Ratification d'ordonnances relatives à la Corse (Nouvelle lecture)
Mme la présidente. - L'ordre du jour appelle la nouvelle lecture du projet de loi ratifiant les ordonnances n°2016-1561 du 21 novembre 2016 complétant et précisant les règles budgétaires, financières, fiscales et comptables applicables à la collectivité de Corse, n°2016-1562 du 21 novembre 2016 portant diverses mesures institutionnelles relatives à la collectivité de Corse et n°2016-1563 du 21 novembre 2016 portant diverses mesures électorales applicables en Corse.
Discussion générale
M. Jean-Michel Baylet, ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales . - Le 26 janvier dernier, vous avez rejeté ce projet de loi de ratification lors d'une séance sur laquelle je préfère ne pas revenir.
M. Jean Desessard. - Dommage !
M. Jean-Michel Baylet, ministre. - L'intérêt des Corses n'a pas été, me semble-t-il, au coeur des préoccupations... Après que l'Assemblée nationale eût pour sa part adopté le texte le 9 février, la commission mixte paritaire, réunie lundi dernier, n'a pu que constater l'ampleur des désaccords. Hier, les députés ont confirmé leur vote en nouvelle lecture. J'ose encore espérer, même si l'espoir s'amenuise (Mme Isabelle Debré sourit), vous convaincre d'adopter à votre tour ce beau projet de loi utile et nécessaire pour la Corse.
Les ordonnances ne font que mettre en oeuvre la création de la collectivité unique de Corse prévue par l'article 30 de la loi NOTRe, et dont l'Assemblée de Corse avait approuvé le principe à une large majorité, toutes tendances politiques confondues, dès le 12 décembre 2014.
M. Philippe Kaltenbach. - À 80 % !
M. Jean-Michel Baylet, ministre. - Elles ont été préparées avec l'ensemble des élus concernés et intègrent la quasi-totalité des modifications souhaitées par les députés et sénateurs corses. Les précisions rédactionnelles, adoptées par votre commission des lois en première lecture, ont été reprises par l'Assemblée nationale. L'institution d'une chambre des territoires située à Bastia est un gage de coordination de l'action publique et de solidarité financière entre la collectivité de Corse, les intercommunalités et les communes. Les garanties au sujet de l'emploi et du statut du personnel ont également été renforcées, et je rends hommage aux présidents des trois collectivités d'avoir rassuré les agents par une déclaration commune. Rassurez-les donc tout à fait en votant ce projet de loi...
Je ne comprends pas comment on peut être favorable au principe de la collectivité unique et refuser ces ordonnances. On me dit que la collectivité créée n'est pas celle que l'on souhaitait. L'argument ne vaut pas : l'article 30 de la loi NOTRe entre déjà dans le détail, et vous l'avez voté ! Ces ordonnances en constituent seulement la déclinaison. Si vous rejetez aujourd'hui ce que vous approuviez hier, pourquoi ne pas le dire clairement ? Il est vrai que les élus corses auront du mal à expliquer à leurs électeurs qu'ils ont sacrifié l'intérêt de leur île à des intérêts électoraux...
Le Gouvernement, pour sa part, n'entrera pas dans le débat politicien. Il est au travail jusqu'au dernier jour et prend ses responsabilités. Il est indispensable de ratifier ces ordonnances pour que la collectivité unique puisse voir le jour, renforçant l'efficacité de la gouvernance de l'île et la qualité des services publics à moindre coût. Je vous demande donc de voter ce projet de loi, afin que les élus corses puissent assurer l'avenir de l'île et de son peuple. (Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste et républicain, écologiste et RDSE)
M. Hugues Portelli, rapporteur de la commission des lois . - En créant la collectivité unique de Corse, la loi NOTRe a renoué avec la tradition : pendant 165 ans, la Corse n'a compté qu'une seule collectivité territoriale, le département. Dès 1811, en effet, avaient été réunis les deux départements créés en 1790. Puis, en 1970, vit le jour la région, ce qui conduisit quelques années plus tard à recréer deux départements.
Cette réforme a un air de famille avec celle que j'avais contribué à préparer en 2003, mais qui fut repoussée par un référendum consultatif à quelques milliers de voix près et rangée dans les tiroirs.
Il nous est aujourd'hui proposé de clore un processus entamé en 1981 avec le transfert massif de compétences départementales à la région, poursuivi lors de la création de la collectivité territoriale de Corse puis de la loi Jospin de 2002, si bien qu'il ne reste plus grand-chose des compétences des départements corses.
En première lecture, la commission des lois avait adopté le texte en n'y apportant que quelques modifications de pure forme, jointes à un amendement de la commission des finances. Par un miracle du scrutin public sénatorial, il fut ensuite rejeté en séance publique. J'ai toujours été contre le scrutin public, et ce n'est pas parce qu'il s'agit de la Corse qu'il faut laisser décider les absents !
Après l'adoption du projet de loi par les députés, la CMP est rapidement parvenue à un constat d'échec. Votre commission des lois réunie ce matin a cependant approuvé le texte à l'unanimité, et j'espère qu'elle sera cette fois-ci suivie par le Sénat. (Applaudissements sur la plupart des bancs)
M. Jean Desessard . - Comme l'ensemble des parlementaires, je constate que le Gouvernement a parfaitement l'habilitation qui lui était donnée par l'article 30 de la loi NOTRe, quant à l'objet et aux délais des ordonnances. Garantir la neutralité budgétaire, comptable et financière de la réforme, maintenir les conditions d'emploi et le statut du personnel, assurer la continuité de l'action publique après le 1er janvier 2018, tels étaient les objectifs poursuivis.
Ces ordonnances parachèvent le processus de Matignon, engagé il y a vingt ans par le Gouvernement Jospin. La loi du 22 janvier 2002 était, en effet, restée au milieu du gué, et la création d'une collectivité unique fut rejetée en 2003 par un référendum consultatif à l'issue très serrée. Sept ans plus tard, l'assemblée de Corse relançait le projet, avant d'adopter le 12 décembre 2014 une délibération en ce sens. Elle a trouvé sa concrétisation dans la loi NOTRe de 2015, puis dans les ordonnances dont nous débattons, lesquelles ont fait l'objet de mois de concertation et ont été avalisées par une délibération de l'Assemblée de Corse du 7 septembre 2016.
C'est donc un travail de longue haleine, mené à l'initiative des élus de l'île et en association avec le Parlement, qu'il nous est demandé d'approuver. Le groupe écologiste votera pour. (Applaudissements sur les bancs des groupes écologiste, RDSE et socialiste et républicain ; Mme Isabelle Debré applaudit également)
M. Philippe Kaltenbach . - L'échec de la CMP était prévisible, les positions de l'Assemblée nationale et du Sénat étant pour le moins antagonistes. J'espère que les opposants du 26 janvier auront changé d'avis...
Ce projet de loi achève un processus de simplification des structures institutionnelles corses tout en tenant compte des spécificités de l'île. Le texte est le fruit d'une concertation transpartisane : 80 % des élus corses ont approuvé la création d'une collectivité unique, sans juger nécessaire une consultation de la population. Voilà pour répondre à ceux qui réclament la tenue d'un référendum.
Il y a plus de dix ans que l'on parle de cette collectivité unique. Statuts Defferre en 1982, Joxe en 1991, Vaillant en 2002, il est temps d'aboutir, pour adapter les structures institutionnelles aux spécificités de la Corse : l'insularité, mais aussi une forte identité culturelle. Cette réforme s'inscrit parfaitement dans le mouvement de décentralisation et de rationalisation administrative, qui vise à rapprocher la décision de la population, à réduire les coûts et à promouvoir une gouvernance plus solidaire, qui réponde aux attentes des habitants et résorbe les déséquilibres territoriaux.
Alors que nous étions d'accord en 2015, la majorité sénatoriale a changé de pied et voté contre ce projet de loi en première lecture.
M. Jean-Pierre Sueur. - Incompréhensible !
M. Jean Desessard. - S'agissait-il d'hologrammes ? (Sourires)
M. Philippe Kaltenbach. - « Le Sénat ne peut qu'être favorable à la fusion de deux départements avec une région pour en faire une collectivité unique », disait le rapporteur Jean-Jacques Hyest en 2015... Il est évident que la Corse est sur-administrée avec plus de 300 communes, deux départements, une région, sans compter les multiples syndicats et agences.
Les évolutions statutaires de la Corse ont aussi aidé à réintégrer dans le débat démocratique des mouvements indépendantistes et autonomistes qui avaient versé dans la violence politique, on ne saurait l'oublier.
Le groupe CRC reste fidèle à sa position jacobine, c'est compréhensible. Cependant, qu'il s'agisse de l'outre-mer ou de la Corse, on peut être attaché à la République tout en acceptant de voir les institutions évoluer pour s'adapter aux réalités locales.
Il est dommage d'opposer à ce projet mûri pendant plus de dix ans des arguments politiciens ou des calculs boutiquiers. C'est mal servir l'intérêt de la Corse et des Corses.
Soyons raisonnables. Dégageons la voie pour que cette collectivité unique devienne réalité. L'Assemblée nationale bien sûr, qui aura le dernier mot, s'en chargera. Le Sénat s'honorerait cependant à tenir les engagements pris dans la loi NOTRe et à achever une simplification administrative qui pourrait nous inspirer en Île-de-France.
Le groupe socialiste et républicain votera en faveur de ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste et républicain, écologiste et RDSE)
M. Christian Favier . - Le 26 janvier, j'ai eu l'occasion d'expliquer notre opposition à ce projet. Loin des clichés, la Corse n'est pas un territoire favorisé. Le revenu par habitant est le plus faible du pays ; un Corse sur cinq vit sous le seuil de pauvreté, et les inégalités progressent. Alors que l'on accorde 194 millions d'euros de réfaction de TVA aux leaders de la distribution, les produits alimentaires sont 9 % plus chers que sur le continent. Un sous-investissement chronique conduit à un quasi-monopole dans le secteur du tourisme, où l'emploi se précarise et où les saisonniers sont payés 15 % de moins que dans le reste du pays. L'État a liquidé la SNCM, fleuron de l'économie corse. Le sous-investissement touche aussi le secteur énergétique, puisque 87 % de la consommation d'énergie en Corse est issue d'approvisionnements extérieurs et qu'un tiers de l'électricité est importée d'Italie. Sous-investissement numérique enfin : seuls 23 % des foyers ont accès au très haut débit contre 50 % dans l'Hexagone.
En trente ans, on ne compte plus les réformes institutionnelles, sans que jamais l'on s'intéresse au développement économique et à la situation sociale.
La disparition des départements nous fait craindre le pire : qui assurera la solidarité sur le territoire, qui s'occupera des personnes âgées, handicapées, des enfants en danger ?
La concentration des pouvoirs et le recul du contrôle citoyen favoriseront l'affairisme, déjà bien présents. Nous n'acceptons pas ce glissement vers l'Europe des régions au détriment des nations, cette mise en concurrence des territoires qui appauvrira les Corses, voués à être dévorés comme les Grecs par les directives bruxelloises. Seuls les oligarques peuvent se réjouir.
Est-il d'ailleurs admissible de procéder à une telle réforme dans le dos de la population, en faisant l'impasse sur le référendum ? Quelle défiance à l'égard des citoyens corses ! Ce n'est pas en catimini, dans un hémicycle presque désert à quelques jours de la fin de la session, que nous pouvons prendre une telle décision. Le groupe communiste républicain et citoyen, lui, n'a pas peur de la démocratie, et il confirmera son vote négatif.
M. Joseph Castelli . - Ces ordonnances doivent être ratifiées avant la fin de la session pour que la collectivité unique soit installée dans les meilleures conditions et dans les délais impartis. Plus de 80 % des élus corses, gauche, droite et nationalistes, l'avaient appelée de leurs voeux dès 2014.
Très concrètement, il reste peu de temps pour qu'elle soit opérationnelle au 1er janvier 2018.
La déspécialisation du reliquat de l'enveloppe de dotation de continuité territoriale normalement dévolu aux ports, aux aéroports et aux routes dégagera des marges de manoeuvre pour lutter contre la désertification des territoires de l'intérieur et de montagne en Corse.
Rien n'est figé, il sera toujours possible de voter bientôt une loi spécifique à la Corse, qui précise par exemple l'articulation entre les intercommunalités et la collectivité unique. Mais la collectivité unique est en passe de devenir réalité, et ces ordonnances sont nécessaires à sa mise en oeuvre. Le groupe RDSE votera à l'unanimité ce projet de loi, qui aidera la Corse à relever les défis qui sont devant elle. (Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste et républicain et écologiste, ainsi que sur le banc de la commission)
M. Jean-Jacques Panunzi . - (Mme Isabelle Debré applaudit) Vous connaissez notre position depuis le 26 janvier. Ces ordonnances ne nous conviennent pas. En disant cela, je ne remets pas en cause le principe d'une collectivité unique. Mais ces ordonnances imposent un centralisme qui met à mal les équilibres locaux et ne règlent pas les problèmes institutionnels, administratifs et financiers qui se présentent à la Corse.
Je regrette que l'idée d'une loi spécifique, que nous avions proposée avec d'autres parlementaires, n'ait pas été préférée à ces ordonnances contraintes et étriquées.
Monsieur le ministre, vous êtes un homme de terrain, un homme de bon sens. La chambre des territoires, vous le savez, n'aura ni pouvoir, ni représentativité.
En novembre, monsieur le ministre, vous nous informiez de la désaffectation partielle du reliquat de l'enveloppe de la dotation de continuité territoriale, qui pourrait financer - outre les ports et aéroports - des infrastructures routières et ferroviaires. Pourquoi donc l'étendre aujourd'hui aux politiques en faveur des territoires de montagne et de l'intérieur, alors même qu'une étude indique que la remise à niveau de nos ports et aéroports coûterait plus de 200 millions d'euros ? On ne pourra pas tout faire. Ce reliquat est d'ailleurs très volatile et lié aux cours du pétrole.
Je ne suis pas aussi optimiste que nos collègues de l'Assemblée nationale, qui parlent d'une avancée historique. Je crains plutôt un recul. Cette réforme ne correspond pas à ce que souhaitent les Corses. Ils sont déterminés, vous le savez, et quelle que soit la majorité présidentielle qui sortira des élections, vous me reverrez pour parler d'une grande loi spécifique à la Corse. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)
La discussion générale est close.
M. Jean-Michel Baylet, ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales . - Sans emphase, c'est un événement historique : fusionner trois collectivités, cela ne s'est jamais fait ! Merci à M. le rapporteur pour son implication sur ce sujet qu'il connaît ô combien.
Merci au groupe écologiste de son soutien, qui ne m'étonne pas, de la part d'une formation politique qui défend le renforcement des pouvoirs locaux, la décentralisation et la rationalisation des structures.
Merci aussi au groupe socialiste et républicain et à M. Kaltenbach d'avoir rappelé que la crédibilité du législateur, dont j'ai longtemps exercé les fonctions, lui impose d'être cohérent.
Monsieur Favier, vos convictions sont fortes ; mais cette position n'est pas celle que défendait le groupe CRC en 2015. Vous voulez un référendum ? Il a eu lieu il y a déjà longtemps. Je suis, moi, un ardent partisan de la démocratie représentative, et je sais que les électeurs ne répondent jamais à la question posée. L'arme est à manier avec prudence même si la démocratie participative est à la mode.
M. Castelli l'a dit : la décision de créer une collectivité unique a été prise de manière transparente, non pour faire plaisir aux nationalistes mais à l'initiative de la majorité précédente à l'Assemblée de Corse. Dans une île de 300 000 habitants, il faut un pouvoir régional fort.
Monsieur Panunzi, je sais que vous ne remettez pas en cause le principe de la collectivité unique. Mais il est trop facile, dans l'opposition, de dire : « d'accord, mais pas comme ça ». Vient un moment où il faut trancher !
Je ne suis pas hostile à une loi spécifique à la Corse. Seulement, comment aurais-je pu en préparer une en quelques mois, alors même que certaines évolutions proposées par les élus corses exigeraient une révision constitutionnelle ? Chaque chose en son temps ! La politique est l'art du possible...
Peut-être fallait-il une chambre des territoires dotée de pouvoirs plus larges. Je rappelle cependant qu'elle n'existait pas dans la première version du texte. J'ai confiance dans les élus corses : ils se saisiront du pouvoir qu'on leur donne et de la meilleure façon qui soit.
Je m'étais engagé à ouvrir l'affectation de la dotation de continuité territoriale, et j'ai l'habitude de tenir mes promesses. Lors des premières discussions, la Corse n'avait pas encore été reconnue comme « île montagne », et il n'était pas acquis que l'excédent de dotation de continuité territoriale resterait à la Corse. J'ai plaidé pour que ce soit le cas, et j'ai eu gain de cause. Sachant les difficultés des massifs corses, il m'a paru légitime que ce reliquat puisse être employé à financer des politiques en faveur des territoires de l'intérieur et de montagne. Je n'avais aucune raison de m'opposer à cette demande des élus corses. (Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste et républicain, RDSE et écologiste)
L'article premier est adopté, ainsi que les articles 2, 3 et 4.
Interventions sur l'ensemble
Mme la présidente. - Je suis saisie, par le groupe Les Républicains, d'une demande de scrutin public sur l'ensemble du texte.
M. Jean-Pierre Sueur . - Un scrutin public ? Mais l'assemblée a voté chacun des articles du projet de loi.
Mme la présidente. - Je le sais. Pour autant, le Sénat doit se prononcer sur l'ensemble.
M. Philippe Kaltenbach . - Adopter les quatre articles d'une loi pour revenir ensuite sur son vote en rejetant le projet de loi, ce serait parfaitement incohérent.
M. Jean-Jacques Panunzi. - Nous ne revenons pas sur nos votes !
M. Philippe Kaltenbach. - J'invite Les Républicains, qui est un groupe sérieux, à faire preuve de cohérence politique.
Mme Catherine Troendlé, vice-présidente de la commission des lois . - Vous savez pertinemment qu'un scrutin public nous permet de nous démarquer les uns des autres. Ce n'est pas une question de cohérence.
M. Hugues Portelli, rapporteur . - À titre personnel, et alors que je quitte le Sénat en septembre prochain, je veux lancer un message dont j'espère qu'il parviendra au Conseil constitutionnel.
Le scrutin public, tel qu'il existe au Sénat, est contraire à la Constitution : on fait voter des personnes qui ne sont pas présentes. Ses modalités ne figurent pas dans le Règlement du Sénat pour des raisons purement tactiques : on ne peut pas censurer ce qui n'est pas écrit.
Le Conseil constitutionnel doit être saisi de cette anomalie. (Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste et républicain et RDSE)
Mme Éliane Assassi. - Tout le monde en use...
M. Jean Desessard . - J'approuve les propos du rapporteur. Il est écrit clairement dans la Constitution qu'un parlementaire ne peut être porteur que d'un mandat en plus du sien.
M. Hugues Portelli, rapporteur. - Article 27 !
M. Jean Desessard. - Les absents ne devraient pas pouvoir voter. S'ils avaient assisté à nos discussions, peut-être auraient-ils modifié leur position : c'est tout l'intérêt du débat parlementaire. (Exclamations à droite) Ce n'est pas la première fois que j'interviens sur ce point, je l'ai fait dès mon arrivée au Sénat en 2004. L'Assemblée nationale, elle, a fait du chemin ; depuis, ils sont plus nombreux en séance publique. (M. François Pillet lève les bras en signe de dénégation) Soit, les sénateurs, plus vaillants, sont encore une dizaine dans l'hémicycle à 4 heures du matin quand les députés ne sont plus que neuf. En tout cas, eux respectent la Constitution ! (Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste et républicain et RDSE)
M. Philippe Dominati. - Revenons à notre sujet...
M. Jean-Michel Baylet, ministre. - En effet ! La Corse donne lieu à des lois spécifiques et des débats d'une grande originalité... Le 26 janvier, le groupe centriste a annoncé qu'il était favorable au texte par la voix de son orateur avant de disparaître, comme par enchantement, au moment du vote. Aujourd'hui, il est absent.
M. Jean-Pierre Sueur. - Bizarre !
M. Jean-Michel Baylet, ministre. - Un groupe politique qui disparaît en un mois, c'est du jamais vu !
Quant à vous, messieurs les sénateurs du groupe Les Républicains, vous avez voté l'article premier ; vous avez voté l'article 2...
M. Jean-Jacques Panunzi. - Je n'ai pas voté l'article 2 !
M. Jean-Michel Baylet, ministre. - Certes, MM. Panunzi et Dominati n'ont voté ni l'article 3 ni l'article 4. Reste que le Sénat a adopté à main levée les quatre articles constituant le texte. Dans ces conditions, comment voulez-vous que les Français s'y retrouvent s'il vote contre l'ensemble ? Encore un petit effort, votez pour ; vous ferez oeuvre utile pour le débat parlementaire et pour la Corse. (Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste et républicain, écologiste et RDSE)
Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n°102 :
Nombre de votants | 306 |
Nombre de suffrages exprimés | 305 |
Pour l'adoption | 145 |
Contre | 160 |
Le Sénat n'a pas adopté.
M. Jean-Pierre Sueur. - Ce n'est pas glorieux...
M. Jean-Michel Baylet, ministre. - Merci, mesdames et messieurs les sénateurs, pour ce vote serré qui reflète une grande confusion au sein du groupe Les Républicains. Moi qui suis entré au Parlement en 1978, je n'ai jamais vu une assemblée rejeter l'ensemble d'un texte dont elle a approuvé chacune des parties. C'est la première fois, et il a fallu que ce soit pour la Corse....
Mardi, l'Assemblée nationale votera naturellement ce texte. Le Sénat ne sort pas grandi d'une telle affaire, c'est ainsi. Je vous remercie pour ce débat respectueux qui a mis en lumière la nécessité d'oeuvrer pour la Corse. (Applaudissements sur les bancs des groupes RDSE et socialiste et républicain)
Prochaine séance, mardi 21 février 2017, à 9 h 30.
La séance est levée à 16 h 5.
Marc Lebiez
Direction des comptes rendus