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Table des matières
Baisse de la densité médicale dans 86 départements
Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé
Difficultés rencontrées par les donneurs d'organes ultramarins
Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé
Toxicomanie dans le nord-est parisien
Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé
Exploitation commerciale de l'image d'un sportif
Mme Laura Flessel, ministre des sports
Situation du lycée professionnel Jean-Monnet de Montrouge
M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale
M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale
Centre d'hébergement pour les plus démunis
M. Jacques Mézard, ministre de la cohésion des territoires
Défaillance du programme européen pour le développement rural
M. Stéphane Travert, ministre de l'agriculture et de l'alimentation
Avenir agricole du Tarn-et-Garonne
M. Stéphane Travert, ministre de l'agriculture et de l'alimentation
Situation de Castillon-la-Bataille
M. Jacques Mézard, ministre de la cohésion des territoires
Inégalité salariale entre femmes et hommes à compétences égales
Situation fiscale des « Américains accidentels »
Accès au CDI au sein de la fonction publique territoriale
M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics
Fiscalité des maisons de santé implantées dans une zone de revitalisation rurale
M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics
Situation des services départementaux d'incendie et de secours
M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics
Projet de réforme de la carte judiciaire en Savoie et Haute-Savoie
Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice
Réinstallation d'un tribunal de commerce à Dreux
Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice
Raccordement ferroviaire de l'aéroport de Vatry
Contournement du Teil et RN 102
Projets d'infrastructures ferroviaires en Charente-Maritime
Pollution des sols dans des écoles et crèches
Suppression de la réserve parlementaire et projets des petites communes (I)
Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur
Suppression de la réserve parlementaire et projets des petites communes (II)
Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur
Intégration des frais de restauration scolaire dans le calcul du forfait communal
Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur
Parité dans les exécutifs intercommunaux
Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur
Investissements dans les réseaux à très haut débit
M. Patrick Chaize, auteur de la proposition de loi
M. Julien Denormandie, secrétaire d'État auprès du ministre de la cohésion des territoires
M. Julien Denormandie, secrétaire d'État
Ordre du jour du mercredi 7 mars 2018
SÉANCE
du mardi 6 mars 2018
60e séance de la session ordinaire 2017-2018
présidence de M. Vincent Delahaye, vice-président
Secrétaires : M. Daniel Dubois, Mme Annie Guillemot.
La séance est ouverte à 9 h 30.
Le procès-verbal de la précédente séance est adopté.
Décès d'un ancien sénateur
M. le président. - J'ai le regret de vous faire part du décès d'Alain Gérard, ancien sénateur du Finistère de 1986 à 2008.
Questions orales
M. le président. - L'ordre du jour appelle vingt-six questions orales.
Baisse de la densité médicale dans 86 départements
M. Roland Courteau . - Plusieurs dizaines de départements ont enregistré une baisse de la densité médicale au cours de ces dix dernières années. Au total, plusieurs millions de Français vivraient dans des territoires à la situation alarmante.
Nombre de Français renoncent à consulter un médecin dont figure parmi les raisons, pour 15 % d'entre eux, l'absence de médecin de proximité.
Or, selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), « le droit à la santé comprend l'accès en temps utile à des soins de santé acceptables ».
Pourtant, force est de constater la persistance d'une augmentation des inégalités d'accès aux soins en fonction des territoires.
Plusieurs mesures ont déjà été mises en oeuvre mais la solution passera par une multiplicité de solutions. Les élus qui sont en première ligne proposent ainsi un numerus clausus géographique, une aide à la mobilité des praticiens itinérants, ou encore un conditionnement des aides à l'installation d'un médecin à un quantum d'années d'exercice dans les zones sous-dotées. Ou encore prévoir que le conventionnement ne puisse intervenir qu'en concomitance avec la cessation d'activité libérale de médecins exerçants dans une zone en excédent en matière de soins.
De même, j'ai proposé la création d'un statut de « médecin praticien territorial », dans la proposition de loi déposée sur le bureau du Sénat le 20 mars 2016, avec le soutien de l'Association des maires ruraux de France, laquelle voit dans ce statut un outil complémentaire mais indispensable pour une mobilisation totale en faveur des enjeux de santé publique mais aussi un moyen d'éviter l'isolement des médecins en zone rurale.
Quelles mesures envisagez-vous afin d'assurer pour tous le principe de protection de la santé, qui est garanti par le préambule de la Constitution de 1946 ?
Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé . - La démographie médicale n'augmentera malheureusement pas avant 2025.
Pour remédier aux difficultés que rencontrent nos concitoyens en matière d'accès aux soins, comme vous l'avez dit, il n'y a pas de réponse miracle mais un panel de solutions.
Le plan territorial d'accès aux soins que j'ai présenté en octobre dernier est pragmatique : il comprend 26 mesures qui viennent du terrain. Le plan s'appuie sur les remontés des professionnels de santé, des collectivités territoriales, et des usagers.
L'accès aux soins ne repose pas sur l'installation d'un médecin, mais sur l'organisation coordonnée entre tous les professionnels de santé d'un territoire. Ces solutions doivent être trouvées au niveau local, dans chaque territoire, par les acteurs eux-mêmes. Les agences régionales de santé sont en charge d'animer la réflexion avec les professionnels de santé et les élus.
Le plan a pour objectif d'augmenter le temps soignant des professionnels de santé. Il généralise la téléconsultation et la télé expertise.
Nous doublerons les maisons de santé pluri-professionnelles en cinq ans grâce à un programme d'investissement de 400 millions.
Ce plan sera également amené à évoluer en fonction des besoins.
J'ai souhaité associer les organisations des professionnels de santé, au pilotage national et régional du plan, afin qu'elles puissent y être force de proposition. À ce sujet, toutes ont apporté leur signature il y a quinze jours à la charte pour renforcer l'accès territorial aux soins.
Aujourd'hui, 200 millions d'aides conventionnelles sont prévues pour aider les professionnels en zone sous-dense. Nous facilitons le cumul-emploi/retraite des médecins libéraux. Nous développons les consultations avancées ; nous créons des postes d'assistants partagés entre la médecine dite de ville et l'hôpital, nous généralisons le contrat de médecin adjoint.
Enfin, nous favorisons les stages extra-hospitaliers des étudiants en médecine et des internes afin de leur faire découvrir les territoires et nous facilitons les remplacements et l'exercice mixte.
Comme vous pouvez le constater, Monsieur le Sénateur, nous faisons le nécessaire pour apporter des réponses concrètes aux usagers et aux élus.
M. Roland Courteau. - Merci pour ces précisions. Je crois qu'il faudra néanmoins aller vers un statut du médecin praticien territorial. De plus en plus de communes ou intercommunalités salarient des médecins, mais ils sont contractuels. Il faudra bien un jour leur donner un statut.
Difficultés rencontrées par les donneurs d'organes ultramarins
Mme Viviane Malet . - Je souhaite évoquer la situation particulière des donneurs d'organe vivant en outre-mer. En effet, le principe de la gratuité du don d'organes du vivant a pour corollaire la neutralité financière pour les donneurs. Ainsi les textes garantissent le remboursement par l'établissement préleveur, sur production de justificatifs, des frais de transport et d'hébergement du donneur. Pourtant, cela pose certaines difficultés pour les ultramarins devant se rendre en métropole pour effectuer le prélèvement. En effet, pour les personnes aux faibles revenus et vivant outre-mer le remboursement implique une avance de frais importante et souvent impossible à assumer lorsque le prélèvement a lieu en France métropolitaine.
Aussi, je souhaiterais connaître votre position sur la proposition de modification des dispositions de l'article R.1211-2 du Code de la santé publique afin de proposer, non plus un remboursement, mais une avance sur présentation de justificatifs. Les donneurs ultramarins ne doivent pas être confrontés, du fait de l'éloignement géographique et des billets d'avion coûteux, à des difficultés financières
Il paraît ainsi raisonnable de permettre aux établissements hospitaliers préleveurs d'être en mesure de proposer une avance des frais de transport et d'hébergement pour les ultramarins.
Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé . - Le développement des greffes d'organes constitue un enjeu majeur de solidarité nationale et de santé publique, le prélèvement et la greffe figurant dans la loi comme une priorité nationale. Les donneurs vivants, notamment de rein, constituent des sources de greffons complémentaires au don cadavérique significatives.
À travers le plan greffe d'organes de tissus et de cellules 2017-2021, une politique publique volontariste de développement de la greffe est ainsi mise en oeuvre par le Gouvernement dans le respect des principes éthiques du don.
L'un des principes cardinaux est celui de la gratuité du don qui a pour corollaire la neutralité financière pour le donneur. Cette dernière garantit aux donneurs vivants et aux personnes qui les accompagnent le remboursement intégral des frais qu'ils ont engagés au titre du don ainsi que la prise en charge des dépenses de soins par les établissements de santé en charge du prélèvement et de la greffe.
La prise en charge du donneur et de son accompagnement est large et garanti le principe de neutralité financière du don sans pour autant constituer une incitation financière au don, prohibée par la loi.
Ainsi, l'intégralité des frais engagés lors des phases du don est prise en charge par l'établissement de santé préleveur.
Les textes garantissent le remboursement, sur production de justificatifs, des frais de transport, des frais d'hébergement et de la perte de revenus, dispositions qui concernent le donneur et son accompagnant.
Le remboursement des frais de transport et d'hébergement concerne également les déplacements afférents aux examens et soins qui précèdent ou suivent le prélèvement ainsi que les déplacements effectués pour le recueil du consentement du donneur.
De même, le remboursement des frais d'hébergement et de transport est prévu dans le cadre des déplacements afférents aux examens et aux soins qui suivent le prélèvement ou la collecte.
Actuellement, aux termes de l'article R. 1211-2 du code de la santé publique, les frais engagés par les donneurs lui sont remboursés sur présentation de justificatifs, afin d'assurer, d'une part, une prise en charge complète des frais engagés, mais aussi le respect du principe de gratuité du don qui implique l'absence de rémunération ou d'incitation financière.
Dans ces conditions, autoriser une avance sur présentation de justificatifs semble difficile, ou devrait a minima être très encadrée afin de ne pas être assimilée à une incitation financière.
Je suis bien entendu très attentive aux problématiques concernant l'outre-mer afin d'améliorer la prise en charge des patients.
Mme Viviane Malet. - Il s'agit d'alléger les frais des familles nécessiteuses. En tant qu'élue de proximité, j'ai eu un tel cas à traiter : dans une famille, le frère était malade, les deux soeurs au chômage et la maman était grabataire : une avance financière était tout juste impossible. Merci de vous soucier de la problématique des ultramarins.
Toxicomanie dans le nord-est parisien
M. Rémi Féraud . - Depuis plusieurs années, l'État et la ville de Paris ont engagé de nombreux programmes et projets de réduction des risques : points d'accueil et d'information, mise à disposition de matériel stérile et récupération du matériel utilisé dans des automates ou des structures spécialisées, accès à des produits de substitution.
Dans cette logique, une salle de consommation à moindre risque a ouvert fin 2016 dans le Xe arrondissement de Paris dont j'étais le maire. Rendu possible grâce à la loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé, ce projet expérimental, destiné aux usagers de drogue les plus précarisés, a un double objectif de santé publique, en assurant des conditions d'hygiène permettant de réduire les risques, notamment infectieux, liés à leur consommation, et de sécurité publique en réduisant les nuisances liées à la consommation de drogue dans les espaces publics.
Avec plus de 150 passages par jour, la salle de consommation à moindre risque de Paris remplit son objectif, permettant une meilleure prise en charge sanitaire et sociale des toxicomanes et diminuant de façon importante le nombre de seringues retrouvées dans la rue.
Mais depuis mai dernier, le Gouvernement ne s'est pas exprimé sur la toxicomanie. Quel soutien compte-t-il apporter à cette salle dans la durée ? L'ouverture d'autres salles, outre celle de Strasbourg, est-elle envisagée ? Le Gouvernement les soutiendra-t-il ? Quelles mesures spécifiques au crack sont prévues par le Gouvernement pour endiguer la situation actuelle dans le nord-est parisien où la consommation est de plus en plus visible dans la rue ou dans les stations de métro ?
Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé . - L'expérimentation des salles de consommations à moindre risque a été lancée dans notre pays en 2016. Après trente ans d'actions de réduction des risques et des dommages en termes d'addictions, la France a complété son arsenal de réponses et fait aujourd'hui partie des dix pays où de tels espaces ont été ouverts.
Les salles de consommations à moindre risque doivent nous permettre d'atteindre les usagers de drogue injecteurs les plus marginalisés, les plus vulnérables au regard des risques liés à leur pratique. L'accompagnement social est également inclut dans la démarche des salles.
Il s'agit aussi bien sûr de limiter les nuisances pour les riverains des quartiers où les usagers sont nombreux, en réduisant notamment les injections et les seringues usagées dans l'espace public.
Un dispositif d'évaluation a été mis en place pour mesurer concrètement l'impact des salles en matière de santé publique, d'acceptabilité sociale et d'ordre public.
Les deux salles expérimentales, à Paris et à Strasbourg, ont déjà eu en un an des résultats très positifs, au moins pour les personnes concernées. Un comité national réunissant les acteurs de l'expérimentation, les riverains, les partenaires et les associations assurent un suivi attentif des expérimentations.
De nouvelles salles pourront être ouvertes pendant la période d'expérimentation bien sûr, mais cela ne se décide pas d'autorité. Je ne doute pas qu'il y aura des candidats.
Nous travaillons actuellement sur le programme national de santé publique qui sera rendu public le mois prochain et qui proposera des actions spécifiques en matière de toxicomanie.
Comme vous pouvez le constater, nous restons vigilants et monopolisés pour encadrer au mieux les salles de consommations à moindre risque.
M. Rémi Féraud. - Merci pour votre réponse. Le soutien du Gouvernement est essentiel. Je serai attentif aux mesures à venir.
M. le président. - Merci, Madame la Ministre. Bonjour, Madame la Ministre des sports.
Exploitation commerciale de l'image d'un sportif
Mme Catherine Troendlé . - La loi du 1er mars 2017 vise à préserver l'éthique du sport, à renforcer la régulation et la transparence du sport professionnel et à améliorer la compétitivité des clubs, et tout particulièrement l'article 17, adopté au Sénat avec l'accord du Gouvernement. Cet article prévoit qu'une association ou une société sportive mentionnée aux articles L. 122-1 ou L. 122-2 du code du sport peut conclure avec un sportif ou un entraîneur professionnel qu'elle emploie un contrat relatif à l'exploitation commerciale de son image, de son nom ou de sa voix, au moyen d'une redevance.
Grâce à cette disposition, il sera possible de conserver dans les compétitions nationales certains joueurs qui s'expatrient aujourd'hui. Ces joueurs percevront des rémunérations, ce qui signifie des recettes fiscales et sociales pour l'État. Quant aux redevances, elles seront fiscalisées, au titre des bénéfices non commerciaux (BNC) ou des bénéfices industriels et commerciaux (BIC).
Or le décret fixant « les catégories de recettes générées par l'exploitation commerciale de l'image, du nom ou de la voix du sportif donnant lieu au versement d'une redevance à ce dernier » reste en attente de parution. Aussi, dans quel délai ce décret paraîtra-t-il ?
Mme Laura Flessel, ministre des sports . - L'article 17 de la loi du 1er mars 2017 prévoit la valorisation de l'image de joueurs ou d'entraîneurs professionnels, qui peut avoir une valeur marchande. Cette disposition visant à renforcer la compétitivité du sport professionnel français, qui génère une activité essentielle pour nos territoires, doit s'accompagner d'une mesure réglementaire pour être applicable. Les sénateurs m'ont souvent interrogée sur les raisons qui faisaient que le décret n'était toujours pas signé après la promulgation de la loi.
Nous devons déterminer les catégories de recettes constituant l'assiette de la redevance perçue par les bénéficiaires, joueurs et entraineurs. Pour ce faire, nous avons menés des travaux inter-directions - sport, budget, sécurité sociale - conduits sous l'égide du Premier ministre. Je peux vous annoncer ce matin que nous sommes en train de consulter les organisations professionnelles. Nous allons aboutir et le mécanisme sera pérennisé. Les rémunérations des joueurs et entraineurs les plus vulnérables, devait également contribuer à la prévention des comportements d'optimisation fiscale, notamment, offshore. L'honnêteté nous oblige à reconnaître que cela existe dans d'autres championnats.
Enfin en l'absence de règles fiscales communes, ce dispositif doit permettre de réduire l'écart de compétitivité entre les acteurs nationaux et ceux du marché de l'Union européenne. Le renforcement de la compétitivité du sport professionnel devrait se traduire par une revalorisation des flux financiers bénéficiant au sport amateur.
Je serai, en tant que ministre de toutes les pratiques sportives, extrêmement soucieuse de ce que tout le sport français puisse en bénéficier.
Mme Catherine Troendlé. - Je comprends vos contraintes mais le législateur se doit de contrôler l'application des lois qu'il vote. Si nous n'avons pas de réponse d'ici quelque temps, je reviendrai vers vous par écrit.
Situation du lycée professionnel Jean-Monnet de Montrouge
M. le président. - Je salue la présence de M. le ministre de l'éducation nationale.
M. Pierre Ouzoulias . - Monsieur le Ministre de l'Éducation nationale, le prestigieux lycée professionnel Jean-Monnet de Montrouge a été inauguré en 1955 par Léopold Sédar Senghor et Edgar Faure. L'été dernier, la région Île-de-France a investi 300 000 euros pour rénover l'atelier de menuiserie. Connaissant les difficultés budgétaires de toutes les collectivités, je ne peux concevoir que la région ait investi autant d'argent dans une structure obsolète. J'imagine donc que vos services l'ont encouragé à cette rénovation. Je ne comprends donc pas pourquoi le rectorat a décidé de fermer la classe de seconde professionnelle et, au-delà, je m'interroge sur l'avenir de ce lycée qui rend pourtant des services indispensables pour de nombreuses communes du sud des Hauts-de-Seine.
Vous allez me répondre que la fermeture s'impose par manque d'élèves. Je me permets de vous répondre, par prolepse, que cette fermeture a été organisée de longue date en réduisant, sans contrainte d'effectifs, les formations qu'il accueillait.
Je pense notamment à la suppression du CAP il y a cinq ans alors qu'il était apprécié des professionnels et qu'il permettait à des jeunes de poursuivre leurs études en lycée.
Le rectorat souhaite aujourd'hui diriger les élèves vers d'autres lycées professionnels du département. Si ces établissements ont une meilleure fréquentation, c'est justement parce qu'ils ont gardé cette pluralité d'offre.
Je connais votre attachement sincère à l'enseignement professionnel : je vous demande donc de me faire connaître quelles mesures allez-vous prendre pour sauver le lycée professionnel de Montrouge et son atelier de menuiserie : leurs professeurs et leurs élèves sont en tribune pour vous témoigner du prix qu'ils accordent à votre réponse.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale . - Je salue la communauté éducative du lycée Jean-Monnet. Bien entendu, le lycée n'est pas menacé. L'enjeu est la filière bois. Je partage l'esprit de votre question : comme vous l'avez dit, je suis attaché à l'enseignement professionnel et tout particulièrement à ce type de formations alors que l'économie repart.
La désaffectation des élèves a conduit le rectorat à réunir depuis trois ans les établissements - lycées et CFA - et les branches professionnelles du bâtiment, afin de mener des actions de promotion. Le Conseil régional d'Île-de-France a également été saisi et la coordination entre la région et le rectorat est en place.
Les Hauts-de-Seine sont bien dotés par la filière du bois : quatre établissements proposent des formations dans ce domaine : Louis Blériot à Suresnes, le lycée de Prony d'Asnières, le lycée Jean-Monnet de Montrouge et le CFA consulaire de Gennevilliers. La formation dispensée par le lycée Jean-Monnet est isolée sans autre diplôme et donc peine à trouver son public. J'entends bien ce que vous avez dit sur la disparition du CAP il y a cinq ans qu'on peut sans doute déplorer. Mais cette année, seuls sept élèves ont demandé à intégrer la formation. Face à ce contexte, il a été décidé de fermer le pôle bois dans ce lycée afin de resserrer l'offre autour des autres lycées et CFA. Compte tenu des enjeux du Grand Paris et des besoins à venir dans les métiers du bâtiment, une réflexion est engagée avec l'établissement pour enrichir l'offre de formation dans le domaine du gros oeuvre, domaine qui fait d'ailleurs l'identité de cet établissement.
Soucieux du respect des personnels, le rectorat a maintenu les postes de professeurs de façon à poursuivre la vocation de ce lycée.
Je vais à nouveau examiner la situation. Il faut une vision d'ensemble et être attentif aux territoires.
M. Pierre Ouzoulias. - Vos engagements sont fermes envers un outil exceptionnel. Seul un lycée professionnel est vraiment généraliste, puisqu'il s'adresse à l'intelligence de la main comme de l'esprit. (M. Roland Courteau renchérit.)
Envoyer un gamin à Suresnes, ce n'est pas réaliste : deux heures de transport par jour ! C'est dissuasif.
Se déplacer dans les Hauts-de-Seine, c'est parfois plus difficile que dans les territoires ruraux et je vois M. Mézard qui opine. (M. Jacques Mézard, qui vient d'arriver, confirme.) Vos engagements sont précieux et je me tiens à votre disposition pour avancer sur ce dossier.
Suppression des emplois aidés auprès des professeurs de langues dans les collèges « français langue étrangère »
M. Jean-Claude Luche . - Le nombre de mineurs isolés étrangers accueillis dans nos départements progresse tous les jours. Certains parlent le français, d'autres n'en ont jamais prononcé un mot. Certains ont suivi une scolarité régulière dans leur pays d'origine quand d'autres ne sont jamais allés à l'école. C'est avec cette grande diversité de parcours que doivent composer les professeurs enseignant le français dans des collèges proposant le cours : « Français, langue étrangère ». Jusqu'à présent, ils étaient accompagnés d'assistants employés avec des contrats aidés. Or, avec la suppression de ces contrats aidés, ces professeurs de français se trouvent seuls pour enseigner notre langue à des élèves aux profils extrêmement divers.
L'enseignement du français demeure primordial pour ces jeunes afin qu'ils puissent maîtriser les fondamentaux pour s'intégrer le mieux possible dans notre pays. Abaisser l'encadrement des cours de langue, c'est créer des difficultés supplémentaires pour ces jeunes qui ont déjà une culture différente de la nôtre.
Si on ne peut que regretter l'absence de classes spécifiquement dédiées pour que ces jeunes puissent faire l'apprentissage du français et de notre culture avant de suivre une scolarité normale, on ne peut se résoudre à fragiliser encore plus ce dispositif.
Comment pouvez-vous palier la suppression de ces contrats aidés dans les cours dits de « Français, langue étrangère » ?
M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale . - Les deux sujets ne sont pas spécifiquement liés, car les contrats aidés n'ont pas vocation à servir à l'apprentissage du français.
À l'éducation nationale, nous avons pu préserver 50 000 emplois aidés pour l'accompagnement des élèves en situation de handicap, priorité nationale.
Parmi les missions des personnels recrutés sous contrat figurait celle liée à l'appui éducatif mais cette mission d'appui des professeurs ne s'exerce que dans le premier degré. Dans les collèges, la fonction d'assistant au professeur ne peut pas être exercée par des personnels sous contrats aidés. Cette fonction peut être remplie par des assistants pédagogiques qui relèvent du statut des assistants d'éducation, lesquels ont été adaptés à cette fin par le décret du 22 septembre 2005. Les moyens en assistants d'éducation sont notifiés aux recteurs d'académie qui procèdent à la répartition entre les établissements en tenant compte des priorités locales d'accompagnement des élèves. Il existe aussi des assistants de langue qui sont des étudiants étrangers dont la mission est de participer à la vie d'un établissement dans le cadre d'activités pédagogiques valorisant la langue vivante étrangère dont ils sont locuteurs natifs. Nous ne disposons donc pas vraiment d'assistants de langue « Français, langue étrangère » dans les établissements scolaires.
En ce qui concerne la scolarisation des élèves allophones nouvellement arrivés en France, l'école est un droit pour tous les enfants résidants sur le territoire national quelle que soit leur nationalité, leur statut migratoire ou leur parcours antérieur. L'éducation nationale porte une attention particulière à leur accueil et à leur scolarisation qui relève du droit commun et de l'obligation scolaire. En application du principe d'inclusion sans aucune distinction, ils sont scolarisés en milieu ordinaire. Nous voulons offrir le même apprentissage pour tous mais en tenant compte des situations sociales précaires.
L'acquisition de la langue à l'école est un objectif fondamental et l'enseignement du français en tant que langue seconde est dispensé par des enseignants qui sont spécialement formés et qui interviennent en complément du travail fait en classe ordinaire. Les assistants pédagogiques peuvent dans ce cadre contribuer au soutien des élèves les plus en difficulté face aux apprentissages.
La diminution du nombre de contrats aidés ne doit donc pas être vue comme un problème pour l'accueil des élèves allophones car ces contrats ne sont pas faits pour cela. En revanche, nos assistants d'éducation pourraient parfois être plus dédiés à ce sujet, notamment les étudiants qui travaillent sur le français langue étrangère.
M. Jean-Claude Luche. - Les contrats aidés ne sont plus là. La question est : quel est le nombre d'assistants d'éducation disponibles pour accompagner ces jeunes ? Le français est un élément indispensable pour intégrer ces mineurs lorsqu'ils souhaitent rester en France.
M. le président. - Merci à Monsieur le Ministre pour sa présence. Bienvenue à M. Mézard.
Centre d'hébergement pour les plus démunis
Mme Colette Mélot . - L'accès au logement pour tous les ménages est une priorité avec l'urgence de loger tous ceux qui sont aujourd'hui privés d'un logement décent. Il faut rappeler l'engagement constant des communes, depuis des années, pour financer la construction de logements sociaux et mettre en oeuvre des politiques respectant les principes de mixité sociale.
En Seine-et-Marne, la commune de Livry-sur-Seine, avec 2 000 habitants, pour respecter ses obligations légales selon l'article 55 de la loi SRU, a engagé deux opérations, comprenant 15 logements locatifs et 17 logements en accession et ceci malgré l'absence de foncier disponible qui l'oblige à recourir à du foncier privé augmentant ainsi largement les coûts.
Elle accueille également depuis peu un centre d'hébergement d'urgence (CHU) comprenant 38 logements destinés à recevoir 102 personnes en grande difficulté, sous la houlette du Secours catholique qui rénove le château du Clos Notre-Dame où vivent les soeurs dominicaines. Ce centre impacte fortement les finances de la commune avec, d'une part, la scolarisation de 18 enfants, et, d'autre part, l'exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties dont il bénéficie pendant 25 ans, également avec l'absence de taxe d'habitation à percevoir pour chaque logement créé.
Le CHU de Livry a signé un bail de dix ans renouvelable et le gestionnaire a prévu de maintenir les résidents dans les logements en moyenne 18 mois avec un encadrement de professionnels qualifiés pour les accompagner dans la durée. Pourtant, contrairement à un Centre d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS), ces logements ne sont pas comptabilisés dans le recensement des logements locatifs sociaux effectués au titre de l'article 55 de la loi SRU alors que le fonctionnement de ce centre en est extrêmement proche.
Sans élargir la définition des logements locatifs sociaux aux centres d'hébergement d'urgence au même titre que les CHRS, pourquoi ne pas réviser leurs statuts en limitant les CHU à l'urgence de courte durée n'excédant pas un an et en qualifiant les hébergements de plus de douze mois en CHRS ?
M. Jacques Mézard, ministre de la cohésion des territoires . - Vous m'interrogez sur les possibilités d'évolution du statut des centres d'hébergement, afin que les Centres d'hébergement d'urgence (CHU) dont le fonctionnement s'apparente à celui d'un Centre d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) puissent être requalifiés en CHRS. Cette évolution permettrait notamment d'intégrer au décompte des logements sociaux réalisés au titre de l'article 55 de la loi SRU les places de l'actuel CHU de Livry-sur-Seine.
À la différence des CHU, dont la vocation est de répondre à une situation d'urgence en hébergeant temporairement des personnes sans-abri, les CHRS sont décomptés au titre de la loi SRU, en ce qu'ils constituent une étape précédant l'accès à un logement pérenne.
Ces deux types de structures relèvent de statuts différents. Les CHRS constituent une catégorie d'établissements sociaux et médico-sociaux dont le cadre juridique est fixé par le code de l'action sociale et des familles. À ce titre, leur création est conditionnée à l'obtention d'une autorisation préfectorale garantissant un niveau minimal de prestations d'accompagnement. À l'inverse, les CHU, qui ne sont soumis qu'à un régime déclaratif, ne sont pas tenus aux mêmes obligations d'accueil, et d'accompagnement des publics, que les CHRS. Ainsi, les différences de régime entre ces deux types de structure ne sont pas liées aux durées d'occupation constatées mais bien à leurs caractéristiques respectives.
Dans les faits, on observe que le fonctionnement de certains CHU peut s'apparenter à celui d'un CHRS, d'autant que le public visé par ces structures est le même.
Pour ce type de CHU, en l'état actuel du droit, une transformation en CHRS est d'ores-et-déjà possible, mais dans le respect de la procédure d'appel à projets définie à l'article L. 313-1-1 du Code de l'action sociale et des familles.
Dans le projet de loi Évolution du logement et aménagement numérique, que nous présenterons prochainement en Conseil des ministres, une disposition devrait faciliter la transformation de CHU en CHRS, pour ceux dont le fonctionnement est déjà proche de celui d'un CHRS et pour la durée du plan quinquennal en faveur du « Logement d'abord ». Cette mesure permettra de déroger à l'obligation de passer par un appel à projets, Dans cette optique, il est donc possible que vous obteniez satisfaction.
Mme Colette Mélot. - Merci pour ces précisions. Une solution est donc envisageable pour cette commune puisque ce CHU est très proche du fonctionnement d'un CHRS.
Défaillance du programme européen pour le développement rural
M. le président. - Merci au ministre de l'agriculture et de l'alimentation pour sa présence.
M. Jean-Jacques Lozach . - La mise en oeuvre du programme Leader - Liaison entre actions de développement de l'économie rurale - dans le cadre du Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) 2014-2020 est défaillante.
Quatre ans après le lancement de la programmation 2014-2020, force est de constater le retard considérable dans le versement des fonds du programme Leader, mettant en difficulté de nombreux porteurs de projets locaux. Si les régions sont devenues l'autorité de gestion de ces fonds, des retards et des blocages sont toujours très présents. L'Agence des services de paiement (ASP) est confrontée à des complications récurrentes avec son outil informatique et trop peu de moyens semblent attribués aux services instructeurs.
Le risque est de devoir restituer les crédits qui n'auront pas été consommés. Le constat actuel est déjà très alarmant avec une dynamique de projets qui s'effrite et une réalisation qui incombe complètement aux acteurs locaux, disposant d'avances de trésorerie dans certaines régions ou recourant aux banques dans d'autres.
Diverses mesures ont été prises pour améliorer la situation, en particulier suite à la réunion du comité État-régions de novembre 2016.
N'y a-t-il pas un risque de dégagement d'office des crédits attribués à la France ?
M. Stéphane Travert, ministre de l'agriculture et de l'alimentation . - Ce sujet est très important pour de nombreux acteurs du monde rural, en particulier dans la Creuse. Le taux d'engagement national du Feader est de 43 %, le taux de paiement de 30 %. La France se situe au treizième rang européen en termes de paiement de crédits Feader, devant l'Allemagne, l'Italie et l'Espagne ; elle se situe au-dessus de la moyenne européenne. Grâce au rythme soutenu des paiements, tout risque de dégagement d'office à la fin de l'année 2018 est exclu pour une très large majorité de programmes.
Le difficile démarrage de la programmation 2014-2020 s'explique par un cadre réglementaire disponible tardivement en particulier sur les aides d'État, la décentralisation de la gestion des fonds aux régions dont la carte a été revue et, enfin, par le déploiement compliqué des outils informatiques Isis et Osiris.
Concernant les programmes Leader, les régions ont sélectionné 340 GAL en France couvrant une large part du territoire ; 91 % des conventions sont désormais signées. L'instruction des dossiers Leader est réalisée par les conseils régionaux avec l'appui des GAL.
Mieux vaut tenter d'accélérer l'instruction des dossiers par la formation et le recrutement d'instructeurs, la simplification des procédures, l'élaboration de manuels de procédure d'ailleurs exigée par l'Europe.
Les outils sont presque tous opérationnels, les services sont mobilisés. L'ASP et les autorités de gestion espèrent un rattrapage dans les mois à venir.
M. Jean-Jacques Lozach. - Merci pour vos propos rassurants. La décentralisation de la gestion des fonds européens a suscité beaucoup d'attente mais nous sommes encore en période de transition. De nombreux dossiers sont à traiter, des financements sont à verser. Il faut avancer car l'image de l'Europe est en jeu. Les porteurs de projets publics comme privés doivent la voir comme une Europe de la proximité et de la réalité.
Avenir agricole du Tarn-et-Garonne
M. François Bonhomme . - L'avenir agricole du Tarn-et-Garonne repose, en grande partie, sur les aides compensatoires autorisées par le statut de « zones défavorisées », essentielles au maintien de nombreuses exploitations familiales. Mon département se caractérise, en effet, par des exploitations de polyculture-élevage ou de polyculture diversifiée qui exploitent et valorisent des zones à potentiel limité et à relief accidenté. Les parcelles sont de 4 hectares en moyenne, une surface qui engendre des surcoûts mais favorise la biodiversité.
Les critères « diversité des cultures », « taille des parcelles », « pourcentage des exploitations comportant des haies » traduisent bien les contraintes de gestion des terres sans laquelle il n'y a pas d'entretien du paysage rural. Les zones de transition entre coteaux et vallées où l'élevage est présent doivent, elles aussi, être prises en compte dans les zones défavorisées. Le critère de rendement départemental blé tendre traduit fortement les contraintes subies par les agriculteurs de ces territoires.
Le projet de zonage divulgué le 20 décembre 2017 entraînait l'exclusion de nombreuses communes Tarn-et-Garonnaises, vous y avez apporté les corrections nécessaires en présentant une autre carte le 20 février dernier. Le nombre de communes sortantes s'élèverait à 1 349, contre 1 401 dans la carte du 9 février. Pour elles, vous vous êtes engagé à élaborer un dispositif d'accompagnement. En quoi consistera-t-il ?
M. Stéphane Travert, ministre de l'agriculture et de l'alimentation . - Nous avons beaucoup travaillé pour améliorer le nouveau zonage, entre autres, dans votre département. Je ne reviens pas sur la nécessité de sa révision : il datait de 1976, la Commission européenne ainsi que la Cour des comptes européenne demandaient sa réforme depuis 2003. Pas moins de 120 simulations ont été réalisées. Dans le Tarn-et-Garonne, 150 communes resteront en ZRR sur 180. Aucune hypothèse de travail ne permettait d'aller au-delà.
Les référentiels, souvent contestés, correspondent au cahier des charges européen ; ils ont été validés dans le cadre du programme Inventaire, gestion et conservation des sols, « IGCS ». Les données sont robustes.
La carte du 20 février dernier est la base de travail sur laquelle nous entamons la négociation avec l'Union européenne pour obtenir éventuellement, sur la base du critère de continuité territoriale, la réintégration de certaines communes dans le zonage. J'ai conscience que les éleveurs sortant du zonage attendent des solutions. Ce matin même, j'ai rappelé aux directions régionales de l'agriculture et de la forêt ce que nous entendions faire : des groupes de travail pour examiner des projets territoriaux mais aussi pour examiner les cas individuels dont le nombre sera affiné. L'accompagnement passera par le grand plan d'investissement et des mesures à définir avec les professionnels, les élus et les régions.
M. François Bonhomme. - Dans le Tarn-et-Garonne, les 30 communes sortantes attendent un accompagnement dont nous espérons qu'il ne soit pas un sédatif, mais des principes actifs.
Situation de Castillon-la-Bataille
Mme Florence Lassarade . - La commune de Castillon-la-Bataille en Gironde est l'une des communes les plus pauvres de la Nouvelle-Aquitaine avec plus de 25 % d'allocataires du RSA et un taux de chômage de 27 %. Plus de 50 % de sa population vit en dessous du revenu médian de 11 250 euros par an. Elle est pourtant exclue du périmètre d'intervention de la géographie prioritaire de la politique de la ville pour appartenir à une unité urbaine de moins de 10 000 habitants.
Il y aurait donc deux catégories de citoyens pauvres : ceux qui sont aidés, car vivant en agglomération, et les autres. En toute logique, une politique de la ville reposant sur le critère de la pauvreté devrait se traduire par une égale prise en charge.
Afin de faire cesser cette injustice, quelles mesures le Gouvernement entend-il mettre en oeuvre pour prendre en compte ces territoires ruraux qui sont situés en zone grise des politiques de l'aménagement du territoire ?
M. Jacques Mézard, ministre de la cohésion des territoires . - C'est à Castillon-la-Bataille que les troupes de Charles VII, en 1453, ont bouté les Anglais hors de la province de Guyenne. Aujourd'hui, elle compte 3 070 habitants ; difficile, donc, malgré son importance historique, de la rapprocher de la politique de la ville...
La commune cherche des concours financiers, des élus girondins de tous bords bataillent en son nom tant et si bien que j'ai reçu son maire au ministère. Il est entendu, n'est-ce pas, que le Gouvernement n'est nullement responsable de ladite situation de cette commune qui est le fruit des décisions prises par son ancien édile. Cela ne nous empêche nullement de nous montrer attentifs. J'ai demandé à son maire de me transmettre les projets de la commune pour examiner comment nous pourrions l'aider dans le cadre de la dotation d'équipement des territoires ruraux ou de la dotation de soutien à l'investissement public local. Pour bien connaître les territoires ruraux, je puis vous dire que Castillon-la-Bataille, dont l'on veut faire une référence nationale pour les territoires ruraux, n'est pas la commune la plus malheureuse de notre nation : elle se trouve à 13 km de Saint-Émilion.
Enfin, Madame la Sénatrice, ce n'est pas en répétant que les territoires ruraux sont dans la désespérance qu'on convainc les Français d'y rester ou d'y revenir.
Mme Florence Lassarade. - J'ai bien noté votre intérêt pour notre commune, révélatrice de la situation de nombreuses autres communes moyennes. Les maires que j'ai rencontrés la semaine dernière se sentent orphelins. Les pauvres ruraux ont aussi besoin d'être pris en considération, sinon le risque est grand de voir se développer un rejet du monde politique.
Inégalité salariale entre femmes et hommes à compétences égales
M. Dominique Théophile . - Malgré la loi du 13 juillet 1983 sur l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, les femmes touchent un salaire 9 % inférieur à celui des hommes. De fait, la loi ne prévoit pas de sanction pénale pour les employeurs qui n'accordent pas l'égalité de salaire entre hommes et femmes.
Le code du travail, dans la section nommée « plan pour l'égalité professionnelle », engage seulement à prendre des mesures destinées à assurer l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes, sans préciser comment l'égalité salariale peut être concrètement mise en place. Les stéréotypes concernant le travail des femmes persistent, ce qui est consternant dans une société qui promeut l'égalité entre tous ses citoyens.
Je salue le plan d'action annoncé par Mme la secrétaire d'État visant à supprimer la différence de traitement entre les hommes et les femmes, à compétences égales grâce, entre autres, à une plus grande transparence des indicateurs. Quelles seront les principales mesures de ce plan ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères . - Le problème est récurrent en dépit d'un code du travail qui impose aux employeurs de rémunérer tout travail équivalent de la même manière, sous peine d'une amende de cinquième classe pouvant aller jusqu'à 1 500 euros. C'est sans doute trop peu. Les entreprises de plus de 50 salariés doivent également signer des accords en faveur de l'égalité entre les femmes et les hommes où figure la rémunération, sous peine de pénalités financières allant jusqu'à 1 % de la masse salariale. Celles-ci s'élèvent en moyenne à 0,52 % de la masse salariale. Les deux tiers des mises en demeure ont été suivies d'effet. Je l'ai dit, les inégalités persistent, ce qui est inacceptable.
Mmes Pénicaud et Schiappa préparent un plan ambitieux de lutte contre les inégalités salariales, qui sera bientôt dévoilé. Toutes les propositions seront les bienvenues. Soyez sûrs que ce sujet est cher au Gouvernement.
M. Dominique Théophile. - Nous attendons la déclinaison du plan et ferons des propositions au moment opportun.
Situation fiscale des « Américains accidentels »
M. Yannick Botrel . - Les « Américains accidentels » sont ceux qui ont une double nationalité franco-américaine du fait de leur naissance sur le sol américain. Les personnes dans cette situation, qui n'ont jamais tiré profit de leur nationalité américaine, se voient pourtant appliquer le principe de la citizen based taxation. Il leur faut déclarer leurs revenus auprès de l'administration fiscale américaine. L'application de ce principe a été renforcée par la loi Fatca. Si l'objectif de lutte contre l'évasion fiscale est incontestable, de nombreux « Américains accidentels », depuis cette loi, sont soumis à une obligation de régularisation vis-à-vis de l'administration fiscale américaine ; et cela, sous peine de se voir « expulsés » par leur établissement bancaire.
De plus, la procédure de renoncement à la nationalité américaine implique une mise en conformité fiscale préalable et le paiement d'une taxe, qui rend le processus très coûteux.
Dans un rapport d'information du 5 octobre 2016, les députés ont proposé d'engager une action diplomatique afin d'obtenir un traitement dérogatoire pour les « Américains accidentels » ; lesquels se sont regroupés en association et ont saisi le Conseil d'État. Que compte faire le Gouvernement pour eux ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères . - Vous avez bien résumé la situation : elle est kafkaïenne ! La convention bilatérale fiscale de 1994 vise à éviter la double imposition. En théorie, les autorités fiscales américaines ne peuvent demander une imposition complémentaire que dans les cas où l'impôt français est inférieur à celui dû aux États-Unis ou quand certains revenus ne sont pas imposés de façon effective en application du droit fiscal français mais taxables selon la législation des États-Unis.
Nous avons alerté le gouvernement américain, la présidence de l'Union européenne a également adressé un courrier au secrétaire du Trésor américain. On résoudrait le problème en facilitant la procédure de renoncement à la nationalité américaine et en la rendant moins coûteuse mais cela relève des compétences souveraines des États-Unis.
Le Gouvernement veille également à ce que les « Américains accidentels » puissent bien disposer d'un compte bancaire. Des procédures de recours devant la Banque de France existent.
M. Yannick Botrel. - La situation est kafkaïenne, voire ubuesque. Merci au Gouvernement pour son engagement à résoudre cette question épineuse.
Accès au CDI au sein de la fonction publique territoriale
M. Rémy Pointereau . - Les agents non titulaires sont des agents publics qui ne sont pas fonctionnaires. Leur recrutement s'effectue sans concours et n'entraîne pas leur titularisation, sauf disposition expresse. Leur recrutement se fait par contrat soumis au contrôle de légalité sauf ceux effectués sur la base d'un accroissement temporaire ou saisonnier d'activité. Depuis la loi du 12 mars 2012, les communes peuvent proposer à des agents un CDI. Toutefois, cette « CDIsation » n'est permise que sous certaines conditions, parmi lesquelles six ans de contrat à durée déterminée dans la même collectivité.
Toutefois, ne sont pas comptabilisés les services assurés dans le cadre d'une mise à disposition par le centre départemental de gestion, les contrats aidés et les CDD pour des missions de remplacement, d'activités saisonnières ou de renfort. Cette rigidité comptable empêche de nombreux agents contractuels de jouir d'un CDI. La corriger serait aller dans le sens du Gouvernement, qui souhaite augmenter la part des contractuels dans la fonction publique.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics . - Contrairement à ce que vous avez dit, les services assurés dans le cadre d'une mise à disposition par le centre départemental de gestion et les CDD pour des missions de remplacement, d'activités saisonnières ou de renfort sont comptabilisés. En revanche, les contrats aidés ne le sont pas car il s'agit de contrats privés destinés à favoriser l'insertion. Leurs bénéficiaires n'ont pas vocation à occuper un emploi permanent ; ils doivent suivre une formation et bénéficier d'un tutorat.
Je prendrai en compte vos réflexions dans le cadre de la mission que m'a confiée le Premier ministre sur la modernisation de la fonction publique territoriale, dont je présenterai les conclusions lors de la prochaine Conférence des territoires.
M. Rémy Pointereau. - Soit mais les petites communes n'ont plus les moyens de recruter des stagiaires car les dotations baissent. Je ne comprends pas la position du Gouvernement qui fustige les rigidités du statut de la fonction publique et empêche les communes d'embaucher des contractuels. J'espère que vos propositions permettront de répondre aux attentes des communes rurales.
Fiscalité des maisons de santé implantées dans une zone de revitalisation rurale
M. Yves Daudigny . - Les maisons de santé pluri-professionnelles, MSP, dont le nombre est passé d'une vingtaine en 2008 à 910 en 2017, améliorent grandement l'offre de soins primaires dans les zones sous-dotées. Si ces projets bénéficient de financements publics à l'investissement, ils sont lourds à monter. Leur succès repose sur la rencontre entre l'engagement d'un praticien et celui d'une collectivité, donc sur la confiance. Or un doute subsiste sur le traitement fiscal des professionnels de santé, déjà en activité sur une commune située ZRR et qui auraient rejoint ou créé une MSP, édifiée au sein de la même commune, avant le 1er janvier 2016. L'administration fiscale du département de l'Aisne leur refuse la faveur de l'exonération prévue par l'article 44 quindecies du code général des impôts. Ce n'est pourtant pas l'analyse faite ni par l'administration fiscale dans d'autres départements, ni par les sénateurs MM. Jean François-Poncet et Claude Bélot dans leur rapport d'information au nom de la délégation à l'aménagement du territoire du Sénat, ni par la Datar. Ma question est simple : quel dispositif fiscal s'applique aux professionnels de santé intégrant, au 1er janvier 2015, une maison de santé localisée en ZRR ?
M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics . - L'exonération durant cinq ans puis l'abattement dégressif durant trois ans prévu par l'article 44 quindecies du code général des impôts, créé par la loi de finances pour 2011, s'applique aux professionnels de santé s'installant ou reprenant un cabinet pour la première fois dans une ZRR pourvu qu'ils n'aient pas bénéficié du dispositif préalablement. Autrement dit, un professionnel de santé ayant bénéficié du dispositif ne peut y prétendre de nouveau ; en revanche, s'il en bénéficiait avant de rejoindre une maison de santé, le dispositif continue de s'appliquer.
M. Yves Daudigny. - Votre réponse ne clôt pas le débat. Les professionnels de santé peuvent lire sur des sites aussi sérieux que celui du Sénat ou du Gouvernement qu'ils ont droit à l'exonération en créant ou en rejoignant une maison de santé. C'est un leurre, une tromperie et une injustice faite à ceux qui se sont fortement engagés dans la création de ces maisons de santé sans compter que l'interprétation qui est faite du code général des impôts varie selon les départements.
Situation des services départementaux d'incendie et de secours
Mme Catherine Troendlé . - Mme Christine Bonfanti-Dossat souhaite attirer l'attention du Gouvernement sur la situation des services d'incendie et de secours, les SDIS. Leurs missions ne cessent d'augmenter avec une hausse de 3,7 % des interventions entre 2015 et 2016, soit une intervention toutes les 7 secondes. Les soldats du feu honorent leur engagement, unanimement reconnu, en dépit d'une augmentation des agressions dont ils sont victimes - de 17 % en 2016. Cela ne leur épargne pas une diminution de leur budget, de 1,4 % en 2016. Leurs véhicules roulent au diesel. Pourquoi ne pas les faire profiter de l'exonération ou du remboursement partiel de la TICPE dont bénéficient les entreprises de collecte de lait, les taxis et les transporteurs routiers ? Les pompiers, qui sont à 80 % volontaires, représentent souvent le dernier service public de proximité en milieu rural.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics . - Sans méconnaitre la qualité des SDIS, il n'est pas possible au Gouvernement de répondre favorablement à votre demande d'exonération. En effet, le droit européen encadre les possibilités d'exonération de taxe sur les carburants : la hausse de la TICPE impacte l'ensemble des composantes de la société, y compris les forces armées, les forces de l'ordre et l'administration. Il n'est donc pas possible d'en exonérer les SDIS.
Le ministère de l'intérieur prend toutefois des mesures pour faciliter leur vie, alléger leurs charges et renouveler les matériels, comme l'illustre la commande récente de six Canadair.
Mme Catherine Troendlé. - Votre réponse est brutale. Le droit communautaire ? Mais il peut évoluer ! Il suffit d'une volonté gouvernementale. L'opérationnalité des SDIS est conditionnée à leurs déplacements. Sans compter qu'ils suppléent aux carences des services de santé dans de nombreux territoires : les sapeurs-pompiers sont le dernier rempart contre la désertification médicale.
Certes, les Canadair sont bienvenus, mais au quotidien, ce sont les collectivités qui financent largement les SDIS. Le sujet n'est pas clos, nous devrons faire évoluer le droit communautaire.
La séance est suspendue quelques instants.
Projet de réforme de la carte judiciaire en Savoie et Haute-Savoie
M. Loïc Hervé . - Le projet de réforme de la carte judiciaire soulève de vives inquiétudes, particulièrement dans les départements de la Savoie et de la Haute-Savoie. La cour d'appel de Chambéry serait destinée à fusionner avec celles de Grenoble et de Lyon. Va-t-on supprimer les tribunaux de grande instance d'Albertville, de Bonneville et de Thonon-les-Bains ?
Mais « Pacta sunt servanda ». Le traité de Turin a donné un certain nombre de garanties à la Savoie. La Haute-Savoie comme la Savoie sont toujours restées, depuis 1860, des territoires frontaliers et des territoires de montagne.
Un délitement du service public de la justice dans ces territoires dynamiques serait nier leurs besoins, désavouer la performance des juridictions existantes, négliger les difficultés de déplacement si spécifiques aux territoires de montagne.
Au moment où la survie des territoires ruraux et des petites villes est en jeu, la concentration de l'activité dans les seules métropoles revient à nier le droit du justiciable de voir traiter son dossier par un magistrat localement compétent, dans le territoire où il vit.
Allez-vous tenir compte des spécificités de chaque territoire dans la réorganisation des juridictions ? Comptez-vous associer les élus à cette réforme ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UC ; M. Mathieu Darnaud applaudit également.)
Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice . - Le Gouvernement a lancé en octobre une large réflexion sur cinq chantiers thématiques, dont l'adaptation territoriale du réseau des juridictions. Le rapport Raimbourg-Houillon, qui m'a été remis le 15 janvier, contient des propositions sur la base desquelles j'ai engagé des concertations avec les magistrats, les barreaux, les élus locaux et nationaux. Ce matin même, je rencontrais le président de l'Association des régions de France (ARF).
L'intérêt des justiciables est au coeur de la réforme. Nous voulons leur garantir un accès simple, transparent, rapide et direct à la justice. Il faut concilier exigence de proximité, efficience et spécialisation. Il n'y aura aucune baisse des effectifs - au contraire - ni aucune fermeture de site. La fusion de la cour d'appel de Chambéry avec celles de Lyon et Grenoble n'est aucunement envisagée. Le succès de la réforme est conditionné à l'ancrage dans la réalité des territoires, d'où l'importance de poursuivre la concertation et de prendre en compte leurs singularités.
M. Loïc Hervé. - Merci pour cette réponse. Notre vigilance ne faiblira pas. Nous sommes attachés à ce que la justice demeure présente en pays de Savoie. Avec mes collègues savoyards, nous vous demanderons audience pour poursuivre la concertation. (Applaudissements sur les bancs du groupe UC ; M. Mathieu Darnaud applaudit également.)
Réinstallation d'un tribunal de commerce à Dreux
Mme Chantal Deseyne . - Le tribunal de commerce de Dreux a été supprimé en janvier 2009. Parmi les Chantiers de la justice lancés par le Gouvernement figure la révision de la carte judiciaire afin de faciliter l'accès aux juridictions.
Les justiciables du tribunal de commerce du nord de l'arrondissement de Dreux doivent faire 150 kilomètres pour se rendre à Chartres au tribunal ou au greffe. Or le tribunal d'instance et le conseil des prud'hommes sont toujours en activité à Dreux dans le palais de justice. Le greffe de Chartres pourrait ainsi sans problème réinstaller un greffe à Dreux, ce qui faciliterait la prévention des défaillances d'entreprises de l'arrondissement le plus industriel du département. Le Gouvernement entend-il aller dans ce sens ?
Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice . - Les chantiers en cours ne concernent pas les tribunaux de commerce qui ont leurs problématiques propres et méritent une réflexion dédiée. La rationalisation de la carte des juridictions commerciales, entamée en 1999 et qui s'est poursuivie en 2005 et 2008, s'est appuyée sur des critères objectifs tenant à l'activité de la juridiction et à la technicité de la matière
À Dreux, il a également été tenu compte de la localisation des chambres de commerce et d'industrie et des barreaux, des distances, du nombre de juridictions dans le département. Compte tenu de tous ces éléments, il n'est pas envisagé de réinstaller un tribunal de commerce à Dreux.
Mme Chantal Deseyne. - Soit, mais le temps des chefs d'entreprise est précieux. Il n'est pas raisonnable de les expédier à l'autre bout du département !
Raccordement ferroviaire de l'aéroport de Vatry
Mme Françoise Férat . - J'associe à ma question René-Paul Savary, qui était jusqu'à récemment président du conseil départemental de la Marne.
Le renoncement au projet d'aéroport à Notre-Dame-des-Landes relance l'intérêt de soutenir le développement des activités de l'aéroport Paris-Vatry, situé à moins de deux heures de Paris, dernière plateforme construite en France.
Il faudrait améliorer la desserte ferroviaire de l'aéroport par un raccordement au réseau des TER et TGV, comme le prévoit le contrat de projets État-région 2007-2013. Une telle infrastructure désengorgerait les aéroports parisiens et renforcerait l'attractivité économique de notre territoire pour les logisticiens qui ont transféré leurs activités à l'étranger.
En 2017, 110 000 passagers et 18 000 tonnes de marchandises ont transité à Vatry. La Marne est au carrefour de l'Europe : l'aéroport a toutes les capacités à se développer ; il vient d'être certifié conforme aux normes européennes de sécurité.
Le conseil départemental de la Marne est prêt à collaborer avec l'État pour faire avancer projet. Quelles sont les intentions du Gouvernement ?
Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports . - J'ai la conscience des enjeux d'attractivité pour la Marne et le Grand-Est que représente l'aéroport de Paris-Vatry. C'est pourquoi l'État s'est engagé, en 2007, à débloquer 3 millions d'euros pour examiner les conditions de desserte ferroviaire en utilisant la ligne dédiée au fret entre Châlons et Troyes. Par ailleurs, le conseil régional de Champagne-Ardenne a commandé en 2009 une étude visant à estimer les besoins de desserte et à évaluer les aménagements nécessaires.
Étant donné le coût d'un raccordement ferroviaire, ces études invitent à privilégier une desserte par autocar vers Châlons-en-Champagne et Disneyland.
Je veux redonner la priorité aux transports du quotidien en priorisant les financements. Le projet de loi d'orientation des Mobilités sera l'occasion de redéfinir le périmètre et les moyens d'interventions de l'État. Il nous faut dégager des solutions innovantes pour répondre aux enjeux économiques et sociaux des territoires. C'est à cette aune que les enjeux de la desserte ferroviaire de Paris-Vatry pourront être examinés.
Mme Françoise Férat. - Vos propos ne me rassurent pas. Je tiens à souligner la qualité exceptionnelle de cet équipement - une ancienne base de l'OTAN, sur une zone qui compte sept habitants au kilomètre carré, où toutes les habitations ont été insonorisées... Jamais le moindre contentieux, et le dossier jouit du soutien de toutes les collectivités !
Des entreprises souhaitent s'implanter. L'aéroport de Vatry est un outil de maillage du territoire, d'autant plus après le renoncement à Notre-Dame-des-Landes. Mettez donc en oeuvre le CPER, vous aurez les collectivités territoriales à vos côtés ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UC ; M. Mathieu Darnaud applaudit également.)
Avenir de la RN 147
M. Yves Bouloux . - Les axes routiers et ferroviaires sont le système sanguin du pays, or certains territoires souffrent d'une embolie persistante.
La mise à deux fois deux voies de la RN 147 entre Poitiers et Limoges est un chantier urgent et crucial pour un territoire que vous connaissez bien pour y avoir été une préfète de région de grande qualité. Or ce projet a été abandonné au profit du simple contournement, à deux fois une voie, de Lussac-les-Châteaux. Cet axe transversal a pourtant une vocation évidente pour le trajet Nantes-Méditerranée, et les Deux-Sèvres souhaitent d'ailleurs s'y associer.
Le trafic des poids-lourds s'accroît inexorablement sur la RN 147 ; les accidents se multiplient. Il est temps de transformer le cauchemar en vecteur de développement. Le Gouvernement a annoncé un plan d'investissement. Il serait souhaitable que la Haute-Vienne et la Vienne en bénéficient.
Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports . - La modernisation de la desserte routière entre Poitiers et Limoges, dans un territoire que je connais bien, est une priorité pour l'État. Il faut des réponses adaptées, améliorer les temps de parcours et la sécurité routière.
J'ai commandé au préfet de région des études pour identifier les aménagements souhaitables sur la RN 147, notamment sur les tronçons les plus empruntés, et les prioriser dans un cadre soutenable financièrement pour l'État et les collectivités.
La déviation de Belloc a déjà été réalisée. Le contrat de projets État-région inscrit 67 millions d'euros pour la Haute-Vienne, dont 46 millions de l'État, pour une première réalisation à deux fois deux voies au nord de Limoges ; les travaux débuteront en 2020.
Ce dossier aura toute sa place dans notre loi d'orientation sur les mobilités. J'ai rencontré le président de la région Nouvelle Aquitaine et je salue la mobilisation des collectivités aux côtés de l'État pour la modernisation de cet axe.
M. Yves Bouloux. - Merci pour cette réponse. Les élus sont impatients. Je sais que vous connaissez bien le dossier et je vous fais confiance.
Contournement du Teil et RN 102
M. Mathieu Darnaud . - J'associe à ma question mon collègue Jacques Genest.
Les Ardéchois attendent depuis trente ans le contournement du Teil et le réaménagement de ce segment de la RN 102, axe majeur qui traverse l'Ardèche d'est en ouest.
En désengorgeant le centre-ville du Teil - 16 000 véhicules quotidiens, dont 2 200 poids lourds - en fluidifiant et sécurisant le trafic entre la vallée du Rhône et Aubenas, ces travaux désenclaveront le sud du département, qui ne dispose d'aucune desserte ferroviaire ni autoroutière.
Preuve de la volonté unanime des élus locaux, le département de l'Ardèche et la région Auvergne-Rhône-Alpes ont porté leur financement à hauteur de 40 % des 64 millions d'euros estimés pour ce projet. Si les travaux étaient encore retardés, les conséquences seraient lourdes pour les Ardéchois. L'État va-t-il réaffirmer son engagement ou abandonnera-t-il les Ardéchois à leur enclavement ?
Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports . - La RN 102 connecte le sud-est du massif Central à la Vallée du Rhône. Je vous confirme que le contournement du Teil fait partie de notre politique d'investissement en Ardèche : il est inscrit au contrat de plan État-région pour 64 millions d'euros, dont 35 millions de l'État. La déclaration d'utilité publique a été prononcée. Le conseil régional d'Auvergne Rhône-Alpes et le conseil départemental de l'Ardèche apportent respectivement 17 millions et 11 millions d'euros.
Amélioration des temps de parcours, sécurisation des trajets, conditions de vie des riverains, tels sont les enjeux. Une estimation finale des coûts devrait bientôt être approuvée. Les fouilles archéologiques ont déjà été menées, les dernières acquisitions foncières sont achevées. Malheureusement, les contraintes budgétaires n'ont pas permis à l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afitf) de lancer les travaux. J'ai pris note de la proposition du département de l'Ardèche d'avancer les crédits pour ne pas ralentir le projet.
Cette opération s'inscrit dans notre politique de désenclavement des territoires, puisqu'elle améliorera l'accès des Ardéchois à la vallée du Rhône et à la Drôme. Nous étudions la possibilité d'inscrire des capacités de financement supplémentaires.
M. Mathieu Darnaud. - Je prends bonne note de la volonté réaffirmée du Gouvernement d'accompagner financièrement le contournement du Teil. Je regrette que le département de l'Ardèche doive avancer les fonds pour un projet aussi essentiel. Qu'il s'agisse de sécurisation ou d'aménagement, les études devront voir le jour rapidement. Cette liaison est essentielle au développement de l'Ardèche.
Projets d'infrastructures ferroviaires en Charente-Maritime
M. Daniel Laurent . - Je me fais l'écho des préoccupations des élus et des usagers concernant la desserte ferroviaire de la Saintonge, du pays royannais et du Cognaçais - et associe Corinne Imbert à ma question.
Le rapport Duran ne faisait pas du projet d'électrification Angoulême-Royan une priorité, alors qu'il avait été intégré au contrat de plan. Vous vous êtes engagée auprès de M. Bussereau à ne pas le suivre sur ce point. Le Gouvernement ne devrait pas non plus suivre les recommandations du rapport Spinetta, manière habile de désamorcer la colère des élus et des habitants...
La région Nouvelle Aquitaine est prête à cofinancer le lancement des études pour que les travaux commencent en 2020. Or l'État semble y mettre un frein.
Qui financera le projet ? Les régions ne le pourront pas sans un accompagnement de l'État. Vous avez annoncé 36 milliards d'euros pour la modernisation du réseau sur dix ans, les collectivités territoriales ne pourront pas suivre.
Le ferroviaire est un facteur d'attractivité, d'aménagement du territoire et de cohésion sociale. Vers quelles mobilités souhaitez-vous engager nos territoires ?
Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports . - La Saintonge, le pays royannais et le Cognaçais sont desservis par les axes ferroviaires Angoulême-Saintes-Royan et Niort-Saintes-Bordeaux, dont certaines sections ne sont pas en bon état.
Après des décennies de sous-investissement, de nombreuses lignes de Nouvelle-Aquitaine doivent être modernisées, et plus d'un milliard d'euros devront être mobilisés dans les dix prochaines années pour éviter des ralentissements voire des fermetures.
J'ai saisi le président de SNCF Réseaux au sujet du report à 2021 des travaux de modernisation de la signalisation entre Saintes et Angoulême et des mesures qu'il compte prendre pour en limiter les effets négatifs. Les consultations sont en cours au sujet de la ligne Angoulême-Saintes-Royan pour définir les meilleurs investissements à apporter dans le cadre du projet de loi d'orientation des mobilités.
Concernant la ligne Niort-Saintes-Bordeaux, la pérennisation de la section Niort-Saintes est évaluée à plus de 50 millions d'euros, la rénovation de la section Saintes-Bordeaux à 100 millions. Un travail est en cours sous l'égide du préfet de région et du conseil régional afin d'élaborer une vision globale et partagée des actions à entreprendre sur l'ensemble des lignes ferroviaires de Nouvelle Aquitaine.
M. Daniel Laurent. - Merci. C'est surtout la partie Saintes-Bordeaux qui subit les plus forts ralentissements. La région Poitou-Charentes était prête à s'engager financièrement. Je souhaite que le Gouvernement apporte sa caution et que les travaux puissent être lancés en 2020.
Pollution des sols dans des écoles et crèches
M. Laurent Lafon . - La réglementation de l'implantation d'écoles et de crèches sur d'anciens sites industriels est récente, d'où des interrogations sur d'éventuelles pollutions des sols.
En 2012, le ministre de l'écologie avait lancé une campagne nationale pour mieux connaitre l'empreinte de pollution des anciennes activités. Elle a été suspendue. Or les résultats diffusés sont inquiétants, et le nombre de sites concernés significatif.
Présence de pollution ne signifie pas forcément risque sanitaire, et un travail d'information et de concertation est nécessaire pour voir comment décliner le principe de précaution.
Quelle est la position du Gouvernement ? L'enquête sera-t-elle poursuivie et étendue à l'ensemble des régions, et notamment à l'Île-de-France ? Les autorités sanitaires ont-elles élaboré une conduite à tenir, ou les ARS seront-elles seules responsables ?
Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports . - Veuillez excuser Nicolas Hulot qui ne peut être présent et m'a chargée de vous répondre.
Depuis 2010 des diagnostics ont été engagés sur 1 405 établissements - de la halte-garderie, au lycée, implantés sur ou à proximité d'installations industrielles -, 1 248 sont livrés. Pas moins de 486 établissements ont été classés en catégorie A, sans problème de pollution, 658 en catégorie B, où des mesures permettent de neutraliser l'effet d'une pollution. Seuls 104 sont en catégorie C, qui nécessitent des précautions et mesures sanitaires.
Durant l'année à venir, 150 diagnostics seront finalisés. Lorsqu'une pollution est constatée, les services de l'État sont saisis pour accompagner les collectivités territoriales, maîtres d'ouvrage, les parents d'élèves et les professionnels des établissements concernés sont informés de la situation. Dans chaque cas où des préconisations ont été faites après le diagnostic, elles ont d'ores et déjà été réalisées : meilleur système d'aération, réfection des sols, de façon à écarter tout effet de la pollution identifiée. Dans moins de dix cas seulement, le diagnostic a conduit à la fermeture de tout ou partie d'établissements, pour des travaux plus importants. Soyez assuré que l'État reste vigilant sur cette question prioritaire.
M. le président. - Merci à Mme Borne. Nous accueillons Mme Gourault.
Suppression de la réserve parlementaire et projets des petites communes (I)
M. Jérôme Durain . - Le 15 septembre 2017, le Parlement mettait fin à la réserve parlementaire sur proposition du Gouvernement.
Si la suppression de la réserve parlementaire pouvait se justifier par certaines dérives clientélistes observées par le passé, de nombreux parlementaires ont alerté très tôt sur la nécessité de prévoir un mode de financement pouvant s'y substituer afin de ne pas pénaliser l'investissement des petites communes. Le Gouvernement avait évoqué la création d'un « fonds d'action pour les territoires ruraux et les projets d'intérêt général ».
En Saône-et-Loire, il a été décidé que la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) ne financerait plus les projets en deçà de 5 000 euros ; les maires nous alertent qu'ils ne peuvent plus financer des projets d'échelle modeste mais qui sont essentiels, car attendus par les habitants. Ajoutez les suppressions de classes dans les territoires ruraux et les incertitudes sur l'avenir des petites lignes ferroviaires, vous comprendrez, Madame la Ministre, qu'une certaine France attend des engagements clairs de la part du Gouvernement. Je sais que vous êtes consciente des enjeux de cette France rurale, mais comment comptez-vous répondre à ces attentes ? Ne faut-il pas abaisser davantage le seuil, ou bien prévoir une enveloppe ou un taux de subvention propres aux petites communes ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur . - Le Gouvernement avait pris l'engagement que les crédits de la réserve parlementaire s'inscriraient dans les trois dotations d'investissement de droit commun, qui s'élèveront à 1,811 milliard d'euros en 2018, c'est deux fois et demie plus qu'en 2012. Près de 8,9 milliards d'euros seront consacrés à l'investissement local sur la durée du quinquennat.
En loi de finances, le Gouvernement et le Parlement se sont accordés pour que 50 millions d'euros abondent la DETR à destination des petites communes. La loi ne fixe aucun seuil : toutes les communes sont éligibles à la DETR, en deçà de 20 000 habitants. C'est la commission départementale, composée d'élus, qui fixe le règlement d'attribution de la dotation, avec les seuils d'intervention et les domaines prioritaires.
En Saône-et-Loire, le montant minimal du projet a été fixé à 5 000 euros, pour éviter le saupoudrage. Dans la mesure où la commission est composée d'élus locaux, la décision est certainement fondée. Elle ne relève en tout cas pas de l'État.
M. Jérôme Durain. - La dotation globale est importante, certes, et j'entends que le Gouvernement laisse aux commissions départementales le soin de fixer les niveaux minimums. Sur ma réserve parlementaire, j'attribuais des subventions de 1 000 euros pour un cheminement piétons, 2 000 euros pour une aire de jeux, 4 500 euros pour le chauffage d'une salle municipale. Faute de ces subventions qui peuvent paraître anecdotiques, les petites communes se trouvent démunies. Je vous prie donc de bien vouloir utiliser votre pouvoir d'influence pour inciter les préfets à abaisser les seuils : cela aiderait nos maires ruraux.
Suppression de la réserve parlementaire et projets des petites communes (II)
M. Hervé Maurey . - Le 9 août 2017, l'Assemblée nationale supprimait la réserve parlementaire en adoptant définitivement le projet de loi organique dite pour la confiance dans la vie politique. L'Assemblée nationale est revenue sur un amendement que je proposais pour rétablir cette réserve parlementaire indispensable aux petites communes.
Dans cette affaire, le Gouvernement a renié tous ses engagements : il avait promis la création d'un « fonds d'action pour les territoires ruraux et les projets d'intérêt général », il ne l'a pas fait ; il s'était engagé devant le Sénat à reconduire l'ensemble des crédits dédiés aux collectivités locales, il ne l'a pas fait ; il envisageait de permettre aux parlementaires de décider de l'attribution de ces crédits, il ne l'a pas fait.
Une partie seulement des fonds de la réserve parlementaire a été redirigée vers la DETR, dispositif qui ne permet ni la même souplesse d'attribution, ni le financement des investissements modestes des communes. Dans le département de l'Eure, nous avons abaissé à 3 000 euros, contre l'avis du préfet, le niveau plancher des projets pour favoriser les petites communes. Mais rien ne garantit que le préfet n'écartera pas d'office tous les petits projets - car pour les services préfectoraux, c'est le nombre de dossiers qui compte, traduit en charge de travail.
Les élus n'ont qu'un rôle consultatif, et seulement pour les projets de plus de 100 000 euros - bien au-delà des projets des petites communes.
Le Gouvernement doit tenir ses promesses - il n'est jamais trop tard. Que compte-t-il faire pour aider les communes à financer les projets de petite taille qui ne sont aujourd'hui éligibles à aucun financement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur . - Je ne peux pas tout laisser dire. Nous avons stabilisé voire augmenté les dotations aux collectivités territoriales à hauteur de 1,811 milliard d'euros en 2018.
Avant même l'arrivée de ce Gouvernement, la question du prolongement de la réserve parlementaire se posait déjà, tout comme celle du minimum des subventions à apporter - on parlait alors de 1 000 euros, nous en avions débattu au sein même des groupes politiques du Sénat.
Le Conseil constitutionnel a clairement jugé que l'exécution d'un fonds par le Parlement, parce qu'elle lie la compétence de l'exécutif, n'est pas conforme à la Constitution ; il fallait en tenir compte, ou bien des financements pouvaient être contestés.
Le Gouvernement a souhaité préserver les aides apportées aux petites communes grâce à la DETR. Si la commission départementale, dans l'Eure, a imposé au préfet un seuil de 3 000 euros, c'est qu'elle a un vrai pouvoir. Ceci étant, comme je viens de le dire à M. Durain, le Gouvernement peut demander aux préfets de s'assurer que les petites communes reçoivent bien les fonds dont elles peuvent bénéficier. Une information existe à disposition des parlementaires sur le détail de la DETR.
Soyez assurés de la volonté du Gouvernement de soutenir les petites communes.
M. Hervé Maurey. - Je confirme ce que j'ai dit. Je n'ai pas parlé de baisses de dotations de ce Gouvernement, mais de celles qui avaient eu lieu sous le précédent quinquennat. La question n'est pas le niveau global des subventions, mais comment financer une porte d'église à 4 000 euros, des fenêtres d'une mairie à changer pour 1 000 euros, un défibrillateur à 2 000 euros ?
Le Gouvernement, par votre voix, ne fait que confirmer sa méconnaissance grave des problèmes des petites communes. Je vous répéterai ce que j'avais répondu au Premier ministre qui prétendait que la réserve parlementaire ne servait à rien : bien sûr, quand on est maire du Havre, on n'a pas besoin de 2 000 euros pour des petits travaux ! Cessons d'étrangler les communes rurales.
Intégration des frais de restauration scolaire dans le calcul du forfait communal
M. Alain Milon . - Le code de l'éducation énonce que l'inscription à la cantine des écoles primaires, dès lors qu'une telle cantine existe, est un droit pour tous les enfants scolarisés sans discrimination selon leur situation ou celle de leur famille.
Ces dispositions ont été reprises dans le jugement du tribunal administratif de Besançon du 7 décembre 2017 opposant la commune de Besançon à l'une de ses administrées qui souhaitait faire annuler les décisions par lesquelles la commune de Besançon avait refusé l'inscription de son fils aux services périscolaires de restauration scolaire et d'accueil du matin et de l'après-midi au motif qu'il n'y avait plus de place.
Le juge de première instance a considéré, en ce qui concerne la restauration scolaire, qu'il s'agissait d'un droit opposable et que le manque de place disponible ne saurait être un argument justifiant le refus d'inscription.
La reconnaissance du caractère obligatoire du service de restauration scolaire va-t-elle influer sur l'obligation de prise en charge, par les communes, de dépenses de fonctionnement des écoles privées sous contrat ? En effet, en vertu du principe de parité entre l'enseignement privé et l'enseignement public, il paraît légitime que cette dépense de cantine soit désormais intégrée dans le « forfait communal ».
Ces dépenses désormais obligatoires vont-elles être intégrées dans le calcul des dépenses de fonctionnement des écoles privées sous contrat, ceci dès cette année scolaire 2017/2018 ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur . - Le département et la région sont tenus de mettre en place des services de restauration scolaire dans les collèges et les lycées - mais la loi ne l'impose pas aux communes dans les écoles maternelles et primaires.
L'inscription à la cantine des écoles primaires est un droit établi pour tous les enfants scolarisés si ce service existe : dans le cas contraire, cela ne le rend pas obligatoire. Ce texte ne remet pas en cause le financement de ce service.
Dans les écoles privées, le forfait communal ne prend en compte que les dépenses relatives aux activités périscolaires.
Le Conseil d'État a jugé qu'il appartenait à la collectivité de choisir de participer, ou non, au financement de la restauration dans les écoles privées.
M. Alain Milon. - Mes angoisses persistent. Les maires sont inquiets. Une décision de justice pourrait les contraindre à intervenir dans le financement des cantines scolaires dans les établissements privés sous contrat. C'est évident.
Parité dans les exécutifs intercommunaux
Mme Véronique Guillotin . - Depuis 2014, dans les communes de 1 000 habitants et plus, les conseillers communautaires sont élus en même temps que les conseillers municipaux, au suffrage universel direct avec le respect de la parité. Cependant, au 1er janvier 2017, les femmes ne représentent que 34 % des conseillers communautaires. À la communauté d'agglomération de Longwy, les dix vice-présidences sont attribuées à des hommes. Au total, les femmes ne représentent que 18 % des membres de l'exécutif intercommunal en Meurthe-et-Moselle. Une étude publiée portant sur 2015 nous apprend qu'au niveau national, les femmes occupaient seulement 18 % des postes exécutifs intercommunaux et 8 % des présidences. Les intercommunalités sont les dernières assemblées locales de cette importance où la parité ne s'exerce pas au sein des exécutifs.
En matière de parité, seule la loi fait changer les choses. On le voit par le fait que la moindre faille soit utilisée pour la contourner : fusions d'EPCI ou recomposition des conseils... Le Haut Conseil à l'égalité hommes/femmes préconise des tandems paritaires à la tête des exécutifs locaux. Comment le Gouvernement compte-t-il enrayer cette tendance ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur . - La parité hommes/femmes est une grande cause du quinquennat. La parité est un outil autant qu'une fin, c'est une exigence de démocratie. Plusieurs lois ont contribué à instaurer la parité dans les différentes instances, notamment dans les collectivités territoriales. Des progrès ont été faits : alors que seulement 13 % des conseillers généraux étaient des femmes, elles sont désormais la moitié des conseillers départementaux. Dans les communes de moins de 1 000 habitants, il n'y a pas d'obligation de parité car les petites communes ont souvent du mal à trouver des candidats pour siéger dans les conseils municipaux.
Cette situation de déséquilibre au sein des intercommunalités est un fait reconnu. Il faudrait étudier toutes les possibilités. Dans les intercommunalités où il y a beaucoup de petites communes, le déséquilibre hommes/femmes est patent.
Mme Véronique Guillotin. - Le même déséquilibre se constate dans les communautés d'agglomération. En 1986, Simone Veil constatait qu'il n'y avait pas d'autre moyen que la loi pour infléchir la parité. Rien n'a changé. Je note la bonne volonté du Gouvernement pour faire respecter la parité.
La séance est suspendue à 12 h 20.
présidence de M. Thani Mohamed Soilihi, vice-président
La séance reprend à 14 h 30.
Investissements dans les réseaux à très haut débit
M. le président. - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi tendant à sécuriser et à encourager les investissements dans les réseaux de communications électroniques à très haut débit.
Discussion générale
M. Patrick Chaize, auteur de la proposition de loi . - Quel est le contexte de ce texte ? À l'été 2017, un opérateur de télécommunications a annoncé son intention de couvrir l'ensemble du territoire en fibre optique par son propre réseau, mettant en danger le partage entre zones d'initiative privée et réseaux d'initiative publique (RIP), pourtant indispensable à une couverture intégrale rapide.
S'il est revenu depuis sur son intention de « fibrer la France », cet épisode illustre les rapports de force entre opérateurs et collectivités locales. C'est le cas dans les Yvelines, comme à La Réunion où des opérateurs privés ont cherché à dupliquer un RIP.
J'ai fait un rêve. Celui que nous puissions sécuriser ces réseaux. Les efforts consentis par les élus locaux pour déployer la fibre ne sauraient être laissés sans protection.
Cette proposition de loi fournit un cadre sécurisant pour les investissements et contraignant pour les opérateurs. J'ai été en relation constante avec l'ensemble des acteurs, y compris avec le Gouvernement et la Commission européenne qui m'a confirmé que le texte était en phase avec sa position.
Le calendrier ne serait pas optimal ? L'argument ne tient pas, dès lors que la proposition de loi est cohérente avec ce que nous aurons à transposer. En la matière, mieux vaut anticiper, et peser dans le concert européen !
Ce texte est nécessaire et pertinent, il pourra évoluer au cours de la navette en fonction de la stabilisation du cadre européen et national.
L'objectif est d'accélérer le déploiement de la fibre optique sur tout le territoire. L'accès de tous au très haut débit est une condition de la cohésion nationale et de la mobilité sociale. On ne peut accepter la fibre pour les villes et des technologies dégradées pour les champs !
La France, bien notée pour la qualité et la densité de ses infrastructures, doit être à la hauteur pour les réseaux numériques, qui renforceront la performance de nos entreprises et l'attractivité de notre pays.
Pour sécuriser les investissements dans les réseaux en fibre optique, les engagements de déploiement pris par les opérateurs doivent être juridiquement contraignants ; les acteurs publics, dont l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep), doivent pouvoir s'en assurer.
C'est l'objet du titre premier et des articles 1 à 7 de ce texte qui formalisent la répartition et le calendrier du déploiement et qui renforcent les pouvoirs de contrôle de l'Arcep pour prévenir les stratégies de préemption.
Il faut également inciter aux investissements dans la fibre : c'est l'objectif du titre II. En prévoyant l'extinction progressive du cuivre et son remplacement par la fibre, les articles 8 à 10 accélèrent le déploiement de la fibre optique. L'article 11 tire les conséquences de l'approche qualitative de l'Arcep pour évaluer la couverture mobile. Dans chaque commune, les habitants doivent avoir accès aux services de base : messagerie, téléphone, Internet.
Je salue l'écoute de Mme de Cidrac, rapporteure, qui a conduit de nombreuses auditions dans un délai restreint. Le texte sort renforcé de commission ; les ajouts et précisions apportés consolident les dispositions prévues, notamment sur la transparence du statut des zones fibrées ou la progressivité de l'imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux.
Mon rêve a une suite : que votre Gouvernement, porté par un ADN « ni droite ni gauche », soutienne clairement notre initiative. Or, jusqu'à présent, aucune réponse claire... Notre impatience est en passe de devenir déception, alors même que le Sénat est prêt à des concessions.
J'espère que ce débat nous permettra d'avancer ensemble. L'accord historique obtenu sur le mobile doit nous inciter à anticiper pour le fixe. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains, UC et RDSE)
Mme Marta de Cidrac, rapporteure de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable . - À l'heure où Internet est considéré comme un bien commun, il est indispensable que les réseaux de dernière génération irriguent l'ensemble du pays et que ce déploiement bénéficie à tous, sans exception.
La France s'est dotée depuis 2010 d'une programmation nationale fondée sur la complémentarité entre offre privée et initiative publique pour apporter le très haut débit à tous les territoires.
Or en 2017, certains opérateurs privés ont laissé planer le risque d'une duplication du réseau sur les zones prises en charge par les pouvoirs publics, remettant en cause les principes structurants du déploiement du très haut débit et montrant la fragilité d'un système fondé sur un simple consensus entre acteurs publics et privés.
Ce texte met en place les outils permettant d'éviter les superpositions entre réseaux en fibre afin de conforter la complémentarité public-privé ; il comprend également des dispositions relatives à la couverture des zones blanches.
Notre commission, qui partage les inquiétudes sur le risque de concurrence des réseaux d'initiative publique par des projets privés, a approuvé les principes de la proposition de loi, moyennant certains aménagements. L'article 2 a été réécrit pour prévoir l'établissement d'une liste fixant les responsabilités et les calendriers du déploiement, sans modifier le fondement juridique sur lequel des négociations sont en cours entre l'État et les opérateurs privés. Tout en tenant compte de ce contexte, nous avons jugé nécessaire de formaliser la répartition des responsabilités. Les zones très denses ont été exclues, l'Arcep donnera un avis sur le projet de listes, le traitement des cas de duplication sera précisé.
À l'article 6, nous permettons aux autorités délivrant les permissions de voirie de mieux tenir compte des objectifs de mutualisation.
À l'article 8, davantage de marge de manoeuvre a été laissée aux collectivités territoriales dans le rachat des infrastructures d'accueil des réseaux en cuivre. Patrick Chaize a également souhaité conforter le rôle de l'Arcep pour l'attribution du statut de zone fibrée.
La commission a adopté un article additionnel qui conditionne l'application de l'imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux (IFER) aux réseaux classés en zone fibrée, pour en renforcer la progressivité.
Enfin, à l'article 11, nous relevons les exigences de couverture des zones blanches de la téléphonie mobile.
Le premier élément de contexte à avoir à l'esprit est le risque de duplication, à l'origine du présent texte. Rien n'empêche en effet un opérateur de doubler un réseau d'initiative publique sur les parties les plus rentables, au risque de fragiliser l'équilibre économique. Voyez ce qui se passe dans les Yvelines, à Beynes.
Deuxième élément, le nouveau paquet télécom en cours de négociation au niveau européen aura notamment pour but de mieux identifier les intentions des opérateurs et de lutter contre les réseaux non déclarés. En anticipant sur sa transposition, nous réaffirmons la volonté de la France d'agir.
Enfin, le Gouvernement négocie en ce moment avec les opérateurs privés ; nous en avons tenu compte en ne modifiant pas le cadre juridique dans lequel ces négociations sont menées. Mais faute de certitude sur leur résultat, nous proposons de maintenir l'article 2...
Cette proposition de loi apporte des solutions aux collectivités territoriales. Nous sommes prêts à travailler avec le Gouvernement dont l'implication est restée faible jusqu'à présent.
Lors de votre audition devant la commission, Monsieur le ministre, vous aviez dit souscrire aux intentions mais pas aux dispositions proposées. Si c'est toujours le cas, quelles mesures concrètes proposez-vous ? (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC ainsi que sur quelques bancs du groupe SOCR)
M. Julien Denormandie, secrétaire d'État auprès du ministre de la cohésion des territoires . - Le président de la République a fait du numérique une priorité de son quinquennat. Le très haut débit est un outil formidable pour la cohésion territoriale : télétravail, télémédecine, démarches administratives dématérialisées... Or seul un Français sur deux a accès au très haut débit.
Plusieurs d'entre vous se sont mobilisés très tôt sur ce sujet. Je salue l'implication des sénateurs, les échanges constructifs que j'ai eus avec M. Chaize et Mme de Cidrac depuis des mois, dans un contexte difficile.
Ce texte s'inscrit dans la lignée d'autres travaux du Sénat, comme le rapport Maurey, qui ont préconisé des nouvelles approches, des changements de paradigmes. L'octroi des fréquences est, depuis lors, appréhendé comme un outil d'aménagement du territoire.
L'attente de nos concitoyens est immense. Selon les chiffres, les zones blanches sont de plus en plus limitées, Internet est présent presque partout - or ce n'est pas la perception qu'en ont nos concitoyens. Nous leur devons de redoubler d'efforts.
Nous partageons les objectifs de cette proposition de loi, vous le savez. Nous travaillons depuis des mois à des solutions concrètes. Le président de la République et le Premier ministre ont fixé des objectifs ambitieux : un accès Internet de bonne qualité pour tous les Français d'ici 2020, soit 8 mégabits par seconde, le très haut débit - 30 mégabits par seconde - en 2022, et une généralisation de la 4G.
Quatre axes dans notre politique : le premier passe par l'accélération de la couverture numérique des territoires et la sécurisation juridique et financière des réseaux d'initiative publique, auxquels nous croyons, et par la mobilisation des différentes technologies, des opérateurs et des investisseurs.
Deuxième axe, la généralisation d'une couverture mobile de qualité, avec l'accès à la 4G, qui permet l'accès au numérique. Chaque opérateur s'engage à couvrir cinq mille nouveaux sites.
Troisième axe, la simplification des procédures de déploiement, pour réduire les délais.
Dernier axe, un véritable choc de transparence avec l'observatoire qui sera déployé à l'été par l'Arcep.
Je salue vos travaux ; ils ont été lancés dans un contexte qui a évolué depuis. Votre voix a été très importante pour rétablir l'équilibre dans la discussion avec les acteurs économiques.
Aujourd'hui, le contexte est différent, avec la perspective du projet de loi sur le logement et l'aménagement numérique, qui comportera un volet simplification. C'est ce nouveau contexte qui explique les réserves qu'émet le Gouvernement sur l'opportunité d'adopter cette proposition de loi - même s'il soutient sans équivoque ses objectifs.
La négociation avec les opérateurs a fait évoluer leur positionnement. Un code européen des télécommunications est en cours de discussion et pourrait être finalisé au premier semestre 2018 pour être transposé au second semestre. Nous avons demandé aux opérateurs des engagements contraignants, ce que permet l'article L. 3313 du code des postes et communications électroniques inclus dans la loi Montagne. Depuis mon audition devant votre commission, nous avons reçu de nouveaux engagements de la part des opérateurs que nous présenterons à l'Arcep dans les prochains jours, avant de vous les transmettre en toute transparence.
Enfin, les collectivités territoriales ont un rôle à jouer. L'accord que nous avons signé avec les opérateurs leur donne une place centrale. C'est à elles de décider où porteront les nouvelles infrastructures. Elles seront bien les donneurs d'ordre. C'est pourquoi nous avons conforté juridiquement les réseaux d'initiative publique.
Nous soutenons l'ambition de cette proposition de loi mais son calendrier est inadapté : attendons l'achèvement de la discussion sur le code des télécommunications.
M. Hervé Maurey, président de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable . - Je félicite M. Chaize et Mme de Cidrac pour la qualité de leur travail sur ce sujet complexe, d'autant que c'était un baptême du feu pour la rapporteure. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains, UC et RDSE)
Le déploiement du très haut débit sur tout le territoire est un sujet capital, par l'ampleur du chantier - 35 milliards d'euros d'investissements - et par le nombre d'entreprises et de foyers concernés - 33 millions. C'est un projet structurant pour notre compétitivité, pour l'aménagement du territoire, pour l'équité.
L'objectif d'une couverture rapide et exhaustive en fibre optique repose sur le partage de responsabilité entre les zones confiées à l'initiative privée et le reste du territoire, laissé à l'initiative publique. Je regrette ce choix fait en 2011 qui permet une politique d'écrémage, les opérateurs préemptant les zones les plus rentables... Raison de plus pour protéger les efforts menés par les collectivités territoriales.
M. Loïc Hervé. - Très bien.
M. Hervé Maurey, président de la commission. - Nous devons en outre nous assurer que les déploiements dans la zone d'initiative privée sont effectifs. Le contrôle du respect des engagements des opérateurs n'est toujours pas d'actualité, malgré les nombreuses propositions du Sénat : en 2011, un rapport de la commission des affaires économiques intitulé « Aménagement numérique du territoire, passer des paroles aux actes » ; une proposition de loi déposée avec Philippe Leroy adoptée en février 2012 par le Sénat mais hélas rejetée par l'Assemblée nationale ; le rapport que j'ai cosigné en 2015 avec M. Chaize qui préconisait une contractualisation contraignante avec les opérateurs assortie de sanctions éventuelles.
Le Gouvernement précédent nous a régulièrement répondu que le système de conventionnement mis en place en 2013 suffisait. Le processus de contractualisation devait être achevé fin 2015, nous disait le ministre de l'économie de l'époque, Emmanuel Macron. Fin 2017, il ne l'était toujours pas. En octobre dernier, l'Arcep s'est ralliée au point de vue du Sénat en affirmant la nécessité d'un plus grand encadrement des engagements des opérateurs.
Les écarts considérables entre les engagements pris et leur réalisation compromettent l'objectif de couverture intégrale du territoire en très haut débit en 2022, au risque de créer des zones blanches ou grises du très haut débit.
Les opérateurs affirment que l'intégralité des logements sera éligible à une offre commerciale d'ici 2020. Je n'y crois pas. Qu'ils s'engagent donc sur un échéancier, sous contrôle de l'Arcep !
Faute de garantie sur l'aboutissement des discussions en cours avec les opérateurs, le Sénat propose d'aller plus loin. Il est regrettable que nous n'ayons pas été entendus plus tôt. Le Gouvernement continue de privilégier des discussions informelles avec les opérateurs en court-circuitant la représentation nationale, informée tardivement et partiellement. Emmanuel Macron, ministre de l'économie, s'était pourtant engagé à venir nous rendre compte tous les six mois...
Une fois encore, le Sénat est vigilant et réactif. J'espérais que ce Gouvernement nous entendrait... J'avoue ne pas comprendre son positionnement. M. le ministre invoque le calendrier ? Non, il n'est pas trop tôt, il est presque déjà trop tard ! (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains, UC, RDSE et Les Indépendants, ainsi que sur certains bancs du groupe SOCR)
M. Joël Guerriau . - Dès juin 2017, Mounir Mahjoubi promettait d'amener Internet partout. L'État dématérialise à tout va ses services alors même que la moitié de la population n'est pas connectée. En mettant ainsi la charrue avant les boeufs, on crée de l'exclusion numérique. Le plan France Très haut débit est un enjeu d'avenir, de désenclavement des espaces isolés - mais le fossé demeure, source d'injustices. Au coeur de la Corrèze, à Saint-Martin-la-Méanne, le téléphone ne passe pas. L'Arcep dénombre pas moins de 89 zones blanches en Occitanie - même en zone urbaine ! Il est temps d'agir.
Patrick Chaize, dont je salue le travail, nous invite à protéger les réseaux d'initiative publique qui amènent la fibre optique en zone rurale. On nous présente la dématérialisation comme l'alpha et l'oméga ; en réalité, les personnes âgées, les foyers démunis restent exclus. Il faut des mesures d'urgence pour ces territoires isolés, relégués.
Saisissons l'opportunité de la renégociation des licences d'utilisation des fréquences pour accélérer ces débats.
Nous saluons l'article additionnel, introduit en commission, qui limite l'extension de l'IFER aux réseaux en zone fibrée.
La transformation digitale du pays doit bénéficier à tout le pays, villes et campagnes. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Indépendants et UC)
M. Éric Gold . - Ce texte répond aux préoccupations de nos concitoyens confrontés à la fracture numérique dans les territoires peu denses. Accès au savoir et à la culture, télétravail, dématérialisation des démarches, les possibilités offertes par le numérique sont immenses. Or une partie de notre territoire demeure pénalisée. Selon l'Agence du numérique, 6,4 millions de Français disposent de moins de 8 mégabits par seconde et 3 millions de moins de 3 mégabits par seconde. Dans certaines communes, la défaillance du réseau met à mal l'accès aux services publics : l'agent de la Poste ne peut effectuer versement ou prélèvement, aucun mail ne part de la mairie ou de l'Ehpad, les réservations de tourisme en ligne sont impossibles...
Le plan France Très haut débit répond à certaines de nos interrogations, voire de nos inquiétudes, en organisant les réseaux jusqu'en 2022, pour couvrir l'ensemble du territoire français et offrir la fibre à 50 % des Français résidant en zone peu dense.
L'objectif intermédiaire d'un « bon débit pour tous », défini à l'automne dernier par le président de la République, ne doit pas nous détourner des objectifs du plan Très haut débit. Loin de nous l'idée de vouloir freiner l'accès au très haut débit par le recours à une initiative privée accrue. Cependant, les investissements déjà réalisés ou projetés par les collectivités doivent être sécurisés et les utilisateurs protégés.
Dans son avis du 25 octobre 2017, l'Arcep souligne que les initiatives privées doivent tenir compte des réseaux publics et ne pas freiner l'expansion du très haut débit par une rupture de l'équilibre voulu par le Plan Très haut débit. Il faut préserver l'existence d'une seule boucle locale optique mutualisée dans chaque commune.
L'article 2 correspond aux recommandations de l'Arcep, sur le recours à l'article L. 3313 du code des postes et communications électroniques qui permettent au ministre compétent d'accepter des engagements souscrits par les opérateurs pour contribuer à l'aménagement et à la couverture des zones peu denses, et à l'Arcep de contrôler et d'en sanctionner les manquements.
Nous restons vigilants quant aux incitations financières prévues dans l'accord « historique » passé entre le Gouvernement et les opérateurs au sujet du déploiement accéléré de la 4G et de la résorption des zones blanches.
Quant à l'article 10, il reste imprécis et il faudrait en revoir la rédaction.
Le groupe RDSE, pourtant favorable à toute réforme pour désenclaver le territoire, reste réservé sur ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE)
M. Frédéric Marchand . - Lors de la Conférence des territoires, le 17 juillet dernier, ici même, le président de la République déclarait : « pour l'État, le premier enjeu est la lutte contre la fracture territoriale. L'État et les collectivités territoriales doivent travailler de concert afin de construire cette cohésion des territoires ».
Cela passe par une résorption de la fracture numérique. D'où le plan France Très haut débit et les engagements très ambitieux du président de la République. La France se trouve en bas du classement européen pour ce qui est du très haut débit fixe. Cette carence est d'autant moins acceptable que l'État ne cesse d'accélérer la dématérialisation des services publics. Alors que l'intention est celle d'une plus grande efficacité, le résultat est l'exclusion d'une partie de la population. Les zones rurales ont parfois plus besoin du numérique que les zones urbaines, notamment quand il s'agit de lutter contre la désertification médicale. Comment faire sans une connexion Internet de très grande qualité ?
Il nous faut lutter contre les inégalités, contre le sentiment d'abandon : les attentes de nos concitoyens sont fortes. Les retards accumulés par les opérateurs ont mis en péril les ambitions affichées par le Gouvernement.
Ces lourds investissements par les collectivités territoriales dans des réseaux publics doivent absolument être protégés de la concurrence des réseaux privés - sinon leur modèle économique est en péril. Il faut préserver ces investissements et assurer de façon certaine la desserte de l'ensemble des habitants en fibre optique.
La proposition de loi de M. Chaize va dans ce sens. Notre groupe la soutient sur le fond mais souhaite des aménagements. Les négociations au niveau européen n'ont pas encore abouti. Il faudrait en tenir compte.
Le projet de loi Évolution du logement et aménagement numérique (ELAN) à venir contiendra des mesures de simplification qui rejoignent celles de ce texte.
Nous nous abstiendrons sur ce texte, même si nous croyons ce débat nécessaire pour envoyer un signal fort aux opérateurs. Le rôle du Parlement est de légiférer, mais aussi de contrôler. La réforme gouvernementale souhaite graver dans le marbre cet aspect du travail parlementaire. Le sujet de ce texte concerne tous les Français. Voilà pourquoi nous devons nous en emparer.
M. Guillaume Gontard . - Je remercie d'abord l'auteur de la proposition de loi, dont nous partageons l'objectif : simplifier et clarifier pour atteindre les objectifs du très haut débit, équivalent de l'électricité et du rail autrefois, déployés sous l'égide de la puissance publique. L'ONU a d'ailleurs consacré l'accès au numérique comme un nouveau droit de l'homme. C'est pourquoi nous sommes inquiets des retards pris en France, qui se situe au vingt-septième rang européen pour l'accès à l'Internet fixe.
Le retard français est la conséquence directe des politiques de libéralisation totale de ce secteur et du désengagement de l'État qui ne définit pas un cadre juridique contraignant qui serait favorable au développement du très haut débit. Dans notre pays, la politique numérique consiste, en résumé, à socialiser les pertes et à privatiser les profits. Les collectivités territoriales sont appelées à combler les carences en investissant dans les zones non rentables, tandis que les opérateurs dégagent des bénéfices juteux de plusieurs milliards d'euros.
Cette proposition de loi introduit des correctifs dans les zones intermédiaires, dans les zones où l'État a émis des appels à manifestation d'intention d'investissement dites zones « AMII ». Or les engagements des opérateurs ne sont soumis à aucune obligation de résultat ni même de moyens. Ce texte clarifie les engagements, prévoit des sanctions s'ils ne sont pas atteints. C'est une réponse à SFR qui se faisait fort de « fibrer » l'ensemble du territoire.
Nous sommes favorables à ces évolutions tout en regrettant leurs périmètres circonscrits et leurs limitations. Cette proposition de loi préserve malgré tout un modèle hybride, injuste, qui entérine les fractures territoriales : rien sur la zone dense et rien non plus pour aider les collectivités à assumer leur mission de service public local reconnu par la présente proposition de loi.
Il nous faut repenser l'ensemble de notre modèle pour garantir les droits de nos citoyens. La rentabilité à court terme ne peut plus être notre boussole. La « rente du cuivre » aurait déjà dû financer le déploiement de la fibre plutôt qu'alimenter les généreux dividendes versés aux actionnaires d'Orange.
Si cette proposition de loi reste loin de la « révolution du numérique » que nous appelons de nos voeux, elle corrige certains dysfonctionnements, encadre mieux et apporte un début de régulation : c'est bien sûr une avancée. Comme elle s'inscrit dans un système qui ne fonctionne pas, le groupe CRCE choisira une abstention constructive. (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE)
M. Claude Bérit-Débat . - (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR) À mon tour de remercier l'auteur de la proposition de loi. À l'instar du rapport d'information publié en 2015 compilant les recommandations du groupe de travail sur l'aménagement numérique du territoire, notre commission réalise depuis plusieurs années déjà un important travail de vigilance sur ce sujet tout en se montrant force de proposition.
Le groupe socialiste et républicain est depuis longtemps très investi sur cette question. Je me réjouis que le problème du numérique soit en voie de résolution grâce à une volonté politique réaffirmée. Cela a commencé avec le plan France Très haut débit lancé sous le quinquennat précédent.
Ce déploiement est en marche. Mais il y a des dérives, comme les projets de SFR l'illustrent. Cette proposition de loi apporte une clarification et des obligations de résultats. Notre groupe souscrit à ses objectifs : conforter les investissements publics dans la fibre et leur permettre de contrôler les investissements privés.
Surtout, l'instauration de sanctions est une avancée qui complète l'article 33-13 introduit par la loi « République numérique » de 2016 dans le code des postes et communications électroniques via un amendement du groupe socialiste et républicain du Sénat.
Il était aussi impératif de préciser les mobilités d'octroi du statut en zone fibrée, et d'affirmer la compétence de l'Arcep.
Notre groupe, vous l'avez compris, votera ce texte. (M. Bruno Sido s'en réjouit.)
Concernant la création des réseaux d'initiative publique, destinée à contrer SFR, il y aurait beaucoup à gagner à réoctroyer les zones dites « AMII », selon un ciblage et des critères précis, ce qui permettrait d'accélérer les déploiements dans certaines zones sous-équipées, comme le recommande l'Arcep.
De même, la définition de critères de priorité pour inciter les opérateurs à investir dans les anciennes « zones blanches » serait utile. Les maires des communes rurales attendent vos réponses, Monsieur le Ministre. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR ; MM. Bruno Sido et Jean-Paul Émorine applaudissent également.)
M. Guillaume Chevrollier . - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Je salue cette proposition de loi responsable de M. Chaize, et le travail de notre rapporteure, Marta de Cidrac.
L'accès au numérique est essentiel pour nos territoires. C'est un sénateur optimiste qui s'exprime, à la suite de la signature de la délégation de service public relative à la conception, l'établissement, le financement et l'exploitation du déploiement du réseau très haut débit dans la Mayenne qui permettra à ce département d'être le premier 100 % fibré en 2021. Il s'agit d'un accord historique, mais exceptionnel, qui prouve que les intérêts publics et privés peuvent s'entendre.
En effet, ce n'est pas toujours le cas, ce qui rend cette proposition de loi nécessaire. Régulièrement, on apprend que des réseaux d'initiative publique sont menacés par les projets de certains opérateurs. Le ministre a reconnu que certains investissements publics avaient été fragilisés et que cette proposition de loi apportait des réponses utiles. Certes, le calendrier, en particulier, fait subsister des interrogations. Faut-il légiférer maintenant, alors qu'une nouvelle réglementation européenne du secteur des communications électroniques est annoncée, laquelle devra être transposée ?
Depuis son arrivée aux responsabilités, le Gouvernement a fixé un cap, le déploiement de la fibre est un enjeu prioritaire - et des objectifs chiffrés.
Cette proposition vous offre sur un plateau d'argent un dispositif efficace et précis, afin de mettre en oeuvre cette politique publique. Espérons qu'il ne subira pas le même sort que la proposition de loi Eau et assainissement votée par le Sénat et cassée par la majorité de l'Assemblée nationale. Nous comptons sur votre soutien, Monsieur le Ministre. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et Les Indépendants, ainsi que sur quelques bancs du groupe UC)
M. Alain Fouché . - Lancé au début des années 2010, le plan France Très haut débit devait ouvrir la voie à une connexion pour tous. Mais la France reste en bas du classement européen. Les « zones blanches » persistent avec un risque d'exclusion, signalé par l'Arcep, pour certaines zones. Il y l'Internet des villes et l'Internet des campagnes. Or l'accès à Internet est économiquement vital.
Pas de service public non plus sans Internet. Il est donc urgent d'accélérer le mouvement de déploiement sur tout le territoire au-delà des grands axes de communication, au plus proche des habitations. Entre parenthèses, ce n'est pas avec la limitation à 80 kilomètres/heure sur les routes que vous inciterez les entreprises à aller dans ces territoires. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe UC)
Cela dit, cette proposition de loi va dans le bon sens. Les collectivités territoriales ont besoin de lisibilité, donc de stabilité législative et réglementaire, pour pouvoir investir dans les réseaux. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et Les Indépendants)
M. Louis-Jean de Nicolaÿ . - Le texte de M. Chaize, passionné de numérique, s'inscrit dans le droit fil du plan Très haut débit.
Il vise à donner aux collectivités territoriales les moyens de lutter contre les tentatives de déstabilisation de leurs réseaux. Trois points sont essentiels.
Tout d'abord, la sécurisation des investissements publics. Certains opérateurs ont fait des annonces floues et déstabilisantes pour les réseaux d'initiative publique qui doivent couvrir 43 % de la population dans les zones que les opérateurs privés n'ont pas voulu fibrer eux-mêmes en 2011. Ne soyons pas naïfs, l'intervention du privé serait source de mitage du territoire. L'Arcep, dans son avis, le dit clairement.
Ensuite, un cadre contraignant des engagements existants ou en projet - en termes de péréquation, de complétude et de calendrier -, est nécessaire, assorti d'un mécanisme de sanction clairement établi.
Enfin, ce texte facilite l'aménagement numérique du territoire. Les mesures de simplifications en matière d'urbanisme et de plafonnement de l'IFER étaient très attendues, tout comme le soutien au basculement du cuivre vers la fibre dont nous avons besoin pour le déploiement de la télémédecine.
Monsieur le Ministre, vous avez annoncé devant nous un « changement de paradigme », terme à la mode. Mais nous avons été trop souvent déçus par vos trop nombreuses tergiversations. Cette proposition de loi est une occasion d'avancer. Le groupe Les Républicains la votera. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)
M. Jean-Paul Émorine. - Bravo !
M. Jean-Yves Roux . - (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR) Depuis la France Très haut débit, on note une succession d'appels à projets.
Je salue les accords du 14 décembre qui rendent opposables les engagements des opérateurs.
Je salue la volonté de M. Chaize de protéger les réseaux d'initiative publique (RIP) en reconnaissant leur rôle crucial. Il serait étrange qu'ils soient soumis à l'IFER.
Le renforcement des pouvoirs de l'Arcep serait utile.
Le terrain n'est pas totalement vierge. Des projets ont été lancés, notamment dans les « RIP » : il est donc nécessaire de les protéger. La fermeture du guichet du Fonds national pour la société numérique est source d'inquiétude pour les porteurs de projets anciens. Des contrats d'affermage de quinze ans avaient en effet été conclus.
Ensuite, prenons garde à la priorisation des investissements, y compris en zone très peu dense. Identifions dès maintenant avec les élus de montagne les endroits où nous pourrons en priorité utiliser des technologies alternatives.
Le manque de main-d'oeuvre est aussi un problème. On estime les besoins à 40 000 personnes à horizon 2020. Un plan de formation ciblé s'impose.
Enfin, je plaide pour un plan d'usage du numérique afin que l'accès au service public numérique s'accompagne de personnel et d'équipements dans les mairies et les maisons de service public. Les infrastructures sont des moyens, jamais des fins. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR ; M. Jean-Paul Émorine applaudit aussi.)
M. Yves Bouloux . - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Je suis satisfait, d'abord en tant qu'élu local. Maire de Montmorillon, président de la communauté de communes pendant dix ans, j'ai pu constater que le déploiement des réseaux était un travail de longue haleine. Dans la Vienne, outre Poitiers et Châtellerault, le très haut débit reste un espoir trop lointain. Jeune parlementaire, je suis aussi satisfait que cette proposition de loi vienne en aide aux collectivités territoriales, car elle protégera les réseaux publics installés en zone rurale contre une concurrence privée qui les tuerait.
La répétition ayant des vertus pédagogiques, je rappelle que ces réseaux ne se sont pas faits en un jour... Pour créer un « RIP », il faut constater un appel d'offres infructueux, garantir l'utilisation partagée des infrastructures, respecter les droits et obligations des opérateurs en télécommunications, et ceux relatifs aux subventions.
L'article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales le dit bien, les RIP ne doivent leur existence qu'à l'insuffisance d'initiatives privées. Pour cette unique raison, il est essentiel de protéger les collectivités et autres organismes sui generis qui ont souhaité investir.
Cette proposition de loi protège aussi les investissements de l'État qui a mis la main à la poche, à hauteur de 3,3 milliards d'euros, sur 6,5 milliards de subventions publiques. Il serait étonnant que l'État ne sécurise pas de tels investissements. Il doit donc donner à l'Arcep les moyens de réguler l'offre d'infrastructures dans les zones fragiles.
Je fais amende honorable devant M. Chaize et Mme de Cidrac. Je sais que personne ici ne doute ni de leur volonté, ni de leurs compétences. Ce texte redorera le blason de la France. Il faut développer tous les territoires au service de nos concitoyens. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)
M. Jean-François Husson. - Bravo !
M. Julien Denormandie, secrétaire d'État . - L'urgence est là, nous partageons l'impatience. Le numérique est en haut de la pile des dossiers que nous avons à traiter avec Jacques Mézard.
Nous avons changé d'approche. L'accord scellé en janvier avec les opérateurs établit pour la première fois que les enchères ont pour but la couverture du territoire. (M. Jean-François Husson insiste.) C'est une modification majeure dans la gestion de ce dossier.
Comment aller plus vite ? Il faut plus d'investissements, d'argent de l'État ou des investisseurs privés. On parle des annonces tonitruantes des opérateurs ; il faut les canaliser, les encadrer, mais il faut se réjouir aussi de cette initiative.
Monsieur le Président de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, je peux venir, par exemple tous les six mois ou au rythme que vous déciderez, rendre compte à votre commission des progrès de ce processus. Il faut être d'une transparence totale avec nos concitoyens.
Les « RIP » sont des engagements contractuels. Dans les grandes zones urbaines, c'est tellement rentable que les opérateurs se jettent dessus. Restent les zones intermédiaires, où il n'y avait pas d'engagements contraignants.
Nous en sommes à la phase finale de nos négociations pour rendre contraignants les engagements des opérateurs concernés. Le résultat sera soumis à l'Arcep et rendu public.
Pour aller plus vite, il faut plus d'argent, ce choc de transparence que je viens d'évoquer, et des engagements contraignants.
La discussion générale est close.
Discussion des articles
ARTICLE PREMIER
M. Alain Duran . - La couverture numérique n'a pas, hélas, été considérée comme un objectif de service public, à remplir par les opérateurs - ce sont les collectivités qui, dans les zones non rentables délaissées par les opérateurs, doivent développer les réseaux d'initiative publique. Ce choix politique continue de porter préjudice à une part très importante de nos territoires et des citoyens qui y habitent. Toutefois, les collectivités concernées assument leur mission. En Ariège, où vous êtes venu, Monsieur le Ministre, le réseau THD coûtera 120 millions d'euros ; le département à lui seul remboursera un million d'euros par an pendant vingt-trois ans.
Pour autant, aucune mesure n'empêche le déploiement d'un réseau concurrent à un réseau d'initiative publique. Si la sécurité des investissements publics venait à être remise en cause par l'ouverture d'investissements privés dans des zones préalablement laissées au réseau d'initiative publique, cela constituerait une double peine insupportable.
Je salue l'esprit de cette proposition de loi qui maintient un équilibre entre tous les acteurs du secteur, encadre mieux le déploiement sur nos territoires et permet la réalisation des réseaux dont nos administrés ont besoin. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR et sur quelques bancs du groupe Les Républicains)
M. le président. - Amendement n°15, présenté par Mme de Cidrac, au nom de la commission.
Alinéa 4
Remplacer la référence :
L. 33-13
par la référence :
L. 33-14
L'amendement de coordination n°15, accepté par le Gouvernement, est adopté.
M. le président. - Amendement n°6, présenté par M. Schmitz.
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par les mots :
et ceux figurant dans les plans de déploiement décrits dans les conventions conclues entre un opérateur et une ou plusieurs collectivités territoriales ou groupements de collectivités territoriales, pour autant que ces conventions prévoient le prononcé de sanctions en cas de non-respect de ses engagements par ledit opérateur
M. Alain Schmitz. - La rédaction actuelle exclut les déploiements auxquels, dans des cadres juridiques divers, des opérateurs se sont engagés directement auprès de collectivités territoriales, alors même que ces engagements sont assortis de sanctions en cas de non-respect, qu'il faut inclure ces engagements pour trois raisons.
Il ne faut pas défavoriser les opérateurs qui ont fait l'effort de s'engager localement, là où leurs concurrents avaient jusqu'alors délaissé des zones par nature peu denses et peu rentables ; mécaniquement, ne pas tenir compte de ces engagements placerait les opérateurs ayant pris des engagements au titre de l'article L. 33-13 du CPCE dans une situation injustement et selon nous illégalement protectrice au regard du droit de la concurrence, puisque la loi organiserait ainsi un marché asymétriquement régulé.
Ensuite, il faut assurer une prise en compte des actions menées par les collectivités territoriales au titre de leurs compétences en matière d'aménagement numérique des territoires, ce que traduisent ces conventions locales d'engagement de déploiement.
Enfin, rendre ces conventions locales opposables évitera la redondance de réseaux sur les zones considérées et incitera par là même les opérateurs à adresser des zones dépourvues de tout engagement de déploiement, favorisant ainsi une couverture plus rapide de l'ensemble du territoire national.
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. - L'article premier se borne à renvoyer à la liste de l'article 2. L'amendement de coordination que nous venons d'adopter rend cet amendement non nécessaire. Retrait ?
M. Julien Denormandie, secrétaire d'État. - Avis défavorable car ces dispositions défendent les articles 20 à 22 du Règlement européen encore en discussion. L'acteur qui reste décisionnaire est la collectivité territoriale.
L'amendement n°6 est retiré.
L'article premier, modifié, est adopté.
ARTICLE ADDITIONNEL
M. le président. - Amendement n°3 rectifié, présenté par Mmes Dindar et Malet et MM. Dennemont et Lagourgue.
Après l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La continuité numérique territoriale est un principe de service public destiné à assurer une qualité et un coût des communications électroniques dans les départements d'outre-mer au moins équivalent à ceux proposés dans la moyenne des départements métropolitains. Ce principe est assuré par la compensation des handicaps dus aux surcoûts liés à l'éloignement ou à l'étroitesse des marchés, ainsi que par toute mesure législative ou règlementaire visant à assurer des conditions loyales de concurrence. Il est motivé par le respect du principe d'égalité entre tous les citoyens français, mais également par l'objectif de développement économique par les services liés aux technologies de l'information et de la communication.
Mme Viviane Malet. - C'est un amendement de bon sens qui impose par tout moyen le principe de la continuité numérique entre la France métropolitaine et les départements d'outre-mer, pour des questions d'égalité de traitement, mais également pour des impératifs de développement économique.
Dans les départements d'outre-mer, le rapport qualité/prix de l'Internet est très inférieur à celui de France métropolitaine. Techniquement, pourtant, il n'existe aucune raison à cet état de fait. L'éloignement joue certes un rôle, mais pas déterminant. À titre d'exemple, une rapide recherche sur des offres en fibre du plus grand opérateur Internet français Orange nous montre une différence de 30 % en moyenne. Trois offres en métropole à 42 euros, 48 euros ou 56 euros sont à 55 euros, 65 euros et 75 euros à La Réunion.
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. - Nous partageons vos objectifs mais vous rédigez là un amendement d'appel. Retrait ?
M. Julien Denormandie, secrétaire d'État. - Même avis ; la mobilisation du Gouvernement est très forte sur les outre-mer. Je reviens de Saint-Martin où nous devons remettre en état les réseaux de téléphonie mobile.
M. Victorin Lurel. - Je le voterai. Je veux bien croire à la mobilisation du Gouvernement. Mais la liaison entre Guadeloupe et Porto Rico a coûté 30 millions d'euros avec peu d'aides extérieures. Cela coûte maintenant 183 millions d'euros en deux tranches de construire une couverture terrestre en fibre optique dont seulement 19 millions d'euros ont été financés par l'Union européenne et autant par l'État. La rédaction de cet amendement est peut-être d'appel, mais le problème se pose bien.
L'amendement n°3 rectifié est retiré.
ARTICLE 2
M. le président. - Amendement n°12 rectifié bis, présenté par M. Lafon, Mme Dindar, MM. Kern, Luche, Détraigne et Laugier, Mmes Billon et Vullien, MM. Bonnecarrère, Cigolotti et Médevielle, Mmes Gatel et Létard et M. Canevet.
Alinéa 3
Après le mot :
denses
insérer les mots :
hors les poches de basse densité,
M. Laurent Lafon. - Il y a des zones hétérogènes dans les zones denses, ce que l'Arcep appelle les « poches de basse intensité » : nous les incluons dans le dispositif.
M. le président. - Amendement identique n°13, présenté par M. Lalande.
M. Bernard Lalande. - Il a été très bien défendu par M. Lafon.
L'amendement n°14 n'est pas défendu.
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. - Nous avons exclu les zones très denses en commission, mais en notant que les poches de basse densité devraient être traitées. Avis favorable.
M. Julien Denormandie, secrétaire d'État. - Cet amendement vise l'article 22 du code des télécommunications qui sera modifié par le code européen.
Je m'engage à ce que cette demande soit prise en compte. Sagesse.
Les amendements identiques nos12 rectifié bis et 13 sont adoptés.
M. le président. - Belle unanimité !
Amendement n°8, présenté par M. Schmitz.
Alinéa 3
Remplacer la référence :
L. 38-4-3
par la référence :
L. 34-8-3
M. le président. - Amendement identique n°17, présenté par Mme de Cidrac, au nom de la commission.
Les amendements rédactionnels identiques nos8 et 17, acceptés par la commission et le Gouvernement, sont adoptés.
M. le président. - Amendement n°7 rectifié, présenté par M. Schmitz.
Alinéa 4
Après le mot :
territoriales
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
, des projets déposés dans le cadre du plan « France très haut débit », et, le cas échéant, des conventions conclues par les collectivités territoriales ou leurs groupements pour l'établissement de lignes en fibre optique assorties de sanctions.
M. Alain Schmitz. - Cet amendement prend en compte les engagements de déploiement souscrits par les opérateurs directement auprès des collectivités territoriales pour l'établissement des recensements - alinéa 2 - et des listes - alinéa 4 - dressées sous l'autorité du ministre des communications électroniques destinées à rationaliser l'établissement de réseaux en fibre optique sur l'ensemble des zones du territoire national.
Ignorer les initiatives locales engageantes des opérateurs porterait atteinte à l'exhaustivité et à la pertinence de cette liste.
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. - Cela peut être pertinent pour être exhaustif. Avis favorable.
M. Julien Denormandie, secrétaire d'État. - Avis défavorable.
L'amendement n°7 rectifié est adopté.
L'article 2, modifié, est adopté.
L'article 3 est adopté, de même que l'article 4.
ARTICLE ADDITIONNEL
M. le président. - Amendement n°11 rectifié, présenté par M. Schmitz.
Après l'article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au 1° de l'article L. 34-8-4 du code des postes et des communications électroniques, la référence : « L. 45-1 » est remplacée par la référence : « L. 45-9 ».
M. Alain Schmitz. - Cet amendement rectifie une erreur rédactionnelle et prend en considération la renumérotation des articles L. 45 et suivant issue de l'article 19 de la loi du 22 mars 2011.
L'amendement n°11 rectifié, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté et devient un article additionnel.
L'article 5 est adopté.
ARTICLE 6
M. Patrick Chaize . - L'adressage est un enjeu majeur. Une étude évalue à 10 milliards d'euros la perte sèche liée à un mauvais référencement des adresses, sans parler des problématiques sécuritaires. Il faut continuer le travail pour donner une adresse aux quelque 2,6 millions d'habitations qui n'en n'ont pas.
Le 15 avril, une nouvelle version de la base adresses sera déployée, où les collectivités pourront contribuer. La Poste peut déjà donner une géolocalisation des adresses pour le déploiement de la fibre optique.
L'adresse doit être considérée comme un bien public avec une compensation pour La Poste, au titre de sa mission de service public.
M. le président. - Amendement n°9 rectifié, présenté par M. Schmitz.
Après l'alinéa 2
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
...° Le quatrième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « La délivrance d'une permission de voirie en vue du déploiement de lignes de communication électroniques à très haut débit en fibre optique mentionnées aux articles L. 33-6 et L. 34-8-3 du présent code peut être suspendue par l'autorité compétente, tant que l'opérateur demandeur n'assure pas la bonne information des collectivités desservies par ces réseaux et des collectivités territoriales ou de leurs groupements compétents au sens des articles L. 1425-1 et L. 1425-2 du code général des collectivités territoriales, au moyen des consultations préalables aux déploiements ou à leur mise à jour, dans les conditions prévues par les décisions de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes en application de l'article L. 34-8-3 du présent code. » ;
M. Alain Schmitz. - Cet amendement clarifie la cohérence entre les déploiements projetés d'un opérateur de lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique et l'octroi des droits de passage sur le domaine public.
L'Arcep a mis en place un ensemble de consultations préalables obligatoires aux déploiements, à destination des acteurs concernés, notamment les collectivités territoriales et leurs groupements, permettant de recueillir les remarques des intéressés et dont les opérateurs déployeurs doivent tenir le plus grand compte.
Dans la pratique, les collectivités territoriales et leurs groupements concernés sont susceptibles de ne pas recevoir ou alors trop tardivement les consultations initiales en question.
Par ailleurs, les autorités en charge de l'octroi ne sont pas toujours en mesure de vérifier la cohérence de ces demandes avec le déploiement projeté.
Cet amendement s'assure que les opérateurs déployeurs ont respecté, préalablement aux dépôts des demandes de permissions de voirie nécessaires au déploiement projeté, leurs obligations concernant les consultations préalables.
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. - Avis favorable, car cet amendement apporte une plus grande cohérence et une meilleure gestion du domaine public.
M. Julien Denormandie, secrétaire d'État. - Avis défavorable, même si je comprends votre intention. Les délais d'organisation sont de plus en plus longs. Cet amendement les allongera encore.
L'amendement n°9 rectifié est adopté.
L'article 6, modifié, est adopté.
ARTICLE ADDITIONNEL
M. le président. - Amendement n°1 rectifié bis, présenté par Mme Vermeillet, MM. Longeot, Lafon, Détraigne, D. Dubois, Luche, Cigolotti et Médevielle, Mme Doineau, MM. Delcros et Vanlerenberghe et Mmes Gatel et Létard.
Après l'article 6
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le IV de l'article L. 1111-10 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation aux dispositions du présent article, les communes membres d'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre peuvent financer toute opération d'investissement pour l'établissement et l'exploitation d'infrastructures et de réseaux de communications électroniques en application de l'article L. 1425-1 du présent code. Ce financement est encadré par les modalités prévues au V de l'article L. 5214-16, à l'article L. 5215-26 et au VI de l'article L. 5216-5. »
Mme Sylvie Vermeillet. - Cet amendement permet aux communes membres d'EPCI, non maîtres d'ouvrage, de cofinancer les opérations de déploiement de réseau numérique, dans lesquels s'engagent financièrement ces derniers, selon les modalités prévues par les fonds de concours.
Les conséquences financières sont neutres au niveau du bloc communal, dans la mesure où il se borne à autoriser les communes membres à prendre en charge une partie de la contribution de l'EPCI.
L'AMF soutient cet amendement.
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. - L'amendement répond à une difficulté technique. Les représentants des communes nous ont indiqué qu'il faciliterait le financement des réseaux. Avis favorable.
M. Julien Denormandie, secrétaire d'État. - Cet amendement créera des financements indirects via les fonds de concours. Ce n'est pas le sens de la fiscalité. Avis défavorable.
L'amendement n°1 rectifié bis est adopté et devient un article additionnel.
L'article 7 est adopté.
ARTICLE 8
M. le président. - Amendement n°5 rectifié, présenté par M. Magras et Mme Malet.
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Toute personne propriétaire d'infrastructures accueillant un réseau de communications électroniques, situées sur un territoire faisant l'objet d'une reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle peut, dans les mêmes conditions que celles prévues au premier alinéa du présent II, demander à la collectivité territoriale sur laquelle sont implantées ces infrastructures d'accueil de racheter celles susceptibles de donner lieu à des activités de génie civil. Cette faculté est ouverte pendant un délai de dix-huit mois à compter de la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle ou de trois mois à compter de la publication par la collectivité de son intention de lancer un programme d'enfouissement des réseaux. »
Mme Viviane Malet. - Les ouragans qui ont balayé les territoires de Saint-Martin, Saint-Barthélemy et de la Guadeloupe en septembre dernier ont détruit tous les réseaux de communications électroniques qui n'étaient pas enterrés.
L'article 8 donne la possibilité pour les opérateurs propriétaires d'infrastructures d'accueil sur un secteur ayant obtenu le statut de « zone fibrée » d'en proposer le rachat à la collectivité.
Cet amendement propose d'élargir cette possibilité aux cas dans lesquels le secteur concerné n'a pas le statut de « zone fibrée » mais a subi une catastrophe naturelle conduisant au lancement d'un programme d'enfouissement des réseaux de communications électroniques.
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. - La faculté de rachat prévue à l'article 8 s'appuie dans cet amendement à la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle. Avis favorable par solidarité pour les territoires d'outre-mer touchés par l'ouragan.
M. Julien Denormandie, secrétaire d'État. - Je reviens juste de Saint-Martin. Je ne suis pas certain que cet amendement soit la bonne solution. Une fois le réseau rétabli, il deviendra propriété du conseil régional ou départemental ; or c'est l'opérateur qui a les capacités d'en assurer la maintenance. Avis défavorable.
L'amendement n°5 rectifié est adopté.
L'article 8, modifié, est adopté.
ARTICLE 9
M. le président. - Amendement n°4 rectifié, présenté par MM. Gold, Arnell, Artano et A. Bertrand, Mme M. Carrère, MM. Castelli, Collin et Corbisez, Mme Costes, M. Dantec, Mme N. Delattre, MM. Gabouty et Guérini, Mmes Guillotin et Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et MM. Léonhardt, Menonville, Requier et Vall.
Supprimer cet article.
M. Éric Gold. - Cet amendement supprime cet article qui plafonne le montant de l'imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux due par les opérateurs, assise sur le nombre de stations radioélectriques déployées.
Cet article est soit prématuré, soit insuffisamment ciblé. Il risque d'entraîner une perte de recettes pour les collectivités territoriales. Une étude d'impact serait bienvenue.
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. - Je vais proposer de réécrire l'article, en vous donnant satisfaction sur le fond. Retrait ?
M. Julien Denormandie, secrétaire d'État. - Avis favorable car la proposition de loi n'est pas le bon véhicule pour traiter de l'IFER. Toutefois, sur le fond, il est judicieux de plafonner l'IFER de manière équilibrée. Nous proposerons prochainement une exonération de l'IFER mobile pour les infrastructures supplémentaires des opérateurs par rapport à la tendance prévue, ce qui favorise l'investissement des opérateurs sans grever le budget des collectivités territoriales.
L'amendement n°4 rectifié est retiré.
M. le président. - Amendement n°16, présenté par Mme de Cidrac, au nom de la commission.
Rédiger ainsi cet article :
I. - Le premier alinéa du III de l'article 1519 H du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée : « Les stations radioélectriques construites entre le 1er janvier 2018 et le 31 décembre 2022 pour assurer ou améliorer la couverture par les réseaux radioélectriques mobiles ouverts au public de zones identifiées conjointement par l'État, les collectivités territoriales et les opérateurs de communications électroniques titulaires d'une autorisation d'utilisation de fréquences radioélectriques pour l'exploitation d'un réseau mobile ouvert au public ne sont pas soumises à cette imposition. »
II. - La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du I est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
III. - La perte de recettes résultant pour l'État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. - Cet amendement réécrit donc l'article 9. Les exonérations d'IFER risquant de grever les recettes des collectivités territoriales, nous proposons de les cibler sur les stations construites dans les cinq ans en vue d'assurer ou d'améliorer la couverture mobile dans des zones identifiées conjointement par l'État, les collectivités territoriales et les opérateurs.
M. Patrick Chaize. - Ce texte devait proposer un dispositif de plafonnement de l'IFER plus pérenne. Il n'était pas complètement abouti. Une modification totale n'est pas nécessaire, mais une approche par site serait bienvenue pour tenir compte de la densité accrue de stations que demanderont les futurs réseaux 5G.
L'amendement n°16 est adopté, l'article 9 est ainsi rédigé.
ARTICLE 9 BIS
M. le président. - Amendement n°18, présenté par le Gouvernement.
Alinéas 2 à 4
Supprimer ces alinéas.
M. Julien Denormandie, secrétaire d'État. - Par le présent amendement, le Gouvernement entend lever les gages prévus à l'article 9 bis.
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. - Avis favorable.
L'amendement n°18 est adopté.
L'article 9 bis, modifié, est adopté.
L'article 10 est adopté.
ARTICLE 11
M. le président. - Amendement n°2 rectifié ter, présenté par MM. de Nicolaÿ, Chaize, Pointereau, Retailleau et Savin, Mme Renaud-Garabedian, MM. Bansard, Joyandet, J.M. Boyer, Raison et Perrin, Mme Deromedi, MM. Lefèvre et Mayet, Mme Micouleau, MM. Poniatowski, Paccaud, Bascher, Bouchet et Rapin, Mmes Garriaud-Maylam, Duranton et Lamure, M. Danesi, Mmes Troendlé et Eustache-Brinio, MM. Panunzi, Bazin, Vogel, Duplomb, Brisson, Pellevat, Piednoir et Genest, Mme Puissat, M. Darnaud, Mmes Gruny et Billon, MM. H. Leroy et Chevrollier, Mmes Vullien et Dindar, M. Husson, Mmes Thomas, Chauvin et Chain-Larché, MM. Bonhomme, Bonnecarrère, Louault, Bizet, Kern, Milon, Henno, Chatillon et Pierre, Mme Deroche, MM. Longeot, D. Laurent, A. Bertrand et B. Fournier, Mme F. Gerbaud et MM. Leleux et Charon.
Alinéa 11
Remplacer le mot :
troisième
par le mot :
quatrième
M. Louis-Jean de Nicolaÿ. - Cet amendement de précision renforce les exigences de couverture pour les zones blanches, en cohérence avec l'accord mobile 2018 conclu entre les opérateurs et l'État qui prévoit une couverture à 75 % des zones blanches - centres-bourgs en 4G d'ici 2020 et à 100 % d'ici 2022. Au lieu de faire référence à la 3G, il est préférable de viser la 4G directement.
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. - Avis favorable, car trop de zones blanches existent encore et nous devons les réduire.
M. Julien Denormandie, secrétaire d'État. - L'objectif est de déployer la 4G de manière massive. L'accord de janvier signé avec les opérateurs prévoit de faire la transformation sur 10 000 communes d'ici 2020. Dès lors qu'il y a une zone blanche, elle passera directement en 4G. Avis de sagesse. L'objectif contraignant est déjà posé. Rien ne justifie la transformation légistique.
M. Daniel Gremillet. - Je soutiens cet amendement et me réjouis de la position de la rapporteure. Beaucoup de nos concitoyens souffrent d'être en zone blanche. Déployer maintenant la 4G les aidera.
L'amendement n°2 rectifié ter est adopté.
L'article 11, modifié, est adopté.
ARTICLE 12
M. le président. - Amendement n°19, présenté par le Gouvernement.
Supprimer cet article.
M. Julien Denormandie, secrétaire d'État. - Cet amendement lève le gage prévu par l'article 12.
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. - Avis favorable.
L'amendement n°19 est adopté.
L'article 12, modifié, est adopté.
ARTICLE ADDITIONNEL
M. le président. - Amendement n°10, présenté par M. Schmitz.
Après l'article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le 4° du II de l'article L. 32-1 du code des postes et des communications électroniques est complété par les mots : « , sur la base notamment des schémas directeurs territoriaux d'aménagement numérique prévus à l'article L. 1425-2 du code général des collectivités territoriales ».
M. Alain Schmitz. - Cet amendement reconnaît la portée et l'intérêt des documents d'orientations mis en place par les collectivités territoriales et leurs groupements pour la politique d'aménagement numérique sur les territoires.
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. - Avis favorable.
M. Julien Denormandie, secrétaire d'État. - Le code des collectivités territoriales prévoit déjà un schéma territorial d'aménagement numérique. Sagesse.
L'amendement n°10 est adopté et devient un article additionnel.
L'article 13 demeure supprimé.
À la demande du groupe Les Républicains, la proposition de loi est mise aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°66 :
Nombre de votants | 334 |
Nombre de suffrages exprimés | 283 |
Pour l'adoption | 283 |
Contre | 0 |
Le Sénat a adopté.
(Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains, UC, RDSE et sur quelques bancs du groupe SOCR)
Prochaine séance demain, mercredi 7 mars 2018, à 14 h 30.
La séance est levée à 17 heures.
Jean-Luc Blouet
Direction des comptes rendus
Annexes
Ordre du jour du mercredi 7 mars 2018
Séance publique
De 14 h 30 à 18 h 30
Présidence : M. Philippe Dallier, vice-président
Secrétaires : Mme Agnès Canayer - M. Yves Daudigny
1. Proposition de loi organique visant à améliorer la qualité des études d'impact des projets de loi (n° 610 rectifié, 2016-2017)
Rapport de M. Jean-Pierre Sueur, fait au nom de la commission des lois (n° 317, 2017-2018)
Texte de la commission (n° 318, 2017-2018).
2. Proposition de loi visant à instituer le Conseil parlementaire d'évaluation des politiques publiques et du bien-être (n° 611 rectifié, 2016-2017)
Rapport de M. Jean-Pierre Sueur, fait au nom de la commission des lois (n° 319, 2017-2018).
De 18 h 30 à 20 h 30 et de 22 heures à minuit
Présidence : M. Philippe Dallier, vice-président M. Vincent Delahaye, vice-président
3. Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, visant à assurer la revalorisation des pensions de retraite agricoles en France continentale et dans les outre-mer (n° 368, 2016-2017)
Rapport de M. Dominique Watrin, fait au nom de la commission des affaires sociales (n° 315, 2017-2018)
Texte de la commission (n° 316, 2017-2018).
4. Proposition de résolution en application de l'article 34-1 de la Constitution, pour une Conférence des parties (COP) de la finance mondiale, l'harmonisation et la justice fiscales (n° 271, 2017-2018).
Analyse des scrutins publics
Scrutin n°66 sur l'ensemble de la proposition de loi tendant à sécuriser et à encourager les investissements dans les réseaux de communications électroniques à très haut débit.
Résultat du scrutin
Nombre de votants :334
Suffrages exprimés :283
Pour :283
Contre :0
Le Sénat a adopté.
Analyse par groupes politiques
Groupe Les Républicains (146)
Pour : 145
N'a pas pris part au vote : 1 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat
Groupe SOCR (78)
Pour : 78
Groupe UC (50)
Pour : 50
Groupe LaREM (21)
Abstentions : 21
Groupe RDSE (21)
Pour : 6 - MM. Stéphane Artano, Ronan Dantec, Éric Gold, Jean-Noël Guérini, Mme Mireille Jouve, M. Joël Labbé
Abstentions : 15
Groupe CRCE (15)
Abstentions : 15
Groupe Les Indépendants (11)
N'ont pas pris part au vote : 11 - MM. Jérôme Bignon, Emmanuel Capus, Daniel Chasseing, Jean-Pierre Decool, Alain Fouché, Joël Guerriau, Jean-Louis Lagourgue, Claude Malhuret, Alain Marc, Mme Colette Mélot, M. Dany Wattebled
Sénateurs non inscrits (6)
Pour : 4 - M. Philippe Adnot, Mme Christine Herzog, M. Jean Louis Masson, Mme Évelyne Perrot
N'ont pas pris part au vote : 2 - Mme Claudine Kauffmann, M. Stéphane Ravier