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Table des matières
Modification de l'ordre du jour
Mission d'information (Nominations)
Représentation des communes déléguées dans les communes nouvelles
M. Yvon Collin, pour le groupe RDSE
Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur
Mme Jacqueline Gourault, ministre
Quelles énergies pour demain ?
M. Ronan Dantec, pour le groupe RDSE
M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État
M. Christian Manable, pour le groupe SOCR
Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur
Mme Jacqueline Gourault, ministre
Modalités de dépôt de candidature aux élections
Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur
M. Didier Marie, rapporteur de la commission des lois
ARTICLE ADDITIONNEL avant l'article premier A
Ordre du jour du jeudi 23 novembre 2017
Composition d'une mission d'information
SÉANCE
du mercredi 22 novembre 2017
21e séance de la session ordinaire 2017-2018
présidence de M. David Assouline, vice-président
Secrétaires : M. Joël Guerriau, M. Dominique de Legge.
La séance est ouverte à 14 h 30.
Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.
Modification de l'ordre du jour
M. le président. - Par lettre en date du 21 novembre 2017, le Gouvernement a demandé l'inscription à l'ordre du jour du mardi 19 décembre des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022, ou de sa nouvelle lecture, après l'examen des conclusions de la commission mixte paritaire, sur le projet de loi de finances pour 2018, ou de sa nouvelle lecture.
Nous pourrions prévoir une discussion générale commune d'une heure pour ces deux textes.
Il en est ainsi décidé.
Échec en CMP
M. le président. - J'informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée d'élaborer un texte sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 n'est pas parvenue à l'adoption d'un texte commun.
Communications
Mission d'information (Nominations)
M. le président. - L'ordre du jour appelle la désignation des 27 membres de la mission d'information sur Alstom et la stratégie industrielle du pays, créée à l'initiative du groupe socialiste et républicain en application du droit de tirage prévu par l'article 6 bis du Règlement.
En application de l'article 8, alinéas 3 à 11, et de l'article 110 de notre Règlement, la liste des candidats établie par les groupes a été publiée.
Elle sera ratifiée si la présidence ne reçoit pas d'opposition dans le délai d'une heure.
Représentation des communes déléguées dans les communes nouvelles
M. le président. - L'ordre du jour appelle le débat : Représentation des communes déléguées dans les communes nouvelles, une demande du groupe RDSE. Ce débat et le suivant s'inscrivent dans l'ordre du jour réservé à un groupe. Nous devons avoir terminé à 18 h 30. J'invite chacun à respecter son temps de parole.
M. Yvon Collin, pour le groupe RDSE . - Alain Bertrand souffrant d'une extinction de voix, je me fais son porte-parole.
Je remercie Mme Gatel, rapporteure de la commission des lois, même si nous aurions préféré examiner aujourd'hui notre proposition de loi.
Plusieurs maires ont signalé le problème de la représentativité à long terme des communes déléguées dans les communes nouvelles. Lors des élections municipales de 2020, le nombre de conseillers municipaux chutera, ce qui suscite des inquiétudes. En effet, si la représentativité des communes déléguées figure généralement dans les chartes des communes nouvelles, elle n'a aucun caractère obligatoire.
Jusqu'au prochain renouvellement du conseil de la commune nouvelle, le conseil municipal est composé de l'ensemble des membres des conseils municipaux des anciennes communes. Deuxième période transitoire de 2020 à 2026 : après le premier renouvellement, le conseil municipal de la commune nouvelle sera du nombre prévu pour une commune de la strate démographique immédiatement supérieure. Enfin, à partir de 2026, c'est le droit commun de l'article L2121-2 du code général des collectivités territoriales qui s'applique.
Lors des prochaines élections de 2020, rien n'obligera les listes à comporter des candidats de chaque commune déléguée. En cas de démission ou de décès du maire délégué, la représentativité de la commune déléguée peut ne pas être assurée.
Ce manque de pérennité de la représentativité des communes historiques fait obstacle aux fusions.
Le groupe RDSE avait rédigé une proposition de loi pour garantir la représentation des communes déléguées au sein de la commune nouvelle. Les listes seraient composées de candidats résidant dans chaque commune déléguée...
M. Bruno Sido. - Très bien !
M. Yvon Collin. - Le maire délégué serait choisi parmi les conseillers municipaux résidant dans la commune déléguée. Un conseiller municipal décédé ou démissionnaire ne pourrait être remplacé que par un candidat de la même commune déléguée.
Toutefois, il y aurait un problème dans les communes de moins de mille habitants, où les conseillers sont élus au scrutin majoritaire, car l'ordre de la liste peut être modifié. La solution serait d'appliquer le scrutin de liste à toutes les communes nouvelles, quelle que soit la population. C'était le sens d'un amendement d'Alain Bertrand - mais, à la suite de la motion votée en commission, la proposition de loi est devenue un débat.
Certes, la création de communes nouvelles provient d'abord d'une démarche volontaire des élus, mais avoir un projet commun n'implique pas de renoncer à son identité, symbolisée par une mairie, une école, une église, un monument aux morts.
La rapporteure de la commission des lois a jugé que la législation actuelle donnait assez de souplesse aux communes pour s'organiser, et qu'il fallait leur faire confiance : elles sauraient naturellement assurer le respect des anciennes communes déléguées. Cet optimisme l'honore - mais en matière électorale, mieux vaut s'assurer qu'espérer ! Imaginons quatre communes voulant fusionner, l'une de 900 habitants, les trois autres de 50 habitants, soit 1 050 habitants au total. Comme les candidats de la commune majoritaire n'ont aucun intérêt à laisser des places éligibles aux autres, il n'y a aucune garantie que ces communes soient représentées au conseil municipal, même si elles auront un maire délégué.
Les maires des petites communes connaissent les faiblesses de la nature humaine : le bon sens rural les pousse à demander des garanties.
Notre texte n'était pas parfait, mais nous aurions pu, ensemble, l'améliorer. Ce débat, toutefois, a le mérite de lancer la discussion. Il est de la responsabilité du Sénat de lancer des pistes.
L'excellent travail de Mme Gatel avait reconnu que dans l'état actuel du droit, des communes déléguées pourraient ne pas être représentées, par exemple lorsque le conseil d'une commune nouvelle constituée de seize communes déléguées ne compte que quinze membres. Certains ajustements juridiques peuvent être apportés aisément. Rien ne s'oppose à ce que nous aboutissions. (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE ; M. Pierre-Yves Collombat et Mme Cécile Cukierman applaudissent également.)
M. le président. - Merci, j'ai reconnu la prose, et même l'accent, d'Alain Bertrand. (Sourires)
Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur . - Ce débat est l'occasion de revenir sur un sujet cher au Gouvernement, celui des communes nouvelles. Projets locaux portés par les élus, elles sont le gage d'une meilleure administration et de meilleurs services rendus à la population. L'État a toujours été un partenaire attentif, soucieux d'accompagner les initiatives des territoires.
Les communes nouvelles ont été créées par la loi du 16 décembre 2010 ; la loi Pélissard du 16 mars 2015, du nom de l'ancien président de l'Association des maires de France (AMF), en a amélioré le régime et assis le succès.
À la différence de la rationalisation imposée de la carte intercommunale, les communes nouvelles reposent uniquement sur le volontariat. Ainsi, 1 760 communes ont fusionné pour former 517 communes nouvelles, regroupant 1,8 million d'habitants. La France est passée sous la barre symbolique des 36 000 communes. Selon la direction générale des collectivités locales (DGCL), 24 projets sont en cours. Il y a donc une décélération du processus, mais le Gouvernement croit toujours à la force de ce modèle et compte accompagner son développement : prolongation jusqu'au 1er janvier 2019 des incitations financières, y compris pour les communes nouvelles créées en 2017 ; élargissement du bénéfice de la bonification de la DGF de 5 % aux communes de 10 000 à 15 000 habitants ; fonds de modernisation de 50 millions d'euros au sein de la dotation de soutien à l'investissement public local (DSIL).
Une circulaire du 18 avril 2017 vise à encadrer la graphie des noms des communes nouvelles - car l'imagination des élus est parfois débridée ! Autres mesures : une dispense d'actualisation des cartes grises, le maintien des associations communales de chasse agréées, l'adaptation des formulaires Cerfa, le maintien des aides au titre du Fonds d'amortissement des charges d'électrification (FACÉ) aux communes déléguées...
MM. Jean-Claude Requier et Yvon Collin. - Très bien !
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Grâce à la loi Sido de novembre 2016, les communes associées peuvent être maintenues sous la forme de commune déléguée. De manière transitoire, il pourra être dérogé à la loi sur la parité pour l'élection des adjoints.
M. Bruno Sido. - Absolument.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Les communes seront enfin représentées dans les organes délibérants des EPCI à fiscalité propre et des syndicats.
Toutefois, il ne faut pas oublier le principe ayant présidé à la création des communes nouvelles : ce sont des communes à part entière, non des intercommunalités déguisées.
Le groupe RDSE, dans sa proposition de loi, proposait que les listes aux élections municipales de la commune nouvelle comportent obligatoirement des candidats de chaque commune déléguée ainsi qu'un remplacement obligatoire de chaque conseiller municipal par un conseiller issu de la même commune déléguée. Le critère de résidence constitue une rupture d'égalité devant le suffrage. Vous réintroduisez de fait les sections électorales supprimées en 2013 : c'est pourquoi nous partageons l'analyse de la rapporteure sur l'inconstitutionnalité de la loi.
Il y a eu d'autres propositions. L'AMF propose de fixer le nombre de conseillers municipaux à trois fois le nombre de communes déléguées. Pour mémoire, c'est seulement à partir du deuxième renouvellement que le nombre de conseillers municipaux sera conforme au droit commun.
Le Gouvernement tient à ce que les communes nouvelles soient considérées comme des communes à part entière : le dispositif dérogatoire n'a pas vocation à être pérennisé. Nulle commune nouvelle ne pourra réussir sans une volonté commune autour d'un projet d'avenir et d'une vision partagée du territoire. Il faut conforter les communes nouvelles, non freiner leur entrée dans le droit commun.
C'est le sens des propositions de la conférence des communes nouvelles. Le Gouvernement sera là pour vous aider. (Applaudissements sur les bancs des groupes UC, RDSE, LaREM et SOCR)
M. Éric Kerrouche . - Entre 2015 et 2016, du fait de la volonté des élus locaux, plus de 500 communes nouvelles ont été créées à partir de 1 800 communes historiques, pour 25 000 conseillers municipaux et 1,7 million de citoyens. C'est la preuve de la capacité d'adaptation et d'innovation des territoires dès lors que le régime juridique est souple et permet de respecter les spécificités de chacun. Quelque 95 % des communes nouvelles ont souscrit au régime dérogatoire et transitoire qui prend fin en 2020. À cette date, les effectifs des conseillers municipaux chuteront, parfois jusqu'à 80 %, posant la question de la représentation démocratique. Les communes nouvelles constituent bien une nouvelle entité, pas une supra-communalité, mais cela ne doit pas interdire d'assurer une meilleure représentativité, sans complexité excessive. Le caractère obligatoire de la Charte peut-il être examiné ? Pourquoi ne pas laisser à chaque commune nouvelle le soin de définir sa propre gouvernance ? (M. Alain Bertrand applaudit.)
Mme Jacqueline Gourault, ministre . - La solution doit être trouvée au moment où l'on constitue les listes. Comme dans une commune, on s'efforce de représenter tous les quartiers, les têtes de listes devront faire en sorte que les anciennes communes déléguées soient bien représentées.
Dans le Maine-et-Loire, les chartes des nombreuses communes nouvelles servent de document de base - certes sans valeur juridique, mais contractuelle et morale. Lui donner force juridique risquerait d'entrer en contradiction avec la loi et d'alourdir le fonctionnement des communes nouvelles.
M. Alain Marc . - La démarche volontaire des élus a été encouragée par un pacte financier et par des garanties de représentativité des communes historiques à titre transitoire. La fin programmée de ce régime transitoire provoque des inquiétudes légitimes. En 2020, la baisse du nombre des conseils municipaux devrait être de 49 % ; en 2026, de 56 %. Les élus redoutent que les communes déléguées soient insuffisamment représentées. Une nouvelle phase transitoire ne pourrait-elle pas être définie ? (M. Alain Bertrand applaudit.)
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Les règles du jeu étaient connues, les créateurs des communes nouvelles les avaient en main. Ils savaient que la période transitoire, par définition, s'achèverait un jour, qu'ils passeraient d'abord à la strate supérieure, puis à la strate correspondant à la population de la commune. Le Gouvernement ne reviendra pas dessus. La meilleure réponse, c'est l'équilibre dans la formation des listes.
M. Alain Marc. - On a confondu finalité et moyens. Ce qui compte, c'est de définir un projet de territoire plutôt que de toucher aux structures.
M. Jean-Claude Requier . - Comme beaucoup d'entre vous, je sors d'une campagne électorale, j'ai visité les 318 communes du Lot. On a parlé presque partout des communes nouvelles. Les petites communes qui se regroupent ont peur de ne plus avoir de conseillers municipaux. Le protocole n'est que moral, rien n'obligera les nouveaux candidats à respecter les engagements pris par les anciens.
Je comprends que notre proposition coince sur le plan constitutionnel. Comment faire pour satisfaire les demandes légitimes des élus tout en respectant le droit ? Je crains que l'on ne tourne en rond cet après-midi... (Sourires et applaudissements sur les bancs du groupe RDSE ainsi que sur plusieurs bancs des groupes UC et Les Républicains)
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Les anciennes communes deviennent toutes commune déléguée, sauf décision contraire des conseils municipaux avant la création de la commune nouvelle. Le plafonnement du nombre d'adjoints au maire à 30 % du nombre de conseillers municipaux est aménagé, puisque la loi du 16 mars 2015 dispose que les maires délégués sont adjoints au maire de droit, sans être décomptés. Le maire délégué dispose d'une annexe de la mairie, il est officier d'état civil et de police judiciaire, il peut recevoir des délégations territorialisées, créer un conseil de la commune déléguée. Le conseil municipal de la commune nouvelle peut instituer une conférence municipale comprenant les maires délégués pour débattre des sujets les concernant. Bref, le rapport entre commune nouvelle et communes déléguées est souple, libéral, et respecte les particularités des communes historiques.
M. Jean-Claude Requier. - Permettez-moi de citer Henri Queuille.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Un radical ! (Sourires)
M. Jean-Claude Requier. - « Il n'y a pas de problème qu'une absence de solution ne finisse par résoudre » (Sourires)
M. François Grosdidier. - C'est pour ça que nous ne sommes pas tous radicaux !
Mme Agnès Canayer . - Attention à ne pas donner l'illusion d'un maintien de la démocratie de proximité. Au Havre, une commune associée loi Marcelin perdure depuis 45 ans, alors qu'elle est devenue un quartier de la ville. Un maire associé sans pouvoir, un budget annexe où il n'y a rien... une illusion de démocratie !
Comme dit Mme Gatel, une commune nouvelle, c'est une nouvelle commune. Elle doit permettre à terme l'intégration de l'ensemble de ses composantes.
L'autre écueil, c'est de vouloir une organisation uniforme pour toutes les communes nouvelles. Chacune a ses spécificités. Faisons confiance aux élus locaux pour mettre en place les conditions de l'intégration et de la représentation équilibrée de tous les territoires.
Un exemple local, pour conclure : nous avons cassé l'accord local de mon intercommunalité, à la suite de la loi NOTRe. Comment garantir le principe de la libre administration des collectivités territoriales au sein des communes nouvelles ?
M. Mathieu Darnaud. - Vous avez quatre heures ! (Sourires)
M. le président. - Si chacun continue à dépasser de la sorte son temps de parole, nous ne pourrons pas achever le débat dans les temps. (Protestations sur les bancs du groupe Les Républicains, où l'on souligne que la règle s'applique à tous.)
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - La commune associée loi Marcellin que vous citez pourrait toujours fusionner avec Le Havre, pour créer une commune nouvelle, quitte à demeurer commune déléguée. Mais dans l'état actuel du droit, impossible de la faire entrer de force.
Les chartes doivent rester contractuelles, et non des normes réglementaires qui rigidifieraient le système.
Quant aux accords locaux, vous savez que le Conseil constitutionnel impose la règle du tunnel de 20 %...
M. Didier Rambaud . - Les communes déléguées n'ont pas vocation à perdurer ; elles sont transitoires. Tout dispositif visant à renforcer leur représentativité doit être examiné avec prudence. On ne saurait imaginer des communes nouvelles prospérer avec des communes déléguées constituées indéfiniment. Elles n'ont d'autre fonction que de garantir une transition fluide vers la commune nouvelle et un lien de proximité avec les habitants. Le conseil municipal peut d'ailleurs décider de leur suppression dans le délai qu'il détermine. Comment concilier souplesse et clarté ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Je suis globalement d'accord. La possibilité de créer des communes déléguées est transitoire, et facultative. À tout moment, on peut - me semble-t-il - les supprimer. Jacques Pélissard, l'auteur de la loi, avait bien déterminé les choses. Trop souvent, à relégiférer, on rigidifie...
M. Pierre-Yves Collombat . - Il est des communes nouvelles de bon sens, d'autres nées d'un réflexe de défense contre la pénurie financière, pour exercer en commun des compétences orphelines ou simplement pour exister au sein d'intercommunalités XXL ou de grandes régions. Beaucoup aussi ont pensé que les communes déléguées n'étaient pas provisoires, que les mesures temporaires seraient éternelles. Pourquoi ne pas répondre à leurs attentes ? Qu'est-ce qui s'oppose à leur donner satisfaction ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Rien ne s'oppose au bon sens !
Mme Françoise Gatel. - Bravo !
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Chacun savait à quoi s'en tenir. Les gens ont mûrement réfléchi, élaboré des projets, en connaissance de cause. Les règles du jeu étaient connues.
Ce n'est pas un hasard si les communes nouvelles sont très majoritairement dans l'ouest de la France. Cela correspond à un état d'esprit mutualiste, un caractère culturel, l'habitude de travailler ensemble. (Mme Françoise Gatel le confirme.)
On ne peut pas modifier le modèle qui restera fondé sur le volontariat.
Mme Françoise Gatel. - Très bien.
M. Pierre-Yves Collombat. - Je constate que ce qui est permis aux métropoles ne l'est pas aux petites communes. Une commune nouvelle n'est pas un EPCI, dites-vous ? Mais un EPCI peut cacher une commune qui ne dit pas son nom : la métropole lyonnaise, par exemple !
Mme Sonia de la Provôté . - Sur 517 communes nouvelles qui ont vu le jour, 37 sont dans le Calvados. Les communes nouvelles bousculent nos habitudes. Il ne faut pas se leurrer, ce succès n'est pas étranger aux avantages financiers concédés par l'État. Celui-ci doit veiller à reconduire les agréments et les aides obtenus préalablement par les communes historiques.
Aujourd'hui, les communes nouvelles s'inquiètent de ne pas voir perdurer ces avantages qui ont conditionné leur création. C'est en vivant la commune nouvelle au quotidien que les habitants s'en emparent. Pour ce faire, il faut de la stabilité. C'est de la sécurisation du projet de territoire qu'il est question.
Que pensez-vous d'un délai de trois ans, comme le propose le rapport de Françoise Gatel et Christian Manable ? Cela permettrait de réaliser un projet de territoire cohérent.
Mme Françoise Gatel. - Très bien !
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - La bonification de DGF de 5 % est reconduite jusqu'au 1er janvier 2019 et étendue aux communes jusqu'à 15 000 habitants. Les communes nouvelles ont droit à la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR). Désormais, il n'y a plus de seuil pour accéder à la dotation de soutien à l'investissement public local (DSIL) qui a été pérennisée.
Quant à pérenniser le régime dérogatoire, c'est impossible.
M. Joël Bigot . - Le Maine-et-Loire est en pointe sur les communes nouvelles : le nombre de communes est passé de 358 en 2015 à 186 en 2017. Les élus d'Anjou ont su dépasser les clivages partisans, faire triompher l'intérêt collectif sur l'esprit de clocher. Je me réjouis que le projet de loi de finances soutienne cette dynamique. Même si le seuil de 10 000 habitants est contestable, le maintien de la bonification de la DGF est bienvenu.
Le rapport de nos collègues Gatel et Manable fait des remarques pertinentes. Un délai de trois ans a été prévu pour permettre aux communes nouvelles de se mettre en règle avec les nouvelles obligations qui leur incombent en matière de logement social ou d'accueil des gens du voyage. Il faut aussi établir des documents d'urbanisme communs, mettre en place des comités techniques paritaires...
Le délai peut sembler bien court, notamment pour les territoires ruraux. Le Gouvernement prévoit-il un accompagnement renforcé pour laisser aux communes nouvelles le temps de s'adapter à leurs nouvelles obligations ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Effectivement, des obligations s'imposent aux communes nouvelles s'il y a franchissement de seuil. Il est fixé à 5 000 habitants concernant les aires d'accueil pour les gens du voyage. Quant à la construction de logements sociaux, vous faites sans doute allusion à l'article 55 de la loi SRU. Il est prévu des aménagements dans la loi Égalité et citoyenneté : aucune pénalité financière n'est applicable les trois premières années, en cas de non-respect. Dans un cas comme dans l'autre, nous constatons un manque. Il n'y aura donc pas d'exceptions. En revanche, je suis ouverte à la discussion. Peut-être pouvons-nous envisager de laisser un peu plus de temps aux élus.
M. Mathieu Darnaud . - Disons toute la vérité sur la commune nouvelle et la place des communes déléguées. Comme M. Pierre-Yves Collombat, je crains que les maires qui ont choisi le regroupement en commune nouvelle par choix défensif aient un réveil douloureux à la fin de la période transitoire. Je suis très sceptique sur l'accumulation des mesures dérogatoires.
Madame la ministre, vous avez rappelé, fort justement, que le phénomène des communes nouvelles n'est pas uniforme sur le territoire. Le Maine-et-Loire compte 181 communes, contre 363 autrefois. Dans mon département de l'Ardèche, aucune commune nouvelle ! Le maintien de la commune déléguée encouragera leur création (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains, UC et CRCE)
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Oui, il faut toujours dire la vérité et donner tous les éléments à ceux qui envisagent la création d'une commune nouvelle. Le projet n'est pas pérenne s'il est guidé par l'opportunisme financier. Les communes déléguées sont pérennes. On peut les conserver aussi longtemps qu'on le veut, comme on peut les supprimer à tout instant à la majorité simple. Le système est souple.
Mme Patricia Schillinger . - La fin de la période transitoire inquiète les élus locaux : la représentation des communes déléguées n'est ni organisée ni obligatoire. L'introduction de contraintes dans la constitution des listes municipales en fonction du lieu de résidence créerait une rigidité indésirable, qui ne correspond pas à la philosophie du projet.
En revanche, pour encourager les regroupements, ne pourrions-nous pas, comme l'a proposé notre collègue Arnaud de Belenet, modifier l'article 7 de la loi du 11 décembre 1990 qui empêche la création de communes nouvelles après mars 2019 ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Autoriser la création de communes nouvelles jusqu'au 1er janvier 2020, à quelques semaines du renouvellement des conseils municipaux ? Non, et c'est précisément la raison pour laquelle il est prévu, dans la loi du 11 décembre 1990, une année blanche dans le redécoupage avant chaque renouvellement. C'est une question de lisibilité, tant pour les électeurs que pour les personnes qui se présentent à l'élection.
Mme Cécile Cukierman . - Depuis 2010, 542 communes nouvelles ont été créées, regroupant 1 830 communes et 1,8 million d'habitants. Grâce aux communes déléguées, les communes ont pu conserver leur histoire tout en mutualisant les moyens. En revanche, il est illusoire de croire que les communes perdureront après 2020. La représentation des communes déléguées doit être clarifiée. Pourquoi maintenir les incitations financières si c'est un choix effectué librement au niveau local ? Sans doute parce que l'idéologie sous-jacente est la réduction du nombre de communes et l'alignement sur le modèle européen... Comptez-vous donner toutes les informations aux élus afin qu'ils fassent un choix éclairé plutôt que de décider l'avenir de leur commune à partir du seul argument financier ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - L'enfer est pavé de bonnes intentions... Cela dit, l'esprit qui a présidé à la création des communes nouvelles a été constructif. L'idée était d'aider des communes qui ne pouvaient plus faire face seules à l'évolution de notre pays. On ne peut pas accuser Jacques Pélissard d'avoir voulu supprimer les communes ; bien au contraire, il les a confortés (Mme Françoise Gatel abonde.). Suffisamment grandes, elles peuvent répondre aux exigences de plus en plus grandes de leurs administrés. Trois majorités se sont succédé depuis 2010, toutes ont considéré que la commune nouvelle reposait sur le volontariat et un projet d'aménagement du territoire. Il ne faut pas en créer une pour l'argent, c'est certain.
Mme Françoise Gatel . - Si le RDSE a posé une question pertinente, sa réponse l'est moins. Christian Manable et moi-même avons constaté la révolution silencieuse que représentent les créations de communes nouvelles. Sans remettre en cause le principe général, je propose d'allonger la période transitoire en accordant aux communes nouvelles, lors du renouvellement de 2020, un nombre de conseillers municipaux trois fois supérieur à celui du nombre des communes d'origine. Sans cela, à la Hague qui rassemble 19 communes, 80 % des 234 conseillers municipaux auront disparu. Avec la mesure que je propose, la commune conserverait 57 conseillers municipaux, au lieu de 35.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Madame Gatel, j'ai bien compris que vous vouliez augmenter le nombre de représentants municipaux. Ce n'est pas possible. Disons la vérité : les communes nouvelles sont des nouvelles communes. Le transitoire n'est pas éternel.
M. Pierre-Yves Collombat. - Et les métropoles ne sont pas des EPCI !
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - N'opposons pas rural et urbain. Les communes nouvelles sont pour l'un comme pour l'autre. Le Gouvernement n'ira pas dans votre sens, Madame Gatel. Personne n'oblige les élus à créer une commune nouvelle.
Mme Françoise Gatel. - La commune nouvelle n'est pas une colocation de communes, nous en sommes d'accord. Il n'en faut pas moins faire preuve d'un peu de souplesse si l'on veut le succès. Nous en parlions ce matin au Congrès des maires...
M. Christian Manable . - L'essor récent des communes nouvelles marque un tournant. Françoise Gatel et moi-même avons identifié, dans notre rapport, quelques-uns des ressorts de la révolution silencieuse des communes nouvelles. La loi du 16 mars 2015 a été largement inspirée par les débats au sein de l'AMF. Le mouvement a été initié par les élus eux-mêmes, sur le terrain. Si le succès est réel, il n'est pas uniforme. Dans le Maine-et-Loire, 50 % des communes ont fusionné. Mon département de la Somme est médaille de bronze en nombre de communes, 782 ; il ne compte que deux communes nouvelles. Malheureusement, c'est parfois dans les départements qui auraient le plus besoin de communes nouvelles que l'on n'en crée pas. Dans la Somme, il y a une commune de 5 habitants et 7 élus ! Le soir des élections, vous êtes sûr de déboucher le champagne que vous avez mis au frais ! Son budget est inférieur à 10 000 euros par an.
Plusieurs voix à droite. - Et alors ?
M. Christian Manable. - L'État doit jouer son rôle de facilitateur.
M. le président. - Veuillez conclure.
M. Christian Manable. - Afin de mieux accompagner ces territoires, peut-on envisager des dispositions nouvelles ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - La création d'une commune nouvelle repose sur le volontariat. La majorité des élus souhaite que cela ne change pas. Oui, l'État doit accompagner les communes. Je crois à la vertu de la pédagogie. Si vous le souhaitez, je peux me déplacer dans la Somme. Nous maintenons les incitations financières jusqu'à 2019, ensuite commence l'année blanche. Il n'est pas interdit de réfléchir à de nouveaux accompagnements, par exemple au sein de la Conférence nationale des territoires.
M. Philippe Bas . - Les départements de l'Ouest ont eu fortement recours au nouvel instrument que constituent les communes nouvelles. Il est moins aisé d'y recourir en raison de l'existence de très grandes intercommunalités aux compétences renforcées par leur statut de communautés d'agglomérations. Si l'on veut à la fois de très grandes intercommunalités et la vitalité des communes, cellules de base de la démocratie, c'est-à-dire trouver un bon équilibre entre l'infiniment grand et l'infiniment petit, peut-être faut-il envisager que les grandes communautés d'agglomération rétrocèdent des compétences aux communes pour les inciter à devenir des communes nouvelles ? Les intercommunalités se consacreraient à l'essentiel : développement économique, aménagement du territoire, urbanisme, gestion des ordures ménagères... (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains ; Mme Françoise Gatel applaudit également.)
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Je salue, Monsieur Bas, la finesse de votre raisonnement. C'est exact, nous avons commis une erreur en abaissant le seuil de création des communautés d'agglomération. Et tout ça, pour faire plaisir à quelques-uns... (Exclamations faussement indignées) Certains ont créé des communes nouvelles pour peser davantage dans les grandes intercommunalités et récupérer des compétences que ces dernières ne voulaient pas exercer. Des retours de compétences, ce serait une nouveauté ! On mettrait en compétition communes nouvelles et intercommunalités. Cela mérite assurément une large réflexion... (Sourires)
M. Jean-Marie Janssens . - Avec 517 communes nouvelles, le modèle communal français est en mutation. La commune doit cependant demeurer le socle et le ciment de notre République. Nous demandons à l'État, au-delà d'incitations financières, un vrai pacte de proximité garantissant le maintien des services publics de proximité ; la sanctuarisation des dotations, à commencer par la DETR ; une aide au maintien des commerces et à la revalorisation des centres-bourgs ainsi qu'un soutien dans la lutte contre la désertification médicale. Ce pacte est encore plus nécessaire pour les territoires ruraux. Pouvez-vous nous assurer, Madame la Ministre, que l'État ne se désengagera pas et aidera les communes nouvelles à conserver des services publics de proximité ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Monsieur le Sénateur Janssens, vous avez vous-même créé une commune nouvelle dans le Loir-et-Cher. Ce que vous dites pour les communes nouvelles est valable pour toutes les communes. En effet, elles sont la cellule de base de la démocratie et ce sont d'ailleurs les seules à avoir conservé la clause de compétence générale. Vous voudriez, en plus du bonus sur la DGF et les dotations, un fléchage de la DETR et de la DSIL. N'oubliez pas cependant que l'enveloppe est normée : quand on donne aux uns, on prend aux autres. Après tout, on peut y réfléchir...
M. Philippe Bas. - Que de réflexions ouvertes ! (Sourires)
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Je suis pour le dialogue... (Même mouvement)
M. Franck Montaugé . - Dans notre paysage institutionnel, la commune nouvelle apparaît comme une nouvelle réforme d'organisation pour répondre de façon plus efficiente aux besoins de la population. Je suis de ceux qui pensent que la commune doit rester la cellule de base de la République. Et ce, pour trois raisons. D'abord, elle est la porte d'entrée dans la citoyenneté - c'est l'enjeu démocratique. Ensuite, les services, quand ils sont organisés par la commune, le sont à moindre coût - c'est l'enjeu financier. Enfin, elle est le cadre où la qualité de la relation entre les élus et leurs administrés est la plus grande - c'est l'enjeu social. Les communes nouvelles doivent préserver, voire conforter ces trois principes. Les élus vivent très mal ce qu'ils ressentent comme un déclassement de la commune, un dédain vis-à-vis de leur engagement qui tient souvent du sacerdoce.
M. Philippe Bas. - Très bien !
M. Franck Montaugé. - Envisagez-vous l'élection des présidents d'EPCI au suffrage universel direct ? (Exclamations indignées sur les bancs du groupe Les Républicains) Ce serait la fin des communes. Les communes nouvelles ont-elles vocation à se substituer aux communes ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Oui, la commune est au coeur de notre identité nationale et républicaine, et les Français y sont attachés. L'incitation financière favorise la création des communes nouvelles, mais celles-ci restent le fruit du volontariat. Le Gouvernement n'a nullement l'intention de faire élire au suffrage universel direct les présidents d'intercommunalité - seule la métropole de Lyon, en raison de son statut particulier, est dans ce cas. Le Gouvernement a décidé une pause dans les réformes territoriales. Cela vaut pour les structures comme pour la manière dont les structures sont élues.
Mme Catherine Deroche . - Certaines communes nouvelles, comme dans le Maine-et-Loire, ont une taille qui leur permettrait d'exercer les compétences des communautés de communes. Les intercommunalités XXL auraient pour compétences, comme l'a dit Philippe Bas, le développement économique, le tourisme, la gestion des déchets. Les communes nouvelles, elles, détiendraient les compétences de proximité. Or les intercommunalités sont tentées de prendre le plus possible de compétences pour bénéficier de la DGF bonifiée. Avez-vous l'intention de revoir le partage des compétences et de limiter les compétences obligatoires ? Peut-on envisager, pour les communes nouvelles et les communes traditionnelles au sein des intercommunalités, d'autres formes de conventionnement que le syndicat ? En un mot, envisagez-vous de laisser la place à l'imagination et de faire confiance aux élus des territoires ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Il existe d'autres formes de mutualisation que le syndicat, comme les ententes, mais elles sont peu connues. Nous n'avons pas l'intention de revenir sur les compétences obligatoires, hors compétences eau et assainissement, comme le président de la République l'a dit au congrès de l'AMF. À l'initiative du Gouvernement, les règles sur la DGF bonifiée ont été assouplies dans le projet de loi de finances pour 2018 à l'Assemblée nationale. Le seuil a été abaissé de neuf à huit compétences.
Mme Catherine Deroche. - Un seuil de huit compétences reste élevé pour certains territoires. Les choses sont trop rigides. Quoi que vous en disiez, vous ne faites pas confiance aux élus.
M. Philippe Mouiller . - Dans mon département des Deux-Sèvres, ce sont de très petites communes, de moins de 300 habitants, qui envisagent la fusion en des communes nouvelles de 1 000 à 1 500 habitants. Y a-t-il un nombre critique d'habitants pour créer une commune nouvelle ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Non, il n'y a ni seuil ni modèle, tout dépend de la volonté des communes. Qu'on se le dise une bonne fois pour toutes, nous faisons confiance aux territoires pour s'organiser... dans le cadre républicain, celui de la loi. Madame Deroche, j'ai passé ma vie à défendre les élus locaux. Ce n'est pas parce que l'on laisse les élus s'organiser dans les limites d'une loi que l'on bride la liberté locale. La République est décentralisée, elle n'est pas désorganisée !
M. Philippe Mouiller. - Merci, même si vous avez plutôt répondu à l'oratrice précédente...
M. Bruno Sido . - La France compte 36 000 communes. Ce serait trop, selon certains. En 1971, la loi Marcellin a autorisé la création des communes associées, sur la base du volontariat, officiellement - sous la pression des préfets, en réalité. Dans mon département de la Haute-Marne, la moitié d'entre elles ont divorcé très vite ; il n'en reste qu'une centaine. Les garanties étaient pourtant réelles : une mairie annexe, un délégué sénatorial... La loi du 8 novembre 2016, qui porte mon nom, était une façon de soulever la question suivante : le regroupement implique-t-il la disparition des anciennes communes ? Va-t-on traiter les communes déléguées comme les communes associées ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Non, je le redis, nous n'entendons pas faire disparaître les communes déléguées. Votre proposition de loi était d'ailleurs très intéressante.
Mme Patricia Morhet-Richaud . - La dynamique de regroupement des communes est une réalité. Dans mon département, les communes, plus peuplées, sont plus fortes. Elles pèsent davantage au sein des intercommunalités. Un regroupement doit reposer sur un projet de territoire, c'est-à-dire plus d'équipements, plus d'investissements et de services publics. Un nouveau pacte de stabilité de la DGF et une dotation aux communes nouvelles seraient utiles, notamment dans les territoires de montagne. Est-ce prévu ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Oui, l'Assemblée nationale a voté un nouveau système d'aide, avec un bonus de DGF de 5 %. Le pacte de stabilité concernera toutes les communes nouvelles, de zéro jusqu'à 15 000 habitants. Nous avons besoin d'un plafond puisque l'enveloppe est normée, l'Assemblée nationale l'a porté de 10 000 à 15 000 habitants. Nous l'avons accepté, pour favoriser les rapprochements.
Mme Josiane Costes . - En octobre dernier, les élus des communes nouvelles se sont regroupés pour la première fois en assises nationales. Une commune nouvelle doit être appréhendée comme une nouvelle commune, pas comme une intercommunalité bis. Au sein de ces nouveaux ensembles, le respect de l'identité des communes déléguées est primordial. Comment le Gouvernement entend-il répondre aux préoccupations des communes nouvelles - composition des conseils municipaux et allocation temporaire spéciale aux communes nouvelles ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - J'ai répondu sur le nombre d'élus. Le Gouvernement n'entend pas créer de subventions supplémentaires, compte tenu des efforts consentis par ailleurs. La suppression du seuil minimal de 1 000 habitants fera sans doute réfléchir les plus petites communes. Le passage du plafond de 10 000 à 15 000 sera aussi, nous l'espérons, incitatif.
La séance, suspendue à 16 h 20, reprend à 16 h 30.
Quelles énergies pour demain ?
M. le président. - L'ordre du jour appelle le débat : « Quelles énergies pour demain ? », une demande du groupe RDSE.
M. Ronan Dantec, pour le groupe RDSE . - Nul ne doute de l'extrême importance des enjeux énergétiques pour l'avenir de nos sociétés, à commencer par la crise climatique liée à la consommation des énergies fossiles. L'humanité ne résistera pas à une hausse des températures de plus de 2 degrés. C'est aussi une question de solidarité, d'efficacité, de compétitivité.
Tenir compte de tous ces enjeux, pour construire une stratégie énergétique nationale cohérente, s'inscrivant dans un cadre européen et mondialisé, n'est pas chose aisée, mais nous espérons que ce débat y contribuera, dans la perspective aussi de la prochaine programmation pluriannuelle de l'énergie pour la période 2018-2028 ou 2019-2029 dont nous débattrons l'an prochain.
Il y a des nuances sur ce sujet au sein du RDSE, qui est à l'origine de ce débat, notamment sur le nucléaire, mais nous assumons notre diversité, d'autant que nous réfléchissons ensemble et sommes tous d'accord sur la nécessité de s'engager dans l'inéluctable transition énergétique et de revoir en conséquence notre mix énergétique...
MM. Yvon Collin et Raymond Vall. - Très bien !
M. Ronan Dantec. - On ne peut rester aussi dépendants du nucléaire, situation unique au monde, qui nous met à la merci d'une défaillance. Les divergences entre nous portent sur les modalités de sortie et la part du nucléaire sous l'objectif de 50 % ne fait pas débat. J'ai bien entendu hier au congrès des maires la volonté de Nicolas Hulot d'atteindre l'objectif le plus rapidement possible. Le ministre pourra-t-il nous préciser le calendrier ?
M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire. - Pas plus que le ministre d'État.
M. Ronan Dantec. - Le groupe RDSE est particulièrement attentif aux enjeux territoriaux qui sont une des clés de la réussite de la transition énergétique.
Nous voulons aussi soulever la question des territoires impactés par la transition énergétique, comme les territoires charbonniers, les sites nucléaires ou les sites pétrochimiques qui doivent anticiper la fin des mobilités fossiles.
La Hollande vient d'annoncer la fin des véhicules thermiques pour 2030, la France annonce 2040, en plus de ce développement maintenant prévisible de la mobilité électrique, le gaz s'annonce comme une transition possible pour la mobilité des poids lourds.
Le Gouvernement a annoncé, pour les contrats de transition écologique, des mesures d'accompagnement. Selon quels critères ? Pour quels territoires ?
En Loire-Atlantique, qui possède un port et de la pétrochimie, mais aussi une centrale à charbon, ces mutations toucheront des milliers d'emplois. Le succès de l'appel à projets des territoires à énergie positive et croissance verte (TEPCV) est intéressant à ce titre. Les réseaux d'EPCI auront établi des plans climat air énergie territoriaux en cohérence avec les engagements internationaux de la France. Les régions font de même avec les schémas régionaux d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (Sraddet). Nous en avions voté très majoritairement le principe au Sénat l'année dernière en PLFR et il ne nous aura manqué que quatre voix à l'Assemblée nationale pour l'inscrire dans la loi.
Le Gouvernement a eu le courage et la volonté d'augmenter la contribution carbone énergie pour un supplément de recettes de 12 milliards d'euros pour l'État. Ce n'est pas rien !
Mais tous les ménages ne seront pas également concernés : les habitants des territoires ruraux et les ménages ne pouvant pas troquer leur chauffage au fioul pour des énergies plus propres seront particulièrement mis à contribution.
Cette stratégie ne sera acceptable que si elle s'accompagne de mesures d'accompagnement. Que proposera le Gouvernement ?
Enfin, n'oublions pas la dimension européenne. Le RDSE lui est attaché, vous le savez. (M. Yvon Collin le confirme.) Le président de la République, à la tribune de la COP23, a annoncé qu'il voulait multiplier par deux les interconnexions électriques européennes. Cela réduit en effet la variabilité de la production liée à la météorologie.
Cette annonce porte en germe, même si le président de la République ne l'a pas encore évoqué, l'accord historique entre la France et l'Allemagne sur les diminutions parallèles du charbon et du nucléaire ; donc la construction d'une véritable stratégie électrique européenne, qui devrait s'étendre aux énergies renouvelables. Pourriez-vous préciser les contours de l'ambition de la France à cet égard ?
Quid aussi de la privatisation de l'hydroélectricité ? Ces questions ne sont pas exhaustives, ce débat est crucial pour notre avenir. (Applaudissements sur les bancs des groupes RDSE, LaREM et UC)
M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire . - Merci d'avoir pris l'initiative de ce débat riche et pédagogique. Je sais combien les membres de la Haute Assemblée sont sensibles à ce sujet, trop souvent abordé de manière caricaturale.
L'énergie est une question de souveraineté, à dimension européenne. Le discours du président de la République à Bonn dans le cadre de la COP23 à Bonn l'a montré. Ces thèmes concernent directement les territoires, leur aménagement, leur beauté, comme les Français, qui paient leur facture d'électricité.
Deux impératifs. D'abord, la prévisibilité, nécessaire aux acteurs ; c'est pourquoi il y aura une loi de programmation. La sincérité ensuite. L'objectif de 50 % a un coût ; c'est un investissement pour construire une stratégie sur des bases solides.
Nous commençons par le commencement, les énergies fossiles. Nous serons le premier pays au monde à renoncer à extraire nos hydrocarbures et à utiliser le charbon pour produire de l'électricité.
Ce dernier engagement a eu un écho : avec le Royaume-Uni et le Canada, nous travaillons de concert à la sortie du charbon. De même, nous avons augmenté la contribution carbone.
Nous maintenons les alternatives aux véhicules thermiques : véhicules électriques, véhicules utilisant le gaz naturel pour véhicules (GNV), véhicules à hydrogène. Nous facilitons l'implantation de bornes.
Nous soutenons les solutions innovantes de mobilité, qui permettent de réduire la consommation d'énergies. En effet, la sobriété énergétique est le gage du succès. Le Gouvernement annoncera un plan d'investissement de 9 milliards pour la rénovation des logements.
La révolution numérique offre des possibilités d'innovation : autoconsommation, réseaux intelligents, progrès technologiques.
Chacun est attaché à la sécurité et à la sûreté du nucléaire. La question de la place de l'atome dans le mix énergétique reste posée. Le Gouvernement tient au seuil de 50 %. À quel horizon ? Le plus tôt possible. Nous connaissons le chemin : c'est le développement des énergies renouvelables. Nous y travaillons déjà, avec le groupe de travail sur l'éolien, mais aussi les Assises de la mer,...
C'est aussi l'objet du paquet Climat : chèque énergie, prime de conversion pour les véhicules thermiques, évolution du CITE en prime versée rapidement pour les ménages modestes.
Le Gouvernement est aussi attentif aux territoires concernés, notamment par l'arrêt de la production d'électricité par le charbon. L'enjeu est d'élaborer une stratégie nouvelle partant des territoires, en partenariat avec le privé. Les contrats territoriaux y contribueront.
Le Gouvernement agit avec cohérence et sera attentif aux propositions du Sénat. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, RDSE, UC, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe SOCR)
M. Jérôme Bignon . - Ce débat constructif pose la question de la France que nous voulons léguer aux générations futures. Nous ne pouvons plus attendre. Comme l'a rappelé le Premier ministre et Nicolas Hulot, il y a le feu !
L'énergie hydraulique marémotrice n'est pas assez utilisée, même si, en la matière, la France a été pionnière avec l'usine de la Rance, inaugurée en 1966. Depuis, toutefois, rien n'a eu lieu. Un nouveau prototype de démonstration sera installé au large du Pays de Galles. Cela conviendrait aux sites français avec un haut marnage ? Que compte faire le Gouvernement pour soutenir la construction de ces lagons qui ont pour intérêt de protéger également les côtes des aléas climatiques ?
M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État . - La France a en effet été pionnière en 1966 avec l'inauguration de l'usine de la Rance. La question est celle du modèle économique, de sa rentabilité. Nous étudierons avec attention le projet britannique. Ce type d'infrastructures intéresserait aussi les outre-mer.
M. Raymond Vall . - Si l'Agence internationale de l'énergie s'est félicitée du projet ambitieux de la France, matérialisé par la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, elle a regretté le manque de visibilité à long terme sur le financement de ces mesures. Quelque 530 territoires ont été labellisés TEPCV mais seuls 450 millions d'euros de crédits de paiement ont été débloqués sur 750 millions d'euros d'engagements. Le Gouvernement entend débloquer une enveloppe supplémentaire de 75 millions d'euros dans le projet de loi de finances rectificative mais il manquera tout de même 275 millions d'euros d'autorisations d'engagement.
Le président de la République a déclaré que le seuil de l'irréversible a été franchi, que les équilibres de la planète sont prêts à se rompre ; il est incompréhensible que l'État ne respecte pas sa parole. Quels seront les crédits débloqués en faveur des contrats TEPCV ?
M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État. - Je l'ai dit il y a quelques jours aux questions d'actualité au Gouvernement : la parole de l'État sera tenue. Même si le précédent gouvernement fut bien imprudent en confondant autorisations d'engagement et crédits de paiement. (MM. Roland Courteau et Alain Duran s'exclament.)
Le Gouvernement propose 75 millions d'euros dans le cadre du prochain collectif. Cela suffira pour 2018. Les collectivités territoriales invitées par le précédent gouvernement à signer ces conventions, alors que leur corps délibérant n'en avait pas délibéré, ne seront pas inquiétées par les préfets. Les collectivités territoriales devront avoir engagé les travaux avant le 1er janvier 2018. Un bon de commande suffira.
M. Raymond Vall. - Si les territoires en sont là, c'est qu'ils ont été convoqués dans des délais très brefs.
M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État. - Nous disons la même chose.
M. Daniel Gremillet . - Le Gouvernement confirme que le calendrier de réduction de 50 % de la part du nucléaire n'était pas tenable. Les objectifs étaient-ils trop ambitieux ?
Au vu des difficultés de sécurité d'approvisionnement des dernières années, et après 2017 où l'on a frôlé la rupture, l'hiver 2017-2018 s'annonce à nouveau très tendu, quid du mix énergétique et du stockage des énergies : l'éolien, c'est bien... quand il y a du vent ; le solaire, c'est bien... quand il y a du soleil ! Nous avons besoin de cette sécurité et de clairvoyance pour les citoyens, l'économie, les entreprises. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)
M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État. - C'est toute la différence entre décider de perdre du poids et se lancer dans un régime, j'en sais quelque chose. (Sourires)
Les objectifs étant ambitieux, s'ouvre maintenant la question du comment. C'est la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE). Il faut de la prévisibilité pour garantir la sécurité d'approvisionnement, c'est l'un des points cardinaux de la PPE. Il n'y a pas eu de risque de rupture au sens de black-out en 2017, je tiens à vous rassurer. Avec RTE, où j'étais il y a encore quelques jours pour faire le point au début de la saison hivernale, nous avons cela sous contrôle. L'ensemble des acteurs sont associés de près. Merci d'avoir accepté de faire partie du groupe de travail sur l'éolien. Sur le stockage, nous avons de bonnes nouvelles en perspective, pourvu qu'on s'y mette.
M. Daniel Gremillet. - Le coût de l'électricité est un élément stratégique pour l'économie et la précarité des ménages. Si nous voulons des emplois, il faut développer l'industrie... qui nécessite de l'électricité. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)
M. Michel Dennemont . - Les PPE concernent le territoire métropolitain mais aussi l'outre-mer et la Corse, zones dites « non interconnectées ».
Les PPE, fondement d'une bonne gestion énergétique, ont comme objectif global « l'autonomie énergétique » à l'horizon 2030.
Il y a quelques semaines, RTE a établi un bilan qui servira de base à la révision de la première période des PPE qui arrivera à son terme l'an prochain. La prochaine période concernerait toutes les consommations énergétiques et non plus la seule énergie électrique. Quel sera le calendrier ?
Les territoires non connectés méritent une attention particulière. Ils ont des caractéristiques particulières : plus d'énergies fossiles, des coûts de production plus élevés, plus d'ensoleillement et de renouvelable... Comment le Gouvernement en tiendra-t-il compte ? Comment placer, en particulier, les transports au centre de cette nouvelle période ?
M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État. - Je n'ai pas eu le plaisir d'aller à La Réunion . Nous devons changer totalement la déclinaison des PPE en outre-mer. L'autonomie en 2030 fait des outre-mer des modèles pour la métropole. Nous travaillons à ce que les prochains appels d'offres pour le renouvelable se fassent territoire par territoire, pour un véritable développement des énergies renouvelables à La Réunion par exemple. Dans le modèle industriel, au regard du prix du carbone, elles deviennent compétitives.
M. Fabien Gay . - Les enjeux de la transition énergétique portent sur l'organisation des systèmes, notre façon de vivre, de produire et de consommer, pour faire face à l'urgence du réchauffement climatique.
La problématique est globale : réduction des émissions de gaz à effet de serre, transports, traitement des déchets et vous avez raison, Monsieur le Ministre, de parler des transports.
Aujourd'hui, 8 millions de Français sont en précarité énergétique. (M. Roland Courteau le confirme.) Environ deux milliards d'humains n'ont pas accès à l'électricité. L'énergie de demain doit être accessible à toutes et tous. Il faut investir massivement dans les énergies renouvelables. Cela ne pourra se faire que dans des pôles publics.
L'État, les collectivités territoriales doivent retrouver des marges de manoeuvre. L'évasion fiscale prive notre pays des moyens de réussir la transition énergétique. Or si le budget est légèrement en hausse, il s'inscrit toutefois dans une politique d'austérité. Les 500 millions d'euros supplémentaires pour le budget de l'écologie suffiront-ils à répondre à l'urgence climatique ?
M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État. - Je partage votre combat, mais je doute de pouvoir vous convaincre.
Le paquet solidarité est un virage majeur : nous aurons besoin du Parlement pour évaluer l'efficacité de ses mesures. Le Gouvernement prévoit près de 10 milliards d'euros pour le renouvelable - ce qui passera par la commande publique via les projets de territoires.
Rendez-vous début décembre pour le budget du ministère : le projet de loi de finances devrait être rassurant.
Mme Nadia Sollogoub . - Merci à M. Dantec, qui a été très complet. Les récents débats montrent combien les contraintes économiques sont souveraines. Les politiques que nous sommes et qui représentent les territoires doivent défendre les bassins d'emploi. Nous n'avancerons que si les stratégies de reconversion sont claires, accompagnées et anticipées par les pouvoirs publics.
Élue dix ans à quelques pas de la centrale de Belleville, je mesure la dépendance de certains territoires à une activité dominante. La part du nucléaire doit être réduite à 50 % en 2025. La perte de poids est vertueuse, mais le régime est toujours difficile à suivre. (Sourires) Quels accompagnements prévoyez-vous pour assurer la reconversion pérenne des travailleurs ?
M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État. - Les calendriers sont différents : le diesel et le charbon répondent à du temps court ; les autres sujets plutôt à du temps long. Nous avons le modèle des mines : traitement territorial, social, mais on ne s'est pas posé la question de la transition économique.
Trente ans plus tard, les Hauts-de-France se fondent sur la transition écologique par l'activité économique, mais après trois décennies où il ne s'est pas passé grand-chose. Il faut éviter cela, avec une vision globale et au cas par cas, avec une logique de filière : ainsi, une centrale nucléaire n'est pas une usine produisant des voitures.
M. Roland Courteau . - Ma question concerne le stockage de l'électricité. Les énergies renouvelables sont variables et intermittentes. Le stockage permettrait de restituer l'énergie accumulée là et quand se trouvent les besoins.
Où en est-on ? On nous dit depuis longtemps que cela avance... Or cette nouvelle technologie conditionne le développement des énergies renouvelables, d'autant que l'électromobilité prendra bientôt le pas sur les véhicules thermiques. Quelles sont donc les perspectives, Monsieur le Ministre, pour faire face à cet enjeu et garantir la sécurité énergétique ?
M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État. - Votre question est centrale. Il y a déjà du stockage avec l'hydroélectricité. Mais vous parlez bien du noeud technologique, du palier que nous devons franchir. C'est l'électromobilité qui pousse à la recherche. Le constructeur de la Zoé, dont le prix n'est plus si élevé, y travaille. Les innovations arrivent. Les outre-mer sont intéressants pour l'expérimentation en la matière : l'insularité rend le stockage encore plus précieux.
L'Ademe finance des projets innovants. Je ne veux pas faire d'annonce prématurée. Le Premier ministre en a parlé devant le Conseil national de l'industrie.
M. Roland Courteau. - Le stockage est indispensable à l'emploi et à la diminution de notre facture énergétique de 60 milliards d'euros.
Mme Maryse Carrère . - Avec la loi de transition énergétique, la France s'est fixé des objectifs ambitieux. Avec 13 % d'électricité d'origine hydraulique, la France est le deuxième pays producteur de cette énergie. Or elle subit des contentieux pour sa gestion des concessions. Ce « délai glissant » est juridiquement très fragile.
Le retard pris dans le renouvellement des concessions engendre un manque à gagner pour les collectivités territoriales et l'État. La Cour des comptes a évalué la perte pour l'État à 600 millions d'euros d'ici à 2020. Le département des Hautes-Pyrénées estime pour sa part le manque à gagner à plus de 1,125 million d'euros pour les collectivités territoriales.
Quelle stratégie le Gouvernement veut-il mettre en place pour engager rapidement les concessions arrivées à échéance, dédommager les collectivités lésées et préparer l'avenir de l'hydroélectricité dans notre pays ?
M. Jean-Claude Requier. - Très bien !
M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État. - Les contentieux étant en cours, je ne veux pas ajouter du trouble au trouble. La loi de transition énergétique autorise les collectivités territoriales à créer des sociétés d'économie mixte. Les cahiers des charges peuvent prévoir que le personnel soit intégralement réintégré. De nombreux échanges avec la Commission européenne ont lieu en ce moment, pour le moment sans accord. Le Gouvernement veut garder le même état d'esprit. Il faut sortir d'un statu quo qui inquiète tous les acteurs.
M. Pierre Cuypers . - La pollution de l'air tue prématurément 40 000 personnes par an en France. L'objectif est de réduire le taux d'émissions à 95 grammes de CO2 par kilomètre pour les voitures neuves d'ici 2020 - or le Gouvernement ne baisse le seuil que de 127 à 120 grammes pour les véhicules de société. Dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, le Sénat a été plus ambitieux en étendant sur 12 trimestres l'exonération de taxe sur les véhicules de société aux véhicules roulant au Superéthanol E85. La France a la chance d'avoir des carburants vertueux qui réduisent sa dépendance énergétique. Confirmez-vous que le Gouvernement, qui a donné au Sénat un avis favorable à cet amendement, en tirera les conséquences dans le projet de loi de finances pour 2018 ?
M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État. - La réponse est oui. Merci pour les travaux que vous menez sur ce sujet. Notre stratégie et notre ambition, en écho avec la trajectoire carbone, se veulent pragmatiques et sincères.
M. Pierre Cuypers. - Merci de ce « oui » franc. Encourager cette filière vertueuse, c'est sécuriser notre approvisionnement, répondre à la crise agricole, protéger l'environnement et préserver 30 000 emplois !
M. Julien Bargeton . - Le plan Climat de la ville de Paris a été adopté à l'unanimité ce lundi. Preuve que sur les sujets importants, on peut s'entendre ! Contrairement aux Normands, les Parisiens ne peuvent faire appel à l'éolien offshore. (Sourires) Le Gouvernement a pris la mesure des enjeux en faisant du développement des énergies renouvelables un axe de sa politique.
L'éolien a besoin de simplification, d'un cadre stable, pour développer des entreprises à fort potentiel. Je ne plaide pas pour un abandon du cadre mais je m'interroge sur le bon niveau des contraintes. Il faut un bon équilibre.
Quel est le périmètre du groupe de travail que vous avez évoqué ? Où en est la réflexion sur l'éolien terrestre ? Quelles seront les traductions législatives, réglementaires et budgétaires de ces travaux ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)
M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État. - Nous avons identifié, dans le cadre de la Conférence des territoires, les obstacles au développement de l'éolien. Le groupe de travail dédié travaille sur le cadre réglementaire. Simplification ne veut pas forcément dire assouplissement. Aujourd'hui, c'est souvent le juge administratif qui tranche. Je préférerais que ce soit le préfet, avec les élus !
Autres axes : l'intéressement et la participation, qui peuvent renforcer l'acceptabilité locale des projets ; la protection des paysages ; le renouvellement du parc existant et enfin l'éolien offshore. Le groupe de travail associe parlementaires, élus locaux, associations, représentants de la filière, ministères de la culture et des armées, ONG... Les résultats de ses travaux seront annoncés début 2018.
M. Guillaume Gontard . - L'hydroélectricité représente 15 % de l'électricité en France, c'est la deuxième source derrière le nucléaire, la seule stockable. Dans le monde, un tiers seulement de son potentiel est utilisé. C'est pourtant le mode de production d'électricité le plus compétitif et le plus durable.
Les barrages de type STEP (stations de transferts d'énergie par pompage) permettent de subvenir à nos besoins lors des pics de consommation. Ils font la fierté de l'entreprise GE Hydro de Grenoble, pourtant rentable mais qui est sous le coup d'un plan de sauvegarde de l'emploi menaçant plus de 300 emplois.
Le Gouvernement n'a pour l'instant pas souhaité intervenir dans ce dossier, refusant d'entrer au capital d'Alstom. Nous peinons à comprendre la stratégie industrielle du Gouvernement en matière de transition énergétique. À quand un grand débat national sur le sujet ?
M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État. - Je vous rassure : le dossier GE Hydro est suivi de près par Bercy. J'ai déjà tracé dans mon propos liminaire les lignes de notre stratégie générale pour la transition énergétique.
La France est particulièrement bien dotée en grands ouvrages hydroélectriques. Les petits ouvrages sont, eux, accompagnés par les appels d'offres. L'État réaffirmera l'importance qu'il lui accorde dans le cadre de la programmation pluriannuelle de l'énergie, qui sera l'occasion d'un grand débat.
M. Jean-Paul Prince . - La stratégie nucléaire française est à la croisée des chemins. Voulons-nous sortir du nucléaire ou promouvoir un autre nucléaire ?
La loi de transition énergétique a fixé comme objectif de réduire à 50 % de part du nucléaire en 2025. Cela va réclamer des efforts monstrueux. Le démantèlement de la centrale de Saint-Amand-les-Eaux dure depuis vingt-cinq ans et sera achevé en 2100... Vu le coût pharaonique de l'arrêt des centrales les plus anciennes, une sortie totale du nucléaire est sans doute utopique. Il faut plutôt faire évoluer le nucléaire. C'est tout l'enjeu de l'EPR, des technologies révolutionnaires telles que l'ITER. Où en est ce dernier ? La France pourra-t-elle renouveler son parc ?
M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État. - La principale énergie des années à venir sera celle qu'on n'aura pas consommée. Il y a une filière industrielle d'avenir autour du démantèlement. Je suis de près le dossier de Fessenheim, mais ne peux vous répondre dans le détail en si peu de temps. Personne n'a parlé de suppression du nucléaire. L'horizon reste 50 %, c'est l'objectif de la PPE.
L'ITER, c'est 1,2 milliard d'euros de crédits jusqu'en 2020. Nous soutenons toujours l'innovation. La PPE fera des choix industriels que le président de la République annoncera prochainement.
M. Franck Montaugé . - L'énergie la plus propre est celle que l'on ne consomme pas. La transition énergétique s'appuie sur les initiatives locales. Dès 2016, 500 territoires sont entrés dans le dispositif des territoires à énergie positive pour la croissance verte - or de nombreux maires et présidents d'intercommunalité sont contraints de renoncer à leurs projets. Après une première circulaire très restrictive, quelles sont les instructions données aux préfets pour accompagner les projets ? Pouvez-vous rassurer les élus ?
L'évolution de notre mix énergétique transforme notre modèle centralisé et nous oblige à faire évoluer aussi notre modèle de tarification, notamment pour l'acheminement de l'énergie. Où en est la réflexion sur la péréquation tarifaire ?
M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État. - J'ai déjà été précis sur les TEPCV. Quand on met la charrue avant les boeufs, que l'on fait des annonces précipitées, ce sont les élus locaux qui en pâtissent... J'ai été élu local : ce que je veux, c'est que la parole de l'État soit tenue. Il faut se réjouir que le président de la République tienne les engagements pris par François Hollande et Ségolène Royal.
Sur l'accès au réseau, le Gouvernement finance à hauteur de 40 % les coûts de raccordement au réseau pour tous les acteurs qui produisent des énergies renouvelables : agriculteurs, entreprises mais aussi collectivités territoriales.
Nous reviendrons sur la tarification dans le cadre de la PPE.
M. Franck Montaugé. - Sur le premier point, il s'agit de choix politiques. La question de la péréquation tarifaire est technique mais importante.
M. Michel Raison . - Notre-Dame-des-Landes est le symbole des blocages auxquels se heurtent les grands projets. Qu'importe l'enjeu, le processus décisionnel, la validation scientifique, le vote démocratique : les décisions publiques sont de plus en plus contestées, le rapport de M. Bonnecarrère sur la démocratie coopérative l'a bien montré. Comment lever les blocages et susciter l'adhésion ?
L'éolien en mer doit représenter 40 % de l'énergie renouvelable d'ici 2030. Les premiers lauréats des appels d'offres ont été annoncés en 2011, mais rien n'avance car tous ont fait l'objet de recours en justice. Et je ne dis rien du blocage du projet du site d'enfouissement de déchets de Bure ou du barrage de Poutès en Haute-Loire.
Comment l'État parviendra-t-il à faire appliquer ses décisions ? Comment faire face à la difficulté d'acceptabilité des ouvrages par les populations ?
M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État. - Je vous sais très impliqué sur ces sujets. Il est ici question de pragmatisme, d'intérêt à agir, de sécurisation des porteurs de projets, mais aussi d'autorité de l'État. Il faut parfois assumer de perdre du temps en amont pour éviter des blocages ensuite. Certains blocages pourraient être évités avec une meilleure concertation préalable, sur les projets de méthanisation ou d'éolien. Les procédures, parfois inadaptées, méritent d'être améliorées. Il est regrettable que ce soit le juge administratif qui tranche à la place du préfet : c'est un appel d'air au contentieux. Renforçons l'exemplarité des projets, et encourageons l'intéressement et la participation, pour que les citoyens aient un intérêt à regarder les projets avec bienveillance.
Mme Denise Saint-Pé . - Avec la loi de transition énergétique et les engagements de la COP21, la France s'est clairement engagée. Les collectivités territoriales seront en première ligne. La gouvernance de l'énergie va évoluer, conjuguant les atouts d'un système très centralisé et les dynamiques territoriales.
La loi NOTRe, en désignant les régions comme chef de file, porte en filigrane une notion de territorialisation de l'énergie. Or les élus locaux se heurtent à des freins institutionnels ou administratifs. L'installation de turbines, de parcs photovoltaïques ou d'éoliennes est trop souvent un parcours du combattant. Alors que les ressources des collectivités proviennent de moins en moins de l'État, il faut les laisser réinventer leur équilibre économique ; la production d'énergie y participe.
Que compte faire le Gouvernement pour rendre l'État facilitateur ? Il n'y aura pas de transition énergétique sans un État volontariste. (Applaudissements sur les bancs des groupes RDSE et UC)
M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État. - L'État est d'abord présent par l'appui à l'investissement : c'est le grand plan d'investissement, le rôle de la Caisse des dépôts, de la DETR. Des documents cadres orientent les investissements locaux, comme le plan climat air-énergie territorial (PCAET). (M. Ronan Dantec approuve.)
L'autre volet est réglementaire. Nous cherchons toujours l'équilibre entre libérer et protéger. Pour du repowering, faut-il passer par une nouvelle étude d'impact générale, une étude au cas par cas ne suffirait-elle pas ?
Enfin, les contrats de transition écologique supposeront que les normes environnementales soient adaptées, quand tous les acteurs sont d'accord. L'autorité environnementale pourrait accompagner a posteriori plus qu'a priori.
M. Alain Duran . - La PPE issue de la loi de transition énergétique fixe un objectif de 23 % d'énergies renouvelables en 2020, contre 12 % en 2006. Il est pertinent d'investir dans la biomasse forestière, première ressource renouvelable, riche en emplois locaux non délocalisables, qui contribue au maillage du territoire et à l'entretien et la régénération des forêts. Pourtant, le rythme de développement de la filière est insuffisant pour atteindre les objectifs. Elle n'est pas compétitive face au gaz naturel, les tarifs d'achat sont insuffisants par rapport au prix de revient, surtout pour les petites installations. Le doublement du fonds chaleur n'est pas à l'ordre du jour et l'Ademe voit ses autorisations d'engagement baisser dans le projet de loi de finances pour 2018. Comment l'État compte-t-il soutenir la filière bois, particulièrement importante dans les territoires ruraux et de montagne ?
M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État. - La biomasse comprend aussi les nouveaux carburants, la méthanisation. Nous avons fait le choix courageux de privilégier les matières organiques, sans développer, comme d'autres, de cultures spécifiques consommatrices de terres agricoles. La filière bois doit impérativement être structurée. La durabilité de la production d'énergie doit être évaluée ; privilégions les chutes de bois, par exemple, plutôt que de la déforestation.
Le fonds chaleur ne diminue pas : regardez plutôt les crédits de paiements, 200 millions d'euros pour 2018 ! La trajectoire carbone renforcera la compétitivité des projets et donc leur éligibilité.
M. Gérard Longuet . - Les énergies quelles qu'elles soient sont de grosses consommatrices de capitaux ; cela suppose des règles prévisibles et stables. Le débat est mondial et nous ne sommes pas à l'abri d'un événement international, d'une nouvelle technologie ou d'une décision d'un pays étranger qui modifierait notre approvisionnement énergétique.
L'Allemagne a renoncé au nucléaire après Fukushima et relancé à la fois les énergies renouvelables aléatoires, comme l'éolien, et les énergies fossiles, charbon et lignite. Cela a déstabilisé les prix de l'électricité en Europe, car celle-ci ne se stocke pas. Allez-vous prendre des initiatives franco-allemandes pour que les règles du jeu européen ne soient pas remises en cause par une décision unilatérale ?
M. Ladislas Poniatowski. - Très bien.
M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État. - Vous avez raison. La réalité est d'abord technologique. Vous posez la vraie question de la trajectoire carbone en Europe. Ce sont les effets de levier qui permettent d'engager la transition. Si l'éolien en mer du Nord n'a plus besoin de subventions publiques, c'est que les prix sont suffisants.
La question du coût du carbone fait partie du dialogue entre le président de la République et Mme Merkel ; des conseils des ministres de l'énergie sont prévus. La trajectoire doit être nationale - nous l'avons - et, en même temps, européenne.
M. Gérard Longuet. - Je remercie Nicolas Hulot pour son sens des réalités.
M. Joël Bigot . - La filière solaire ne connaît malheureusement pas la dynamique de l'éolien. Cette énergie est pourtant très compétitive, à 55 euros le mégawattheure. Nous devons rattraper notre retard. Il a fallu attendre huit ans pour que la Commission de régulation de l'énergie valide un projet innovant en Maine-et-Loire. À quand un recensement du foncier non agricole pouvant être reconverti en ferme solaire, pour doper la filière ?
Nos concitoyens sont mobilisés, grâce à des associations comme CoWatt ; manque un soutien de l'État. Quelles mesures comptez-vous prendre, Monsieur le Ministre, pour rattraper le Royaume-Uni ou l'Allemagne, pourtant moins ensoleillés ?
M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État. - Je partage votre analyse, mais le défaut d'organisation de la filière n'est pas de la responsabilité de l'État : le problème n'est pas réglementaire. Recenser les friches susceptibles d'être utilisées pour produire de l'énergie est une bonne idée.
Le soutien public au solaire passera par la pluriannualité dans la gestion des appels d'offres et la massification des projets, pour améliorer leur rentabilité économique et créer des effets de levier.
M. Jean-François Husson . - La loi de transition énergétique prévoit de porter la part des énergies renouvelables dans la consommation finale à 23 % en 2020 et à 32 % en 2030. Cela pèsera sur nos finances publiques. Le soutien à l'électrique s'élève à 5 milliards d'euros en 2018 - soit 30 milliards à l'issue du quinquennat.
Or le Parlement est contourné alors qu'il devrait fixer lui-même, dans une loi de programmation, le plafond de production par filière et la compensation des surcoûts aux opérateurs en contrepartie de l'achat d'énergie. Le Gouvernement entend-il lui demander de se prononcer sur ces sujets décisifs ?
M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État. - Bien malin celui qui sait combien les énergies vont coûter aux contribuables. L'état du marché fait que les énergies renouvelables n'ont jamais été aussi compétitives ! Voyez le projet de loi de finances rectificative : il reste de l'argent sur le compte d'affectation spéciale.
Il faut associer le Parlement à l'élaboration de la PPE, mais surtout organiser un grand débat public sur l'acceptabilité : on ne peut le cantonner aux membres du corps des mines ! Il faudra préciser la méthodologie, associer les élus locaux, les associations environnementales. La performance énergétique n'est pas qu'un changement de politique, mais un changement de comportement.
M. Jean-François Husson. - Vous nous trouverez toujours à vos côtés quand il s'agira d'associer le Parlement, les collectivités territoriales et les Français aux décisions. Il faudra de la cohésion pour réussir.
M. François Bonhomme . - La stratégie nationale de mobilisation de la biomasse prévue par la loi de transition énergétique vise à lutter contre le changement climatique et à améliorer notre indépendance énergétique. Mais manque une vraie stratégie publique de bioéconomie, pour produire mieux et plus. Un rapport récent de l'Opecst dénonce cette absence de stratégie à long terme.
L'exploitation de cette énergie est en outre freinée par les lourdeurs administratives, avec des autorisations trois à quatre fois plus longues à obtenir que chez nos voisins italiens et allemands. Le basculement vers la biomasse de l'ancienne centrale à charbon de Gardanne devait avoir lieu fin 2016, or nous sommes toujours en phase expérimentale...
Comment faciliter la réalisation de projets, Monsieur le Ministre ?
M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État. - La filière bois en particulier demande un effort de structuration. L'outil, c'est l'appel à projet. La stratégie de mobilisation de la biomasse, qui a été coécrite avec les acteurs de la filière, sera présentée très prochainement. Les appels d'offres seront régionalisés pour coller au plus près des besoins des territoires. Il faut aussi définir un modèle économique viable pour la filière bois : l'enjeu, c'est la durabilité. Si ces questions vous passionnent, nous serons heureux de vous y associer très directement.
La séance, suspendue à 18 h 20, reprend à 18 h 30.
Collectivités locales
M. le président. - L'ordre du jour appelle un débat sur la thématique des collectivités locales, à la demande du groupe socialiste et républicain.
M. Christian Manable, pour le groupe SOCR . - Le rôle des collectivités territoriales, l'avenir de la décentralisation, les suites à donner à la réforme territoriale auront un impact direct sur la vie quotidienne des Français.
Quatre enjeux se dessinent : les relations entre État et collectivités territoriales, les finances locales, les compétences des collectivités territoriales et l'achèvement de la modernisation de l'intercommunalité.
Les élus locaux s'inquiètent légitimement du devenir de leur collectivité, ils ont besoin de pouvoir se projeter pour être des bâtisseurs d'avenir. Comment agir si le flou pèse sur leurs recettes avec la suppression programmée de la taxe d'habitation ? Que faire pour les rythmes scolaires sans certitude d'un engagement pérenne de l'État ? Comment programmer des logements sociaux avec l'instrumentalisation des APL et le risque d'étranglement des offices ?
L'acte III de la décentralisation, il faut le reconnaître n'a pas eu lieu, les précédents gouvernements ayant préféré moderniser notre organisation territoriale. Pour la première fois, le nombre de communes françaises est inférieur à 36 000 grâce aux communes nouvelles. La carte des régions métropolitaines a été redessinée. La clause de compétence générale des départements et régions a été supprimée, et le régime intercommunal rénové avec la création de grandes métropoles. Décentralisation de compétences ciblées, modernisation des structures, tout cela doit être poursuivi mais sans engager de nouveau big bang. Cela suppose de créer une instance de dialogue pérenne pour améliorer la relation entre État et collectivités territoriales.
Le projet d'exonération de la taxe d'habitation pour 80 % des contribuables a reçu un écho médiatique non négligeable durant la campagne présidentielle. Il était très populaire : cet impôt souffre de nombreux défauts. Le projet a le mérite de cibler les classes moyennes et populaires. Pour autant, il ne doit pas conduire à amoindrir l'autonomie fiscale des collectivités territoriales.
Le Gouvernement doit s'ouvrir à de nouveaux transferts de compétences. La suppression de la clause de compétence générale a conduit à recentrer les départements sur la solidarité ; les régions, sur le développement économique et la formation. Une décentralisation intégrale du service public de l'emploi vers les régions serait cohérente.
La refonte de la carte intercommunale et le renforcement des EPCI à fiscalité propre ne doivent pas être perçus comme une remise en cause des communes, indispensable échelon de la proximité, mais plutôt comme une facilitation de la mise en oeuvre de politiques à l'échelle des bassins de vie.
Je veux témoigner de l'inquiétude ou, pire, de la résignation des maires face aux mesures qui affaiblissent les communes, à commencer par les économies de 13 milliards d'euros demandées au secteur local, qui se traduira par une baisse brutale de l'investissement. Certes, la contractualisation est préférable à une baisse de la DGF. Toutefois, la suppression d'emplois aidés, la réduction du périmètre du PTZ et du Pinel, la baisse du nombre d'élus locaux ou l'annulation de crédits de plus de 200 millions sur la DETR ont rendu les élus locaux méfiants, de même que la suppression de la taxe d'habitation, la restriction du recours à l'emprunt - mesure vexatoire quand aucune collectivité n'est en faillite et que les budgets locaux doivent être votés à l'équilibre - sans parler de la baisse du nombre d'élus, dont la plupart sont bénévoles.
Comment sera prise en compte, dans la contractualisation, l'hétérogénéité des départements ? Leur situation diffère selon le nombre de bénéficiaires de l'APA, du RSA, de la PCH ou encore de mineurs isolés. Comment le taux d'augmentation est-il négociable, en fonction de quels critères ? Ne faudrait-il pas dès à présent inscrire une clause de revoyure afin de rassurer les élus ?
Si la carte des régions a été remodelée, tout reste à construire. L'essentiel est que ces régions XXL puissent agir de manière cohérente, dans une démarche partenariale et programmatique. Leur attribuer une part de TVA renforcera leur autonomie fiscale, qui est tombée à moins de 10 %. Il faut redonner du sens au principe de libre administration des collectivités, cela est possible à Constitution constante. Les exemples de la Nouvelle-Calédonie, de Wallis et Futuna, de la Corse, de l'Île-de-France et de Lyon le prouvent. La France est un État fédéral qui s'ignore ou tout au moins un État dévolutif. Il est, cependant, nécessaire de marquer une pause dans ce mouvement.
La République s'est construite sur un triptyque hérité de 1789 : commune, département, Nation. La contre-révolution, parfois technocratique, bouleverse ce paysage : Commission européenne, grande région, métropole.
Si la République est une et indivisible, il faut rappeler le principe de la libre administration des collectivités. Des phénomènes de « recentralisation » nous ramèneraient plusieurs décennies en arrière... (Applaudissements sur les bancs des groupes SOCR, RDSE et LaREM)
Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur . - Nous avons effectivement besoin de retisser la relation entre État et collectivités territoriales. Une méfiance, il est vrai, s'est installée. Rien ne sert de pointer du doigt tel ou tel gouvernement. À l'occasion de certaines réformes, les territoires se sont sentis abandonnés ; ils ont eu le sentiment qu'on leur forçait la main. La Conférence nationale des territoires au Sénat, que le président de la République a lancé en juillet dernier au Sénat, sera le lieu de discussion entre État et collectivités. Hors des temps forts, la réunion en juillet dernier ou celle du 14 décembre prochain, le dialogue se poursuit : une mission a été confiée à MM. Richard et Bur sur les finances locales, le Premier ministre m'a confié une mission sur l'eau et l'assainissement, des discussions sont en cours avec les départements sur les allocations de solidarité et la question des mineurs isolés.
Le président de la République n'entend pas entreprendre une nouvelle réforme territoriale. Il veut faire vivre les structures actuelles, achever ce qui a été commencé, en procédant à des adaptations là où cela est nécessaire. Je pense, entre autres, à la compétence Gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations, Gemapi, née au Sénat d'un amendement sénatorial. Plutôt que revenir sur le transfert de compétences, nous faciliterons sa mise en application. C'est le voeu des élus locaux, notamment des départements littoraux qui ont déjà beaucoup fait pour prévenir le risque de submersion marine. Pour le dire en un mot, nous réformerons en marchant.
Nous sommes attachés, comme vous, à l'autonomie fiscale des collectivités territoriales. C'est d'ailleurs un principe constitutionnel. La réforme de la taxe d'habitation, qu'il faut aussi envisager sous son aspect social, se fera en trois ans. L'État se substituera au contribuable par des dégrèvements, puis viendra une réforme de la fiscalité locale. Nous aurons de grands débats à trancher : faut-il rester dans notre tradition française en considérant que l'impôt local, levé par la collectivité, doit aller à la collectivité ou aller vers le système allemand où les collectivités reçoivent une part de l'impôt national ? Vous avez cité le transfert d'une part de TVA aux régions, les départements souhaitent une part de CSG. La mission Richard-Bur fera des propositions.
Le fonds de soutien pour les rythmes scolaires est pérennisé, cela a été voté.
Sur le logement social, le Premier ministre a fait des annonces hier : la garantie des collectivités aux bailleurs sociaux ne jouera pas, la baisse des APL sera étalée sur trois ans, la TVA sera augmentée sur les loyers. Les discussions se poursuivent.
M. le président. - Il faut conclure.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Je reviendrai sur la taxe d'habitation en répondant à vos questions. (Applaudissements sur les bancs des groupes UC, RDSE et LaREM)
Mme Mireille Jouve . - Depuis 2014, les conseillers métropolitains, comme les conseillers communautaires dans les communes de plus de 1 000 habitants, sont élus au suffrage universel par fléchage. Lors de la loi Maptam, le principe d'un scrutin autonome a été retenu : ce débat et les modalités de l'élection ont été renvoyés au 1er janvier 2017, puis au 1er janvier 2019 dans la loi relative au statut de Paris. Cette perspective inquiète les maires. S'ils ont soutenu la logique métropolitaine, ils ne veulent pas être évincés par un scrutin autonome. Le 7 février dernier, le RDSE avait déposé un amendement pour acter l'abandon de cette hypothèse. Le Premier ministre, à l'occasion du 100e Congrès des maires, a affirmé, par voie de presse, que tout mécanisme mettant en cause les maires ne lui semblait pas crédible. Madame la Ministre, pouvez-vous préciser la position du Gouvernement ? (Applaudissements sur les bancs des groupes RDSE et LaREM)
Mme Jacqueline Gourault, ministre . - Les conseillers métropolitains sont d'ores et déjà élus au suffrage direct par fléchage. Ils l'ont été en 2014. La réflexion n'était pas mûre lors de l'examen de la loi Maptam. Faut-il étendre le mode d'élection de la métropole de Lyon aux autres métropoles qui, si l'on peut dire, sont des super-communautés urbaines ? À ce stade, le Gouvernement considère que le mode d'élection actuel dans les métropoles répond aux exigences démocratiques. Cela vaut pour les autres intercommunalités.
M. Pascal Allizard . - La question des emprunts toxiques demeure après les fusions provoquées par la loi NOTRe. Pour bénéficier du fonds de soutien, la collectivité devait renoncer au contentieux engagé contre la banque. Certaines communautés de communes ont préféré poursuivre le contentieux. Fusionnant, elles ont transféré leur emprunt toxique au nouvel EPCI. Le fonds de soutien a été fermé alors que 300 millions d'euros de crédits n'avaient pas été consommés. Le Gouvernement a indiqué que la collectivité unique de Corse pourrait profiter de sa réouverture. Est-ce spécifique à la Corse ou d'autres collectivités sont-elles éligibles ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Le fonds de soutien a été créé par la loi de finances pour 2014, sa capacité d'intervention a été portée à 3 milliards par l'article 31 de la loi de finances pour 2016. Pour bénéficier de l'aide, la demande devait être déposée avant le 30 avril 2015. Le Gouvernement examine les conditions de la réouverture de ce fonds au regard des risques juridiques et de la question du financement. Le ministre des comptes publics, responsable de ce dossier que la DGCL suit de près, n'a pas encore pris de décision.
M. Pascal Allizard. - Je prends acte de cette réponse qui n'est pas totalement négative. Si besoin est, je déposerai un amendement au projet de loi de finances pour 2018.
M. Didier Rambaud . - L'article 3 du projet de loi de finances instituant un dégrèvement de la taxe d'habitation constitue la traduction législative d'un engagement du président de la République auquel le groupe LaREM souscrit. C'est une mesure de justice sociale, un premier jalon dans la réforme de la fiscalité locale qui n'obère pas les capacités des collectivités grâce à la compensation. La taxe d'habitation est un impôt profondément injuste qui frappe proportionnellement plus durement les étudiants, les habitants des quartiers populaires et les personnes seules. Sa suppression, que je salue, rendra 10 milliards de pouvoir d'achat aux Français. Cette mesure a été caricaturée. Madame la Ministre, pouvez-vous rappeler tout l'intérêt de cette réforme ? (M. Dominique de Legge ironise ; applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Les collectivités ont la garantie de recevoir le montant qu'elles attendent à partir des décisions qu'elles ont votées en conseil municipal. La première année, 30 % des contribuables seront dégrevés, l'État se substituera à eux ; puis la réforme ira s'amplifiant durant deux ans encore. Durant des années, par faiblesse commune, nous n'avons pas procédé à la révision des bases cadastrales, de peur d'être battus aux élections suivantes. Résultat, une taxe d'habitation injuste. Nous avons besoin d'impôts locaux prévisibles et justes, c'est le sens de la mission Richard-Bur.
M. Pascal Savoldelli . - Alors que le 100e Congrès des maires se tient en ce moment même, les élus, dont certains assistent à nos débats, sont inquiets. Après avoir réduit leurs moyens de 11 milliards d'euros sous le quinquennat précédent, on leur supprime la taxe d'habitation. Pour mon département du Val-de-Marne, 253 millions d'euros pourront être gelés d'ici 2020, l'équivalent de 25 écoles ou 75 crèches. Je vous laisse imaginer les conséquences... Madame la ministre, je vous ai entendu, ce matin, décrire le mécanisme de compensation. Il jouera jusqu'en 2020. Et ensuite ? Je crains qu'on connaisse, avec la taxe d'habitation, ce que l'on a connu pour la taxe professionnelle : une extinction lente mais régulière de la compensation.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Sous le quinquennat précédent, les 11 milliards d'économies demandées aux collectivités ont consisté en une baisse de la DGF. Nous procédons différemment : les 13 milliards d'économie que la loi de programmation des finances publiques prévoit sont un appel à la maîtrise des dépenses publiques. Il n'y a pas de baisse des dotations.
Pour la taxe d'habitation, il s'agit d'un dégrèvement, non d'une compensation : les services fiscaux prendront en compte les nouvelles constructions dans les bases taxables. Pendant trois ans, vous n'avez pas à craindre une baisse, puisque l'État prend la place du contribuable. Après, que se passe-t-il ? C'est l'objet de l'étude sur la fiscalité locale. Il faudra trouver des ressources comprises par nos concitoyens et justes pour les collectivités territoriales - peut-être pas l'impôt sur les portes et fenêtres... (Sourires)
M. Jean-Marie Bockel . - La délégation aux collectivités territoriales, que vous avez présidée, Madame la Ministre, lance, à la demande du président Larcher, des travaux sur le statut de l'élu. Le moment s'y prête avec la fin du cumul des mandats. Le sujet est un serpent de mer, me dira-t-on, mais nous ne partons pas de rien : des textes ont été pris entre 1992 et 2015. Notre ancien collègue Jean-Jacques Hyest, lors de la réforme constitutionnelle de 2008, réclamait un « statut clair et parfaitement explicite ». Avant, pendant, après le mandat... Beaucoup de questions sont sur la table. Nous irons, bien évidemment, voir ce qu'il en est chez nos voisins. Faut-il aller vers le professionnalisme comme l'Allemagne où l'on exige certaines conditions de diplôme ? Je ne le crois pas. Quel est l'état d'esprit du Gouvernement sur ce sujet ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Le Parlement, et plus particulièrement le Sénat, a joué un rôle décisif dans la construction du statut de l'élu. La loi du 31 mars 2015, à laquelle vous avez fait allusion, initiée par Jean-Pierre Sueur et moi-même, visait à donner des garanties durant l'exercice du mandat et à faciliter la réinsertion professionnelle.
Le statut de l'élu est toujours perfectible. Nous sommes ouverts aux discussions. Le président de la République l'a dit, la fin du cumul des mandats est l'occasion de reposer la question du statut de l'élu. Pour les parlementaires, il réclame moins d'élus, mais des élus plus protégés, mieux rémunérés et plus libres de leur action. Pour les élus locaux, nous avons déjà beaucoup progressé ; nous avons une tradition de bénévolat, La professionnalisation est un vrai sujet.
M. Yannick Botrel . - La question des relations entre les collectivités territoriales et les services déconcentrés de l'État est aussi ancienne que la décentralisation. Les élus locaux veulent une pause. Les réformes territoriales décidées durant le quinquennat précédent ne sont pas encore entièrement appliquées, parfois parce que le législateur a voulu ménager une transition. Pour réussir ces réformes, les élus ont besoin du soutien de l'administration déconcentrée. Or le Gouvernement semble recentrer le corps préfectoral selon une logique descendante quand le préfet a aussi un rôle de conseil à jouer auprès des territoires ruraux. La décentralisation ne pourra se faire pleinement sans une réflexion, point par point, sur ce qui relève de l'État et ce qui dépend d'une ou plusieurs collectivités. Les politiques décentralisées et déconcentrées doivent être mieux coordonnées. Le pacte que le Gouvernement propose à 219 grandes collectivités. Ce mode d'action, s'il est novateur, pourrait conduire à une recentralisation de l'action publique. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - J'ai entendu vos préoccupations. Je vous sais un véritable décentralisateur. La recherche d'un équilibre entre pouvoirs des collectivités et présence forte de l'État est dans notre tradition mi-girondine, mi-jacobine. Le président de la République a la ferme volonté de redonner tout leur pouvoir aux préfets de départements, qui avaient été écartés du fait de l'évolution des régions. La politique de contractualisation n'est aucunement de la recentralisation : les contrats seront individualisés, ils porteront uniquement sur les dépenses de fonctionnement. Seront pris en compte les efforts consentis, la population, les caractéristiques socio-économiques, la construction de logements. Ces contrats procèdent d'une politique constructive entre l'État et les collectivités.
M. Jean-Louis Lagourgue . - Les collectivités locales ne veulent pas d'un big bang venu d'en haut, elles veulent maîtriser leur destin. Qui sait mieux qu'elles la meilleure organisation pour leur territoire ? Depuis 2010, elles subissent des réformes et des baisses de dotation. L'accent mis sur les régions et les métropoles, invite à s'interroger sur le sort des départements et des communes, en particulier en zone rurale. Les communes, échelon de la proximité, savent s'adapter. On le voit avec la révolution silencieuse des communes nouvelles. Les collectivités veulent être écoutées, respectées. Madame la Ministre, faites le pari de l'intelligence collective. Madame la Ministre, avez-vous la volonté de retisser un lien de confiance avec les collectivités ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - La réponse est : oui. Et ce n'est pas une posture. Je sais qu'une tension s'est installée entre l'État et les collectivités. Le président de la République ne veut pas d'une grande réforme territoriale. Il demande aux préfets d'accompagner les élus dans leur volonté d'évoluer. Vous avez cité les communes nouvelles, bon exemple ! Ce sont des nouvelles communes, l'organisation de base de la République.
Les communes nouvelles sont un bel exemple de cette évolution. Les communes et le bloc communal ont la liberté de se saisir des sujets qui les intéressent pour mettre en place leur politique grâce à la clause de compétence générale, dont ne bénéficient plus les régions et les départements.
Tout en ne souhaitant pas bouleverser les structures, l'État accompagnera les territoires qui voudront évoluer.
M. Yvon Collin . - Sans relancer le débat sur la réserve parlementaire, je souhaite poser la question de son remplacement. Je me souviens de la promesse d'une dotation de solidarité locale de 50 millions d'euros pour les collectivités, et de 30 millions d'euros pour les associations.
La dotation de soutien à l'investissement local (DSIL) a été transférée vers la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) lors de l'examen du projet de loi de finances, à l'Assemblée.
Le décret du 20 juillet dernier a annulé 260 millions d'euros de crédits DETR et de DSIL, pour 2017. La réserve parlementaire finançait, en zones rurales, de petits projets, qui souvent n'étaient pas éligibles à la DETR.
Enfin, la composition et le fonctionnement de la commission départementale, prévue à l'article L. 2334-37 du CGCT, ne sont pas satisfaisants.
Elles ne sont que des chambres d'enregistrement des décisions prises par des préfectures. Comment améliorer les modalités d'attribution des fonds afin de ne pas pénaliser les petites communes qui ne pourront plus, en 2018, compter sur la réserve parlementaire ?
M. Rémy Pointereau. - Très bonne question !
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - En première lecture à l'Assemblée nationale, la DETR a été abondée de 50 millions d'euros pour les projets d'investissements de proximité des petites communes qui bénéficiaient souvent de la réserve parlementaire. Dans une logique de décentralisation, la DETR est tout à fait adaptée. La commission d'élus fixe les règles. L'Assemblée nationale a longuement débattu de la présence des parlementaires au sein de la commission. Deux députés et deux sénateurs y seront associés mais ils ne sauraient y être plus nombreux, par rapport aux élus locaux, sans remettre en cause la confiance de ceux-ci...
M. Yvon Collin. - Soit.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - L'Assemblée nationale a abaissé à 100 000 euros le seuil de consultation de la commission et la DETR comme la DSIL n'auront plus de seuil, de sorte que les plus petites communes y auront accès. En outre, un fonds de 25 millions d'euros a été créé pour les associations.
M. Yvon Collin. - Nous resterons très vigilants.
M. Rémy Pointereau . - En 2014, le président Larcher a souhaité faire du Sénat le moteur de la simplification des normes. J'en suis chargé au sein de la délégation aux collectivités territoriales. Nous avons proposé de simplifier la saisine du Conseil national d'évaluation des normes (CNEN), voté une résolution afin de limiter le poids de la réglementation applicable aux collectivités territoriales, voté une proposition de loi constitutionnelle posant plusieurs principes dont celui de la suppression de deux normes pour une norme adoptée. Malgré les demandes répétées du président du Sénat, l'Assemblée nationale n'a jamais donné suite.
Madame la Ministre, en cette période de diète financière pour les collectivités territoriales, où le CNEN estime à 6,9 milliards d'euros le coût normatif des lois examinées en 2016, allez-vous faire du poids et du coût des normes une priorité du Gouvernement ? Allez-vous faire inscrire notre proposition de loi sur l'accélération des procédures à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Je ne peux parler qu'au nom du Gouvernement, pas de l'Assemblée nationale.
Le CNEN et le Sénat ont adopté une charte de partenariat en matière de simplification administrative le 23 juin 2016. Ainsi le Sénat ayant été saisi par le CNEN des difficultés des collectivités en cette matière, a abouti à la proposition de loi de MM. Delcros et Vandierendonck sur le service public d'eau potable, adoptée par le Sénat en juillet 2017.
La simplification est l'un des chantiers de la Conférence nationale des territoires. La règle que vous rappelez, de deux normes supprimées pour une créée, a été posée par la circulaire du 26 juillet 2017. Mais tout le monde crée des normes : les professionnels, les élus locaux, l'Europe... Tout le monde doit se réfréner. Le Secrétaire général du Gouvernement (SGG) est venu présenter les effets de cette règle au CNEN.
Le Gouvernement souhaite aller plus loin en renforçant le rôle du CNEN sur le stock et le flux de normes. Il présentera un projet de loi Logement qui aura la simplification pour objectif.
M. Rémy Pointereau. - Je regrette la suppression du ministère de la simplification.
M. Arnaud de Belenet . - Il y a tant de sujets à aborder que j'ai renoncé à choisir...
Nous partageons tous le même constat : taxe d'habitation, baisse des dotations... Les élus locaux sont épuisés et se défient de l'État.
Le Gouvernement refuse la brutalité à l'égard des élus locaux et fait le choix de la confiance collective. Le projet de loi de finances pour 2018 en témoigne.
Une inquiétude singulière s'exprime chez les élus locaux sur la baisse des crédits affectés. Pouvez-vous nous rassurer ? Qu'en est-il du calendrier ?
M. Didier Rambaud. - Très bien !
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Vous avez rappelé l'histoire des relations entre l'État et les collectivités territoriales. Il faut faire preuve de pédagogie. Les DETR et DSIL étaient maintenues au haut niveau de 1,8 milliard d'euros. Il fallait sans cesse lutter contre l'idée de la baisse des dotations. Mais les chiffres sont têtus. Nombre de réformes d'ampleur sont prévues pour le quinquennat, donc rapidement.
J'espère que l'on aboutira à quelque chose, contrairement à ce qui s'est passé sous le précédent président de la République...
Mme Michelle Gréaume . - La teneur des questions posées aujourd'hui montre combien les doléances des collectivités territoriales sont nombreuses, mais aussi combien leurs relations avec l'État sont complexes.
Les collectivités territoriales sont soumises à la règle de l'équilibre réel entre recettes et dépenses et les différentes parties du budget. Or les transferts de compétence sont de plus en plus nombreux. Les communes se retrouvent pieds et poings liés à assumer de nouvelles missions sans visibilité sur les dotations de l'État à venir ni les compensations de la réforme de la taxe d'habitation. Charges d'état-civil, PACS, changements de nom ou de sexe, dédoublements des classes de CP... Les grandes communes ont les moyens d'anticiper, contrairement aux petites.
Quelles mesures concrètes et efficaces mettrez-vous en place pour accompagner toutes les communes ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Vous avez raison de rappeler la règle d'or. Toutefois le budget de la Nation dans son ensemble doit être pris en compte, comme notre engagement de respecter la règle européenne des 3 % de déficit, rapporté au PIB. Le Gouvernement s'est engagé à mettre fin aux transferts de charge rampants, ainsi qu'à la stabilité des dotations sur cinq années. Vous évoquez le manque d'accompagnement technique des petites communes : ce peut être fait par l'intercommunalité. Le Gouvernement a aussi l'intention de renouveler les conseils de l'État sur le territoire, en renforçant la présence des fonctionnaires dans les préfectures.
M. Jean-Marie Mizzon . - La compensation de la suppression de la taxe d'habitation pour certains ménages se fera par dégrèvement. Cela concernera-t-il aussi les constructions en cours et à venir ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Je vous le confirme. Cela s'appelle l'évolution des bases.
M. Jean-Marie Mizzon. - Merci pour cette réponse très claire.
Mme Corinne Féret . - La Conférence nationale des territoires a dessiné des espoirs qui laissent place aux doutes, avec l'annulation de crédits, l'atteinte au logement social. On est loin de la décentralisation lancée par François Mitterrand en 1981. (Mme Maryvonne Blondin approuve.) Les collectivités territoriales s'inquiètent du maintien de leur capacité d'investissement. Les élus locaux déplorent la stigmatisation dont ils font l'objet, alors qu'ils sont très majoritairement bénévoles et impliqués. Qu'entend le Gouvernement par la réduction du nombre d'élus ? L'administration va-t-elle récupérer une part de leurs compétences ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SOCR)
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Je veux vous rassurer. Il y aura une réforme, mais la réduction du nombre d'élus portera sur le nombre de parlementaires ; là n'est pas votre question. Si le président de la République a pu prononcer une phrase dont se sont inquiétés certains élus, ce qui est certain, c'est que la création de communes nouvelles réduit automatiquement le nombre d'élus.
L'Association des Régions de France (ARF) a également entamé, avec le Gouvernement, une réflexion sur le nombre d'élus régionaux puisqu'actuellement les conseils régionaux accueillent tous les élus des anciennes régions. La chose n'est pas simple puisqu'il faut veiller à une représentation équilibrée des départements.
Le président de la République n'a nullement l'intention de modifier le nombre d'élus municipaux. En 2013, nous l'avions nous-même décidé pour les communes de moins de 100 habitants, en passant de 9 à 7, à la demande des élus eux-mêmes puisque la constitution des listes de candidats était parfois difficile...
Mme Nicole Bonnefoy. - Oui.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Moi-même je siège dans une commune de 4 500 habitants, nous sommes 27. Je le dis à titre tout à fait personnel, car le Gouvernement, je le répète, n'a nullement l'intention de réduire le nombre d'élus. Serions-nous 25 ou 23 que la face du monde n'en serait pas changée.
M. Philippe Pemezec . - Merci au ministre de l'intérieur, une fois n'est pas coutume, pour son appui aux maires mobilisés contre les prières de rue. Tenez bon !
Aujourd'hui, si vous n'êtes pas près d'une gare de TGV ou d'une ligne à grande vitesse, vous êtes voué à disparaître. Que reste-t-il de la décentralisation quand les communes étaient le coeur vivant de la démocratie ? J'ai peur d'une remise sous tutelle. Quel sera demain le rôle des préfets vis-à-vis des collectivités territoriales ? Pouvez-vous donner des signes encourageants aux élus qui ont perdu leur passion ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains ainsi que sur quelques bancs du groupe UC)
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Vous avez remercié le ministre de l'intérieur. Merci. Nous sommes derrière vous. Cela signifie que vous avez besoin du préfet et d'un État fort. Le ministre de l'intérieur plaide pour un État fort et des collectivités territoriales fortes. Le préfet doit accompagner les collectivités territoriales, non pour faire le gendarme, mais pour les aider dans leur développement économique, afin de réduire le chômage et faire repartir les territoires vers plus de sérénité. Nous avons la volonté d'accompagner les collectivités territoriales, tout comme Gérard Collomb. Nous avons tous deux été maires.
M. Jean-Claude Luche . - En ces jours de congrès des maires, nous débattons ici des collectivités territoriales, sujet de débat et de passions, encore. Je serai toutefois pragmatique, car je veux évoquer la mise aux normes des bâtiments appartenant aux collectivités territoriales : économies d'énergie, désamiantage... il y a vraiment trop de normes dans ce pays, au point que les collectivités territoriales doivent choisir entre assurer les dépenses de fonctionnement et investir. Isolées, elles peinent parfois à répondre aux demandes de mises aux normes nécessaires.
Prévoyez-vous un plan ou une aide financière dédiée, Madame la Ministre ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - C'est un sujet très important. Le projet de loi Logement contient des dispositions transformant l'obligation de résultat en obligation de moyens - les contraintes sont donc allégées.
Une partie de la DSIL est en outre fléchée sur les charges d'investissement des collectivités locales.
Enfin, les territoires à énergie positive bénéficieront d'une enveloppe supplémentaire de 75 millions d'euros pour financer des travaux tels que ceux que vous évoquez.
M. Éric Kerrouche . - L'article 72, alinéa 5, de la Constitution prévoit des dispositifs de péréquation, pour réduire les inégalités territoriales.
Les territoires peu denses ne bénéficient pas des mêmes externalités positives que les métropoles, c'est évident. Le législateur a progressivement mis en place des mécanismes horizontaux et verticaux, mais au détriment de leur lisibilité. La mission de réflexion « Richard-Bur » est certes en cours.
Alors que l'on prive les territoires de certaines ressources, alors qu'on leur demande plus d'effort de solidarité, comment résorber la fracture territoriale ? Sur quelle vision territoriale s'appuie votre refonte de la péréquation ? Ruissellement ou solidarité ? Allez-vous encourager les dynamiques territoriales porteuses d'égalité ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - La péréquation bénéficie au monde rural : en 2017, les communes de moins de 50 000 habitants perçoivent 34 % des versements du fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC), alors qu'elles n'y contribuent qu'à hauteur de 26 %. La métropole du Grand Paris fournit 34 % du fonds mais n'en bénéficie qu'à hauteur de 4 %.
Dix mille communes bénéficient de la dotation de solidarité rurale (DSR) cible, 87 % d'entre elles touchent aussi une aide du FPIC et 92 % ont vu leur DGF augmenter. Je rappelle enfin que les communes rurales ne sont pas concernées par la demande de réduction contractuelle de réduction des dépenses de fonctionnement.
Avec les communes rurales, nous faisons donc le pari de la confiance.
À l'Assemblée nationale, un amendement a été adopté qui prévoit la création d'une commission et la remise d'un rapport visant à améliorer la péréquation en général et le FPIC en particulier.
Mme Marie Mercier . - La loi Maptam du 27 janvier 2014 a créé une nouvelle compétence, relative à la gestion des milieux aquatiques et à la prévention des inondations, dite Gemapi. Deux ans plus tard, la loi NOTRe a imposé son transfert aux communautés d'agglomération et de communes, dans le bloc des compétences obligatoires, au 1er janvier 2018.
Or cette compétence nécessite une ligne budgétaire. Les élus locaux vont devoir trancher entre baisser les dépenses et augmenter les impôts.
La taxe, Gemapi, pas encore en vigueur, est pour l'heure une composante de la taxe d'habitation et de la taxe foncière. Mais la suppression de la première va nous forcer à revoir le dispositif...
Un pilotage de la compétence Gemapi va nécessiter des compétences techniques, apportées parfois par des associations syndicales autorisées, sur lesquelles s'appuient un nombre important de communes et de groupements, parce qu'elles connaissent le terrain. Quel statut leur accorder ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Nous avons trois ans de tranquillité : la taxe d'habitation n'est pas supprimée, je le rappelle, elle continuera à exister, l'État prendra la place d'une partie des contribuables, voilà tout.
La loi Maptam préserve les compétences des syndicats et associations syndicales autorisées, et il n'est pas prévu d'y revenir.
Le député Marc Fesneau a déposé une proposition de loi visant à améliorer la mise en oeuvre de cette compétence. Elle est très intéressante, mais je manque de temps pour vous la présenter...
M. Guy-Dominique Kennel. - C'est dommage !
M. Franck Montaugé . - Loi d'affirmation des métropoles, loi de création des grandes régions, loi sur la politique de la ville, loi Montagne récemment : la ruralité n'a toujours pas fait l'objet d'un grand dessein national. C'est l'impensé de nos politiques. Dans la mondialisation, nous avons besoin de métropoles fortes, le rural que je suis, en est convaincu et y contribue.
Mais il faut aussi penser la place des ruralités, j'emploie à dessein ce pluriel, car notre ruralité est diverse et plurielle. Je ne dirai pas que rien n'est fait, mais il faut bien constater les phénomènes de déprise économique, démographique, de fermeture de services publics, de désertification médicale. Ne pas les traiter ne fera qu'alimenter le sentiment d'abandon, de défiance de nos concitoyens à l'égard de l'action publique, dont les effets se font sentir d'élection en élection.
Un projet de loi largement participatif de reconnaissance des ruralités est nécessaire, Madame la Ministre...
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Je connais bien la ruralité, puisque j'y vis. La désertification médicale est un vrai sujet, en zone rurale comme dans certaines banlieues.
La ministre de la santé a annoncé un grand plan sur lequel nous sommes tous pleinement mobilisés. Il faudra travailler en lien avec les médecins.
Les contrats de réciprocité, que vous aviez portés à Toulouse, sont un autre outil important.
Faut-il un projet de loi sur la ruralité, me demandez-vous...
M. Franck Montaugé. - Les ruralités !
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - La question se pose. Faut-il aborder les problèmes sous l'angle géographique ou thématique ? Nous aurons l'occasion d'y revenir.
Mme Dominique Estrosi Sassone . - La contractualisation État-collectivités territoriales concerne les 319 plus grandes collectivités territoriales, à l'origine de 80 % des dépenses locales, dont la hausse serait plafonnée à 1,2 % l'an. « Travail de dentelle » que cette contractualisation, avez-vous déclaré, Madame la Ministre. Mais pourquoi en avoir limité le périmètre aux intercommunalités de plus de 150 000 habitants et aux communes de plus de 50 000 habitants, en renforçant ainsi l'inquiétude budgétaire et le sentiment d'abandon des plus petites ? Enfin, comment éviter que les communes vertueuses, bien gérées par des élus courageux, ne soient pas pénalisées aujourd'hui ? Comment tenir compte des efforts passés ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Le contrat de mandature entre État et collectivités territoriales reposera sur la confiance. Le cadre sera fixé par la loi de programmation des finances publiques, mais les modalités et les objectifs seront laissés à l'appréciation de chaque collectivité territoriale, au cas par cas.
Certaines collectivités territoriales pourront contractualiser, même si elles ne sont pas dans les 319. La mission Richard-Bur propose d'élargir le périmètre à 600 collectivités territoriales, celles dont le budget dépasse 300 millions d'euros - ce qui ferait 80 % de la dépense locale, contre 70 % pour les 319 initiales.
Impossible enfin, j'insiste, de ne pas tenir compte du passé. Il en sera tenu compte.
M. Dominique de Legge . - En 2010, le Gouvernement a supprimé la taxe professionnelle au motif que son calcul était anti-économique. Les 13 milliards de pertes pour le bloc intercommunal ont été compensées dans les conditions que vous savez. La suppression de la taxe d'habitation...
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Non !
M. Dominique de Legge. - ...améliorera peut-être le pouvoir d'achat des familles, mais privera le bloc communal de 18 milliards d'euros. Quel avenir pour la taxe sur le foncier bâti et la taxe sur le foncier non bâti, peu dynamiques ?
Est-ce seulement compatible avec l'article 72-2 de la Constitution ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - L'autonomie financière des collectivités territoriales au sens de l'article 72 sera respectée : le ratio d'autonomie sera respecté, puisque la taxe d'habitation fera l'objet d'un dégrèvement, et non d'une exonération. Elle demeure une ressource propre. Et même si l'autonomie financière en droit ne garantit pas le pouvoir de décider du taux, celui-ci sera maintenu aux collectivités territoriales. Une réflexion plus large a été engagée avec la mission Richard-Bur.
Et lorsque l'on voit ce que rapporte la taxe sur le foncier non bâti, il faut aussi y réfléchir... D'autres ressources peuvent être trouvées pour les collectivités territoriales.
M. Dominique de Legge. - J'ai bien compris qu'il s'agissait d'un dégrèvement. En 2010, une excellente sénatrice disait craindre une recentralisation avec une telle compensation de la taxe professionnelle. Que la ministre qu'elle est devenue ensuite s'en souvienne...
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Pour la taxe professionnelle, c'était une exonération, non un dégrèvement comme celui que nous proposons pour la taxe d'habitation !
M. Bernard Fournier . - Comme vous, Madame la Ministre, je vois dans l'intercommunalité une chance de survie pour les communes à condition qu'elle soit consensuelle, cohérente, et serve un projet de territoire. Or nous assistons à une course à la collectivité XXL coûteuse et peu démocratique. Les transferts de compétence obligatoires ont transformé nos communes en coquilles vides. Bon exemple ou, plutôt, mauvais exemple : le transfert des compétences eau et assainissement dans la loi NOTRe. D'autant que le périmètre des intercommunalités ne correspond pas à celui des syndicats. Ces transferts ne seront pas sans conséquences sur le prix de l'eau. Poursuivre dans cette voie serait du technocratisme.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Sur les questions de périmètre des intercommunalités, puisque l'on évoque mes années au Sénat, on aurait pu rappeler combien je me suis battue avec d'autres, lors de la discussion de la loi NOTRe, pour un critère de densité de population différent dans le monde rural. Ensuite, certains élus, ceux du Grand Reims par exemple, ont souhaité former des communautés plus grandes ; à d'autres, on a forcé la main. Le Premier ministre m'a confié une réflexion sur les compétences eau et assainissement. Les élus sont donc entendus et respectés. Il y aura un droit d'opposition au transfert de ces compétences, comme il en existe un pour le PLU, pour les conserver au niveau communal. C'est un bon compromis.
La séance est suspendue à 20 h 35.
présidence de M. Jean-Marc Gabouty, vice-président
La séance reprend à 22 h 5.
Modalités de dépôt de candidature aux élections
M. le président. - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, relative aux modalités de dépôt de candidature aux élections (Demande du groupe SOCR).
Discussion générale
Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur . - Votre haute Assemblée a souhaité mettre à l'ordre du jour cette proposition de loi, adoptée le 1er février dernier à l'Assemblée nationale et qui avait reçu un avis favorable du Gouvernement.
Les candidats « malgré eux » sont des personnes qui figurent contre leur gré sur une liste, ayant signé le formulaire Cerfa de dépôt de candidature, qui leur a été présenté comme un parrainage ou une pétition. Ces manoeuvres concernent principalement des scrutins de liste ou des scrutins majoritaires uninominaux.
Les conséquences de ces manoeuvres frauduleuses sont lourdes : les candidats « malgré eux » ne peuvent retirer leur candidature si le délai est forclos, et la propagande électorale ne peut être rappelée.
Pour les autres candidats, cela constitue un préjudice si cela conduit à une annulation du scrutin. Déjà, des annulations ont été prononcées dans les années 1990. Ce sujet concernant le coeur de la démocratie, la confiance de nos concitoyens dans la sincérité de l'élection, il est bienvenu de le régler.
En 2014, une quarantaine de cas ont été repérés en Seine-Maritime, Calvados, Seine-Saint-Denis et Haute-Savoie par exemple. Même chose aux élections départementales et régionales de 2015. Le Conseil d'État a confirmé l'annulation de l'élection municipale de Vénissieux de 2014. Cela porte atteinte à la confiance des électeurs.
Jusqu'à présent, ce combat était mené a posteriori. Cette proposition de loi va plus loin en formalisant plus explicitement le consentement du candidat, en ajoutant une mention manuscrite, qui cite nommément la tête de liste ou le candidat du scrutin uninominal, et en prévoyant la transmission d'une copie de la pièce d'identité.
Ces deux nouvelles modalités introduisent-elles trop de complexité ? Je ne le crois pas, car la mention manuscrite est simple ; elle ne saurait suffire, car elle peut être apportée frauduleusement par la tête de liste. C'est pourquoi la copie de la pièce d'identité est indispensable pour attester qu'il n'y a pas fraude, puisque la pièce d'identité est la seule pièce personnelle qu'on ne peut produire à l'insu de son détenteur.
Le dispositif est simple et efficace ; le Gouvernement veillera à ce que les dispositions réglementaires le restent elles-aussi.
La commission des lois a étendu ce dispositif aux communes de moins de 1 000 habitants, à la métropole de Lyon, aux élections des Français de l'étranger, aux communautés ultramarines, de même qu'aux élections législatives, départementales et sénatoriales.
Fallait-il une loi pour garantir cela ? Cela a fait débat à la commission des lois. Je réponds oui : la gravité du sujet ne souffrirait pas l'absence d'un débat parlementaire. Le Gouvernement ne voulait pas en faire l'économie.
L'amendement de M. Jean-Pierre Grand prévoit d'ajouter deux noms sur les listes des élections aux communes de plus de 1 000 habitants.
Le Gouvernement n'ignore pas les difficultés rencontrées lorsque le maire démissionne et que le conseil municipal est incomplet. Cependant, l'ajout de deux candidats poserait des problèmes aux petites communes pour atteindre des listes complètes, sachant que nous connaissons une crise des vocations. Le Gouvernement défendra un amendement visant à rendre ces dispositions optionnelles.
Les nuances politiques sont utilisées par l'administration depuis la IIIe République. Dans la mesure où elles ne sont pas communiquées aux électeurs, elles n'altèrent pas la sincérité du scrutin, comme en témoigne la jurisprudence du Conseil d'État en 2003 et 2015.
La CNIL est allée dans le même sens dans sa décision du 19 décembre 2013, où elle a distingué nettement la nuance, de l'étiquette politique.
Tout candidat peut demander à l'administration communication - voire rectification - de la nuance qui lui a été attribuée. Cela suffit. (Applaudissements au centre et à droite ; M. Didier Marie applaudit aussi.)
M. Didier Marie, rapporteur de la commission des lois . - Entre 2014 et 2017, un million de nos concitoyens ont été candidats aux élections en déposant leur candidature en préfecture, selon les modalités prévues par les lois de 1988 à 2013 : c'est dire la vitalité de notre démocratie - et tous ces candidats ont suivi les règles de procédure qui ont été renforcées ces dernières décennies.
Cependant, des partis politiques souvent situés aux extrémités ont profité de l'inattention ou de la faiblesse de certains citoyens pour les inscrire. En Seine-Maritime, il y en a eu une trentaine : 22 au Grand-Quevilly, 6 dans ma bonne ville d'Elbeuf, 1 à Lillebonne, mais aussi 8 à Giberville dans le Calvados, 3 à Barfleur, 1 à Annemasse (Haute-Savoie), 1 à Noisy-le-Grand (Seine-Saint-Denis) et 1 à Puteaux (Hauts-de-Seine). En 2015, un binôme a même recueilli 14,3 % des voix au premier tour sans faire campagne.
Il est difficile de recenser avec précision le nombre de « candidats malgré eux » signalés. Toutefois, ces manoeuvres frauduleuses portent une atteinte grave à la sincérité des scrutins : à défaut de pouvoir retirer leur candidature avant l'élection, les personnes abusées ont pour seule solution de saisir le tribunal administratif. Ces manoeuvres sont donc lourdes de conséquences pour le bon fonctionnement de la démocratie : elles dupent les électeurs, ruinent la confiance qu'ils peuvent avoir dans les institutions et pénalisent l'ensemble des listes. Elles engendrent également des dépenses publiques nouvelles lorsqu'elles provoquent la convocation d'élections partielles.
L'inscription de « candidats malgré eux » présente, enfin, des conséquences non négligeables sur les citoyens dupés comme cette personne âgée de Giberville, qui a toute sa vie voté communiste, le proclame haut et fort, et s'est retrouvée sur la liste du Front national. Le préjudice psychologique est terrible...
À Orléans, une nonagénaire atteinte d'Alzheimer a été inscrite sur une liste Bleu marine.
M. Jean-Pierre Sueur. - Hélas !
M. Didier Marie, rapporteur. - Et je ne dis rien de Vénissieux.
Ces personnes ne peuvent retirer leur candidature que si la moitié de la liste y consent et dans les délais prévus. Les « bourrages de liste » pour reprendre l'expression d'une députée prennent une ampleur inégalée.
Cette proposition de loi renforce les dispositifs mis en oeuvre pour vérifier le consentement des candidats par le biais d'une mention manuscrite et de la transmission d'un justificatif d'identité.
La commission souscrit pleinement aux objectifs de ce texte qui semble faire consensus.
Le caractère éventuellement réglementaire n'a été relevé ni par l'Assemblée nationale, ni par le Gouvernement.
La déclaration de candidature est au coeur de l'exercice des droits civiques et le législateur s'est souvent penché dessus.
Guy Geoffroy l'a bien dit : « Cela vaut la peine (d'être) astreint à respecter un peu plus de formalisme et à écrire un peu plus à la main tous les cinq ou six ans pour pouvoir s'engager dans le débat démocratique et devenir un élu de la République (...) car l'objectif est de lutter contre tous les types de détournement, toutes les fraudes ».
La commission a étendu les dispositions de la proposition de loi à toutes les élections, en y incluant les communes de moins de 1 000 habitants, la métropole de Lyon, la représentation des Français de l'étranger et certaines élections outre-mer. Je ne doute pas de son adoption à une large majorité par notre assemblée. (Applaudissements sur de nombreux bancs)
Mme Josiane Costes . - Pour nous, tous élus de la République, l'existence de candidats « malgré eux » est révoltante. Cette pratique altère le contrat social, elle dénote un mépris envers nos institutions démocratiques et elle est une injure au visage de tous les élus en laissant croire que leur engagement est le fait du hasard ou d'une circonstance. Elle est heureusement exceptionnelle. Nous ne sommes pas démunis. La proposition de loi renforce le contrôle a priori. Les améliorations de notre rapporteur comblent les lacunes du texte d'origine.
M. Grand relève des problèmes réels, notamment l'étiquetage politique par les préfectures.
Les faits divers témoignent au moins de deux lacunes de notre système actuel. D'abord, l'insuffisante responsabilisation des têtes de liste. Nous souhaiterons l'accentuer en prévoyant que, pour chaque scrutin de liste, la tête de liste soit responsable du dépôt de candidatures de l'ensemble des membres de la liste et d'un premier contrôle des conditions d'éligibilité. Cela suppose de limiter leur capacité à déléguer, et qu'ils soient seuls à porter la responsabilité juridique.
Le cas des candidats malgré eux très âgés pose, ensuite, le problème des personnes vulnérables. À l'heure actuelle, rien ne permet aux services de l'État en charge du contrôle d'éligibilité des candidats de vérifier s'ils ne font pas l'objet de mesures de tutelle ou de curatelle. Cela laisse planer le doute sur leurs capacités à mesurer vraiment l'éligibilité des candidats. La rectification d'un scrutin par un juge contribue à la fragilité de nos institutions démocratiques en nourrissant les discours populistes.
Ce texte est le premier jalon utile d'un vaste débat sur la révision de nos institutions électorales. (Applaudissements sur de nombreux bancs)
M. Christophe Priou . - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Comparaison ne vaut pas raison mais puisque nous nous apprêtons à approuver ce texte qui a fait l'unanimité à l'Assemblée nationale, nous aurions aimé que le texte sur l'eau et l'assainissement connaisse le même traitement au Palais-Bourbon... (Sourires)
L'honnêteté, la sincérité sont un préalable à l'accession publique. Des mesures renforçant la transparence ont été prises ces dernières années, en particulier depuis la mise en place de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique. Ce texte ne règle pas tout. On pourrait être tenté de rendre obligatoire la résidence des candidats sur le lieu de leur élection. Trop de candidats sont dénués de tout lien avec les populations qu'ils sont censés représenter, je l'ai constaté en Pays de la Loire en 2017.
Le consentement clair et précis des candidats évitera l'empoisonnement des scrutins. Je salue les maires pour leur service rendu à la Nation. La suspicion gagne du terrain, ce qui est inacceptable. Le consentement est une condition irréductible, et bien le minimum. Une étude de l'Insee montre que l'abstention a atteint des records en 2017, 21 % des inscrits ne votant plus qu'à l'élection présidentielle, contre 9 % dans la séquence de 2012. Ce phénomène inquiétant fragilise les élus en réduisant leur socle électoral. Le groupe Les Républicains est favorable à cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC).
MM. Daniel Gremillet et François Grosdidier. - Très bien !
M. Arnaud de Belenet . - Le travail du rapporteur, après l'unanimité à l'Assemblée nationale, a fédéré l'ADF et l'ARF autour d'un texte qui recueille un très large consensus. Le groupe LaREM adhère aux huit amendements de la commission des lois et à celui du Gouvernement.
Si l'étiquette de la nuance politique n'est pas portée à la connaissance du grand public, elle peut marquer un candidat élu. Il manque toutefois la case « absence d'étiquette », par exemple pour un élu rural qui veut protéger son emploi et sa famille. Ainsi cela ne freinerait pas sa vocation. Le groupe LaREM adhérera à la dynamique unanime. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM ; Mmes Nadia Sollogoub et Marie Mercier applaudissent aussi.)
Mme Éliane Assassi . - Être élu sans avoir fait acte de candidature, c'est ainsi que sont élus les papes...
M. Philippe Bas, président de la commission des lois. - Il y a des précédents.
Mme Éliane Assassi. - Mais les cas cités ne bénéficient pas des mêmes recours spirituels. La manoeuvre en 2014 a surtout été utilisée par un parti dont les sénateurs ne sont pas très présents.
M. Philippe Bas, président de la commission. - Ni très nombreux.
Mme Éliane Assassi. - Le temps parlementaire est précieux, il est regrettable de devoir légiférer là-dessus. Pourtant c'est nécessaire. Deux formalités sont ajoutées : justificatif d'identité et mention manuscrite, outre la signature. Ces modalités de recueil du consentement volontaire et éclairé sont pertinentes. Le groupe CRCE votera en faveur de cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE ; MM. Philippe Bas, président de la commission, Didier Marie, rapporteur et Mme Marie Mercier applaudissent.)
M. Philippe Bonnecarrère . - Cette proposition de loi relève du bon sens. Les « malgré eux » ont été plus nombreux en 2014 et 2015. L'exigence d'un justificatif d'identité et d'une mention manuscrite est proportionnée et n'alourdit pas la procédure. Non, ce n'est pas une loi de circonstance : le nombre et la répartition des cas détaillés par le rapporteur en témoignent. La question du domaine législatif ou réglementaire ne paraissait plus délicate. Mais votre analyse, Madame la Ministre, m'a convaincu.
La liberté de candidature est préservée.
Le groupe centriste votera favorablement à cette proposition de loi.
Ce débat pose deux questions complémentaires. D'abord, celle des conseils municipaux non complets dans les petites communes. En 2014-2020, le nombre de démissions semble particulièrement important. Dans le Tarn, j'ai été étonné par le nombre de dissolutions de conseils municipaux parce qu'ils étaient incomplets. Il me semble donc utile, comme le propose l'amendement de Jean-Pierre Grand, d'ajouter deux noms de candidats aux listes pour les communes de plus de 1 000 habitants. Cependant pour ne pas compliquer la constitution des listes, il faudra, probablement, suivre l'amendement du Gouvernement qui fait de cet ajout de deux noms une faculté, plutôt qu'une obligation.
Second sujet, l'obligation du rattachement politique. Même si cette mention est une donnée interne et non publiée, elle porte atteinte à une forme de liberté qu'il ne faut pas sous-estimer. Une case « sans étiquette » devrait être rouverte par voie réglementaire par le Gouvernement. Ce serait plus humain et plus correct envers les candidats et toutes les bonnes volontés qui font vivre notre démocratie. (Mme Nadia Sollogoub, MM. Joël Guerriau, Didier Marie, rapporteur, Philippe Bas, président de la commission applaudissent.)
M. Alain Marc . - Certains partis politiques profitent de la faiblesse ou de l'inattention de candidats devenus « malgré eux ». Les responsables de liste usent parfois de subterfuges. Ce fut le cas en 2014 et 2015, sous prétexte de pétition ou de recours devant le Conseil d'État. Ces manoeuvres dupent les électeurs et ruinent leur confiance dans notre démocratie.
Des candidats « malgré eux » subissent un préjudice non négligeable, surtout quand ils ne partagent pas les idées du parti en question. Je partage le point de vue de MM. de Belenet et Bonnecarrère sur la case « sans étiquette ».
L'annulation a posteriori n'efface pas le préjudice et elle est dommageable à tous.
La proposition de loi propose des nouvelles formalités que certains regretteront. Mais si c'est pour éviter les fraudes, est-ce si grave ? (Mme Nadia Sollogoub, MM. Joël Guerriau, Arnaud de Belenet, Didier Marie, rapporteur, Philippe Bas, président de la commission applaudissent.)
Mme Corinne Féret . - Un dépôt de candidature à une élection n'est pas anodin. Il doit être éclairé et volontaire. Cette proposition de loi répond aux manipulations frauduleuses recensées en 2014 et 2015. Le cas de Giberville, dans le Calvados, est emblématique. Huit personnes ont ainsi été dupées par un candidat du FN qui ne parvenait pas à constituer sa liste. Lorsqu'elles se sont rendu compte de la manoeuvre, il était trop tard. Il ne leur restait qu'à saisir la justice. Le tribunal administratif de Caen a annulé l'élection des deux conseillers municipaux fautifs, leurs sièges sont restés vacants, mais le mal était fait et les conséquences sont lourdes. Cela peut engendrer des dépenses publiques. Les fondements de la démocratie en sont fragilisés.
Le traumatisme est particulièrement fort, en particulier dans les petites communes. La proposition de loi est simple et efficace : mention manuscrite de chaque candidat citant nommément la tête de liste et justificatif d'identité. On s'assure aussi de la volonté personnelle et éclairée de chaque candidat.
Je remercie le rapporteur et l'ensemble de la commission des lois pour leur travail sur cette proposition de loi, qu'ils ont améliorée. Elle est à présent complète, simple et claire, contre les partis malveillants, qui masquent ainsi leur incapacité à pourvoir des sièges.
Le groupe SOCR votera naturellement cette proposition de loi, comme tous ceux qui sont attachés à la sincérité des scrutins. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOCR, LaREM et UC)
M. Bruno Sido . - Je comprends et partage l'objectif de cette proposition de loi. Parfois, les candidats malgré eux découvrent leur nom sur les documents de propagande, voire les affiches, d'un parti dont ils ne partagent pas les idées. Imaginez leur stupeur ! J'ai toutefois été surpris par les solutions préconisées.
Pourquoi ne pas punir plus sévèrement les auteurs - deux dizaines de cas sont à traiter - plutôt que de renforcer le contrôle a priori pour, potentiellement, 67 millions de Français ? Si ces obligations nouvelles peuvent s'entendre pour les parlementaires, elles décourageront les candidatures dans les communes de moins de 1 000 habitants. Mme la Ministre, nous représentons tous les territoires, pas seulement les métropoles. Dans les petites communes, majoritaires dans mon département de la Haute-Marne, c'est un défi de constituer un conseil municipal. Il faut aller chercher des volontaires et les convaincre. L'obligation de déposer les candidatures constitue déjà un obstacle, si l'on en rajoute, autant dire aux communes à taille humaine que le Sénat leur refuse le droit d'exister.
Quelle hypocrisie de s'étonner que les conseils municipaux se vident si l'on ajoute, année après année, des contraintes supplémentaires ! En Haute-Marne, 27 conseils municipaux ont élu leur maire sans être au complet. Ce sujet est tabou. Je tiens ce chiffre, non de la préfecture qui a refusé de me le donner, mais de la presse. Il suffira au préfet de refuser que les conseils municipaux élisent les maires sans être au complet pour décider une fusion d'office. C'est arrivé en Haute-Marne ! Il faut encourager l'engagement en allégeant au maximum les contraintes et nous faisons l'inverse ! À titre personnel, je voterai contre ce texte et je déposerai une proposition de loi supprimant l'obligation de dépôt des candidatures dans les communes de moins de 1 000 habitants.
M. Cyril Pellevat . - Cette proposition de loi consensuelle sied parfaitement à la chambre haute. Pour avoir été élus conseillers municipaux, départementaux ou régionaux, nous connaissons bien le fonctionnement des élections locales. Nous sommes élus au Sénat par les territoires, que nous représentons.
Lors du dévoilement des listes du FN aux élections municipales de mars 2014, certains se sont découverts candidats malgré eux. Plus incongru, une femme décédée a été déclarée candidate. Il y a eu un cas dans mon département de la Haute-Savoie. À l'occasion des élections départementales de mars 2015, un binôme de candidats a été investi contre son gré dans le Puy-de-Dôme ; il a recueilli 14,34 % des voix au premier tour sans faire campagne.
Une série de litiges s'est ensuivie. Certaines élections furent annulées par les juridictions administratives au nom de la sincérité du scrutin.
Ces pratiques, qui ne sont sans doute pas l'apanage du Front national, sont néfastes pour la démocratie. Elles amplifient la crise de confiance des citoyens envers les élus. Ce texte évitera les cafouillages. Les partis ne doivent pas profiter de l'inattention, voire abuser de la faiblesse de certains citoyens, pour les inscrire, à leur insu, sur une liste.
Notre commission des lois est parvenue à un texte complet en ajoutant la transmission d'une copie du justificatif d'identité des candidats et suppléants aux élections législatives, départementales et sénatoriales. Je souligne l'extension du périmètre de la proposition de loi aux élections municipales dans les communes de moins de 1 000 habitants, à l'élection des conseillers de la métropole de Lyon, à celle des instances représentatives des Français établis hors de France et à l'ensemble des élections des collectivités ultramarines.
Rendre facultatif l'ajout de deux noms sur les listes, comme le propose le Gouvernement par un amendement, est bienvenu. Les hypothèses d'épuisement des listes seront réduites et s'ensuivront moins d'élections partielles.
Je voterai ce texte, utile à la santé de notre démocratie, en rappelant l'urgence de développer davantage la culture de la participation, que je connais bien, pour être d'un département frontalier avec la Suisse. Consultations numériques, panels de citoyens, rétablissement du droit de pétition auprès des assemblées, assouplissement du référendum local, notre mission sur la démocratie représentative, participative et paritaire a présenté des pistes pour redonner confiance en notre démocratie. (Applaudissements de M. Jean-Paul Émorine, Mme Nadia Sollogoub et de M. Didier Marie, rapporteur)
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Ce sont, non des étiquettes mais des nuances. Il existe déjà, aux côtés de « divers gauche » et « divers droite », la nuance « divers » ; ce peut-être une solution.
M. Jacques Bigot. - On pourrait ajouter « divers en même temps ».
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Le ministère de l'intérieur actualise la grille des nuances avant chaque scrutin. Toutes les informations sur les demandes de communication et de rectification figurent dans le mémento remis aux candidats.
La discussion générale est close.
Discussion des articles
ARTICLE ADDITIONNEL avant l'article premier A
M. le président. - Amendement n°19 rectifié, présenté par Mmes Costes, N. Delattre et M. Carrère, MM. Arnell, A. Bertrand, Gabouty, Gold et Guérini, Mmes Jouve et Laborde et MM. Menonville, Requier et Vall.
Avant l'article 1er A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 444 du code civil est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Ils sont opposables aux services administratifs chargés du contrôle de l'éligibilité des candidatures aux élections sans délai après leur notification, dans des conditions prévues par décret. »
Mme Josiane Costes. - Avec cet amendement, les services de l'État pourront s'assurer que les candidats ne sont pas inéligibles parce que placés sous tutelle ou sous curatelle. On me répondra que cela représente une charge lourde, elle est moindre que celle qui consiste à invalider une élection.
M. Didier Marie, rapporteur. - Intention louable mais qui pose des difficultés pratiques. Quelque 700 000 personnes sont concernées. Avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Avis défavorable. Ce serait disproportionné et censuré par le juge parce qu'attentatoire à la vie privée. Le juge des tutelles a le choix de priver une personne du droit de vote. Si tel est le cas, la personne ne peut se porter candidate. Retrait, sinon avis défavorable.
L'amendement n°19 rectifié est retiré.
ARTICLE PREMIER A
M. le président. - Amendement n°3 rectifié, présenté par MM. Grand, Daubresse, Paccaud, Bonhomme et Le Gleut, Mme Bories et MM. Frassa et Lefèvre.
Alinéa 4
Rédiger ainsi cet alinéa :
a) À la deuxième phrase, le mot : « ; celui-ci » est remplacé par les mots « dans des conditions fixées par décret. Ce remplaçant ».
M. Jean-Pierre Grand. - Je propose de réécrire une grande partie de ce texte, non parce que je le mets en cause, mais dans l'objectif de mieux légiférer. Adoptée à la fin de la législature précédente, cette proposition de loi aurait dû se voir opposer une irrecevabilité aux termes de l'article 41. De tels détails (M. Jean-Pierre Grand lit le texte de l'article premier) doivent-ils vraiment figurer dans la loi ? Faisons confiance à l'exécutif qui pourra prendre un décret, voire une simple circulaire.
M. Didier Marie, rapporteur. - M. Grand est un fin connaisseur du droit électoral mais je ne partage pas cette position : le domaine législatif encadre déjà le dépôt des candidatures. La nature du sujet justifie la mobilisation de la loi. Du reste, ni le Gouvernement ni les députés n'ont soulevé ce point. Retrait, sinon avis défavorable.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Même avis : ce qui touche à la sincérité du scrutin relève de la loi, conformément à l'article 34 de la Constitution. Le pouvoir réglementaire fixera les modalités d'application du texte. Entre autres, la mention manuscrite vaudra-t-elle pour une élection ? Pour toutes ?
L'amendement n°3 rectifié est retiré.
L'article premier A est adopté.
ARTICLE PREMIER
L'amendement n°4 rectifié est retiré.
M. le président. - Amendement n°12 rectifié, présenté par Mmes Costes, N. Delattre et M. Carrère, MM. Arnell, A. Bertrand, Gabouty, Gold et Guérini, Mme Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et MM. Menonville, Requier et Vall.
Après l'alinéa 7
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
...) Les deux premières phrases du deuxième alinéa sont ainsi rédigées : « Elle est faite collectivement pour chaque liste par le candidat tête de liste ayant la qualité de responsable de liste. À cet effet, chaque candidat établit un mandat signé de lui, confiant au responsable de liste le soin de faire toutes déclarations et démarches utiles à l'enregistrement de la liste, pour le premier et le second tours. » ;
Mme Josiane Costes. - Les membres du RDSE veulent renforcer le contrôle interne en donnant à la tête de liste la responsabilité du dépôt des candidatures. Cela découragerait l'utilisation de mandataires ayant vocation à servir de fusibles. L'idée n'est pas de noyer la tête de liste sous la paperasse mais de la responsabiliser.
M. Didier Marie, rapporteur. - Si l'on comprend la logique de responsabilisation, nous nous éloignons du sujet. La suppression du mandataire apporterait une rigidité malvenue. Le recours à des mandataires est encadré pour les élections régionales et, en pratique, pour toutes les élections de liste. Retrait, sinon rejet.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Même avis pour les mêmes raisons.
L'amendement n°12 rectifié est retiré.
L'article premier est adopté.
ARTICLES ADDITIONNELS
M. le président. - Amendement n°2 rectifié, présenté par MM. Grand, Daubresse, Paccaud, Bonhomme, Dufaut et Le Gleut, Mme Bories et MM. Frassa, Gremillet et Lefèvre.
Après l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À l'article L. 260 du code électoral, les mots : « autant de candidats que de sièges à pourvoir » sont remplacés par les mots : « un nombre de candidats égal au nombre de sièges à pourvoir augmenté de deux candidats supplémentaires ».
M. Jean-Pierre Grand. - Lors des dernières élections de mars 2014, un scrutin de liste à la proportionnelle s'est tenu pour la première fois dans les communes entre 1 000 et 3 500 habitants. Pour un tiers d'entre elles, n'existait qu'une liste de candidats, principalement dans les petites communes rurales.
Or le code général des collectivités territoriales prévoit que le conseil municipal soit complet pour élire le maire. Ainsi, si un maire d'une commune, élu en 2014 sur une liste unique, démissionne de sa fonction et de son mandat, une nouvelle élection intégrale est nécessaire. D'où cette proposition de deux candidats supplémentaires, que le Sénat avait adoptée en mars 2016, et que notre collègue Patrick Chaize a reprise dans une proposition de loi il y a moins d'un mois.
M. le président. - Amendement n°21 rectifié, présenté par le Gouvernement.
Après l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À l'article L. 260 du code électoral, les mots : « autant de candidats que de sièges à pourvoir » sont remplacés par les mots : « au moins autant de candidats que de sièges à pourvoir, et au plus deux candidats supplémentaires ».
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Le Gouvernement est favorable à la possibilité d'avoir deux noms supplémentaires. En revanche, pour ne pas aggraver la situation dans les petites communes - oui, Monsieur Sido - où il est parfois difficile de trouver des candidats, le Gouvernement propose de rendre le dispositif facultatif.
M. Jean-Pierre Grand. - Je retire mon amendement : vous y ajoutez une précision de bon sens.
L'amendement n°2 rectifié est retiré.
M. Didier Marie, rapporteur. - Merci à M. Grand d'avoir introduit ce débat. L'amendement du Gouvernement règle les difficultés que nous avions identifiées. Avis favorable.
M. Jean-Pierre Sueur. - Je soutiens cet amendement, qui répond à des situations réelles. Mon collègue Jean-Noël Cardoux avait d'ailleurs fait la même proposition. Personne n'a compris, dans le Loiret, qu'il faille organiser une élection après le décès d'un maire alors qu'il existait une seule liste.
M. Philippe Bonnecarrère. - Cet amendement a mon approbation. J'en profite pour souligner, puisque le sujet avait fait l'objet de propositions de loi sénatoriales, que M. Jean-Claude Carle avait déposé un texte sur les nuances. Adopté par le Sénat le 17 juin 2014, il n'a pas non plus été inscrit à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale.
M. Bruno Sido. - Si cette proposition de loi ne concernait que les communes de plus de 1 000 habitants, je la voterai sans hésitation.
Dans les petites communes, il peut y avoir quinze noms pour sept places depuis belle lurette. On raye des noms et c'est tout ! Le texte parle de tête de liste... Dans les petites communes, les noms sont présentés selon l'ordre alphabétique. Mon nom a toujours été en dernier, cela ne m'empêche pas d'être élu depuis quarante ans.
Avec ce texte, vous embêterez les communes de moins de 1 000 habitants, les plus nombreuses en France. Il y a une crise des vocations. Dans une commune voisine de la mienne, la préfète convoque une élection tous les trois mois parce qu'il n'y a pas de candidat ! Cela ne concerne pas que la Haute-Marne ! Soit, on peut autoriser, par dérogation, l'élection du maire sans un conseil municipal au complet mais que ferez-vous si le phénomène s'amplifie ?
M. Philippe Bas, président de la commission. - Ce problème est bien réel. Cette proposition de loi porte sur un épiphénomène qui n'est que l'accessoire d'un problème beaucoup plus grave. Pas moins de 30,78 % des communes de plus de 1 000 habitants ne comptaient qu'une liste. C'est dire l'échec de l'extension du mode de scrutin des communes de plus de 3 500 habitants à celles ayant une population comprise entre 1 000 et 3 500 habitants. C'est un véritable recul de la démocratie que de ne pouvoir choisir puisque la liste est bloquée. Aucun dialogue démocratique puisqu'il n'y a qu'une liste. La commission des lois vient de lancer un groupe de suivi des réformes territoriales. Elle se penchera sur la démocratie municipale qui n'est plus quand l'électeur n'a que le choix de prendre la liste ou de la laisser. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)
M. François Bonhomme. - Merci à M. Grand d'avoir soulevé ce problème qui détourne insidieusement les électeurs des élections municipales. Nous aurions gagné beaucoup de temps si le Sénat, avec la proposition de MM. Cardoux, Chaize, Grand, avait été entendu plus tôt. Écoutons les élus et donnons-leur la stabilité dont ils ont besoin.
M. Christophe Priou. - Cet après-midi, la ministre évoquait le retour de l'État dans les territoires grâce aux préfets. Que ceux-ci ne mettent pas la pression sur les élus et qu'ils fassent attention aux étiquettes qu'ils accolent à certains.
L'amendement n°21 rectifié est adopté et devient un article additionnel.
M. le président. - Amendement n°1 rectifié, présenté par MM. Grand, Daubresse, Paccaud, Bonhomme et Le Gleut, Mme Bories et MM. Frassa, Gremillet et Lefèvre.
Après l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le 2° de l'article L. 265 du code électoral, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« ...° L'étiquette politique de la liste lorsqu'elle a été déclarée par le responsable de la liste.
« Les nuances politiques attribuées aux listes par l'administration sont publiées ou communiquées dans des conditions fixées par décret. »
M. Jean-Pierre Grand. - Lors des élections de mars 2014, le ministère de l'intérieur a attribué pour la première fois une nuance politique aux listes de candidats dans les communes entre 1 000 et 3 500 habitants. Cette politisation du scrutin a posé problème notamment dans les petites communes rurales. Depuis la proposition de loi de Jean-Claude Carle, que le Sénat a adoptée en 2014, les choses ont évolué. Un décret de 2014 prévoit qu'au moment du dépôt de candidature, chaque candidat est informé de la grille des nuances politiques et du fait qu'il peut avoir accès au classement qui lui est affecté et en demander la rectification. Il convient d'encadrer la publication et la communication de ces nuances par voie réglementaire. Une tête de liste peut être gaulliste ou communiste et ne pas vouloir se présenter sous cette étiquette, parce que dans les petites communes, ce qui compte c'est que la liste soit du village.
M. Didier Marie, rapporteur. - La question a été largement débattue en commission. Vous l'avez rappelé, les choses ont évolué depuis la proposition de loi de M. Carle. Retrait ou avis défavorable.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Avis défavorable. Il ne faut pas confondre étiquette et nuance. Vous pouvez utiliser la case « divers ».
L'amendement n°1 rectifié est retiré.
ARTICLE 2
L'amendement n°5 rectifié est retiré.
L'article 2 est adopté.
ARTICLE 2 BIS A
L'amendement n°13 rectifié est retiré, de même que l'amendement n°10 rectifié.
L'article 2 bis A est adopté.
ARTICLE 2 BIS
L'amendement n°6 rectifié est retiré.
L'article 2 bis est adopté.
ARTICLE 3
L'amendement n°14 rectifié est retiré, de même que l'amendement n°7 rectifié.
L'article 3 est adopté.
ARTICLE 4
L'amendement n°15 rectifié est retiré, de même que les amendements nos16 rectifié et 8 rectifié.
L'article 4 est adopté.
ARTICLE 4 BIS
L'amendement n°17 rectifié est retiré, de même que l'amendement n°11 rectifié.
L'article 4 bis est adopté.
ARTICLE 5
L'amendement n°18 rectifié est retiré, de même que l'amendement n°9 rectifié.
M. le président. - Amendement n°22 rectifié, présenté par le Gouvernement.
Après l'alinéa 15
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
...° La deuxième phrase de l'article L. 431 est ainsi rédigée :
« Chaque liste doit comprendre au moins autant de noms qu'il y a de sièges à pourvoir, et au plus deux noms de candidats supplémentaires. » ;
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Coordination pour la Nouvelle-Calédonie.
L'amendement n°22 rectifié, accepté par la commission, est adopté.
L'article 5, modifié, est adopté.
La proposition de loi est adoptée.
Prochaine séance demain, jeudi 23 novembre 2017, à 11 heures.
La séance est levée à 23 h 55.
Jean-Luc Blouet
Direction des comptes rendus
Annexes
Ordre du jour du jeudi 23 novembre 2017
Séance publique
À 11 heures
Présidence : M. Thani Mohamed Soilihi, vice-président
Secrétaires : Mme Annie Guillemot - M. Michel Raison
1. Projet de loi de finances pour 2018, adopté par l'Assemblée nationale (n° 107, 2017-2018).
Rapport de M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général, fait au nom de la commission des finances (n° 108, 2017-2018).
Avis fait au nom de la commission des affaires économiques (n° 109, 2017-2018), tomes I à VIII.
Avis fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 110, 2017-2018), tomes I à XI.
Avis fait au nom de la commission des affaires sociales (n° 111, 2017-2018), tomes I à VIII.
Avis fait au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication (n° 112, 2017-2018), tomes I à VI.
Avis fait au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable (n° 113, 2017-2018), tomes I à IX.
Avis fait au nom de la commission des lois (n° 114, 2017-2018), tomes I à XIV.
Discussion générale.
À 15 heures
Présidence : Mme Marie-Noëlle Lienemann, vice-présidente
2. Questions d'actualité au Gouvernement.
À 16 h 15 et, éventuellement, le soir
Présidence : Mme Marie-Noëlle Lienemann, vice-présidente M. David Assouline, vice-président
3. Suite du projet de loi de finances pour 2018, adopté par l'Assemblée nationale (n° 107, 2017-2018).
Suite de la discussion générale.
Examen de l'article liminaire.
Examen de l'article 27 : débat sur la participation de la France au budget de l'Union européenne.
Composition d'une mission d'information
Alstom et la stratégie industrielle du pays (27 membres)
M. Pascal Allizard, Mme Viviane Artigalas, MM. Jacques Bigot, Martial Bourquin, Alain Chatillon, Jean-Pierre Corbisez, René Danesi, Gilbert-Luc Devinaz, Fabien Gay, Alain Joyandet, Mme Fabienne Keller, MM. Guy-Dominique Kennel, Claude Kern, Daniel Laurent, Martin Lévrier, Jean-François Longeot, Franck Menonville, Jean-Pierre Moga, Franck Montaugé, Cyril Pellevat, Mme Marie-Françoise Perol-Dumont, M. Cédric Perrin, Mme Sophie Primas, MM. Didier Rambaud, Michel Savin, Mme Michèle Vullien, M. Dany Wattebled.