Questions d'actualité (Suite)

Cristallerie d'Arques

M. Dominique Watrin .  - Arques, la première entreprise industrielle du Pas-de-Calais avec plus de 5 000 salariés, a failli disparaître en décembre 2015. Reprise par le groupe américain PHP, elle a reçu le soutien des banques qui ont effacé l'essentiel de son passif de dettes. L'espoir est revenu en 2016 où l'on a cru à la fin des départs volontaires. Un plan d'investissement massif a été lancé grâce à un consortium alliant un fonds souverain russe et la Caisse des dépôts et consignations, pour 250 millions d'euros. Emmanuel Macron et François Hollande se sont rendus sur le site. (On ironise à droite)

Nous voici à nouveau dans une mauvaise passe. Le fonds souverain russe rechigne à verser 50 millions d'euros et le propriétaire américain ne veut pas non plus payer. Pourquoi ne pas avoir fait entrer l'État, par la Caisse des dépôts et consignations, au capital ? Quels moyens l'État mettra-t-il en oeuvre pour aider Arques ? Il y a urgence. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)

M. Christophe Sirugue, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé de l'industrie .  - Cette belle entreprise est un fleuron de notre industrie. Monsieur Watrin, vous avez rappelé la mobilisation de l'État. Des efforts ont pu être engagés, des contrats signés, comme avec Ikea. Les résultats du groupe sont toutefois préoccupants. Le Gouvernement est en contact avec ses dirigeants. Des propositions d'accompagnement ont été faites.

Un nouveau directeur général, Tristan Borne, a été nommé. Nous avons exprimé le souhait de le rencontrer pour évoquer la situation financière. Nous restons vigilants. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Cybersécurité

M. Rachel Mazuir .  - Nos concitoyens ont découvert les cyberattaques qui ont frappé les États-Unis pendant son élection présidentielle. Le système électoral de plusieurs États a été attaqué, tout comme le compte mail du directeur de la campagne démocrate ; des fausses informations ont été publiées sur les réseaux sociaux et abondamment reprises. On connaît la réponse du président Obama : des sanctions ont été prises et 35 diplomates russes ont été expulsés, sans d'ailleurs que Moscou réagisse très vigoureusement.

On connaît moins les attaques des hackers contre les entreprises. Le directeur de l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (Anssi) déclare que, si l'on devine l'origine des attaques, celle-ci est difficile à prouver. Aujourd'hui, certains candidats en France se plaignent d'attaques similaires ; je ne suis d'ailleurs pas sûr que le pluriel s'impose... (On feint de s'en offusquer, à droite). Monsieur le ministre, pourriez-vous nous rassurer ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

M. Bruno Le Roux, ministre de l'intérieur .  - Je vous rassure. L'élection présidentielle est sous le contrôle du Conseil constitutionnel. La sécurisation des bureaux de vote sera assurée par le plan Vigipirate. L'Anssi évalue en ce moment même la sécurité électronique. Le risque est faible pour les remontées électorales.

La principale question est celle des fausses nouvelles sur les réseaux sociaux. L'Anssi est à disposition de tous les partis pour faire un audit et une mise à niveau de sécurité.

Tous nos services de renseignement, en cette période chargée pour eux, sont aussi mobilisés : il y va de l'indépendance de notre pays et de sa capacité à décider souverainement de son avenir.

Rassemblement sur le site de Bure

M. Christian Namy .  - La loi Bataille de 1991 a fixé les orientations de recherche à mener sur la gestion des déchets radioactifs issus du retraitement. Le stockage en couche géologique profonde est la solution retenue et l'Andra en a la responsabilité. Depuis seize ans, l'Agence exploite un laboratoire souterrain, implanté à 490 mètres de profondeur en Meuse et Haute-Marne. En 2006, après avis de l'Autorité de sûreté nucléaire et après un débat public, le Parlement a entériné le choix du stockage en couche géologique profonde.

Or, depuis plusieurs mois, l'Andra est confrontée à des manifestants de plus en plus violents. Confirmez-vous le soutien du Gouvernement à ce projet et son engagement à défendre les riverains face à ces violences ? (Applaudissements au centre)

M. Bruno Le Roux, ministre de l'intérieur .  - Un certain nombre d'individus appartenant à la mouvance écologiste radicale contestent avec violence le projet Cigéo et veulent transformer le site en ZAD. Une procédure judiciaire pour occupation illégale a été lancée. Une cinquantaine d'individus ont commis des dégradations sur le bâtiment Ecotèque de Bure. Les forces de sécurité ont mené un travail fin et remarquable. Un gendarme mobile blessé et deux personnes placées en garde à vue : ces violences sont inacceptables. Je les condamne avec fermeté.

Il n'y aura pas de ZAD à Bure car les lois de la République y seront respectées. (Marques d'approbation à droite ; applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Politique extérieure

M. Jean-Pierre Raffarin .  - Ce quinquennat s'achève dans une situation internationale complexe, confuse et dangereuse.

Des progrès ont été accomplis en matière de défense et de sécurité ces dernières années. Mais mesurons la situation : nous sommes au bord de la rupture. Il faudra un milliard d'euros pour payer les soldats de Sentinelle, sans compter le financement du matériel pour les forces de l'armée. Les défis sont nombreux, les impasses aussi.

La France semble impuissante dans un monde troublé. La situation au Levant semble inextricable. Nous sommes partis fleur au fusil contre Daech et Bachar al Assad, et voici que celui-ci est à la table des négociations et pas nous. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Nous avons trop suivi les États-Unis et oublié l'essentiel : les frontières de la Méditerranée et le Maghreb. Que faisons-nous pour aider la Tunisie ? Revenons à nos priorités : l'indépendance de la France, pour la paix. (Vifs applaudissements prolongés à droite)

M. Harlem Désir, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé des affaires européennes .  - Depuis le début du quinquennat, la diplomatie française est engagée et respectée. (On ironise sur les bancs du groupe Les Républicains) La voix indépendante de la France compte dans le monde. Le Mali et la Centrafrique seraient tombés aux mains des terroristes (applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain) sans action de la France. Elle est le premier partenaire des États-Unis contre Daech. (Mêmes mouvements)

Seule une solution négociée pourra ramener la paix en Syrie. Nous renouvelons notre soutien à l'émissaire de l'ONU, Staffan de Mistura. Nous voulons défendre la solution à deux États, Israël et Palestine. Nous avons respecté nos engagements militaires.

La voix de la France, c'est la voix de toute la représentation internationale. Chacun devrait en être fier.

M. Jacques Mézard.  - Très bien !

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Terres agricoles et viticulture

Mme Hermeline Malherbe .  - Les agriculteurs, à commencer par les viticulteurs de mon département, sont inquiets. L'accès au foncier est rendu de plus en plus difficile pour les jeunes agriculteurs. La récente proposition de loi contre l'accaparement des terres donne de nouvelles possibilités aux Safer. L'artificialisation des terres agricoles et l'étalement urbain représentent une menace réelle. Des dispositions existent pourtant, comme les PAEN, mis en oeuvre dans les Pyrénées-Orientales mais globalement sous-utilisés.

Les transferts des droits de plantations, possibles y compris pour les appellations d'origine contrôlée (AOC) et les indications géographiques protégées (IGP), fragilisent les vignerons et déstabilisent les zones viticoles. Certains arrachent des vignes et les replantent ailleurs, bénéficiant des aides tout en pillant les potentiels de production, sans parler du préjudice sanitaire et environnemental.

Que compte faire le Gouvernement contre cette pratique néfaste ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RSDE)

M. Christian Cambon.  - Rien !

M. Jean-Michel Baylet, ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales .  - Veuillez excuser Stéphane Le Foll.

Le Gouvernement agit. La loi d'avenir pour l'agriculture de 2014 a renforcé les outils de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers. Nous avons aussi renforcé le rôle des Safer. Le Sénat a adopté ce volet renforcé à l'unanimité ; malheureusement 70 députés Les Républicains, dont MM. Jacob et Le Maire, ont saisi le Conseil constitutionnel. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et républicain). On ne peut que regretter ce manque de cohérence...

Nulle politique efficace sans accompagnement des élus locaux qui délivrent les permis de construire. Il faut une vision partagée.

La majorité précédente, en accord avec l'Allemagne, avait acté la fin des régulations des plantations de vignes. (Protestations à droite) Nous les avons sauvées, avec la réforme de la PAC de 2013.

Enfin, les professionnels du Cognac seront reçus demain par le ministre de l'agriculture. (On ironise à droite)

Vous le voyez, la maîtrise du foncier et les préoccupations des agriculteurs et des vignerons sont au coeur de l'action du Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Mme Hermeline Malherbe.  - Merci. Je salue l'excellent travail mené avec Xavier Beulin, président de la FNSEA, à cet égard. (MM. Jean-Claude Lenoir et Jean-Pierre Sueur applaudissent)

Grippe aviaire

M. Jean-Louis Carrère .  - Le ministre de l'agriculture était dans les Landes mardi, je le remercie de son travail et de sa disponibilité. Il faut rassurer. Les agriculteurs sont en déshérence. Ils n'ont pas même perçu 30 % des compensations que l'Europe devait leur verser pour l'épisode de 2016 ! Ils ont besoin d'être rassurés, sur les volumes et sur les dates.

Le ministre doit élaborer un pacte avec la filière pour apporter des correctifs à la biosécurité - il y va de sa pérennité. Le Gouvernement peut-il nous éclairer sur les pistes qu'il entend négocier avec le Comité interprofessionnel du foie gras (Cifog) pour sauver cette filière d'excellence ? (Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste et républicain, RDSE et sur quelques bancs du groupe Les Républicains)

M. André Vallini, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - Merci d'avoir salué le travail et l'engagement de M. Le Foll. La crise est très grave. Il faut d'abord stabiliser la contamination. Les services de l'État ont étendu la zone d'abattage préventif dans les Landes et les Pyrénées-Atlantiques. Sur quinze jours, tous les palmipèdes seront abattus, et les mouvements sont interdits jusqu'à nouvel ordre. Il n'y a pas d'autre stratégie possible ; la vaccination n'est en effet pas une solution.

La remise en place des palmipèdes n'interviendra que fin mai, mais celle des gallinacés est déjà possible dans les zones stables.

Les premiers versements des compensations aux éleveurs concernés par les abattages viendront en mars. Les pertes économiques de revenus seront indemnisées au printemps. Le reste dû suite à la crise de 2016 devrait être débloqué fin avril. Pour l'aval, le Gouvernement prolongera son dispositif de soutien en trésorerie.

La filière doit se moderniser pour se pérenniser. Une réflexion est engagée avec les professionnels ; le pacte portera sur l'organisation des flux et les mesures de confinement nécessaires pour éviter le contact avec les oiseaux migrateurs. Le Gouvernement veillera à préserver la diversité des situations et des modèles. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Conséquences du Brexit

M. Olivier Cadic .  - Depuis l'annonce du Brexit, il y a huit mois, les 300 000 ressortissants français et plus largement les trois millions de citoyens européens résidant au Royaume-Uni n'ont reçu aucune assurance sur leur statut, dans un climat anxiogène et sur fond de xénophobie décomplexée, nourrie par les atermoiements de Theresa May. Les Européens ne se sentent plus bienvenus. Exemple, le questionnaire à remplir pour devenir résident permanent est passé de 12 à 85 pages : s'il est jugé incomplet, vous recevrez une invitation à quitter le territoire. Les employeurs ne prennent plus le risque d'offrir un CDI aux ressortissants de l'Union européenne.

Lundi, j'étais aux côtés de milliers de manifestants devant Westminster à l'appel du mouvement TheThreeMillion : ils refusent de servir de monnaie d'échange lors des futures transactions.

Vendredi, le Premier ministre a rencontré Theresa May... Qu'avez-vous fait pour que les droits des Européens établis au Royaume-Uni soient préservés ? (Applaudissements sur les bancs des groupes UDI-UC et Les Républicains ainsi que sur certains bancs du groupe RDSE)

M. Harlem Désir, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé des affaires européennes .  - La Chambre des Communes s'est prononcée. La Chambre des Lords doit maintenant le faire pour que le gouvernement britannique soit autorisé à activer l'article 50 avant la fin mars, comme promis. C'est sur cette base que les négociations s'engageront sur la séparation du Royaume-Uni de l'Union européenne, sur les conséquences financières et les relations futures, économiques et commerciales, voire la participation à des politiques communes.

M. François Grosdidier.  - Répondez à la question !

M. Harlem Désir, secrétaire d'État.  - La première question - au coeur des discussions entre M. Cazeneuve et Mme May - sera celle du statut des 300 000 Français résidant au Royaume-Uni et des 150 000 Britanniques résidant en France. Ils ne peuvent être victimes d'un référendum que nous n'avons pas voulu et dont la responsabilité incombe aux seuls Britanniques. Nous ferons en sorte que les négociations se passent au mieux.

Et puisque c'est la dernière fois que je m'exprime devant vous, je tiens à remercier le président Larcher et le président Bizet pour notre bonne coopération sur les questions européennes. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

M. le président.  - Merci.

M. Olivier Cadic.  - La détresse de nos compatriotes outre-manche n'est pas prise en compte. Soyons proactifs : accordons unilatéralement aux Britanniques installés dans des pays de l'Union le statut de citoyen européen à vie afin que le Royaume-Uni ne puisse plus utiliser nos ressortissants comme monnaie d'échange dans les négociations. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDI-UC et Les Républicains)

Justice

M. Philippe Bas .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Au terme de ce quinquennat, je veux dresser l'état des lieux du service public de la justice. La commission des lois enquête depuis six mois sur la situation de la justice française. Les indicateurs sont éloquents : le délai moyen de jugement pour les TGI est passé de sept à onze mois, celui des conseils des prud'hommes, de treize mois à seize mois et demi. Seule la moitié des condamnations reçoit un début d'exécution dans l'année qui suit la peine. (Mouvements à gauche)

M. Jean-Louis Carrère.  - Vous êtes cynique !

M. Philippe Bas.  - La politique pénale est un fiasco. Vous voulez vider les prisons. Seulement 1 000 décisions de contrainte pénale sont prononcées, sur 130 000 condamnations en 2016. N'est-ce pas un désaveu cinglant ?

La situation de nos prisons est catastrophique, inhumaine. Vous avez suspendu la loi de 2012 qui prévoyait des créations de places. Résultat, nos prisons sont surchargées ! N'est-il pas temps de dresser le constat d'échec de cette politique ? (Applaudissements à droite et au centre)

M. Jean-Louis Carrère.  - Ce n'est pas une question, c'est un meeting !

M. André Vallini, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - Après ce violent réquisitoire, je plaiderai la cause du Gouvernement.

En 2016, le budget de la justice a augmenté de 4,2 %, en fonctionnement et en investissement. La justice est lente, car la société se judiciarise, mais aussi parce que l'on manque de magistrats. Depuis 2012, 2 282 magistrats ont été formés à l'ENM et 5 512 greffiers à Dijon. Le budget de la justice a augmenté de 14 % depuis 2012. La hausse avait été forte sous le gouvernement Jospin et s'était poursuivie, reconnaissons-le, sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy.

Mais la différence, c'est l'indépendance de la justice... (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain ; vives protestations à droite, qui couvrent la voix du ministre) Depuis la loi du 27 juillet 2013, aucune instruction individuelle n'a été adressée au parquet. Ses membres ont tous été nommés après avis conforme du Conseil supérieur de la magistrature - c'est une rupture avec le quinquennat précédent... exception faite de Michel Mercier. Et la révision constitutionnelle a été bloquée par la droite !

M. François Grosdidier.  - Vous avez cessé de construire des prisons !

M. André Vallini, secrétaire d'État.  - La justice est indépendante, souhaitons qu'elle le demeure après les élections... (Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste et républicain et écologiste)

Plan de lutte contre les violences faites aux enfants

Mme Michelle Meunier .  - Il y a un mois, à Saint-Herblain, le petit David est décédé à la suite des sévices infligés par sa mère et son compagnon. À Vitry, Oumar, 15 ans, est mort sous les coups de ceinturon de son beau-père. Le 6 février, à Aire-sur-la-Lys, c'était au tour du jeune Yanis. Depuis le début de l'année, cinq décès d'enfants par mort violente ont été médiatisés ; ces enfants avaient tous subi pendant des années des actes de violence et de maltraitance dans le cadre familial. Violence physique, sexuelle, psychologique, les conséquences sont graves pour les victimes. Le coût social se chiffre en milliards ! Il y a urgence, humaine et sociale, à apporter une réponse à ce problème majeur de santé publique.

Madame la ministre, vous avez su mettre en oeuvre un plan global contre les violences faites aux femmes et dit votre volonté d'en faire autant pour les enfants. Pouvez-vous nous en dire davantage ? (Applaudissements à gauche et sur certains bancs au centre ; M. Jean-Baptiste Lemoyne applaudit également)

Mme Laurence Rossignol, ministre des familles, de l'enfance et des droits des femmes .  - Je profite de cette dernière séance pour remercier les sénatrices et sénateurs avec lesquels j'ai travaillé au cours de ces trois dernières années : Mme Michelle Meunier, MM. Gérard Roche, Georges Labazée, les deux présidentes de la délégation aux droits des femmes, le président Milon et Mme Cayeux.

Je me suis attachée à développer une politique globale de l'enfance mais aussi à mettre en place des mesures spécifiques en faveur de l'enfance en danger. La loi du 14 mars 2016, que vous avez portée avec Mme Dini, permet d'éviter les ruptures de parcours, de repérer et anticiper les difficultés, de décloisonner les services.

Je suis convaincue que la protection de l'enfance n'est pas qu'un sujet compassionnel : c'est un sujet éminemment politique, qui convoque la représentation de la famille, la liberté éducative, le rôle de l'école, les droits de l'enfant, l'éducation à la sexualité...

La protection de l'enfance engage la responsabilité de chacun. Voilà pourquoi nous avons défini, dans la loi Égalité et citoyenneté, l'autorité parentale « sans punition corporelle ». Je regrette que la majorité sénatoriale ait saisi le Conseil constitutionnel sur ce sujet : cela revient à dire à des parents que l'on défend leur droit à frapper leur enfant ! Il est difficile pour certains de faire la différence entre les sévices corporels et les punitions. (Protestations sur les bancs du groupe Les Républicains)

Je présenterai la semaine prochaine le premier plan interministériel de lutte contre les violences faites aux enfants. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain et du groupe écologiste)

Politique de santé

M. Alain Milon .  - Dans le domaine des affaires sociales et de la santé, le bilan du quinquennat n'est guère satisfaisant. Le pouvoir d'achat des Français a baissé de 500 euros depuis 2012. Le nombre de travailleurs pauvres atteint 9 millions. Le nombre de demandeurs d'emploi de catégorie A a crû de 500 000 en cinq ans... (M. Jean-Louis Carrère s'exclame)

Le déficit de la sécurité sociale sera de 4 milliards d'euros en 2017. La seule amélioration est liée à la réforme du régime de retraite réalisée par vos prédécesseurs !

Vos réformes de la santé ont été dogmatiques et bureaucratiques. Le niveau de remboursement a baissé avec les contrats dits responsables ; le malaise à l'hôpital s'accroît ; en décourageant la médecine libérale, vous avez développé les déserts médicaux. La baisse des allocations familiales a été un coup porté aux familles.

Le pays n'a pas pris le virage du XXIe siècle. Il aurait pourtant suffi de s'inspirer de ce qui marche chez nos voisins ! La loi El Khomri a été un simulacre de réforme. Face à la désespérance, n'est-il pas temps de faire résonner vos paroles avec la réalité ? (Applaudissements à droite et au centre)

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion .  - Veuillez excuser Mme Touraine, en déplacement à l'étranger. Monsieur le président Milon, j'ai beaucoup d'estime pour vous, mais je vous pensais capable de plus de modération.

M. Alain Gournac.  - La vérité blesse !

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État.  - Le Gouvernement est fier d'avoir mené une vraie politique de gauche, fier d'avoir rétabli l'équilibre des comptes sociaux - je rappelle que le déficit était de plus de 17 milliards d'euros il y a cinq ans. (Exclamations à droite)

Nous sommes fiers de l'avoir fait tout en octroyant de nouveaux droits : 650 000 personnes ont pu partir à la retraite avant l'âge légal, 500 000 travailleurs ont déjà des points pénibilité. Nous sommes fiers que quatre millions de foyers aient bénéficié de la prime d'activité en 2016, que des dizaines de milliers de femmes bénéficient de la garantie des impayés de pension alimentaire.

Nous sommes fiers d'avoir amélioré l'accès aux soins grâce aux mille maisons de santé, à la généralisation du tiers payant, à la complémentaire santé pour tous les salariés. Nous sommes fiers d'avoir mis la prévention au premier plan, d'avoir mené une politique de redistribution envers les plus précaires...

M. Bruno Sido.  - Bref, ça va mieux !

M. Alain Gournac.  - C'est le paradis !

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État.  - Oui, nous sommes fiers de notre bilan, qui a fait progresser la justice sociale. (Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste et républicain et écologiste)

M. François Grosdidier.  - Si fiers que François Hollande ne se représente pas, que personne ne veut endosser le bilan !

M. Alain Milon.  - La modération doit se retrouver dans tous les propos, madame la ministre.

Le reste à charge dépasse les 3 000 euros pour des millions de patients...

M. Jean-Louis Carrère.  - C'est fini ! (Brouhaha à gauche)

M. Alain Milon.  - Et que dire de la baisse de la natalité ? Moins 20 000 naissances, c'est dangereux. (Applaudissements à droite et au centre)

Politique économique

M. Jean-Claude Lenoir .  - (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) L'heure du bilan a sonné. Pour apprécier l'efficacité et la pertinence de la politique menée depuis 2012, il faut regarder les résultats obtenus par nos partenaires de l'Union européenne. Pouvez-vous citer un seul chiffre qui montre que la France aurait fait mieux que ses voisins ? (Applaudissements à droite et au centre)

M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget et des comptes publics .  - Chacun ses points de comparaisons. La croissance a augmenté de 4 points pendant cette législature, quatre fois plus que pendant le quinquennat précédent.

Le commerce extérieur s'est amélioré de 25 milliards d'euros, alors qu'il s'était dégradé de 32 milliards pendant le quinquennat précédent.

Le taux de marge des entreprises s'est redressé de 2 points, après avoir baissé de 3 points pendant le quinquennat précédent.

Entre 2012 et 2017, 150 000 emplois ont été créés ; 280 000 avaient disparu sous la présidence précédente. Le nombre de demandeurs d'emploi a crû de 500 000 - c'est trop ; il avait crû de 800 000 sous la présidence précédente.

La dette a augmenté de 6 points - contre 25 points au cours du précédent quinquennat.

Quant au déficit public, il s'est amélioré de 2,3 points alors que nous avions hérité d'un pays en faillite, comme vous le disiez vous-mêmes à l'époque... Le bilan est clair, précis, vérifiable.

M. Ladislas Poniatowski.  - Vous plaisantez !

M. Christian Eckert, secrétaire d'État.  - À titre exceptionnel, je me ferai le porte-parole du Gouvernement pour remercier le Sénat pour la qualité et la courtoisie qui a caractérisé nos débats. Je vous souhaite à tous de traverser cette période électorale dans la sérénité - ce qui n'empêche pas les convictions ! (Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste et républicain et écologiste)

M. Jean-Claude Lenoir.  - Vous n'avez pas répondu à ma question, et faites l'impasse sur la grave crise de 2008-2010, qui a frappé tous les pays. Je vais vous y aider : 600 000 chômeurs de catégorie A supplémentaires, 1,2 million toutes catégories confondues ; un taux de chômage des jeunes de 25 %, contre 4,7 % en Allemagne.

La croissance française est à la traîne : 1 % contre 1,9 % en moyenne dans l'Union européenne. Attractivité des territoires ? Commerce extérieur ? La part de nos ventes à l'intérieur de la zone euro est passée de 17,9 % à 14 %.

La dette publique ? Elle représente 97,6 % du PIB national contre 83 % en Europe.

M. Jean-Louis Carrère.  - L'héritage...

M. Jean-Claude Lenoir.  - Le déficit, enfin, est de 3,3 % en 2016 - personne ne croît aux prévisions pour 2017. Il est de 1,9 % en Europe. Au total, c'est une succession d'échecs ! Nous sommes nombreux à combattre votre action ; il est temps de réunir toutes celles et ceux qui veulent redresser la France ! (Vifs applaudissements à droite et au centre)

La séance est suspendue à 16 heures.

présidence de Mme Isabelle Debré, vice-présidente

La séance reprend à 16 h 20.