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Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.


Table des matières



CMP (Candidatures)

Organisme extraparlementaire (Candidature)

Engagement de la procédure accélérée

Dépôt de documents

Question prioritaire de constitutionnalité

Questions orales

Politique en faveur des abeilles

M. Michel Raison

M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Défense de l'appellation « calisson d'Aix-en-Provence »

Mme Mireille Jouve

M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Allocation de rentrée scolaire des mineurs placés

Mme Stéphanie Riocreux

M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Réglementation de l'activité des thoniers senneurs français

M. Michel Canevet

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargé des transports, de la mer et de la pêche

Enclavement ferroviaire de l'ancienne région Limousin

M. Daniel Chasseing

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargé des transports, de la mer et de la pêche

Liaison ferroviaire Creil-Roissy-Picardie

M. Jean-Pierre Bosino

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargé des transports, de la mer et de la pêche

Contournement autoroutier de Bordeaux

M. Philippe Madrelle

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargé des transports, de la mer et de la pêche

Pêche au large de la baie de Seine

Mme Nelly Tocqueville

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargé des transports, de la mer et de la pêche

Classement du bois de rose

Mme Sophie Primas

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargé des transports, de la mer et de la pêche

Sécurité dans les centrales nucléaires

M. Didier Marie

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargé des transports, de la mer et de la pêche

Fermeture de la plate-forme industrielle du courrier de Nice en 2018

Mme Dominique Estrosi Sassone

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargé des transports, de la mer et de la pêche

Obstacle à la mise en place d'un accueil échelonné en petites sections de maternelles

Mme Mireille Jouve, en remplacement de M. Robert Navarro 

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargé des transports, de la mer et de la pêche

Ouverture d'une classe préparatoire à Dreux

Mme Chantal Deseyne

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion

Réforme de l'éducation prioritaire

Mme Brigitte Gonthier-Maurin

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion

Centre hospitalier de La Rochefoucauld

M. Michel Boutant

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion

Accès aux soins bucco-dentaires

Mme Isabelle Debré

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion

Émanations dangereuses dans les cabines d'avion

Mme Colette Giudicelli

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion

Difficultés financières des associations de services à la personne

M. Dominique Bailly

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion

Déserts médicaux

M. Hervé Maurey

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion

Maladie de Lyme

M. Bruno Sido

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion

Anonymat des travailleurs sociaux

M. Jean-Jacques Lasserre

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion

Revente des caveaux

M. Georges Labazée

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État auprès de la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, chargée de la formation professionnelle et de l'apprentissage

Sécurité dans les transports

M. Alain Fouché

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État auprès de la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, chargée de la formation professionnelle et de l'apprentissage

Safer

M. Henri Cabanel

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État auprès de la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, chargée de la formation professionnelle et de l'apprentissage

Zones de revitalisation rurale

M. Franck Montaugé

M. Jean-Michel Baylet, ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales

Dotation globale de fonctionnement

M. Cyril Pellevat

M. Jean-Michel Baylet, ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales

CMP (Nominations)

Organisme extraparlementaire (Nomination)

Éloge funèbre de Jean-Claude Frécon

M. Gérard Larcher, président du Sénat

M. André Vallini, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement

Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe (Candidature)

Commission (Candidature)

Électricité, gaz et énergies renouvelables (Procédure accélérée)

Discussion générale

Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargée de la biodiversité

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur de la commission des affaires économiques

M. Roland Courteau

M. Jean-Pierre Bosino

M. Jean-Claude Requier

Mme Anne-Catherine Loisier

M. Hervé Poher

M. Franck Montaugé

M. Jean-Claude Lenoir, président de la commission des affaires économiques

Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État

Discussion des articles

ARTICLE PREMIER BIS AC

ARTICLE PREMIER BIS AD

ARTICLE PREMIER BIS A

ARTICLE PREMIER BIS

ARTICLE PREMIER TER

ARTICLE 2

M. Roland Courteau

ARTICLE 3

M. Jean-Claude Lenoir, président de la commission

Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État

ARTICLES ADDITIONNELS

ARTICLE 4

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur

M. Roland Courteau

ARTICLE 4 TER (Supprimé)

ARTICLE 4 QUATER

ARTICLE ADDITIONNEL

Interventions sur l'ensemble

M. Jean-Claude Requier

M. Jean-Pierre Bosino

M. Roland Courteau

Mme Marie-Noëlle Lienemann

Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe (Nomination)

Commission (Nomination)

Échec en CMP

Sécurité publique (Procédure accélérée)

Discussion générale

M. Bruno Le Roux, ministre de l'intérieur

M. Jean-Jacques Urvoas, garde des sceaux, ministre de la justice

M. François Grosdidier, rapporteur de la commission des lois

M. Philippe Paul, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères et de la défense

M. David Rachline

Mme Esther Benbassa

M. Jean-Noël Guérini

M. Michel Mercier

Mme Éliane Assassi

M. François-Noël Buffet

M. Jacques Bigot

M. Bruno Le Roux, ministre

Questions prioritaires de constitutionnalité

Sécurité publique (Procédure accélérée - Suite)

Discussion des articles

ARTICLE PREMIER

ARTICLE 2

ARTICLES ADDITIONNELS

ARTICLE 6

ARTICLES ADDITIONNELS

ARTICLE 7

ARTICLES ADDITIONNELS

ARTICLE 9

ARTICLE ADDITIONNEL

ARTICLE 10

M. Jean-Baptiste Lemoyne

ARTICLES ADDITIONNELS

Ordre du jour du jeudi 26 janvier 2017

Analyse des scrutins publics




SÉANCE

du mardi 24 janvier 2017

47e séance de la session ordinaire 2016-2017

présidence de M. Jean-Claude Gaudin, vice-président

Secrétaires : Mme Frédérique Espagnac, M. Bruno Gilles.

La séance est ouverte à 9 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu intégral publié sur le site internet du Sénat, est adopté sous les réserves d'usage.

CMP (Candidatures)

M. le président.  - M. le Président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la demande de réunion d'une commission mixte paritaire chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de programmation relatif à l'égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique.

J'informe le Sénat que la commission des lois a procédé à la désignation des candidats qu'elle présente à cette commission mixte paritaire.

Cette liste a été publiée conformément à l'article 12, alinéa 4, du Règlement et sera ratifiée si aucune opposition n'est faite dans le délai d'une heure.

Organisme extraparlementaire (Candidature)

M. le président.  - Je rappelle au Sénat que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation d'un sénateur appelé à siéger au sein de la Commission nationale d'évaluation des politiques de l'État outre-mer.

La commission de l'aménagement du territoire et du développement durable a proposé la candidature de Mme Gélita Hoarau.

Cette candidature a été publiée et sera ratifiée, conformément à l'article 9 du Règlement, s'il n'y a pas d'opposition à l'expiration du délai d'une heure.

Engagement de la procédure accélérée

M. le président.  - En application de l'article 45, alinéa 2, de la Constitution, le Gouvernement a engagé la procédure accélérée pour l'examen du projet de loi ratifiant l'ordonnance du 13 octobre 2016 modifiant la partie législative du code des juridictions financières, déposé sur le Bureau de l'Assemblée nationale le 4 janvier 2017.

Dépôt de documents

M. le président.  - M. le Président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre deux projets de conventions entre l'État et l'Agence nationale de la recherche relatives aux actions « écoles universitaires de recherche » et « nouveaux cursus à l'université » du programme d'investissements d'avenir.

Question prioritaire de constitutionnalité

M. le président.  - Le Conseil constitutionnel a informé le Sénat, le 20 janvier 2017, qu'en application de l'article 61-1 de la Constitution, le Conseil d'État lui a adressé une décision de renvoi d'une question prioritaire de constitutionnalité portant sur l'article 2 de la loi du 19 décembre 2016 (État d'urgence - Prolongation des assignations à résidence au-delà d'un an).

Le texte de cette décision de renvoi est disponible à la direction de la séance.

Questions orales

M. le président.  - L'ordre du jour appelle vingt-six questions orales.

Politique en faveur des abeilles

M. Michel Raison .  - Nous connaissons le rôle des pollinisateurs, tant pour la biodiversité que l'économie - ils rapportent entre 2 et 5 milliards d'euros.

Le dossier est complexe, les causes de surmortalité sont multiples. La nourriture des abeilles, leurs maladies en tout genre, des abeilles plus fragiles car plus sélectionnées, les cocktails de traitement, le retour à la ruche... Toutes ces questions méritent qu'on se mobilise.

L'INRA, l'Anses, les professionnels travaillent. Avançons en constituant un réseau de surveillance de ruches témoins pour améliorer la prophylaxie. Si nous avions fait pour les abeilles ce que nous avons fait pour les bovins, les ovins et d'autres espèces, nous n'en serions pas là. Pourquoi ne pas en faire une grande cause nationale et prévoir les financements qui vont avec ?

M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement .  - Je partage votre objectif. À mon arrivée au ministère de l'agriculture, j'ai pris une décision sur un néonicotinoïde utilisé dans la culture colza dont l'Anses avait démontré très clairement les effets négatifs sur la mortalité des abeilles. J'ai ensuite obtenu un moratoire européen sur trois néonicotinoïdes, qui a justifié l'interdiction de tous les néonicotinoïdes dans la loi sur la biodiversité.

Deux enjeux se dégagent : la protection de la biodiversité des pollinisateurs et des abeilles d'une part, celle de la production de miel d'autre part.

Le 8 février, j'engagerai un nouveau plan après celui de 40 millions d'euros consacré à l'évaluation de la situation génétique et sanitaire du cheptel d'abeilles.

Quelque 7,5 millions d'euros par an sont prévus pour les abeilles entre 2016 et 2019.

Le verdissement de la PAC appuiera notre stratégie de hausse du cheptel mais aussi de la production de miels aux origines mieux définies - la production de miel a chuté au printemps dernier : 9 000 tonnes en 2016 contre 16 000 à 17 000 tonnes auparavant. La structuration d'une filière « miel de France » sera un moyen d'éviter les importations massives. C'est ainsi que nous pourrons continuer de manger du miel chaque matin et de soigner nos petits maux de gorge.

M. Michel Raison.  - Merci, monsieur le ministre. La commission du développement durable organisera bientôt une table ronde sur le sujet. Cela ne règle pas tout mais permet de mieux cerner les problèmes. J'insiste sur la prophylaxie ; si nous n'avions rien fait pour les ovins et les bovins, nous aurions encore des cas de brucellose.

Défense de l'appellation « calisson d'Aix-en-Provence »

Mme Mireille Jouve .  - En juin 2016, un entrepreneur chinois a déposé la marque « les calissons d'Aix » auprès des autorités de son pays, provoquant la colère des producteurs de cette confiserie.

Le calisson d'Aix, tradition ancestrale, est composé d'un tiers d'amandes, d'un tiers de fruits confits et d'un tiers de sucre. Tous ses ingrédients proviennent de Provence, melon de Cavaillon ou encore amande provençale, ce qui lui donne son goût si particulier.

Depuis quatorze ans, une demande d'indication géographique protégée (IGP) a été déposée par l'Union des fabricants de calissons d'Aix (UFCA) auprès de l'Union européenne pour protéger cette appellation. La procédure n'a pas pu aboutir en raison de l'exigence des critères requis et, il est vrai, parce que les fabricants n'ont pas toujours réussi à se mettre d'accord.

Il semble que ce soit désormais chose faite. Après une réunion avec l'Institut national de l'origine et de la qualité (l'INAO) le 6 décembre dernier, les représentants des Calissons du Roy René ont présenté un nouveau cahier des charges le 20 décembre. Le dossier d'IGP serait déposé en mars pour une reconnaissance en juin prochain.

D'ici là, l'appellation n'est pas protégée. La confiserie du Roy René a avancé les frais nécessaires à la première action juridique en Chine. Les fabricants de calissons se sentent impuissants et démunis face à un plagiat sans vergogne. Quel soutien juridique et logistique l'État compte-t-il leur apporter pour protéger un savoir-faire qui date du XVe siècle ?

M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement .  - Le ministère de l'agriculture s'est battu pour défendre toutes les indications géographiques protégées. Il y a un an et demi, la Chine a reconnu 45 appellations d'origine protégée, ce qui a sécurisé le marché entre Bordeaux et la Chine. Dans les instances internationales, j'ai toujours défendu notre vision française, contre celle des Anglo-saxons qui privilégient les marques. Dans les négociations avec les États-Unis, j'ai été très clair : hors de question de mettre en cause les IGP. À Lisbonne, en 2015, un accord a été signé pour protéger les appellations à l'échelle internationale.

Restent les procédures. Et, parfois, sur des productions historiques, les fabricants ne parviennent pas à se mettre d'accord sur le cahier des charges. Ceux de calissons, après quinze ans, ont trouvé un accord. Je ferai diligence pour que l'INAO traite rapidement le dossier.

Comme quoi, il faut toujours une pression extérieure pour que les acteurs s'accordent...

Mme Mireille Jouve.  - Merci, au nom de tous les calissonniers d'Aix-en-Provence.

Allocation de rentrée scolaire des mineurs placés

Mme Stéphanie Riocreux .  - Ma question s'adressait à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé. L'article 19 de la loi du 14 mars 2016 crée un article au code de la sécurité sociale selon lequel l'allocation de rentrée scolaire « est versée à la Caisse des dépôts et consignations, qui en assure la gestion jusqu'à la majorité de l'enfant ou, le cas échéant, jusqu'à son émancipation. À cette date, le pécule est attribué et versé à l'enfant ». Ce dispositif est appliqué lorsque l'enfant est placé sur décision judiciaire. Cependant, le placement sur décision d'un magistrat judiciaire n'est pas le seul qui existe : des parents peuvent volontairement placer leur enfant lorsqu'ils rencontrent des difficultés. La disposition s'applique-t-elle dans le cas d'un placement volontaire, notamment lorsque la convention signée entre le lieu d'accueil du mineur et le parent précise que la participation financière de celui-ci porte sur les fournitures scolaires ?

M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement .  - Près de 40 % des 18-25 ans vivant dans la rue ont eu un parcours en protection de l'enfance. C'est pourquoi le Gouvernement a souhaité que ces jeunes de l'Aide sociale à l'enfance disposent d'un pécule. Ils entrent dans la vie adulte parfois sans économies, sans famille, sans amis. Cette entrée est plus difficile pour eux que pour tout autre jeune.

Depuis 2016, l'allocation de rentrée scolaire est versée sur un compte bloqué à la Caisse des dépôts et de consignation qui en assure la gestion jusqu'à la majorité des enfants. Cela concerne exclusivement les placements ordonnés par un magistrat, et non les placements administratifs, pour lesquels les parents continuent à percevoir l'allocation de rentrée scolaire et contribuent à la mesure de leurs moyens.

Mme Stéphanie Riocreux.  - Merci de cette réponse qui clarifie ce point.

Réglementation de l'activité des thoniers senneurs français

M. Michel Canevet .  - Ma question porte sur la pêche du thon rouge en Méditerranée, chère à notre président Gaudin. La réglementation, particulièrement draconienne, consiste en un quota annuel et en un nombre limité de navires autorisés à pêcher. Seuls dix-sept thoniers sur vingt-trois le sont, ce qui est préjudiciable à l'emploi et à l'activité économique. Les thoniers souhaitent que les vingt-trois bateaux soient autorisés - il ne s'agit aucunement de remettre en cause les quotas de pêche.

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargé des transports, de la mer et de la pêche .  - Le thon rouge est proche d'une espèce en voie de disparition de sorte qu'on en a interdit totalement la pêche. Un effort important des professionnels de la pêche a contribué à ce que le stock augmente, à nouveau, de 20 % chaque année depuis 2014.

La commission internationale de conservation des thonidés (Cicta) se réunira en novembre prochain. Bonne gestion de la filière, amélioration de la traçabilité, tels sont les éléments qui permettent le passage du thon rouge sous plan de gestion, et non plus sous plan de reconstitution. C'est dans ce cadre que sera négocié le nombre de thoniers autorisés à pêcher.

Pour les « petits métiers », ont été délivrées à l'ensemble des navires 87 autorisations en 2014 et 107 en 2016. Je salue le transfert de quotas des senneurs vers les petits métiers ; cette solidarité contribue à l'équilibre socio-économique des ports de pêche en Méditerranée.

M. Michel Canevet.  - Merci de cette réponse ouvrant des perspectives et, encore une fois, pour l'ouverture du BTS pêche dans le Finistère à la rentrée prochaine.

Enclavement ferroviaire de l'ancienne région Limousin

M. Daniel Chasseing .  - Monsieur le ministre, il y a plus d'un an, je vous interrogeais sur la ligne à grande vitesse Poitiers-Limoges. Vous m'aviez donné des assurances qui s'étaient matérialisées par la déclaration d'utilité publique du 10 janvier 2015. Le 15 avril 2016, le Conseil d'État a enterré en quelques minutes ce projet pour lequel l'équipe de la nouvelle grande région se montrait beaucoup moins enthousiaste.

En Corrèze, plus personne n'y croit... D'autres solutions sont envisagées pour réduire l'enclavement. Parmi elles, le doublement de la LGV Paris-Lyon en créant une relation Paris-Orléans-Clermont-Lyon avec passage à Vierzon. Quelle est la position du Gouvernement sur ce projet ? La ligne Paris-Toulouse-Rodez est également vétuste et inconfortable. Où en est sa rénovation ? Enfin, le maintien du train de nuit Paris-Rodez ne doit pas conduire à négliger la ligne Paris-Brive.

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargé des transports, de la mer et de la pêche .  - Le projet de la LGV Poitiers-Limoges n'est pas abandonné, il a fait l'objet d'une décision administrative.

L'amélioration de la desserte du Limousin constitue un enjeu majeur d'aménagement du territoire. Aussi le Premier ministre a-t-il confié une mission à Michel Delebarre pour définir les meilleurs moyens d'aménager une desserte efficace de Limoges, du Limousin et des territoires limitrophes.

L'aménagement de la ligne Paris-Orléans-Clermont-Lyon est examiné. Nous attendons les conclusions de la mission pour avril 2017.

Le Gouvernement a mené une action résolue sur les trains d'équilibre du territoire, mais aussi sur la régénération des infrastructures sur l'axe Paris-Orléans-Limoges-Toulouse. Une enveloppe de 500 millions d'euros est consacrée à la modernisation de cet axe entre 2015 et 2020, soit le double du montant engagé entre 2009 et 2014. À cela s'ajoutent 120 millions d'euros d'investissement dans les contrats de plan 2015-2020. Le matériel roulant sera renouvelé d'ici 2025. Un appel d'offres a été lancé le 21 décembre dernier, l'avis de marché publié au Journal officiel de l'Union européenne le 24 décembre. L'axe sera rajeuni et modernisé. On alimentera ainsi le schéma directeur en cours d'élaboration.

Le train de nuit Paris-Rodez sera impacté par les travaux de la ligne Paris-Orléans-Clermont-Lyon. Faire passer le train par la ligne Brive-Périgueux, tel est le scénario retenu. Des vérifications sur les horaires et les coûts sont menées actuellement, nous en connaîtrons les résultats prochainement.

M. Daniel Chasseing.  - Peu de gens croient encore à la LGV Limoges-Poitiers. La ligne Paris-Orléans-Clermont-Lyon est très mal entretenue : j'ai mis 3 h 30 à rejoindre Paris hier soir, le même trajet prenait 2 h 45 dans les années quatre-vingts. La solution du Y inversé permettrait un désenclavement rapide.

Liaison ferroviaire Creil-Roissy-Picardie

M. Jean-Pierre Bosino .  - La liaison ferroviaire Creil-Roissy-Picardie joue l'Arlésienne. En 2010, un débat public a eu lieu. On annonçait la déclaration d'utilité publique pour 2015, puis pour 2016. Nous sommes en 2017, et l'on ne voit toujours rien venir... En octobre dernier, selon des rumeurs insistantes, confirmées par le sénateur Manable, le projet était reporté de 2020 à 2030. Le 25 du même mois, vous les avez, monsieur le ministre, formellement démenties, ce dont je me réjouis car des milliers d'habitants du sud de l'Oise sont contraints, pour aller travailler à Roissy et dans ses environs, de prendre leur voiture sur une autoroute saturée de poids lourds et d'autocars Macron ou encore de descendre à gare du Nord pour y prendre le RER B. Relier Amiens et Creil à Roissy en vingt-deux minutes nécessite d'aménager un barreau de six kilomètres seulement.

Le Gouvernement, avez-vous dit, est pleinement engagé en faveur de cette liaison. À quelle échéance ? Pourra-t-elle être utilisée par les TER et les TGV ? Quel sera son coût ?

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargé des transports, de la mer et de la pêche .  - Ce projet nécessite la construction de sept kilomètres, ainsi que des aménagements dans les gares de Roissy-Charles de Gaulle, Survilliers-Fosses, Creil et Amiens. Des TER vers Paris et des TGV vers la province pourront circuler. J'ai démenti toutes les rumeurs en expliquant que la commission Mobilité 21 a placé cette liaison parmi les projets prioritaires qui devront aboutir à horizon 2030 au maximum. Les conditions sont toujours réunies pour le lancement des travaux sur l'axe Roissy-Picardie d'ici 2020. Je réaffirme l'engagement du Gouvernement.

Un financement de 282 millions d'euros pour la première phase de travaux a été défini, pour deux allers retours TGV et trois allers retours directs sous réserve d'un conventionnement entre SNCF Mobilités et la région Hauts-de-France.

Le conseil régional des Hauts-de-France a ouvert des discussions pour alimenter le dossier de l'enquête publique d'ici 2018. Les 24 millions d'euros inscrits dans les contrats de plan des régions Ile-de-France et Hauts-de-France financeront les études complémentaires et les premières acquisitions foncières.

M. Jean-Pierre Bosino.  - Monsieur le ministre, votre réponse accroît le flou : 24 millions d'euros inscrits quand le CESER Haut-de-France évalue le coût du projet à plus de 340 millions d'euros ? On a déjà perdu vingt ans. Si le TGV était passé par Amiens et non par la gare des betteraves, nous n'en serions pas là... La réalisation de cette ligne est essentielle à l'heure des pics de pollution.

Contournement autoroutier de Bordeaux

M. Philippe Madrelle .  - La rocade bordelaise est quotidiennement engorgée. Elle accueille plus de 100 000 véhicules par jour, plus de 140 000 sur sa partie Est et 23 000 poids lourds, en raison de la densité du fret sur cet axe, ce qui est considérable, si l'on songe que, selon votre propre ministère, chaque camion a une incidence sur le trafic équivalant à 2,5 véhicules légers. Au total, l'équivalent de 265 000 véhicules par jour y circulent. Sur plus de 4,7 millions de déplacements quotidiens dans le département de la Gironde, 3,3 millions ont lieu à l'intérieur de la métropole bordelaise Les projections les plus sérieuses annoncent une hausse de plus de 2 millions du nombre de déplacements dans l'agglomération. La saturation actuelle provoque un gaspillage de plus de 300 000 heures, dont au moins 60 000 perdues dans les embouteillages par les automobilistes qui travaillent.

En 1995, président du conseil départemental, j'avais fait réaliser une étude de faisabilité pour un grand contournement autoroutier de l'agglomération bordelaise, que j'avais suggéré dès 1989. En 2001, le contrat de plan confirmait cette faisabilité et, en 2004, le ministre de l'équipement de l'époque confirmait également les conditions de réalisation de ce projet. Las, il a dû être abandonné après le Grenelle de l'environnement.

Bordeaux est un point de passage obligé sur l'itinéraire entre Paris, le nord de l'Europe et l'ouest espagnol, le Portugal, voire les pays du Maghreb. L'agglomération bordelaise est le maillon faible de ce grand axe Nord-Sud européen.

La réalisation d'un grand contournement s'impose urgemment. Si seulement 20 % du trafic quotidien des 240 000 véhicules qui passent par les ponts d'Aquitaine et François Mitterrand était transféré, cela représenterait un gain économique et un gain de temps considérables, sans parler de l'impact sur la pollution. Les statistiques de l'union routière de France obligent à être alarmistes : le trafic de poids lourds à Hendaye a augmenté de plus de 50 % entre 1985 et 2000, soit plus du double de la moyenne nationale. Nous avons besoin de faire de ce grand contournement une priorité. On ne peut plus tergiverser. Il faut une décision politique pour construire cette indispensable infrastructure. L'avenir de toute une région est en jeu.

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargé des transports, de la mer et de la pêche .  - Le Gouvernement est sensible à cette situation. Un grand contournement de l'agglomération était en effet envisagé, supposant la construction d'une infrastructure autoroutière d'une centaine de kilomètres, pour un coût estimé il y a dix ans à plus d'un milliard d'euros. Conformément aux orientations du Grenelle de l'environnement, ce projet a été abandonné en 2008, car il ne répondait pas à une nécessité de sécurité ou d'utilité collective et présentait un impact non négligeable sur l'environnement. Il ne figurait donc pas au schéma national des infrastructures de transport de 2011. La commission « Mobilité 21 » qui a établi les priorités en la matière en 2013 n'a pas non plus retenu ce projet.

Aujourd'hui, aucun nouvel élément ne peut remettre en cause ces conclusions. Toutefois, l'État, je l'ai dit, est conscient des conséquences de la congestion de la rocade pour les habitants de la métropole et le transit français et européen. C'est pourquoi, depuis 2009, il s'est engagé auprès de Bordeaux Métropole à élargir la rocade à deux fois trois voies. Les travaux d'élargissement de la moitié sud de la rocade ouest, ont coûté plus de 100 millions d'euros, pris en charge à 75 % par l'État et ont été achevés en novembre 2016. La circulation sera significativement améliorée. Le premier bilan des mises en service consécutives est déjà très positif. C'est en ce sens que l'État entend agir, en ciblant ses investissements pour répondre aux attentes des Français dans un contexte budgétaire contraint.

M. Philippe Madrelle.  - La thrombose est réelle et la réponse du ministre n'est pas satisfaisante. Huit sondés sur dix, selon Sud-Ouest, sont en colère, en raison de cette thrombose avérée. Les automobilistes sont exaspérés. Cet axe nord-sud est bloqué.

Pêche au large de la baie de Seine

Mme Nelly Tocqueville .  - Depuis plusieurs mois, les pêcheurs normands sont confrontés à leurs homologues britanniques qui viennent pécher la coquille Saint-Jacques, en contournant le cadre normatif en vigueur, au large de la baie de Seine, de manière abusive et sans aucune limitation.

Un accord franco-britannique avait pourtant été conclu afin que chaque flottille puisse pêcher équitablement ; cependant, afin de le contourner, les pêcheurs anglo-saxons ont acheté massivement des navires de plus petite taille.

Les bateaux français sont restreints à deux tonnes par jour, avec quatre sorties en mer, tandis que les Britanniques sont à environ dix à quinze tonnes chaque jour sur une semaine. La filière normande est lésée. Il est urgent que les autorités anglaises, irlandaises et européennes, en particulier la Commission, se saisissent de ce problème, qui fait courir des risques à la foi à la filière normande et aux ressources naturelles.

De plus, nos pêcheurs craignent que le Brexit remette en cause leur accès aux abords des côtes anglaises. Celui-ci pourrait donner une plus grande liberté aux Britanniques.

Monsieur le ministre, en réponse aux élus locaux, vous avez rappelé votre soutien aux propositions avancées par la France auprès de la Commission et du comité scientifique, pour une gestion durable du stock de coquilles Saint-Jacques en Manche Est. Pouvez-vous rassurer les pêcheurs normands ?

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargé des transports, de la mer et de la pêche .  - Je suis très sensible à l'appel lancé il y a quelques mois par nos pêcheurs. En 2013, au terme de longues discussions, les professionnels britanniques et français ont conclu un premier accord, entériné par les gouvernements britannique et français, puis renouvelé chaque année. En 2016, l'ouverture au Sud du parallèle 49°42'N a été avancée, à la demande de la partie française, du 30 octobre au 11 octobre, pour toutes les flottilles. Cet accord ne concerne pas les bateaux irlandais ni les navires britanniques de moins de quinze mètres. J'ai fait part des préoccupations de la France aux ministres britannique et irlandais, ainsi qu'au commissaire concerné, à l'occasion du Conseil européen de la pêche du 14 novembre dernier. J'ai réaffirmé ma volonté de parvenir à un cadre réglementaire commun.

Des contacts ont été pris pour travailler avec les professionnels à cette fin. Dans le cadre du Brexit, les discussions doivent être maintenues. Il importe que nous puissions défendre nos intérêts de pêche dans le cadre de ce dialogue global avec les Britanniques. Une politique commune de la pêche est nécessaire, pour harmoniser les réglementations entre les différents pavillons et permettre un accès réciproque aux eaux des États membres.

Mme Nelly Tocqueville.  - Merci, monsieur le ministre, d'avoir apporté ces garanties.

Classement du bois de rose

Mme Sophie Primas .  - Je souhaite attirer l'attention du ministre sur le classement des bois « dalbergia », dit bois de rose, à l'annexe II de la convention internationale sur le commerce de toutes les espèces sauvages menacées d'extinction (Cites). Utile, il suscite néanmoins l'inquiétude des entreprises de la facture instrumentale, et notamment les fabricants de clarinettes et de hautbois, dont les Yvelines comptent deux entreprises prestigieuses : Selmer et Buffet Crampon. Près de 90 % de leur production est vendue à l'étranger. Beaucoup d'entreprises du secteur redoutent le redoublement des contraintes administratives à l'exportation. Demeurent en effet plusieurs zones d'ombre. Quelles formalités devront-elles subir au niveau européen, en cas d'import et de réexport d'instruments pour réparation, par exemple ?

Quelles seront les conséquences réglementaires, administratives, mais aussi économiques de ce classement tant pour les fabricants d'instruments que pour les musiciens qui se rendent à l'étranger avec leurs instruments ?

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargé des transports, de la mer et de la pêche .  - L'annexe II de la Cites comprend les espèces qui sans être nécessairement menacées pourraient le devenir si leur commerce international n'était pas régulé. Le bois de rose y a été inclus lors de la réunion de Johannesburg en octobre 2016. Cette inscription est entrée en vigueur le 2 janvier 2016.

Tout a été mis en oeuvre aussitôt pour accompagner les professionnels. Les entreprises exportatrices françaises peuvent ainsi obtenir des permis préremplis. Une assistance technique permanente des services du ministère de l'environnement leur est fournie.

Les procédures liées aux expéditions d'instruments pour réparation exigent une approche commune des pays concernés. Au 23 janvier, plus de 570 permis Cites ont été délivrés pour des instruments en palissandre, afin d'éviter toute rupture d'approvisionnement.

Une réunion doit se tenir à Bruxelles, le 7 février. Nous veillerons à ce que des solutions opérationnelles soient trouvées.

Mme Sophie Primas.  - Nos entreprises devraient être rassurées.

Sécurité dans les centrales nucléaires

M. Didier Marie .  - Je souhaite vous interroger sur la sécurité des centrales nucléaires de Penly et Paluel, situées dans mon département.

En 2012, un incendie s'est déclenché sur une pompe du circuit primaire du réacteur n°2 de la centrale nucléaire de Penly, suivi d'une importante fuite d'eau. En 2016, le président de l'Autorité de sûreté nucléaire a demandé à EDF l'arrêt de plusieurs réacteurs à la suite de plusieurs contrôles, diligentés après divers incidents.

Le 31 mars 2016, un générateur de vapeur usagé de la centrale nucléaire de Paluel, haut de vingt-deux mètres et pesant cinq cents tonnes, a basculé au cours d'une opération de maintenance. Selon l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN), le générateur a terminé sa chute en position horizontale, en partie sur le béton du bâtiment du réacteur et en partie sur les plateaux de protection de la piscine de ce bâtiment qui ont, pour certains, été endommagés. Un tel incident - non prévu lors de la conception du site - aurait pu entraîner des conséquences dramatiques. Un dernier générateur de vapeur doit être sorti de la centrale.

Compte tenu des risques sanitaires et environnementaux, l'anticipation est indispensable. Quelles sont les dispositions retenues et celles à venir pour assurer la sécurité des centrales nucléaires ?

Par ailleurs, dans un contexte où la menace terroriste est plus élevée qu'elle ne l'a jamais été et où les sites nucléaires peuvent devenir une cible privilégiée, quelles mesures sont mises en oeuvre pour protéger ces sites sensibles ?

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargé des transports, de la mer et de la pêche .  - La sûreté et la sécurité nucléaires sont une priorité pour le Gouvernement. La garantie de cette sûreté justifie que des moyens techniques, organisationnels et réglementaires suffisants lui soient consacrés. Ségolène Royal a veillé personnellement à ce que l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) soient dotés respectivement de 30 emplois et de 20 emplois supplémentaires, ce qui représente un effort exceptionnel dans le contexte budgétaire actuel.

Vous avez rappelé que le 31 mars 2016, dans le cadre de la troisième visite décennale du réacteur n°2 de Paluel, un générateur de vapeur a chuté sur le sol du bâtiment réacteur lors de son remplacement. L'analyse de l'évènement et les mesures mises en place en vue du redémarrage de l'installation conduisent EDF à allonger la durée prévue de cette visite décennale au-delà de deux ans.

Par lettre motivée du 14 novembre 2016 à la ministre, EDF a demandé une prolongation de l'arrêt du générateur endommagé. L'ASN contrôle l'opération de dégagement du générateur, tant à l'égard de la sûreté nucléaire, que de la protection des travailleurs. Le ministère a demandé des analyses et un retour d'expérience pour éviter qu'un tel événement se reproduise. Elle a demandé à EDF des contrôles sur les générateurs où la concentration élevée de carbone dans l'acier entraîne des propriétés mécaniques plus faibles qu'attendu. Douze de ces réacteurs sont fabriqués par le japonais JCFC. Les centrales de Paluel et Penly ne sont pas concernées. Neuf des douze réacteurs concernés ont redémarré, un réacteur est en cours de redémarrage et des contrôles complémentaires sont prévus pour les deux derniers.

Dans le cadre de la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, Ségolène Royal a doté l'ASN d'une commission des sanctions et de moyens de sanctions renforcés (amendes, astreintes, etc.) ; les modifications des installations nucléaires sont désormais soumises à autorisation de I'ASN, et non à déclaration comme auparavant ; le recours à des sous-traitants ou des prestataires est mieux encadré.

Quant à la protection des sites sensibles, la base réglementaire a été renouvelée entièrement. Les nouvelles menaces ont été prises en compte.

M. Didier Marie.  - Je salue le renforcement des moyens de l'ASN. Les salariés qui travaillent sur les sites et la population habitant alentour seront rassurés.

Fermeture de la plate-forme industrielle du courrier de Nice en 2018

Mme Dominique Estrosi Sassone .  - Annoncée par la direction de La Poste à l'été 2016, la fermeture de la plate-forme industrielle du courrier (PIC) de Nice concerne 380 agents qui travaillent dans ce centre de tri postal. Pourtant, ce centre de tri est stratégique puisqu'il est implanté à proximité du deuxième aéroport de France ; l'ensemble du trafic postal niçois y est géré, favorisant le maillage économique et les échanges postaux dans les Alpes-Maritimes.

L'argument avancé par La Poste pour justifier la fermeture tient à la baisse de trafic et à une meilleur adaptabilité au réseau mais cet argument paraît discordant tant le volume du courrier traité est important. Nice avait été sélectionnée pour expérimenter le travail dominical des facteurs volontaires avant les fêtes de fin d'année 2015.

Un éventuel transfert de ce centre de tri vers le site de Toulon dans le Var ne semble pas opérant eu égard au temps de transport par la route entre les deux villes, qui allongera les délais de transmission puisqu'il n'existera plus de centre de tri postal dans les Alpes-Maritimes. De plus, le centre de tri de Toulon ne disposerait ni des capacités logistiques ni de ressources humaines suffisantes pour recevoir, traiter et faire acheminer rapidement le courrier vers Nice.

Le bail du site niçois n'étant pas renouvelable, la métropole Nice Côte-d'Azur a présenté des solutions pour conserver son centre de tri, notamment des propositions d'emplacement géographique dans la plaine du Var, en collaboration avec le président de l'établissement public d'aménagement de la plaine du Var. Ce transfert permettrait de sauvegarder les emplois et l'activité postale tout en modernisant l'infrastructure.

L'État détenant plus de 70 % du capital de La Poste, quelle est la logique économique de cette décision ? Nice sera l'une des seules villes de France sans plateforme de tri pour le courrier ? Encouragez-vous La Poste à relocaliser sa plate-forme dans la plaine du Var, afin de sauvegarder les emplois rendre un service de qualité sans allonger les délais de remise du courrier ?

Mme Colette Giudicelli.  - Très bien !

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargé des transports, de la mer et de la pêche .  - Développement des échanges numériques, baisse du volume du courrier et de la fréquentation des centres postaux : La Poste est en pleine évolution.

Pour les colis et le courrier de proximité, elle doit se moderniser pour rester concurrentielle. D'où la décision qui concerne la plate-forme de Nice devenue inadaptée.

Les autorités souhaitent récupérer le terrain pour d'autres activités comme la desserte de l'aéroport par le tram.

Le transfert vers le site de Toulon La Valette, qui rassemblera le tri pour l'ensemble de la côte d'Azur est déjà engagé, puisqu'un quart du courrier des Alpes-Maritimes y est déjà traité.

La Poste a rencontré les collectivités concernées, communauté d'agglomérations, établissement public d'aménagement de la plaine du Var, afin de rechercher des terrains aux alentours de Nice. Plusieurs propositions lui ont été faites, elle rendra sa décision dans les prochains mois. Elle poursuivra sa réorganisation, sans aucun licenciement. Des activités nouvelles seront proposées aux agents, qui seront formés à cette fin.

De nouveaux parcours professionnels seront constitués pour les 336 agents de la plate-forme, dont une centaine doit partir à la retraite d'ici à 2018.

Les autres se répartiront dans les nouveaux services de proximité mis en place par La Poste, comme la livraison des colis le soir.

L'État est très attentif à l'évolution des missions de service public de La Poste, mais aussi à la qualité du service rendu, en observant que tous les objectifs définis dans ce domaine ont été atteints en 2014 au niveau national, et que le prochain contrat qui sera signé avec l'État en tiendra compte.

Mme Dominique Estrosi Sassone.  - Ni les salariés ni les élus ne seront rassurés par votre réponse. L'État doit être là pour accompagner La Poste dans ses évolutions. C'est la Cour des comptes qui l'affirme. Je souhaite que La Poste conduise ces transformations avec les élus de sorte que nous préservions les emplois et le traitement du courrier dans les Alpes-Maritimes tout en développant la performance du service. Les élus de tous bords du département comptent sur lui pour trouver des solutions d'ici 2018.

Obstacle à la mise en place d'un accueil échelonné en petites sections de maternelles

Mme Mireille Jouve, en remplacement de M. Robert Navarro  .  - De plus en plus d'équipes éducatives privilégient un accueil échelonné sur deux jours pour les enfants de maternelle. Cette initiative rencontre un grand succès.

L'accueil échelonné améliore une étape cruciale dans le parcours scolaire des enfants : il respecte pleinement ces derniers ainsi que leurs parents en leur accordant le temps nécessaire pour être écoutés, reconnus, informés, rassurés. Il permet de nouer un lien de proximité dès le premier jour et chacun sait combien celui-ci sera nécessaire, primordial, afin que l'enfant s'adapte à ce nouvel environnement, tout en plaçant le parent dans son rôle de parent d'élève. Cette mesure simple n'a pas de coût supplémentaire pour l'État.

Un dernier point, non négligeable, est le contexte de menace terroriste que nous connaissons ; une rentrée progressive permet à l'ensemble de l'équipe d'identifier plus rapidement les visages des nouveaux parents. C'est donc aussi un dispositif efficace pour la sécurité de l'école, qui renforce l'impossibilité pour un intrus d'y commettre des actes graves.

Cependant, même en cas d'unanimité au conseil de l'école, une inspectrice de circonscription peut tout empêcher. C'est absurde ! Sans imposer l'accueil échelonné, le Gouvernement pourrait-il solliciter les Dasen pour qu'ils donnent des instructions appropriées aux inspecteurs de circonscription, afin que ceux-ci respectent les choix du conseil d'école ?

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargé des transports, de la mer et de la pêche .  - La circulaire du 18 décembre 2012 insiste sur le nécessaire dialogue avec les familles pour l'accueil des jeunes enfants.

Des ressources pédagogiques en ligne sur le portail Éduscol sont à la disposition des enseignants.

Un conseil en formation aux inspecteurs et aux enseignants prolonge ce travail. Un réseau de professionnels experts existe. La circulaire du 9 septembre 2012 invite à prendre en compte la situation de chaque territoire.

Dans l'Hérault, par exemple, l'accueil échelonné est une pratique ancienne. Il n'y a eu aucune consigne de l'académie.

Cependant, le contexte marqué par le terrorisme oblige à garantir la sécurité des établissements.

Ouverture d'une classe préparatoire à Dreux

Mme Chantal Deseyne .  - Le rectorat de l'académie d'Orléans-Tours ainsi que les divers corps d'inspection ont tous donné un avis favorable à l'ouverture d'une classe préparatoire technique physique chimie dans le lycée Rotrou à Dreux. Cette ouverture avait même été budgétée. Le coût de la création de cette classe préparatoire est limité car le lycée dispose de tous les équipements nécessaires à cette formation, ainsi que des professeurs capables d'enseigner dans cette section. L'ouverture de cette classe préparatoire était si avancée que cette nouvelle formation apparaissait sur le site d'inscription pour les admissions post-bac (APB), géré par le ministère, avant de disparaître pendant les vacances de Noël 2015. Au mois de mars 2016, le recteur m'a communiqué par courrier son avis favorable pour le projet d'ouverture d'une classe préparatoire au lycée Rotrou à Dreux pour la rentrée de septembre 2017.

Or les enseignants et le personnel viennent d'apprendre avec consternation le refus du ministère. Cette décision, qui semble arbitraire, est d'autant plus regrettable que le bassin drouais est la capitale du cluster d'industries pharmaceutiques Polepharma et du centre de la Cosmetic Valley qui proposent de nombreux emplois dans les domaines enseignés dans une classe préparatoire technique physique chimie. Le lycée Rotrou accueille des élèves issus de catégories socioprofessionnelles différentes et plutôt défavorisées. L'ouverture de cette classe préparatoire offrirait une voie d'orientation d'excellence à des élèves parfois brillants mais qui n'ont pas les moyens de poursuivre des études longues. Pourquoi ce revirement de dernière heure deux années de suite privant ainsi les élèves d'une insertion professionnelle accessible, qualifiante et valorisante ?

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion .  - À la rentrée 2016, 86 500 étudiants ont été accueillis en classe préparatoire. La filière scientifique concentre deux tiers de ces étudiants. Un étudiant sur trois étudie en Île-de-France. Trois sections physique chimie existent à Mulhouse, Montpellier et Saint-Maur-des-Fossés. Trois demandes d'ouverture ont été adressées par les académies de Bordeaux, Lyon et Tours. Le doublement de l'offre de formation nationale introduirait un déséquilibre, car les concours des écoles n'offrent que quarante places. Les débouchés de ces classes doivent être appréciés au regard de ce nombre de places et non des possibilités d'insertion professionnelle locale, qui peuvent être pourvues par d'autres moyens.

D'où la décision de la ministre, après instruction par ses services, de ne pas donner suite à la demande du lycée de Dreux, puisque la section de Saint-Maur-des-Fossés n'est guère éloignée. (Marques de perplexité sur les bancs du groupe Les Républicains)

Mme Chantal Deseyne.  - Merci pour cette réponse qui ne me satisfait que partiellement. La population de Dreux est peu mobile. Comment envoyer les étudiants à Saint-Maur-des-Fossés ? De plus, le taux de chômage, de 12 %, est élevé, contre 10 % en moyenne pour le département. Une adéquation entre l'offre de formation et les emplois sur place aurait été bienvenue. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Réforme de l'éducation prioritaire

Mme Brigitte Gonthier-Maurin .  - Je regrette l'absence de la ministre de l'Éducation nationale... Dès février 2014, j'avais exprimé des inquiétudes sur le choix de traiter « à part » les lycées d'éducation prioritaire. Depuis septembre, la mobilisation ne cesse de croître, de nombreux établissements ont rejoint le collectif « Touche pas à ma ZEP ». Lors d'un déplacement à Marseille, la ministre a annoncé un plan exceptionnel de 450 postes supplémentaires à la rentrée 2017 ; cela représente 40 postes pour l'académie de Versailles, mais on ignore comment ils seront répartis. Le ministère est sans doute conscient qu'en dévoilant les détails du plan, il en révélerait les insuffisances... Dans mon département qui compte douze lycées ZEP, essentiellement d'enseignement professionnel, les équipes constatent déjà des heures en moins, pour le même nombre d'élèves.

Les annonces ne sont pas à la hauteur des enjeux. Il serait trop tard pour redéfinir une nouvelle carte ? Mais le ministère a bien dû plancher sur les critères de répartition de ces 450 postes... Pourquoi ne pas établir une carte d'éducation prioritaire élargie aux lycées ?

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion .  - Je vous prie d'excuser Mme Vallaud-Belkacem. Si la réforme de l'éducation prioritaire a d'abord concerné les écoles et collèges, il a constamment été rappelé qu'elle devra être conduite pour les lycées. Cela suppose de dresser la liste des établissements qui connaissent les plus grandes difficultés sociales et scolaires. La réforme passera par une concertation avec l'ensemble des acteurs.

La ministre a pris des engagements forts pour les lycées scolarisant les élèves les plus défavorisés : nouvelle allocation progressive des moyens depuis 2015, dotation exceptionnelle de 450 emplois nouveaux à la rentrée 2017.

Toutes les dispositions ont été prises pour sécuriser les rentrées 2017, 2018, 2019, tant en termes de maintien des indemnités et des droits à la mutation pour les enseignants que de maintien des moyens supplémentaires dont bénéficient les lycées.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - Pourquoi ne pas avoir mené la réforme dans son ensemble ? Je ne conteste pas les moyens supplémentaires, mais constate leur saupoudrage. La sortie programmée de certains lycées de l'éducation prioritaire me navre, d'autant que dans mon département, il s'agit surtout de lycées professionnels, importants pour la remédiation.

Dans une tribune publiée le 12 janvier dans Libération, 300 universitaires plaident pour la publication de la carte scolaire.

Centre hospitalier de La Rochefoucauld

M. Michel Boutant .  - Le centre hospitalier de La Rochefoucauld, structurant pour son environnement dans le département de la Charente, affiche un déficit cumulé de 3,5 millions d'euros, de 760 000 euros pour l'année en cours ainsi qu'une suppression prévisionnelle de 21 postes. Grâce à la nomination d'un nouveau directeur, les relations avec le personnel et les organisations syndicales sont apaisées, mais la situation reste très dégradée.

Les restructurations précédentes sont arrivées au bout de ce qu'il est acceptable de demander : des équipements sont autorisés mais non financés, les salariés ont accepté de réviser les accords de réduction du temps de travail. Les banques ne financent plus les investissements indispensables, les fournisseurs sont frileux, une impasse de trésorerie se dessine... Ces éléments justifient une intervention rapide et durable de l'État pour assurer la pérennité de l'offre de santé sur ce territoire.

Quelles mesures le Gouvernement compte-t-il prendre pour apaiser les inquiétudes ?

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion .  - Les hôpitaux publics sont au coeur de l'action de Marisol Touraine - que je vous prie d'excuser. Ils sont au coeur de notre système de santé, en particulier dans les territoires menacés par la désertification médicale, et ont un rôle structurel. L'Agence régionale de santé de la Nouvelle Aquitaine suit et accompagne le centre hospitalier de La Rochefoucauld depuis ses premières difficultés. Pour la reconstruction des bâtiments, il a bénéficié dès 2015 d'une revalorisation de sa dotation de 350 % par an et d'une subvention d'investissement de 500 000 euros.

Un plan de restructuration a été proposé par la nouvelle direction commune avec le centre hospitalier d'Angoulême et adopté par le conseil de surveillance. Il s'accompagnera d'un accompagnement financier d'un million d'euros en 2016. Le ministère est très attentif à la pérennisation de cette offre de soins locale qui répond aux besoins du territoire.

Accès aux soins bucco-dentaires

Mme Isabelle Debré .  - Les soins dentaires sont devenus inabordables pour beaucoup de Français. Dans son récent rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, la Cour des comptes relève qu'un Français sur cinq renonce à se soigner, deux fois la moyenne européenne. La part des dépenses prises en charge par l'assurance maladie est tombée à 33 %, les assurances complémentaires en supportant 39 % et les patients le quart. Le reste à charge est très élevé, notamment pour les soins prothétiques, d'implantologie et d'orthodontie. La répartition disparate des praticiens sur le territoire aggrave les inégalités et conduit à de quasi-déserts médicaux.

La Cour des comptes préconise de revaloriser la prise en charge et de mettre en oeuvre un politique active de prévention, ainsi que la fixation d'objectifs conventionnels plus ambitieux. Quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre pour que chacun bénéficie d'une meilleure couverture des soins dentaires, pour améliorer la situation sanitaire de l'ensemble de la population et maîtriser plus strictement les coûts ? C'est un enjeu de santé publique.

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion .  - L'accès aux soins dentaires est une préoccupation majeure pour la ministre. La santé bucco-dentaire impacte la santé globale d'un individu. Or 25 % de ces soins restent à la charge des ménages, c'est inacceptable. Entre 2005 et 2015, les taux de dépassements d'honoraires sur les prothèses ont augmenté de 66 points, atteignant 400 % en moyenne. Dans le même temps, la mauvaise prise en charge des soins conservateurs conduit les dentistes à limiter ces actes qu'ils réalisent à perte.

Plafonnement des dépassements d'honoraires pour toute la profession et revalorisation des soins conservateurs : tels sont les piliers de la négociation conventionnelle entre les chirurgiens-dentistes et l'assurance maladie, qui s'achève le 31 janvier. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 garantit l'aboutissement des modifications tarifaires : en cas d'échec de la négociation, un arbitrage extérieur prendra le relais. En valorisant la prévention, les évolutions à venir modifieront durablement la pratique des soins dentaires en France.

Mme Isabelle Debré.  - J'attends donc les résultats de cette négociation. J'en prendrai acte s'ils conviennent à nos concitoyens. Sinon, je vous interrogerai à nouveau, car il y a urgence. Il est anormal que les Français n'aient pas tous accès aux soins dentaires de manière équitable.

Émanations dangereuses dans les cabines d'avion

Mme Colette Giudicelli .  - Je vous avais déjà alerté en juillet 2012 sur l'intoxication des cabines d'avions du fait d'émanations de particules d'huiles pour moteurs. Plusieurs associations et syndicats de personnel navigant envisagent de porter les conséquences de ces intoxications en justice.

Dans la plupart des appareils, pour des raisons de coût, l'air respiré est amené de l'extérieur jusque dans la cabine en utilisant les compresseurs des moteurs. Selon une circulaire de 2015 de l'Organisation de l'aviation civile internationale, des émanations dangereuses provenant d'huiles de moteur peuvent contaminer le système d'alimentation en air de la cabine et du poste de pilotage, entrainant de graves symptômes neurologiques.

Or les équipages ne sont pas formés à détecter les émanations dangereuses, et l'air diffusé par les masques à oxygène provient pour moitié de la cabine...

Ce qui est en jeu, c'est la santé des millions de personnes qui prennent l'avion tous les jours. Les incidents dangereux concernent cinq vols par semaine. À quand une étude épidémiologique indépendante à grande échelle ?

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion .  - La qualité de l'air dans les cabines est suivie par l'Agence européenne de sécurité aérienne. En 2009, elle a lancé un processus pour savoir si des exigences devaient être édictées sur la qualité de l'air dans les cabines, avant de conclure, après examen des données disponibles, qu'une intervention ne se justifiait pas, faute de lien de cause à effet démontré.

En 2015, elle a souhaité mettre à jour les connaissances dans ce domaine. Une étude est en cours et ses conclusions pourront donner lieu au lancement d'une étude épidémiologique.

Mme Colette Giudicelli.  - Merci. Il faut aussi sensibiliser et former les équipages. La santé de millions de passagers est en jeu.

Difficultés financières des associations de services à la personne

M. Dominique Bailly .  - Je veux alerter sur la situation financière des associations de services à la personne. Le département accompagne la prise en charge des personnes âgées ou handicapées via l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) et la prestation de compensation du handicap. Dans le département du Nord, le montant de la tarification remboursée aux structures des services à la personne est gelé depuis des années à 17,50 euros, alors que la moyenne nationale est de plus de 20 euros.

La survie de ces structures pourtant cruciales est en jeu. Les déficits, redressements judiciaires, menaces de licenciements s'aggravent ; le recours au temps partiel se généralise alors que les besoins en accompagnement de la population vieillissante ne cessent de croître.

Qu'entend faire le Gouvernement pour pallier les difficultés financières auxquelles sont confrontées les associations de services à la personne, en particulier dans le Nord, et pérenniser ce secteur d'activité essentiel ?

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion .  - Le secteur de l'aide à domicile fait l'objet d'un important soutien de l'État. La loi d'adaptation de la société au vieillissement du 28 décembre 2015 a été préparée en concertation étroite avec l'Association des départements de France. La contribution additionnelle de solidarité pour l'autonomie (CASA), qui représente 740 millions d'euros, a financé la réforme de l'APA, la revalorisation des plans d'aide et la baisse du reste à charge.

Le Gouvernement compense les dépenses nouvelles des départements à la suite de la revalorisation des salaires de 1 %, dans le cadre d'une enveloppe annuelle de 25 millions d'euros. Le fonds de restructuration créé en 2012, mobilisant 130 millions d'euros, sera abondé de 25 millions en 2016.

Les loi de finances et de financement pour 2017 ont renforcé le soutien du Gouvernement : extension du crédit d'impôt à hauteur d'un milliard d'euros qui bénéficiera à 1,3 million de personnes ; extension du CICE au secteur privé non lucratif, pour 600 millions d'euros, qui permet un abattement de 4 % de la masse salariale ; création d'un fonds d'appui aux bonnes pratiques pour soutenir les services départementaux dans le cadre des contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens.

La mission parlementaire sur la tarification des services d'aide à domicile, confiée à Georges Labazée, contribuera à mieux identifier les difficultés. Des représentants du conseil départemental du Nord et des associations ont été auditionnés. Le Gouvernement lancera en 2017 une campagne pour rendre plus attractifs les métiers du domicile.

M. Dominique Bailly.  - Je ne doutais pas de l'accompagnement du Gouvernement. Il faut permettre aux collectivités locales de continuer à agir, en menant une action proximité.

Déserts médicaux

M. Hervé Maurey .  - Bien que le nombre de médecins n'ait jamais été aussi élevé, la désertification médicale s'intensifie, et les disparités aussi. Si Paris compte huit médecins pour mille habitants, l'Eure n'en compte que deux. Entre 2007 et 2016, la densité médicale a baissé dans 86 départements, et 14,6 millions de personnes vivent dans un territoire où l'offre de soins libérale est « notoirement insuffisante ». En quatre ans, plus du quart des Français ont vu diminuer le nombre de médecins généralistes accessibles en moins de trente minutes en voiture, et le temps d'attente pour obtenir un rendez-vous ne cesse de croître : 110 jours en moyenne pour un ophtalmologue !

Depuis 2009, je propose l'extension aux médecins du conventionnement sélectif selon les zones d'installation. Un médecin ne pourrait ainsi s'installer dans une zone sur-dotée qu'à condition de remplacer un confrère ou de renoncer au conventionnement. Ce dispositif a permis d'augmenter de 30 % le nombre de kinésithérapeutes dans les zones sous-dotées.

Les mesures incitatives sont insuffisantes. Il ne s'agit pas de revoir le dogme de la liberté d'installation, mais de la réguler et de la soumettre au principe de l'intérêt général. Avant de nous quitter, le Gouvernement fera-t-il enfin preuve de courage ?

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion .  - Le problème est complexe ; je regrette, monsieur le président de la commission de l'aménagement du territoire, que vous ne proposiez d'autre solution que le conventionnement sélectif. Courage politique, dites-vous ? Que ne l'avez-vous mis en place pendant les dix années où vous étiez au pouvoir ?

Le conventionnement sélectif, c'est l'assurance de voir s'installer dans les villes une médecine rapide pour les riches et dégradée pour les pauvres.

La vraie question, c'est celle de l'organisation des soins ambulatoires. Dès 2012, nous avons lancé le pacte territoire santé. Le nombre de maisons de santé a été multiplié par cinq, la loi de modernisation de la santé a également créé des plateformes et des communautés territoriales de santé.

Développement de la télémédecine, création du praticien territorial de remplacement ? Ce sont bien les mesures votées dans le PLFSS 2017, je ne doute pas que vous les soutiendrez.

Le Gouvernement a pleinement conscience de l'urgence, mais on ne peut se contenter de solutions populistes. Il n'y a pas de remède miracle. Il faut un ensemble de mesures structurelles pour résorber les déserts médicaux, dans le temps. C'est tout le sens de l'action de Marisol Touraine.

M. Hervé Maurey.  - Il m'avait échappé que j'avais été au pouvoir pendant dix ans... En tout état de cause, je ne suis pas de ceux dont les positions varient selon que je suis dans la majorité ou dans l'opposition - contrairement à Mme Touraine, qui prônait des solutions coercitives dans l'opposition et qui a changé d'avis une fois au Gouvernement. Je prônais déjà les mêmes mesures lors de la loi Bachelot de 2009.

Comme toujours, vous êtes dans le déni de réalité et l'autosatisfaction. Loin d'être la panacée, certaines maisons de santé n'ont même pas de médecins ! François Hollande n'a pas tenu ses engagements : votre action est un échec tragique. J'espère que vos successeurs feront preuve de plus de courage et de responsabilité !

Maladie de Lyme

M. Bruno Sido .  - Chaque année en France, 23 000 cas de maladie de Lyme sont diagnostiqués, contre 300 000 en Allemagne. Face à cette carence, nombre de Français se rendent en Bavière, dans la clinique spécialisée d'Augsbourg, afin de bénéficier d'une prise en charge leur garantissant un droit de guérir. Après un traitement intensif de trois semaines, d'un coût de 7 000 euros, ils reprennent espoir et voient leur état de santé s'améliorer, après des mois, voire des années à attendre en vain le bon diagnostic.

Pourquoi la France a-t-elle attendu le 29 septembre 2016 pour annoncer un plan de mobilisation contre cette maladie, quand l'Allemagne créait cette clinique spécialisée il y a dix ans ? Je me réjouis de cette annonce et de l'élaboration d'un protocole de diagnostic et de soins associant les malades. Ce protocole a-t-il été validé par la Haute autorité de Santé et par l'assurance maladie ? La situation est urgente.

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion .  - Les situations en Allemagne et en France sont très différentes. Les taux d'incidence en région Centre, Normandie, Aquitaine sont bas, mais plus élevés en Alsace... En matière vectorielle, l'épidémiologie n'est pas uniforme sur l'ensemble du territoire.

Dans la majorité des cas, les formes primaires peuvent être traitées par une cure d'antibiotiques. D'autres formes secondaires sont plus difficiles à diagnostiquer et à soigner.

La France n'a pas attendu 2016 : un centre national de référence a été créé en 2002. Les professionnels de santé ont été sensibilisés. Le Haut conseil de la santé publique a été saisi en 2012 pour émettre des recommandations.

En septembre 2016, Mme Touraine a lancé un plan de mobilisation contre la maladie de Lyme. Il renforce la surveillance sanitaire, développe l'information et la prévention, mobilise la recherche pour développer les outils de diagnostic. Le protocole national de diagnostic et de soins sera élaboré par la Haute autorité de santé, en lien avec tous les professionnels et les associations de patients. Les travaux ont débuté, les conclusions sont attendues en juin 2017. Oui, il y a urgence, mais elle ne justifie pas de déroger aux pratiques professionnelles garantes de la sécurité des patients.

M. Bruno Sido.  - La maladie de Lyme, transmise par les tiques, vient du Connecticut. Elle est en recrudescence, notamment dans l'Est de la France, dont je suis élu, et gagne du terrain. Les Allemands, certes davantage concernés, ont réagi depuis longtemps ; résultat, les Français sont obligés d'aller en Bavière pour se faire soigner. Incroyable alors que nous prétendons avoir le meilleur système de soins au monde !

Les médecins et la sécurité sociale doivent traiter ce problème. Il y a des méthodes pour soigner, pour peu qu'on le veuille.

Anonymat des travailleurs sociaux

M. Jean-Jacques Lasserre .  - Assistants de services sociaux, éducateurs spécialisés, conseillers d'insertion, animateurs socioculturels, les travailleurs sociaux sont de plus en plus confrontés à des violences, agressions, menaces verbales ou physiques. Lors d'un dépôt de plainte à la gendarmerie, leurs nom, prénom et adresse sont mentionnés dans le procès-verbal - ils risquent donc de faire l'objet de représailles.

Dans les Pyrénées-Atlantiques, les agressions chez les assistants sociaux ont augmenté d'un tiers entre 2015 et 2016. La majorité sont verbales, mais on note un net durcissement.

Avant l'été, le président de la République avait évoqué des mesures en direction des forces de l'ordre afin de protéger leur anonymat et éviter les éventuelles représailles. Un système similaire ne pourrait-il pas être mis en place pour protéger les travailleurs sociaux ?

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion .  - Les violences contre les travailleurs sociaux sont inacceptables. Elles font systématiquement l'objet d'enquêtes pour appréhender les coupables.

Appliquer le même dispositif que pour les forces de l'ordre n'est pas une bonne solution car policiers et gendarmes ont à mener des enquêtes. En revanche, les dispositions protectrices des témoins issus de la loi du 3 juin 2016 sont applicables aux travailleurs sociaux dans le cadre des procédures pénales. C'est ainsi que le dispositif prévu pour les repentis est élargi aux témoins qui pourront bénéficier de mesures de protection, de réinsertion et d'une identité d'emprunt. Le décret du 5 décembre 2016 a mis en oeuvre cet élargissement.

La mise en place de 81 zones de sécurité prioritaires fait du partenariat la clé de voûte de la politique territoriale de sécurité, ce qui contribue à la protection des travailleurs sociaux.

Le Gouvernement a créé en 2015 un plan d'action pour les travailleurs sociaux, que je vous invite à consulter sur notre site internet.

M. Jean-Jacques Lasserre.  - Oui, cet anonymat est important. J'espère tout de même que ce genre de question ne se posera pas éternellement !

Revente des caveaux

M. Georges Labazée .  - La circulaire ministérielle du 15 mars 1976 précise que le prix de revente des caveaux par les communes doit être établi en tenant compte de ceux pratiqués pour des caveaux neufs par les marbriers. Cela revient à dire qu'une commune peut augmenter le prix de vente des caveaux de façon exorbitante. Cette circulaire doit être actualisée. Elle autorise une collectivité territoriale à revendre un bien gratuit et d'occasion au prix du neuf. Elle pose aussi la question de la différence entre service public et prestation privée dans le cadre de prestations funéraires.

L'organisation d'obsèques et les frais funéraires illustrent l'inégalité sociale face à la mort. Nombreux sont les foyers en difficultés financières, et en particulier les personnes âgées qui, soumis au diktat du marché funéraire, doivent s'endetter et aggraver leur précarité.

On pourrait exiger des communes qu'elles réattribuent à des familles en précarité financière et sociale les caveaux qu'elles auront repris, ou que les maires puissent fixer un tarif modulaire de revente, pouvant même aller jusqu'à la gratuité pour des familles en-dessous des minima sociaux.

Le Gouvernement entend-il revoir les termes de cette circulaire, afin de lui donner un caractère social utile et juste ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État auprès de la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, chargée de la formation professionnelle et de l'apprentissage .  - La collectivité n'a aucune exclusivité et est tenue d'autoriser la construction d'un caveau par une entreprise extérieure. Quant au prix de revente, la circulaire garantit avant tout la liberté des familles.

Le recours au caveau d'occasion permet d'éviter les frais liés au caveau d'attente. Les prix de vente doivent tenir compte des prix du marché, sans logique de profit pour la commune. Le code des marchés s'applique.

Les personnes sans ressources financières peuvent déjà bénéficier d'une aide par la commune, conformément à l'article 2223-27 du code général des collectivités territoriales. Le cadre juridique actuel respecte donc le droit de la commune, la liberté de choix des usagers, tout en garantissant une aide pour les plus démunis.

M. Georges Labazée.  - Il faudrait aussi tenir compte des nouvelles pratiques funéraires, incinérations ou columbariums, qui n'existaient pas il y a quarante ans.

Sécurité dans les transports

M. Alain Fouché .  - L'attentat du Thalys du 21 août 2015 a montré que les gares et les moyens de transport étaient une cible privilégiée des terroristes. Pourquoi les décrets de la loi relative à la prévention du terrorisme du 22 mars 2016 n'ont-ils toujours pas été pris ? Pourquoi les TGV sont-ils à quai quinze minutes avant le départ, toutes portes ouvertes, sans contrôle ? Pourquoi n'y a-t-il pas de portiques aléatoires ? Pourquoi les bagages ne sont-ils pas fouillés ? Toutes les mesures suggérées par notre mission n'ont pas été prises. Cela n'est pas sérieux. Le Sénat est inquiet.

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État auprès de la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, chargée de la formation professionnelle et de l'apprentissage .  - Le Gouvernement a publié les décrets le plus rapidement possible, du 3 juillet 2016 au 27 décembre 2016, sauf deux textes sur les enquêtes administratives et l'utilisation des données de sécurité sociale pour identifier les contrevenants. Sur ce sujet, une plateforme a été créée.

Le Conseil d'État a examiné le premier décret le 15 novembre et il a demandé la disjonction d'une disposition. Un nouveau texte a été rédigé en réponse. Nul reproche ne peut être fait au Gouvernement.

De plus, la loi Savary renforce les pouvoirs des agents de sécurité et permet d'interdire l'accès aux véhicules, aux personnes en infraction tarifaire ou qui refusent l'inspection de leurs bagages. Des expérimentations sont en cours pour accroître la prévention, la sensibilisation du public.

Ainsi le Gouvernement agit, contrairement à vos allégations.

M. Alain Fouché.  - Je prends régulièrement le train.

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État.  - Moi aussi.

M. Alain Fouché.  - Il y a du relâchement ! Pas de fouilles, pas de portiques aléatoires, alors qu'ils avaient été promis. Le risque d'attentat est élevé ! Le Gouvernement ne prend pas les bonnes mesures et ne fait pas ce qu'il faudrait ! S'il y a un attentat, sa responsabilité sera engagée !

Safer

M. Henri Cabanel .  - On pourrait rapprocher les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (Safer) et les établissements publics fonciers (EPF) sur la gestion du foncier rural, par le biais de conventions d'objectifs relatives à la protection des espaces agricoles, naturels et forestiers, et à l'installation, au maintien et à la consolidation des exploitations agricoles ou forestières.

Au fil des années, en même temps que les subventions de l'État se réduisaient, le rôle des Safer s'est élargi à la protection des espaces fragiles et de l'environnement. Face à l'exacerbation de la concurrence sur l'utilisation du foncier agricole et rural, et à l'augmentation des prix qui en résulte, certaines Safer rencontrent des difficultés financières. Elles peinent à renouveler leur droit de préemption, le tout dans un contexte d'accroissement sensible des recours des particuliers contre leur action.

Le risque est de voir certaines Safer retenir des choix stratégiques rémunérateurs, en se transformant en prestataires d'opérations foncières étrangères à l'objectif de protection des terres agricoles, au détriment de leur mission de service public originelle.

Les EPF ont pour but d'acquérir du foncier pour faire des opérations d'aménagement, financées par une taxe. Ne pourrait-on assurer un meilleur financement aux Safer via les EPF ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État auprès de la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, chargée de la formation professionnelle et de l'apprentissage .  - Les Safer et les EPF d'État comme locaux collaborent déjà. La loi Alur répond largement à vos interrogations : elle a renforcé cette collaboration. En pratique, les dix EPF sous la tutelle de l'État coopèrent déjà avec les Safer, dans le cadre de conventions, pour éviter la spéculation sur le foncier. La loi Alur a prévu d'étendre le périmètre des EPF pour couvrir tout le territoire.

Un projet de convention nationale entre les EPF, l'État et les Safer est en cours d'élaboration. Je rappelle toutefois que les EPF n'interviennent qu'à titre subsidiaire au titre de la préservation des espaces naturels et agricoles. Ils ne sauraient donc consacrer à ce type d'actions une part importante de leurs ressources financières.

M. Henri Cabanel.  - Les avancées sont inégales selon les territoires. Certains EPF ne passent pas de conventions avec les Safer. Pourquoi ne pas flécher une part de la taxe spéciale d'équipement finançant les EPF, dans la limite du plafond de 20 euros, vers les missions dédiées à la Safer, spécialiste des opérations foncières agricoles ?

Zones de revitalisation rurale

M. Franck Montaugé .  - La loi du 29 décembre 2015 de finances rectificative pour 2015 a modifié la définition des zones de revitalisation rurale (ZRR) à partir du 1er juillet 2017. Le classement en ZRR est désormais réalisé au niveau de l'intercommunalité, sans distinction entre les communes la composant. Selon la carte des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), le nouveau classement en ZRR compterait ainsi 1 000 communes de moins, notamment en zones hyper rurales et en cas de fusion d'EPCI.

Le Gouvernement prévoit-il des mesures transitoires pour les communes menacées de déclassement à cause d'une fusion d'EPCI ? Les exonérations de CFE pourraient-elles aussi être prolongées ?

M. Jean-Michel Baylet, ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales .  - La réforme des ZRR a été concertée. Les nouveaux critères permettent de conserver globalement au niveau national le même nombre de communes classées en ZRR. Nos simulations confirment cette stabilité. Je publierai très vite la nouvelle carte.

Dans le Gers, seuls quatre EPCI seraient pas en ZRR, du fait non de leur densité démographique mais du revenu fiscal médian de leurs habitants. La communauté d'agglomération Grand-Auch-Coeur de Limagne sortira du dispositif, c'est que le revenu fiscal médian de ses habitants est de 19 951euros alors que le plafond de classement est de 18 664 euros.

Les exonérations fiscales existantes seront prolongées pour ne pas pénaliser les zones concernées : aussi l'exonération de l'impôt sur les sociétés sera prolongée jusqu'au 31 juillet 2025, soit huit années au-delà de la réforme.

M. Henri Cabanel.  - Pour Grand Auch Coeur de Gascogne, au 1er juillet 2017, 29 communes sur 34 sortiront du dispositif ZRR. La loi prévoit que le classement en ZRR s'apprécie à l'échelle géographique du territoire de l'agglomération. Cette échelle XXL est-elle pertinente ? Sans doute pas pour la CFE. Il faudra revenir sur ce périmètre. La loi de programmation sur les territoires ruraux et hyper ruraux pourrait en être l'occasion.

Dotation globale de fonctionnement

M. Cyril Pellevat .  - Depuis 2015, les communes et intercommunalités peuvent connaître sur Internet le montant de leur DGF pour l'année en cours afin de préparer leurs budgets. Cette transparence révèle des inégalités importantes entre les communes, et une ponction énorme sur les collectivités qui représentera au total 28 milliards entre 2014 et 2017. Les collectivités territoriales peinent face à cette situation, ainsi que toute l'économie de nos territoires ruraux. Les conséquences sur les finances publiques locales sont lourdes, les collectivités représentant 70 % de l'investissement public.

Un mot sur le Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales (Fpic). Chamonix va devoir débourser 3,1 millions d'euros cette année, soit une augmentation de 46 % en un an, pour un budget de fonctionnement de la commune de 23 millions d'euros et de l'intercommunalité de 21. Est-ce ainsi que le Fpic va compenser des situations liées à la montagne et à la situation frontalière ? Le rapport de MM. Guené et Raynal de juin 2016 appelait à une redéfinition des indicateurs.

Le rapport de la Cour des comptes paru en décembre 2016 révèle des disparités qui vont du simple au triple. La Cour recommande une réforme de la DGF, pour réduire la composante forfaitaire, pour mieux prendre en compte la réalité des charges.

Faisons un état des lieux de la DGF, en cette fin de quinquennat.

M. Jean-Michel Baylet, ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales .  - Vaste question ! Rappelez-vous que nous avons dû rétablir les finances publiques et ramener le déficit public en dessous des 3 %. Cela a supposé une économie de 50 milliards d'euros entre 2014 et 2019. Cela fut fait. L'État a montré l'exemple, et les collectivités territoriales ont aussi participé, avec sérieux et courage. Le Gouvernement a augmenté la DETR de 62 % pour soutenir l'investissement local et créé le FSIL, doté d'1,2 milliard cette année - 600 millions pour la ruralité et autant pour l'investissement. L'investissement repart. Nous avons poursuivi une politique contractuelle : pacte État-régions ; pacte État-métropoles.

Devant le Congrès des maires, le président de la République a annoncé que l'effort demandé aux collectivités territoriales serait réduit de moitié, 1 milliard au lieu de 2.

Quant à la péréquation, il est logique que les communes saluent la péréquation verticale et se plaignent parfois de la péréquation horizontale, quand elles sont mises à contribution.

La DGF est inéquitable, illisible. Sa réforme sera reportée à 2018 pour accroître la concertation.

Enfin, la loi Montagne tiendra compte de la situation des communes frontalières.

M. Cyril Pellevat.  - Merci pour ces précisions. En Haute-Savoie, la baisse de la DGF et le prélèvement du FPIC entraînent une baisse d'investissements. Il importe de tenir compte des particularités des communes frontalières de montagne. Qu'on n'oublie pas la compensation genevoise !

CMP (Nominations)

M. le président.  - Il va être procédé à la nomination de sept membres titulaires et de sept membres suppléants de la commission mixte paritaire chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de programmation relatif à l'égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique.

La liste des candidats établie par la commission des lois a été publiée conformément à l'article 12 du Règlement. Je n'ai reçu aucune opposition. En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire : membres titulaires : Mme Catherine Troendlé ; MM. Mathieu Darnaud ; Michel Magras ; Mme Lana Tetuanui ; MM. Thani Mohamed Soilihi ; Serge Larcher ; Mme Gélita Hoarau ; membres suppléants : M. Guillaume Arnell ; Mmes Karine Claireaux ; Chantal Deseyne ; Vivette Lopez ; MM. Jean-François Mayet ; Georges Patient ; François Zocchetto.

Organisme extraparlementaire (Nomination)

M. le président.  - La commission de l'aménagement du territoire et du développement durable a proposé une candidature pour un organisme extraparlementaire. La présidence n'a reçu aucune opposition dans le délai d'une heure prévu par l'article 9 du Règlement. En conséquence, cette candidature est ratifiée et je proclame Mme Gélita Hoarau membre de la Commission nationale d'évaluation des politiques de l'État outre-mer.

La séance est suspendue à 12 h 30.

présidence de M. Gérard Larcher

La séance reprend à 14 h 15.

Éloge funèbre de Jean-Claude Frécon

M. Gérard Larcher, président du Sénat .  - (Mmes et MM. les sénateurs se lèvent, ainsi que M. le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement) C'est avec stupeur et une immense tristesse que nous avons appris, le samedi 10 décembre dernier, la brutale disparition de Jean-Claude Frécon, à l'âge de 72 ans.

Il avait été victime d'un infarctus massif, après avoir assisté au marché aux vins de Chavanay. Conduit à l'hôpital de Givors, il n'a pu être réanimé.

Sa générosité et son engagement total pour accomplir les mandats qui lui avaient été confiés auront eu raison de sa santé, que nous savions fragilisée par la charge de travail qu'il s'imposait.

Sa disparition a été un choc pour les sénatrices et les sénateurs, quelles que soient leurs sensibilités politiques, et bien sûr pour son département de la Loire, dont Jean-Claude fut une figure majeure durant des décennies.

Je lui ai rendu hommage, en votre nom, le 13 décembre dernier à l'occasion d'une émouvante cérémonie en l'église de Pouilly-lès-Feurs, au milieu de sa famille, de ses proches, de ses collègues et de ceux qui lui étaient chers.

J'étais accompagné du président du groupe socialiste et républicain, Didier Guillaume, et de la présidente de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication, Mme Catherine Morin-Desailly, aux côtés de nos collègues sénatrice et sénateurs de la Loire, Mme Cécile Cukierman, MM. Maurice et Bernard Fournier. Cet hommage devait trouver son prolongement dans notre hémicycle du Sénat.

Jean-Claude Frécon était un militant infatigable, un élu local et national exemplaire, un Européen convaincu et un défenseur inlassable des territoires ruraux.

Natif de Castellane dans les Alpes-de-Haute-Provence, c'est dans le département de la Loire qu'il a accompli toute sa carrière politique.

Il avait gardé de son métier d'instituteur, puis de directeur d'école, la passion d'enseigner et un sens de la pédagogie et de l'écoute dont il a fait des vertus majeures tout au long de son itinéraire public et politique. Mais il était aussi, depuis toujours, un homme de convictions qui aimait à dire : « Je suis toujours un militant dans l'âme. Je milite depuis l'âge de 11 ans. »

Jean-Claude Frécon fut, durant vingt-quatre années, le maire de sa commune de Pouilly-lès-Feurs, dont il avait été élu conseiller municipal dès 1971, à l'âge de 27 ans, avant d'en devenir le premier magistrat en 1983. Il était avant tout un élu de proximité qui a marqué l'histoire de sa commune. Il restera aux yeux des Pouillerots un maire actif, dynamique et apprécié pour sa capacité d'écoute, son dévouement inlassable, sa disponibilité à l'égard de ses concitoyens, son attachement à la dimension participative et festive de la vie communale.

Jean-Claude Frécon mesurait et subissait aussi le prix de cet engagement total. Il soulignait en ces termes la difficulté de la mission de maire dans nos territoires ruraux : « Les maires sont en contact direct 365 jours par an avec la population, 24 heures sur 24. C'est un travail passionnant mais le plus stressant de tous ».

Cette proximité absolue, qui est le coeur du mandat de maire, Jean-Claude Frécon a aussi tenu à la mettre au service de l'Association des maires de France, dont il fut le vice-président respecté de 1989 à 2006. Il fut aussi conseiller général du canton de Feurs de 1979 à 2002, président de la commission des transports de l'assemblée départementale.

L'engagement total et le sens du travail bien fait de Jean-Claude Frécon en faisaient aussi un défenseur convaincu de la limitation des mandats. Permettez-moi de lui donner à nouveau la parole : « Je n'aime pas faire les choses à moitié et si l'on ne peut pas faire un travail complètement, il faut s'en démettre ». Tenant à s'appliquer à lui-même ce principe, il renonça à son mandat de conseiller général en 2002 avant d'abandonner en 2006 ses fonctions de maire. Ce fut pour lui une décision douloureuse : « C'est une déchirure, le mandat de maire est un mandat passionnant, on est près des gens, on voit des choses concrètes se réaliser. Mais je savais qu'un jour ou l'autre il faudrait s'arrêter... ».

Jean-Claude Frécon se consacra alors, intensément, à son activité de parlementaire puisqu'il avait été élu sénateur de la Loire le 23 septembre 2001. Après avoir été, en 1985 et 1986, chargé de mission au cabinet de Jean Auroux, ministre de l'urbanisme, du logement et des transports, puis candidat aux élections législatives, Jean-Claude Frécon souhaitait fortement représenter son département de la Loire au Sénat de la République.

Sa marche vers le palais du Luxembourg fut un long chemin. Militant socialiste fidèle, élu local d'exception, spécialiste des finances locales, il fut candidat à plusieurs élections sénatoriales, avant d'être élu sénateur de la Loire en 2001 aux côtés de Josiane Mathon, de Michel Thiollière et de notre collègue Bernard Fournier. Dix années plus tard, il fut reconduit dans ce mandat qui lui était si cher.

Jean-Claude Frécon, qui avait visité chacune des 326 communes de la Loire, avait sans doute été le plus ému de tous lors de son élection. II se consacra dès lors, comme toujours, avec passion à son mandat, qu'il voulait exercer de manière plénière, dans toutes ses dimensions. Il s'investit pleinement pour la défense des territoires de la Loire et dans l'exercice de sa fonction de législateur, siégeant successivement à la commission des lois, puis à la commission des finances, dont il fut le vice-président, et enfin depuis 2014 à la commission de la culture.

Spécialiste reconnu des finances locales, ses rapports budgétaires annuels sur le conseil et le contrôle de l'État ou sur les engagements financiers de l'État faisaient autorité. Il y déplorait fortement que l'État se comporte trop souvent comme un actionnaire simplement financier.

Le travailleur infatigable qu'était Jean-Claude Frécon tenait aussi à participer pleinement à la mission de contrôle du Sénat. II mettait ainsi un point d'honneur à élaborer, presque chaque année, un rapport d'information sur les sujets les plus variés : Les avances aux services de l'État et aux organismes gérant des services publics, Les engagements hors bilan de l'État, La Cour nationale du droit d'asile, La réforme du Conseil économique social et environnemental, ou encore La sécheresse de 2003.

Il tenait à s'investir pleinement dans un certain nombre de groupes d'études et dans de nombreuses activités internationales, rédigeant, là aussi, des rapports concernant aussi bien le Brésil que les relations économiques et financières à reconstruire entre l'Iran et la France.

Jean-Claude Frécon, dont l'intérêt se portait sur les situations difficiles, présidait le groupe d'amitié avec le Kosovo et le groupe d'études et de contact du Sénat avec la République populaire démocratique de Corée.

Ce tour d'horizon des innombrables sujets qui le passionnaient serait toutefois très incomplet sans souligner la force des convictions européennes de Jean-Claude Frécon. Membre du Conseil de l'Europe, il participa dès 1994 aux travaux du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux. Il eut ainsi à observer de nombreuses élections locales dans les 47 pays membres de cette instance qui défend les droits de l'homme, la démocratie et le respect de l'État de droit.

L'investissement de Jean-Claude Frécon dans cette institution européenne fut consacré, vingt ans plus tard, par son élection à la présidence du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux. Ce fut, le 14 octobre 2014, un moment de grande émotion pour notre ami qui s'exprima en ces termes devant le Congrès réuni à Strasbourg : « C'est pour moi un immense honneur que vous venez de m'accorder. C'est, permettez-moi de le dire avec une grande sincérité, la consécration d'une carrière tout entière dédiée aux collectivités territoriales à travers toutes les fonctions que j'ai pu occuper dans mon pays ».

Orateur chaleureux, l'Européen Jean-Claude Frécon était avant tout un humaniste.

Il avait décidé de ne pas être candidat en septembre prochain au renouvellement de son mandat de sénateur. Il était venu m'en parler et adressa aux maires de son département un courrier rédigé en ces termes : « J'aurai passé seize ans dans cette fonction de sénateur et j'y ai connu beaucoup de satisfactions, avec énormément de travail, mais je ne le regrette pas car j'ai toujours eu le souci de nos communes. J'aurai en septembre prochain 73 ans et il sera temps pour moi de laisser la place à des plus jeunes avec la satisfaction d'avoir servi notre pays, notre département, nos communes et nos concitoyens ».

Le destin n'aura pas laissé à notre collègue le temps de bénéficier d'un repos pourtant si mérité. C'est un travailleur infatigable et un homme de bien qui nous a quittés.

En cette heure de partage et de recueillement, je souhaite redire notre sympathie attristée aux membres du groupe socialiste et républicain du Sénat et à ses collègues de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication.

Je souhaite aussi exprimer à son épouse Ginette, à ses trois enfants Éric, Isabelle et Christelle, à toute la famille de Jean-Claude Frécon et à leurs proches, ma profonde peine personnelle. En les écoutant à Pouilly-lès-Feurs, j'ai mieux perçu l'intime de Jean-Claude Frécon, les souffrances et les espérances, les douleurs et les rêves qu'il a emportés dans le secret de son coeur, sur une des routes de la Loire.

Jean-Claude Frécon restera présent dans nos mémoires.

M. André Vallini, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - C'est avec une grande tristesse que le Gouvernement a appris le 10 décembre que Jean-Claude Frécon nous avait quittés brutalement.

Enseignant par vocation, instituteur puis directeur d'école, Jean-Claude Frécon s'était engagé très tôt dans la vie associative de Pouilly-lès-Feurs, créant le comité des fêtes, mais aussi dans l'éducation populaire au sein de la fédération des oeuvres laïques, et dans la vie sportive avec le club de football. Il s'engagea aussi dans la vie syndicale, à l'UNSA, avant d'entrer dans la vie publique comme conseiller général du canton de Feurs, à 35 ans.

Quatre ans plus tard, il fut élu maire de Pouilly-lès-Feurs. Il devait le rester pendant vingt-trois ans. Pendant toutes ces années, il oeuvra jour après jour pour ses concitoyens et sut garder leur confiance, grâce à son inlassable dévouement. Apprécié dans son canton, il l'était aussi au conseil général et à l'Association des maires de France, de 1983 à 2006.

Élu local, viscéralement attaché à son territoire, Jean-Claude Frécon n'en était pas moins un Européen convaincu. Membre, dès les années quatre-vingt, de la délégation française à la Chambre des pouvoirs locaux du Conseil de l'Europe, il en gravit ensuite tous les échelons, jusqu'à en devenir président, puis président du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux en 2014. Il s'engagea avec passion sur bien des sujets : migrants et réfugiés, Ukraine, Iran, Corée du Nord.

Figure marquante du département de la Loire, il en fut tout naturellement élu sénateur en 2001, et réussit très vite à s'épanouir au sein de la Haute Assemblée, jusqu'à démissionner de ses fonctions de conseiller général et de maire.

Tous, nous nous souvenons d'un collègue chaleureux, travailleur, enthousiaste.

La dernière fois que je l'ai vu, il s'envolait pour une réunion du Conseil de l'Europe en Scandinavie. Il m'avait une nouvelle fois impressionné par sa sagacité sur la situation internationale et nationale.

Jean-Claude Frécon avait annoncé qu'il ne briguerait pas de nouveau mandat de sénateur, souhaitant passer le flambeau et profiter d'une retraite bien méritée après quarante ans au service de sa région et de son pays.

Durant toutes ces années, Jean-Claude Frécon a marqué l'histoire de son département. Il a brillamment représenté notre pays au Conseil de l'Europe. Il a ardemment défendu la diversité de nos collectivités locales au Sénat. Et il a toujours défendu avec fierté les couleurs de son idéal socialiste.

Par ma voix, le Gouvernement souhaite lui rendre un hommage appuyé.

À son épouse, à ses trois enfants, à ses amis, collaborateurs, concitoyens et collègues, j'adresse, au nom du Gouvernement et en mon nom personnel, mes condoléances les plus sincères et les plus attristées.

M. le président.  - Je vous invite maintenant à observer un moment de recueillement à la mémoire de Jean-Claude Frécon. (Mmes et MM. les sénateurs et M. le secrétaire d'État observent un moment de recueillement)

La séance est suspendue à 14 h 35.

présidence de Mme Jacqueline Gourault, vice-présidente

La séance reprend à 14 h 50.

Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe (Candidature)

Mme la présidente.  - J'informe le Sénat que le groupe socialiste et républicain a fait connaître à la présidence qu'il présente la candidature de Mme Marie-Françoise Perol-Dumont pour représenter la France en qualité de membre suppléant à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe.

Cette candidature a été publiée et sera ratifiée, conformément à l'article 9 du Règlement, s'il n'y a pas d'opposition à l'expiration du délai d'une heure.

Commission (Candidature)

Mme la présidente.  - J'informe le Sénat que le groupe communiste républicain et citoyen a fait connaître à la Présidence le nom de la candidate qu'il propose pour siéger à la commission de la culture, en remplacement de Jean-Claude Frécon, décédé.

Cette candidature a été publiée et la nomination aura lieu conformément à l'article 8 du Règlement.

Électricité, gaz et énergies renouvelables (Procédure accélérée)

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, ratifiant les ordonnances n°2016-1019 du 27 juillet 2016 relative à l'autoconsommation d'électricité et n°2016-1059 du 3 août 2016 relative à la production d'électricité à partir d'énergies renouvelables et visant à adapter certaines dispositions relatives aux réseaux d'électricité et de gaz et aux énergies renouvelables.

Discussion générale

Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargée de la biodiversité .  - Il y a dix-huit mois, à la suite d'une discussion parlementaire intense, la loi pour la transition énergétique et la croissance verte était promulguée. Sans attendre d'atteindre 32 % d'énergies renouvelables dans le mix énergétique d'ici 2030, le Gouvernement a publié dès le 24 avril le volet de la programmation pluriannuelle de l'énergie qui leur est dédié. Tripler la production électrique photovoltaïque, doubler la puissance éolienne, augmenter de plus de 50 % la production de chaleur renouvelable : l'ambition est considérable.

Depuis 2014, la puissance éolienne terrestre a déjà augmenté de 25 %, et les énergies renouvelables représentent désormais l'équivalent de six réacteurs nucléaires. Le fonds chaleur a accompagné 4 000 opérations pour un montant de 1,4 milliard d'euros. Cette dynamique se fait déjà ressentir sur la création d'emplois et la croissance. La filière photovoltaïque au 31 décembre 2015 employait 15 000 personnes, soit 15,6 % de plus en un an et 33,3 % de plus en deux ans, dans 800 sociétés. La première usine française de production d'éoliennes terrestres achève d'être construite en Isère.

Pour prolonger cette dynamique, l'ordonnance du 3 août 2016 prévoit de nouvelles procédures de mise en concurrence plus adaptées. Elle supprime la priorité d'appel accordée au charbon et étend aux zones non interconnectées celle qui existe en métropole continentale pour les installations produisant de l'électricité à partir d'énergies renouvelables.

L'ordonnance autorise aussi d'autres procédures de mise en concurrence que l'appel d'offres, comme le dialogue concurrentiel, afin de permettre l'évolution des projets au fil de la procédure et de réduire les délais : ainsi au large de Dunkerque ou d'Oléron.

Quant à l'ordonnance du 27 juillet 2016, elle fixe le cadre légal de l'autoconsommation d'électricité, dont le développement est bénéfique pour les énergies renouvelables, pour les réseaux comme pour la facture des consommateurs. Les appels d'offres pour le développement de l'autoconsommation dans les secteurs industriels, tertiaires et agricoles, ont rencontré un grand succès, les soixante-douze premiers lauréats sont déjà connus.

L'ordonnance définit l'autoconsommation et reconnaît notamment l'autoconsommation collective. Elle oblige les gestionnaires de réseau à faciliter de telles opérations et prévoit une tarification d'usage du réseau tenant compte du fait que l'autoconsommation limite celui-ci. Elle simplifie les procédures pour les installations de petite taille. L'Assemblée nationale et votre commission ont prévu en outre une exonération de contribution au service public de l'électricité (CSPE) et de taxes locales, à laquelle nous sommes très favorables. Ségolène Royal et moi-même nous félicitons de cette co-construction.

Outre ces ordonnances, la publication des décrets d'application de la loi de transition énergétique a été menée tambour battant : nous en sommes à 95 %. De même pour les appels d'offres.

L'article 2 interdit le cumul de la valorisation des garanties d'origine de l'électricité renouvelable avec le bénéfice d'un dispositif de soutien, tarif d'achat ou complément de rémunération. C'est nécessaire pour sécuriser des mécanismes de soutien dont nous avons obtenu la validation par la Commission européenne le 12 décembre. L'Assemblée nationale a préféré un système de mise aux enchères par l'État, et votre commission a encore amélioré la rédaction en autorisant un allotissement par filière et par zone géographique, c'est un équilibre bienvenu. Le décret sera publié dans les meilleurs délais, après concertation.

L'article 3 vise à diminuer les coûts de raccordement des installations de production d'énergies renouvelables grâce à la réfaction tarifaire. L'objectif est de favoriser le raccordement de petites et moyennes installations isolées, notamment en zone rurale. Certaines entreprises locales de distribution craignent que cela pèse sur leur trésorerie, mais ce n'est qu'une mesure d'équité. (M. Roland Courteau le confirme) Le coût de raccordement peut freiner des installations chez des particuliers ou des agriculteurs.

Le même article clarifie les conditions de l'indemnisation en cas de retard de raccordement des parcs éoliens en mer.

L'article 4 confie aux gestionnaires de réseau la coordination des opérations liées à la modification de la nature du gaz acheminé dans le réseau. Cela concerne particulièrement le Nord de la France, avec la baisse de la production du champ néerlandais de Groningue. Pour les consommateurs dont les appareils sont adaptables, l'ensemble des coûts seront pris en charge par les gestionnaires, qui les répercuteront sur les tarifs. Les plus vieux appareils, moins de 5 %, devront être remplacés, et il faudra accompagner financièrement les ménages en situation de précarité : nous accueillons très favorablement votre demande de rapport.

Je ne doute pas que notre débat enrichira encore ce projet de loi, et souhaite qu'il entre en vigueur au plus vite pour accélérer encore la transition énergétique. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur de la commission des affaires économiques .  - Les parlementaires, surtout lorsqu'ils sont dans l'opposition, n'aiment pas beaucoup le recours aux ordonnances.

M. Jean-Claude Lenoir, président de la commission des affaires économiques.  - On peut changer d'avis !

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur.  - Elles se justifient cependant lorsque le sujet est technique et qu'il y a urgence, surtout si le Parlement est ensuite saisi pour les ratifier explicitement comme c'est le cas aujourd'hui. Nous, parlementaires, n'avons parfois que ce que nous méritons lorsque nous empilons, jusqu'à plus soif, les articles additionnels : loi Macron, loi Travail, loi de transition énergétique, les textes doublent, triplent ou quadruplent de volume.

Sous ses abords techniques, ce texte comporte des enjeux importants. La première ordonnance qu'il nous est proposé de ratifier fixe un cadre légal à l'autoconsommation, ce qui contribuera à réduire les coûts du réseau à condition que des règles soient fixées pour bien synchroniser la production et la consommation, dimensionner les installations en fonction des besoins et s'assurer que l'électricité est produite près de là où elle est consommée. La commission vous proposera de limiter l'autoconsommation à un même site, faute de quoi l'on pourrait consommer à Paris l'électricité produite dans une résidence secondaire dans le midi...

La commission a approuvé la garantie d'accès au réseau, la possibilité de céder gratuitement ses surplus et la fixation d'un tarif d'accès propre aux petites installations ; elle y a ajouté des dispositions fiscales et techniques facilitatrices, élargissant par exemple le champ de l'autoconsommation collective pour autoriser les échanges d'énergie entre deux bâtiments.

La seconde ordonnance comporte des mesures techniques pour favoriser le développement des énergies renouvelables et améliorer leur intégration aux réseaux : formes de mise en concurrence alternatives à l'appel d'offres, coordination entre producteurs et gestionnaires de réseaux, extension de la priorité d'appel aux zones non interconnectées.

L'article 2 a trait aux garanties d'origine qui permettent aux fournisseurs de justifier de l'origine « 100 % verte » de l'électricité qu'ils vendent. Jusqu'ici, elles ne concernent que l'électricité non subventionnée, soit un quart de la production renouvelable. La version initiale du projet de loi interdisait les garanties d'origine en cas d'aide publique à la production, afin que le consommateur ne paie pas deux fois. Cela avait l'inconvénient d'empêcher la traçabilité de l'électricité verte subventionnée. C'est pourquoi les députés ont préféré une mise aux enchères par et au bénéfice de l'État, qui aura pour autre avantage de fournir des recettes en déduction des subventions aux énergies renouvelables. L'instauration d'un prix de réserve évitera de déstabiliser un marché où l'offre est déjà très excédentaire, et les plus petites installations seront dispensées d'inscription. C'est un bon compromis, auquel nous avons seulement apporté quelques compléments, comme la possibilité d'allotir par type de filière et par zone géographique.

L'article 3 rétablit la réfaction tarifaire, c'est-à-dire le financement partiel par le tarif d'utilisation des réseaux publics d'électricité (Turpe) du raccordement des installations d'énergies renouvelables. Cela peut favoriser les projets éloignés des réseaux, notamment en milieu rural, et nous avons après analyse approuvé un dispositif dont les inconvénients avaient été corrigés par l'Assemblée nationale : modulation du taux de réfaction pour aider les petits producteurs plus que les gros, extension du mécanisme au biogaz. Quant aux petits gestionnaires, qui craignent que ce mécanisme ne pèse sur leur trésorerie avant remboursement par le Turpe, qu'ils se rassurent : outre la modulation prévue, nous proposerons d'abaisser de 50 à 40 % le taux maximal.

Le députés ont introduit un régime indemnitaire spécifique en cas de retard de raccordement des énergies renouvelables en mer dont le coût, certes plafonné, sera pris en charge en tout ou partie par le Turpe, le reste relevant du gestionnaire du réseau de transport, RTE, selon que sa responsabilité sera engagée ou non. Il pourrait en coûter plusieurs centaines de millions d'euros. Cela dit, la spécificité des risques, comme la faillite d'un câblier, justifie ici un régime dérogatoire et une socialisation partielle du risque.

Enfin l'article 4 aborde un sujet qui a son importance pour les Hauts-de-France qui ne seront bientôt plus fournis en gaz néerlandais de type B, mais en gaz de type H. Cela concerne 10 % de la consommation nationale et 1,3 million de clients.

Or, si la question avait déjà été abordée dans la loi de transition énergétique, il est apparu nécessaire de compléter ce cadre législatif, notamment pour permettre aux gestionnaires de réseaux d'intervenir sur les installations intérieures de gaz afin de les contrôler et, le cas échéant, de les adapter ou de les régler. Il s'agira d'une opération d'ampleur puisque, sur la période 2016-2029, 650 millions d'euros devraient être engagés et couverts par les tarifs de réseaux, dont 400 millions pour les seules opérations de contrôle.

Il reste cependant deux sujets à traiter, sur lesquels j'espère que le Gouvernement pourra nous éclairer. Les sites de stockage, d'abord, qui devront aussi être adaptés et ne sont pas inclus dans le dispositif.

Rien n'est prévu pour accompagner les personnes à revenu modeste qui devront remplacer leur appareil. L'article 40 s'opposant à la création d'une aide, la commission, contrairement à son habitude, demandera la remise d'un rapport sur le sujet ; il permettra au Gouvernement d'avancer dans sa réflexion d'ici la prochaine loi de finances.

Sous réserve de l'adoption de quelques amendements complémentaires, je vous proposerai d'adopter ce texte ainsi amendé. (Applaudissements à droite et au centre ; M. Alain Bertrand applaudit également)

M. Roland Courteau .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain) Il est rare que les projets de ratification d'ordonnance soient inscrits à l'ordre du jour. Ce texte sécurise des dispositifs juridiques qui boosteront la transition énergétique, chantier législatif majeur sur lequel la France est en pointe, ce qui a contribué au succès de la COP21.

Le projet de loi ratifie deux ordonnances et comprend également de nombreuses mesures sur le réseau d'électricité et de gaz ainsi que sur les énergies renouvelables.

L'ordonnance de juillet 2016 sur l'autoconsommation répond à une forte attente des citoyens qui souhaitent produire leur propre électricité, ce que facilite la baisse du prix des panneaux solaires, de 80 % entre 2009 et 2015. Même s'il est favorisé par l'envol des factures d'électricité, le choix de l'autoconsommation reste coûteux et doit donc être encouragé.

Il convenait aussi de fixer un cadre pour éviter les risques liés à un développement incontrôlé, comme l'apparition de réseaux de distribution sauvages, les transferts de charges vers les autres utilisateurs ou les difficultés pour le réseau de transport.

La seconde ordonnance supprime le plafonnement législatif de 12 MWh pour favoriser l'intégration des énergies renouvelables aux réseaux. Je me félicite de la simplification des procédures d'appel d'offres, avec la procédure plus souple du dialogue concurrentiel, de la suppression de l'appel en priorité par RTF des centrales à charbon, et de la priorité d'appel des producteurs d'énergie renouvelable dans les zones non interconnectées.

L'article 2 interdit le cumul de la valorisation de la garantie d'origine avec des dispositifs de soutien public, pour éviter que le consommateur ne paie deux fois son énergie. Il encourage le développement de nouvelles capacités renouvelables.

Le risque était que cette interdiction ne conduise à supprimer toute traçabilité de l'énergie. Or l'État détiendra le bénéfice des garanties d'énergies produites avec mécanisme de soutien et pourra les mettre aux enchères aux producteurs, qui pourront ainsi proposer des offres vertes aux consommateurs. Les recettes de ces enchères allègeront les charges du service public de l'électricité. L'amendement adopté en commission donne de la flexibilité mais compromet l'équilibre global du texte en supprimant la traçabilité totale. Nous sommes donc sceptiques.

L'article 3 crée une réfaction tarifaire pour financer, en partie, grâce au Turpe, les coûts de raccordement au réseau de distribution, notamment dans les zones isolées. Le reste à charge restera supérieur à 50 %, ce qui incitera les producteurs à localiser de façon optimale les installations. La réfaction sera compensée par une hausse du tarif de 0,65%, ce qui représente 80 à 90 millions d'euros sur un Turpe de 13 milliards.

Je salue les dispositions encourageant les éoliennes en mer : il fallait un régime particulier en cas de non-respect des délais, selon qu'il est imputable ou non au gestionnaire - d'autant qu'il y aura bientôt des éoliennes au large des côtes audoises, en face de Gruissan et de Leucate. Merci au ministère de ce choix pertinent ! (Sourires)

L'article 5 concerne le projet Tulipe dans les Hauts-de-France, de conversion du gaz B en gaz H : il faut couvrir les surcoûts pour les consommateurs précaires obligés de remplacer leur équipement. L'article 40 interdisant de créer une aide à caractère social, nous nous rallierons à la position du rapporteur.

Pour réussir la transition énergétique, il faut être innovant. Ce texte l'est. Nous le voterons avec enthousiasme. (Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste et républicain et RDSE)

M. Jean-Pierre Bosino .  - Notre système électrique est le produit d'un projet collectif incarné par l'entreprise publique EDF-GDF, sur la base de la péréquation tarifaire, de l'égalité de traitement entre monde rural et urbain, entre zones riches et défavorisées. La libéralisation du marché de l'énergie devait garantir la sécurité d'approvisionnement à un coût acceptable. On en est loin, avec douze millions de précaires énergétiques. Le Gouvernement, qui promeut l'effacement des foyers plutôt que des entreprises, renonce à faire de l'État le garant de la solidarité nationale.

Parallèlement, la Commission européenne élabore le cadre juridique de l'autoconsommation des énergies renouvelables, le paquet énergie propre étant marqué par la volonté de donner aux citoyens européens un pouvoir de contrôle accru sur la production et la consommation d'énergie.

C'est dans ce contexte de démantèlement d'un modèle centralisé qui a fait ses preuves que s'inscrit ce texte. Ainsi de la modification des conditions de raccordement ou de la valorisation des garanties d'origine. Le texte confond malheureusement production d'énergie renouvelable d'une part et autoconsommation et autoproduction d'autre part. Il autorise l'autoconsommation collective : les logements collectifs ou centres commerciaux pourront produire leur électricité, ce qui peut être positif, mais aussi la vendre en dérogeant à l'obligation de contracter avec un tiers.

De même, le dialogue concurrentiel remplace l'appel d'offre - procédure saluée par la Commission de régulation de l'énergie (CRE) mais qui nous éloigne de l'objectif de maîtrise publique accrue du secteur de l'énergie, pour le plus grand profit de quelques opérateurs privés.

On ne peut faire payer au consommateur le surcoût des aides aux investisseurs dans l'éolien, arrivé à maturité avec un chiffre d'affaires de 10 milliards d'euros en France. Le recours exclusif au secteur privé, guidé par une logique de profit à court terme, n'est pas à la hauteur des enjeux de la transition énergétique, qui nécessite un temps long et des investissements publics.

Le Conseil d'État a déploré l'insuffisance des études d'impact. Certes, l'autoconsommation méritait un cadre légal, mais le risque de transfert de charge vers les autres utilisateurs est réel, sans parler de la baisse des recettes fiscales. En effet, on exonère les autoconsommateurs de CSPE, même quand ils ne consomment pas entièrement l'énergie produite !

Nous ne pourrons pas voter ce texte qui entérine la casse de notre système unifié de production et de distribution. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)

M. Jean-Claude Requier .  - Le passage d'une économie fondée sur les énergies fossiles à un modèle sobre en carbone peut être créateur d'emplois, à condition d'un cadre juridique et financier stable. La politique énergétique, coûteuse pour les finances publiques, doit être plus efficace. Sans pour autant faire le bilan du quinquennat - même si c'est à la mode (Sourires) - je déplore qu'elle ait manqué de lisibilité, notamment concernant le nucléaire, sans lequel aucune transition n'est possible.

M. Olivier Cigolotti.  - Bravo !

M. Jean-Claude Requier.  - À Fessenheim, c'est l'impasse !

MM. Ladislas Poniatowski, rapporteur, et Jacques Mézard.  - Très bien.

M. Jean-Claude Requier.  - Ce texte ratifie deux ordonnances essentielles dans un contexte de décentralisation énergétique. Je partage les remarques du rapporteur sur le risque d'un développement massif non maîtrisé de l'autoconsommation, même si celle-ci reste très en-deçà en France de ce qu'elle est au Royaume-Uni ou en Espagne. Alors qu'il était jusqu'ici plus avantageux de revendre l'électricité produite, les choses changent, avec la hausse de la facture conjuguée à la baisse du prix des installations d'autoconsommation. La part des demandes de raccordement est passée de 4 % en 2013 à 37 % en 2016, en dépit d'un coût qui reste élevé.

Le projet de loi fixera un cadre légal, adaptant la tarification aux petites installations d'une puissance inférieure à 100 MWh qui sollicitent moins le réseau et seront exonérés de l'obligation de conclure un contrat de revente avec un tiers pour le surplus d'électricité non consommée.

La deuxième ordonnance étend la priorité d'appel dans les zones non interconnectées, améliore la coordination entre producteurs et gestionnaires de réseau et crée de nouvelles formes de mise en concurrence. L'article 2 prévoit la mise aux enchères des garanties d'origine pour assurer la traçabilité de l'énergie verte et prémunir les consommateurs contre un double paiement.

La réfaction tarifaire introduite à l'article 3 est une bonne nouvelle pour les zones rurales, où les coûts de raccordement sont prohibitifs. Le texte instaure aussi régime d'indemnisation spécial en cas de retard des installations en mer.

Ce texte prépare l'avenir et contribue à la lutte contre le changement climatique. Le groupe RDSE le votera à l'unanimité. (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE et sur quelques bancs du groupe socialiste et républicain)

Mme Anne-Catherine Loisier .  - Nous devons diversifier notre bouquet énergétique en renforçant la part des énergies renouvelables et prendre le virage de la croissance verte, déclinée dans la loi de transition énergétique. L'autoconsommation d'électricité connait une croissance dynamique, même si elle ne représente que 4,2 %, contre 8 % en Allemagne ou 13 % au Royaume-Uni et en Espagne, en dépit d'une forte demande sociale en sa faveur. Elle bénéficie d'avancées technologiques qui font augurer de belles perspectives, notamment dans le domaine de l'habitat propre.

Le groupe UDI-UC souscrit pleinement à ces ordonnances qui autorisent à déroger à l'obligation de contrat de vente, chargent la CRE de fixer un Turpe spécifique et prévoit des exonérations de CSPE pour les petites installations. Soixante-dix projets de taille intermédiaire ont été désignés par un appel d'offres. Si le solaire est la source d'énergie la plus utilisée, assurons-nous toutefois de bien favoriser la filière française...

S'agissant de la traçabilité, le texte interdit les cessions de garanties d'origine bénéficiant d'un soutien public et instaure un système de vente aux enchères afin d'encourager un nouveau modèle de financement des énergies renouvelables fondé sur la valeur de la garantie d'origine.

L'extension de la réfaction tarifaire répond à une attente des territoires ruraux, notamment des agriculteurs, freinés par les coûts de raccordement au réseau.

Le rapporteur propose de plafonner à 40 % le taux de réfaction, nous +y souscrivons. La fixation d'un Turpe spécifique ne contrevient pas au principe de péréquation tarifaire, c'est essentiel. Attention toutefois aux effets pervers : le coût pour le Turpe sera de 70 millions d'euros par an, à comparer au Turpe financé de 13,5 milliards. Nous resterons vigilants pour éviter tout renchérissement de la facture pour le consommateur.

Attaché au développement des énergies renouvelable, le groupe UDI votera ce texte facilitateur. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Charles Revet.  - Très bien.

M. Hervé Poher .  - Ce texte est très technique, mais la technique est parfois nécessaire. Certains de nos collègues se sont spécialisés et c'est tant mieux pour ceux, comme moi, qui sont allergiques aux acronymes. Mon approche sera plus philosophique que technique.

En février 2015, nous discutions de la loi de transition énergétique. Le 16 novembre 2015, nous adoptions à l'unanimité une résolution avant la COP 21 pour rappeler le rôle des collectivités territoriales. Dernièrement, nous débattions du recul du trait de côte. Ces dossiers sont liés, qu'il s'agisse des causes comme des conséquences. La réponse ne pourra être que collective, associant État, collectivités territoriales, entreprises, citoyens.

Lorsqu'on travaille sur un projet de territoire à énergie positive, on cherche à diminuer la consommation tout en augmentant la production d'énergie sur le territoire. Cela oblige à réfléchir à la vie énergétique d'un territoire et sur l'acceptabilité des différentes options.

Toutes les énergies renouvelables sont à valoriser, tous les maitres d'ouvrage sont à accompagner. Il faut des relais sur le terrain, faute de quoi, la belle idée de la transition énergétique, de la diversification du mix énergétique, restera une utopie - même si les utopies sont parfois utiles !

Autrement dit, si nous voulons réussir la transition énergétique, nous devons encourager les initiatives citoyennes, promouvoir le droit à l'expérimentation, abandonner le réflexe centralisateur. Le texte améliore la situation des consommateurs de gaz des Hauts-de-France : merci ! (Sourires)

M. Labbé a déposé des amendements de précision à l'article 2.

Le groupe écologiste votera ce texte, non pour des affaires de Turpe et de réfaction (sourires), mais parce qu'il est une avancée pour les vrais acteurs citoyens de la transition énergétique. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste et républicain, du groupe RDSE et sur quelques bancs du groupe communiste républicain et citoyen)

M. Franck Montaugé .  - Que de chemin parcouru depuis la loi sur la transition énergétique en juillet 2015. La stratégie nationale bas-carbone a été la base de la contribution française à l'accord de Paris. La stratégie nationale de développement de la mobilité propre est plus que jamais d'actualité. Les territoires se sont engagés dans la transition énergétique, se sont saisis du dispositif territoire à énergie positive. Dans mon agglomération, c'est un succès et une aide considérable pour les maires.

Le fonds de financement de la transition énergétique dont les crédits ont triplé, de 250 à 750 millions d'euros, allège les budgets des collectivités territoriales, en facilitant la transition énergétique. Certificats d'économies d'énergie, chèques énergie, crédits d'impôt bénéficient aux plus modestes.

L'autoconsommation participe de ce volontarisme en matière de transition énergétique - mais la question de la péréquation tarifaire, gage d'équilibre entre les territoires, ne peut être éludée. On s'éloigne de notre modèle centralisé, vertical, (M. Jean-Pierre Bosino le confirme). L'exonération de CSPE ne risque-t-elle pas de générer des distorsions ? Si les modes de production autonomes se développent, comment éviter les disparités de coûts et garantir le recours assurantiel au réseau classique ? Selon France Stratégie, la logique du tout décentralisé voudrait que les investissements soient portés par les collectivités territoriales.

L'hypothèse d'une coexistence entre le système actuel et des boucles locales suppose une tarification adaptée en fonction de la puissance installée, qui reflète les coûts. Vu les difficultés que rencontrent les collectivités à financer le très haut débit, cela mérite réflexion... Loin de moi l'idée de remettre en cause le développement des systèmes locaux de production, mais j'attire l'attention sur ce changement de paradigme. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

M. Jean-Claude Lenoir, président de la commission des affaires économiques .  - Je regrette que le Gouvernement ne souhaite pas intervenir - cela aurait été bienvenu après ce que vient de souligner M. Montaugé.

La péréquation tarifaire est au coeur de notre modèle depuis l'après-guerre. (M. Jean-Pierre Bosino renchérit) Mais nous assistons à des dérives. Il y a ainsi eu des tentatives, dans la loi Maptam, visant à introduire un droit pour les régions de s'organiser de manière autonome en matière d'électricité et de gaz. Dans la loi sur la transition énergétique, certains ont proposé que les îles bretonnes puissent se déconnecter du réseau... Le Sénat a mis le holà à ces initiatives.

Le débat a été relancé avec la primaire de la gauche. Le candidat ayant recueilli le plus de suffrages s'est ainsi prononcé, lors d'un débat télévisé, pour l'autoconsommation et pour l'autonomie des territoires.

M. Jean-Claude Requier.  - Il est bobo !

M. Jean-Claude Lenoir, président de la commission.  - Je le dis avec fermeté : c'est une idée perverse qui se retournera contre nos territoires. Le Sénat est unanime, je pense, pour dire qu'il n'est pas question pour nous de toucher au principe républicain de la péréquation tarifaire. Cela signerait l'abandon de nos territoires ruraux. Je souhaite, chers collègues, que vous manifestiez votre adhésion à ces propos ! (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains, UDI-UC, RDSE ainsi que sur plusieurs bancs du groupe socialiste et républicain)

Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État .  - Il n'est pas question de remettre en cause la péréquation tarifaire...

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur.  - C'est mieux de le dire !

Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État.  - Pour un même usage, le tarif doit être le même sur tout le territoire national - il peut varier selon les usages, en revanche, dès lors qu'il y a encadrement.

On quitte un système très centralisé pour aller vers un système qui, grâce aux énergies renouvelables, permettra aux territoires d'avoir une certaine autonomie.

M. Jean-Claude Lenoir, président de la commission.  - Ça, non !

Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État.  - C'est un choix politique.

M. Jean-Claude Lenoir, président de la commission.  - Clairement !

Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État.  - Le monde change, engageons-nous pour la transition énergétique, sans oublier que les citoyens ont droit à une égalité de traitement.

La discussion générale est close.

Discussion des articles

L'article premier est adopté, ainsi que l'article premier bis AA et l'article premier bis AB.

ARTICLE PREMIER BIS AC

Mme la présidente.  - Amendement n°18, présenté par M. Courteau et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 2

Remplacer les mots :

plus de

par les mots :

au moins

M. Roland Courteau.  - Cet article définit les critères selon lesquels l'autorité administrative sélectionne les projets.

La commission a prévu que le prix compte pour plus de la moitié dans la notation des candidatures. Il faut certes privilégier les projets les moins onéreux pour la collectivité, mais aussi tenir compte des critères environnementaux comme la performance énergétique, qui réduit à terme le coût d'usage. Nous proposons que le prix représente « au moins » la moitié de la note. À titre personnel je serais allé plus loin.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur.  - Avis défavorable. Admettons que la différence est minime, pour le moins ! M. Courteau souhaitait à titre personnel, en fait, plafonner à 50 % le critère du prix dans la note.

Nous sommes nombreux à être, encore pour quelques mois, élus locaux. Nous savons que le prix est un critère important ; dans certains appels d'offre, il ne peut dépasser 35 % de la note. 50 % ou plus c'est un bon critère. Retrait ?

Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État.  - Sagesse. (Sourires)

M. Roland Courteau.  - En effet, je voulais plafonner le critère prix à 50 %. Mais je présente la position de mon groupe.

L'amendement n°18 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°24, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission.

Alinéa 3

Rédiger ainsi cet alinéa :

2° Au 4°, après le mot : « territoire », sont insérés les mots : « ou à proximité du territoire ».

L'amendement rédactionnel n°24, accepté par le Gouvernement, est adopté.

L'article premier bis AC, modifié, est adopté.

ARTICLE PREMIER BIS AD

Mme la présidente.  - Amendement n°9, présenté par M. Courteau et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 2

Supprimer cet alinéa.

M. Roland Courteau.  - Il est nécessaire que certaines installations puissent bénéficier plusieurs fois d'un contrat de complément de rémunération. L'article L. 314-19 restreint déjà la possibilité de conclure des contrats de complément de rémunération après avoir bénéficié d'un contrat d'achat. Mieux vaut prolonger leur durée d'exploitation plutôt qu'inciter à remplacer les installations amorties.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur.  - La commission se rallie à cet amendement. L'article 314-21 du code de l'énergie permet déjà de bénéficier plusieurs fois du complément de rémunération. Et mieux vaut inciter les propriétaires d'installations à les rénover plutôt qu'à tout casser pour reconstruire du neuf !

Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État.  - Avis très favorable.

L'amendement n°9 est adopté.

L'article premier bis AD, modifié, est adopté.

L'article premier bis AE est adopté.

ARTICLE PREMIER BIS A

Mme la présidente.  - Amendement n°25, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission.

Rédiger ainsi cet article :

I. - Le 4° du V de l'article L. 3333-2 du code général des collectivités territoriales est ainsi rédigé :

« 4° Produite et utilisée dans les conditions du 4° du 5 de l'article 266 quinquies C du code des douanes. »

II. - Le code des douanes est ainsi modifié :

1° Au a du 3 de l'article 265 bis, au a du 5 de l'article 266 quinquies et au 1° du 5 de l'article 266 quinquies B, les mots : « V de l'article L. 3333-2 du code général des collectivités territoriales » sont remplacés par les mots : « 5 de l'article 266 quinquies C » ;

2° Le 4° du 5 de l'article 266 quinquies C est complété par deux phrases ainsi rédigées :

« Cette disposition s'applique également à la part, consommée sur le site, de l'électricité produite par les producteurs d'électricité pour lesquels la puissance de production installée sur le site est inférieure à 1 000 kilowatts. Pour les installations de production d'électricité utilisant l'énergie solaire photovoltaïque, la puissance installée s'entend de la puissance crête installée. »

III. - Les I et II s'appliquent à compter du premier jour du trimestre civil suivant la promulgation de la présente loi.

IV. - La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales des I à III est compensée à due concurrence par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.

V. - La perte de recettes résultant pour l'État du IV est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur.  - L'article 1er bis A tel qu'introduit par l'Assemblée et amendé par votre commission clarifie le droit applicable en matière d'exonération de contribution au service public de l'électricité (CSPE) et de taxes locales sur l'électricité au bénéfice des autoconsommateurs.

Mais il faut préciser que cette exonération ne vaut que si l'énergie n'est pas entièrement consommée, et modifier la date d'entrée en vigueur.

Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État.  - Avis très favorable. Je lève le gage.

L'amendement n°25 rectifié est adopté.

L'article premier bis A est ainsi rédigé.

ARTICLE PREMIER BIS

Mme la présidente.  - Amendement n°19, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission.

Rédiger ainsi cet article :

L'article L. 315-1 du code de l'énergie est ainsi rédigé :

« Art. L. 315-1.  -  Une opération d'autoconsommation individuelle est le fait pour un producteur, dit autoproducteur, de consommer lui-même et sur un même site tout ou partie de l'électricité produite par son installation. La part de l'électricité produite qui est consommée l'est soit instantanément, soit après une période de stockage. »

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur.  - Nous entendons préciser qu'une opération d'autoconsommation individuelle doit être circonscrite géographiquement à un « même site ». À défaut, le statut d'autoconsommateur pourrait être ouvert à des clients résidentiels qui produiraient de l'électricité dans leur résidence secondaire et la consommeraient dans leur résidence principale, ou des clients non résidentiels qui exploiteraient une centrale photovoltaïque dans le sud de la France et consommeraient sur d'autres sites ailleurs en France.

Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État.  - Avis favorable.

L'amendement n°19 est adopté.

L'article premier bis est ainsi rédigé

ARTICLE PREMIER TER

Mme la présidente.  - Amendement n°5, présenté par M. Courteau et les membres du groupe socialiste et républicain.

1° Première phrase

Remplacer les mots :

de distribution publique d'électricité

par les mots :

public de transformation d'électricité de moyenne en basse tension

2° Seconde phrase

Remplacer les mots :

Les chapitres III et

par les mots :

Le chapitre

M. Franck Montaugé.  - La notion de « poste de distribution publique d'électricité » englobe également les postes de transformation de haute en moyenne tension dits « postes sources » ; la rédaction actuelle viserait donc également tous les départs moyenne tension, alors que l'intention de la Commission était d'étendre le dispositif à tous les départs « basse tension ».

L'autoconsommation « collective », qui s'exerce entre producteurs et consommateurs « liés entre eux au sein d'une personne morale » ne saurait être qualifiée d'activité « d'achat pour revente », puisque c'est bien l'électricité produite par cette personne qui est consommée.

En revanche si de l'électricité est achetée par cette personne à un tiers, cette activité sort du périmètre de l'autoconsommation collective ; dans ce cas, une dispense d'autorisation d'achat pour revente permettrait de contourner facilement le dispositif de l'autoconsommation en le transformant en une simple activité de fourniture, qui pourrait concerner un volume important de consommateurs et d'électricité pour une autoproduction symbolique.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur.  - Votre amendement est conforme à la position initiale de la commission : avis favorable. La suppression de la dispense d'autorisation d'achat pour revente est une précision bienvenue.

Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État.  - Avis favorable.

L'amendement n°5 est adopté.

L'article premier ter, modifié, est adopté.

L'article premier quater est adopté, ainsi que les articles premier quinquies et premier sexies.

ARTICLE 2

M. Roland Courteau .  - Énercoop nous a alertés sur l'échéance de validité des garanties d'origine prévue par le décret du 11 juillet 2016. Il y a un risque que les garanties d'origine de 2017 ne puissent pas être émises à temps ni par les producteurs, ni par l'État, ce qui pose un problème de traçabilité. Lors de la dernière désignation, il a fallu attendre quelques mois pour que le gestionnaire soit opérationnel. Madame la ministre, pouvez-vous nous rassurer sur la mise en oeuvre d'un registre opérationnel de garantie d'origine ?

Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État.  - Certainement : le décret sera publié d'ici avril, de manière que le dispositif s'applique rapidement.

Mme la présidente.  - Amendement n°14, présenté par M. Courteau et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 12

Après les mots :

Les installations

insérer les mots :

qui produisent de l'électricité à partir de sources renouvelables

M. Franck Montaugé.  - Cet amendement précise que l'obligation d'inscription sur le registre ne concerne que les installations produisant de l'électricité à partir d'énergies renouvelables et non pas les autres installations telles que les installations de cogénération, qui peuvent également bénéficier d'un dispositif de soutien.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur.  - Précision utile : avis favorable.

Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État.  - Avis favorable.

L'amendement n°14 est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°11, présenté par M. Poher et les membres du groupe écologiste.

Alinéa 13

Remplacer les mots :

à sa demande

par les mots :

à la demande de l'État ou des candidats qui participent aux enchères mentionnées au troisième alinéa

M. Hervé Poher.  - Cet amendement et le suivant reviennent à la rédaction de l'Assemblée nationale pour garantir les possibilités d'Énercoop.

Les modifications apportées en commission sur l'émission partielle ou totale des garanties d'origine dans le cadre de la mise aux enchères sont les bienvenues car elles permettront de limiter les coûts de la mise aux enchères aux seules garanties d'origine demandées, sans créer d'offre excédentaire.

Cependant, il convient aussi de garantir que l'offre correspond bien à la demande. C'est pourquoi nous proposons que l'évaluation de la quantité de garanties d'origine mise aux enchères régulièrement se fonde sur la demande en garanties d'origine prévue par l'État et par les candidats participants à la mise aux enchères prévues.

Mme la présidente.  - Amendement n°12, présenté par M. Poher et les membres du groupe écologiste.

Alinéa 14, dernière phrase

Rédiger ainsi cette phrase :

Un allotissement par installation, par filière et par zone géographique est prévu sur demande des candidats qui participent aux enchères.

M. Hervé Poher.  - Cet amendement optimise les allotissements à prévoir dans le cadre des enchères sur les garanties d'origine issues d'installations de production d'électricité de source renouvelable en ouvrant la possibilité d'organiser des allotissements par installation.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur.  - Le système Énercoop n'est en rien menacé. Je comprends l'objectif de votre amendement n°11, mais le dispositif qu'il propose est contre-productif et impossible à réaliser juridiquement. Comment des candidats à un appel d'offres pourraient-ils en déterminer à l'avance les modalités sans acheter eux-mêmes ? Les fournisseurs auraient intérêt à exiger le plus grand nombre de garanties - ce qui n'est pas votre intention. Retrait ?

Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État.  - De plus en plus de consommateurs veulent consommer de l'énergie renouvelable ; le Gouvernement soutient cette démarche. Les amendements du Sénat la faciliteront. Le décret d'application sera pris le plus tôt possible.

L'amendement n°11 pose des problèmes techniques et juridiques. Tout acteur peut vouloir acquérir des garanties : comment prévoir que l'un d'entre eux puisse exiger une procédure concurrentielle ? Le Gouvernement entend bien proposer suffisamment de garanties.

Il y a aujourd'hui 11 000 installations d'énergies renouvelables produisant plus de 100 kW ; un allotissement par installation aurait un coût bien trop élevé. L'allotissement par filière et par zone géographique est suffisant. Retrait de l'amendement n°12 ?

J'entends bien l'inquiétude des fournisseurs qui produisent de l'énergie 100 % renouvelable. Ils veulent que leur modèle soit préservé - il le sera.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur.  - Même avis défavorable à l'amendement n°12 : l'argument des 11 000 appels d'offres à organiser est décisif.

L'amendement n°11 est retiré, ainsi que l'amendement n°12.

L'article 2 est adopté.

ARTICLE 3

M. Jean-Claude Lenoir, président de la commission .  - Dans la facture d'électricité, une moitié concerne la distribution et l'autre la production.

La Commission de régulation de l'énergie (CRE) fixe les tarifs d'utilisation. Aujourd'hui, 24 janvier, la proposition de la CRE est d'augmenter de 2,71 % pour la production et de 6 % pour le transport : ce n'est pas rien. Pour la première fois, le Gouvernement refuse ces chiffres, considérant cette augmentation comme insuffisante pour les besoins de la transition énergétique, et il demande une seconde délibération. La balle est dans votre camp, madame la ministre, quelle augmentation souhaitez-vous que la CRE fixe ?

Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État .  - Mme Royal a donné des orientations politiques à la CRE ; elle ne demande pas d'augmentation tarifaire, mais que le tarif prenne en compte le financement de la transition énergétique.

M. Jean-Claude Lenoir, président de la commission.  - Ce n'est pas le sujet !

Mme la présidente.  - Amendement n°4 rectifié quinquies, présenté par M. Mouiller, Mme Primas, MM. Huré, D. Laurent, Kern et Chasseing, Mme Giudicelli, MM. Pointereau, Longeot, Genest, Pierre, Laufoaulu et Guerriau, Mme Deromedi, MM. Bignon et Morisset, Mme Deroche, M. Trillard, Mme Lamure, MM. del Picchia, G. Bailly, Mandelli, L. Hervé, P. Leroy, Revet, Charon, Rapin, Laménie, Longuet, Détraigne, Raison et Perrin, Mme Doineau, M. Cuypers, Mme Billon et M. Gremillet.

Alinéa 8

Après le mot :

raccordées

insérer les mots :

en basse tension

M. Philippe Mouiller.  - Les petits sites de 3 à 250 kWh, que sont par exemple les toits de hangars agricoles, ne sont pas soumis aux mêmes contraintes que les grands sites, dont le raccordement coûte 4 %. Une prise en charge partielle de ce dernier coût mettrait en difficulté les GRD ruraux qui supportent des investissements très lourds. La compensation par le Turpe ne suffirait pas.

Cet amendement réserve le bénéfice de la prise en charge du raccordement à ces petits sites.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur.  - J'ai demandé aux auteurs de cet amendement de le déposer en séance, alors que mes explications les conduisaient à le retirer : il faut rassurer.

L'Assemblée nationale a répondu à votre première préoccupation : le taux sera différent selon la taille des sites ; les grosses installations n'en ont pas besoin, les hangars agricoles oui.

La commission sénatoriale a répondu à votre deuxième préoccupation : la compensation du Turpe nécessitait une avance de trésorerie par les producteurs - ce qui peut être difficile pour les plus petits : nous avons baissé le plafond en deçà duquel les producteurs ne sont pas soumis à l'obligation. Retrait de cet amendement satisfait ?

Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État.  - Rien à ajouter à cette excellente explication.

M. Philippe Mouiller.  - Je le retire, considérant que le Gouvernement a bien confirmé le sens du texte.

L'amendement n°4 rectifié quinquies est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement n°6, présenté par M. Courteau et les membres du groupe socialiste et républicain.

Après l'alinéa 8

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque le raccordement mentionné au a ou au c est réalisé sous la maîtrise d'ouvrage d'une autorité organisatrice de la distribution publique d'électricité mentionnée à l'article L. 121-4, conformément à la répartition opérée par le contrat de concession ou par le règlement de service de la régie, une convention avec le gestionnaire du réseau public de distribution règle les modalités d'application pour la prise en charge prévue au présent 3°. Le modèle de cette convention est approuvé par la Commission de régulation de l'énergie.

M. Roland Courteau.  - Il est légitime que les utilisateurs du réseau bénéficient des mêmes droits, quel que soit le maître d'ouvrage des travaux de raccordement. Toutefois, les amendements adoptés par la commission au a) et c) de cet article ne règlent pas la question puisque, les AODE ne percevant pas le Turpe qui porte cette réfaction, la partie des coûts de raccordement ne peut pas être couverte directement par le dispositif de réfaction institué par l'article L. 341-2.

Il convient donc de donner une base législative au dispositif dit « PCT » (part couverte par le tarif), mis en oeuvre conventionnellement entre les AODE et les gestionnaires de réseau. Ce dispositif ayant des effets sur le Turpe, il convient de le faire valider par la CRE.

Mme la présidente.  - Sous-amendement n°23 à l'amendement n°6 de M. Courteau et les membres du groupe socialiste et républicain, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission.

Amendement n° 6, alinéa 3

1° Première phrase

Après le mot :

règle

rédiger ainsi la fin de cette phrase :

notamment les modalités de versement de la prise en charge prévue au présent 3° 

2° Seconde phrase :

Rédiger ainsi cette phrase :

Le modèle de cette convention est transmis pour approbation au comité du système de distribution publique d'électricité mentionné à l'article L. 111-56-1.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur.  - L'amendement n°6 confirme utilement que la maîtrise d'ouvrage peut concerner le raccordement des consommateurs comme des producteurs, et donner une base législative au dispositif conventionnel « PCT ».

Mon sous-amendement précise l'objet de la convention entre Enedis et les AODE, qui devra traiter des modalités de versement de la réfaction, et non de son application proprement dite, mais qui va aussi bien au-delà.

En outre, il soumet pour approbation le modèle de cette convention, non pas à la Commission de régulation de l'énergie, qui n'a pas pour mission de réguler l'ensemble des dispositions contractuelles ayant vocation à être traitées dans la convention, mais au Comité du système de la distribution publique d'électricité créé par la loi « Transition énergétique » précisément pour examiner tous les investissements sur les réseaux de distribution, qu'ils soient réalisés sous maîtrise d'ouvrage d'Enedis ou des AODE.

Avis favorable à l'amendement n°6, sous réserve de l'adoption de ce sous-amendement.

Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État.  - Les AODE ne percevant pas le Turpe, elles ne peuvent pas bénéficier de la réfaction prévue par l'article L. 341-2. Avis favorable à cet amendement qui corrige le manque d'une base législative.

Sagesse sur le sous-amendement.

Le sous-amendement n°23 est adopté ainsi que l'amendement n°6, sous-amendé.

Mme la présidente.  - Amendement n°7, présenté par M. Courteau et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 9, première phrase

Supprimer les mots :

lorsque celui-ci est effectué sous la maîtrise d'ouvrage du gestionnaire de réseau concerné

M. Roland Courteau.  - Ne laissons pas penser qu'il y aurait, en fonction de la qualité du maître d'ouvrage des travaux de raccordement, plusieurs plafonds de prise en charge d'une partie des coûts par le Turpe. Ce serait illégitime au regard du principe d'égalité applicable aux usagers du service public.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur.  - Avis favorable à cet amendement de conséquence.

Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État.  - Avis favorable.

L'amendement n°7 est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°10, présenté par M. Courteau et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 12, première phrase

Après le mot :

délai

insérer les mots :

de raccordement

Mme Nelly Tocqueville.  - Cet amendement précise que le délai visé par la convention de raccordement est bien celui de mise à disposition des ouvrages de raccordement.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°20, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission.

Alinéa 12, première phrase

Après le mot :

délai

insérer les mots :

de raccordement

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur.  - Amendement de précision rédactionnelle.

Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État.  - Avis favorable.

Les amendements identiques nos10 et 20 sont adoptés.

L'article 3, modifié, est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

Mme la présidente.  - Amendement n°1, présenté par MM. Bouvard et Vial.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code de l'énergie est ainsi modifié :

1° L'article L. 522-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Toutefois, indépendamment des modalités de calcul fixées par voie réglementaire, cette compensation financière ne peut être inférieure par mégawattheure à 25 % du tarif réglementé de vente d'électricité pris comme référence pour l'année 2015. » ;

2° L'article L. 522-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Toutefois, indépendamment des modalités de calcul fixées par voie réglementaire, cette compensation financière ne peut être inférieure par mégawattheure à 25 % du tarif réglementé de vente d'électricité pris comme référence pour l'année 2015. »

M. Michel Bouvard.  - Les départements bénéficient de contingents d'énergie sur les concessions hydrauliques. La loi a prévu un système de monétisation de la part non consommée, donnant lieu à une compensation financière versée aux collectivités territoriales.

Un arrêté avait calé sur le prix réglementé la valorisation de cette énergie. Depuis lors, le tarif de référence a indexé le prix sur le tarif Spot du marché de l'énergie. Cet amendement fixe un plancher pour garantir que les collectivités territoriales bénéficieront de la ressource apportée pour cette énergie. Il n'y a aucune raison qu'EDF bénéficie d'une prime alors que l'énergie hydraulique se vend à un prix bien supérieur au tarif spot.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur.  - Les tarifs réglementés ayant disparu, l'arrêté de février 2016 se fonde en effet sur le marché de l'électricité. Je comprends la crainte de M. Bouvard, que les aléas de ce marché nuisent à la prévisibilité de la recette. La solution qu'il propose remet cependant en cause la cohérence du système qui n'est plus basé sur les tarifs réglementés mais sur les prix du marché. En cas d'une baisse de cours, le département gagnerait moins mais sa facture énergétique serait inférieure.

Retrait, sinon avis défavorable.

Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État.  - Le prix de marché reflète les dépenses du bénéficiaire, comme le gain du producteur. Avis défavorable.

M. Michel Bouvard.  - Je comprends. Mais nous parlons d'énergie hydraulique, qui se vend à un prix supérieur au marché ! Le prix de référence qu'on nous applique ne correspond pas au prix de vente de notre énergie réservée.

Un arrêté pris sans concertation a précisé de manière léonine le volume de cette énergie réservée. Je retire l'amendement avec l'espoir qu'une concertation précédera la rédaction d'un nouvel arrêté, qui prenne en compte mes arguments.

L'amendement n°1 est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement n°3, présenté par MM. Bouvard et Vial.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le troisième alinéa de l'article L. 521-16 du code de l'énergie est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Toutefois, pour compenser les pertes financières engendrées par le retard pris dans le renouvellement des concessions concernées, l'exploitant de l'ouvrage verse chaque année aux collectivités bénéficiaires de la redevance prévue à l'article L. 523-2, une compensation financière dont le montant est calculé par voie réglementaire. »

M. Michel Bouvard.  - Je ne ferai pas l'histoire des actes réglementaires concernant les redevances domaniales des concessions.

Mon amendement renvoie au décret la fixation d'une compensation pour les collectivités territoriales en cas de retard dans le renouvellement d'une concession.

Mme la présidente.  - Amendement n°2, présenté par MM. Bouvard et Vial.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 522-2 du code de l'énergie est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Dans le cas prévu au troisième alinéa de l'article L. 521-16, les affectations de l'énergie réservée de l'aménagement hydroélectrique concerné, effectuées par l'État et le département, deviennent caduques à compter du 1er juillet 2017. L'énergie réservée est alors, et dans l'attente de la délivrance de la nouvelle concession, soit réaffectée par les soins du département concerné, soit monétisée à son profit dans les conditions prévues au troisième alinéa du présent article. »

M. Michel Bouvard.  - L'amendement n°2 propose que les contingents d'énergie réservée concernés, dès lors que la concession est arrivée à son terme, soient remis au département.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur.  - Quelle constance ! N'oubliez pas, monsieur Bouvard, les concessionnaires - qui ne se réduisent pas aux deux grands, Engie et ERDF. Par un amendement voté à l'unanimité au Sénat, nous avons protégé nos installations hydrauliques - et donc nos concessionnaires. Le système français est différent de celui de nos voisins, (M. Roland Courteau renchérit) qui lorgnent avec gourmandise sur nos barrages sans prendre aucun risque car aucun des leurs n'est public. En cas d'ouverture du marché, ils pourraient sans que les entreprises françaises aient la moindre chance d'obtenir des concessions à l'étranger. Je ne suis pas sûr que notre position tienne longtemps face à Bruxelles.

Si l'amendement n°3 va trop vite, l'amendement n°2 va trop loin. Vous y allez fort ! (M. Michel Bouvard s'esclaffe) Vous riez, tant mieux, car vous avez obtenu satisfaction sur ce point dans la loi Montagne. Là, vous tentez de gagner six mois de plus. Retrait des deux amendements.

Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État.  - J'écoute toujours avec attention les propos très instructifs du rapporteur. Avis défavorable à l'amendement n°3, qui ajoute une charge fiscale. Le montant des nouvelles redevances dépendra de la mise en concurrence. Avis défavorable à l'amendement n°2 pour les mêmes raisons que le rapporteur.

M. Michel Bouvard.  - Je retire l'amendement n°2, mais aussi l'amendement n°3, conscient de son caractère imparfait. Mais la situation n'est pas normale. Il faut certes défendre les intérêts nationaux ; mais nous avons voté un régime, il y a plusieurs années, sous lequel aucune concession n'est passée, car tout est figé. Le référé de la Cour des comptes évoque un manque à gagner considérable, de plusieurs centaines de millions d'euros pour le budget de l'État et des collectivités territoriales.

L'amendement n°3 est retiré, ainsi que l'amendement n°2.

Mme la présidente.  - Amendement n°13 rectifié bis, présenté par MM. Chasseing, B. Fournier, D. Laurent et Requier, Mmes Morhet-Richaud et Cayeux, MM. de Nicolaÿ, G. Bailly et Mandelli, Mme Deromedi, M. L. Hervé, Mme Joissains, MM. Chaize, Nougein, Laménie, P. Leroy, Perrin, Raison, Pointereau, Huré, de Raincourt, Mayet, Revet, Doligé, Kern, César, Maurey, Danesi et Longuet, Mme Lamure, MM. Détraigne, D. Dubois, Longeot, Guené, Pierre, Capo-Canellas, Masclet, Boulard et Émorine, Mme Billon et MM. Gabouty, Bas et Gremillet.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les anciens moulins à eau situés en milieu rural et équipés par leurs propriétaires, des tiers délégués ou des collectivités territoriales, pour produire de l'électricité ne sont plus soumis au classement par arrêté des préfets coordonnateurs.

M. Daniel Chasseing.  - L'avenir des moulins à eaux est compromis par la réglementation sur la continuité écologique, en partie issue de la loi sur l'eau, mais aussi des lois Biodiversité et Création. L'administration française veut les effacer au nom de la prétendue continuité écologique. À ma question écrite, en 2015, le ministère concerné m'a répondu, en 2016, que les moulins non adaptés aux contraintes écologiques, devraient être détruits. Cette réglementation semble excessive, pour ne pas dire arbitraire, comme l'a dit notre collègue Rémy Pointereau.

Les seuils séculaires des moulins sont sans lien avec la dépopulation des cours d'eau. Les moulins encore en état de fonctionnement pourraient jouer un rôle non négligeable, en matière d'énergie renouvelable, si on les laissait produire de l'électricité, et ce, avec un coût de production très bas et sans risque de pollution, puisque la plupart de ces ouvrages d'art existent depuis les XVIIe et XVIIIe siècles et respectent parfaitement l'environnement, ce qu'a noté la mesure « visant à faciliter la préservation des moulins à eau protégés pour leur intérêt patrimonial » adoptée à deux reprises par la commission de la culture du Sénat, à l'initiative de son rapporteur Mme Férat. Dans ce cas précis, les moulins équipés pour produire de l'électricité échapperaient au classement des préfets coordonnateurs.

En équipant 30 000 moulins, on créerait 20 000 emplois de techniciens et 15 000 relevant de l'économie sociale et solidaire.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur.  - La commission considère cet amendement avec beaucoup de sympathie. J'ai toujours défendu le petit hydraulique. Mais c'est de vous qu'il s'agit, madame la ministre : les écologistes, qui ne sont pas à une contradiction près, devraient défendre l'électricité produite à partir de l'eau, mais préfèrent défendre les petits poissons...

Les moulins font partie du patrimoine français. Certains produisent toujours, même si c'est en très petite quantité.

Dans la loi Montagne, il est acté que l'administration doit contribuer à protéger ce patrimoine en évitant de fixer des exigences exorbitantes aux propriétaires qui souhaitent restaurer leur moulin. Mais notre collègue Chasseing reste inquiet...

Je ne peux pas accepter, cependant, que l'on supprime toute autorisation administrative. Attendons de voir comment s'applique la loi Montagne. Si nos propriétaires continuent de se heurter à l'administration, nous mettrons les points sur les i. Retrait ?

Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État.  - La position de M. le rapporteur est raisonnable. Le Gouvernement n'entend pas opposer la préservation indispensable de la biodiversité à la production d'énergie renouvelable ou à la défense de notre patrimoine culturel. J'ai insisté pour que les journées du patrimoine intègrent le patrimoine naturel aux côtés du patrimoine culturel.

Les petits poissons des cours d'eau font partie d'un écosystème global, monsieur le rapporteur. La nature nous rend des services gratuits, à force de les négliger nous devrons en payer la facture. Voyons comment concilier nos impératifs, sans nous laisser entraîner par des intérêts particuliers.

Vous avez obtenu, dans la loi Montagne, l'introduction d'une disposition sur les moulins. Oui, nous devons mieux connaître le micro-hydraulique. Le Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) remettra bientôt un travail à la ministre sur ce sujet. Retrait ou avis défavorable.

M. Jean-Claude Boulard.  - Je soutiens cet amendement qui transmet un message fort. Les moulins sont une innovation du néolithique, lorsque les hommes ont eu l'idée de retenir l'eau pour l'utiliser quand ils en auraient besoin. L'État s'est souvenu de leur utilité lors de la sécheresse ! Il est temps que le Sénat affirme sa volonté de défendre les petits moulins et les barrages. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Jean-Claude Lenoir, président de la commission.  - Solidaire du rapporteur, je demande que l'amendement soit retiré. Cependant, le débat est intéressant. Nous ne parlons pas de nouveaux moulins, qui viendraient interrompre les cours d'eau, mais d'anciens moulins construits pour beaucoup au XVIIIe siècle. Faudra-t-il les démolir pour rétablir la continuité écologique ? Ce serait perturber les usages et les paysages, ainsi que l'économie locale où le micro-hydraulique joue son rôle. Prenons le temps de la réflexion pour protéger ces petits monuments du génie français.

M. Michel Le Scouarnec.  - À plusieurs reprises j'ai rappelé le fort potentiel de développement de l'hydroélectricité. Il y a 60 000 moulins sur notre territoire, qu'il suffit d'équiper d'une petite turbine. Des contraintes administratives freinent le développement de l'hydroélectricité, alors qu'il est démontré que les moulins n'ont aucun impact sur l'environnement et n'entravent pas la circulation des poissons. On se prive d'un moyen de lutter contre le réchauffement, mais aussi de diminuer la pollution de l'eau, sans compter que les moulins sont des espaces de concentration de la biodiversité aquatique et un atout pour le tourisme - pensez aux moulins à marée du Morbihan, précurseurs des usines marémotrices.

Tout doit être fait pour mieux utiliser la force de l'eau, selon des modalités bien définies et sous le contrôle de l'État. (Applaudissements sur plusieurs bancs au centre et à droite)

M. Charles Revet.  - J'avais déposé, il y a déjà quelque temps, un amendement similaire. Mme Royal m'avait suggéré de le retirer en me promettant une réunion de travail sur le sujet. Vous nous faites la même réponse.

Qu'il faille une autorisation pour construire un nouveau moulin, soit. Mais ceux qui existent depuis des siècles n'ont jamais empêché les poissons de remonter les cours d'eau. Pourquoi faudrait-il tout à coup une passe à poissons ?

Les moulins constituent un patrimoine extraordinaire, sans compter qu'ils produisent de l'électricité. Ne différons pas les mesures qui garantissent leur protection, quitte à aménager plus tard cet amendement.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Je suis également une amoureuse des moulins. Cependant, une directive-cadre sur l'eau nous contraint à vérifier que les poissons circulent normalement dans nos rivières au nom de la continuité halieutique.

Il ne s'agit pas de supprimer les moulins partout, mais d'avoir l'intelligence des situations au cas par cas.

M. Michel Bouvard.  - C'est un problème d'aval et d'amont... ou de Valls et d'Hamon ? (Sourires)

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - L'amont l'emportera, on remonte toujours à la source... (Sourires) Il faut acter le principe de la continuité halieutique. La stratégie du Gouvernement me paraît pragmatique, équilibrée et juste.

M. Jean-Claude Requier.  - Cet amendement est de bon sens. Ma femme est originaire d'une famille de meuniers. Les moulins existent depuis longtemps et n'ont jamais bloqué la circulation des poissons. C'est la pollution qui menace les poissons, pas les moulins ! (M. Michel Bouvard applaudit)

M. Jackie Pierre.  - Si on empêche les moulins de produire de l'électricité, on conduira à la ruine ce beau patrimoine. J'espère que cet amendement ne sera pas retiré.

Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État.  - J'insiste. Le Gouvernement défend le patrimoine des moulins. Ségolène Royal a lancé un appel d'offres pour soutenir 150 moulins producteurs d'électricité. Les moulins n'empêchent certes pas la circulation des poissons depuis le XVIIIe siècle ; cependant, certains d'entre eux ont été aménagés. Il faut regarder les situations au cas par cas plutôt que de fabriquer des peurs vaines.

L'étude du CGEDD devrait nous éclairer sur la situation.

Cet amendement risque de poser plus de problèmes que d'en régler. D'où notre avis défavorable.

M. Daniel Chasseing.  - Les travaux démontrent que les seuils séculaires des moulins n'ont pas d'impact sur les poissons. Leur disparition est plutôt due à la pollution.

En outre, les 30 000 hectares de zones humides que constituent les seuils contribuent à l'élimination des nitrates et des phosphores. Au pays de la COP21, nous devrions être capables de les préserver.

J'ai beaucoup d'estime et de respect pour le président Lenoir et le rapporteur, mais je maintiens mon amendement. Je crains que les moulins ne disparaissent. Or 30 000 moulins réhabilités produiraient l'équivalent d'une centrale nucléaire !

L'amendement n°13 rectifié bis est adopté et devient article additionnel.

ARTICLE 4

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur .  - Madame la ministre, prévoyez-vous des mesures au sujet de l'installation de stockage de Gournay-sur-Aronde, qui devra elle aussi être adaptée au gaz H ?

Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État.  - Nous avons déposé un amendement à ce sujet.

M. Roland Courteau .  - Dans l'avant-projet de loi, le Gouvernement prévoyait une aide financière aux ménages de revenus modestes qui devront remplacer leurs appareils à cause du changement de gaz, attribuée par le gestionnaire de réseau. Mais le Conseil d'État a considéré que le tarif d'accès au réseau n'avait pas vocation à financer des aides sociales. Il faut continuer à y réfléchir - si nous n'avons pas déposé d'amendement, c'est parce que l'article 40 nous aurait été opposé... Nous pensions à un dispositif semblable au chèque énergie, financé par le budget de l'État. Le Gouvernement cherche une solution, tant mieux, car il faut songer à ces ménages qui devront faire face à des dépenses importantes et imprévues.

Mme la présidente.  - Amendement n°26, présenté par le Gouvernement.

I.  -  Après l'alinéa 2

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

...  -  L'article L. 431-6-1 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Afin d'assurer l'équilibrage des réseaux et la continuité du service d'acheminement tout au long du processus de modification de la nature du gaz acheminé, le gestionnaire de réseau de transport de gaz naturel peut conclure avec les opérateurs des stockages souterrains de gaz naturel raccordés à son réseau des contrats spécifiant la nature du gaz stocké durant la phase de modification. Ces contrats prévoient la compensation par le gestionnaire de réseau de transport des coûts induits pour l'opérateur de stockage par la modification de la nature du gaz. Un décret pris après avis de la Commission de régulation de l'énergie précise les coûts faisant l'objet d'une compensation. »

II.  -  Alinéa 12

Compléter cet alinéa par les mots :

ainsi que la compensation des opérateurs de stockages souterrains de gaz naturel au titre des contrats mentionnés à l'article L. 431-6-1

Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État.  - Je regrette que cet amendement ait été déposé si tard, il y a visiblement eu un problème d'acheminement...

La modification de la qualité du gaz concernera 1,3 million de consommateurs dans les Hauts-de-France. Elle implique non seulement les gestionnaires de réseau, mais aussi l'opérateur de stockage de la région. Afin de permettre le bon déroulement du plan de conversion, l'amendement donne la possibilité au gestionnaire de réseau de transport de contractualiser avec l'opérateur de stockage la nature du gaz stocké durant la phase de conversion en contrepartie de la compensation des coûts induits pour l'opérateur de stockage.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur.  - La commission n'a pas eu le temps d'examiner cet amendement... J'ai bien compris que le Turpe compenserait les coûts - on parle de 20 millions d'euros. Avis favorable à titre personnel, car on ne peut pas rester sans rien faire.

L'amendement n°26 est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°21, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... . - Dans un délai de douze mois suivant la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport indiquant quelles mesures il entend mettre en oeuvre pour accompagner les consommateurs finals aux revenus modestes qui seraient contraints, en raison de la modification de la nature du gaz acheminé dans les réseaux de distribution de gaz naturel auxquels ils sont raccordés, de remplacer un ou des appareils ou équipements gaziers inadaptables.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur.  - Pour une fois, je demande un rapport. Le Conseil d'État a rejeté la solution proposée par le Gouvernement. Quand il faudra remplacer une chaudière entière, les ménages modestes seront face à un vrai problème. D'où ma demande de rapport.

Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État.  - Avis très favorable, car il faudra être prêt le moment venu.

M. Roland Courteau.  - Nous soutiendrons cet amendement.

L'amendement n°21 est adopté.

L'article 4, modifié, est adopté.

L'article 4 bis est adopté.

ARTICLE 4 TER (Supprimé)

Mme la présidente.  - Amendement n°8, présenté par M. Courteau et les membres du groupe socialiste et républicain.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Le deuxième alinéa des articles L. 341-4 et L. 453-7 du code de l'énergie est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Un décret précise le contenu des données concernées ainsi que les modalités de leur mise à disposition. »

M. Roland Courteau.  - La suppression de cet article par la commission aboutit à une situation juridique paradoxale puisque, pour des dispositions similaires, certains sont fixées par décret en Conseil d'État sur proposition de la CRE et d'autres par décret simple.

L'amendement n°8, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté et l'article 4 ter est rétabli.

ARTICLE 4 QUATER

Mme la présidente.  - Amendement n°22, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission.

Alinéa 2, deuxième phrase

Remplacer le pourcentage :

50 %

par le pourcentage :

40 %

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur.  - Réparons un oubli du Gouvernement et de l'Assemblée nationale en étendant au gaz ce que nous avons prévu pour l'électricité.

M. Jean-Paul Émorine.  - On voit là l'utilité du Sénat !

L'amendement n°22, accepté par le Gouvernement, est adopté.

L'article 4 quater est adopté.

ARTICLE ADDITIONNEL

Mme la présidente.  - Amendement n°15 rectifié, présenté par M. Courteau.

Après l'article 4 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La section 2 du chapitre Ier du titre VII du livre Ier du code de l'environnement est ainsi modifiée :

1° L'article L. 171-7 est ainsi rédigé :

« Art. L. 171-7.  -  Indépendamment des poursuites pénales qui peuvent être exercées, lorsque des installations ou ouvrages sont exploités, des objets et dispositifs sont utilisés ou des travaux, opérations, activités ou aménagements sont réalisés sans avoir fait l'objet de l'autorisation, de l'enregistrement, de l'agrément, de l'homologation, de la certification ou de la déclaration requis en application des dispositions du présent code, ou sans avoir tenu compte d'une opposition à déclaration, l'autorité administrative compétente met l'intéressé en demeure de régulariser sa situation dans un délai qu'elle détermine, et qui ne peut excéder une durée d'un an.

« Elle peut suspendre le fonctionnement des installations et ouvrages ou la poursuite des travaux, opérations ou activités jusqu'à ce qu'il ait été statué sur la déclaration ou sur la demande d'autorisation, d'enregistrement, d'agrément, d'homologation ou de certification, à moins que des motifs d'intérêt général et en particulier la préservation des intérêts protégés par le présent code ne s'y opposent.

« L'autorité administrative peut, en toute hypothèse, édicter des mesures conservatoires au frais de la personne mise en demeure.

« S'il n'a pas été déféré à la mise en demeure à l'expiration du délai imparti, ou si la demande d'autorisation, d'enregistrement, d'agrément, d'homologation ou de certification est rejetée, ou s'il est fait opposition à la déclaration, l'autorité administrative ordonne la fermeture ou la suppression des installations et ouvrages, la cessation définitive des travaux, opérations ou activités, et la remise des lieux dans un état ne portant pas préjudice aux intérêts protégés par le présent code.

« Elle peut faire application du II de l'article L. 171-8, notamment aux fins d'obtenir l'exécution de cette décision. » ;

2° Le troisième alinéa du 4° du II de l'article L. 171-8 est ainsi rédigé :

« L'amende ne peut être prononcée plus de trois ans à compter de la constatation des manquements. »

M. Roland Courteau.  - Dans le cas où une installation de production électrique est réalisée sans autorisation ou déclaration préalable, il faut laisser à l'autorité administrative la possibilité de prendre des mesures conservatoires autorisant une poursuite temporaire d'activité accompagnées d'une mise en demeure de régulariser la situation administrative, car une fermeture brutale peut avoir des conséquences dramatiques, non seulement sur le plan socio-économique, mais aussi sur l'environnement - pensons à un site de traitement de déchets ou d'épuration de l'eau. Afin de concilier au mieux la protection de l'environnement et l'activité économique, nous proposons de limiter à un an la durée de la mise en demeure, de faire de la suspension le principe, et de rendre la suspension ou la cessation définitive d'activité automatique s'il n'est pas déféré à la mise en demeure dans le délai imparti. Nous allongeons aussi la période pendant laquelle une amende administrative peut être prononcée.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur.  - Cet amendement est nécessaire pour lever un risque de contentieux européen. Avis favorable.

Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État.  - Même avis.

L'amendement n°15 rectifié est adopté et devient un article additionnel.

L'article 5 demeure supprimé.

Interventions sur l'ensemble

M. Jean-Claude Requier .  - L'autoconsommation est une opportunité pour le consommateur, mais présente un risque de pertes fiscales et d'impact négatif sur le réseau. Il faudra ajuster les courbes de production et de consommation - les personnes concernées feront appel au réseau en période de grand froid, par exemple, de même que les consommateurs d'eau de source ont besoin d'eau courante en plein été. C'est d'ailleurs surtout l'affaire de bobos avec quelques moyens...

Cela dit, ce projet de loi va dans le bon sens, et le RDSE le votera à l'unanimité.

M. Jean-Pierre Bosino .  - Le débat que nous venons d'avoir est important. Petit à petit, nous sommes en train de démanteler le système de production d'électricité bâti à la Libération...

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Mais non, cela n'a rien à voir !

M. Jean-Pierre Bosino.  - ...et cela au nom des énergies renouvelables, quand nous n'avons jamais eu autant besoin d'un système national, justement pour les développer. Nous avons fait la même chose avec France Télécom, avec le résultat que l'on sait. Même chose avec La Poste, qui ne dessert plus certains villages isolés en Ardèche.

M. Roland Courteau .  - Les socialistes voteront ce projet de loi qui propose des solutions pertinentes et innovantes. Répondant à une attente sociétale, il promeut un développement maîtrisé de l'autoconsommation. La réfaction tarifaire et l'indemnisation en cas de retard de raccordement des parcs éoliens en mer stimuleront, quant à elles, l'essor des énergies renouvelables. La plupart de mes amendements ont été adoptés, j'en remercie le Gouvernement, le rapporteur et le Sénat.

Mme Marie-Noëlle Lienemann .  - Je soutiendrai ce texte. Certains voient dans l'autoconsommation une fragilisation du système électrique global et une remise en cause de l'esprit de la Libération, qui a permis à chacun d'avoir accès à l'énergie. On peut comprendre cette crainte. Mais nous avons tout intérêt à développer cette production locale, 100 % made in France. La difficulté, c'est de rendre compatible cette autonomie choisie et l'intérêt général. C'est là tout l'intérêt du texte. Ailleurs, l'autoconsommation s'est développée sans que cela déstabilise le réseau.

Il nous faudra aussi travailler sur les méthodes de stockage de l'énergie, pour les rendre plus autonomes et individualisée. Nous devons financer la recherche sur ce sujet.

Enfin, comment garantir la capacité d'autoconsommation tout en faisant vivre la péréquation tarifaire ? Répondre à cette question est essentiel, il y va de notre idéal républicain.

À la demande du groupe socialiste et républicain, le projet de loi est mis aux voix par scrutin public.

Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n°91 :

Nombre de votants 333
Nombre de suffrages exprimés 332
Pour l'adoption 311
Contre 21

Le Sénat a adopté.

Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe (Nomination)

Mme la présidente.  - Je rappelle au Sénat que le groupe socialiste et républicain a présenté une candidate pour représenter la France en qualité de membre suppléant à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe.

La Présidence n'ayant reçu aucune opposition dans le délai d'une heure prévu par l'article 9 du Règlement, je proclame Mme Marie Françoise Perol-Dumont membre suppléant, représentant la France à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe.

Commission (Nomination)

Mme la présidente.  - Je rappelle au Sénat que le groupe communiste républicain et citoyen a présenté une candidature pour la commission de la culture.

La Présidence n'ayant reçu aucune opposition dans le délai prévu par l'article 8 du Règlement, je proclame Mme Évelyne Rivollier, membre de la commission de la culture, en remplacement de M. Jean-Claude Frécon, décédé.

Échec en CMP

Mme la présidente.  - J'informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi relative à l'extension du délit d'entrave à l'interruption volontaire de grossesse n'est pas parvenue à l'adoption d'un texte commun.

présidence de Mme Françoise Cartron, vice-présidente

Sécurité publique (Procédure accélérée)

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi relatif à la sécurité publique (procédure accélérée).

Discussion générale

M. Bruno Le Roux, ministre de l'intérieur .  - Nous débattons d'un texte dont chacun reconnaît l'importance. Je tiens à remercier les rapporteurs et le président Bas avec qui j'ai pu travailler dans un esprit constructif et républicain.

Important, ce texte l'est avant tout pour les policiers et les gendarmes qui sont en charge de la protection quotidienne de nos concitoyens, dans des conditions souvent éprouvantes. Depuis plus de deux ans, ils sont sur tous les fronts, contre le terrorisme, la délinquance du quotidien, la criminalité organisée, les trafics qui empoisonnent la vie de certains quartiers. Chaque jour, ils sont en première ligne pour garantir la paix publique, entretenir le lien de proximité avec les Français, les accueillir, écouter leurs angoisses, accomplir des interventions de toute nature. Ils font preuve d'un professionnalisme de chaque instant, en dépit d'accès de lassitude bien naturels face au caractère endémique de certaines formes de délinquance.

La sécurité est la condition de l'exercice de nos libertés fondamentales, mais aussi un enjeu de justice sociale, et c'est sur les épaules des policiers et des gendarmes que repose cette exigence.

Les forces de l'ordre sont au contact des pires noirceurs de la société et de plus en plus exposées à de violentes agressions : le simple fait de porter l'uniforme, d'incarner l'autorité publique fait d'eux des cibles.

Certes, le métier est par définition dangereux, mais un palier dans les violences a été franchi à Viry-Châtillon, le 8 octobre dernier, quand des délinquants en bande organisée ont attaqué quatre policiers en mission avec la volonté de les tuer. Les services de la police judiciaire ont progressé rapidement et plusieurs individus ont été mis en examen et incarcérés. Aucun fait de cette nature ne doit rester impuni.

Je pense aussi à l'assassinat du commissaire Jean-Baptiste Salvaing et de Jessica Schneider à Magnanville, ou au major de gendarmerie Christian Rusig, percuté délibérément par un automobiliste à Tarascon-sur-Ariège.

L'an dernier, 26 policiers et gendarmes sont morts en service, 16 000 ont été blessés. Les assaillants n'hésitent plus à utiliser des armes à feu.

Depuis 2012, le Gouvernement a renforcé les moyens humains, matériels et juridiques des forces de l'ordre. Ce projet de loi constitue l'ultime étape législative de ce processus.

N'occultons pas le contexte : à l'automne, de nombreux gardiens de la paix ont manifesté leur malaise, exacerbé par les sacrifices qu'ils consentent dans la lutte antiterroriste. L'attaque de Viry-Châtillon a été un déclencheur.

Le Gouvernement apporte deux réponses. Une grande consultation a été organisée dans chaque commissariat et au sein de la gendarmerie nationale pour recueillir les doléances et propositions. Je disposerai bientôt des retours et nous en tirerons les leçons.

Un grand plan de 250 millions d'euros pour la sécurité publique a été annoncé dès le 26 octobre, après dialogue avec les syndicats. Doté d'un volet matériel et d'un volet législatif, il correspond aux engagements pris envers les forces de l'ordre.

Ce texte cohérent répond à une situation précise et ajoute à notre dispositif global les derniers ajustements nécessaires. Ce n'est pas un texte fourre-tout. Je souhaite parvenir sur ce sujet crucial à un consensus. Ce texte équilibré tient compte des impératifs opérationnels des forces de l'ordre, dans le respect des libertés publiques et de l'État de droit. Il a été approuvé par le Conseil d'État et les instances représentatives des policiers et gendarmes.

D'abord, ce texte fixe un cadre commun d'usage des armes pour les policiers, les gendarmes, les douaniers et les militaires engagés dans l'opération Sentinelle. La légitime défense est maintenue - les forces de l'ordre l'ont intériorisée, et je rends hommage à leur sang-froid. Nous clarifions et modernisons les conditions d'usage des armes face à des violences croissantes. Ce texte s'inspire des préconisations de Mme Cazaux-Charles et respecte scrupuleusement les conditions posées par la Cour européenne des droits de l'homme et de la Cour de cassation : proportionnalité et absolue nécessité. Il vient compléter la loi du 3 juin 2016 qui autorisait les policiers à faire usage de leur arme en cas de « périple meurtrier » pour prévenir tout risque de réplique lors d'une tuerie de masse. Le Conseil d'État a salué le point d'équilibre qui a été trouvé, nous répondrons ensemble aux interrogations soulevées en commission.

Les policiers municipaux ne sont pas oubliés. Je pense à Clarissa Jean-Philippe tuée à Montrouge, ou à Aurélie Fouquet, tuée à Villiers-sur-Marne. Le Gouvernement a développé leurs moyens matériels et juridiques.

Mme Catherine Troendlé.  - Très bien.

M. Bruno Le Roux, ministre.  - Financement des équipements, rénovation du cadre d'emploi : trois lois et sept décrets ont renforcé la police municipale, notamment le décret du 28 novembre 2016 qui autorise le port de l'arme de poing à la ceinture sur le trajet vers le centre de tir et le décret du 23 décembre 2016 qui permet aux policiers d'utiliser des caméras embarquées à titre expérimental.

À Nancy, j'ai signé trente conventions de coordination avec des polices municipales de Meurthe-et-Moselle, dans une démarche de co-construction de la sécurité. De même, en Île-de-France, les policiers municipaux doivent intervenir au commandement de la police nationale. La police municipale agit en complémentarité, non en substitution des forces de l'État. Le Gouvernement est ouvert à de nouvelles dispositions visant à consolider son action des polices dès lors qu'il n'y a pas confusion dans les missions.

Autre point, les policiers et gendarmes pourront s'identifier par un numéro d'immatriculation administratif pour garantir leur anonymat dans les procédures pénales. Si la divulgation de l'identité de l'enquêteur est indispensable au respect des droits de la défense, le juge pourra en ordonner la révélation. Ce dispositif, qui existe ailleurs, est admis par la Cour européenne des droits de l'homme. L'administration est autorisée à ne notifier qu'une ampliation anonyme de l'acte, tout en aménageant les règles du contradictoire.

Nous doublons les peines encourues pour outrage à personne dépositaire de l'autorité publique, pour les aligner sur celles encourues pour outrage à magistrat. S'en prendre à un policier ou à un gendarme, c'est s'en prendre à la République !

Votre commission a identifié d'autres évolutions législatives, le Gouvernement les examinera avec intérêt.

Le projet de loi comporte en outre des dispositions d'ajustement de mesures en vigueur. Ainsi, l'article 4 complète la loi Savary du 22 mars 2016 pour tirer les conséquences des enquêtes administratives concernant les salariés des entreprises de transport.

Nous renforçons l'articulation entre procédures juridictionnelles et contrôle administratif des personnes ayant cherché à rejoindre un théâtre d'opération terroriste à l'étranger.

Nous ouvrons aussi la possibilité, encadrée, d'un armement des agents de sécurité privée exposés à un risque exceptionnel.

Les articles 8 et 9 relèvent du ministère de la justice ; l'article 10, qui concerne le service militaire volontaire, du ministère de la défense.

Les policiers, nationaux et municipaux, les gendarmes n'exercent pas un métier comme les autres. Ils acceptent d'exposer leur intégrité physique et leur vie au nom de l'intérêt général. Nous devons leur garantir une protection vigilante et juridiquement incontestable. Cela ne peut que renforcer la République. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain, ainsi que sur plusieurs bancs au centre et à droite)

M. Jean-Jacques Urvoas, garde des sceaux, ministre de la justice .  - Ce qui donne sens et légitimité au contrat social, c'est la protection qu'il donne à ceux qui s'y engagent. La sécurité publique est donc une question éminemment démocratique et ce projet de loi, l'occasion d'anticiper de nouvelles réponses.

Deux questions importantes relèvent du ministère de la justice. D'abord, la prise en charge des mineurs confrontés à la radicalisation violente, dans le cadre de l'assistance éducative. L'avenir de la société réside dans ses enfants. Leurs malheurs seront les nôtres. C'est pourquoi le dispositif de protection de l'enfance doit être opérationnel. L'État s'est donc rapproché des départements qui sont compétents en matière d'aide à l'enfance - et remercie l'ADF pour sa disponibilité. La convention internationale du 20 janvier 1989 stipule en effet, en son article 19, que l'État est responsable ; il doit donc prendre toute sa place, accompagner les départements dans la prise en charge de situations complexes et coordonner les approches.

La protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) s'est fortement impliquée, aux côtés des départements, dans la prise en charge de ces mineurs, potentiellement nombreux. J'ai proposé une expérimentation de trois ans : le juge pourrait confier à la PJJ des enfants de familles radicalisées, en milieu ouvert, y compris lorsqu'ils ont été confiés à l'ASE, ce que ne permet pas le droit actuel. L'expérience des départements en est encore à ses prémices en matière de radicalisation violente : à ce jour, seuls 21 mineurs de retour de la zone irako-syrienne sont suivis.

Il faut amplifier leur suivi, pour les aider à surmonter les traumatismes et répondre au risque de prosélytisme, ou au contraire de repli.

Je tiens à ce que le procureur de la République soit le point d'entrée, le coordinateur du dispositif. L'État doit structurer l'offre d'accompagnement des collectivités locales. Il faut étendre les mesures éducatives en milieu ouvert ; une mesure judiciaire d'investigation spécifique pourra être prononcée.

Second sujet que je porte, la sécurité pénitentiaire, dans les établissements et lors des extractions. L'unité des corps des personnels pénitentiaires est précieuse. Sans la remettre en cause, j'ai créé par le décret du 17 janvier 2017 une sous-direction de la sécurité pénitentiaire, au sein de laquelle un bureau de la gestion de la détention et des missions extérieures comprendra seize équipes dont les agents seront armés.

La commission a inclus ces agents dans le cadre d'usage des armes. D'accord, mais je souhaite que la compétence de ces équipes ne porte que sur l'emprise pénitentiaire. D'accord également pour décliner le modèle des équipes de sécurité de la SNCF ou de la RATP. Cela entraînera une structuration plus opérationnelle dans les missions d'extraction.

Un plan pluriannuel de recrutement sera lancé pour assurer le déploiement progressif de ces équipes sur tout le territoire.

Enfin, je soumettrai un amendement de précision sur le renseignement pénitentiaire pour articuler la répartition des techniques de renseignement dans le code de procédure pénale et le code de sécurité intérieure.

Chaque jour on découvre des téléphones portables illicites dans les prisons. Il faut y mettre fin et envisager une judiciarisation. Je précise que seuls les détenus seront visés, non l'entourage ou le personnel. Je vous propose enfin de créer dans le code de sécurité intérieure un titre dédié, sous le contrôle de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement, car nous avons grand besoin de renforcer le renseignement pénitentiaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain et sur plusieurs bancs à droite et au centre)

M. François Grosdidier, rapporteur de la commission des lois .  - La commission des lois a été saisie de ce projet de loi déposé le 21 décembre 2016, jour même de son examen en Conseil des ministres. L'attaque planifiée, odieuse et lâche de Viry-Châtillon n'est malheureusement pas un acte isolé. Les agressions contre les forces de l'ordre se sont multipliées, leur violence s'est accrue, comme l'illustre le meurtre d'un couple de policiers à leur domicile.

Parallèlement, jamais les forces de l'ordre n'ont été autant sollicitées et exposées à la menace terroriste. D'où un malaise compréhensible.

L'article premier crée un régime d'utilisation des armes commun aux forces de l'ordre, non pour répondre à une demande conjoncturelle mais pour déterminer un cadre stable et cohérent.

Les gendarmes sont soumis à un décret de 1903 qui les autorise à faire feu après deux sommations, que la personne soit dangereuse ou non. Il n'est plus appliqué depuis longtemps, les gendarmes respectent les principes d'absolue nécessité et de proportionnalité édictés par la Convention européenne des droits de l'Homme.

Les policiers, eux, sont soumis au droit commun de la légitime défense, comme n'importe quel citoyen. Si les gendarmes sont formés à utiliser leur arme, les policiers, eux, apprennent plutôt à ne pas s'en servir. Tel jeune adjoint de sécurité a préféré se battre à mains nues contre une foule l'attaquant à coups de barres de fer, d'autres ont risqué de mourir carbonisés dans leur véhicule plutôt que de faire usage de leur arme.

Cette inhibition paralyse et démoralise : nous devons désinhiber les policiers, tout en se gardant de tout effet de balancier. Il faudra dégager une doctrine partagée entre l'Intérieur et la Chancellerie, dispenser une formation théorique et pratique, doublée d'un entraînement renforcé.

Ce nouveau régime, inspiré de celui en vigueur pour les gendarmes, qu'il rénove, est étendu aux adjoints de sécurité et réservistes.

Les policiers qui utilisent leur arme hors service, en cas d'agression subite, basculeront de facto dans le cadre de l'exercice de leur fonction et rentreront dans ce cadre.

Même si la jurisprudence reconnaît la légitime défense putative, il fallait sécuriser juridiquement les forces de l'ordre. Parmi les cas visés, l'usage d'arme en cas de menace par un individu armé ; pour défendre un site ou une personne ; pour arrêter un fugitif dangereux. Dans la rédaction du Gouvernement, l'agent devait apporter la preuve que le fugitif s'apprêtait à perpétrer un attentat.

Aujourd'hui, les gendarmes peuvent faire feu pour empêcher un terroriste de s'enfuir à bord d'un véhicule armé d'une kalachnikov ; avec une telle rédaction, ils le laisseront filer ! Nous l'avons donc revue, en nous inspirant des préconisations de Mme Cazaux-Charles.

L'extension de ce régime aux douaniers et aux militaires de l'opération Sentinelle est bienvenue. Nous l'avons également étendu aux agents de l'administration pénitentiaire, pour tenir compte de leurs nouvelles missions, et aux policiers municipaux. De plus en plus exposés, formés et entrainés, ils sont la troisième force de la République !

L'article 1er alinéa 1, le minimum minimorum, a fait l'objet d'un large consensus en commission, même si nous n'avons pas retenu la possibilité de tirer après sommation.

À l'article 2, sur l'identification par le numéro d'immatriculation administrative, nous supprimons la condition du quantum de peine.

À l'article 4, nous encadrons les délais pour ne pas pénaliser les entreprises.

L'article 6 autorise les agents de sécurité privés à être armés. Il fallait combler un vide juridique pour la protection des sites sensibles.

Nous avons introduit un article 6 bis et un article 6 ter, qui modifie la composition de la cour d'assises spéciale dans le sens suggéré par Michel Mercier.

L'article 7 aggrave les peines pour outrage à personne dépositaire de l'autorité publique ; nous renforçons la sanction de la rébellion et du refus d'obtempérer.

Il nous semblait également nécessaire d'élargir les prérogatives des agents pénitentiaires au-delà du strict domaine pénitentiaire, pour éviter par exemple le jet d'objets par-dessus les murs.

Comme chaque fois qu'il s'agit de la sécurité, le Sénat est au rendez-vous ! (Applaudissements à droite et au centre)

M. Philippe Paul, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères et de la défense .  - La commission des affaires étrangères et de la défense s'est saisie de l'article premier et de l'article 10. Nous sommes satisfaits de l'inclusion des militaires déployés dans les opérations Sentinelle et Vigipirate dans le dispositif de l'article premier, car ce sont des cibles. Ils pourront ainsi répliquer dans les mêmes conditions que les gendarmes et policiers. La réflexion devra se poursuivre sur la remontée du renseignement de proximité par les militaires.

L'article 10 concerne le service militaire volontaire (SMV), transposition expérimentée en métropole du service militaire adapté, qui a fait ses preuves en matière d'insertion des jeunes décrocheurs. L'expérimentation proposée, qui incarne le renouveau du lien armée-Nation depuis les attentats, crée un statut spécifique combinant celui de militaire et de stagiaire de la formation professionnelle. L'expérimentation court jusqu'au 31 décembre 2018 ; le législateur décidera alors s'il la pérennise ou non.

La commission des lois a adopté plusieurs de nos amendements pour améliorer l'articulation, entre les statuts. Il faudra veiller à ce que le SMV demeure un dispositif militaire et ne connaisse pas le même sort que l'établissement public de la défense. Vu son coût, il faudra s'assurer de son efficacité sur le long terme. Rendez-vous fin 2018 pour le bilan. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Bruno Le Roux, ministre.  - En accord avec la commission des lois et en application de l'article 44, alinéa 6 du Règlement du Sénat, le Gouvernement demande la réserve de l'examen des articles 8 et 9 et de l'amendement n°40 portant article additionnel après l'article 9, afin qu'ils soient examinés après l'article 11.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois.  - La commission des lois est d'accord.

La réserve est ordonnée.

M. David Rachline .  - Je rends d'abord hommage à celles et ceux qui travaillent à préserver notre sécurité. Il est facile de discuter à loisir, dans le confort de nos fauteuils, des conditions d'usage de la force ; sur le terrain, confrontés à des situations de stress et de violence, les agents, eux, doivent réagir en une fraction de seconde.

Ce texte, rédigé dans la précipitation, vient tenter de calmer la colère légitime des forces de l'ordre après l'attaque de Viry-Châtillon. Les policiers eux-mêmes dénoncent une occasion ratée, mais peu importe, du moment que le Gouvernement donne l'illusion aux citoyens qu'il agit ! Vous faites de la com', une fois de plus !

Nous réclamons, nous, une présomption de légitime défense. Pas un permis de tuer, mais le droit pour les forces de l'ordre de se battre à armes égales, en utilisant la force légitime. Il est temps que la peur change de côté ! Ces faits relèveraient d'une juridiction spécialisée.

Il faudrait aussi développer la formation et l'entraînement au tir des policiers, aujourd'hui réduit à la portion congrue.

Dans votre exposé de motifs, vous insistez partout sur la conformité du texte à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme. Mais la justice est rendue au nom du peuple français, et c'est le Parlement qui vote la loi !

Il est temps de se libérer de ce gouvernement des juges, surtout lorsqu'ils ne sont même pas français. (Mmes Éliane Assassi et Esther Benbassa protestent) Cela passe par une volonté politique et le retour à une souveraineté pleine et entière.

Mme Esther Benbassa .  - Le 8 octobre 2016, une quinzaine de personnes incendiaient deux voitures de police à Viry-Châtillon, blessant grièvement deux policiers. Cette attaque a déclenché un mouvement de protestation sans précédent des forces de l'ordre ; éreintées par des mois d'état d'urgence et de plan Vigipirate.

Réponse législative du Gouvernement à la mobilisation des policiers, ce texte vise à assurer leur protection et la sécurité juridique de leurs interventions.

Je salue le courage de ces femmes et de ces hommes qui assurent quotidiennement notre protection, en dépit d'un manque criant de moyens.

Ce texte précise les conditions d'usage des armes par les forces de l'ordre. Est-ce suffisant pour assurer leur protection, comme il prétend le faire ? Les droits des citoyens sont-ils suffisamment garantis ? Le sentiment du groupe écologiste est mitigé. Il y a des avancées certaines, comme le cadre commun aux différentes forces de sécurité ou l'inscription dans la loi des principes d'absolue nécessité et de stricte proportionnalité.

Mais les risques de dérives sont nombreux. Certains spécialistes craignent que le texte n'accroisse même l'insécurité juridique. Le sociologue Olivier Cahn s'inquiète que les policiers soient davantage incités à ouvrir le feu, faute de message clair, alors qu'ils sont toujours soumis à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme. Pour maître Laurent-Franck Lienard, avocat spécialisé dans la défense des policiers, si des policiers tirent sur une voiture en fuite, ils seront condamnés : la réforme est, à ses yeux, dangereuse pour les policiers comme pour les citoyens.

Malgré les injonctions du Gouvernement, le groupe écologiste a déposé quelques amendements ; leur sort conditionnera notre vote sur le texte. Si nous sommes majoritairement contre, ce n'est pas par défiance envers les forces de l'ordre mais parce que nous pensons que ce texte ne renforcera pas leur sécurité, ni celle de nos concitoyens.

M. Jean-Noël Guérini .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE) Depuis deux ans, nous vivons une situation à laquelle la France n'était pas préparée.

Des fanatiques guidés par des barbares nous attaquent depuis 2015 par des actes qui nous ont plongés dans un état de sidération. Nous devons approfondir nos discussions théoriques sur leurs causes, sans oublier que notre pays n'est pas le seul à être touché : Belges, Maliens, Turcs, Allemands ont aussi été frappés.

La réponse des forces de l'ordre est coûteuse : 4 000 perquisitions, une centaine d'arrestations, dix-sept attentats déjoués, militaires en patrouille, contrôles aux frontières. D'aucuns, prisonniers des sirènes électoralistes appellent à faire plus. Ce sont souvent les mêmes qui ont imposé des coupes claires dans les effectifs et les budgets. D'autres, brandissant la glorieuse bannière des droits de l'homme, en veulent toujours moins et de fortes voix promettent sans ciller des économies en réalisant des coupes dans les agents de la fonction publique. Tous oublient que la politique suivie depuis quatre ans n'a jamais sacrifié les attentes de la population en écoutant les policiers. Restons vigilants envers l'équilibre entre sécurité et libertés individuelles.

Depuis Thomas Hobbes, cette tension est au coeur de la pensée politique : la sécurité est la condition de la liberté, mais aussi sa limite. Je serais trop conciliant avec les socialistes ? (Sourires) Il faut pourtant bien reconnaître les mérites de Bernard Cazeneuve et de Bruno Le Roux.

Policiers et gendarmes sont fatigués. Les agressions qui les frappent ajoutent à leur mal-être. L'unification dans un même article des règles d'usage des armes, en rappelant les principes d'absolue nécessité et de proportionnalité, est une bonne chose. Ce texte est l'expression d'un État sûr de ses valeurs. Laissons là les vaines polémiques : les gouvernements peuvent changer, mais les menaces demeureront, hélas. Le groupe RDSE votera ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs RDSE)

M. Michel Mercier .  - Débattre de ce texte, c'est pour le Parlement, et singulièrement pour le Sénat, une façon de rendre hommage aux 26 policiers et gendarmes morts dans le cadre de la lutte antiterroriste, et de dire notre reconnaissance aux policiers, gendarmes et militaires de l'organisation Sentinelle.

Revoir les règles d'usage des armes, c'est permettre aux policiers de se défendre, mais cela ne peut pas être céder au laxisme. Ce texte a su créer cet équilibre. Les forces de l'ordre doivent respecter les principes d'absolue nécessité et de proportionnalité. Cela remplace avantageusement le régime obsolète pour les gendarmes et le droit commun pour les policiers. Nous adhérons particulièrement à l'inclusion des polices municipales. Le numéro d'identification administrative est une bonne chose.

Conjuguer une mesure de placement dans le cadre de l'Aide sociale à l'enfance et une mesure judiciaire dans celui du projet de loi est très positif.

Ce texte est un bon texte. Vous avez bien voulu ajouter à l'article 6 ter les dispositions réclamées par le président Hayat au sujet de la cellule spéciale de Paris.

Le Sénat a toujours su, quand il s'agit de la sécurité du pays, faire abstraction des questions électorales. Il n'est jamais trop tard pour bien faire. Nous voterons ce bon texte car le pays en a besoin. (Applaudissements au centre et à droite)

Mme Éliane Assassi .  - Encore une fois, nous sommes appelés à examiner des mesures lourdes dans l'urgence. Après l'agression de Viry-Châtillon, qu'on ne peut que condamner, ce texte arrive dans un contexte anxiogène d'inflation législative. Son coeur est de refondre l'usage des armes des forces de l'ordre, dans la continuité de la loi antiterroriste du 3 juin 2016 qui prévoit déjà que les policiers, militaires de Sentinelle, gendarmes et douaniers puissent faire usage de leur arme en cas de « périple meurtrier ».

Ainsi glisse-t-on encore des lois d'exception vers un droit commun de plus en plus dicté par le tout sécuritaire. Espérons que ces mesures ne serviront pas à réprimer la délinquance ordinaire plutôt que le terrorisme.

L'idée d'ouvrir l'usage des armes aux policiers est un leitmotiv du Front national, repris par certains syndicats de policiers et Nicolas Sarkozy. La mesure a fait l'objet de cinq initiatives parlementaires, quatre à l'initiative du groupe Les Républicains, une de Jean Louis Masson. Elles ont toutes été repoussées.

En 2013, déjà, la commission des lois du Sénat contredisait l'idée qu'il y avait là un problème réel. Il y aura eu très peu de dossiers judiciaires sur ces sujets : 120 procédures de l'IGPN pour des cas de légitime défense et un nombre de condamnations marginal. De toute manière, nous devons aussi nous conformer à la Convention européenne des droits de l'homme. L'Europe a déjà condamné des gendarmes ayant fait un usage excessif de leur arme.

Les revendications des policiers portent en réalité sur les moyens et sur le paiement des heures supplémentaires en attente. Mais une fois de plus, le Gouvernement élude cette question car il n'a plus les moyens.

L'IHESJ préconise la nomination d'un magistrat par Cour d'appel référent sur l'usage des armes. Laurent-Franck Lienard, avocat spécialiste de la défense des policiers s'inquiète aussi de l'absence de formation des gendarmes et des policiers, « la honte de notre pays ». Les policiers nationaux ne sont soumis qu'à trois séances de tir par an - et je ne parle même pas des policiers municipaux.

Quelle sera la prochaine étape ? Le rétablissement de la maréchaussée ? Cessons de faire la loi dans l'émotion. La peur sert de prétexte à un mode de gouvernement, comme nous l'enseignent Patrick Boucheron et Corey Robin dans Exercice de la peur. Usages politiques de l'émotion. Toutes ces mesures pourront être utilisées par un futur Gouvernement de droite dure. Nous ne voterons pas. Soyons modestes vis-à-vis d'un scénario du pire... (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)

M. François-Noël Buffet .  - Les actes terroristes ont révélé la nécessité de donner aux forces de l'ordre les moyens de prévenir et à la justice ceux de punir. Le Sénat n'a jamais failli ; il a pris toutes ses responsabilités. Le groupe Les Républicains avait souhaité aller plus loin et plus vite. Le Gouvernement nous a finalement suivis, concernant les sites de propagande terroriste par exemple.

Hors de toute polémique, notre conscience citoyenne nous impose de continuer à travailler. Nous n'avons cessé de rappeler la nécessité de donner des moyens aux forces de l'ordre et de rétablir leur autorité. Nous ne pouvons pas nous contenter de communiqués de presse comme celui de la semaine dernière.

Nous devons aux Français un discours de vérité, celle que les personnes revêtues de l'autorité publique connaissent. Oui, la violence gangrène les rapports sociaux.

Sans remettre en cause la compétence des agents, tous nos services doivent pouvoir échanger avec les magistrats antiterroristes.

L'action volontariste des policiers n'a malheureusement pas toujours été suivie d'effet. Les policiers ne sont pas entrés dans ce métier pour être des cibles, comme à Viry-Châtillon ! Saisir la crosse de son pistolet, c'est trop souvent le début d'un long marathon procédural et judiciaire pour les policiers. La question de l'armement n'est pas nouvelle pour la sécurité privée. Le juge constitutionnel n'a jamais invalidé les règles qui s'y appliquent. La sécurité privée est en pleine mutation.

Nous devons accompagner les forces de l'ordre - c'est dommage que ce texte ne prévoie aucune action de formation.

Le « spectre des revenants » n'est pas qu'un mirage, loin s'en faut. François Molins parle à juste titre de « bombes à retardement ». La majorité à laquelle j'appartiens n'a eu de cesse d'appeler à traiter ces cas que l'Uclat évalue à 700. Les enfants doivent aussi être pris en charge.

Grâce au travail précis de notre rapporteur, le Sénat adoptera un bon texte. Le groupe Les Républicains le votera avec confiance. Mais n'oublions pas que la lutte contre le terrorisme n'avancera qu'avec une politique de lutte contre la délinquance ferme. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Jacques Bigot .  - Ce texte satisfait semble-t-il l'essentiel des sénateurs - M. le ministre de l'intérieur a bien fait de le faire examiner par le Sénat en premier.

Les menaces que subissent les policiers, les difficultés de leur métier sont trop souvent incomprises. La loi du 3 juin dernier avait trouvé un équilibre, avons-nous cru. Mais cela ne suffisait pas ; il fallait agir sur le code de la sécurité intérieure et pas seulement dans le code pénal. Ce texte veut surtout rassurer les policiers, qui ont l'impression que les magistrats ne comprennent pas leurs difficultés - ce qui n'est pas vrai.

Il ne s'agit pas seulement du terrorisme : Viry-Châtillon fut l'oeuvre de délinquants. L'étude d'impact qui détaille la jurisprudence de la Cour de cassation et de la Convention européenne des droits de l'homme est beaucoup plus nuancée qu'on ne le dit. Les policiers de la base le disent : les difficultés viennent parfois de leur hiérarchie.

Il faut sans doute prévoir des formations, le Conseil d'État a eu raison de le rappeler.

Ce texte apporte une clarification pour l'ensemble de ceux qui sont appelés à prendre les armes au nom de la justice.

Monsieur le rapporteur, votre proposition sur les policiers municipaux nous satisfait. Nos sénateurs pourront ainsi constater que les policiers municipaux sont amenés à assister les forces de l'ordre nationales.

Nous déposons un amendement qui corrige une curiosité : les policiers municipaux ne peuvent pas procéder à une palpation, alors que les agents de sécurité privée le peuvent.

L'article 2 sur l'anonymisation présente une difficulté : le procureur de la République ne devrait-il pas en donner l'autorisation ? Il faut sécuriser les procédures pour éviter qu'un dossier n'arrive un jour devant la Cour de cassation ou la Cour européenne des droits de l'homme et que celles-ci concluent que la procédure n'était pas conforme.

On ne peut pas envisager de laisser l'administration pénitentiaire assurer la sécurisation sur la voie publique - il faut la cantonner à l'emprise foncière des établissements. Nous l'avons vu lors de la mission sur le redressement de la justice : le transfèrement des détenus qui a été confié au ministère de la justice, a suffisamment chargé le personnel.

Je n'ai qu'une inquiétude : que ceux qui nous reprochent aujourd'hui de ne pas en avoir fait assez reviennent sur les efforts indispensables consentis par notre majorité : recrutements de magistrats, de policiers et de gendarmes. Il faut maintenir ces moyens sinon nos lois seront vaines. Montrons-nous modestes, constructifs, à l'écoute du personnel mais aussi de la hiérarchie. (Applaudissements sur les bancs socialistes et au centre)

M. Bruno Le Roux, ministre .  - Merci pour ces propos unanimes d'hommage aux forces de l'ordre. Tout dans ce texte répond à des nécessités opérationnelles et au respect de l'État de droit.

Monsieur Guérini, merci pour le soutien du groupe RDSE. Ce texte est nécessaire comme les six qui l'ont précédé sur ces sujets, et ce n'est pas fini. Nous n'agissons pas dans l'émotion.

M. Rachline a-t-il demandé aux policiers et aux gendarmes si c'était un texte de communication ? Ses interventions, quant à elles, font semblant de s'intéresser aux policiers et à la sécurité des Français.

Mme Sophie Primas.  - Très bien !

M. Bruno Le Roux, ministre.  - Merci aux rapporteurs pour l'esprit dans lequel ce débat commence. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

La discussion générale est close.

La séance est suspendue à 20 h 05.

présidence de Mme Françoise Cartron, vice-présidente

La séance reprend à 21 h 35.

Questions prioritaires de constitutionnalité

Mme la présidente.  - Le Conseil constitutionnel a communiqué au Sénat, par courriers en date du 24 janvier 2017, deux décisions relatives à des questions prioritaires de constitutionnalité portant respectivement sur les contrôles d'identité sur réquisitions du procureur de la République, et sur le délit de communication irrégulière avec un détenu.

Sécurité publique (Procédure accélérée - Suite)

Mme la présidente.  - Nous reprenons la discussion du projet de loi relatif à la sécurité publique (procédure accélérée).

Discussion des articles

ARTICLE PREMIER

Mme la présidente.  - Amendement n°22, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Supprimer cet article.

Mme Éliane Assassi.  - En avril 2013, M. Valls, ministre de l'intérieur, a estimé que l'unification du cadre d'usage des armes pour les policiers et gendarmes n'était ni justifiée ni opportune. Nous partageons cet avis, d'autant qu'il faut tenir compte de la norme supranationale européenne. On fait croire aux policiers que la loi leur sera plus favorable alors que c'est le contraire. On donne une arme à des gens qu'on ne forme ni n'informe, constate Laurent-Franck Lienard. Le cadre d'usage des armes des gendarmes aurait dû être aligné sur celui des policiers, et non l'inverse.

L'amendement n°38 rectifié n'est pas défendu.

M. François Grosdidier, rapporteur.  - Avis défavorable. Aujourd'hui, un policier ne peut même pas faire usage de son arme contre un terroriste qui tire sur la foule à coups de kalachnikov, du moment qu'il lui tourne le dos ! De même s'il est au volant d'une voiture. Le cadre commun de la légitime défense, conçu pour les simples citoyens, ne suffit pas.

M. Bruno Le Roux, ministre.  - Je partage l'avis du rapporteur. L'article premier, qui fait suite au rapport de Mme Cazaux-Charles et respecte toutes les exigences du droit national et européen, a fait l'objet d'une concertation avec les forces de l'ordre. Elles sont prêtes à s'en emparer, et leur formation sera assurée. Il ne s'agit pas seulement de répondre à leurs préoccupations, mais de leur donner les moyens d'affronter les menaces qu'elles rencontrent quotidiennement. Tout montre qu'elles agissent dans le strict respect des règles d'usage ; si ce n'est pas le cas, des procédures disciplinaires ou judiciaires sont engagées. Il n'y a pas d'inquiétudes à avoir, nos forces de l'ordre sont conscientes de leurs responsabilités.

L'amendement n°22 n'est pas adopté.

L'amendement n°33 rectifié n'est pas défendu.

Mme la présidente.  - Amendement n°28 rectifié, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste.

Alinéa 6

Supprimer cet alinéa.

Mme Esther Benbassa.  - L'alinéa 6 autorise l'usage d'une arme lorsqu'après deux sommations, les agents des forces de l'ordre « ne peuvent défendre autrement le terrain qu'ils occupent, les postes ou les personnes qui leur sont confiés ». C'est inutile et risqué. En cas d'attroupement, c'est redondant avec l'article L. 211-9 du code pénal. Les rares autres cas - attaque d'une brigade, d'un commissariat, protection rapprochée d'une personne - seront couverts par les autres alinéas de l'article L. 435-1.

M. François Grosdidier, rapporteur.  - Il y a là une confusion. Les attroupements ne sont pas les cas les plus dangereux. Les nouvelles dispositions peuvent trouver à s'appliquer lors de la protection d'un dépôt d'armes, d'un site industriel sensible, de hautes personnalités, de témoins ou de prévenus que l'on chercherait à neutraliser... Avis défavorable.

M. Bruno Le Roux, ministre.  - L'attaque d'une brigade de gendarmerie ou d'un commissariat, celle d'un fourgon pour faire évader un détenu lors d'un transfèrement sont rares, certes, mais il est nécessaire de s'en prémunir, et la légitime défense ne suffit pas. Avis défavorable.

L'amendement n°28 rectifié n'est pas adopté.

L'amendement n°32 rectifié bis n'est pas défendu, non plus que l'amendement n°34 rectifié bis.

Mme la présidente.  - Amendement n°29 rectifié, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste.

Après l'alinéa 8

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Dans les situations prévues aux 3° et 4°, il est exclu de tirer sur un fugitif, y compris s'il est coupable de meurtre, alors qu'aucune raison réelle et objective ne permet de penser qu'il va réitérer son acte ;

Mme Esther Benbassa.  - Les alinéas 7 et 8, qui confèrent aux policiers le droit d'ouvrir le feu pour arrêter un fugitif ou immobiliser un véhicule, risquent d'être mal compris sur le terrain. Nous proposons donc de reprendre les termes du rapport de l'INHESJ selon lesquels il est clairement exclu de tirer sur un fugitif, « y compris s'il est coupable de meurtre, alors que rien ne permet de penser qu'il va réitérer son acte ». Le rapport poursuit : « Toute autre interprétation (...) ne serait pas compatible avec une conception démocratique et républicaine de l'ordre, les armes ne pouvant parler à la place de la loi, expression de la souveraineté populaire », non plus qu'avec « l'exigence de nécessité posée par la CEDH ».

M. François Grosdidier, rapporteur.  - Vous êtes satisfaite, puisque la rédaction de la commission n'autorise les agents à tirer, dans ce cas, que s'ils ont « des raisons réelles et objectives d'estimer probable la perpétration par ces personnes d'atteintes à leur vie ou à leur intégrité physique ou à celles d'autrui ». Retrait.

M. Bruno Le Roux, ministre.  - Avis défavorable.

L'amendement n°29 rectifié est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement n°23, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Après l'alinéa 9

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Les armes ne doivent être utilisées qu'en ultime recours, seulement lorsque des mesures moins extrêmes sont insuffisantes. Les forces de l'ordre ne recourront intentionnellement à l'usage meurtrier d'une arme que si c'est absolument inévitable pour protéger des vies humaines. Lorsqu'elles n'ont pas d'autres choix que de faire usage d'une arme à feu, elles s'efforceront en toute circonstance de viser les zones non vitales du corps de la personne qu'elles cherchent à appréhender ; ».

Mme Éliane Assassi.  - Que soient désormais inscrits dans la loi les principes de stricte proportionnalité et d'absolue nécessité qui encadrent, selon la CEDH, l'usage de leurs armes par les forces de sécurité est une avancée importante. Attention cependant à ce qu'ils ne soient pas interprétés de manière trop extensive, surtout si la rédaction de la commission est retenue, et qu'ils ne créent pas d'insécurité juridique. Comme le recommande l'Action des chrétiens pour l'abolition de la torture, l'usage des armes ne doit être autorisé que si des mesures moins extrêmes se sont avérées insuffisantes, et l'on doit s'efforcer en toutes circonstances de viser les parties non vitales. C'est déjà la règle en Espagne.

M. François Grosdidier, rapporteur.  - Avis défavorable, car vous ne faites que décrire les principes d'absolue nécessité et de stricte proportionnalité que nous avons posés. L'usage d'armes non létales, auxquelles vous ne vous êtes guère montrée favorable, participe du reste de la réponse graduée... Quant à la formation des agents, elle relève du pouvoir réglementaire, si souhaitable soit-elle.

M. Bruno Le Roux, ministre.  - Votre intention est louable, mais c'est plutôt à la doctrine d'emploi et aux manuels de formation qu'il revient d'expliciter les principes d'absolue nécessité et de stricte proportionnalité, dont les contours ont d'ailleurs été définis par une jurisprudence abondante à laquelle les formateurs se réfèrent. Ce n'est que lorsqu'elles n'ont pas d'autre choix, pour prévenir une atteinte à la vie ou à l'intégrité physique, que les forces de l'ordre peuvent avoir recours aux armes. Retrait.

Mme Éliane Assassi.  - Par principe, je le maintiens.

M. Jacques Bigot.  - Une rédaction de ce type ne peut satisfaire les forces de l'ordre, qui ne veulent pas chaque fois avoir à tout prouver.

Mme Éliane Assassi.  - C'est justement le problème !

M. Jacques Bigot.  - À l'instant t, un fonctionnaire peut mal viser. Mieux vaut laisser au juge le soin d'apprécier in concreto.

L'amendement n°23 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°24, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Alinéas 12 à 15

Supprimer ces alinéas.

Mme Éliane Assassi.  - La commission des lois a étendu en partie aux policiers municipaux le régime unifié d'usage des armes que l'article premier rend applicables aux policiers nationaux et aux gendarmes. Leurs missions, administratives et de proximité, ne sont pourtant pas celles des policiers nationaux et gendarmes, d'investigation. Ce n'est d'ailleurs pas un cadeau pour les policiers municipaux, à qui on demande de réfléchir à l'usage de leurs armes en dehors de toute riposte ; en cas de bavure, il faudra aller en assises... Sur un sujet aussi grave, l'examen de ce texte en procédure accélérée et en fin de législature empêche tout débat apaisé.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°30 rectifié, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste.

Mme Esther Benbassa.  - Le groupe écologiste est également opposé à l'extension partielle du régime unifié aux policiers municipaux, qui plus est sans étude d'impact. Le droit commun de la légitime défense suffit parfaitement.

L'amendement n°35 rectifié n'est pas défendu.

Mme la présidente.  - Amendement n°21 rectifié ter, présenté par MM. Buffet, Rapin, Carle, Retailleau, Grand, Reichardt et Lemoyne, Mme Di Folco, M. Vial, Mmes Deromedi et Troendlé, MM. Mandelli et Lefèvre, Mme Debré, MM. Bizet et Bouchet, Mme Keller, MM. Cantegrit, Pillet, Darnaud, Portelli et Vasselle, Mme Giudicelli, MM. Milon et Pellevat, Mmes Lamure et Hummel, MM. Bonhomme et de Legge, Mme Garriaud-Maylam, M. Doligé, Mme Gruny et M. Husson.

Alinéa 15

Remplacer les mots :

au 1°

par les mots :

aux 1° et 5°

M. François-Noël Buffet.  - Nous nous félicitons pour notre part que la commission ait étendu aux policiers municipaux le droit de faire usage de leurs armes dans le cas prévu au 1°. Nous proposons d'y ajouter le 5°, c'est-à-dire le cas du périple meurtrier.

M. François Grosdidier, rapporteur.  - Les amendements nos24 et 30 rectifié traduisent une méconnaissance totale de la réalité. (Mme Éliane Assassi proteste) Depuis des décennies, les policiers municipaux reçoivent une formation technique, juridique et déontologique pointue. Leurs conditions d'exercice sont extrêmement difficiles. Aurélie Fouquet, Clarissa Jean-Philippe ont été assassinées, leur nom vous dit-il quelque chose ?

Mme Éliane Assassi.  - Scandaleux ! Ne mélangez pas tout !

M. François Grosdidier, rapporteur.  - La position de la commission des lois a fait consensus, seuls les groupes CRC et écologiste s'y sont opposés. Nous permettons aux policiers municipaux de protéger leur vie ou celle des citoyens comme des atteintes ou des menaces imminentes. Avis très défavorable.

J'en viens à l'amendement n°21 rectifié ter. Il était exclu d'étendre aux policiers municipaux le 2°, qui concerne des missions qui ne leur sont jamais confiées. Nous avons aussi choisi d'exclure les tirs après sommation visés aux 3° et 4°. Reste le cas des périples meurtriers, au 5°, et qui pourrait aussi concerner les agents de surveillance de la SNCF et de la RATP. La commission a émis un avis favorable à cet amendement.

M. Bruno Le Roux, ministre.  - Le Gouvernement s'en remettra à la sagesse du Sénat sur les deux premiers amendements, car s'il entend maintenir l'équilibre de l'article premier et éviter toute confusion sur les missions respectives de la police nationale et des polices municipales, il entend les préoccupations de votre commission et souhaite que le débat se poursuive. Avis défavorable, en revanche, à l'amendement n°21 rectifié ter.

M. Alain Richard.  - Réfléchissons avant de voter l'amendement de M. Buffet. Les polices municipales sont toujours sous le commandement opérationnel du maire et non de la police nationale. Seule une petite minorité d'agents disposent d'armes à feu.

Lorsqu'un policier est isolé, hors de toute formation organisée, il n'intervient que parce qu'il a été alerté par l'intermédiaire d'un réseau, le plus souvent un réseau radio, et qu'on lui a décrit un véhicule, par exemple. Or il n'existe pas encore de système de communication en temps réel entre police nationale et polices municipales. La construction du réseau radio polyvalent prendra du temps. Dès lors, je ne vois que des inconvénients à inscrire dans la loi une éventualité qui n'a aucune chance de se produire. C'est adresser aux policiers municipaux un signal trompeur.

Les amendements identiques nos24 et 30 rectifié ne sont pas adoptés.

L'amendement n°21 rectifié ter est adopté.

L'article premier, modifié, est adopté.

ARTICLE 2

Mme la présidente.  - Amendement n°25, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Supprimer cet article.

Mme Cécile Cukierman.  - L'article 2 autorise les policiers, gendarmes et douaniers à conserver l'anonymat dans les procédures pénales sur décision de leur hiérarchie. Nous y sommes opposés, car les conditions sont trop extensives, au point que l'anonymat pourrait devenir un mode d'exercice normal de l'action policière. En outre, c'est une protection illusoire. Les exemples cités dans l'étude d'impact parlent d'eux-mêmes : les policiers agressés ont été rencontrés fortuitement ou suivis depuis leur lieu de travail. Il faut trouver le juste équilibre entre la sécurité des forces de l'ordre et les droits de la défense.

M. François Grosdidier, rapporteur.  - Avis défavorable. Vous méconnaissez là encore les menaces et pressions exercées contre les policiers. L'anonymat est quasi systématique dans les pays qui ont connu le terrorisme pendant de longues années, comme l'Espagne ou l'Irlande. Il peut aussi être nécessaire contre des mafieux, ou même de petits délinquants que des motifs qui paraissent insignifiants à toute personne rationnelle suffisent à rendre agressifs. L'agent devrait être autorisé à faire usage de ce droit, non pas par son chef immédiat, mais par un responsable hiérarchique tel que le directeur départemental de la sécurité publique ou le commandant de groupement. Enfin, les magistrats pourront lever cet anonymat à tout moment.

M. Bruno Le Roux, ministre.  - Un dispositif trop extensif ? Illusoire ? Les incidents de 2016 ont pourtant montré que tous les agents intervenant dans une enquête pénale sont susceptibles de subir des menaces. En outre, nous avons encadré ce droit à l'anonymat, qui ne pourra être autorisé que lorsque la révélation de l'identité de l'agent sera susceptible de mettre en danger sa vie ou son intégrité physique ou celle de ses proches. C'est tout à fait proportionné, et il n'y a aucun risque que l'anonymat devienne un mode d'exercice normal de l'activité policière, pour reprendre vos termes. Avis défavorable.

Mme Cécile Cukierman.  - Parvenir à d'autres conclusions que vous, monsieur le rapporteur, ce n'est ni méconnaître les risques, ni se désintéresser de la vie des agents. Le débat politique fait la force de la démocratie, et il faudra le préserver au cours des années à venir...

On ne peut non plus assimiler la France au pays basque ou à l'Irlande du Nord. Tenons-nous en à la situation actuelle.

L'équilibre entre sécurité et droits individuels et collectifs est toujours délicat à trouver. Selon nous, cet article le fragilise. C'est une réflexion qu'il faudra poursuivre.

L'amendement n°25 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°39 rectifié, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 3, première phrase, et alinéa 16

Après les mots :

responsable hiérarchique

insérer les mots :

qui doit être d'un niveau suffisant,

M. Bruno Le Roux, ministre.  - Si j'ai bien entendu le rapporteur, il devrait approuver cet amendement qui rétablit la précision selon laquelle le responsable hiérarchique qui autorisera l'anonymat devra être d'un niveau hiérarchique suffisant, comme l'a demandé le Conseil d'État. C'est une garantie essentielle.

M. François Grosdidier, rapporteur.  - Cette disposition n'a tout simplement pas sa place dans la loi. Nous n'avons aucune divergence de fond, l'exécutif fera ce qu'il a à faire. Avis défavorable.

L'amendement n°39 rectifié n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°2, présenté par M. Vandierendonck et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 4

Compléter cet alinéa par les mots :

puni d'au moins trois ans d'emprisonnement

M. Jacques Bigot.  - Prudence, l'anonymat doit être réservé aux infractions graves, punies d'au moins trois ans d'emprisonnement. C'est le quantum qui ouvre la voie à la détention provisoire.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°31 rectifié, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste.

Mme Esther Benbassa.  - L'anonymisation, pour ne pas devenir un mode d'exercice normal de l'activité policière, doit être à tout le moins réservée aux crimes et délits punis d'au moins trois ans d'emprisonnement.

M. François Grosdidier, rapporteur.  - L'anonymisation ne doit, en effet, pas être générale. À notre sens, le critère pour l'appliquer doit être, non pas la peine de trois ans d'emprisonnement, mais la mise en danger de la vie ou de l'intégrité physique de l'agent ou de ses proches. Pensez à ceux qui se livrent à l'outrage ou à la rébellion, et qui révèlent assez leur agressivité.

Interprétation rigoureuse, oui, condition systématique du quantum de peine, non. Avis défavorable.

M. Bruno Le Roux, ministre.  - Avis favorable puisque ces amendements rétablissent la rédaction du Gouvernement. La réflexion devra se prolonger.

Les amendements identiques nos2 et 31 rectifié ne sont pas adoptés.

Mme la présidente.  - Amendement n°4 rectifié, présenté par MM. Grand, Masclet, Danesi et Joyandet, Mme Garriaud-Maylam, M. Lefèvre, Mme Micouleau, MM. J.P. Fournier et Vasselle, Mmes Deromedi et Cayeux, MM. Huré, Bonhomme, Chasseing, Milon, Reichardt, Laufoaulu, Doligé, del Picchia et G. Bailly, Mme Duchêne, MM. Karoutchi et Charon, Mme de Rose, MM. Revet, Chaize et Laménie, Mmes Giudicelli et Hummel, MM. Gremillet et Pellevat et Mme Gruny.

I.  -  Alinéa 7

Compléter cet alinéa par les mots :

et à l'article L. 511-1 du code de la sécurité intérieure

II.  -  Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

...  -  L'article L. 511-5 du code de la sécurité intérieure est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Ils peuvent, sous leur numéro d'immatriculation administrative, leur qualité et leur commune d'affectation, être identifiés dans les actes de procédure, sur autorisation du maire, déposer, être désignés, comparaître comme témoins ou se constituer parties civiles en utilisant ces mêmes informations, dans les conditions et sous les réserves prévues à l'article 15-4 du code de procédure pénale et dans des conditions fixées par décret. »

M. Jean-Pierre Grand.  - Ce n'est pas en raison de leur qualité d'officier ou d'agent de police judiciaire que des policiers ou gendarmes sont agressés, mais parce qu'ils appartiennent aux forces de sécurité. Il n'y a pas de raison que les policiers municipaux n'aient pas le même droit à l'anonymat.

M. François Grosdidier, rapporteur.  - Vous connaissez mon attachement aux prérogatives et à la protection des agents municipaux. Toutefois, l'anonymisation me paraît sans effet sur la petite délinquance de proximité dont s'occupent les policiers municipaux, sur ces petits malfrats qui, parfois, appellent les policiers par leur prénom. Attention aussi à ne pas généraliser le dispositif, au risque de le fragiliser car cela contreviendrait aux droits de la défense.

M. Bruno Le Roux, ministre.  - Je connais votre sincérité, monsieur le sénateur. L'extension de la procédure dérogatoire aux agents de police municipale n'est toutefois pas cohérente avec la position du Gouvernement qui souhaitait la réserver aux infractions les plus graves, punies d'au moins trois ans. Les policiers municipaux n'ont pas compétence pour établir des actes d'enquête dans des domaines autres que contraventionnel, ils ne sont donc pas exposés aux mêmes risques que les gendarmes et policiers nationaux. Avis défavorable.

L'amendement n°4 rectifié est retiré.

L'article 2 est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

Mme la présidente.  - Amendement n°10 rectifié bis, présenté par MM. Grand, Masclet, Danesi et Joyandet, Mme Garriaud-Maylam, MM. Fontaine et Lefèvre, Mme Micouleau, MM. J.P. Fournier et Vasselle, Mmes Deromedi et Cayeux, MM. Huré, Bonhomme, Chasseing, Milon, Reichardt, Legendre, Laufoaulu, Doligé, del Picchia et G. Bailly, Mme Duchêne, M. Charon, Mme de Rose, MM. Revet, Chaize et Laménie, Mmes Giudicelli et Hummel, M. Pellevat et Mme Gruny.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 62-1 du code de procédure pénale est complété par les mots : « ou de la préfecture de leur département ».

M. Jean-Pierre Grand.  - L'article 62-1 du code de procédure pénale autorise les officiers et agents de police judiciaire à déclarer comme domicile l'adresse du siège du service dont ils dépendent - possibilité rendue inopérante pour les militaires par le fait que leurs familles sont logées sur le même site que l'unité de rattachement. Nous permettons donc la domiciliation à l'adresse de la préfecture de département.

M. François Grosdidier, rapporteur.  - Avis défavorable. L'agression dans une caserne est moins aisée que dans un appartement privé. Si tant est que la domiciliation de préfecture soit possible - or il y a des objections juridiques - l'appartenance du gendarme à telle ou telle brigade n'est pas difficile à établir. Les dispositions actuelles sont suffisamment protectrices. Retrait ?

M. Bruno Le Roux, ministre.  - Même avis. Le code de procédure pénale prévoit déjà la domiciliation au siège du service dont dépendent les agents, c'est suffisant pour garantir leur protection. La remise des plis qui leur sont adressés peut difficilement dépendre d'un renvoi par les services préfectoraux. En outre, cet amendement entrainerait une confusion entre les rôles respectifs de l'autorité administrative et judiciaire. Retrait ou avis défavorable.

M. Jean-Pierre Grand.  - Je le retire.

L'amendement n°10 rectifié bis est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement n°13 rectifié bis, présenté par MM. Grand, Masclet, Danesi et Joyandet, Mme Garriaud-Maylam, MM. Fontaine et Lefèvre, Mme Micouleau, MM. J.P. Fournier et Vasselle, Mmes Deromedi et Cayeux, MM. Huré, Bonhomme, Savary, Chasseing, Milon, Reichardt, Rapin, Legendre, Laufoaulu, Doligé, del Picchia et G. Bailly, Mme Duchêne, MM. Karoutchi et Charon, Mme de Rose, MM. Revet, Chaize et Laménie, Mmes Giudicelli et Hummel, M. Pellevat et Mme Gruny.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 322-2 du code de la route, il est inséré un article L. 322-... ainsi rédigé :

« Art. L. 322-... -  Pour la délivrance du certificat d'immatriculation de leurs véhicules personnels, les personnels visés aux articles 16 à 29 du code de procédure pénale sont autorisés à déclarer comme domicile l'adresse du siège du service dont ils dépendent. »

M. Jean-Pierre Grand.  - Il faut aussi protéger les forces de sécurité en permettant l'utilisation de leur adresse professionnelle pour l'immatriculation de leurs véhicules personnels. En effet, l'accès au Système d'immatriculation des véhicules (SIV) est autorisé à de nombreux professionnels de l'automobile : un garagiste peu scrupuleux, par exemple, pourrait dévoiler l'identité et l'adresse personnelle d'un policier ou d'un gendarme.

Le service se chargerait de transmettre aux agents les éventuelles contraventions.

M. François Grosdidier, rapporteur.  - Retrait ou avis défavorable. L'accès au SIV est extrêmement restreint et garanti par une traçabilité totale. Tout agent public qui consulterait le fichier doit justifier sa consultation. Les garagistes n'y ont accès que lorsqu'ils sont mandatés par leurs clients pour procéder à l'immatriculation.

Imaginez en outre si toutes les contraventions des fonctionnaires, mais aussi de leurs conjoint ou enfants, arrivaient en préfecture et devaient être ré-adressées au titulaire de la carte grise !

M. Bruno Le Roux, ministre.  - Même avis, retrait ou avis défavorable.

L'amendement n°13 rectifié bis est retiré.

L'article 3 est adopté, ainsi que les articles 4, 4 bis et 5.

ARTICLE 6

Mme la présidente.  - Amendement n°26, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Supprimer cet article.

Mme Évelyne Rivollier.  - Autoriser le port d'arme pour les agents de sécurité privée participe de la tendance inquiétante à la privatisation de la sécurité intérieure. Le port et l'usage d'une arme doit rester de la responsabilité d'agents publics formés à cet effet. Des sociétés à but lucratif n'ont pas à venir compléter les dispositifs publics de lutte contre la délinquance ou contre le terrorisme.

On met le doigt dans un engrenage dangereux qui risque d'aller jusqu'à l'armement des agents de surveillance, nullement formés pour cela. La multiplication des armes à feu ne fait jamais bon ménage avec le principe de sécurité ! Le manque de moyens ne saurait justifier que l'État se décharge de sa mission régalienne sur des sociétés privées.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°36 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collombat, Amiel, Arnell, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin, Guérini et Hue, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et MM. Requier et Vall.

M. Jean-Noël Guérini.  - Si la protection des personnes exposées à des risques exceptionnels d'atteinte à la vie constitue une charge importante pour les forces de l'ordre, armer les agents de sécurité privée est contraire à la conception française du « monopole de la violence physique légitime » de l'État. De plus, la jurisprudence du Conseil constitutionnel et du Conseil d'État encadrent très strictement les possibilités de déléguer des prérogatives de police.

La loi du 12 juillet 1983 avait d'ailleurs exclu la possibilité d'armer les personnels des entreprises exerçant une activité de protection des personnes, là où elle l'autorisait pour les activités de gardiennage ou de transport de fonds.

M. François Grosdidier, rapporteur.  - Avis défavorable. Comment imaginer que l'on affecte des agents de la police nationale ou de la gendarmerie à la protection des personnes privées, aux frais du contribuable ? Une surveillance 24 heures sur 24 mobilise quatre policiers. Ces personnes, souvent des grands patrons d'entreprises sensibles, ont les moyens d'assurer leur protection.

L'article permet à des personnes menacées de déléguer le port d'armes dont elles disposent à une personne plus qualifiée. Le système actuel est hypocrite, puisque les gardes du corps n'ont pas de port d'arme à titre professionnel, mais à titre personnel...

Nous proposons de dupliquer ce qui existe pour les convoyeurs de fonds, qui sont formés et contrôlés sous l'égide du Conseil national des activités privées de sécurité (Cnaps). Cela fonctionne très bien, aucune bavure ! L'armement de la sécurité privée existe ; il s'agit de l'organiser et de le contrôler, sachant que c'est toujours l'État qui décide des personnes et des lieux protégés par des gardes armés.

M. Bruno Le Roux, ministre.  - La protection des personnes est déjà une activité privée réglementée par le code de sécurité intérieure. Il ne s'agit pas de déléguer des prérogatives de police de manière générale et non encadrée, mais de rendre possible l'armement des gardes du corps dans les cas très rares où il y a un risque d'atteinte à la vie.

Le Conseil constitutionnel ni le Conseil d'État n'interdisent aux acteurs privés d'exercer des missions de protection des personnes et des biens, dès lors qu'elles sont encadrées par la loi. Création d'un Conseil national de sécurité privée en 2012, obligation de formation continue en 2015 : les réglementations sont déjà nombreuses.

La protection policière, malgré son coût financier et humain, n'a pas vocation à disparaitre, mais dans le contexte de menace croissante, il est indispensable d'autoriser d'autres régimes de protection armée.

Le simple droit de porter une arme pour se défendre n'est pas satisfaisant : porter une arme est un métier. Il faut en préciser les conditions pour les gardes du corps. L'autorisation du port d'armes concernera la protection d'une personne identifiée, son usage limité au cas de légitime défense. Formation, certificat médical, comportement : l'aptitude professionnelle sera garantie, car le sujet n'est pas mineur. Avis défavorable.

Les amendements identiques nos26 et 36 rectifié ne sont pas adoptés.

L'article 6 est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

Mme la présidente.  - Amendement n°41 rectifié, présenté par M. Grosdidier, au nom de la commission des lois.

Après l'article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le titre Ier du livre VI du code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :

1° Après le 1° de l'article L. 611-1, il est inséré un 1° bis ainsi rédigé :

« 1° bis À faire assurer par des agents armés l'activité mentionnée au 1° lorsque celle-ci est exercée dans des circonstances exposant ces agents, ou les personnes se trouvant dans les lieux surveillés, à un risque exceptionnel d'atteinte à leur vie ; »

2° Après le premier alinéa de l'article L. 612-2, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L'exercice de l'activité mentionnée au 1° bis de l'article L. 611-1 est exclusif de toute autre activité. » ;

3° Après l'article L. 612-9, il est inséré un article L. 612-9-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 612-9-1.  - L'autorisation prévue à l'article L. 612-9 ne peut être délivrée en vue de l'exercice de l'activité mentionnée au 1° bis de l'article L. 611-1 à un demandeur qui ne justifie pas de l'emploi d'agents disposant d'une aptitude professionnelle spécifique ainsi que d'une organisation et d'équipements propres à garantir la sécurité du port et de la conservation des armes. 

« Un décret en Conseil d'État détermine les modalités d'application du présent article. » ;

4° Après la section 1 du chapitre III, est insérée une section 1° bis ainsi rédigée :

« Section 1° bis : Activités de surveillance armée

« Art. L. 613-7-1.  -  Toute mission exercée dans les conditions prévues au 1° bis de l'article L. 611-1, dans un lieu déterminé et pour une durée donnée, par une personne titulaire de l'autorisation mentionnée à l'article L. 612-9-1, nommément désignée, est soumise à l'autorisation préalable du représentant de l'État dans le département.

« Art. L. 613-7-2.  -  Sans préjudice des dispositions des articles L. 612-7 et L. 612-20, nul ne peut exercer l'activité mentionnée au 1° bis de l'article L. 611-1, comme employé ou comme dirigeant, s'il est interdit d'acquisition ou de détention d'armes en application des articles L. 312-3, L. 312-3-1, L. 312-10 et L. 312-13.

« Art. L. 613-7-3.  -  Les articles L. 613-1, L. 613-2, L. 613-3 et L. 613-4 sont également applicables aux personnes exerçant l'activité mentionnée au 1° bis de l'article L. 611-1. »

5° Après le 2° de l'article L. 617-1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« 2° bis Le fait d'exercer l'activité mentionnée au 1° bis de l'article L. 611-1 et d'avoir une autre activité ; ».

M. François Grosdidier, rapporteur.  - La commission des lois propose de créer une filière de sécurité privée pour la protection des lieux comme il en existe pour la protection des personnes ou le convoyage de fonds.

Certaines entreprises comme Areva ou Disneyland sont déjà protégées par des agents privés armés : la loi de 1983 le prévoit, mais le décret n'a jamais été publié... Il s'agit toujours de lieux désignés par l'État.

M. Bruno Le Roux, ministre.  - Vous proposez la création d'une surveillance armée de certains lieux quand il y a un risque d'atteinte à la vie. L'article 10 de la loi du 12 juin 1983 sur la sécurité privée prévoit de longue date la possibilité d'armer les agents de surveillance ou de gardiennage, mais cette mesure n'a pas été mise en oeuvre, faute de cadre réglementaire adapté.

L'évolution proposée s'inscrit dans le cadre législatif existant, elle a du sens dans le contexte de menace terroriste. Des débats techniques sont en cours depuis un an. Juridiquement, la réforme pourrait se faire par voie réglementaire. Cela dit, votre amendement offre l'opportunité d'un débat au Parlement et d'un encadrement supplémentaire. Le champ d'application est clairement circonscrit à la menace terroriste identifiée. La régulation est double, par le contrôle d'une filière professionnalisée et par l'autorité administrative, qui appréciera au cas par cas. Même si la proposition est équilibrée, la réflexion devra se prolonger à l'Assemblée nationale. Sagesse.

Mme Catherine Troendlé.  - Très bien.

L'amendement n°41 rectifié est adopté et devient un article additionnel.

L'article 6 bis est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°17 rectifié, présenté par le Gouvernement.

Après l'article 6 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La section 3 du titre XV du livre IV du code de procédure pénale est ainsi modifiée :

1° Au premier alinéa de l'article 706-25-4, les mots : « à l'article L. 224-1 » sont remplacés par les mots : « aux articles L. 224-1 et L. 225-7 » ;

2° Au quatrième alinéa de l'article 706-25-6, les mots : « à l'article L. 224-1 » sont remplacés par les mots : « aux articles L. 224-1 ou L. 225-7 » ;

3° Au quinzième alinéa de l'article 706-25-7, les mots : « à l'article L. 224-1 » sont remplacés par les mots : « aux articles L. 224-1 ou L. 225-7 » ;

4° Au 2° de l'article 706-25-9, les mots : « à l'article L. 224-1 » sont remplacés par les mots : « aux articles L. 224-1 et L. 225-7 ».

M. Bruno Le Roux, ministre.  - La loi du 3 juin 2016 et la loi du 21 juillet 2016 instaurent un nouveau régime de contrôle administratif des returnees. L'encadrement de ces personnes de retour des théâtres d'opération terroriste est indispensable à la sécurité nationale. Le dispositif ne s'appliquerait qu'aux personnes non prises en compte par l'autorité judiciaire.

En cas de non-respect des obligations administratives qui leur sont imposées, le code de la sécurité intérieure prévoit une peine de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende. Toutefois, contrairement aux violations des obligations imposées dans le cadre d'une interdiction de sortie du territoire, les infractions ne font pas l'objet d'une inscription au fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions terroristes (Fijait). Ce serait pourtant précieux pour le suivi et l'évaluation de la dangerosité de ces personnes.

M. François Grosdidier, rapporteur.  - La proposition est cohérente, avis favorable.

L'amendement n°17 rectifié est adopté et devient un article additionnel.

L'article 6 ter est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°42, présenté par M. Grosdidier, au nom de la commission des lois.

Après l'article 6 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le second alinéa de l'article 78-6 du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° La première phrase est complétée par les mots : « ou de retenir celui-ci pendant le temps nécessaire à son arrivée ou à celle d'un agent de police judiciaire agissant sous son contrôle » ;

2° Après la deuxième phrase, sont insérées deux phrases ainsi rédigées :

« Pendant le temps nécessaire à l'information et à la décision de l'officier de police judiciaire, le contrevenant est tenu de demeurer à la disposition d'un agent mentionné au premier alinéa. La violation de cette obligation est punie de deux mois d'emprisonnement et de 7 500 € d'amende. »

M. François Grosdidier, rapporteur.  - Cet amendement précise la procédure suivie par les agents de police municipale lorsqu'ils relèvent l'identité des contrevenants.

M. Bruno Le Roux, ministre.  - Aligner les prérogatives des policiers municipaux sur celles des agents assermentés de la SNCF et de la RATP est de nature à renforcer l'efficacité de leur action. L'amendement précise les rôles respectifs des policiers municipaux et des agents de police judiciaire et respecte les droits des personnes puisque la retenue est brève et conditionnée. Avis favorable.

L'amendement n°42 est adopté et devient un article additionnel.

Mme la présidente.  - Amendement n°18, présenté par le Gouvernement.

Après l'article 6 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 21 du même code est ainsi modifié :

1° Le 1° ter est complété par les mots : « et les membres de la réserve civile de la police nationale qui ne remplissent pas les conditions prévues à l'article 20-1 » ;

2° Le 1° sexies est abrogé.

M. Bruno Le Roux, ministre.  - Depuis deux ans, les policiers sont très sollicités et nous avons dû faire appel à la réserve civile de la police nationale, composée de retraités et de volontaires et déjà étendue aux anciens adjoints de sécurité. Les prérogatives des réservistes sont toutefois restreintes, ce qui limite le soutien qu'ils apportent aux fonctionnaires actifs. Nous souhaitons donc les aligner sur celles des militaires servant dans la réserve opérationnelle de la gendarmerie nationale et des adjoints de sécurité de la police nationale.

M. François Grosdidier, rapporteur.  - C'est cohérent, sachant que la police nationale est très sollicitée et que les deux forces sont placées sous l'autorité du ministère de l'intérieur. Avis favorable.

L'amendement n°18 est adopté et devient un article additionnel.

Mme la présidente.  - Amendement n°5 rectifié bis, présenté par MM. Grand, Masclet, Danesi et Joyandet, Mmes Garriaud-Maylam et Micouleau, MM. J.P. Fournier et Vasselle, Mmes Deromedi et Cayeux, MM. Huré, Savary, Chasseing, Milon, Reichardt, Rapin, Laufoaulu, Doligé, del Picchia et G. Bailly, Mme Duchêne, MM. Karoutchi et Charon, Mme de Rose, MM. Revet, Chaize et Laménie, Mmes Giudicelli et Hummel, M. Pellevat et Mme Gruny.

Après l'article 6 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa de l'article 78-6 du code de procédure pénale est complété par les mots : « mais également pour rédiger un rapport lors de la constatation d'une infraction pénale ».

M. Jean-Pierre Grand.  - Les agents de police judiciaire adjoints sont habilités à procéder à un relevé d'identité uniquement pour dresser des contraventions. Cet amendement les y autorise également pour constater une infraction pénale.

M. François Grosdidier, rapporteur.  - Je partage votre préoccupation, mais le cadre constitutionnel nous oblige à la prudence. Faut-il que les policiers municipaux, troisième force de sécurité de l'État, puissent constater des infractions sans passer par l'OPJ ? Je le crois, notamment pour certaines infractions de la compétence du maire. Si un policier municipal constate la fréquentation d'un square après 22 heures en contravention d'un arrêté municipal, il ne peut verbaliser, et ce sont les forces de l'ordre nationales qui doivent entendre les contrevenants ou leurs parents...

Le Conseil constitutionnel avait censuré les dispositions de la Loppsi donnant des prérogatives d'OPJ aux policiers municipaux, considérant que ceux-ci sont sous l'autorité du maire, ce qui mettait à mal le principe constitutionnel d'indépendance de l'autorité judiciaire.

Difficile donc d'aller plus loin, même si cela serait bienvenu en matière d'infraction routière notamment. Je suis plus sceptique sur la qualification d'OPJ ou d'APJ pour des délits qui relèvent de la police nationale.

Retrait, mais je demande au ministère de l'intérieur de s'atteler rapidement à la question de la qualification judiciaire des policiers municipaux dans le cadre de la commission consultative des polices municipales, que je préside, pour décharger la police nationale des charges indues.

M. Bruno Le Roux, ministre.  - Tout à fait d'accord pour travailler dans le cadre de cette commission. Retrait ?

M. Jean-Pierre Grand.  - Merci de cette proposition. Reste que j'ai vu des policiers municipaux arrêter des voleurs en les sommant de venir se présenter à la gendarmerie le lendemain... Heureusement, ils ont été pris de remords et ont obtempéré, mais c'est loin d'être toujours le cas !

M. François Grosdidier, rapporteur.  - L'amendement adopté précédemment permet de les retenir ou de les amener à l'OPJ.

L'amendement n°5 rectifié bis est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement n°7 rectifié bis, présenté par MM. Grand, Masclet, Danesi et Joyandet, Mme Garriaud-Maylam, M. Lefèvre, Mme Micouleau, MM. J.P. Fournier et Vasselle, Mmes Deromedi et Cayeux, MM. Huré, Bonhomme, Savary, Chasseing, Milon, Reichardt, Rapin, Laufoaulu, Doligé, del Picchia et G. Bailly, Mme Duchêne, MM. Karoutchi et Charon, Mme de Rose, MM. Revet, Chaize et Laménie, Mmes Giudicelli et Hummel, M. Pellevat et Mme Gruny.

Après l'article 6 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Aux premiers alinéas des I, II et III de l'article 78-2-2, au premier alinéa de l'article 78-2-3 et au premier alinéa du I de l'article 78-2-4 du code de procédure pénale, la référence : « et 1° ter » est remplacée par les références : « , 1° ter et 2° ».

M. Jean-Pierre Grand.  - Les policiers municipaux sont activement sollicités pour sécuriser les manifestations sportives, culturelles ou récréatives mais aussi pour renforcer la sécurité aux abords des établissements scolaires, établissements publics ou lieux de culte.

Si un contrevenant refuse ou ne peut justifier de son identité, le policier municipal en rend compte immédiatement à tout officier de police judiciaire qui peut alors lui ordonner de lui présenter sur-le-champ le contrevenant. À défaut de cet ordre, il ne peut retenir le contrevenant.

Je propose d'autoriser les policiers municipaux à effectuer différents contrôles sous l'autorité d'un OPJ et sur réquisitions écrites du procureur, en leur étendant les dispositions applicables aux adjoints de sécurité.

M. François Grosdidier, rapporteur.  - Avis défavorable. Cela fait partie des dispositions censurées par le Conseil constitutionnel dans la Loppsi.

M. Bruno Le Roux, ministre.  - Avis défavorable.

L'amendement n°7 rectifié bis est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement n°27 rectifié bis, présenté par M. Vandierendonck et les membres du groupe socialiste et républicain.

Après l'article 6 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le sixième alinéa de l'article L. 511-1 du code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :

1° Après la référence : « L. 613-3 », sont insérés les mots : « ou à la surveillance de l'accès à un bâtiment communal » ;

2° Sont ajoutées deux phrases ainsi rédigées :

 « Ils peuvent également procéder, avec le consentement exprès des personnes, à des palpations de sécurité. Dans ce cas, la palpation de sécurité doit être effectuée par une personne de même sexe que la personne qui en fait l'objet. »

M. Jacques Bigot.  - Il s'agit de permettre aux policiers municipaux qui assurent la sécurité de certains événements sportifs ou culturels de procéder à des palpations, comme peuvent le faire les agents de sécurité privés.

M. François Grosdidier, rapporteur.  - C'est bien le moins ! Avis très favorable.

M. Bruno Le Roux, ministre.  - Avis favorable, cela renforcera l'efficacité.

M. Alain Vasselle.  - Je suivrai le rapporteur. Cependant, je note qu'il faut le consentement exprès de la personne qui fait l'objet de la palpation. N'est-ce pas un coup d'épée dans l'eau ?

L'amendement n°27 rectifié bis est adopté et devient un article additionnel.

Mme la présidente.  - Amendement n°6 rectifié bis, présenté par MM. Grand, Masclet, Danesi et Joyandet, Mme Garriaud-Maylam, M. Lefèvre, Mme Micouleau, MM. J.P. Fournier et Vasselle, Mmes Deromedi et Cayeux, MM. Huré, Bonhomme, Savary, Chasseing, Milon, Reichardt, Rapin, Laufoaulu, Doligé, del Picchia et G. Bailly, Mme Duchêne, M. Charon, Mme de Rose, MM. Revet, Chaize et Laménie, Mmes Giudicelli et Hummel, M. Pellevat et Mme Gruny.

Après l'article 6 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le sixième alinéa de l'article L. 511-1 du code de la sécurité intérieure, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation au chapitre III du titre II du livre Ier du code de procédure pénale, les agents de police municipale peuvent, sur décision du maire et sur l'instruction de l'officier de police judiciaire territorialement compétent, effectuer des contrôles de véhicules ou de personnes lors de circonstance exceptionnelle et dans un périmètre préalablement identifié. »

M. Jean-Pierre Grand.  - Cette fois-ci, il s'agit d'autoriser les policiers municipaux à effectuer des contrôles de véhicule sans infraction préalable ou des contrôles de personnes lors de circonstances exceptionnelles.

M. François Grosdidier, rapporteur.  - Là encore, l'amendement se heurte à la jurisprudence du Conseil constitutionnel. Que se passe-t-il si la décision du maire et l'instruction de l'OPJ ne concordent pas ? En outre, les termes de « contrôle de véhicules et de personnes » sont trop imprécis. Nous devons mener un travail plus global sur la qualification judiciaire des policiers municipaux. Retrait ?

M. Bruno Le Roux, ministre.  - Même avis. Monsieur Vasselle, le refus de palpation peut entraîner l'interdiction d'entrer dans un périmètre, les fan zones, par exemple.

L'amendement n°6 rectifié bis est retiré.

ARTICLE 7

Mme la présidente.  - Amendement n°20 rectifié bis, présenté par MM. Kern, Gabouty et Détraigne, Mme Loisier, MM. Capo-Canellas, Médevielle et Longeot, Mmes Joissains et Férat, MM. D. Dubois, Roche, Cigolotti, Bockel, Tandonnet, M. Mercier et Maurey, Mme Billon, MM. J.L. Dupont et Canevet, Mme Létard, MM. Vogel, Kennel, A. Marc, Legendre et Reichardt, Mme Keller, MM. Doligé et Lefèvre, Mme Micouleau, MM. Bignon, Danesi et J.P. Fournier, Mme Duchêne, MM. Lemoyne, Laménie, Joyandet, Mandelli, Grand et Chasseing, Mme Deromedi, M. Gremillet, Mme Hummel, MM. Pellevat et César, Mmes Duranton, Gruny et Garriaud-Maylam et MM. Perrin, Raison et Vasselle.

Après l'alinéa 3

Insérer deux alinéas ainsi rédigés : 

...) Le deuxième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Sont considérés comme dépositaires de l'Autorité publique les représentants de l'État et des collectivités territoriales, les représentants de la force publique et les agents exerçant une fonction de police, les officiers ministériels lorsqu'ils exercent les fonctions pour lesquelles ils ont été investis, les fonctionnaires exerçant des fonctions d'autorité définies par la loi ou le règlement. » ;

M. Claude Kern.  - Cet amendement reconnait dans la loi les maires et adjoints aux maires comme dépositaires de l'autorité publique.

Après les agressions répétées subies par des maires et le reclassement de certains délits en contraventions, il est urgent de confirmer que l'aggravation des peines proposées par ce texte, concerne aussi les outrages aux maires. Cela évitera de faire appel à la jurisprudence plutôt qu'à la loi. Un maire l'est 24 heures sur 24, 365 jours sur 365 !

M. François Grosdidier, rapporteur.  - Avis défavorable, même si nous partageons votre préoccupation. La qualité de dépositaire de l'autorité publique est reconnue aux maires ou à leurs adjoints dans la jurisprudence. Il existe quelques rares exceptions bien sûr. J'ai été choqué, comme beaucoup, de voir le tribunal refuser cette qualité à un maire qui avait été molesté lors d'une réunion publique au motif qu'il était intervenu en qualité de président d'une société foncière. Je ne sais si cette jurisprudence a été confirmée.

Cependant, même si nous dressons une liste limitative des personnes dépositaires de l'autorité publique, cette qualité ne serait pas reconnue au maire injurié dans le cadre d'un conflit privé, s'il avait maille à partir avec son voisin par exemple.

La jurisprudence étant large, une liste limitative aurait pour inconvénient d'exclure certaines personnes qui interviennent comme dépositaires de l'autorité publique sans avoir la qualité d'OPJ.

Bref, cet amendement présente plus d'inconvénients que d'avantages.

M. Bruno Le Roux, ministre.  - Amendement inutile, car cette qualité est déjà reconnue aux maires par la jurisprudence. Il en est de même pour les préfets, le président de la République, les directeurs et sous-directeurs des services extérieurs de l'État, les présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat mais aussi, les notaires, les huissiers ou encore les avoués. La liste est plus vaste que les cas pris en compte dans votre amendement. Une telle précision exclurait par exemple des agents contractuels exerçant des fonctions d'autorité. Retrait ou avis défavorable.

M. Alain Vasselle.  - Je suis cosignataire de cet amendement. On nous dit qu'il est satisfait par la jurisprudence et qu'il affaiblit le maire plutôt que de le renforcer.

Le rapporteur a cité le cas d'un maire qui interviendrait dans un problème de voisinage...

M. François Grosdidier, rapporteur.  - J'ai parlé d'un conflit avec son voisin.

M. Alain Vasselle.  - Sur un territoire privé, il perdrait donc sa qualité de dépositaire de l'autorité publique ? C'est pourtant bien en sa qualité de maire qu'il intervient pour tenter d'apaiser un conflit de voisinage.

M. Marc Laménie.  - Quand on est maire, on est sollicité pour un oui ou pour un non. Dans ma petite commune de moins de 200 habitants, je fais surtout intervenir la gendarmerie pour assurer l'autorité publique. Le texte fait référence à la Loppsi II à juste titre. Nous tentons d'apporter des éléments supplémentaires. Le pouvoir du maire reste néanmoins modeste.

M. Claude Kern.  - Peut-être aurait-il fallu rédiger cet amendement différemment. Je le retire. Pour revenir sur cette affaire choquante, le délit a été reclassé en contravention car le maire qui avait été battu a accepté de ne s'arrêter que deux jours seulement pour revenir le plus vite possible à son office.

L'amendement n°20 rectifié bis est retiré.

M. Jean-François Longeot.  - Moi qui avais demandé la parole pour réagir à cet amendement, je ne le peux plus maintenant qu'il a été retiré. Je le regrette.

Mme la présidente.  - Amendement n°37 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collombat, Amiel, Arnell, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin, Guérini et Hue, Mmes Jouve et Laborde et MM. Requier et Vall.

Alinéas 5 à 7

Supprimer ces alinéas.

M. Jean-Noël Guérini.  - La commission des lois, au motif du respect de l'échelle des peines, a doublé le quantum des peines pour le délit de rébellion parallèlement au doublement pour délit d'outrage. Nous y sommes hostiles, d'autant qu'il n'est pas sûr que ce soit plus protecteur que dans le code pénal.

M. François Grosdidier, rapporteur.  - Avis défavorable. Il convient de sanctionner davantage la rébellion, résistance violente différente de l'outrage, qui n'est que verbal. Un signal doit être émis par le législateur.

M. Bruno Le Roux, ministre.  - Avis défavorable.

L'amendement n°37 rectifié est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement n°43, présenté par M. Grosdidier, au nom de la commission des lois.

Alinéa 6

1° Remplacer le mot :

un

par les mots :

d'un

2° Avant le mot :

deux

insérer le mot :

de

L'amendement rédactionnel n°43, accepté par le Gouvernement, est adopté.

L'article 7, modifié, est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

Mme la présidente.  - Amendement n°44, présenté par M. Grosdidier, au nom de la commission des lois.

Après l'article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre 3 du titre 3 du livre 2 du code de la route est ainsi modifié :

1° L'article L. 233-1 est ainsi modifié :

a) Au I, les mots : « de trois mois d'emprisonnement et de 3 750 euros d'amende » sont remplacés par les mots : « d'un an d'emprisonnement et de 7 500 euros d'amende » ;

b) Le II est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« ...° L'annulation du permis de conduire avec interdiction de solliciter la délivrance d'un nouveau permis pendant trois ans au plus ;

« ...° La confiscation d'un ou plusieurs véhicules appartenant au condamné. » ;

2° Après l'article L. 233-1-1, il est inséré un article L. 233-1-... ainsi rédigé :

« Art. L. 233-1-....  -  Toute personne coupable, en état de récidive au sens de l'article 132-10 du code pénal, de l'une des infractions prévues aux articles L. 233-1 et L. 233-1-1 du présent code encourt également les peines complémentaires suivantes :

« 1° L'annulation du permis de conduire avec interdiction de solliciter la délivrance d'un nouveau permis pendant cinq ans au plus ;

« 2° La confiscation d'un ou de plusieurs véhicules appartenant au condamné. »

M. François Grosdidier, rapporteur.  - Il y a de plus en plus de refus d'obtempérer, ce qui met en cause l'autorité de l'État et la sécurité des forces de l'ordre. De 2012 à 2016, le nombre de ces délits est passé de 5 624 à 7 812 pour la seule zone gendarmerie, soit une augmentation de près de 40 % en quatre ans. Il faut renforcer la répression et donc les peines encourues. Par comparaison, le régime espagnol connaît une forte baisse des refus d'obtempérer, dans un cadre juridique très dissuasif. En France, le délit de fuite est réprimé, depuis la loi du 14 mars 2011, de trois ans d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende. 

Jusqu'alors punie de trois mois d'emprisonnement et 3 750 euros d'amende, l'infraction de refus d'obtempérer se verrait réprimer d'un an d'emprisonnement et 7 500 euros d'amende, afin de rendre applicable la comparution immédiate. 

D'autres mesures viennent aggraver cette infraction en instaurant les peines complémentaires déjà prévues pour le refus d'obtempérer, à savoir, l'annulation du permis de conduire dans un délai moindre et la confiscation de véhicules appartenant au condamné.

M. Bruno Le Roux, ministre.  - Avis favorable. Certains individus mettent gravement en péril l'intégrité physique de nos forces de l'ordre. Dernier exemple, le 18 janvier, à Méru dans l'Oise, un conducteur a refusé d'obtempérer, pris la fuite, percuté le véhicule des gendarmes et à nouveau pris la fuite avant d'être arrêté. Il faut aggraver les peines et les rapprocher de celles qui motivent le refus d'obtempérer, souvent une conduite sans permis. La comparution immédiate est souhaitable.

Si les assemblées adoptent ces amendements, je demanderai immédiatement à la délégation à la sécurité routière d'en faire la publicité auprès de nos concitoyens.

L'amendement n°44 est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°11 rectifié bis, présenté par MM. Grand, Masclet, Danesi et Joyandet, Mmes Garriaud-Maylam et Micouleau, MM. J.P. Fournier et Vasselle, Mmes Deromedi et Cayeux, MM. Huré, Bonhomme, Savary, Milon, Reichardt, Rapin, Legendre, Laufoaulu, Doligé, del Picchia et G. Bailly, Mme Duchêne, MM. Karoutchi, Charon et Chasseing, Mme de Rose, MM. Revet, Chaize et Laménie, Mmes Giudicelli et Hummel, M. Pellevat et Mme Gruny.

Après l'article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre III du titre III du livre IV du code pénal est complété par une section ainsi rédigée :

« Section ...

« Du signalement de la présence des forces de sécurité intérieure

« Art. 433-...  -  Le fait de diffuser, par quelque moyen que ce soit et quel qu'en soit le support, tout message de nature à signaler la présence des forces de sécurité intérieure est puni de six mois d'emprisonnement et de 7 500 € d'amende. »

M. Jean-Pierre Grand.  - Alors que l'état d'urgence est en vigueur dans notre pays, le signalement de la présence des forces de l'ordre constitue une source d'information majeure pour les délinquants, voire pour les terroristes. L'auteur présumé de l'attentat de Berlin a été localisé à Milan grâce à un simple contrôle.

Alors que les forces de l'ordre sont victimes d'attaques du fait même de leur qualité, leur signalement risque d'en faire des cibles privilégiées. L'attaque de policiers au cocktail Molotov à Viry-Châtillon le 8 octobre 2016 est une triste illustration de cette violence.

M. François Grosdidier, rapporteur.  - La façon la plus fréquente de signaler la présence des forces de l'ordre demeure l'appel de phares. Six mois d'emprisonnement et 7 500 euros d'amende pour un appel de phares serait disproportionné et irait contre l'article 8 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen, et le principe de l'échelle des peines. Retrait ou avis défavorable. L'amendement sur le refus d'obtempérer est déjà suffisant.

M. Bruno Le Roux, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°11 rectifié bis est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement n°15 rectifié, présenté par le Gouvernement.

Après l'article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Le titre Ier du livre III du code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :

1° Les articles L. 311-1 et L. 313-1 sont abrogés ;

2° L'intitulé du chapitre III est ainsi rédigé :

« Chapitre III

« Fabrication et commerce » ;

3° L'intitulé du chapitre VI est ainsi rédigé :

« Chapitre VI

« Acquisition, détention et transferts au sein de l'Union européenne, importations et exportations » ;

II.  -  Les articles L. 2331-2, L. 2332-2, L. 2336-1, L. 2337-1, L. 2339-3-1, L. 2339-5 et L. 2339-9 du code de la défense sont abrogés.

M. Bruno Le Roux, ministre.  - Cet amendement de pure forme est nécessaire pour inclure par décret des dispositions dans les codes de la sécurité intérieure et de la défense, dont l'architecture légistique sera ainsi modifiée. Il ne s'agit pas de modifier la loi sur le fond mais d'assurer en toute sécurité juridique la nouvelle répartition des compétences entre les deux ministères.

M. François Grosdidier, rapporteur.  - Avis favorable à cet amendement technique nécessaire et cohérent avec la loi de finances.

L'amendement n°15 rectifié est adopté et devient un article additionnel.

Mme la présidente.  - Amendement n°16, présenté par le Gouvernement.

Après l'article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Avant le dernier alinéa du II de l'article L. 4139-16 du code de la défense, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les volontaires dans les armées, en service au sein de la gendarmerie nationale, peuvent, sur demande agréée, être maintenus en service au-delà de la limite de durée de service pour une période d'une année. »

M. Bruno Le Roux, ministre.  - Le statut de volontaires dans les armées au service de la gendarmerie est, depuis sa création, enfermé dans une durée maximale fixée à cinq ans. Il est proposé de l'allonger à six années et de maintenir dans l'emploi des personnes expérimentées plus tôt que d'avoir à former cinq compagnies, c'est-à-dire l'équivalent.

M. François Grosdidier, rapporteur.  - Cette proposition est opportune. Avis favorable.

L'amendement n°16 est adopté et devient un article additionnel.

ARTICLE 9

L'amendement n°3 est retiré.

L'article 9 est adopté.

ARTICLE ADDITIONNEL

Mme la présidente.  - Amendement n°40 rectifié, présenté par le Gouvernement.

Après l'article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  - Le code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° L'article 727-1 est ainsi rédigé :

« Art. 727-1.  -  I.  -  Aux fins de prévenir les évasions et d'assurer la sécurité et le bon ordre des établissements pénitentiaires ou des établissements de santé destinés à recevoir des personnes détenues, le ministre de la justice peut autoriser les agents individuellement désignés et habilités de l'administration pénitentiaire à :

« 1° Intercepter, enregistrer, transcrire ou interrompre les correspondances de personnes détenues émises par la voie des communications électroniques et autorisées en détention, à l'exception de celles avec leur avocat, et conserver les données de connexion y afférentes ;

« 2° Accéder aux données stockées dans un équipement terminal ou un système informatique qu'utilise une personne détenue et dont l'utilisation est autorisée en détention, les enregistrer, les conserver et les transmettre.

« Les personnes détenues ainsi que leurs correspondants sont informés au préalable des dispositions du présent article.

« L'autorisation est délivrée pour une durée maximale d'un an, renouvelable.

« II.  -  La découverte dans un établissement visé au I, de tout équipement terminal, système informatique ou support de données informatiques dont la détention est illicite, fait l'objet d'un avis immédiat au procureur de la République.

« Sous réserve d'une éventuelle saisie de ces matériels par l'autorité judiciaire ouvrant à la personne détenue les voies de recours prévues à l'article 41-5, le procureur de la République peut autoriser, par tout moyen, l'administration pénitentiaire à les conserver, s'il estime que ceux-ci ne sont pas utiles à la manifestation de la vérité.

« Dans ce cas et pour les finalités visées au I du présent article, le ministre de la justice peut autoriser les agents individuellement désignés et habilités de l'administration pénitentiaire à mettre en oeuvre les techniques visées au 2° du I. L'autorisation est délivrée pour une durée maximale d'un an, renouvelable.

« La personne concernée, lorsqu'elle est identifiée, est alors informée de la décision de l'administration pénitentiaire de mettre en oeuvre ces techniques. Elle est également informée que les matériels seront détruits à l'issue du délai prévu au troisième alinéa du présent II, sauf si l'exploitation de ces données conduit à l'ouverture d'une procédure judiciaire au dossier de laquelle ils sont alors versés.

« III.  -  Chaque mise en oeuvre d'une technique de recueil de renseignement donne lieu à l'établissement d'un relevé qui mentionne les dates de début et de fin de cette mise en oeuvre ainsi que la nature des renseignements collectés. Ce relevé est tenu à la disposition du procureur de la République, qui peut y accéder de manière permanente, complète et directe, quel que soit son degré d'achèvement.

« La décision de mettre en oeuvre les techniques prévues au présent article est consignée dans un registre tenu par la direction de l'administration pénitentiaire, elle peut faire l'objet d'un recours devant le juge administratif dans les conditions prévues par le code de justice administrative.

« Les données ou enregistrements qui ne font l'objet d'aucune transmission à l'autorité judiciaire en application du présent code sont détruits à l'issue d'une durée de quatre-vingt-dix jours à compter de leur recueil.

« Les transcriptions ou les extractions sont détruites dès que leur conservation n'est plus indispensable à la poursuite des finalités mentionnées au I.

« Lorsque les données ou enregistrements servent de support à une procédure disciplinaire, les délais mentionnés au troisième alinéa du présent III sont suspendus jusqu'à l'extinction des voies de recours.

« Il est dressé un procès-verbal rendant compte des opérations de destruction.

« Les données, enregistrements, transcriptions, extractions et procès-verbaux mentionnés au présent III sont mis à disposition du procureur de la République, qui peut y accéder à tout instant.

« IV.  -  Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'État. » ;

2° L'article 230-45 est ainsi modifié :

a) Au deuxième alinéa, les mots : « , 709-1-3 ainsi que des 1° et 3° de l'article 727-1 » sont remplacés par les mots : « et 709-1-3 » ;

b) Au quatrième alinéa, les mots : « ainsi que des 2° et 4° de l'article 727-1 » sont supprimés.

II.  -  Après le titre V du livre VIII du code de la sécurité intérieure, il est inséré un titre V bis ainsi rédigé :

« TITRE V bis

« DU RENSEIGNEMENT DE SÉCURITÉ PÉNITENTIAIRE

« Art. L. 855-1.  -  Dans le respect des dispositions de l'article L. 801-1 autres que ses 3° et 4° , les services de l'administration pénitentiaire désignés par décret en Conseil d'État pris après avis de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement peuvent être autorisés à recourir aux techniques mentionnées aux articles L. 851-1, L. 851-4, L. 851-5, L. 851-6 et au I du L. 852-1 dans les conditions prévues aux titres II et V du présent livre, à l'encontre des seules personnes détenues, aux fins de prévenir les évasions et d'assurer la sécurité et le bon ordre des établissements pénitentiaires ou des établissements de santé destinés à recevoir des personnes détenues. »

M. Jean-Jacques Urvoas, ministre.  - Il s'agit du renseignement pénitentiaire, enjeu de premier ordre.

M. François Grosdidier, rapporteur.  - Cet amendement parachève le travail entrepris depuis sa nomination par le nouveau garde des sceaux sur le fléau des communications illicites en détention. Il faut renforcer les moyens des services de renseignement pénitentiaire. Nous en sommes heureux. Avis favorable.

L'amendement n°40 rectifié est adopté et devient un article additionnel.

Mme la présidente.  - Nous revenons au cours normal de la discussion.

ARTICLE 10

M. Jean-Baptiste Lemoyne .  - Le service militaire volontaire (SMV), avec un encadrement militaire de qualité, redonne espoir à des jeunes en difficulté. Le coût du dispositif doit être partagé en faisant de ces jeunes des stagiaires de la formation professionnelle. C'est l'objet de cet article que, tous, nous approuvons.

En revanche, faut-il modifier l'intitulé du dispositif ? J'ai visité le centre de Montigny-lès-Metz, où j'ai constaté le succès du label SMV, connoté positivement. Il serait dommage d'en changer pour « volontariat militaire d'insertion ». Gardons l'acronyme SMV quitte à y ajouter « insertion ».

M. Philippe Paul, rapporteur pour avis.  - J'ai évoqué ce point dans mon rapport. Les deux dispositifs sont en expérimentation jusqu'en 2018 et l'acronyme SMV sera conservé à son issue.

L'article 10 est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

Mme la présidente.  - Amendement n°1 rectifié, présenté par MM. Maurey, Joyandet, Pillet, Reichardt et Médevielle, Mme N. Goulet, MM. A. Marc, Longeot, L. Hervé et Cardoux, Mme Joissains, MM. Chaize, Karoutchi et D. Laurent, Mme Lopez, M. Pointereau, Mme Gruny, MM. Doligé, Bizet, Kern, Rapin, Lefèvre et Laménie, Mme Billon, M. Laufoaulu, Mme Duchêne, MM. del Picchia, D. Dubois, Dufaut, G. Bailly, Masclet, Bouchet et Gabouty, Mme Férat, M. Houpert, Mme Duranton et MM. Nègre, Raison et Perrin.

Après l'article 10

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. Après l'article L. 2212-2-2 du code général des collectivités territoriales, sont insérés des articles L. 2212-2-3 et L. 2212-2-4 ainsi rédigés :

« Art. L. 2212-2-3.  -  Le représentant de l'État dans le département communique au maire qui en fait la demande l'identité des personnes résidant dans sa commune et inscrites au fichier des personnes recherchées dans les conditions définies au 8° du III de l'article 2 du décret n° 2010-569 du 28 mai 2010 relatif au fichier des personnes recherchées. Le maire ne peut utiliser les informations ainsi transmises que dans le cadre de ses attributions légales et pour les besoins exclusifs des missions qui lui sont confiées.

« Art. L. 2212-2-4.  -  Aux fins de sécurité publique, le maire peut délivrer les informations mentionnées à l'article L. 2212-2-3 au responsable de la police municipale de sa commune. »

II. Après l'article 11-2 du code de procédure pénale, il est inséré un article 11-3 ainsi rédigé :

« Art. 11-3.  -  Le maire détenteur des informations mentionnées à l'article L. 2212-2-3 du code général des collectivités territoriales est tenu au secret dans les conditions et sous les peines prévues à l'article 226-13 du code pénal. Cette obligation s'applique dans les mêmes termes au responsable de la police municipale mentionné à l'article L. 2212-2-4 du code général des collectivités territoriales. »

M. Claude Kern.  - La plupart des auteurs d'attentats terroristes en France ces dernières années avaient un point commun : ils étaient fichés « S ». De nombreux maires demandent à obtenir la liste des personnes fichées « S » résidant dans leur commune. Cet amendement le rend possible en encadrant strictement ce droit. Le maire ne pourra utiliser les informations transmises que dans le cadre de ses missions légales et pour les besoins exclusifs des missions qui lui sont confiées. Il sera tenu à la confidentialité des données transmises.

L'auteur de l'amendement, M. Maurey, l'a préparé après avoir rencontré M. Cazeneuve le 21 novembre dernier.

M. François Grosdidier, rapporteur.  - Je comprends les motivations de cet amendement, étant moi-même maire. Nous avons toujours repoussé le partage systématique de ce fichier, objet de fantasme. Voici une fiche « S ». (M. François Grosdidier, rapporteur, brandit un document) C'est extrêmement sommaire et codé. Il existe quinze types de comportement à tenir pour les forces de l'ordre, qui nécessitent une absolue discrétion. Si l'on transmettait systématiquement le fichier aux 36 000 maires de France, qui n'ont pas tous la même pratique du renseignement et de la confidentialité... Imaginez la situation ! Réservons la transmission du fichier au cadre particulier des groupes de travail des maires avec l'État, sur la délinquance par exemple ou la prévention de la radicalisation.

Sinon, on risque de compromettre le travail des services de sécurité. Avis défavorable.

M. Bruno Le Roux, ministre.  - Monsieur le sénateur, les discussions que nous aurions au ministère de l'intérieur n'entraîneraient pas nécessairement adhésion à un futur amendement. Je connais la position de M. Cazeneuve.

Cet amendement n'apporterait que peu d'éléments opérationnels. Au contraire, il entraînerait la chute de tout ce système de prévention des risques sur le territoire, fondé sur la confidentialité. En outre, les services étrangers nous fourniraient-ils l'information si elle cessait d'être confidentielle ?

Un maire tirant l'enseignement concret d'une fiche S affaiblirait le travail des services de renseignement.

M. Jean-Marc Gabouty.  - Pourquoi certains maires, tel M. Grosdidier, auraient accès aux fiches « S » de leurs administrés et pas les autres ? La forme de l'amendement est peut-être discutable mais son fond devrait être repris. On demande au maire d'assumer des tâches pour lesquelles on devrait lui fournir les éléments de la fiche « S ». Imaginez que le maire recrute un fiché « S » !

L'amendement n°1 rectifié n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°12 rectifié, présenté par MM. Grand, Danesi et Joyandet, Mmes Garriaud-Maylam et Micouleau, MM. J.P. Fournier et Vasselle, Mmes Deromedi et Cayeux, MM. Huré, Milon, Reichardt, Laufoaulu, Doligé, del Picchia et G. Bailly, Mme Duchêne, MM. Charon et Chasseing, Mme de Rose, MM. Revet, Chaize et Laménie, Mmes Giudicelli et Hummel et M. Pellevat.

Après l'article 10

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le deuxième alinéa de l'article L. 511-5 du code de la sécurité intérieure, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« Après accord du maire ou du président de l'établissement public de coopération intercommunale, cette autorisation reste valable tant qu'ils continuent d'exercer des fonctions d'agents de police municipale. En cas de recrutement par une commune ou un établissement public de coopération intercommunale dans un autre département, les représentants de l'État compétents au titre de l'ancien et du nouveau lieu d'exercice des fonctions sont avisés sans délai.

« L'autorisation peut être retirée, suspendue ou modifiée par le représentant de l'État après consultation du maire ou du président de l'établissement public de coopération intercommunale. Toutefois, en cas d'urgence, l'autorisation peut être suspendue par le représentant de l'État sans qu'il soit procédé à cette consultation. »

M. Jean-Pierre Grand.  - L'article 94 de la Loppsi a modifié les conditions d'agrément et d'assermentation des agents de police municipale. Ces dispositions ont depuis été codifiées par l'ordonnance du 12 mars 2012.

Le double agrément et le serment prêté par les agents de police municipale restent valables tant qu'ils continuent d'exercer des fonctions d'agents de police municipale. Lors d'une mutation d'un agent de police municipale, il convient également pour la commune de renouveler la demande d'autorisation d'armement, ce qui peut prendre plusieurs mois pendant lesquels l'agent se retrouve non armé sur son nouveau territoire d'affectation.

Cet amendement propose une simplification administrative.

M. François Grosdidier, rapporteur.  - Avis défavorable quoique nous partagions le souci de l'auteur de l'amendement.

Il m'est arrivé d'employer pendant six mois des policiers mutés sans qu'ait été renouvelé leur agrément. Le problème est réglé. Faut-il faire de même pour le port d'arme ? Toutes les polices municipales ne sont pas armées, ou pareillement armées. Ce transfert systématique pose de réelles difficultés.

Vous précisez que le maire doit donner son accord. Finalement, est-ce plus simple que la situation actuelle ? Je déplore néanmoins que les délais soient si longs, monsieur le ministre. Il faudrait simplifier la procédure.

M. Bruno Le Roux, ministre.  - Si les délais de vérification sont au coeur de cette proposition, je suis disposé à donner les instructions nécessaires. Avis défavorable à cet amendement quant à son fond.

M. Jean-Pierre Grand.  - La réponse me convient.

L'amendement n°12 rectifié est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement n°9 rectifié, présenté par MM. Grand, Danesi et Joyandet, Mme Garriaud-Maylam, M. Vasselle, Mmes Deromedi et Cayeux, MM. Huré, Milon, Laufoaulu, Doligé, del Picchia et G. Bailly, Mme Duchêne, MM. Karoutchi et Charon, Mme de Rose, MM. Revet et Laménie, Mmes Giudicelli et Hummel et M. Pellevat.

Après l'article 10

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le titre III du livre V du code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :

1° Son intitulé est ainsi rédigé : « Dispositions particulières applicables à Paris et dispositions particulières à certains agents territoriaux chargés de missions de police » ;

2° Est ajouté un chapitre ...ainsi rédigé :

« Chapitre ...

« Agents de surveillance de la voie publique

« Art. L. 533-1.  -  Les agents de surveillance de la voie publique sont des agents communaux agréés par le procureur de la République et assermentés.

« Sans être investis d'une mission générale de surveillance de la voie publique, ils peuvent, lorsque les lois et règlements le prévoient, constater les contraventions.

« Leur entrée en fonctions est subordonnée à l'accomplissement d'une formation initiale d'application.

« Par décision du maire, ils peuvent être armés dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État.

« Sous réserve du deuxième alinéa, un décret en Conseil d'État précise les conditions de leur emploi sur la voie publique, la nature de leurs missions, les modalités de leur équipement et les conditions de leur formation. »

M. Jean-Pierre Grand.  - Défendu.

M. François Grosdidier, rapporteur.  - Avis défavorable. Il faut choisir. On ne peut pas vouloir à la fois une police municipale plus professionnelle et en faciliter ainsi l'accès !

M. Bruno Le Roux, ministre.  - Même avis. Une circulaire sera bientôt adressée aux préfets pour détailler le rôle des agents de surveillance de la voie publique.

L'amendement n°9 rectifié est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement n°8 rectifié, présenté par MM. Grand, Masclet, Danesi et Joyandet, Mmes Garriaud-Maylam et Micouleau, MM. J.P. Fournier et Vasselle, Mmes Deromedi et Cayeux, MM. Huré, Bonhomme, Milon, Reichardt, Laufoaulu, del Picchia et G. Bailly, Mme Duchêne, MM. Charon et Chasseing, Mme de Rose, MM. Revet et Laménie, Mmes Giudicelli et Hummel et M. Pellevat.

Après l'article 10

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 114 de la loi n° 2016-731 du 3 juin 2016 renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l'efficacité et les garanties de la procédure pénale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Dans un délai d'un mois avant le terme de l'expérimentation, le Gouvernement adresse au Parlement un rapport d'évaluation de l'expérimentation. »

M. Jean-Pierre Grand.  - Défendu.

M. François Grosdidier, rapporteur.  - Avis favorable malgré mon aversion pour les rapports. Les caméras protègent citoyens, policiers, magistrats, subordonnés face à leur hiérarchie... Tout le monde est satisfait. Formalisons-le dans un rapport.

M. Bruno Le Roux, ministre.  - Sagesse.

L'amendement n°8 rectifié est adopté et devient un article additionnel.

Mme la présidente.  - Amendement n°14 rectifié, présenté par MM. Grand et Masclet, Mme Imbert, MM. Danesi et Joyandet, Mme Garriaud-Maylam, M. Lefèvre, Mme Micouleau, MM. J.P. Fournier et Vasselle, Mme Cayeux, MM. Huré, Savary, Chasseing, Milon, Reichardt, Rapin, Laufoaulu, Doligé, del Picchia et G. Bailly, Mme Duchêne, MM. Charon et D. Laurent, Mme de Rose, MM. Revet, Chaize et Laménie, Mmes Giudicelli et Hummel, M. Pellevat et Mme Gruny.

Après l'article 10

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa de l'article 371-6 du code civil est complété par les mots : « et validée par la mairie de la commune de résidence ».

M. Jean-Pierre Grand.  - Défendu.

M. François Grosdidier, rapporteur.  - Avis défavorable à cet amendement qui accroît les charges des communes sans prévoir de compensation par l'État.

M. Bruno Le Roux, ministre.  - Avis défavorable car le Gouvernement est attentif à ne pas transférer de charge sans compensation, vous le savez. (Sourires)

M. Jean-Pierre Grand.  - C'est un scoop. Je retire mon amendement.

L'amendement n°14 rectifié est retiré.

L'article 11 est adopté.

Le projet de loi, modifié, est adopté.

Prochaine séance, jeudi 26 janvier 2017, à 10 h 30.

La séance est levée à minuit vingt.

Marc Lebiez

Direction des comptes rendus

Ordre du jour du jeudi 26 janvier 2017

Séance publique

À 10 h 30

1. 2 conventions internationales examinées selon la procédure d'examen simplifié :

=> Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant la ratification de l'accord de passation conjointe de marché en vue de l'acquisition de contre-mesures médicales (n°230, 2016-2017)

=> Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant la ratification de la convention relative à l'assistance alimentaire (n°137, 2016-2017).

2. Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République italienne signé le 24 février 2015 pour l'engagement des travaux définitifs de la section transfrontalière de la nouvelle ligne ferroviaire Lyon-Turin (n°271, 2016-2017).

3. Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant la ratification du protocole au traité de l'Atlantique Nord sur l'accession du Monténégro (texte de la commission, n°314, 2016-2017).

4. Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'accord multilatéral entre autorités compétentes portant sur l'échange des déclarations pays par pays (texte de la commission, n°308, 2016-2017)

À 15 heures

5. Questions d'actualité au Gouvernement.

À 16 h 15

6. Projet de loi ratifiant les ordonnances n°2016-1561 du 21 novembre 2016 complétant et précisant les règles budgétaires, financières, fiscales et comptables applicables à la collectivité de Corse, n°2016-1562 du 21 novembre 2016 portant diverses mesures institutionnelles relatives à la collectivité de Corse et n°2016-1563 du 21 novembre 2016 portant diverses mesures électorales applicables en Corse (procédure accélérée) (texte de la commission, n°312, 2016-2017).

Analyse des scrutins publics

Scrutin n°91 sur l'ensemble du projet de loi ratifiant les ordonnances n° 2016-1019 du 27 juillet 2016 relative à l'autoconsommation d'électricité et n° 2016-1059 du 3 août 2016 relative à la production d'électricité à partir d'énergies renouvelables et visant à adapter certaines dispositions relatives aux réseaux d'électricité et de gaz et aux énergies renouvelables.

Résultat du scrutin

Nombre de votants :333

Suffrages exprimés :332

Pour :311

Contre :21

Le Sénat a adopté.

Analyse par groupes politiques

Groupe Les Républicains (144)

Pour : 142

N'ont pas pris part au vote : 2 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat, M. Michel Bouvard

Groupe socialiste et républicain (108)

Pour : 108

Groupe UDI-UC (42)

Pour : 41

N'a pas pris part au vote : 1 - Mme Jacqueline Gourault, présidente de séance

Groupe communiste républicain et citoyen (21)

Contre : 21

Groupe du RDSE (17)

Pour : 17

Groupe écologiste (10)

N'ont pas pris part au vote : 10 - Mmes Leila Aïchi, Aline Archimbaud, Esther Benbassa, Marie-Christine Blandin, Corinne Bouchoux, MM. Ronan Dantec, Jean Desessard, André Gattolin, Joël Labbé, Hervé Poher

Sénateurs non inscrits (6)

Pour : 3

Abstention : 1 - M. David Rachline

N'ont pas pris part au vote : 2 - MM. Robert Navarro, Stéphane Ravier