Questions d'actualité
M. le président. - L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement. La séance est retransmise en direct sur Public Sénat, sur le site Internet du Sénat et sur Facebook.
Je vous invite à observer l'une de nos valeurs essentielles : le respect des uns et des autres - et des temps de parole.
Réforme de la fonction publique (I)
Mme Maryvonne Blondin . - (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR) Jeudi, lors du comité interministériel sur la transformation publique, le Premier ministre a annoncé des pistes, dont l'extension du recours aux contractuels - alors que les syndicats réclament un nouveau plan de titularisations - ainsi qu'un plan de départs volontaires pour les agents de la fonction publique.
Avec le gel du point d'indice et le rétablissement du jour de carence, les fonctionnaires n'ont cessé d'être pointés du doigt.
Moderniser la fonction publique, la rendre plus efficace et l'adapter aux changements de notre époque, ce n'est pas la démanteler ! Encore moins quand les agents des hôpitaux, des Ehpad ou de la police ont un besoin criant de personnel, quand les services publics de proximité ferment partout sur le territoire...
Allez-vous clarifier ces annonces ? Quels secteurs seront concernés ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)
M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics . - Le Premier ministre a fixé des orientations et des objectifs qui feront l'objet d'une concertation avec les syndicats, sur le dialogue social, le recrutement et la rémunération, mais aussi les carrières, la formation, la mobilité.
Avec les nouvelles technologies, certains métiers de la fonction publique pourront être remis en cause ; des établissements publics pourront être fusionnés : il pourra être envisagé de proposer aux agents concernés des plans de départs volontaires. (Le ministre est invité à parler plus distinctement par de nombreux sénateurs.)
La chose est déjà possible depuis neuf ans. Chaque année, entre 700 et 1 300 personnes quittent la fonction publique de manière volontaire.
Ce plan de départ sera simplifié et négocié. Ce n'est pas un plan de départ forcé ni un droit en moins, c'est une possibilité en plus offerte aux agents. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)
Mme Maryvonne Blondin. - Cela ne me rassure pas. Pas moins de 120 000 fonctionnaires vont disparaître d'ici cinq ans. Allez le dire dans les Ehpad, dans l'Éducation nationale ! Une des clefs de la modernisation de la fonction publique est un management efficace. Vos annonces vont à rebours de ce qu'il faudrait faire ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR et sur plusieurs bancs du groupe RDSE)
Dématérialisation des demandes de carte grise
M. Joël Guerriau . - Les préfectures ont fermé leur accueil pour l'immatriculation des véhicules : depuis le 1er novembre 2017, tout est dématérialisé. Un progrès ? Pas pour tous.
Des sites marchands trompeurs, mieux référencés dans les moteurs de recherche que le site du Gouvernement, en profitent pour facturer lourdement leur service. Sur le site de l'Agence nationale des titres sécurisés, des milliers d'usagers se heurtent à des dysfonctionnements informatiques ; s'ils renoncent, ils se retrouvent dans l'illégalité...
Où est le service public quand un usager se retrouve seul face à une machine, sans personne pour l'aider dans ses démarches ? Tous les Français ne sont pas des cybercitoyens. L'administration 3.0 crée des situations kafkaïennes et accentue la fracture numérique, au risque de provoquer de l'exclusion. Quelles réponses apportez-vous ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Indépendants)
Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports . - Les demandes de titre de circulation représentent trente millions d'opérations chaque année. La dématérialisation portée par le plan Préfectures, nouvelle génération apporte sécurisation, efficience et simplification. Pas moins de 2 millions de permis de conduire et 1,5 million de cartes grises ont été délivrés sans problème. Ce sont autant de files d'attente en moins dans les préfectures.
Pour répondre aux quelques dysfonctionnements constatés, les services du ministère de l'Intérieur ont mis en place un plan d'action qui repose sur un correctif informatique, sur une meilleure qualité de connexion au portail et sur l'amélioration de la chaîne de soutien aux utilisateurs.
Des points numériques ont été mis en place dans les 300 préfectures et sous-préfectures concernées, animés par des médiateurs numériques qui apportent un accompagnement humain aux administrés les plus éloignés des nouvelles technologies. Cette réforme concilie gain de temps et soutien aux administrés qui en ont besoin. (M. Martin Lévrier applaudit.)
M. Joël Guerriau. - Cette réponse administrative n'en est pas une pour tous ceux qui sont perdus devant leur écran. L'informatique est binaire: si vous ne donnez pas la réponse attendue, vous êtes bloqué ! En préfecture, il n'y a personne pour répondre - j'en ai fait l'expérience.
Il n'y a de richesse que dans l'humain. La dématérialisation ne doit pas conduire à la déshumanisation. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Indépendants, ainsi que sur certains bancs des groupes RDSE et SOCR)
Éloignement des déboutés du droit d'asile
M. Roger Karoutchi . - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Votre Gouvernement, Monsieur le Premier ministre, a adressé en novembre une circulaire à tous les préfets leur demandant la plus grande fermeté à l'égard des immigrants en situation irrégulière et des déboutés du droit d'asile.
À quelques jours du dépôt de votre texte sur le sujet, la suppression de la réduction tarifaire dans les transports pour les étrangers en situation irrégulière, souhaitée par le conseil régional d'Île-de-France, a été annulée...
Où en êtes-vous, Monsieur le Premier ministre, sur la lutte contre l'immigration irrégulière et les déboutés du droit d'asile ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)
M. Christophe Castaner, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement . - (Mouvements à droite) Voilà un sujet qui doit nous mobiliser, alors que 96 % des décisions de reconduite à la frontière ne sont pas exécutées. (On renchérit à droite.)
Le phénomène n'est pas nouveau. La France a longtemps joué de la complexité des procédures pour décourager les réfugiés. Il y a aussi les migrants économiques. Le Gouvernement a souhaité se donner les moyens de mener à bien les reconduites qui s'imposent. Nous avons un devoir d'humanité à l'égard de ceux qui peuvent prétendre au droit d'asile et de fermeté à l'égard de ceux qui n'ont pas vocation à rester en France.
Ce sera l'objet du projet de loi porté par le ministre de l'intérieur, qui portera les délais moyens de rétention jusqu'à 90 jours, sachant que la moitié des décisions des autorités consulaires ne parviennent qu'après 45 jours. Ambition d'humanité et exigence de fermeté, voilà ce que les Français attendent. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)
M. Roger Karoutchi. - J'aurais pu tenir le même propos, quand j'étais à votre place... Sauf que vous diminuez les crédits de reconduite à la frontière par rapport à 2017 ! Vous élargissez en outre les capacités de recours qui permettent de retarder l'éloignement. Où est, dans la pratique, la fermeté affichée ? Tous les élus Les Républicains sont attachés à ce que ceux qui ont le statut de réfugié soient bien traités. Cela exige des crédits pour leur intégration. Pour l'heure, le compte n'y est pas ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et sur certains bancs du groupe UC)
Manque de moyens des parquets
M. Vincent Capo-Canellas . - (Applaudissements sur les bancs du groupe UC) Lors de l'audience solennelle de rentrée du tribunal de Bobigny, la procureure de la République a lancé un appel au secours sur la capacité de la justice à répondre à la délinquance. Le Monde en a fait sa une. Le manque de moyens pose la question de l'effectivité de la justice pénale et de l'égalité devant la sanction. Dans certains départements, on priorise : le vol à l'étalage ou l'usage de stupéfiants ne sont plus poursuivis... Les procureurs doivent faire des choix : ce sont 418 dossiers d'instruction qui stagnent dans les rayons du palais de justice de Bobigny. Le taux de réponse pénale est de 50 % à l'échelle nationale, mais de 31 % en Seine-Saint-Denis.
Ne peut-on prendre des mesures exceptionnelles pour ce département exceptionnel ? En 2018, il n'y aura pas de création de postes au parquet de Bobigny. D'autres juridictions sont-elles dans le même cas ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UC)
M. François Grosdidier. - C'est pareil à Metz !
Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice . - Votre question est percutante. Les propos de la procureure de Bobigny ont révélé des inquiétudes. J'ai été alertée, dès mon arrivée, sur la situation de certains parquets, et eu connaissance du « livre noir » des procureurs.
Dès 2018, nous avons augmenté le budget de la justice de 3,9 % et créé 148 postes. La loi de programmation viendra conforter ces effectifs dans la durée. À Bobigny, le nombre de magistrats du siège passera de 131 à 137 et le nombre de magistrats du parquet de 53 à 57. Si le président du tribunal le propose, une deuxième chambre de comparution immédiate pourra ainsi être ouverte. Les effectifs seront pérennisés, l'action publique sera confortée et pourra apporter une réponse pénale adaptée.
Enfin, la révision constitutionnelle consolidera le statut du parquet ; la loi de programmation et la loi pénale renforceront les moyens procéduraux, la transformation numérique et la simplification - autant d'éléments puissants. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)
Police de sécurité du quotidien
M. Frédéric Marchand . - Les crédits dédiés à la sécurité pour 2018 apportent désormais aux policiers et gendarmes des moyens matériels et humains à la hauteur de leurs missions. (On se récrie sur les bancs du groupe Les Républicains)
M. François Grosdidier. - Loin s'en faut !
M. Frédéric Marchand. - Ce budget est en résonance avec la loi renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme, face auquel nous ne baisserons pas la garde.
M. François Grosdidier. - C'est Gérard Collomb qui a écrit la question ? (On s'amuse à droite.)
M. Frédéric Marchand. - Dès 2018, police et gendarmerie seront dotées de 10 000 emplois supplémentaires, comme s'y était engagé le président de la République. La police de sécurité du quotidien suscite beaucoup d'attentes chez les élus locaux. Une consultation inédite a permis à 70 000 gendarmes et policiers de s'exprimer : 74 % d'entre eux souhaitent la suppression de tâches indues. Ils sont formés aux situations les plus extrêmes, on ne saurait épuiser cette richesse en missions accessoires.
M. Jean-François Husson. - La question ! (On renchérit sur les bancs des groupes Les Républicains et SOCR.)
M. Frédéric Marchand. - Le Gouvernement envisage un recours renforcé aux entreprises privées de sécurité, avec lesquelles les forces de police coopèrent déjà. L'objectif de ce continuum de sécurité est de permettre aux forces de sécurité de se consacrer à leurs missions premières. (On s'impatiente bruyamment sur les bancs du groupe Les Républicains.)
M. le président. - Songez à votre question...
M. Frédéric Marchand. - Monsieur le Ministre, pouvez-vous nous éclairer sur ces missions indues qui pourraient être confiées demain aux entreprises de sécurité privée ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)
M. Christophe Castaner, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement . - Vous avez raison. (Rires sur les bancs du groupe Les Républicains) Le ministre de l'intérieur a vu son budget augmenter de 6,8 % dans le projet de loi de finances pour 2018, avec une hausse de 28 % pour la ligne « Asile, intégration et immigration », n'en déplaise à M. Karoutchi.
M. François-Noël Buffet. - C'est faux !
M. Christophe Castaner, secrétaire d'État. - La coordination de l'ensemble des acteurs de la sécurité est une question essentielle. (On ironise sur les bancs du groupe Les Républicains.) La police de proximité permettra de définir au plus près des territoires, avec les élus locaux, les meilleures façons d'intervenir.
Le Sénat travaille déjà sur la problématique des forces de sécurité intérieure et l'interaction avec le secteur privé sur le sujet - la presse s'en fera l'écho demain. La coordination de tous les acteurs, voilà la condition d'une meilleure sécurité dans tous les territoires. (Quelques applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)
Refonte de la carte des zones défavorisées
M. Yvon Collin . - Monsieur le Premier ministre, la refonte de la carte des zones défavorisées mobilise les agriculteurs. En Occitanie, la situation est tendue : blocages, barrages... Les agriculteurs manifestent à juste titre contre un zonage qui les plongera dans la désespérance. Ont-ils besoin de cela, en sus des aléas climatiques et sanitaires, de la volatilité des prix qui bouchent leur horizon ?
La carte définitive remonte à Bruxelles le mois prochain : il y a urgence ! Les agriculteurs demandent le maintien des aides dans des zones qui, sans être en montagne, ont tout du handicap naturel. Cultiver dans les coteaux du Quercy ou les Corbières reste difficile !
Ne découragez pas ces hommes et ces femmes qui s'accrochent, et qui sont souvent le pivot de l'économie locale. Allez-vous entendre les agriculteurs et porter un projet équitable devant la Commission européenne ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE et sur quelques bancs des groupes SOCR et Les Républicains)
M. Stéphane Travert, ministre de l'agriculture et de l'alimentation . - Je n'ignore rien des difficultés des agriculteurs, notamment en zones défavorisées. (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains) Tout le Gouvernement est mobilisé pour trouver des solutions.
Cette carte date de 1976 ; depuis, la cartographie de la France a changé. Cela fait dix ans que l'Europe nous impose de réviser la carte - ce que les majorités précédentes n'ont jamais fait. (Exclamations sur les bancs du groupe SOCR)
Je sais les difficultés, les attentes. J'ai reçu les producteurs, les organisations syndicales. Je veux tenir un discours de vérité : oui, certaines communes sortiront du zonage. Elles seront accompagnées.
Nous travaillons, concertons pour définir les critères les plus robustes, les plus justes, et les plus soutenables financièrement. Concertation, équilibre, équité, voilà les maîtres mots. Un comité national a lieu demain encore. J'espère que nous trouverons une solution pour la ferme France.
M. Yvon Collin. - Soit, mais les agriculteurs ne se contenteront pas de vagues promesses. Les compensations devront être chiffrées.
Mme Sophie Primas. - Avec quel argent ?
Réforme de la fonction publique (II)
M. Éric Bocquet . - Il y a quelques jours, Monsieur le Premier ministre, vous avez annoncé une réforme de la fonction publique et du statut des agents, le tout accompagné de ce que dans le privé, on appellerait un plan social. Vous dites vouloir « bousculer les équilibres ». Les annonces ont été faites sans négociation préalable, ni concertation ! Ces attaques contre la fonction publique sont d'une ampleur inédite.
Quelles sont, Monsieur le Premier ministre, vos intentions véritables ? (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE)
M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics . - (Exclamations sur de nombreux bancs) À l'issue du comité interministériel de la transformation publique, jeudi dernier, le Premier ministre a annoncé une réforme de la fonction publique, sur quatre axes : le recrutement, qui s'ouvrira davantage au contrat, sans remettre en cause le statut ; la simplification du dialogue social ; les rémunérations, avec davantage d'individualisation, comme engagé depuis 2014 via le Régime indemnitaire des fonctionnaires de l'État (Rifseep), et enfin la mobilité et les évolutions des carrières qui passeront davantage par la formation avec les nouvelles technologies. Certains établissements publics peuvent être fusionnés, des métiers peuvent avoir perdu de leur intérêt, nous voulons offrir aux agents qui le souhaitent la possibilité d'en changer, voire de partir dans le privé, en les accompagnant. (M. Martin Lévrier applaudit.)
M. Éric Bocquet. - J'entends votre réponse pour la deuxième fois, mais vous ne m'avez toujours pas convaincu ! Au moment où les agents dans les Ehpad, les hôpitaux, les établissements scolaires expriment leurs inquiétudes, vous annoncez 120 000 suppressions de postes, ceci après que les gouvernements précédents en ont déjà supprimé plusieurs dizaines de milliers. Nos compatriotes expriment leur profond attachement au service public, non pas comme à un totem, mais comme la garantie d'un accès égal aux fonctions que ces services assument : c'est un pilier de notre République. Ce n'est pas de moins de services publics dont nous avons besoin, mais de nouveaux services publics, en particulier dans la petite enfance, le logement ; comme nous, beaucoup de nos compatriotes pensent que le marché ne doit pas être la règle absolue dans notre République ! (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE, ainsi que sur quelques bancs des groupes SOCR et RDSE)
Mercosur
M. Laurent Duplomb . - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Je pose ma question au Premier ministre, elle parle d'emploi, de l'avenir d'une filière et d'un territoire ; elle parle de confiance, celle que le président de la République souhaitait recréer dans son discours de Rungis, la confiance des territoires et de nos concitoyens. Or le président de la République a confirmé à son homologue argentin, le 2 septembre, qu'il est favorable à un accord avec le Mercosur. Les éleveurs ne craignent pas l'ouverture, ils ont peur pour l'avenir de leur emploi, de leur exploitation et pour la sécurité alimentaire. Ils ont raison d'avoir peur. Avez-vous correctement évalué les effets de cet accord ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et sur quelques bancs du groupe UC)
M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères . - Nous avons tous en commun la volonté de protéger notre territoire...
M. Bruno Sido. - Bonne nouvelle !
M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État. - ... et nos producteurs, qui font gagner la France (Exclamations à droite) : l'agriculture est largement excédentaire dans notre balance commerciale. La France défend ses intérêts. Le Premier ministre a reçu, il y a quelques jours, Cecilia Malmström, la commissaire européenne, pour lui rappeler nos lignes rouges dans l'accord avec le Mercosur. À Buenos Aires - Jean Bizet m'est témoin, il était là -, nous avons réactivé une coalition de onze États membres qui souhaitent de la fermeté sur les questions agricoles. La France continuera à être intraitable en matière de sécurité sanitaire et de contingents pour maintenir le niveau de qualité propre à nos producteurs. À chaque déplacement du président de la République, nous nous efforçons de lever les barrières commerciales à nos produits. De nouveaux débouchés s'ouvrent à la filière bovine en Chine ; l'embargo sur la volaille a été levé en Irak. Nos producteurs de lait mais aussi nos vignerons attendent des débouchés grâce à l'accord du Mercosur. Nous agissons à la fois en défense et de manière offensive. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)
M. Laurent Duplomb. - Cet accord avec le Mercosur prévoit l'accès au marché européen de plus de 100 000 tonnes de viande sud-américaine, des viandes provenant d'animaux où la traçabilité individuelle et les principes du bien-être animal ne sont pas obligatoires, où les additifs alimentaires dans la ration des bovins sont autorisés alors qu'ils sont interdits chez nous. Et que dire du Brésil, englué dans une affaire de corruption concernant un vaste réseau de commercialisation de viande avariée !
Le kilo de viande sud-américaine serait commercialisé à 8 euros contre 13 euros sur le marché français.
Comment pouvez-vous imaginer redonner courage aux éleveurs ? Une fois de plus, votre Gouvernement fait le contraire de ce qu'il dit ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et sur quelques bancs du groupe UC)
Réforme de la fonction publique (III)
M. Julien Bargeton . - Les transformations de notre société et de notre économie ne laissent pas les fonctionnaires à l'abri ; ils sont même en première ligne des mutations démographiques, économiques et sociales. Ils en sont conscients, et sont demandeurs de réforme ! Redonnons du sens à la fonction publique !
Seulement 5 % de fonctionnaires changent d'employeur public ; 0,5 % change de type de fonction publique.
La réforme annoncée ne va pas sans inquiéter, on le comprend après les réformes conduites par le passé, qui ont pris le rabot comme principal, sinon comme seul outil ; à l'inverse, une approche qualitative consiste à construire une gestion moderne des ressources humaines dans la fonction publique de l'État.
Comment le Sénat - représentant des collectivités territoriales, qui sont autant d'employeurs publics - sera-t-il associé à ces réflexions ? Quel sera le calendrier de la réforme ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)
M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics . - Merci pour votre question (Exclamations à droite). La réforme vise, je l'ai dit, à améliorer le dialogue social dans la fonction publique - il y a 22 000 instances représentatives du personnel -, à diversifier les modes de recrutement, à garantir l'égalité d'accès pour tous, à favoriser la mobilité - y compris celle, volontaire, vers le privé - et à travailler sur les rémunérations.
Nous avons la chance de disposer d'une année entière pour dialoguer, nous rencontrerons les partenaires dès la semaine prochaine pour arrêter le calendrier et les modalités de la réforme.
L'inquiétude des agents publics est légitime, car depuis plus de vingt ans les réformes ne sont que budgétaires et n'ont jamais interrogé les métiers.
Nous publierons prochainement des schémas d'orientation ; un milliard d'euros du programme d'investissement d'avenir et 700 millions d'euros pour financer les besoins des administrations seront fléchés vers la formation des agents publics. Le Parlement sera largement associé à ces travaux. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)
Pouvoir d'achat des retraités
Mme Pascale Bories . - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Les décisions du Gouvernement ne sont pas comprises car elles ne sont pas justes. Il n'est pas juste de traiter les retraités qui ont travaillé toute leur vie comme des nantis et de baisser les impôts des Français aisés pour en reporter le poids sur les moins riches. Sans parler des hausses de tarif de l'essence, du gaz et des soins hospitaliers. Les nouvelles taxes - vous en avez créé neuf depuis votre prise de fonction - grèvent le pouvoir d'achat. Les Français sont en train de faire leurs comptes, Monsieur le Premier ministre, et ils savent compter ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)
M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics . - (Vives exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains, où l'on demande que M. le Premier ministre réponde.) Nous avons exonéré de taxe d'habitation 80 % des ménages et elle sera supprimée totalement en 2020.
La hausse de la CSG est plus que compensée par la suppression des cotisations sociales pour les actifs, tandis que les retraités touchant moins de 1 200 euros bénéficient de la baisse de la taxe d'habitation.
Vous faites un procès au Gouvernement d'augmenter les impôts, mais le candidat que vous souteniez, lorsqu'il était Premier ministre, les a augmentés de 25 milliards d'euros ! (On se récrie sur les bancs du groupe Les Républicains.) Et votre candidat proposait de supprimer complètement l'impôt sur la fortune (ISF), alors que nous avons maintenu la part sur la fortune immobilière. Je vous engage donc à plus de retenue et moins de posture. (Vives exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains)
Mme Pascale Bories. - Notre candidat voulait réformer l'État ! Or le budget de l'État continue à croître. Vous transférez simplement des impôts pesant sur les riches vers les autres Français. Votre réforme est comme le Canada Dry : elle a l'image et le goût de la réforme, mais ce n'en est pas une ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)
Chlordécone
M. Maurice Antiste . - (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR) Depuis le 26 décembre dernier, la presse locale de Martinique et de Guadeloupe s'est fait l'écho de l'augmentation de l'exposition des habitants au chlordécone. Un lien significatif a été établi avec le cancer de la prostate dont les taux sont plus élevés en Guyane et Martinique que dans l'Hexagone. Il en va de même pour les accouchements prématurés et les pubertés précoces.
La ligne de conduite de l'État depuis 2008 est de faire diminuer l'exposition des populations au chlordécone. La tendance a-t-elle changé ? Pourquoi ne pas demander à la Commission européenne de revenir aux normes de 2008, plus protectrices ?
Vous remettez en cause le lien avec le cancer de la prostate. Ne faudrait-il pas une autre étude après celle de 1979 du Centre d'études sur le cancer ? Le Gouvernement saisira-t-il le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) pour reclasser le chlordécone comme cancérogène probable ? Les Martiniquais et Guadeloupéens sont inquiets. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR et sur quelques bancs du groupe CRCE)
Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé . - J'assure nos compatriotes des Antilles de mon plein engagement sur le chlordécone. J'y ai travaillé avant d'être ministre. Une étude est en cours pour mieux identifier les effets à long terme de l'exposition à ce produit. Je me suis engagée à ce qu'une nouvelle cartographie des sols pollués soit lancée en 2018. Nous avons sollicité la Commission européenne pour clarifier la directive sur les seuils dans les produits alimentaires carnés. En 2016, une étude a confirmé que le respect des seuils était de 98 % aux Antilles. Cela devrait vous rassurer. Le ministre des outre-mer va réunir très prochainement l'ensemble des élus, pour que nous avancions ensemble, en toute transparence. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)
La séance est suspendue à 17 h 40.
présidence de M. Philippe Dallier, vice-président
La séance reprend à 17 h 50.