'entretenir des DAE. L'un des seuls avantages que je vois dans le retard que la France accuse est que nous pourrons d'emblée passer aux DEA connectés. Grâce à cette technologie, l'on peut surveiller à distance et à tout moment l'état de fonctionnement du défibrillateur. Plusieurs options de connexions existent, dont des modules autonomes de surveillance placés sur le support ou dans la sacoche de l'appareil. Les défibrillateurs non connectés pourront ainsi l'être. De grâce, légiférons pour le XXIe siècle tout en prenant garde aux démarcheurs peu scrupuleux qui cherchent à tirer profit d'une obligation nouvelle.
La base de données sera ouverte : il faut s'en féliciter, les associations pionnières qui ont développé des applications de géolocalisation pourront réactualiser leurs données.
Je veux enfin insister sur un point absent de ce texte : la nécessité de la formation aux gestes qui sauvent. C'est l'objet de l'arrêté du 30 juin 2017 et de l'objectif de 80 % de Français formés fixé par le président de la République. De l'avis de tous les spécialistes, l'école doit être le premier lieu de cette sensibilisation - ce sera l'objet d'un amendement d'appel de ma part.
Le groupe LaREM soutient ce texte utile. (Applaudissements)
Mme Laurence Cohen . - Rares sont les propositions de loi qui font consensus à l'Assemblée nationale et au Sénat, comme sur tous les bancs de chaque hémicycle. Que Jean-Pierre Decool en soit remercié.
Ce texte part d'un constat à la fois simple et effrayant : une grande part des 40 à 50 000 décès annuels par arrêt cardiaque pourrait être évitée au moyen d'un DAE, qui fait passer le taux de survie de 8 à 75 %. Plusieurs raisons expliquent leur sous-utilisation en France : défaut d'équipement, de maintenance et de localisation... Ce texte y remédie ; nous serons attentifs à ce que le décret en Conseil d'État garantisse l'équilibre de la répartition des défibrillateurs sur le territoire et leur maintenance.
Alors que les collectivités territoriales sont au bord de l'asphyxie budgétaire, le Gouvernement nous rassurerait en annonçant qu'il finance le déploiement des DAE.
Mme Sylvie Goy-Chavent. - En effet !
M. Philippe Dallier. - On peut toujours espérer...
Mme Laurence Cohen. - Si l'utilisation de ces appareils est assez simple, qui peut se dire confiant à l'idée de s'en servir pour la première fois ? Le palais du Luxembourg en est équipé... Comment le Gouvernement entend-il concrètement renforcer la formation ? Seuls 50 % des élèves de troisième sont formés et seulement 20 % de la population.
Il faut laisser à chacun le temps de se conformer à cette nouvelle obligation sans la renvoyer aux calendes grecques, certes. La date limite d'installation du 1er janvier 2020 est-elle réaliste ?
Enfin, le groupe CRCE est satisfait de la suppression de l'article premier : inutile d'aggraver les sanctions en cas de dégradation ou de vol d'un défibrillateur. Ces incivilités reculeront lorsque chacun aura pris conscience, par la formation, de l'utilité de ces appareils.
Nous voterons ce texte en demeurant attentifs au contenu du décret et au calendrier d'application. (Applaudissements)
Mme Dominique Vérien . - Huit minutes pour vous exposer l'avis du groupe UC sur ce texte, c'est la durée moyenne d'intervention des services d'urgence hospitaliers.
L'excellent rapport de Daniel Chasseing ne laisse aucun doute sur le bien-fondé de cette proposition de loi. Les chiffres ont été rappelés : les décès évitables, et l'on ne dira jamais assez combien cette expression est incongrue, sont trop nombreux dans notre pays. Près de 70 à 80 % des arrêts cardiaques inopinés découlent d'une fibrillation ventriculaire, réversible au moyen d'un DAE. La personne dotée d'un tel appareil n'a qu'à se laisser guider par ses instructions, ce qui donne aux secours le temps d'arriver.
Si 160 000 à 180 000 DAE sont déjà déployés, le grand public n'est pas suffisamment sensibilisé. Un travail considérable de formation est à accomplir, entre autres dans nos écoles, quand près de 70 % des arrêts surviennent devant témoin et que moins de 20 % des témoins seulement entreprennent une réanimation.
Je remercie les auteurs de cette proposition de loi pour avoir déposé et soutenu ce texte. Symboliquement, je m'utiliserai que cinq minutes de mon temps de parole, délai qui peut, au moyen d'un DAE, sauver une vie. (Applaudissements)
Mme Victoire Jasmin . - Merci d'abord à Jean-Pierre Decool et Daniel Chasseing pour leur travail majeur sur ce sujet consensuel. Il fait suite aux efforts d'Alex Türk et Sylvie Desmarescaux, tous deux sénateurs du Nord, qui avaient consacré leur réserve parlementaire...
M. Charles Revet. - Il n'y en a plus !
Mme Victoire Jasmin. - ... à l'équipement de leur territoire en DAE.
Il faut en moyenne entre dix et quinze minutes pour voir arriver les services d'urgence. La proximité d'un DAE est donc essentielle pour faire passer le taux de survie des personnes victimes d'arrêt cardiaque de 8 % actuellement à plus de 85 %, comme les études l'estiment possible.
La meilleure prévention réside dans la formation. Hélas, 20 % de la population et seuls 50 % des élèves de troisième ont suivi une formation adéquate. Les nouvelles technologies peuvent pourtant aider à former nos jeunes à faible coût ainsi que des référents sécurité dans nos collectivités territoriales. Les DAE sont faciles à manier : un décret du 4 mai 2007 considère que toute personne est apte à les manier, même sans aucune formation. Un arrêté de 2009 prévoyait déjà une initiation du grand public à leur maniement en une heure : pourquoi s'en prive-t-on ?
Ce texte oblige les établissements recevant du public à se doter de DAE et à en assurer la maintenance. Il faudra veiller à leur bon déploiement là où c'est utile : aéroport, lieux de culte, salles de spectacle, discothèques, enceintes sportives... Je rassure mes collègues : au Sénat, ils sont un peu partout !
Notre territoire compterait déjà entre 150 et 160 000 DAE en accès public ; reste à s'assurer de leur entretien et de leur caractère fonctionnel. Leur géolocalisation est une piste à exploiter comme l'action de certaines associations l'a montrée.
L'éligibilité des petites collectivités territoriales à la DETR pour se doter de ces appareils pourrait être utilement envisagée.
Cette proposition de loi, votée à l'unanimité à l'Assemblée nationale, est une avancée pour le plus grand nombre qui nécessite que nous la votions conforme. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)
M. Jean-Pierre Decool . - Je dois avouer être saisi d'une certaine émotion en évoquant la genèse de ce texte. Issu d'une coproduction avec Alex Türk, il avait été déposé initialement à l'Assemblée nationale.
L'homme n'a jamais accepté la fatalité de la mort. Eau glacée, flagellation des pieds, fer rouge appliqué sur le thorax... En 1788, Charles Kite a été le premier à faire le pari de l'électricité pour « ressusciter les morts » selon ses propres mots. Deux siècles plus tard, le premier défibrillateur automatique a fait son apparition, en 1994 ; la date restera dans l'Histoire.
En dépit de cela, le taux de survie reste faible en France : 8 % contre 74 % ailleurs. Le geste est pourtant simple. Vous ne savez pas ? Peu importe, vous agissez ; vous suivez les instructions, vous avez quatre à cinq minutes pour sauver une vie. Dès 2006, nous avons aidé à équiper de nombreuses communes du Nord en DAE : 4 000 appareils qui ont sauvé de nombreuses vies, dont quelques élus locaux. L'expérience, concluante, s'est propagée mais ces appareils restent trop peu nombreux. D'où ce texte que j'avais déposé lorsque j'étais encore député, voté le 13 octobre 2016 à l'Assemblée nationale.
Je remercie le rapporteur Chasseing et la commission présidée par Alain Milon pour encourager à le voter conforme. Obligation d'équipement, d'entretien, la tâche n'est cependant pas achevée. Restera à créer une base de données et à systématiser la formation à l'utilisation de ces appareils. Qu'attendons-nous ? Enfin, nous avons des DAE installés au Sénat ; mais savez-vous où ils se trouvent ? Avons-nous des agents formés à leur utilisation ? Ce texte permettra de sauver des vies ; c'est une urgence absolue ! (Applaudissements)
Mme Patricia Morhet-Richaud . - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Sans prise en charge immédiate, plus de 80 % des arrêts cardiaques sont fatals. Résultat : 40 000 à 50 000 morts par an en France. Le déploiement du DAE, prévu par cette proposition de loi, est une solution. Chez nous, le taux de survie est de 5 %, alors qu'il est quatre fois plus élevé dans des pays mieux équipés. Depuis mai 2007, date à laquelle toute personne peut utiliser un DAE, le déploiement de ces appareils a fait l'objet de nombreuses initiatives.
Dans les Hautes-Alpes, avec le soutien du département, beaucoup de communes se sont équipées au titre de leur mission de sécurité publique. Certaines entreprises, aussi, équipent les lieux de travail et forment leurs salariés même si rien ne les y oblige.
Pour faire baisser le nombre de décès quotidiens, il faut respecter la chaîne de survie - appeler les secours, masser la victime, utiliser le défibrillateur - et sensibiliser dès le plus jeune âge. La formation est cruciale, aussi. Nous devons nous montrer plus volontaristes en la matière. Outre le milieu scolaire, des remises à niveau seraient nécessaires tout au long de notre parcours de citoyen et ces formations doivent être facilement accessibles voire gratuites.
La commission des affaires sociales est revenue sur l'aspect réglementaire de l'article 3 et a insisté sur la responsabilité des ERP. La maintenance a un coût. Quel sera le périmètre des ERP retenu par le décret en Conseil d'État ?
La création d'une base nationale de données va dans le bon sens, mais la cartographie doit être pertinente à l'échelle d'un bassin de vie.
Ce texte pose les bonnes questions, mais n'apporte pas forcément les meilleures réponses, alors qu'il s'agit de sauver des vies. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC et sur quelques bancs des groupes Les Indépendants, RDSE et SOCR)
M. Daniel Gremillet . - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Une forte demande émane des territoires. En 2007, c'est M. Bas qui avait autorisé le déploiement des DAE. Pourtant le taux de survie à un infarctus dans notre pays est plus faible que celui de nos voisins. Pourquoi le taux de survie est-il meilleur chez eux ? Nous devons recenser et géolocaliser les DAE déjà installés ; d'abord par les SAMU, qui est le premier interlocuteur en cas d'urgence. Cela ne coûtera presque rien. Puis, l'aspect psychologique doit être pris en compte. Face à un arrêt cardiaque, et il m'est arrivé d'y être confronté, l'on perd aisément ses moyens et ce qui paraît habituellement simple ne l'est plus forcément. D'où l'importance de la formation.
Merci au rapporteur pour son travail. Cette proposition de loi répond au besoin d'installation massive de DAE sur notre territoire et de développement de la formation. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe Les Républicains ; M. Guillaume Arnell, Mme Victoire Jasmin, MM. Bernard Jomier et Daniel Chasseing applaudissent également.)
La discussion générale est close.
Discussion des articles
L'article premier demeure supprimé, de même que l'article 2.
ARTICLE 3
Mme Joëlle Garriaud-Maylam . - Je suis très favorable, comme vous tous, à cette proposition de loi. Mais elle ne va pas assez loin. « Solidarité », « grande ambition » pour la santé des Français : oui, bien sûr, je partage ces objectifs, mais qu'en est-il au juste, Madame la Ministre, des 2,5 millions de Français expatriés ?
En 2009, j'avais posé au Gouvernement une question écrite sur l'installation de DAE dans certains consulats ou centres médico-sociaux à l'étranger. On m'a répondu que l'on n'en avait pas les moyens. C'est de la discrimination !
C'est pour y mettre fin que j'ai déposé un amendement, car il s'agit d'un enjeu humanitaire, de santé publique ; il en va aussi de l'image de la France. Après tout, les conditions de vie sont plus précaires en Afrique que chez nous !
L'article 3 est adopté.
ARTICLE ADDITIONNEL
M. Bernard Jomier. - La base nationale de données fait l'unanimité. L'obligation d'équipement est toutefois renvoyée à un décret en Conseil d'État. Il nous paraît difficile que ce décret puisse prévoir toutes les situations possibles, car elles diffèrent considérablement entre l'urbain dense et le rural.
Mieux vaut renvoyer le plan d'équipement aux schémas régionaux de santé. De plus, l'obligation de maintenance ne résout pas la question du financement de celle-ci. Si l'État est prêt à payer, qu'il le dise !
M. Daniel Chasseing, rapporteur. - Cet amendement soulève la question de l'implantation des DAE. Rien n'empêche les ARS, en collaboration avec les collectivités territoriales, d'élaborer un schéma directeur.
Pour le financement, la réserve parlementaire, reversée dans la DETR, pourrait y concourir.
M. Charles Revet. - C'est à l'État de verser les sommes !
M. Daniel Chasseing, rapporteur. - Avis défavorable.
Mme Sophie Cluzel, secrétaire d'État. - Oui, les ARS sont là pour veiller au maillage du territoire. Et le décret prévoira le cas de chaque ERP, dont la moitié sont privés, telles les piscines, les entreprises, etc. et à même de financer cet équipement.
Quant à la formation, elle sera renforcée : c'est déjà prévu.
Mme Victoire Jasmin. - Merci pour ces réponses. Si les pharmacies sont retenues, imposer aux pharmaciens des villages de financer le DAE serait extravagant. Pour un grand stade de football, c'est une autre affaire... Le texte est encore trop flou sur cette question. Pour faciliter son adoption conforme, je retire néanmoins cet amendement. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes Les Indépendants, RDSE et Les Républicains)
L'amendement n°6 est retiré.
ARTICLE 3 BIS
M. le président. - Amendement n°3 rectifié, présenté par Mme Garriaud-Maylam, MM. Bansard et Frassa et Mme Renaud-Garabedian.
Alinéa 4, première phrase
Après les mots :
sur l'ensemble du territoire
insérer les mots :
et dans les structures françaises à l'étranger
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. - Je comprends qu'il faut aller vite. Mais les DAE existent depuis trente ans ! Et aucune entreprise française n'en fabrique... Dommage ! Pour autant, les Français de l'étranger ne doivent pas en être privés. L'effort de solidarité nationale dont a parlé Mme la ministre les concerne aussi. Ils sont 2,5 millions ! Et il en va de l'image de la France et de son expertise médicale. (M. Jean-Noël Guérini approuve.)
Je remercie ceux de mes collègues qui me soutiennent dans ce combat. (MM. Jean-Noël Guérini et Jean-François Husson applaudissent.)
M. Daniel Chasseing, rapporteur. - Vous défendez toujours avec fougue et talent les Français de l'étranger.
Mais, pour aller vite, nous devons adopter ce texte conforme. Cela dit, vous n'avez pas tort. Je pense que Mme la ministre vous aura entendue... Retrait ou avis défavorable.
Mme Sophie Cluzel, secrétaire d'État. - Je vous rassure : les lycées français font partie des ERP et seront dans la liste. (MM. Claude Kern, Jean-François Husson et Mme Sylvie Goy-Chavent approuvent.)
Nous veillerons aussi à la formation des lycéens de ces établissements. Avis défavorable, donc.
M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. - Nos deux collègues Decool et Türk avaient alors utilisé la réserve parlementaire pour installer des DAE dans leurs communes. Certains sénateurs des Français de l'étranger auraient pu faire de même...
Une loi s'impose à tout le territoire national : la métropole, l'outre-mer et tous les ERP français à l'étranger ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains ; Mme Victoire Jasmin applaudit également.)
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. - Non, les lycées ne sont pas couverts, s'ils dépendent du droit local. Sans parler des centres médico-sociaux dépendant de nos consulats.
Quant à la réserve parlementaire, nos circonscriptions sont immenses, à l'échelle du monde, et les demandes sont énormes. Souvent, nous aidons de petites écoles qui n'auraient pas subsisté sinon. Si Mme la ministre me promet qu'un effort sera fait pour recenser les établissements concernés, je retirerai mon amendement.
Sinon, je le maintiendrai. On supprime tout pour les Français de l'étranger ! (Protestations sur de nombreux bancs) Certains souhaiteraient peut-être qu'on supprime aussi leurs représentants ! (Sourires et dénégations sur plusieurs bancs des groupes RDSE, Les Indépendants et Les Républicains)
Mme Sophie Cluzel, secrétaire d'État. - Je vous le répète : tous les établissements concernés seront recensés.
Mme Patricia Schillinger. - Très bien !
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. - Je le retire, alors. (Applaudissements et marques de satisfaction sur divers bancs, dont ceux du groupe Les Indépendants)
L'amendement n°3 rectifié est retiré.
L'article 3 bis est adopté.
ARTICLES ADDITIONNELS
M. le président. - Amendement n°2 rectifié bis, présenté par Mme Schillinger et les membres du groupe La République En Marche.
Après l'article 3 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, au plus tard un an après la publication de la présente loi, un rapport relatif à l'évaluation des dispositifs déployés, dans le cadre de la scolarité obligatoire, pour la sensibilisation des élèves à la prévention des risques et aux missions des services de secours ainsi que de l'apprentissage des gestes élémentaires de premier secours.
Mme Patricia Schillinger. - C'est un amendement d'appel.
Les articles D. 312-40 à D. 312-42 du code de l'éducation prévoient, dans les établissements scolaires publics et privés sous contrat, une sensibilisation à la prévention des risques et aux missions des services de secours, une formation aux premiers secours ainsi qu'un enseignement des règles générales de sécurité. Si de nombreux efforts sont faits tant dans le premier que le second degré pour déployer l'enseignement « Apprendre à porter secours » (APS), la formation à la prévention et secours civiques de niveau 1 (PSC 1) et la sensibilisation aux gestes qui sauvent, il demeure nécessaire de disposer d'une évaluation quantitative et qualitative par académie de ces dispositifs, ainsi que des moyens alloués.
Vous êtes sensible au handicap, Madame la Ministre. J'espère qu'il sera pris en compte dans le décret. Et nous pourrons nous appuyer sur les professeurs d'EPS pour renforcer cette persuasion.
M. Daniel Chasseing, rapporteur. - Pour former 80 % de la population, il faut en effet commencer par le milieu scolaire. L'arrêté du 30 juin 2017 prévoit une formation en sixième. Mettons-le en oeuvre.
En attendant, avis défavorable, suivant la position de la commission vis-à-vis des demandes de rapport.
Mme Sophie Cluzel, secrétaire d'État. - Le plan Priorité prévention annoncé en mars reprend l'objectif des 80 %. Sa mise en oeuvre fera l'objet d'un rapport annuel, public et transmis au Parlement. Retrait ?
Mme Patricia Schillinger. - Oui. C'était un amendement d'appel.
L'amendement n°2 rectifié bis est retiré.
M. le président. - Amendement n°5, présenté par M. Cabanel.
Après l'article 3 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, au plus tard un an après la publication de la présente loi un rapport relatif à la faisabilité de la mise en oeuvre de drones défibrillateurs.
M. Henri Cabanel. - Je salue le travail et la persévérance de M. Decool. La volonté d'adopter conforme le texte ne doit pas empêcher le débat.
On a attiré mon attention sur les initiatives aux gestes qui sauvent au collège du Salagou, à Clermont-L'Hérault, ainsi que sur l'utilisation de drones défibrillateurs, solution séduisante en milieu rural ou isolé. Il conviendrait de s'interroger sur les modalités d'une éventuelle mise en oeuvre de ces appareils. Faudrait-il alors envisager un maillage géométrique du territoire ? Qui serait responsable de l'utilisation et de l'entretien ?
M. Daniel Chasseing, rapporteur. - J'ignorais l'existence de ces drones, qui pourraient en effet être utiles. Il était important de les mentionner, même si je demande le retrait, à ce stade, afin de faciliter l'adoption rapide de cette proposition de loi.
Mme Sophie Cluzel, secrétaire d'État. - Le Gouvernement s'intéresse à toutes les solutions innovantes ; elles feront l'objet d'un état des lieux dans le plan Priorité prévention. Nous en reparlerons. Je salue moi aussi l'action de l'enseignant que vous avez évoqué. En attendant, retrait pour une adoption rapide.
M. Henri Cabanel. - Ces drones sont mis en oeuvre en Suède.
L'amendement n°5 est retiré.
L'article 4 demeure supprimé.
Explications de vote
M. Philippe Dallier . - Je voterai évidemment cette proposition de loi. Alex Türk m'avait sensibilisé à la question voici dix ans. J'ai très tôt équipé ma commune, de cinq ou six défibrillateurs.
Cependant, cette proposition de loi en changeant d'échelle puisqu'elle concerne tous les ERP, ce qui impliquera une multiplication de ce nombre par cinq environ dans une commune comme la mienne, imposera sans doute une charge supplémentaire à nos communes : elles l'assumeront, par esprit de responsabilité. Mais je rappelle que la croissance de leurs dépenses de fonctionnement est désormais limitée à 1,2 % par an. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) À cela s'ajoute les 50 % de bio dans les cantines...
Je ne sais pas comment feront les communes. Cela posé, dans cette assemblée qui représente les collectivités, je voterai néanmoins ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)
Mme Sylvie Goy-Chavent . - J'ai une fibre particulière pour ce sujet, ayant moi-même fait installer de nombreux défibrillateurs dans l'Ain. Le coût d'installation d'un DAE en extérieur est de 2 500 à 3 000 euros ; c'est beaucoup pour une petite commune rurale. Madame la Ministre, vous avez sans doute quelques noisettes cachées dans les tiroirs pour financer cela... (Sourires)
Bien sûr, nous allons tous voter ce texte dont la première lecture a eu lieu il y a deux ans. Il y a urgence.
M. Bernard Jomier . - La ministre s'est engagée à aller vite sur la question. Mais nous ne pouvons voter une loi où l'État fait la musique et les collectivités territoriales paient. Retrouvons-nous dès cet automne, au moment de l'examen de la mission Santé du projet de loi de finances, pour voter un amendement finançant l'installation des DAE ! (Applaudissements sur divers bancs)
Mme Sylvie Goy-Chavent. - Très bonne idée !
M. Arnaud de Belenet . - Pourquoi attendre l'automne et l'examen du prochain budget ? (Marques de surprise à droite) La loi de finances 2018 a renforcé les crédits DETR, qui peuvent être utilisés pour financer le déploiement. Les préfets, on le sait, sont très sensibles aux enjeux de santé publique. (Exclamations sur les mêmes bancs)
M. Michel Savin . - Le Gouvernement n'a apporté aucune garantie de financement, alors que les contraintes financières s'accumulent pour les collectivités territoriales.
Mme Patricia Schillinger. - Arrêtons ! Les collectivités territoriales financent des clubs de foot qui ne rapportent rien !
M. Michel Savin. - Il faut envoyer un signal au Gouvernement ; à titre personnel, je ne voterai pas ce texte.
La proposition de loi est définitivement adoptée.
(Applaudissements sur de nombreux bancs)
Utilisation des caméras mobiles
M. le président. - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi relative à l'harmonisation de l'utilisation des caméras mobiles par les autorités de sécurité publique.
Discussion générale
M. Jean-Pierre Decool, auteur de la proposition de loi . - J'ai quelques années de vie publique derrière moi et, tout comme vous, j'observe à quel point les mentalités et l'état d'esprit ont évolué.
Dans les années quatre-vingts, je me souviens que lorsque nous évoquions les problèmes des quartiers difficiles, de l'économie souterraine, des zones de non-droit, nous étions traités de « sécuritaires » !
Pourtant, la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, en son article 2, reconnaît le droit à la sûreté. L'article 12 de cette même Déclaration proclame même que « la garantie des droits de l'homme et du citoyen nécessite une force publique ». La sécurité n'est donc pas une nouveauté du XXIe siècle !
À cet effet, des dispositifs de « vidéosurveillance » - on parle de vidéoprotection aujourd'hui - ont été installés dans de nombreuses villes, avec les résultats que l'on connaît, au service des enquêtes. Des caméras mobiles équipent les uniformes des autorités de sécurité, afin de témoigner des conditions d'une interpellation, d'une arrestation au cours d'un contrôle opéré par les forces de l'ordre.
La nature de l'insécurité change. Ce ne sont plus simplement les citoyens qui sont victimes, mais les forces de sécurité, cette force publique qui peut être non seulement agressée physiquement, mais également accusée sur le plan juridique d'insulter, de porter des coups, voire de commettre des viols lors de contrôles de police ordinaires. Les plaintes contre les autorités se multiplient aujourd'hui. La police, protectrice, doit se protéger.
Mais les sapeurs-pompiers, les agents de la pénitentiaire en ont aussi besoin. En décembre 2017, à Wattrelos, une agression d'une violence inouïe, à coups de marteau, d'une quinzaine d'individus contre des sapeurs-pompiers venus secourir des proches de leurs agresseurs, reste dans les mémoires.
Sans disserter ici sur les causes, reconnaissons que la société a changé et adaptons-nous, soyons pragmatiques !
La loi du 22 mars 2016 relative à la prévention et à la lutte contre les incivilités, contre les atteintes à la sécurité publique et contre les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageurs, modifiée par la loi du 30 octobre 2017 renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme, a créé un régime spécifique pour l'enregistrement audiovisuel des interventions des services internes de sécurité de la SNCF et de la RATP.
Enfin, la loi du 3 juin 2016, complétée par un décret d'application du 23 décembre 2016, a prévu un dispositif d'expérimentation pour les agents de police municipale dans le cadre de leurs interventions. L'expérimentation, d'une durée de deux ans, s'est déroulée du 3 juin 2016 au 3 juin 2018 - il y a dix jours. Ainsi, 391 communes ont participé à l'expérience et 2 325 caméras ont été installées.
À Quiévrechain, dans le Nord, les retours sont extrêmement positifs. L'assermentation, aujourd'hui, ne signifie plus grand-chose. Les assermentés doivent toujours se justifier. C'est triste. Grâce aux caméras, tout geste d'hostilité, toute parole seront filmés et authentifiés. L'image a une force que n'a pas la phrase, un vrai effet dissuasif : l'auteur de tels gestes évitera, à l'avenir, les provocations. Enfin, l'agent pourra déclencher la caméra en fonction de son appréciation de la situation.
Pour une fois que quelque chose fonctionne, autant l'utiliser et l'étendre, y compris aux services publics et aux agents de la pénitentiaire.
Certes, c'est un texte de plus. Mais il convenait de dissiper le flou juridique auquel se heurtent les maires pour faciliter les expérimentations. Le texte lève un doute, clarifie une zone d'ombre. Un amendement bienvenu de la commission a précisé les modalités d'intervention donnant lieu à l'utilisation de ces caméras par les pompiers, en excluant les interventions médicales.
Certains élus voudraient prolonger l'expérimentation qui devait prendre fin le 3 juin, sans attendre notre vote. Madame la Ministre, y seront-ils autorisés ? Ce dispositif n'est pas une solution miracle ; mais il protège à la fois le représentant de l'ordre et le citoyen.
Je remercie le rapporteur Wattebled et le président Bas pour leur écoute attentive. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Indépendants et sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains)
M. Dany Wattebled, rapporteur de la commission des lois . - Les agents publics sont de plus en plus victimes d'insultes, d'outrages, voire d'agressions. En 2016, 687 policiers ont été blessés. Tout le monde se souvient du déchainement de violence effroyable de Viry-Châtillon, en octobre 2016. Les agressions, physiques et verbales de sapeurs-pompiers, ainsi que sur le personnel pénitentiaire sont également en hausse.
L'arsenal juridique a été renforcé et la répression des outrages à personne détentrice de l'autorité publique, sur le modèle de celle des outrages à magistrat, a été accrue.
Des initiatives ont été prises en matière de prévention, à l'instar de la mise en place des caméras mobiles pour la police et la gendarmerie nationales, expérimentation étendue à la police municipale et aux services de sécurité de la SNCF et de la RATP.
Les caméras-piétons devaient mieux protéger les agents contre les accusations parfois excessives dont ils font l'objet, et apaiser les tensions, incitant les agents et les citoyens à la modération. Dans les faits, le recours à ces caméras a démontré son efficacité, en apaisant les situations tendues. Cette proposition de loi en étend l'usage à d'autres catégories d'agents, dont les conditions d'intervention se dégradent. Les violences à leur égard sont autant d'atteintes intolérables à la République elle-même.
La commission des lois a tenu à garantir l'équilibre entre la protection des droits, notamment le respect de la vie privée, et les nécessités de l'ordre public, et à assurer l'adéquation du dispositif aux besoins du terrain. Elle a donc récrit l'article premier pour définir un cadre plus protecteur : l'usage des caméras mobiles est autorisé dans le seul cas où un incident se produit ou est susceptible de se produire, qui mette en péril l'intégrité physique des agents ; il est exclu lors des interventions à caractère médical, en raison du secret médical. Vu la nécessité de passer des marchés publics, le délai de l'expérimentation est allongé d'un an. La CNIL donnera un avis motivé et public sur le décret en Conseil d'État et le Gouvernement communiquera au Parlement une évaluation de l'expérimentation au moins six mois avant la fin des trois années.
Le cadre d'utilisation des caméras mobiles par l'administration pénitentiaire est également précisé. L'usage des caméras mobiles pourrait se révéler utile dans le cadre des missions qui présentent un risque particulier d'incident ou d'évasion, soit en raison de leur nature - je pense aux missions des équipes régionales d'intervention et de sécurité qui interviennent en cas de crise - soit en raison du niveau de dangerosité des détenus concernés, les détenus violents ou radicalisés notamment.
Le rapport relatif à l'extension de l'usage des caméras mobiles aux polices municipales étant positif, la commission des lois a complété la proposition de loi pour le pérenniser. Nous espérons, Madame la Ministre, que cette proposition de loi pourra être rapidement débattue à l'Assemblée nationale. (Applaudissements sur quelques bancs)
Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur . - Le Gouvernement se félicite que votre Haute Assemblée ait inscrit ce débat à l'ordre du jour et juge cette proposition de loi bienvenue. Je ne reviendrai pas sur l'extension progressive du périmètre des agents autorisés à recourir aux caméras mobiles - agents de la SNCF et de la RATP, forces de sécurité intérieure, et enfin police municipale. Le Gouvernement est attaché à leur usage par les forces de sécurité intérieure, car les caméras participent à l'apaisement des tensions. Aussi, avons-nous décidé de multiplier par quatre le nombre de ces équipements dans le plan de sécurité du quotidien, pour atteindre 10 000 caméras en 2019. À terme, activer sa caméra quand la situation s'envenime deviendra un réflexe pour tout agent.
Ce dispositif me paraît plus efficace pour apaiser les tensions que celui du récépissé de contrôle d'identité. Le bilan de l'expérimentation prévue par la loi est en train d'être tiré.
Le but de cette proposition de loi était à l'origine d'étendre l'expérimentation aux sapeurs-pompiers. L'idée est bonne - et le Gouvernement condamne fermement les agressions de pompiers survenues récemment. Leur accompagnement par les forces de l'ordre n'est pas exclu. Fallait-il les doter de caméras ? Le Gouvernement n'en n'était pas persuadé, soucieux qu'il était du respect de la vie privée et du secret médical des personnes chez lesquelles les pompiers sont amenés à intervenir - rappelons qu'ils doivent parfois pénétrer dans un domicile sans mandat judiciaire.
La commission a borné utilement le dispositif. Le Gouvernement s'en remettra donc à la sagesse de votre assemblée.
S'agissant du volet du texte relatif à l'administration pénitentiaire, le Gouvernement est favorable à doter les agents de caméras mobiles pour les extractions judiciaires, les transfèrements administratifs, d'autant que la commission a utilement élargi le dispositif au personnel de surveillance, quand il est chargé de missions particulièrement risquées.
Un article additionnel pérennise l'expérimentation dans la police municipale, à son terme le 3 juin dernier. Le Gouvernement n'aurait pas fait preuve de beaucoup de sérieux dans ce dossier, ai-je entendu. C'est oublier que la loi du 3 juillet 2016 faisait courir le délai de deux ans à compter de la prise d'un décret nécessitant l'avis de la CNIL, qui n'a été publié qu'en décembre 2016... Polémique mise à part, le ministre de l'intérieur vous a adressé récemment...
Mme Éliane Assassi. - Hier soir !
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - ... le bilan de l'expérimentation : 2 325 caméras ont été implantées dans 391 communes - six par commune en moyenne. Ceci avec le soutien du fonds interministériel de prévention de la délinquance, pour 171 000 euros en 2017 - 116 communes en ont bénéficié, pour l'achat de 893 caméras.
Le constat du plus grand respect des agents de la police municipale est unanimement partagé. Les caméras mobiles dissuadent des comportements agressifs et apaisent des situations qui auraient pu dégénérer. Elles contribuent parfois à recueillir des éléments de preuve et des extractions ont permis aux unités de police judiciaire d'appréhender des contrevenants. Enfin, le visionnage des bandes améliore la formation des agents.
On l'aura compris : les demandes de pérennisation de ces caméras sont nombreuses. Aussi, le Gouvernement soutiendra-t-il ce texte et fera-t-il son possible pour un examen rapide à l'Assemblée nationale, malgré un calendrier parlementaire chargé.
Les agents ne seront plus autorisés à enregistrer leurs interventions tant que la loi n'aura pas été modifiée. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, UC et SOCR)
M. Stéphane Artano . - En octobre 2015, le Comité interministériel à l'égalité et à la citoyenneté avait reconnu le succès du recours aux caméras mobiles, dissuasives et préventives des actes violents. M. Cazeneuve y voyait un outil déontologique, le son et l'image montrant le comportement des uns et des autres. Nos concitoyens perçoivent généralement ces caméras mobiles comme un moyen d'éviter les contrôles au faciès et les bavures, à condition qu'elles filment en continu, ce qui n'est pas l'objet de ce texte. Les syndicats policiers, eux, se félicitent que la vidéo ne soit déclenchée qu'à l'initiative des policiers, au nom de l'autonomie sur le terrain des forces de l'ordre.
Plusieurs décrets de fin 2016 ont étendu l'expérimentation aux policiers municipaux, ainsi qu'aux agents de sûreté de la SNCF et de la RATP. Le caractère modérateur des caméras a été reconnu par la Direction générale de la police nationale, les agents choisissant de déclencher, ou non, leur caméra.
L'article L 241-1 du code de la sécurité intérieure fixe les conditions d'utilisation des caméras mobiles par les agents de sécurité : les gendarmes et les policiers nationaux peuvent déclencher l'équipement en tous lieux, lorsque se produit ou est susceptible de se produire un incident, après avoir prévenu les personnes filmées ; les images ne peuvent être consultées qu'à l'issue de l'intervention et après leur transfert sur un support informatique sécurisé ; sauf utilité pour une procédure, elles seront effacées automatiquement au bout de six mois.
Ce sont ces règles qui ont été étendues dans l'expérimentation lancée en 2016.
L'objectif de ces caméras est d'apaiser les tensions ; il a donc séduit aussi les polices municipales, tentées de les expérimenter à leur tour. L'harmonisation des règles applicables aux agents de l'administration pénitentiaire est donc souhaitable. N'oublions pas toutefois de garantir le droit à la vie privée, en opérant quelques ajustements pour les agents de la pénitentiaire et les sapeurs-pompiers.
Le groupe RDSE votera ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE)
M. Antoine Lefèvre . - Les maires de quelque trois cents communes et les syndicats de police viennent de s'exprimer sur l'efficacité des caméras mobiles. Le vide juridique qui les entoure est un mauvais signal, alors que la satisfaction des utilisateurs, clairement reflétée dans le rapport qui nous a été adressé hier soir, est unanime. Il est donc temps de proposer un élargissement sécurisé du dispositif.
On recense chaque année un peu plus de 4 000 agressions de surveillants pénitentiaires, soit plus de dix par jour, et parfois des prises d'otages...
Le 16 mai dernier, un détenu de la maison d'arrêt de Brest, fiché S, s'est échappé lors d'un transfèrement médical, son escorte étant peu armée - et l'homme ayant été manifestement prévenu la veille qu'il serait transféré à cette date, ce qui est contraire aux usages. Les escortes, médicales notamment, s'effectuent dans des conditions de sécurité relâchées. Trois fois, les membres du personnel du service d'extraction de la prison de Lille ont été pris à partie sur l'autoroute...
Dans ces situations, les caméras mobiles objectivent les éléments de preuve et dissuadent les comportements dangereux.
Les personnels pénitentiaires sont parfois pris à partie par les familles ou amis des détenus ; on peut penser que face à une caméra, les comportements agressifs seront dissuadés. À titre d'exemple, le pôle de rattachement des extractions judiciaires (PREJ) de Laon, avec neuf agents, assure 640 missions par an, représentant 100 000 kilomètres parcourus.
La Chancellerie a reconnu qu'une harmonisation des règles s'imposerait, quel que soit le type d'extraction envisagée. Madame la Ministre, qu'en est-il ?
Ce texte étend l'expérimentation des caméras mobiles à ces services ; il ne faudrait pas qu'au terme des trois ans d'expérimentation, on connaisse la même situation qu'avec les polices municipales : l'obligation d'un bilan six mois avant le terme est une bonne chose. L'article additionnel propose de pérenniser le port de caméras mobiles par la police municipale, c'est particulièrement bienvenu.
Enfin, je rappelle qu'en six mois on a saisi 20 000 téléphones portables en prison : il faut agir, Madame la Ministre ! Je voterai cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC)
M. Arnaud de Belenet . - Belle journée pour M. Decool ! Je commence par saluer son travail. L'usage des caméras mobiles a été poursuivi et étendu en 2016. Cette proposition de loi l'étend aussi aux sapeurs-pompiers et aux surveillants de l'administration pénitentiaire. Les expérimentations ont montré l'efficacité des caméras-piétons, outil de pacification entre la police et la population, et de prévention.
Cette proposition de loi fait donc consensus. La commission des lois a sécurisé son dispositif, à juste titre, pour renforcer le respect de la vie privée et du secret médical.
Elle prévoit un recours à la CNIL et au Conseil d'État, tout à fait justifié. Son texte, enfin, pérennise l'usage des caméras individuelles par les agents de la police municipale au vu des résultats positifs de l'expérimentation achevée le 3 juin dernier, qui portait sur 2 325 caméras déployées dans 391 communes.
Leur rôle est dissuasif, et elles rassurent les agents en minimisant l'agressivité à leur égard. La pérennisation de ce dispositif, qui s'inscrit dans la logique de la police de sécurité au quotidien, a l'entier soutien de notre groupe. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et sur le banc de la commission)
Mme Éliane Assassi . - Le romancier Alain Damasio a montré que Michel Foucault avait vu juste, en indiquant que le pouvoir devrait procéder autrement, plus insidieusement, en réalisant une sorte d'échange où l'individu troque une partie de sa liberté contre une vie plus fluide, où l'on passe d'un régime disciplinaire à un régime normatif. Nous troquons une partie de notre liberté contre une vie plus fluide... au point qu'un texte comme cette proposition de loi ne fait plus réagir, même en commission des lois. Il étend les caméras mobiles bien au-delà des forces de l'ordre, expérience que le ministre de l'intérieur juge « très positive », mais nous n'en n'avons eu le bilan... qu'hier. Au-delà des satisfecit, il soulève plusieurs questions.
Nous étions opposés à cette expérimentation, nous le sommes aussi à sa pérennisation. Le dispositif n'est pensé que pour les agents, seuls habilités à déclencher - ou éteindre - des caméras mobiles. Pour quoi faire ? Surveiller et punir ? Les moyens octroyés au personnel qui traitera ces images seraient mieux employés ailleurs.
Si rien ne se passe, les images seraient détruites après six mois ; mais elles pourraient l'être, est-il écrit, sans délai en cas de procédure : qu'est-ce à dire, précisément ? Les risques de dérive sont multiples. Pourquoi pas élargir aux personnels hospitaliers, aux instituteurs et aux professeurs ? On ne traite pas tous les problèmes par la technologie ! Les sapeurs-pompiers ne seront pas moins pris à partie une fois munis de caméras... (On le conteste à droite.)
C'est la disparité financière des territoires, ou le retrait de la puissance publique, qu'il faut enrayer.
Pour les agents pénitentiaires, les caméras mobiles amélioreront-elles les conditions de travail ?
M. Antoine Lefèvre. - Oui !
Mme Éliane Assassi. - Les agents de la pénitentiaire, que nous avons rencontrés avec mon collègue Fabien Gay, ne refusent pas ces outils, mais ils ne sont pas dupes. Ils savent qu'il vaudrait mieux accroître les moyens humains, pour traiter les causes et non les symptômes.
De même, aucune des 32 propositions avancées par la Fédération nationale des sapeurs-pompiers ne porte sur ce sujet. Surveillance désincarnée et suspicion généralisée ne répondent pas aux enjeux de sécurité.
Nous nous abstiendrons donc. (M. Fabien Gay applaudit.)
M. Loïc Hervé . - En 2016, le Gouvernement autorisait l'usage de caméras mobiles par les agents de sécurité de la SNCF et de la RATP. Ce nouvel outil suscitait des craintes et des doutes. Deux ans plus tard, il a fait ses preuves.
La proposition de loi Decool étend l'utilisation des caméras mobiles aux surveillants pénitentiaires, pour lesquels les agressions ont augmenté de 20 % depuis 2016 et aux surveillants de l'administration pénitentiaire, confrontés à une population plus nombreuse et plus violente. Cet objectif est légitime ; et concerne tout citoyen, qui peut être victime d'abus de droit.
Mais il faut concilier la protection des droits individuels avec le maintien de l'ordre public. Je siège à la CNIL et me réjouis que la généralisation de l'usage des caméras mobiles ait été délimitée, comme l'usage des enregistrements. La proportionnalité du dispositif est donc garantie.
Le secret médical est protégé par un amendement adopté en commission qui encadre mieux l'utilisation par les sapeurs-pompiers en intervention, comme le respect de la vie privée.
Enfin, la commission pérennise l'usage des caméras mobiles par la police municipale, comme le souhaitaient les maires et les policiers municipaux engagés dans l'expérimentation qui, depuis le 3 juin, se trouvaient sans cadre légal.
Le groupe UC votera donc cette proposition de loi - mais ces dispositifs, s'ils ont fait leurs preuves, ne remplaceront jamais la prévention. (Applaudissements sur les bancs du groupe UC et sur quelques bancs des groupes SOCR et CRCE)
M. Patrick Kanner . - (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR) Merci aux sénateurs du Nord, MM. Decool et Wattebled. Cette proposition de loi protège ceux qui, au péril de leur vie, protègent la nôtre. Le groupe socialiste ne peut qu'y souscrire. Je rappelle qu'elle s'inscrit dans une démarche engagée sous le quinquennat précédent, avec l'expérimentation lancée dès 2013 dans la police nationale, étendue par la loi du 3 juin 2016 à la police municipale ; enfin la loi du 27 janvier 2017 pour l'égalité et la citoyenneté, que j'avais défendue pour le Gouvernement, rendait systématique l'enregistrement lors des contrôles d'identité, tout en regrettant les récépissés, moins efficaces que les caméras mobiles.
Désormais, nous disposons des résultats de l'expérimentation : ce dispositif est efficace.
Oui, les sapeurs-pompiers et les surveillants de l'administration pénitentiaire seront protégés par les caméras mobiles. Ces outils réduisent les outrages verbaux et physiques, et servent aux magistrats pour en juger. Et les problèmes sont nombreux.
En 2016, le nombre de surveillants pénitentiaires agressés a bondi de 20 % ! À Aurillac, trois pompiers ont été violemment agressés dans la nuit du 2 au 3 juin dernier alors qu'ils intervenaient pour une tentative de suicide...
Chez les surveillants de l'administration pénitentiaire, au moins 4 000 agressions sont recensées chaque année. Aussi l'usage des caméras mobiles est-il légitime, et il serait absurde de s'en priver.
Pour être efficace, il faut l'encadrer de règles strictes : les caméras mobiles doivent être positionnées de façon apparente et les personnes filmées devront être prévenues ; les agents ne pourront accéder directement aux enregistrements. L'usage de ceux-ci sera strictement encadré par la CNIL. Mais, comme les données ne seront pas centralisées, le droit d'accès indirect ne sera pas effectif. Et la notion de « risque d'incident » est éminemment subjective.
Ensuite, il faut prévoir des règles pour l'usage des caméras mobiles dans un domicile privé. Hélas, l'étude d'impact manque. Pourquoi le Gouvernement ne nous a-t-il pas fourni des éléments techniques et éthiques sur le sujet ? La commission des lois a toutefois travaillé et a amélioré ce texte. Par exemple, à l'article 2, le dispositif retenu pour l'administration pénitentiaire est aligné sur les autres professions.
Madame la Ministre, nous souhaitons une adoption conforme dans les meilleurs délais. Mon amendement sur l'anonymat des sapeurs-pompiers qui recourent à la caméra mobile a été déclaré irrecevable au titre de l'article 45 de la Constitution ce matin. Je le regrette.
Le groupe socialiste se félicite de cette proposition de loi. Mais ne mécanisons pas tous les rapports humains : la formation doit demeurer prioritaire. Le livre 1984 est toujours en avance sur nous, lisais-je récemment. C'est notre phare inversé. Gardons-le en tête !
En 2007, la CNIL appelait déjà à la vigilance face à l'innovation technologique, qui séduit par le confort qu'elle promet, sans qu'on en mesure les risques, en particulier pour les libertés. Nous devrons donc être très vigilants !
Le groupe socialiste et républicain votera cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)
M. Alain Marc . - Le recours aux caméras mobiles est un outil utile de sécurisation ; l'expérimentation l'a montré. On s'interroge aujourd'hui sur son extension aux sapeurs-pompiers, victimes d'un nombre croissant d'agressions - une hausse de 20 % en 2016 par rapport à l'an précédent, ainsi qu'aux surveillants pénitentiaires, qui font face à une population carcérale de plus en plus nombreuse et de plus en plus violente - on se souvient de leurs manifestations en janvier dernier. Ils demandent légitimement un renforcement de leur protection.
Cette proposition de loi pertinente de notre collègue Decool y répond : désormais, sapeurs-pompiers et agents pénitentiaires pourront, comme les policiers nationaux et les gendarmes, les policiers municipaux et les agents de sécurité de la SNCF et de la RATP, utiliser des caméras individuelles.
Notre rapporteur, à raison, a limité le champ d'utilisation des caméras mobiles pour les sapeurs-pompiers aux interventions présentant un risque d'atteinte grave à leur intégrité physique et a exclu tout enregistrement en risque d'atteinte au secret médical. La commission a prolongé d'un an l'expérimentation, prévu un rapport d'évaluation et un décret en Conseil d'État soumis à un avis motivé de la CNIL.
La commission a également autorisé, à titre expérimental, l'utilisation des caméras mobiles par les agents pénitentiaires durant trois ans. Le champ d'application a été élargi aux missions présentant un risque particulier d'incident ou d'évasion.
Pragmatique et pertinente, cette proposition de loi répond à une nécessité ; le groupe Les Indépendants la votera sans réserve. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Indépendants)
M. Henri Leroy . - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) À mon tour de remercier Jean-Pierre Decool. En commission, plusieurs d'entre nous ont proposé d'élargir le champ de cette proposition de loi. Il fallait, en effet, pérenniser l'expérimentation autorisant les policiers municipaux à utiliser des caméras mobiles, qui a pris fin dans une regrettable indifférence le 3 juin dernier. Lors du débat sur la sécurité routière, le 5 juin, j'avais expliqué pourquoi cela ne présentait que des avantages.
Les mêmes raisons valent pour les sapeurs-pompiers. Depuis dix ans, leurs conditions d'exercice se sont beaucoup dégradées. Pourquoi ? Parce qu'ils portent l'uniforme, parce qu'ils représentent l'autorité, parce qu'ils travaillent de concert avec les policiers et gendarmes. Les agressions contre eux ont explosé : leur nombre est passé de 1 603 en 2014 à 2 280 en 2016. Comme nombre d'élus, je dialogue souvent avec eux. Je retiens de nos échanges que ces violences sont souvent sociétales d'abord, alimentées par l'alcool et les pratiques dites festives ; ces violences sont urbaines ensuite, c'est-à-dire liées aux trafics et elles sont le fait de jeunes voyous qui caillassent nos pompiers, leur crachent dessus, s'en prennent à eux physiquement.
Alors, oui, nous devons équiper nos pompiers de caméras piétons parce qu'elles ont une fonction préventive - un témoin lumineux signale que l'enregistrement est mis en marche - et qu'elles favorisent la sanction - visionner la scène est un moyen de preuve efficace dans les tribunaux - à condition que le Gouvernement revienne sur la loi Taubira qui a affaibli l'institution judiciaire. Les voyous condamnés à de la prison ferme doivent aller en prison !
Nous avons dans cette proposition de loi un moyen d'apporter notre soutien à ces héros du quotidien, souvent bénévoles. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et Les Indépendants)
M. Alain Fouché . - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Indépendants) Je salue le travail d'anticipation de Jean-Pierre Decool. L'expérimentation dans la police municipale, unanimement reconnue positive, est prolongée. C'est un dispositif protecteur, qui apporte aussi des éléments objectifs de preuve en cas de litige.
J'avais déposé un amendement, avec François Bonhomme, à la loi du 22 mars 2018 autorisant les agents de sécurité de la SNCF et de la RATP à expérimenter les caméras individuelles. Cette expérimentation, qui doit prendre fin le 1er janvier 2020, devra, elle aussi, être pérennisée de même que les autorités de sécurité publique devront pouvoir visionner en temps réel les données récoltées. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Indépendants)
M. François Grosdidier . - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Cette proposition de loi tombe à point nommé, la commission des lois l'a utilement élargie. C'est l'État qui nous contraint à légiférer. En France, tout le monde a le droit de filmer. Les maires n'ont pas attendu l'État pour équiper les policiers municipaux : je l'ai fait dans ma commune il y a sept ans. L'expérience était concluante : les caméras protègent, font chuter la pression chez près de 90 % des personnes qui se savent filmer, fournissent au juge des éléments objectifs qu'il n'a jamais refusés. Mais voilà, le Gouvernement a voulu encadrer ce qui n'en avait pas besoin par la loi du 3 juin 2016.
L'Assemblée nationale avait limité l'expérimentation aux ZSP, le Sénat l'avait étendue à toutes les polices municipales. Elle a pris fin le 3 juin 2018, le Gouvernement n'avait pas prévu de suite. Sinon que les préfets, par circulaire, ont demandé aux maires de remiser les caméras dont l'État leur avait imposé le modèle - sept fois plus cher que le prix du marché pour une sophistication sans efficacité. Certains poursuivent les maires qui les conservent. Sont-ce des initiatives individuelles ou y a-t-il eu des instructions ministérielles en ce sens ?
La caméra est aussi le meilleur régulateur de la relation police-population, ce que confirme le rapport d'évaluation de l'Intérieur du 7 juin. J'aurais pu l'écrire il y a deux ans, je vous renvoie au procès-verbal de la réunion de novembre 2016 de la commission consultative des polices municipales. La caméra est l'alternative au récépissé lors de contrôles d'identité, qui ajoute de la paperasse à la paperasse.
Bien sûr, il faut aussi équiper les sapeurs-pompiers et les agents pénitentiaires. Les prisons sont les premières zones de non-droit, les couloirs sont équipés de caméras mais il y manque le son. C'est indispensable pour appuyer les procédures disciplinaires et judiciaires et commencer de rétablir le droit dans ces établissements.
Les communes pour les polices municipales et les départements pour les SDIS sauront équiper leurs agents. Peut-on en dire autant du ministère de l'intérieur ? Les modèles sont inadaptés en BAC. Des policiers doivent continuer à utiliser leur propre GoPro, achetée à leur frais. J'ai rencontré une compagnie qui a reçu 30 caméras, 20 sont déjà hors service ; une autre en Lorraine attend toujours ses caméras qui ont été envoyées en Loire-Atlantique. J'en conclus que l'État ferait mieux d'accélérer l'équipement de ses forces, plutôt que de ralentir celui des collectivités territoriales.
Le groupe Les Républicains votera ce texte avec enthousiasme. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)
Mme Jacqueline Gourault, ministre . - Je remercie M. Grosdidier pour son enthousiasme...
M. Antoine Lefèvre. - Il est partagé !
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Le Gouvernement fait tout pour équiper ses agents. Des marchés publics ont été passés ; vos conseils techniques, Monsieur Grosdidier, sont les bienvenus. Pour répondre à votre question, aucune instruction n'a été donnée aux préfets sur les équipements.
La discussion générale est close.
Discussion des articles
L'article premier est adopté, ainsi que les articles 2 et 2 bis.
L'article 3 demeure supprimé.
M. le président. - La proposition de loi est adoptée. (Applaudissements sur tous les bancs, à l'exception de ceux du groupe CRCE)
La séance, suspendue à 17 h 50, reprend à 18 h 30.
Équilibre territorial et vitalité de la démocratie locale (Suite)
M. le président. - L'ordre du jour appelle la suite de l'examen de la proposition de loi relative à l'équilibre territorial et à la vitalité de la démocratie locale.
Discussion des articles (Suite)
ARTICLES ADDITIONNELS après l'article 20 sexies (Suite)
M. le président. - Amendement n°9, présenté par M. Grand.
Après l'article 20 sexies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au II de l'article L. 237-1 du code électoral, les mots : « ou de ses communes membres » sont supprimés.
Amendement n°10, présenté par M. Grand.
Après l'article 20 sexies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 239 du code électoral est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, tout élu ayant été amené à démissionner de son mandat de conseiller communautaire à la suite de l'un des cas d'incompatibilité prévus au II de l'article L. 237-1 qui ne se trouve plus dans la situation d'incompatibilité ayant conduit à cette démission, durant le temps d'exercice du mandat pour lequel il a démissionné, retrouve automatiquement son mandat de conseiller communautaire. L'élu concerné doit manifester son souhait de retrouver son mandat par lettre recommandée avec demande d'avis de réception adressée au président de l'établissement public de coopération intercommunale. La personne l'ayant remplacé dans ses fonctions de conseiller communautaire est considérée démissionnaire d'office. »
M. Jean-Pierre Grand. - La loi de 2013 interdit aux salariés d'un EPCI ou de ses communes membres d'exercer le mandat de conseiller communautaire alors qu'il n'existe aucune incompatibilité entre l'exercice d'un emploi salarié au sein d'un EPCI et le mandat de conseiller municipal. C'est une inégalité flagrante à laquelle je vous propose de mettre fin avec l'amendement n°9 que le Sénat a déjà adopté en 2016. L'amendement n°10 est de repli. Le cas n'est pas fréquent mais touche des élus généralement d'expérience.
M. Mathieu Darnaud, rapporteur de la commission des lois. - Je réitère la position de la commission. Rejet de l'amendement n°9 car l'incompatibilité est gage d'impartialité dans la gestion des EPCI. Idem sur l'amendement n°10, il forcerait le remplaçant à démissionner d'office, déstabilisant les assemblées délibérantes des EPCI.
Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur. - C'est par parallélisme que le législateur a introduit une telle incompatibilité. Un groupe de travail sénatorial réfléchit au statut de l'élu : il abordera les règles d'incompatibilité de manière globale et pourra les uniformiser. Le président de la République a dit vouloir ouvrir ce chantier lors du congrès des maires. Retrait ou avis défavorable.
M. Jean-Pierre Grand. - Soit.
L'amendement n°9 est retiré, de même que l'amendement n°10.
M. le président. - Amendement n°54, présenté par M. Collombat.
Après l'article 20 sexies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le 7° de l'article 222-13 du code pénal est abrogé.
M. Pierre-Yves Collombat. - Assurons aux élus un minimum de sécurité juridique. Le fait d'être dépositaire de l'autorité publique est systématiquement considéré comme une circonstance aggravante du moins jusqu'à une période récente... La Cour d'appel de Douai a relaxé un maire condamné pour avoir giflé un gamin qui embêtait le voisinage et semait la panique un peu partout ; elle a jugé sa réponse mesurée à la provocation dont il avait fait l'objet. Cet amendement adapte le code pénal en conséquence.
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. - Nous en avons longuement débattu en commission des lois ; celle-ci a finalement donné un avis favorable. Si les élus doivent être exemplaires, ils sont plus exposés que leurs concitoyens.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Rien ne justifie que les élus soient davantage préservés. Un détenteur de la force publique doit être exemplaire. D'ailleurs, quand un élu est attaqué, le code pénal prévoit une sanction plus forte. Avis défavorable.
M. Pierre-Yves Collombat. - Ça ne coûte pas de pognon, pourtant ! (Sourires ; Mme Cécile Cukierman s'esclaffe.)
L'amendement n°54 est adopté et devient un article additionnel.
M. le président. - Amendement n°50, présenté par M. Collombat.
Après l'article 20 sexies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 432-14 du code pénal est ainsi modifié :
1° Après le mot : « susmentionnées », sont insérés les mots : « d'avoir en connaissance de cause et en vue » ;
2° Après le mot : « injustifié », sont insérés les mots : « , octroyé cet avantage injustifié » ;
3° Les mots : « publics et » sont remplacés par les mots : « publics ou ».
M. Pierre-Yves Collombat. - Actuellement, toute erreur de procédure dans l'attribution de marché est considérée comme caractérisant un délit de favoritisme. Je croyais pourtant qu'il n'y a pas de délit sans intention de le commettre... Avec cet amendement, nous retirerons l'épée de Damoclès du dessus de la tête des élus ; une faute vient vite, vu la complexité du code des marchés publics.
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. - Cet amendement aussi a été examiné à plusieurs reprises par le Sénat. Avis favorable, en cohérence avec notre position lors de l'examen de la loi Sapin II.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Avis défavorable car vous atténuez la portée de l'article 432-14 du code pénal pour l'ensemble de ceux qui portent une responsabilité publique. Une réflexion générale doit être menée sur le régime de responsabilité des élus.
M. Pierre-Yves Collombat. - L'empressement à conduire cette réflexion générale n'est pas manifeste...
L'amendement n°50 est adopté et devient un article additionnel.
ARTICLE 21
M. le président. - Amendement n°72, présenté par M. Darnaud, au nom de la commission des lois.
Rédiger ainsi cet article :
L'article L. 1111-8 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est ainsi modifié :
a) Après le mot : « propre », sont insérés les mots : « tout ou partie d' » ;
b) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, lorsqu'il y est expressément autorisé par ses statuts, peut également déléguer à une collectivité territoriale tout ou partie d'une compétence qui lui a été transférée. » ;
2° Au deuxième alinéa, le mot : « délégante » est remplacé par les mots : « ou de l'établissement public délégant ».
L'amendement n°72 de précision, sur lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat, est adopté et l'article 21 est ainsi rédigé.
ARTICLES ADDITIONNELS
M. le président. - Amendement n°20 rectifié, présenté par M. Piednoir, Mme Deroche, MM. Grosdidier et Meurant, Mme Eustache-Brinio, MM. Paccaud, Bascher, Panunzi et Joyandet, Mme Lamure, MM. Courtial, Bonhomme, Chatillon, Vaspart et de Nicolaÿ, Mme Thomas, M. Cardoux, Mme Deseyne, M. Pierre, Mme Deromedi, MM. Longuet et Savary, Mme Garriaud-Maylam et MM. Revet, D. Laurent, Lefèvre, Bonne, Sido, Hugonet et Laménie.
Après l'article 21
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le sixième alinéa du I de l'article L. 5214-16 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation au 1° du présent I, une commune nouvelle constituée sur le périmètre d'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre peut s'opposer au transfert de la compétence en matière de plan local d'urbanisme, de documents d'urbanisme en tenant lieu ou de carte communale, au nouvel établissement public de coopération intercommunale qu'elle a intégré. »
M. Stéphane Piednoir. - Certaines communes nouvelles sont créées sur le périmètre d'un EPCI à fiscalité propre. Dans les cas où l'EPCI avait élaboré un plan local d'urbanisme intercommunal, ce dernier devient alors très souvent le plan local d'urbanisme (PLU) de la commune nouvelle.
Lorsqu'une telle commune nouvelle intègre un nouvel EPCI, elle doit pouvoir avoir la faculté de conserver sa compétence PLU et non de la transférer à l'échelon intercommunal.
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. - En cohérence avec la suppression de l'article 8, et dans la perspective de l'examen de la proposition de loi de Françoise Gatel, un retrait s'impose pour l'heure. L'amendement est intéressant, au demeurant.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Avis défavorable.
M. Stéphane Piednoir. - Puisse-t-il prospérer dans la proposition de loi à venir...
L'amendement n°20 rectifié est retiré.
M. le président. - Amendement n°19 rectifié, présenté par M. Piednoir, Mme Deroche, MM. Grosdidier et Meurant, Mme Eustache-Brinio, MM. Danesi, Paccaud, Bascher, Panunzi et Joyandet, Mme Lamure, MM. Courtial, Bonhomme, Chatillon, Vaspart et de Nicolaÿ, Mme Thomas, M. Cardoux, Mme Deseyne, M. Pierre, Mme Deromedi, MM. Longuet et Savary, Mme Garriaud-Maylam, M. Revet, Mme A.M. Bertrand et MM. Lefèvre, Bonne, Sido, Hugonet, Laménie et B. Fournier.
Après l'article 21
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au premier alinéa du II de l'article L.5214-16 du code général des collectivités territoriales :
1° Le mot : « doit » est remplacé par le mot : « peut » ;
2° Les mots : « d'au moins trois des neuf » sont remplacés par le mot : « des ».
M. Stéphane Piednoir. - Cet amendement assouplit la répartition des compétences entre les communes et les intercommunalités en transformant l'obligation de transfert de ces compétences optionnelles en une simple faculté.
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. - Après un long débat sur ce point, la commission a émis un avis plutôt favorable sur le fond. Il ne faudrait toutefois pas que cet amendement court-circuite les réflexions en cours, notamment celles de la délégation aux collectivités territoriales et celles de la mission de suivi et de contrôle des lois de réforme territoriale. En effet, l'adoption de cet amendement, aussi pertinent soit-il, changerait considérablement les règles du jeu. Des préconisations ultérieures, de la mission que j'ai citée en particulier, qui s'occupe des liens entre communes et intercommunalités, éclaireront cette question.
Les intercommunalités, spécialement les communautés d'agglomération, épousent des territoires très divers, plus ou moins urbains, ce qui pose des problèmes de natures différentes. Il faut donc différencier, pour le transfert de compétences optionnelles, celles qui sont clairement supra-communales, de celles qui correspondent à un échelon de proximité. D'où, finalement, notre demande de retrait.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Même avis. Toucher à un pan des compétences optionnelles peut avoir des conséquences en cascade, dans un système cohérent où tout est lié, le volet compétences comme le volet financier.
L'amendement n°19 rectifié est retiré.
ARTICLE 21 BIS
M. le président. - Amendement n°60 rectifié, présenté par M. de Belenet et les membres du groupe La République En Marche.
Supprimer cet article.
M. Arnaud de Belenet. - Cet article permet la participation des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre à des groupements de commandes. Or il semble contrevenir au principe de spécialité qui s'oppose à ce qu'un EPCI agisse hors du champ de compétence qui lui a été attribué. Préservons la lisibilité de l'action publique locale.
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. - Cet article est pertinent, au contraire, surtout dans les territoires peu peuplés. Avis défavorable.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Avis favorable. (Exclamations à droite) Vous connaissez tous le principe de spécialité, je suppose. Or la mention des champs sur lesquels porteront les groupements de commandes fait ici défaut. Supprimer cet article protégerait les communes !
M. Pierre Louault. - Vous faites erreur, Madame la Ministre : les communautés de communes sont aussi des communautés de services aux communes, en obtenant par exemple des prix pour des achats groupés !
M. Éric Kerrouche. - Nous voterons contre cet amendement. La loi autorise déjà des services communs hors de tout transfert de compétences. Par analogie, faire de même pour les groupements de commandes rendrait l'action publique locale plus efficace et moins coûteuse.
Mme Anne Chain-Larché. - Je rejoins les orateurs précédents. Toutes les communes s'alarment de la baisse de leurs dotations. Tout ce qui permet de limiter les dépenses des communes, en stimulant la solidarité intercommunale, par la conférence des maires par exemple, tout ce qui contribue donc à libérer les initiatives et les énergies des territoires, est bon à prendre.
M. Patrick Chaize. - Madame la Ministre, convenons que, juridiquement, le transfert de compétences doit respecter un certain nombre de règles, soit. Mais dans la vraie vie, la simplification doit primer ! Faites correspondre vos actes à vos discours en soutenant cet amendement.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Certes, les groupements de commandes sont banals, mais l'EPCI ne peut le faire que dès lors qu'ils touchent une compétence qu'il exerce !
L'amendement n°60 rectifié n'est pas adopté.
L'article 21 bis est adopté.
ARTICLE 21 TER
M. Patrick Chaize . - Maire d'une commune de 3 000 habitants, j'ai dû choisir entre mes deux mandats en septembre dernier. Il n'y avait d'opposition. Or un des conseillers municipaux est décédé, et il a fallu renouveler complètement le conseil municipal, en plein milieu d'un mandat. L'équipe en place a perdu l'élection. Son programme n'aura pas été réalisé, et celui de la nouvelle équipe qui lui a succédé à mi-mandat ne le sera pas non plus : six ans de perdus ! Cet article évite de telles situations et j'invite le Sénat à le voter.
M. le président. - Amendement n°62, présenté par M. de Belenet et les membres du groupe La République En Marche.
Supprimer cet article.
M. Arnaud de Belenet. - Cet amendement supprime l'article, non par hostilité à ce dispositif, (M. Philippe Dallier ironise ; sourires sur les bancs du groupe Les Républicains) mais parce qu'il ne concernera qu'une strate de collectivités, et que le Sénat a songé à d'autres solutions. Par exemple, utilisons les suppléants ! Un souci de cohérence et d'équité territoriale nous anime.
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. - Regardez les résultats des dernières élections municipales sur la strate de communes qui va de 5 000 à 20 000 habitants ! Des conseils municipaux forts peuvent n'avoir aucune réserve majoritaire. S'il y a moins de 1 000 habitants, on peut organiser une élection partielle, ce qui est plus simple. S'il y a un article qu'il est urgent d'adopter, c'est bien celui-là.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Sagesse. Le problème existe, comme ceux posés aux communes de moins de 1 000 habitants par le fléchage vers les EPCI en cas de changement de maire. Il faut traiter ces questions de manière globale dans le cadre des travaux du groupe sénatorial sur le statut de l'élu - qui a le soutien du Gouvernement et qui prendra l'initiative de proposer des corrections.
M. Didier Marie. - Que l'on raisonne en pourcentage ou en nombre de suppléants, cela fonctionne aussi. Il suffit d'augmenter le nombre de suppléants à due concurrence pour atteindre le seuil de 10 %. Il faut en tout cas régler ce problème.
M. Éric Kerrouche. - Il faut être pragmatique, car les difficultés posées sont réelles - et on peut les régler très facilement. Je voterai donc contre cet amendement.
M. Arnaud Bazin. - Moi aussi. Dans mon département, une commune de 12 000 habitants n'avait qu'une liste ! Cet article est de bon sens. Je voterai contre cet amendement.
M. Marc Laménie. - Pour les communes de moins de 1 000 habitants, c'est plus simple. Sinon, la défection d'un seul conseiller municipal impose de réélire toute l'équipe ! C'est trop complexe. L'équité nous impose de voter comme notre rapporteur.
M. Patrick Chaize. - Comment trouverons-nous des suppléants ? Il sera difficile de les motiver. Mieux vaut un nombre moindre de conseillers, mais motivés. Maintenons cet amendement.
M. Michel Savin. - Dans mon département, dans ma commune de 5 000 habitants, une seule liste s'est présentée. Le décès du maire après un an a provoqué une élection où plusieurs listes se sont présentées et la proportionnelle a éliminé plusieurs élus en fonction. Du coup, la majorité de l'intercommunalité a basculé, ce qui a remis en cause les projets engagés.
Cet amendement est donc utile, conservons-le.
M. Bruno Sido. - Accepter que le conseil municipal puisse ne pas être complet pour élire un maire pourrait être utile, quoiqu'en dise la loi à présent...
L'amendement n°62 n'est pas adopté.
L'article 21 ter est adopté, de même que l'article 21 quater.
ARTICLE 21 QUINQUIES
M. Patrick Chaize . - Il faut maintenir le fonctionnement des syndicats intercommunaux. Actuellement, l'administration devenant plus tatillonne, ceux qui fonctionnaient avec les fonds de concours des communes ne le peuvent plus.
L'article 21 quinquies est adopté.
ARTICLES ADDITIONNELS
M. le président. - Amendement n°40 rectifié bis, présenté par Mme Primas, MM. Bansard, Bazin, Bizet, Brisson et Cambon, Mme Chain-Larché, MM. Charon, Chatillon, Cuypers et Danesi, Mmes Deroche, Deseyne, Di Folco, Dumas, Duranton et Eustache-Brinio, MM. B. Fournier, Grosdidier et Husson, Mme Lanfranchi Dorgal et MM. Laugier, D. Laurent, Lefèvre, H. Leroy, Mandelli, Panunzi, Perrin, Piednoir, Pierre, Poniatowski, Raison, Savary, Schmitz et Vaspart.
Après l'article 21 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° Au b du 2° du I de l'article L. 5215-20, les mots : « voirie ; signalisation » sont remplacés par les mots : « la voirie d'intérêt communautaire et sa signalisation » ;
2° Au 11° du I de l'article L. 5215-20-1, les mots : « Voirie et signalisation » sont remplacés par les mots : « Voirie d'intérêt communautaire et sa signalisation » ;
3° Au b du 2° du I de l'article L. 5217-2, les mots : « voirie ; signalisation » sont remplacés par les mots : « la voirie d'intérêt métropolitain et sa signalisation » ;
4° Au 1° du I de l'article L. 5218-2, les mots : « voirie" et "signalisation » sont remplacés par les mots : « la voirie d'intérêt métropolitain et sa signalisation ».
Mme Catherine Di Folco. - La loi Maptam a conduit à la création d'EPCI de taille très importante, incluant un grand nombre de communes et prenant la forme de communautés d'agglomération, de communautés urbaines ou de métropoles. Dans ces deux dernières, la compétence voirie est obligatoire et totale, impliquant des tâches d'ultra-proximité, dont l'entretien quotidien de la voirie, alors que ces EPCI devraient se concentrer sur la stratégie territoriale et les grands plans d'aménagement. Cela génère un sentiment profond de dépossession des maires vis-à-vis de leurs administrés. En conséquence, cet amendement restreint la compétence de la communauté urbaine et de la métropole à la voirie principale, déterminée d'intérêt communautaire ou métropolitain par l'organe délibérant.
M. le président. - Sous-amendement n°66 à l'amendement n°40 rectifié de Mme Primas, présenté par M. Grand.
Amendement n°40 rectifié bis, alinéa 7
Remplacer cet alinéa par quatre alinéas ainsi rédigés :
4° Le c du 2° du I de l'article L. 5217-2 est abrogé ;
5° Le 1° du I de l'article L. 5218-2 est ainsi modifié :
a) Les mots : « voirie" et "signalisation » sont remplacés par les mots : « la voirie d'intérêt métropolitain et sa signalisation » ;
b) Les mots : « et pour la compétence ?création, aménagement et entretien des espaces publics dédiés à tout mode de déplacement urbain ainsi qu'à leurs ouvrages accessoires? prévue au c du même 2°» sont supprimés.
M. Jean-Pierre Grand. - Fort utilement, cet amendement restreint la compétence obligatoire à la voirie d'intérêt communautaire dans les communautés urbaines et les métropoles.
En effet, avec ces transferts, les mairies sont aujourd'hui totalement dépossédées de cette mission essentielle de proximité qui nécessite pourtant une grande réactivité : les délais d'exécution sont doublés ou triplés et nous ne maîtrisons plus les coûts. De plus, nous payons, dans les communes, les travaux exécutés par les métropoles. En trente-cinq ans, je n'ai jamais vu une situation si désastreuse.
Nous voulons récupérer notre espace public. À Montpellier, il faut sept mois pour un appel d'offres et quatorze mois pour ouvrir un dossier ! On ne travaille pas comme ça ! Nous sommes perdants sur tous les tableaux.
M. le président. - Amendement n°21 rectifié bis, présenté par Mme Primas, MM. Bansard, Bazin, Bizet, Brisson et Cambon, Mme Chain-Larché, MM. Charon, Chatillon, Cuypers et Danesi, Mmes Deroche, Deseyne, Di Folco, Dumas, Duranton et Eustache-Brinio, MM. B. Fournier, Grosdidier et Husson, Mme Lanfranchi Dorgal et MM. Laugier, D. Laurent, Lefèvre, H. Leroy, Mandelli, Panunzi, Perrin, Piednoir, Pierre, Poniatowski, Raison, Savary, Schmitz et Vaspart.
Après l'article 21 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° Au b du 2° du I de l'article L. 5215-20, les mots : « voirie ; signalisation » sont remplacés par les mots : « la voirie d'intérêt communautaire et sa signalisation » ;
2° Au 11° du I de l'article L. 5215-20-1, les mots : « Voirie et signalisation » sont remplacés par les mots : « Voirie d'intérêt communautaire et sa signalisation ».
Mme Catherine Di Folco. - Amendement de repli.
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. - Avis favorable à l'amendement n°40 rectifié bis. Avis défavorable à l'amendement n°66.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Avis défavorable : c'est un vrai détricotage.
Mme Cécile Cukierman. - C'est la fin des métropoles...
M. Jean-Pierre Grand. - Mais cela ne fonctionne pas, Madame la Ministre !
M. Pierre-Yves Collombat. - Détricotons la camisole de force !
M. René-Paul Savary. - On a fait de très grandes intercommunalités ; résultat : on a fini par créer des communautés urbaines rurales...
Dans la Marne, celle de Reims compte 143 communes et plus de 1 000 kilomètres de voiries communales ! Est-ce à elle de s'occuper des nids-de-poule ? Les intercommunalités doivent pouvoir laisser aux maires ces questions.
M. Jean-Pierre Grand. - Si la rue devient municipale, la placette voisine devrait-elle pour autant relever de la métropole ? Les citoyens s'adressent au maire de toute façon. Il faut étendre l'espace public.
M. Didier Marie. - Parfois les choses se passent bien. Je suis élue d'une métropole qui compte 71 communes regroupant 57 000 habitants. Nous y avons installé dès le départ des pôles de proximité qui hébergent les équipes de proximité. Résultat : les nids-de-poule sont rebouchés en quelques heures.
M. Jean-Pierre Grand. - Chez nous, en trois mois !
M. Bruno Sido. - À quoi bon des agglomérations larges de 60 kilomètres ? Les communes périphériques sont mal servies quand leurs maires se sentent abandonnés.
M. Jean-Pierre Grand. - Ce qui se faisait dans la semaine prend à présent deux mois. Bravo !
L'amendement n°66 n'est pas adopté.
L'amendement n°40 rectifié bis est adopté et devient un article additionnel.
L'amendement n°21 rectifié bis n'a plus d'objet.
M. le président. - Amendement n°57 rectifié, présenté par MM. Chaize, D. Laurent et Poniatowski.
Après l'article 21 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article1636 B undecies du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« ... Lorsque les dispositions de l'article 1522 bis sont appliquées à un établissement public de coopération intercommunale résultant de la fusion de plusieurs établissements publics de coopération intercommunale, dont l'un au moins a institué, préalablement à la fusion, une redevance d'enlèvement des ordures ménagères en application de l'article L. 2333-76 du code général des collectivités territoriales, le produit de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères applicable à la totalité du territoire de l'établissement public de coopération intercommunale résultant de la fusion ne peut excéder la somme des produits totaux de cette taxe ou de cette redevance tel qu'issus des rôles généraux, pour chacun des établissements publics de coopération intercommunale fusionnés, au titre de l'année précédente. »
M. Patrick Chaize. - Selon le code général des impôts, « la première année d'application des dispositions de l'article 1522 bis, le produit de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères ne peut excéder le produit total de cette taxe tel qu'issu des rôles généraux au titre de l'année précédente ».
L'esprit de ce texte, qui ne prend pas en compte la situation des EPCI fusionnés, est que l'instauration d'une part incitative à la taxe d'enlèvement des ordures ménagères (TEOM) ne doit pas être un moyen d'accroître le produit global de cette taxe.
La conséquence de ce texte est qu'en cas de fusion d'EPCI, l'instauration d'une TEOM avec part incitative sur l'ensemble du territoire devient impossible lorsque l'un des EPCI fusionné avait supprimé la TEOM pour la remplacer par une redevance d'enlèvement des ordures ménagères (REOM). Ce cas n'a pas été envisagé par le législateur puisque, hors cas de fusion d'EPCI, un EPCI n'a aucune raison de passer de la REOM à la TEOM avec part incitative.
Le cas de la fusion d'EPCI n'ayant pas été prévu par le législateur, il convient de permettre le passage à la TEOM avec part incitative sur l'ensemble du territoire d'un EPCI dont une partie du territoire était passée au système de la REOM préalablement à la fusion.
Le présent amendement intègre un alinéa supplémentaire à l'article 1636B undecies du code général des impôts afin de prévoir explicitement ce cas. Conformément à l'esprit du texte, le produit total de la TEOM avec part incitative ne devra pas excéder la somme des produits des TEOM et REOM des différents EPCI fusionnés.
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. - C'est un sujet très complexe. Il y a eu un oubli du législateur. En commission, nous avons demandé le retrait mais, éclairé par de nouveaux éléments, j'estime que cet amendement apporte une solution pertinente aux problèmes posés par les fusions. Par conséquent, avis favorable à titre personnel.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Modifier ainsi une imposition locale relève d'une loi de finances ou d'une loi de finances rectificative.
Dans le cadre de la refonte de la fiscalité locale et de la réflexion sur l'économie circulaire, le Gouvernement a engagé un travail sur la taxe d'enlèvement des ordures ménagères (TEOM). La redevance d'enlèvement des ordures ménagères (REOM), proportionnelle au service rendu, n'étant pas recouvrée sur rôle, elle ne peut servir de base au calcul de la part incitative de la TEOM. Retrait ?
M. Patrick Chaize. - Je maintiens mon amendement car la question doit être traitée dans la navette.
L'amendement n°57 rectifié est adopté et devient un article additionnel.
ARTICLE 22
M. le président. - Amendement n°73, présenté par M. Darnaud, au nom de la commission des lois.
Alinéa 2
Remplacer les mots :
au deuxième alinéa
par les mots :
aux premier et deuxième alinéas
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. - Amendement rédactionnel.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Sagesse.
L'amendement n°73 est adopté.
L'article 22, modifié, est adopté.
ARTICLE 23
M. le président. - Amendement n°74, présenté par M. Darnaud, au nom de la commission des lois.
Alinéa 3, seconde phrase
Rédiger ainsi cette phrase :
Tout retard dans la notification à une collectivité territoriale ou à un groupement de collectivités territoriales du montant de son attribution individuelle est présumé lui causer un préjudice jusqu'à preuve contraire.
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. - Cet amendement renforce la sanction des retards pris par l'État dans la notification aux collectivités territoriales et à leurs groupements du montant de leur attribution individuelle annuelle au titre de la dotation globale de fonctionnement (DGF). Il répond à une demande maintes fois formulée par les maires. Tout retard serait présumé porter préjudice à la collectivité territoriale ou au groupement concerné jusqu'à preuve contraire.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Évidemment, le Gouvernement est défavorable. (Sourires)
M. Pierre-Yves Collombat. - Quelle déception !
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - La notification de la DGF est normalement en ligne le 31 mars ; cette année, c'était le 3 avril. (M. Philippe Dallier s'exclame ; murmures à droite.) Il faut être souple !
M. Éric Kerrouche. - Le groupe socialiste et républicain votera cet amendement, mais je doute que sa rédaction impressionne beaucoup l'État...
L'amendement n°74 est adopté.
L'article 23 est adopté.
ARTICLE 24
M. le président. - Amendement n°27, présenté par Mmes Cukierman, Assassi et Benbassa, M. Bocquet, Mmes Brulin et Cohen, MM. Gay et Gontard, Mme Gréaume, MM. P. Laurent et Ouzoulias, Mme Prunaud et M. Watrin.
Alinéas 3 à 6
Supprimer ces alinéas.
Mme Cécile Cukierman. - Les baisses de dotations, la raréfaction des services d'État pour accompagner les élus ont incité les auteurs de la proposition de loi à instaurer un droit de timbre pour certains actes dont la délivrance des permis de construire. Cela nous semble injuste ; nous sommes à la disposition du Sénat et du Gouvernement pour envisager d'autres solutions.
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. - La loi ALUR a certes réduit le nombre de communes et EPCI susceptibles de bénéficier de l'aide des services de l'État pour l'examen des demandes en matière d'urbanisme mais le transfert de compétences sans compensation financière est contraire à l'article 72-2 de la Constitution. Avis défavorable.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Avis favorable.
Mme Cécile Cukierman. - Les transferts de compétences sont injustes quand ils ne sont pas financés, mais ce n'est pas une raison pour faire payer l'usager ! La majorité sénatoriale a plutôt l'habitude de demander des exonérations de charges.
Mme Françoise Gatel. - L'État nous a transféré voici plusieurs années, sans compensation, les autorisations d'urbanisme.
Il est équitable que ce service, financé par l'ensemble des usagers de la commune, fasse l'objet d'une contribution des pétitionnaires. En général, ils le font une ou deux fois dans leur vie ; c'est comme pour le passeport.
M. François Bonhomme. - À l'époque du transfert, les notaires avaient multiplié les demandes de certificat d'urbanisme qu'ils refacturaient à leurs clients, à la barbe des mairies ! Je suis d'accord avec le rapporteur.
M. Philippe Bas, auteur de la proposition de loi. - Un rappel historique s'impose, de ces évolutions dont nous sommes nombreux ici à pouvoir témoigner. En 1983, la compétence en matière d'urbanisme a été transférée aux maires : c'est un acquis de la décentralisation. Or les maires n'ayant en général pas les moyens de l'exercer, sagement, le ministre de l'intérieur de l'époque, Gaston Defferre, a mis les services de l'État à leur disposition. Mais voilà que le précédent gouvernement a retiré le tapis de sous les pieds des édiles tout en baissant les dotations. Le droit de timbre est une modeste contribution.
Madame la Ministre, je m'adresse à la présidente de la délégation aux collectivités territoriales que vous avez été, je m'adresse aussi à la ministre aux libertés locales que vous êtes aujourd'hui : je suis convaincu que vous pouvez encore changer votre position sur ce problème, pour le régler en faveur de nos communes ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains ; M. Pierre Louault applaudit également.)
M. Charles Guené. - Je suis gêné par le seuil de 20 000 habitants. Les pétitionnaires dans les communes en dessous de ce seuil pourraient s'estimer victimes de distorsion.
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. - La commission a supprimé le seuil.
M. François Bonhomme. - La voie est libre !
M. Pierre Ouzoulias. - La suppression de la taxe d'habitation, ce sont des recettes en moins non compensées par l'État. Aujourd'hui, certaines familles paient davantage en services publics qu'en impôts locaux.
Mme Cécile Cukierman. - On pourrait faire payer les entreprises aussi !
M. Pierre Ouzoulias. - Dans les communes populaires des Hauts-de-Seine la fréquentation des cantines scolaires a dramatiquement baissé, en raison des augmentations de prix. La solidarité nationale doit prendre sa part.
M. Éric Kerrouche. - En 1983, la mise à disposition des services de l'État était transitoire, ce qui explique qu'elle ait pu être retirée aussi facilement.
Sur le fond, mon groupe soutiendra cet amendement. Il faut se souvenir que tout service se paie.
M. François Bonhomme. - Il n'y a que l'air qui soit gratuit !
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - D'abord, la suppression de la taxe d'habitation prenant la forme d'un dégrèvement, elle sera compensée à l'euro près par les collectivités territoriales. (Marques d'ironie et de doute sur de nombreux bancs) Ensuite, les pétitionnaires paient déjà leurs demandes d'autorisation : n'en ajoutons pas, ou bien ce serait augmenter les prélèvements obligatoires.
L'amendement n°27 n'est pas adopté.
L'article 24 est adopté.
ARTICLE ADDITIONNEL
M. le président. - Amendement n°29 rectifié bis, présenté par M. Perrin, Mmes Primas et Estrosi Sassone, MM. Pointereau, Longuet, Raison, Magras et Kennel, Mmes Eustache-Brinio et Chauvin, MM. Nougein, Courtial, Vial, H. Leroy, Joyandet, Meurant, Huré et Brisson, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Paccaud et J.M. Boyer, Mmes Puissat et Gruny, M. Panunzi, Mme Keller, MM. Vaspart et Houpert, Mmes Delmont-Koropoulis et Deromedi, M. Savin, Mmes Raimond-Pavero, Deseyne et F. Gerbaud, MM. Mayet, Vogel, Savary, Bascher et Reichardt, Mmes Imbert, Lherbier et Garriaud-Maylam, M. Babary, Mme A.M. Bertrand, M. D. Laurent, Mme Duranton, MM. Revet et Sido, Mme Lassarade, MM. Laménie, Priou et Bonhomme et Mme Thomas.
Après l'article 24
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 2334-37 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° Le dixième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « Elle est consultée sur tout projet subventionné au titre de la dotation des équipements ruraux. » ;
2° La dernière phrase de l'avant-dernier alinéa est supprimée.
Mme Dominique Estrosi Sassone. - Cet amendement permet à la commission d'élus dite « commission DETR » de rendre un avis décisionnel sur tout projet de subvention au titre de la DETR, quel que soit son montant.
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. - Je suis navré de contredire les signataires de l'amendement, mais ainsi rédigé l'amendement n'est pas décisionnel. Avis favorable, puisque le pouvoir revient de toute façon au préfet.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Avis défavorable.
M. Marc Laménie. - La nouvelle commission DETR compte deux députés et deux sénateurs par département. Nous avons longuement débattu de sa composition. On peut regretter la suppression de la réserve parlementaire, qui réduit notre poids décisionnaire au sein de la DETR. Je soutiendrai néanmoins l'amendement.
M. Philippe Dallier. - Tous les préfets de France et de Navarre ont-ils bien l'obligation de réunir cette commission ? Parce qu'il est un département où nous n'y avons pas été conviés. (M. Bruno Sido et Mme Martine Berthet applaudissent.)
M. René-Paul Savary. - Les parlementaires, notamment les sénateurs, sont de plus en plus coupés du terrain. Est-ce une volonté du Gouvernement de privilégier des élus hors-sol ?
Plusieurs voix sur les bancs du groupe Les Républicains. - Mais oui !
M. Bruno Sido. - Dans les collectivités territoriales, toutes les subventions, même les plus petites, figurent en annexe du rapport... Pourquoi n'y aurait-il pas la même transparence du côté de l'État ?
M. Daniel Chasseing. - Les parlementaires sont consultés en DETR pour les subventions de plus de 100 000 euros. Mieux vaudrait qu'ils aient connaissance de tous les dossiers.
M. François Bonhomme. - Madame la Ministre, dès lors qu'on parle d'argent public en direction des territoires, il est normal que les sénateurs donnent leur avis. Je lance une supplique à la Jacqueline Gourault, millésime 2015-2016...
M. Charles Guené. - Une part de la réserve parlementaire a été intégrée à la DETR. Il serait logique que la même publicité y soit appliquée.
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. - Monsieur Dallier, oui, le préfet a l'ardente obligation de réunir la commission DETR...
M. Philippe Dallier. - La Seine-Saint-Denis est décidément un département hors normes !
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. - ...car cette commission a pour mission de définir les critères d'éligibilité des subventions.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Je peux vous parler d'un millésime plus ancien, Monsieur Bonhomme, car j'ai par le passé participé à des réunions de commission DETR...
Les choses sont claires. (« Ah ! » sur les bancs du groupe Les Républicains) Cette commission a pour rôle de définir les critères d'instruction des demandes par le préfet. Il y a quatre parlementaires par commission depuis la suppression de la réserve.
Il est curieux, Monsieur Dallier, que la commission DETR de votre département n'ait pas été réunie.
Le ministère a donné instruction aux services d'informer les parlementaires de l'ensemble des dossiers.
Enfin, c'est une dotation de l'État - qui a d'ailleurs augmenté de 5 % : il est donc normal que le préfet, et non la commission, en décide. Les sommes sont souvent importantes : tout est clair et transparent, et pourrait même figurer, naturellement, sur le site de la préfecture.
M. Olivier Jacquin. - Nous attendons une telle transparence. Dans la même logique, le seuil pourrait être abaissé.
La DSIL me semble plus obscure encore et ma dernière lettre sur le sujet au préfet de ma région est restée sans réponse.
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. - La commission des lois avait proposé lors de l'examen du dernier projet de loi de finances que la même commission soit réunie pour le DSIL.
L'amendement n°29 rectifié bis est adopté et devient un article additionnel.
ARTICLE 25
M. le président. - Amendement n°75, présenté par M. Darnaud, au nom de la commission des lois.
Rédiger ainsi cet article :
Le deuxième alinéa du III de l'article L. 1111-10 du code général des collectivités territoriales est complété par une phrase ainsi rédigée : « Toutefois, ce taux est ramené à 5 % lorsque le maître d'ouvrage est une commune de moins de 1 000 habitants. »
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. - Amendement rédactionnel.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Sagesse.
L'amendement n°75 est adopté et l'article 25 est ainsi rédigé.
ARTICLES ADDITIONNELS
M. le président. - Amendement n°58 rectifié bis, présenté par M. Chaize, Mme Bories et MM. Pierre et Lefèvre.
Après l'article 25
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° L'article L. 2411-5 est ainsi modifié :
a) Au 1°, le mot : « vingt » est remplacé par le mot : « quarante » ;
b) Le 3° est ainsi modifié :
- à la première phrase, le nombre : « 2 000 » est remplacé par le nombre : « 10 000 » ;
- à la seconde phrase, le mot : « révisé » est remplacé par le mot : « augmenté » ;
2° Après l'article L. 2411-10, il est inséré un article L. 2411-10-... ainsi rédigé :
« Art. L. 2411-10-... - I. - Une taxe peut être instituée par délibération du conseil municipal pour contribuer au financement par la commune des frais liés au fonctionnement d'une section de commune.
« II. - La taxe est instituée avant le premier octobre de l'année pour être applicable à compter de l'année suivante.
« III. - La taxe est acquittée par chaque membre de la section de commune. Son montant est déterminé par délibération du conseil municipal dans la limite de 200 euros.
« IV. - La taxe ne peut être perçue dès lors que les biens de la section de commune ont été transférés à la commune en application des articles L. 2411-11 à L. 2411-12-2 ou L. 2411-13.
« V. - Un décret en Conseil d'État détermine les modalités d'application du présent article. » ;
3° Après l'article L. 2411-18, il est inséré un article L. 2411-18-... ainsi rédigé :
« Art. L. 2411-18-... - Le conseil municipal peut, par délibération, prononcer la dissolution d'une section de commune :
« - soit à la demande de la commission syndicale ou, lorsque la commission syndicale n'a pas été constituée en raison des 1° ou 3° de l'article L. 2411-5, de la moitié des membres de la section ;
« - soit lorsque la commission syndicale n'a pas été constituée en raison du défaut de réponse des électeurs, constaté dans les conditions prévues au 2° de l'article L. 2411-5 ;
« - soit lorsqu'il n'existe plus de membres de la section de commune. »
M. Patrick Chaize. - Selon le code général des collectivités territoriales, « constitue une section de communes toute partie d'une commune possédant à titre permanent et exclusif des biens ou des droits distincts de ceux de la commune ».
La complexité de leur régime juridique, dans la ligne droite d'un dispositif issu du droit médiéval, pose aujourd'hui de sérieuses difficultés à de nombreuses communes rurales. L'aspect de démocratie locale tend à s'estomper derrière des considérations de défense d'intérêts particuliers. C'est également une source de contentieux.
Cet amendement limite les cas de création d'une commission syndicale et instaure une taxe communale pour la gestion des sections de communes et permet au conseil municipal de prononcer la dissolution d'une section de communes selon des cas définis.
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. - Retrait : cet amendement pose un problème de constitutionnalité.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Même avis.
M. Patrick Chaize. - Je le maintiens car je tiens à ce que la question reste en débat.
Mme Cécile Cukierman. - Cet amendement caricature les sections de communes. Elles sont encore nombreuses à vivre dans nos départements et la proposition de loi de Jacques Mézard en 2012 ou 2013 a apporté des solutions.
Le débat serait à reprendre à cette aune.
L'amendement n°58 rectifié bis n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°53 rectifié ter, présenté par MM. Chaize, Brisson, Bascher, Milon, Vaspart, Saury et Pierre, Mmes de Cidrac et Deromedi et MM. D. Laurent, Mandelli et Savary.
Après l'article 25
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au premier alinéa de l'article 6 de la loi n°77-2 du 3 janvier 1977 sur l'architecture, après les mots : « collectivités locales », sont insérés les mots : « , des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, ».
M. Patrick Chaize. - Le présent amendement consacre la prise en compte, par les statuts des CAUE de la participation EPCI à fiscalité propre à ces associations.
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. - Avis favorable.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Sagesse.
L'amendement n°53 rectifié ter est adopté et devient un article additionnel.
Explications de vote
Mme Françoise Gatel . - Ces débats soulignent l'imperfection de la loi NOTRe et appellent à davantage de souplesse.
Les questions relatives aux communes nouvelles n'ont pas été abordées. Voilà pourtant l'exemple d'un texte qui permet sans imposer. Ce sera l'objet d'une proposition de loi à venir, dont l'objet sera de renforcer la proximité.
M. Bernard Delcros . - Cette proposition de loi, contrairement à son objectif, n'assouplira pas la loi NOTRe, elle introduira même des difficultés nouvelles. Ainsi de l'article 10, qui posera problème en zone de montagne, ou de l'exercice territorialisé des compétences ou encore du retrait de l'obligation de déclarer sa candidature dans les communes de moins de 1 000 habitants. Je ne voterai donc pas ce texte.
Mme Cécile Cukierman . - Nous voterons cette proposition de loi, bien qu'elle ne soit pas révolutionnaire, comme l'a dit le rapporteur, car elle assouplit la loi NOTRe. Elle ne lèvera toutefois pas tous les obstacles rencontrés dans nos territoires.
M. Didier Marie . - Notre impression initiale s'est hélas renforcée : ce texte est touche-à-tout et remet en cause des acquis de la loi NOTRe.
Vous dites qu'il faut marquer une pause institutionnelle, mais vous réintroduisez de la confusion, du désordre. Nous ne voterons pas ce texte.
M. François Bonhomme . - Je partage la philosophie de cette proposition de loi, qui panse les plaies ouvertes par la loi NOTRe. J'y vois la meilleure façon de procéder. Notre organisation administrative reste byzantine, il est temps de rationaliser - mais pas au sens où l'ont entendu les préfets ces dernières années, en torturant le fait communal. Ce texte apporte de la souplesse et de la respiration, nous le voterons.
À la demande du groupe LaREM, la proposition de loi est mise aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°123 :
Nombre de votants | 342 |
Nombre de suffrages exprimés | 302 |
Pour l'adoption | 178 |
Contre | 124 |
Le Sénat a adopté.
(Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains ; M. Philippe Bas, auteur de la proposition de loi, applaudit également.)
La séance est suspendue à 20 h 20.
présidence de M. Philippe Dallier, vice-président
La séance reprend à 21 h 50.
Revitalisation des centres-villes et centres-bourgs
M. le président. - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi portant Pacte national de revitalisation des centres-villes et centres-bourgs à la demande de la délégation aux collectivités territoriales et de la délégation aux entreprises.
Discussion générale
M. Rémy Pointereau, auteur de la proposition de loi . - Dès le mois de mai 2017, le Sénat s'est emparé d'un enjeu crucial pour nos territoires : la dévitalisation des centres-villes et des centres-bourgs. Sous l'impulsion du président Larcher et avec le soutien d'Élisabeth Lamure, présidente de la délégation aux entreprises, et de Jean-Marie Bockel, président de la délégation aux collectivités territoriales, nous nous sommes, avec Martial Bourquin, attaqués à cet enjeu de société qui transcende les clivages politiques.
Notre diagnostic, dressé en juillet 2017, est sans appel : les centres-villes et centres-bourgs meurent ; le taux de vacance commerciale atteint dans de nombreuses villes plus de 20 % jusqu'à 29 % à Calais et 26 % à Vierzon. Plus de 700 villes sont en grande difficulté, plusieurs centaines de bourgs également. C'est que nous avons autorisé beaucoup trop d'implantations commerciales : de 14 millions de m2 en France métropolitaine en 2010, on est passé à 17 millions en 2017, soit une hausse de 30 %. Ce triste état des lieux nous a conduits à auditionner près de 150 personnes, à écouter 4 000 élus qui se sont exprimés en ligne.
Vous êtes près de 240 sénateurs à avoir cosigné ce texte, ce dont je vous remercie ; vous n'êtes pas les seuls à le soutenir publiquement : l'association des maires de France, l'AMF, l'association des maires ruraux de France et l'association des petites villes de France, comme de nombreuses autres associations professionnelles, ont pris publiquement position pour. C'est la preuve que ce texte est très attendu.
Il n'a pas vocation à concurrencer le programme Action coeur de ville. Présenter un contre-projet n'est pas dans les pratiques sénatoriales. Ce texte prend le mal à la racine en s'attaquant aux causes profondes de la dévitalisation ; elles sont multiples mais ne nous y attardons pas pour en venir aux solutions car c'est cela l'urgence.
Ce texte structurel, qui vise à en finir avec la culture de la périphérie et réguler l'e-commerce, est ouvert à toutes les collectivités qui ont un coeur de ville ou de bourg méritant de s'inscrire dans le périmètre OSER. Il favorise le repeuplement des centres par la réduction du coût du logement et des normes et la préservation des services publics dans le centre ; il rénove et renforce le Fisac, qui a été complètement abandonné ; il régule les implantations en périphérie. Merci aux différents rapporteurs de l'avoir co-construit.
Nous présenterons des amendements pour lever les dernières inquiétudes sur son volet fiscal sans lequel rien n'est possible. Ce que nous proposons, c'est finalement un système de bonus-malus qui passe par l'instauration d'une contribution sur l'artificialisation des terres et une taxe sur la livraison liée à l'e-commerce. Pour cette dernière, nous avons mis au point une nouvelle méthode de calcul fondée sur un pourcentage du prix du bien commandé.
La seule question qui vaille est : quelle ville voulons-nous pour demain ? Une ville avec un coeur qui vit et qui bat ou une ville à l'américaine avec ses friches commerciales ? Adopter ce texte, c'est s'opposer à la fatalité ; c'est « oser » la revitalisation des centres-villes et des centres-bourgs ! (Applaudissements sur tous les bancs, à l'exception de ceux du groupe CRCE)
M. Martial Bourquin, auteur de la proposition de loi . - Après un travail de neuf mois, je veux, avec Rémy Pointereau, pousser un cri d'alarme et d'alerte : nos centres-villes et centres-bourgs meurent, leur identité s'efface. La dignité de leurs habitants en est affectée. La culture de la périphérie, de l'étalement urbain, a fait des dégâts considérables.
Quel est l'enjeu de cette proposition de loi ? Tout simplement, que le Sénat, défenseur des territoires, propose des mesures structurelles fortes en misant sur nos petites entreprises, qui font la prospérité de nos territoires. Il s'agit d'abandonner le correctif, pour faire du structurant. Le structurant, c'est comprendre que nos centres-villes se dévitalisent parce que nous avons déplacé les flux de consommation, de services et, donc, de population vers la périphérie quand centres-villes et centres-bourgs devraient maximiser l'ensemble des activités. Si nous y parvenons, nous aurons inversé la tendance.
Ce texte est fort d'un projet et d'un financement de ce projet tout à fait crédible. Il suffit de le vouloir. René Char disait : « Notre avenir n'est précédé d'aucun testament ». Ne soyons pas la génération d'élus qui aura laissé partir nos centres-villes et centres-bourgs. Soyons celle qui agit pour défendre la ville européenne, lieu des relations commerciales, des relations de service, de la démocratie et de la sociabilité depuis la cité grecque.
Le projet de loi ELAN est, non pas concurrent, mais complémentaire. Nous avons entamé ce travail bien avant que ce gouvernement ne se mette en place. Le Sénat, avec l'expertise qui est la sienne, avec plus de 4 000 personnes entendues, invite le Gouvernement à travailler à un mixte savant entre ELAN et OSER parce qu'il faut oser élan et avoir l'élan d'oser. (Applaudissements)
M. Jean-Pierre Moga, rapporteur de la commission des affaires économiques . - (Applaudissements sur les bancs du groupe UC) Nos centres-villes et centres-bourgs ne doivent pas rester en marge de la reprise économique et de la vague d'optimisme qui traverse notre pays. Il est d'ailleurs anormal qu'ils soient moins vivaces aujourd'hui dans une France de plus de 67 millions d'habitants qu'ils ne l'étaient en 1980 avec 55 millions d'habitants. Socialement, nous devons envoyer un signal fort à une France qui se sent oubliée. Rideaux métalliques des commerces fermés, premiers étages aux volets clos sont corrélés à la montée de la délinquance, des violences et des extrêmes.
Les centres-villes et centres-bourgs représentent plus que la somme des difficultés de logement, d'animation commerciale, ou de distorsions fiscales. L'enjeu est de civilisation et l'on ne saurait le traiter uniquement à coup de statistiques.
Ce texte a anticipé un tournant de la jurisprudence européenne : le juge européen, en janvier 2018, a fait prévaloir sur la liberté d'installation, un des piliers des traités européens, le droit d'un élu local des Pays-Bas à imposer l'implantation d'un magasin de chaussures en centre-ville. Rétrospectivement, on peut se demander si notre tendance à surtransposer les textes européens n'a pas fait de la France le pays où il est le plus facile de créer une grande surface...
Les réactions suscitées par ce texte sont enthousiastes, surtout sur sa partie normative non fiscale. Elle est une véritable bouffée d'oxygène pour les maires ruraux, pris en étau entre l'inertie des pouvoirs publics et l'inégalité de traitement qui leur est faite. La vélocité de l'action publique locale a diminué après les années 1990, on ne peut plus agir vite et simplement ; c'est indéniablement un facteur de découragement des élus. Répondons aux espoirs qu'ils placent en nous.
Des auditions, je retiens que la réussite de la revitalisation dépendra, d'abord, de la mise à disposition des territoires qui en ont le plus besoin de compétences d'ingénierie puis de l'avantage comparatif donné aux petits centres-villes en termes d'attractivité.
Sur l'article premier, la commission des affaires économiques a donné un socle à ce texte par un message rassembleur jusqu'au plan Action coeur de ville. La protection des centres-villes est érigée au rang de « motif impérieux d'intérêt général » pouvant justifier des dérogations au droit européen. Notre pays attend un desserrement de l'étau réglementaire : commençons par les centres-villes. Toujours à l'article premier, nous avons voulu mieux prendre en compte l'artisanat, l'animation culturelle et l'attractivité touristique. Nous avons également étendu le périmètre de la revitalisation pour les communes de moins de 10 000 habitants tout en conservant, pour les autres, le plafond de 4 % de la surface urbanisée.
L'article 7, sur l'intervention de l'ABF, a failli déclencher une polémique mais la sagesse sénatoriale l'a emporté. (« Bravos » et applaudissements sur les bancs du groupe UC) L'avantage fiscal Malraux serait opportunément recentré sur les petits centres-villes qui en ont le plus besoin.
Sur l'urbanisme commercial, notre rédaction ne remet pas en cause l'esprit du texte original. Notre approche est dominée par la confiance à l'égard des élus de terrain et la volonté de donner aux dispositifs toute leur capacité opérationnelle.
Cette proposition de loi donne des clés pour intervenir sur une pluralité de thématiques complémentaires. Nous sommes 230 à avoir cosigné ce texte. Je vous demande de le voter, pour nos communes, nos centres-villes et nos centres-bourgs. (« Bravos » et applaudissements sur les bancs du groupe UC)
M. Arnaud Bazin, rapporteur pour avis de la commission des finances . - Saluons le travail approfondi de Rémy Pointereau et Martial Bourquin sur ce texte, modèle de travail parlementaire, sur un problème bien identifié. Le pacte qu'ils proposent, contrairement au plan Action coeur de ville, s'inscrit dans la rupture. À un ciblage restreint déterminé par l'État, il préfère un périmètre étendu décidé par les collectivités. À la mobilisation d'outils contractuels agrégeant les financements de plusieurs partenaires, il ajoute l'utilisation d'une palette multiple de leviers, dont des mécanismes fiscaux. C'est, à ce titre, que notre commission des finances s'est vue déléguer l'examen de neuf articles au fond et de six articles pour avis.
La mobilisation du levier fiscal répond certes à des problèmes, mais ne peut constituer qu'un outil de second rang. L'implantation d'un commerce répond avant tout à l'existence d'un marché, d'une demande ; à la présence d'infrastructures, de services, de logements. Le levier normatif doit être la clé de voûte de la revitalisation sans compter que les finances publiques sont contraintes et le principe de l'égalité devant les charges publiques doit être respecté. À cet égard, la définition actuelle du périmètre OSER pose quelques difficultés juridiques.
La commission, consciente que la revitalisation des centres-villes et centres-bourgs exige des moyens financiers, a amendé cette proposition de loi en veillant à la proportionnalité des dépenses fiscales vis-à-vis de leur efficacité escomptée et à leur utilisation prudente pour ne pas alourdir la pression fiscale globale.
Notre commission des finances a supprimé l'article 3 mais c'est sur les articles 26 à 28 instituant de nouvelles taxes que se concentre le débat. Attention de ne porter préjudice à nos acteurs d'e-commerce. L'administration fiscale risque d'avoir du mal à calculer la distance parcourue par un livreur d'Amazon, moins celle d'un livreur de la Fnac ou de Darty...
Le rapport de l'IGF sera bientôt rendu public ; il complétera notre réflexion et les travaux que le Sénat a entamés de longue date sur la fiscalité numérique. (Applaudissements)
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur pour avis de la commission de la culture . - Il y a moins de deux ans, nous débattions, lors de l'examen de la loi relative à la liberté de la création, à l'avis conforme des architectes des bâtiments de France (ABF). Si l'on dépasse l'aspect parfois conflictuel que peut prendre la relation entre l'ABF et le maire, ce n'est pas un obstacle à l'aménagement local. Le fonctionnement des sites patrimoniaux remarquables et la délimitation des périmètres intelligents des abords reposent dorénavant sur des procédures transparentes et concertées, ce qui limite les risques de contentieux. Il existe en outre des instances de dialogue, la commission nationale du patrimoine et de l'architecture et ses déclinaisons régionales et locales, dont les attributions ont été revalorisées et dont la présidence a été confiée à des élus.
Le délai d'instruction des ABF est, en moyenne, de 22 jours, soit moins que les deux mois prévus. Un avis défavorable n'est rendu que dans 6,6 % des cas, taux réduit à moins de 0,1 % après dialogue. Les recours sont possibles et souhaitables, ils facilitent le rapprochement des points de vue ; leur banalisation faciliterait l'harmonisation des règles entre les ABF.
Certes, des relations conflictuelles subsistent avec certains maires. Les avis doivent être rendus plus prévisibles. La dernière instruction qu'a donné la ministre de la culture aux préfets de région est, à cet égard, de bon augure.
L'article 7 de la proposition de loi est le fruit d'un dialogue entre ses auteurs et les rapporteurs. Il constitue un bon compromis entre les enjeux financiers et patrimoniaux : l'avis conforme de l'ABF est préservé mais le maire sera écouté.
Pour finir, bravo aux auteurs de cette proposition de loi de s'attaquer à un mal qui gangrène tant de nos villes moyennes. (Applaudissements sur tous les bancs, à l'exception de ceux du groupe CRCE)
M. Jacques Mézard, ministre de la cohésion des territoires . - Cette proposition de loi porte sur un sujet majeur pour l'équilibre des territoires. Le Sénat est, une fois de plus, force de proposition sur l'aménagement du territoire, comme le veut l'article 24 de la Constitution, et je veux m'en réjouir.
Élu local depuis des décennies, j'ai présidé une agglomération de 57 000 habitants de 2001 à 2017. J'ai vite compris quelles étaient les difficultés et vu comment elles étaient aggravées par certaines réformes territoriales, notamment la fusion des régions...
Mme Sophie Primas. - Très bien !
M. Jacques Mézard, ministre. - Le Gouvernement n'entend pas bouleverser à nouveau la carte territoriale. Une chose est sûre : entre les métropoles, nous avons besoin de pôles de centralités, de villes moyennes et de petites villes qui ont la caractéristique d'être en osmose avec les territoires ruraux. Or, depuis les années 1970, aucun plan n'a été mis en place pour dynamiser nos villes petites et moyennes. Aucun ! L'urgence était donc de le faire.
J'entends bien : 222 villes retenues, ce n'est sans doute pas assez. Mais si j'avais retenu 700 villes, l'on m'aurait fait le même reproche. Nous avons beaucoup travaillé avec les associations d'élus pour aboutir à un texte qui ne prévoit pas la création d'une agence ou de structures administratives lourdes, qui rassemble des moyens existants : 1,5 milliard d'Action logement, 1 milliard en fonds propres de la Caisse des dépôts et 700 millions en prêts, 1 milliard de l'ANAH. Et il ne s'agit pas de recyclage. Pour les 222 communes retenues, et M. Leleux ne me dira pas le contraire, ce sera un vrai levier de dynamisation. Leurs caractéristiques sont similaires : vacance des commerces et des logements, activité économique entravée par des difficultés de mobilité.
Il faut agir, et vite. D'où le plan Action coeur de ville. Je ne vois pas en cette proposition de loi une concurrente mais un complément. (Marques de satisfaction) Vous le savez, j'ai l'habitude de tenir compte du travail parlementaire. Je vous propose d'intégrer certaines de vos dispositions dans la loi ELAN, à l'exclusion des dispositions fiscales car je ne suis pas ministre de l'économie et des finances...
Ce projet de loi a été rédigé dans la concertation avec les collectivités territoriales, y compris l'association des villes de France qui organise demain son congrès à Cognac où je serai présent, mais aussi avec les conseils départementaux et les conseils régionaux. J'étais la semaine dernière à Metz et à Lunéville pour lancer la première convention Action coeur de ville. J'y insiste, les opérations de revitalisation des territoires, dites ORT, s'adressent à toutes les villes, pas seulement aux 222 retenues dans le plan. Je note qu'elles sont très proches de vos opérations OSER, comme l'agence nationale dont vous envisagez la création se rapproche de l'agence nationale de la cohésion des territoires dont nous renforçons les compétences.
La proposition de loi comporte des mesures innovantes, notamment en matière d'urbanisme commercial. Là, les déséquilibres, réels, diffèrent selon les territoires. C'est pourquoi je n'ai pas été favorable à un moratoire général. Il faut des dispositifs adaptés aux spécificités locales.
Bref, faisons de la concomitance de l'examen de cette proposition de loi avec ELAN une force. Plusieurs propositions donnent aux élus la possibilité de mieux agir en matière d'urbanisme et de planification ; une ordonnance, je n'en raffole pas non plus, simplifiera et modernisera les SCOT. L'Assemblée nationale a supprimé le seuil de déclenchement de 1 000 m2 en matière d'urbanisme commercial mais je suis ouvert au débat. Autre piste à explorer : le fonctionnement des CDAC. Certains d'entre nous y ont siégé - à l'époque où nous pouvions cumuler... (Applaudissements sur les bancs des groupes RDSE, Les Indépendants, UC et Les Républicains) Beaucoup d'idées ont été expérimentées, sans trouver la bonne solution.
Notre méthode, c'est la concertation qui a montré des positions divergentes ; je suis donc ouvert à la discussion. C'est aussi le diagnostic et le Gouvernement a diligenté plusieurs études : un rapport sur la revitalisation commerciale des petites et moyennes villes, qui m'a été remis il y a plusieurs semaines ; un autre confié à l'IGF sur l'équité fiscale des commerces physiques et en ligne qui sera bientôt remis et un autre encore au CGEDD sur les villes moyennes qui est disponible. Reste à en tirer la substantifique moelle.
Avec le plan Action coeur de ville, 222 conventions seront signées d'ici septembre. Cela fera de bons exemples de mesures opérationnelles. Le Gouvernement accueille cette proposition de loi avec sagesse et, comme la sagesse est aussi une vertu du Sénat, je ne doute pas que nous trouverons des solutions ensemble. (Applaudissements)
M. Jean-Claude Requier . - Le Sénat est pleinement dans son rôle de représentant des collectivités territoriales. Depuis des siècles, le village incarne une certaine idée de la France, paisible et immuable, celui de la force tranquille.
M. Didier Guillaume. - Très bonne référence ! (Mme Cécile Cukierman s'esclaffe.)
M. Jean-Claude Requier. - Comme l'a montré le sociologue Jean-Pierre Le Goff, nous assistons à la « fin du village » alors que Tocqueville avait bien montré l'importance du lien social. Dans nos villes moyennes, on ne croise plus personne ; on ne se parle plus guère. Il n'y a donc pas à s'étonner qu'un un sentiment d'abandon y règne et que les extrêmes y progressent.
Cette transformation s'est faite sur des décennies, lentement, par l'action comme par l'inaction. La responsabilité en est d'ailleurs partagée par les élus et gouvernements successifs. Saluons l'engagement des élus locaux qui, malgré le carcan des normes, font tout pour faire vivre leurs territoires.
Cette proposition de loi, si elle n'est pas révolutionnaire, a le mérite de poser la question de la dévitalisation des centres-bourgs et d'avancer des solutions. Sa philosophie doit être saluée : réduction des normes, généralisation de l'expérimentation... L'uniformisation des pratiques des ABF serait bienvenue car les maires des petites villes, où il n'existe pas de service d'urbanisme, sont souvent désemparés.
Certains autres dispositifs sont plus contestables, comme le calcul d'une taxe sur le dernier kilomètre de livraison de biens du commerce électronique qui pénaliserait le monde rural. De même la taxe sur les Drive pourrait, en favorisant les livraisons depuis l'étranger, pénaliser la compétitivité française.
Membre de la commission des finances, je m'interroge sur la compatibilité avec la législation communautaire sur la TVA de certaines dispositions. Renommer le Fisac, c'est bien ; l'alimenter, c'est mieux.
D'autres mesures suscitent encore notre interrogation. L'opération de revitalisation des territoires (ORT) n'est pas réservée aux 222 villes visées par Action coeur de ville ; pourquoi ? L'accent doit être mis sur la mutualisation des moyens d'ingénierie.
Félicitons-nous du rôle joué par le Sénat. La dévitalisation n'est pas une fatalité. Le groupe RDSE, partageant l'objectif de rechercher un nouveau souffle, sera attentif à la tournure des débats.
Ce texte est une première étape pour y remédier, soit, en cette période, une sorte de bac blanc, préfigurant le grand oral à venir de Monsieur le Ministre. (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe SOCR)
Mme Noëlle Rauscent . - Cette proposition de loi est l'occasion d'aborder un sujet qui nous est cher. Depuis des années, le bâti se dégrade, la population diminue, l'activité économique baisse, les commerces disparaissent. Le numérique a bouleversé nos habitudes, et nous avons clairement encouragé tel ou tel développement commercial. La chambre des territoires doit se saisir de ce sujet et proposer des solutions concrètes.
Je salue le travail de fond de nos collègues ; transpartisan de surcroît. Obtention d'AEC, lutte contre le départ des services publics, rôle et composition des commissions départementales d'aménagement commercial (CDAC), expérimentation... Ces dispositions vont dans le bon sens. D'autres sont à préciser. ORT et OSER se ressemblent.
Ce dernier ne se limite pas aux 222 territoires éligibles, comme l'affirment certains, mais pourra être étendu et mobilisé par toute collectivité souhaitant entrer dans la démarche.
À l'Assemblée nationale, l'article 54 a été enrichi par des mesures similaires à celles contenues dans ce texte. Nous marchons ensemble dans la bonne direction ! Unissons nos forces, pour nos villes et nos territoires ! Plutôt que de multiplier les véhicules législatifs, enrichissons la navette, pour dégager le meilleur pour nos villes et territoires !
Mme Michelle Gréaume . - La situation des centres-villes et centres-bourgs se dégrade ; une action transversale est nécessaire pour enrayer le départ des services publics, le recul de l'offre culturelle et la baisse de la population. La métropolisation n'est pas étrangère au phénomène qui creuse l'écart entre centre-ville, hors de prix, et périphérie.
L'objectif est de protéger les centres-villes et centres-bourgs, de lutter contre la vacance de logements et de recréer du lien social, sans oublier les enjeux écologiques, mitage, étalement urbain, etc.
Le texte va à l'opposé de la logique recentralisatrice du programme Action coeur de ville ; il laisse la main aux élus locaux. Il faut le reconnaître : il est parfois plus facile de construire en périphérie que de densifier au centre...
Sur le fond, nous partageons la plupart des propositions de ce texte, ainsi de la création d'une Agence nationale des centres-villes et centres-bourgs, ou de la création de périmètres de sauvegarde.
Nous sommes favorables à ce que Drive et entrepôts soient davantage mis à contribution, nous soutenons de même une fiscalité qui pénalise l'étalement urbain. Nous nous réjouissons que l'article 3 et l'article 12 aient été supprimés en commission.
Nous restons opposés à la simplification des normes environnementales et d'accessibilité. Nous sommes satisfaits que la commission des affaires culturelles ait rétabli l'avis conforme des architectes des bâtiments de France.
Dans un sondage récent, les habitants insistent sur la piétonisation des rues, les commerces alimentaires et les transports en commun, sujet qui n'est pas évoqué ici, hélas. Or la mobilité aurait pu être abordée par cette proposition.
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Nous voterons ce texte, comme un signal envoyé au Gouvernement sur l'attention à porter aux centres-villes et centres-bourgs, en vue de la discussion de la loi ELAN. (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE et sur plusieurs bancs du groupe SOCR)
M. Xavier Iacovelli . - Nos villes et villages affrontent un danger commun : la dévitalisation. C'est une urgence, à laquelle répond ce pacte national.
Cette proposition de loi n'a pas souffert de la précipitation : c'est l'aboutissement d'un riche travail mûri et posé, au service de l'intérêt général. Avec 230 cosignataires, ce texte révèle l'intérêt du Sénat, sa raison d'être. Que ses auteurs en soient remerciés.
L'intérêt général méritait ce dialogue et cette convergence des groupes politiques. Je remercie les auteurs, Martial Bourquin et Rémy Pointereau pour avoir adopté une méthode de travail qui a rendu possible cette prouesse.
Près de 4 000 élus locaux ont été consultés et c'est heureux, car ce sont eux qui font vivre nos territoires.
Les territoires OSER répondront à la question de l'attractivité et de la préservation du lien social. Cette proposition de loi fait confiance aux élus locaux : la sauvegarde de nos centres ne doit pas dépendre de la foudre jacobine.
Elle concerne de nombreux centres-villes et centres-bourgs. Le Gouvernement en a choisi arbitrairement 222 : c'est insuffisant. L'heure n'est plus à l'expérimentation. Elle est à l'action réfléchie : c'est ce que porte cette proposition de loi.
M. Roland Courteau. - Très bien !
M. Xavier Iacovelli. - La ruralité et les territoires d'outre-mer participent de la République, ne l'oublions pas : c'est le sens des amendements que nous présenterons. Je défendrai pour ma part la consultation des chambres de commerce et d'industrie en amont des procédures d'urbanisme.
Avec OSER, nous relevons le défi du développement territorial. Faites confiance aux élus locaux, Monsieur le Ministre. Vous avez annoncé un premier pas en inscrivant dans la loi ELAN une partie de ces principes. Soyez au rendez-vous, Monsieur le Ministre ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)
M. Claude Malhuret . - (Exclamation sur les bancs du groupe CRCE) La dévitalisation des centres-villes n'épargne aucune région de France. Cette proposition de loi part d'un constat sans appel, d'une réalité vécue par les élus et les habitants.
« Ne laissons pas s'éteindre les dernières lumières de la ville » alertaient les présidents de trois fédérations de commerce dans Les Échos récemment. Si nous n'agissons pas aujourd'hui, les enseignes clignotantes des grandes surfaces à la périphérie des villes remplaceront demain nos clochers, nos pharmacies, nos librairies...Des trompe-l'oeil peints sur la tôle grise des boutiques « à vendre » feront figure de cache-misère, tandis que les services publics s'éloigneront toujours plus des habitants, faisant de nos villes et villages des cités fantômes.
La France est l'un des pays d'Europe les plus pourvus en centres commerciaux. Le taux de vacances commerciales dans les centres-villes augmente d'un point par an, pendant que les zones commerciales s'étendent en périphérie, au détriment des terres agricoles et des zones naturelles. Aussi, est-il temps de stopper l'artificialisation du territoire. Le foisonnement des normes malheureuses, subsidiaires, décourage les initiatives et affaiblit les normes nécessaires. Notre groupe a déposé un amendement inscrivant dans la loi l'objectif de zéro artificialisation nette du territoire d'ici 2025.
Saluons l'initiative gouvernementale que constitue le programme Action coeur de ville, qui fera 222 heureux. Ce pacte le complète : incitation, régulation, responsabilités partagées des acteurs, le tout appuyé sur les élus locaux.
La création d'une agence nationale fournira l'ingénierie et les compétences techniques nécessaires à la revitalisation. Le reste du texte renforce la politique du logement et d'urbanisme afin de réorienter les flux économiques et financiers vers les centres. La mise sous convention OSER pourrait en outre refuser une norme aux conséquences disproportionnées.
Attractivité économique et richesse patrimoniale sont en outre rendues davantage compatibles.
La vitalité des centres-villes est au coeur de nos préoccupations. Aussi, les membres du groupe Les Indépendants voteront-ils cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Indépendants et Les Républicains)
M. Louis-Jean de Nicolaÿ . - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Il faut appréhender ces questions au prisme d'une démarche globale. Il faut agir en décloisonnant, en misant sur la complémentarité, en faisant coopérer les acteurs.
Avec ces 31 articles, le Sénat s'attaque résolument aux problèmes de fond, aux causes structurelles, et propose aux élus locaux des outils innovants susceptibles d'enclencher un cercle vertueux. J'en remercie les auteurs et salue le travail réalisé par les délégations aux collectivités territoriales et aux entreprises.
Le programme OSER s'adresse à tous les territoires ; les ingrédients d'une fiscalité innovante sont réunis pour favoriser la réhabilitation des centres-villes et l'implantation d'activités ; sur l'avis conforme de l'ABF, une solution a été trouvée en commission.
La création de l'agence de revitalisation que les auteurs proposent prouve que nos réflexions convergent, puisque figurait, l'année dernière au sein de notre rapport avec le Président Maurey, cette idée de créer un guichet unique au service des territoires ruraux et périurbains pour répondre à leurs besoins en ingénierie et en conseils.
Pour inciter l'exécutif à rationaliser les moyens, l'agence proposée par cette proposition de loi aura vraisemblablement vocation à s'intégrer dans l'ANCT.
Le seul plan Action coeur de ville ne suffit pas ; il est temps d'engager un dialogue constructif avec les territoires et de faire preuve d'audace. Il faut OSER, il faut soutenir ce texte ! (« Bravos » et applaudissements au centre et à droite)
M. Rémy Pointereau. - Très bien !
Mme Françoise Férat . - (Applaudissements sur les bancs du groupe UC) Monsieur le Ministre, le 27 mars, vous nous avez présenté le plan Action coeur de ville qui bénéficiera à 222 villes moyennes.
La recomposition sociale des territoires a en effet été puissante : commerce en ligne, effets de la mondialisation, émergence des métropoles, développement de la grande distribution, puis du commerce en ligne... Les effets ont été puissants.
La baisse de l'activité commerciale des centres-villes est préoccupante : ils ne représentent plus que 30 %. Entre 1994 et 2009, les grandes surfaces ont crû de 60 %, alors que la consommation finale des ménages augmentait de 38 % seulement.
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Pour un chiffre d'affaires de 250 millions d'euros, il faut 250 boutiques ; mais 45 grandes surfaces et seulement un entrepôt. Les boutiques emploieront 420 personnes, la distribution 170 et le e-commerce, 50 ! On marche sur la tête !
Cette proposition de loi prend les enjeux à bras-le-corps et notamment les vacances commerciales et celle des logements. Il y manque toutefois trois éléments, qui ne relèvent pas du domaine législatif.
D'abord, l'État doit reprendre la main et muscler l'aménagement des territoires, en retrouvant les vertus du Plan et de la Datar - Délégation interministérielle à l'aménagement du territoire et à l'attractivité régionale. Il faut un État stratège, régulateur et aménageur !
Puis, les commerçants et les artisans doivent s'adapter aux nouvelles habitudes des consommateurs, avec l'aide de leurs organisations professionnelles. Enfin, les consommateurs doivent devenir des « consommacteurs » et se montrer responsables. Nos emplettes sont nos emplois, dit-on.
Le groupe UC soutient cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe UC et sur quelques bancs du groupe Les Républicains)
M. Max Brisson . - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) En 1971, la Datar présentait comme « le scénario de l'inacceptable » une France des années 2000 caractérisée par la concentration autour de quelques zones de forte polarisation. N'y sommes-nous pas ? Les coeurs des centres-villes et les centres-bourgs furent longtemps des lieux de vie et de partage. On y naissait, grandissait, produisait, négociait, échangeait. Les bâtiments que nous considérons comme patrimoniaux étaient des lieux de vie en perpétuelle transformation.
Aujourd'hui, la production y a disparu, la réparation n'y a plus droit de cité, le commerce recule, les services se retirent, la population s'en éloigne et celle qui reste se paupérise. Or quand les hommes se retirent, les pierres finissent par tomber...
Cette proposition de loi lutte contre la métropolisation, car la France ne peut devenir une suite de 14 Singapour, comme l'a dit Erik Orsenna lors de son audition par notre commission de la culture.
Halte à la « Start-up nation » ! Je soutiens cette proposition de loi, globale, transversale et novatrice, qui renverse une tendance certes lourde mais pas irréversible. Girondine et décentralisatrice, elle lutte contre un jacobinisme centralisateur dont nous avons souffert. (Applaudissements sur les bancs du groupe UC)
Elle déroge aux règles car il y a urgence. Appliquer partout les mêmes règlements est absurde. Les axes de reconquista que propose cette proposition de loi sont les bons : déroger, protéger et encourager. La variété des situations, comme celles des 258 variétés de fromages qu'évoquait le général de Gaulle, y appelle.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. - Un grand décentralisateur !
M. Max Brisson. - L'État doit s'y inscrire non pas dans une logique de contrôle, mais de soutien aux bonnes initiatives. Elles sont proposées en nombre dans ce texte. (Applaudissements sur les bancs des groupes UC et Les Républicains)
M. Didier Rambaud . - Avec cette proposition de loi, nous reprenons des réflexions anciennes, qui ne nous ont jamais empêchés de défigurer nos centres-villes...
Notre commission des finances a déploré l'absence d'études d'impact, comme la taxe sur les livraisons, qui ne sera pas applicable. Différentes niches fiscales proposées complexifieraient le droit existant. Et on sait à qui de telles niches profiteraient...
J'ai cosigné cette proposition de loi, comme un appel. Il faut d'abord prendre le temps d'expertiser ses normes. Ce sera l'objet du projet de loi ELAN, et notamment de son article 54.
Le groupe LaREM vous fait confiance, Monsieur le Ministre. (Quelques applaudissements)
Mme Sonia de la Provôté . - (Applaudissements sur les bancs du groupe UC) Le pacte national de revitalisation poursuit un objectif précis : afin de renforcer l'attractivité des centres-villes et des centres bourgs, il propose un ensemble d'outils structurels pour lutter contre cette déprise des centres qui n'est pas une fatalité mais bien le résultat d'erreurs et d'une certaine passivité ou impuissance.
Les grandes surfaces de périphérie se sont étendues deux fois plus vite que la consommation ! Entre 600 et 700 villes sont en situation d'urgence. Il nous faut retrouver une culture de la centralité, autour des commerces notamment.
La tendance actuelle au retour des consommateurs en centre-ville doit être accompagnée pour être durable. Le SCOT doit être mobilisé à cet effet. Quant au rôle des ABF, l'article 7 simplifie la prise en compte de leurs avis. Une solution d'équilibre est de préserver les règles existantes tout en renforçant le dialogue avec les élus. C'est ce qu'a proposé la commission de la culture, sous la présidence de Catherine Morin-Desailly (Marques d'appréciation sur les bancs du groupe UC)
Le patrimoine est lui-même un atout touristique, et donc économique, majeur !
Cette proposition de loi fait consensus, avec 230 cosignataires. Elle est perfectible, certes. Je vous invite à y participer largement pour la rendre efficiente. (Applaudissements sur les bancs du groupe UC et sur quelques bancs du groupe Les Républicains)
M. Patrice Joly . - (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR) La France se fracture. C'est le réseau si dense de nos villes petites et moyennes qui flanche. Leur perte d'activité diminue aussi les recettes fiscales. Et, comme les centres-villes et centres-bourgs participent à l'image de notre pays, ils concourent à son attractivité. Or le malaise se répand, au-delà des zones rurales, y compris à proximité des métropoles.
C'est toute une façon de vivre qui est remise en cause ! À Nevers, plus de 10 000 habitants sont partis en cinquante ans. Les Français sont inquiets de ce déclin ; 70 % d'entre eux sont préoccupés par la désertification des centres-villes.
Le plan que vous avez lancé est une première réponse, mais plus de 400 villes en sont écartées. D'où cette proposition de loi. Ses mesures fiscales en faveur des collectivités territoriales et des ménages sont équitables. Je regrette à cet égard la suppression par la commission des finances de son article 3.
Le volet fiscal de ce texte est aussi essentiel pour rééquilibrer les coûts entre les centres-villes et leur périphérie et dégager des ressources au profit des collectivités. L'article 3 de la proposition de loi malheureusement supprimé par la commission des finances proposait justement d'alléger la fiscalité sur les logements dans les périmètres des conventions OSER. Car la reconquête des centres-villes induit à la fois la construction de logements nouveaux, mais aussi la rénovation des locaux d'habitation existants pour permettre l'installation d'une population nouvelle sans la désolvabiliser par des coûts excessifs.
Les mesures fiscales rétablissant une concurrence loyale avec le e-commerce sont également bienvenues.
Il en va de l'attractivité de notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)
M. Jean-Raymond Hugonet . - La dévitalisation des centres-villes est un fléau, contre lequel il est urgent d'agir. Le commerce de proximité est le poumon de nos communes : quand un rideau métallique se baisse, c'est un peu de sa vie qui disparaît.
Certaines collectivités se donnent déjà les moyens d'agir contre ce cercle vicieux. Il en est ainsi du conseil régional d'Ile-de-France, dont le programme de renouvellement urbain, mis en place dès janvier 2017, accompagne les élus locaux dans 180 projets vitaux, qui vont bientôt sortir de terre.
Je suis très heureux que le Sénat, toujours attentif à la vie des territoires et aux réalités de terrain, ait pris l'initiative.
L'article 24 de la Constitution - qu'il n'est pas prévu de modifier... (Sourires)
M. Jean-François Husson. - Pas encore !
M. Jean-Raymond Hugonet. - ... lui donne un rôle majeur en la matière. Pour paraphraser le fameux mot de Cambronne, les centres-villes se meurent, mais le Sénat ne se rend pas ! (« Bravos » et applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC)
Le patrimoine doit être protégé, oui, mais pas au détriment des Français. Nous ne voulons pas faire de notre pays, si magnifique soit-il, un musée ! Il est donc urgent de soumettre les ABF à une seule et même doctrine, pour arrêter certains caprices locaux. Je me réjouis du compromis intelligent trouvé en commission de la culture.
Il ne s'agit nullement de cliver, mais, dans le respect de notre patrimoine, de tenir compte avec discernement des nécessités de revitalisation de l'habitat et des activités économiques et sociales, ainsi que des capacités financières des collectivités. Il y a urgence. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC)
M. Jacques Mézard, ministre. - Je me réjouis que le constat fasse consensus. Le mot de jacobinisme ne me fait pas peur ; mais le plan Action coeurs de villes que nous avons mis en place n'est pas jacobin ! L'État ne fait que coordonner et faciliter la réalisation des projets des collectivités.
Vous dites qu'un milliard par an, sur 222 villes, c'est peu ! Je suis prêt à recevoir des leçons, mais le plan centres-bourgs du dernier quinquennat prévoyait 40 millions d'euros pour six ans et 55 communes...
J'entends que 222 centres-villes, cela peut paraître insuffisant ; mais je me réjouis d'avoir donné satisfaction à un certain nombre d'intervenants de ce soir. La fiscalité est un sujet difficile sur lequel il reste beaucoup de concertation à faire.
La discussion générale est close.
Discussion des articles
ARTICLE PREMIER
M. Jean-Marie Bockel . - Je salue à mon tour le travail conjoint et transpartisan de Rémy Pointereau et Martial Bourquin, en association avec les délégations du Sénat. Les auditions, déplacements et 4 000 contributions reçues ont enrichi ce texte, assurément.
Le plan du ministre est à saluer, mais rien ne nous empêche de l'enrichir. Cet article définit les centres-villes et centres-bourgs sur des critères objectifs et pose les bases des OSER, distinctes des ORT en ce qu'elles sont dans la main des élus locaux, au lieu que les ORT répondent à une logique de sites prioritaires - et les OSER embrasseront un ensemble de mesures diverses, de la fiscalité au logement en passant par les équipements publics, ce qui autorisera une action cohérente.
M. Maurice Antiste . - Les territoires d'outre-mer sont concernés par la dévitalisation des centres-villes et centres-bourgs. En dix ans, la population a baissé de 6,7 % en Martinique et 2,8 % en Guadeloupe.
Des mesures ont certes été prises, je pense au programme Action coeur de ville, à la convention signée en 2017 pour revitaliser Saint-Pierre de la Martinique... Les outils pour y remédier existent. C'est une urgence, notamment dans le nord de la Martinique, où les services sanitaires et les services publics en général disparaissent - et où l'on assiste à une dévitalisation de grande ampleur.
Ce texte complète les outils actuels, en articulant bien le développement et la préservation du patrimoine architectural - c'est un atout essentiel, je pense à la Maison de la Bourse de Saint-Pierre, joyau de l'architecture créole. Notre richesse patrimoniale constitue une composante essentielle de notre identité antillaise, elle est aussi déterminante pour l'attractivité économique et touristique de nos territoires : ce texte en prend la mesure, c'est important.
Mme Viviane Artigalas . - La désertification de nos centres-villes et centres-bourgs est une préoccupation grandissante sur nos territoires. La loi du 18 juin 2014 a étendu la zone d'intervention de la politique de la ville aux zones dégradées ; le plan Action coeur de ville, lancé fin 2017, prolonge cette logique mais son périmètre est étroit. La présente proposition de loi l'élargit opportunément, tout en précisant suffisamment les critères pour éviter la dispersion des moyens.
Dans les Hautes-Pyrénées, seules Tarbes et Lourdes entrent dans le programme ORT ; avec OSER, d'autres villes moyennes seront prises en compte.
Je ne doute pas que le Sénat permettra aux élus locaux de mener enfin une vraie politique de revitalisation.
M. le président. - Je vous propose de prolonger nos travaux jusqu'à minuit et demi. Il en est ainsi décidé.
Mme Élisabeth Lamure . - Le défi de la revitalisation ne sera pas relevé sans les entreprises. Je me félicite que notre délégation aux entreprises se soit engagée dans ce travail. Ce texte facilite l'installation de nouveaux commerçants, le déploiement du très haut débit, le développement des baux commerciaux, il aménage la fiscalité, les loyers commerciaux, exonère de Tascom et accompagne le petit commerce avec le FISAC...
Toutes ces mesures forment le pacte national auquel j'apporte tout mon soutien. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)
Mme Catherine Conconne . - Je remercie les auteurs de cette proposition de loi, qui offre une boîte à outils aux élus locaux pour lutter contre la mort - oui la mort de nos centres-villes, désignés par des affiches « à vendre » qui pâlissent à vue d'oeil. Oui, les habitudes commerciales ont changé, les services publics, pour plus d'espace, partent en périphérie et laissent de véritables friches urbaines en centre-ville. Mais nous savons nous mobiliser, les plus de 200 signatures portées à ce texte le démontrent !
Ce texte fait mentir ceux qui estiment que le Sénat ne sert à rien, qu'il ne serait qu'un machin inutile à supprimer ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR et sur quelques bancs du groupe Les Républicains)
En Martinique, cette proposition de loi est fort bienvenue. L'article premier plante le décor, fixe un cadre clair, établit les bases d'une justice qui commande de faire contribuer les GAFA, responsables de la fermeture de la dernière librairie dans une ville. Voilà une politique de gauche, qui redistribue les revenus ! (M. Martial Bourquin applaudit ; exclamations à droite.)
Mme Marie-Noëlle Lienemann . - Ce texte est essentiel pour nos territoires menacés par la métropolisation et parce que si nous ne faisons rien, nous perdrons une partie de l'âme de notre pays.
Le bilan des actions de rénovation de nos centres depuis les années 1970 est mitigé : la mixité sociale et la mixité générationnelle n'ont pas fonctionné, les couples avec enfants ne choisissent plus d'habiter dans les bâtiments anciens et souvent sombres des centres-bourgs, leur préférant des constructions souvent neuves, en périphérie.
Il faut pour y remédier renforcer l'accession sociale à la propriété dans l'ancien, mais cela exige une reconfiguration du bâti, mixte entre modernité et tradition - cela supposera de la compréhension de la part des ABF et de la créativité de la part des architectes. Un outil pour y parvenir : un prêt social location-accession repensé pour l'ancien.
M. le président. - Amendement n°21 rectifié, présenté par M. Montaugé et les membres du groupe socialiste et républicain.
Alinéa 1
Remplacer les mots :
centres-villes et centres-bourgs
par le mot :
communes
M. Franck Montaugé. - Je félicite à mon tour Martial Bourquin et Rémy Pointereau. On ne peut dire que rien n'a été fait pour les centres-villes et les centres-bourgs depuis trente ans, Monsieur le Ministre, sauf à considérer que les élus locaux ont travaillé d'arrache-pied pour rien...
L'exposé des motifs indique clairement que les OSER sont ouvertes à toutes les communes, mais le dispositif du texte ne mentionne ensuite plus que des centres-villes et des centres-bourgs. Pour éviter toute ambiguïté, et assurer que toutes les communes, y compris rurales, seront éligibles, cet amendement remplace « centres-villes et des centres-bourgs » par « communes ».
M. Jean-Pierre Moga, rapporteur. - La question est de savoir si toutes les communes sont concernées par les conventions OSER. Or la réponse est oui : l'amendement est donc satisfait. Retrait ?
M. Jacques Mézard, ministre. - Avis défavorable. Monsieur Montaugé, la ville d'Auch est retenue dans le programme Action coeur de ville, j'imagine que vous n'y voyez pas d'inconvénient. Si l'on étend le dispositif à toutes les communes de France, on s'écarte de son esprit... Je précise que j'ai simplement dit qu'aucun plan n'avait été lancé depuis quarante ans pour les villes moyennes !
M. Franck Montaugé. - Je persiste, il y a alors une ambigüité dans l'exposé des motifs du texte, voire une contradiction.
M. Xavier Iacovelli. - Cette nouvelle formulation ne garantira pas que les communes rurales soient ciblées...
L'amendement n°21 rectifié n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°40, présenté par M. Malhuret et les membres du groupe Les Indépendants - République et Territoires.
Alinéa 3, seconde phrase
Compléter cette phrase par les mots :
et de la commission du développement économique de la région
M. Claude Malhuret. - Cet amendement propose un avis consultatif de la commission du développement économique de la région sur la décision d'engager une OPER.
La région détient en effet le chef de filât sur les questions économiques et définit les orientations en matière d'aides aux entreprises, de soutien à l'internationalisation, d'aides à l'investissement immobilier et à l'innovation des entreprises. En outre, elle donne les orientations en matière d'attractivité du territoire régional et de développement de l'économie solidaire.
Depuis la loi NOTRe de 2015, la région est seule compétente pour définir les aides et les régimes d'aides générales.
M. Jean-Pierre Moga, rapporteur. - La commission n'a pas souhaité alourdir le texte ; les régions sont associées au stade des conventions de sauvegarde, de toute façon... Avis défavorable.
M. Jacques Mézard, ministre. - Moins il y a de contraintes administratives, mieux ce sera en effet.
De plus, vous impliqueriez non pas la région, mais la commission du développement économique de la région dans les affaires des autres niveaux de collectivités... Retrait ou avis défavorable.
L'amendement n°40 est retiré.
M. le président. - Amendement n°49 rectifié, présenté par Mme Bonfanti-Dossat, MM. Brisson et Courtial, Mmes Lherbier, Puissat et Deromedi, MM. Savary et Revet, Mmes Garriaud-Maylam et Gruny, M. Babary, Mme Delmont-Koropoulis, MM. Lefèvre et Bonne, Mme Bruguière, MM. H. Leroy, Perrin et Raison, Mmes Chauvin et Lassarade, M. Pierre, Mme Lanfranchi Dorgal, MM. Laménie, B. Fournier et Bonhomme, Mme Thomas et M. Daubresse.
Alinéa 3, seconde phrase
Compléter cette phrase par les mots :
et d'une consultation du conseil départemental
Mme Christine Bonfanti-Dossat. - Certains départements comme le mien participent à la revitalisation des centres-bourgs. Ils ont en effet une connaissance humaine de leur territoire et de ses problématiques. Les consulter est de bon sens.
M. Jean-Pierre Moga, rapporteur. - À nouveau, n'alourdissons pas le texte : retrait ?
M. Jacques Mézard, ministre. - Même avis : s'il faut l'avis de toutes les collectivités systématiquement, on n'en sort pas... Et si l'avis est négatif ? Laissons les acteurs s'organiser librement. Avis défavorable.
M. René-Paul Savary. - L'alinéa 3 dispose bien que l'avis du préfet est recueilli... Qui va financer ? Le département marche sur deux pieds : la solidarité des hommes et celle des territoires. Il serait donc légitime que les départements soient autour de la table. Le schéma départemental est bien co-présidé par le préfet et le président du conseil départemental, que je sache. Sur l'aménagement numérique, les régions ont pris les choses en main, mais le schéma départemental est toujours géré par les départements. Ne mettons pas de côté les acteurs de proximité.
M. Max Brisson. - Le département a la connaissance, donc. Avec la loi NOTRe, on a vu que les communes et les instances étaient en phase avec lui. Il avait même le chef de filât pour la solidarité territoriale... J'aurais bien voté cet amendement, si son auteur, pour satisfaire le rapporteur, ne s'apprêtait pas à le retirer...
M. Pierre Louault. - J'avais, pour ma part, compris que départements et régions étaient intégrés à la réflexion.
Mme Françoise Gatel. - N'oublions pas la diversité des territoires : certains départements n'accompagnent pas du tout les communes. Une commune qui a un projet de revitalisation travaillera naturellement avec le département. Mais si celui-ci ne met pas un sou, pourquoi lui demander son avis ?
Mme Sophie Primas. - Je fais intégralement mien ce propos.
Mme Françoise Férat. - Ce débat me surprend. Un amendement que j'ai déposé en commission a été accepté. Le département, acteur essentiel de l'aménagement du territoire, est associé. Ce problème me paraissait avoir été réglé.
Mme Christine Bonfanti-Dossat. - Je retire cet amendement.
M. Jean-Pierre Moga, rapporteur. - L'article premier dispose effectivement, à son alinéa 8 que si l'OSER est signée par la commune et le préfet, toute autre collectivité territoriale peut y être associée.
L'amendement n°49 rectifié est retiré.
M. le président. - Amendement n°22 rectifié bis, présenté par Mme Conconne et les membres du groupe socialiste et républicain.
Alinéa 7
Compléter cet alinéa par les mots :
et antérieur à 1980 en outre-mer
Mme Catherine Conconne. - Cet amendement est de bon sens : il prend en compte nos territoires, sans oublier ceux éloignés du centre. L'urbanisation des départements d'outre-mer est récente et s'est faite cahin-caha. Saint-Pierre, par exemple, a été détruite en 1902. Plus aucun bâtiment antérieur au XXe siècle ! D'autres centres-villes, en métropole, ont connu le même sort. Je propose donc de faire référence non pas aux bâtiments antérieurs au XXe siècle, mais à 1980.
M. Jean-Pierre Moga, rapporteur. - Certes, les catastrophes naturelles fragilisent le bâti outre-mer plus fréquemment qu'en métropole. Avis favorable.
M. Jacques Mézard, ministre. - Sagesse.
L'amendement n°22 rectifié bis est adopté.
M. le président. - Il reste 43 amendements.
Prochaine séance, aujourd'hui, jeudi 14 juin 2018, à 10 h 30.
La séance est levée à minuit trente.
Jean-Luc Blouet
Direction des comptes rendus
Annexes
Ordre du jour du jeudi 14 juin 2018
Séance publique
À 10 h 30
Présidence : Mme Marie-Noëlle Lienemann, vice-présidente Secrétaires :MM. Michel Raison et Joël Guerriau
1. Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi pour un nouveau pacte ferroviaire.
Rapport de M. Gérard Cornu, rapporteur pour le Sénat (n°560, 2017-2018).
Texte de la commission mixte paritaire (n°561, 2017-2018).
2. Suite de la proposition de loi portant Pacte national de revitalisation des centres-villes et centres-bourgs (n°460, 2017-2018).
Rapport de M. Jean-Pierre Moga, fait au nom de la commission des affaires économiques (n°548, 2017-2018).
Rapport d'information de MM. Rémy Pointereau et Martial Bourquin, fait au nom de la délégation aux collectivités territoriales et de la délégation aux entreprises (n°526, 2017-2018).
Avis de M. Jean-Pierre Leleux, fait au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication (n°500, 2017-2018).
Avis de M. Arnaud Bazin, fait au nom de la commission des finances (n°543, 2017-2018).
Texte de la commission (n°549, 2017-2018).
De 14 h 30 à 18 h 30
Présidence : Mme Catherine Troendlé, vice-présidente
3. Proposition de loi tendant à imposer aux ministres des cultes de justifier d'une formation les qualifiant à l'exercice de ce culte (n°30, 2017-2018).
Rapport de Mme Françoise Gatel, fait au nom de la commission des lois (n°537, 2017-2018).
Texte de la commission (n°538, 2017-2018).
À 18 h 30 et le soir
Présidence : Mme Catherine Troendlé, vice-présidente M. Thani Mohamed Soilihi, vice-président
4. Suite de la proposition de loi portant Pacte national de revitalisation des centres-villes et centres-bourgs (n°460, 2017-2018).
Analyse des scrutins publics
Scrutin n°123 sur l'ensemble de la proposition de loi relative à l'équilibre territorial et à la vitalité de la démocratie locale
Résultat du scrutin
Nombre de votants :342
Suffrages exprimés :302
Pour :178
Contre :124
Le Sénat a adopté
Analyse par groupes politiques
Groupe Les Républicains (145)
Pour : 143
Abstention : 1 - M. Max Brisson
N'a pas pris part au vote : 1 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat
Groupe SOCR (77)
Contre : 77
Groupe Union Centriste (50)
Pour : 6 - Mmes Annick Billon, Françoise Gatel, Sophie Joissains, MM. Nuihau Laurey, Pierre Médevielle, Mme Lana Tetuanui
Contre : 26
Abstentions : 16 - MM. Jean-Marie Bockel, Philippe Bonnecarrère, Yves Détraigne, Mmes Françoise Férat, Jocelyne Guidez, MM. Claude Kern, Jean-François Longeot, Jean-Claude Luche, Hervé Marseille, Hervé Maurey, Jean-Marie Mizzon, Mme Catherine Morin-Desailly, M. Gérard Poadja, Mmes Sonia de la Provôté, Denise Saint-Pé, Dominique Vérien
N'ont pas pris part au vote : 2 - M. Vincent Delahaye, Président de séance, M. Olivier Cadic
Groupe RDSE (22)
Abstentions : 22
Groupe LaREM (21)
Contre : 21
Groupe CRCE (15)
Pour : 15
Groupe Les Indépendants (11)
Pour : 11
Sénateurs non inscrits (6)
Pour : 3
Abstention : 1 - Mme Évelyne Perrot
N'ont pas pris part au vote : 2 - Mme Claudine Kauffmann, M. Stéphane Ravier
Composition d'une CMP
Les représentants du Sénat à la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à garantir la présence des parlementaires dans certains organismes extérieurs au Parlement et à simplifier les modalités de leur nomination sont :
Titulaires :
- M. Philippe Bas
- M. Loïc Hervé
- Mme Jacky Deromedi
- Mme Muriel Jourda
- M. Jean-Yves Leconte
- M. Jean-Pierre Sueur
- Mme Nathalie Delattre
Suppléants :
- Mme Agnès Canayer
- M. Pierre-Yves Collombat
- Mme Jacqueline Eustache-Brinio
- M. Jean-Luc Fichet
- M. Christophe-André Frassa
- M. Hervé Marseille
- M. Alain Richard