Liberté, indépendance et pluralisme des médias (Procédure accélérée - Suite)
Mme la présidente. - Nous reprenons la discussion des articles à l'article premier ter, qui avait été réservé.
Discussion des articles (Suite)
ARTICLE PREMIER TER (Précédemment réservé)
Mme la présidente. - Amendement n°4, présenté par M. Abate et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Après l'alinéa 2
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« La protection du secret des sources s'applique au pacte passé entre le journaliste et sa source, et à l'ensemble de la chaîne de transmission de l'information. »
M. Patrick Abate. - La protection des sources doit porter, non sur tel ou tel individu, mais sur le pacte passé entre le journaliste et sa source. Ce changement de conception, qui coupe court à tout soupçon de corporatisme, est essentiel à l'existence du journalisme.
M. Hugues Portelli, rapporteur pour avis de la commission des lois. - Maintenons le droit en vigueur : avis défavorable.
Mme Audrey Azoulay, ministre. - Le code de procédure pénale accorde déjà une protection aux sources des journalistes, qu'il y ait accord écrit ou verbal. L'amendement du Gouvernement à venir rétablit un équilibre général sur ce sujet. Retrait ?
M. Jean Louis Masson. - Cet amendement est positif. Ne restreignons pas excessivement la protection des sources.
La presse doit être protégée des pouvoirs politique et économique, mais aussi des syndicats : il est scandaleux que la CGT ait bloqué les imprimeries des journaux qui ont refusé, à raison, de publier la tribune dans laquelle elle vantait ses belles réalisations. La CGT, on s'en passerait bien !
À la demande de la commission, l'amendement n°4 est mis aux voix par scrutin public.
Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n°233 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 216 |
Pour l'adoption | 30 |
Contre | 186 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°78, présenté par le Gouvernement.
I. - Alinéa 4
Après la référence :
1°
insérer les mots :
Le journaliste, soit
et supprimer les mots :
de journaliste
II. - Alinéa 6
Rétablir le 2° dans la rédaction suivante :
« 2° Le collaborateur de la rédaction, soit toute personne qui, par sa fonction au sein de la rédaction dans une des entreprises, publications ou agences mentionnées au 1° , est amenée à prendre connaissance d'informations permettant de découvrir une source et ce, à travers la collecte, le traitement éditorial, la production ou la diffusion de ces mêmes informations.
III. - Alinéa 9
Rédiger ainsi cet alinéa :
« III. - Constitue une atteinte directe au secret des sources le fait de chercher à découvrir une source au moyen d'investigations portant sur une des personnes mentionnées au I. Constitue une atteinte indirecte au secret des sources le fait de chercher à découvrir une source au moyen d'investigations portant sur toute personne qui, en raison de ses relations habituelles avec une des personnes mentionnées au I, peut détenir des renseignements permettant de découvrir cette source.
IV. - Alinéa 10
Après les mots :
être porté
insérer les mots :
directement ou indirectement
V. - Alinéa 11
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Il est tenu compte, pour apprécier la nécessité et la proportionnalité, de la gravité des faits, des circonstances de préparation ou de commission de l'infraction, du nombre et de la qualité des victimes et des mis en cause.
VI. - Après l'alinéa 13
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« ... - La détention, par une personne mentionnée au I du présent article, de documents, d'images ou d'enregistrements sonores ou audiovisuels, quel qu'en soit le support, provenant du délit de violation du secret professionnel ou du secret de l'enquête ou de l'instruction ou du délit d'atteinte à l'intimité de la vie privée ne peut constituer le délit de recel prévu à l'article 321-1 du code pénal ou le délit prévu à l'article 226-2 du même code lorsque ces documents, images ou enregistrements sonores ou audiovisuels contiennent des informations dont la diffusion au public constitue un but légitime dans une société démocratique. »
VII. - Alinéas 18 et 19
Rédiger ainsi ces alinéas :
« Art. 706-183. - Il ne peut être porté directement ou indirectement atteinte au secret des sources au cours d'une procédure pénale que dans les conditions et selon les modalités prévues au présent titre.
« Pour l'application du présent titre, les personnes titulaires du droit à la protection du secret des sources et les notions d'atteinte directe et indirecte au secret des sources sont celles définies à l'article 2 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse.
VIII. - Alinéa 21
Après les mots :
d'enquête
insérer les mots :
de police judiciaire ou d'instruction
IX. - Alinéa 22
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Il est tenu compte, pour apprécier la nécessité et la proportionnalité, de la gravité des faits, des circonstances de préparation ou de commission de l'infraction et du nombre et de la qualité des victimes et des mis en cause.
X. - Alinéa 23
Après le mot :
ordonnance
insérer le mot :
spécialement
et après les mots :
par le juge
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
des libertés et de la détention saisi, selon les cas, par requête motivée du procureur de la République ou par ordonnance motivée du juge d'instruction.
XI. - Alinéa 24
Supprimer la référence :
et à l'article 96
et les mots :
ou du juge d'instruction
XII. - Après l'alinéa 24
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« En cas d'opposition à la saisie conformément au sixième alinéa de l'article 56-2, les attributions confiées au juge des libertés et de la détention en application de ce même alinéa et des septième à dixième alinéas du même article sont exercées par le président de la chambre de l'instruction.
Mme Audrey Azoulay, ministre. - Votre commission a retranché des ajouts importants que le Gouvernement a proposés à l'Assemblée nationale, qui les a acceptés. Je pense à l'extension de la protection du secret des sources pour les collaborateurs de journalistes, l'introduction de la notion d'atteinte indirecte au secret de sources - pour couvrir les cas d'enquête sur les proches, l'encadrement des conditions dans lesquelles le secret des sources peut être levé et la protection des journalistes contre des poursuites pour recel de violation du secret de l'enquête et de l'instruction. C'est maintenir le droit actuel, celui de la loi de 2010, dont on sait qu'il est insuffisant, voire revenir en arrière.
Cet amendement, fruit du travail commun du ministère de la culture et de la Chancellerie, réécrit une partie de l'article en s'appuyant sur la jurisprudence de la CEDH et les avis du Conseil d'État pour ménager, de manière responsable, un équilibre entre liberté de la presse et protection des individus et de la nation.
L'amendement n°3 est retiré.
Mme la présidente. - Amendement n°29 rectifié, présenté par Mme Jouve, MM. Amiel, Barbier et Bertrand, Mmes Laborde et Malherbe et M. Vall.
Alinéa 6
Rétablir le 2° dans la rédaction suivante :
« 2° Le collaborateur direct de la rédaction au sens de l'article L. 7111-4 du code du travail, soit les rédacteurs-traducteurs, sténographes-rédacteurs, rédacteurs-réviseurs, reporters-dessinateurs, reporters-photographes, à l'exclusion des agents de publicité et de tous ceux qui n'apportent, à un titre quelconque, qu'une collaboration occasionnelle ;
Mme Mireille Jouve. - Les collaborateurs directs de la rédaction, qui pratiquent le recueil et le traitement de l'information, doivent eux aussi bénéficier de la protection du secret des sources.
Mme la présidente. - Amendement n°45, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste et républicain.
Alinéa 6
Rétablir le 2° dans la rédaction suivante :
« 2° Le collaborateur de la rédaction, soit toute personne qui, par sa fonction au sein de la rédaction dans une des entreprises, publications ou agences mentionnées au 1°, est amenée à prendre connaissance d'informations permettant de découvrir une source et ce, à travers la collecte, le traitement éditorial, la production ou la diffusion de ces mêmes informations ;
M. David Assouline. - Il faut rétablir l'alinéa supprimé par la commission des lois sans quoi stagiaires, secrétaires ou collaborateurs occasionnels ne seront pas protégés.
Mme la présidente. - Amendement n°70, présenté par Mme Blandin et les membres du groupe écologiste.
Alinéa 6
Rétablir le 2° dans la rédaction suivante :
« 2° Le collaborateur de la rédaction, soit toute personne qui, par sa fonction au sein de la rédaction dans une des entreprises, publications ou agences mentionnées au 1°, est amenée, dans le cadre des missions qui lui ont été confiées à prendre connaissance d'informations permettant de découvrir une source et ce, à travers la collecte, le traitement éditorial, la production ou la diffusion de ces mêmes informations ;
Mme Marie-Christine Blandin. - Si la loi de 2010 a représenté une avancée, elle demeure insuffisante. Le projet de loi déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale en 2013 n'a jamais été examiné. Progressons en appliquant les recommandations du Conseil de l'Europe : le régime de la protection des sources doit s'étendre au-delà des journalistes.
Mme la présidente. - Amendement n°46, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste et républicain.
I. - Alinéa 9
Rédiger ainsi cet alinéa :
« III. - Constitue une atteinte directe au secret des sources le fait de chercher à découvrir une source au moyen d'investigations portant sur une des personnes mentionnées au I. Constitue une atteinte indirecte au secret des sources le fait de chercher à découvrir une source au moyen d'investigations portant sur les archives de l'enquête d'une des personnes mentionnées au I ou sur toute personne qui, en raison de ses relations habituelles avec une des personnes mentionnées au I, peut détenir des renseignements permettant de découvrir cette source.
II. - Alinéas 18 et 21
Après les mots :
secret des sources
insérer les mots :
directement ou indirectement
III. - Alinéa 19
Remplacer les mots :
d'atteinte au secret des sources est définie
par les mots :
d'atteinte directe ou indirecte au secret des sources sont celles définies
M. David Assouline. - Réintégrons la notion d'atteinte indirecte au secret des sources.
Mme la présidente. - Amendement n°47, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste et républicain.
I. - Alinéas 10 et 11
Rédiger ainsi ces alinéas :
« Il ne peut être porté atteinte au secret des sources, directement ou indirectement, qu'à titre exceptionnel et seulement si cette atteinte est justifiée soit par la prévention ou la répression d'un crime, soit par la prévention d'un délit constituant une atteinte à la personne humaine puni d'au moins sept ans d'emprisonnement, d'un délit prévu au titre I et du livre IV du code pénal puni d'au moins dix ans d'emprisonnement ou d'un délit prévu au titre II du même livre IV puni d'au moins sept ans d'emprisonnement, soit par la répression d'un de ces délits lorsque celui-ci est d'une particulière gravité en raison des circonstances de sa réparation ou de sa commission ou en raison du nombre et de la qualité des victimes et des mis en cause et lorsque l'atteinte est justifiée par la nécessité de faire cesser le délit ou lorsqu'il existe un risque particulièrement élevé de renouvellement de celui-ci.
« Il est tenu compte, pour apprécier la nécessité et la proportionnalité, de la gravité des faits, des circonstances de préparation ou de commission de l'infraction, du nombre et de la qualité des victimes et des mis en cause. S'agissant de la répression d'un des délits précités, il est aussi tenu compte de la nécessité de le faire cesser ou du risque particulièrement élevé de son renouvellement.
II. - Après l'alinéa 20
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Avant le début de toute audition ou de tout interrogatoire, elle est informée de son droit à ne pas révéler ses sources.
III. - Alinéa 21
1° Après le mot :
enquête
insérer les mots :
ou d'instruction
2° Après les mots :
secret des sources
insérer les mots :
, directement ou indirectement,
IV. - Alinéa 22
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Les mesures portant atteinte au secret des sources envisagées doivent être strictement nécessaires et proportionnées au but légitime poursuivi. Il est tenu compte, pour apprécier la nécessité et la proportionnalité, de la gravité des faits, des circonstances de préparation ou de commission de l'infraction et du nombre et de la qualité des victimes et des mis en cause. S'agissant de la répression d'un des délits précités, il est aussi tenu compte de la nécessité de le faire cesser ou du risque particulièrement élevé de son renouvellement.
Mme Sylvie Robert. - Le droit belge pourrait nous inspirer : le secret des sources n'est levé seulement s'il y a atteinte à l'intégrité physique. Le texte de l'Assemblée nationale est plus responsable.
Mme la présidente. - Amendement n°5, présenté par M. Abate et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
I. - Alinéa 10
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Il ne peut être porté atteinte au secret des sources, directement ou indirectement, qu'à titre exceptionnel, dans la mesure où la révélation des sources est de nature à prévenir la commission d'un crime ou d'un délit constituant une menace grave pour l'intégrité des personnes ou si un impératif prépondérant d'intérêt général le justifie, et sous réserve que cette information ne puisse être obtenue d'aucune autre manière.
II. - Alinéa 11
Supprimer cet alinéa.
M. Patrick Abate. - En l'état, les possibilités de dérogation à la protection du secret des sources empêchent le juge de se positionner sur le conflit de droits au risque de restreindre la protection. Elles méconnaissent la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, qui se fonde sur le motif d'impératif prépondérant d'intérêt public.
Mme la présidente. - Amendement n°62, présenté par Mme Blandin et les membres du groupe écologiste.
Alinéa 10
Remplacer le mot :
que
par les mots :
qu'à titre exceptionnel et seulement
Mme Marie-Christine Blandin. - L'atteinte au secret des sources doit demeurer une exception.
Mme la présidente. - Amendement n°63, présenté par Mme Blandin et les membres du groupe écologiste.
Alinéas 10 et 21
Remplacer les mots :
par la prévention ou la répression, soit d'un crime, soit d'un délit
par les mots :
, soit par la prévention ou la répression d'un crime, soit par la prévention d'un délit
Mme Marie-Christine Blandin. - Cet amendement renforcera la protection du secret des sources.
Mme la présidente. - Amendement n°9, présenté par M. Abate et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Après l'alinéa 13
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« V. - La détention, par une personne mentionnée au I du présent article, de documents, d'images ou d'enregistrements sonores ou audiovisuels, quel qu'en soit le support, provenant du délit de violation du secret professionnel ou du secret des affaires ou du secret de l'enquête ou de l'instruction ou du délit d'atteinte à l'intimité de la vie privée ne peut constituer le délit de recel prévu à l'article 321-1 du code pénal ou le délit prévu à l'article 226-2 du même code lorsque ces documents, images ou enregistrements sonores ou audiovisuels contiennent des informations dont la diffusion au public constitue un but légitime dans une société démocratique. »
M. Patrick Abate. - Il y a eu des avancées, je ne le nie pas. Renforçons-les, notamment en interdisant les poursuites à l'encontre de journalistes pour délit de recel.
Mme la présidente. - Amendement n°35 rectifié, présenté par Mme Jouve et MM. Amiel, Barbier, Bertrand, Collombat et Vall.
Après l'alinéa 13
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« V. - La détention, par une personne mentionnée au I du présent article, de documents, d'images ou d'enregistrements sonores ou audiovisuels, quel qu'en soit le support, provenant du délit de violation du secret professionnel ou du secret de l'enquête ou de l'instruction ou du délit d'atteinte à l'intimité de la vie privée ne peut constituer le délit de recel prévu à l'article 321-1 du code pénal ou le délit prévu à l'article 226-2 du même code lorsque ces documents, images ou enregistrements sonores ou audiovisuels contiennent des informations dont la diffusion au public constitue un but légitime dans une société démocratique. »
Mme Mireille Jouve. - Amendement similaire sur le délit de recel.
Mme la présidente. - Amendement identique n°48, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste et républicain.
M. David Assouline. - Un journaliste doit bénéficier de la protection du secret de ses sources même s'il a porté atteinte au secret de l'instruction pourvu que ce soit « dans un but légitime dans une société démocratique ». L'expression n'est pas de moi, mais de la Cour européenne des droits de l'homme dans son arrêt du 7 juin 2007.
Mme la présidente. - Amendement n°6, présenté par M. Abate et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Alinéa 22
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Aucun acte d'enquête ne peut avoir pour objet de porter atteinte au secret des sources sauf s'il est justifié par la prévention de la commission d'un crime ou d'un délit constituant une menace grave pour l'intégrité des personnes et si les mesures envisagées sont strictement nécessaires et proportionnées au but légitime poursuivi.
M. Patrick Abate. - Amendement de coordination.
Mme la présidente. - Amendement n°49, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste et républicain.
Alinéas 23 et 24
Remplacer ces alinéas par trois alinéas ainsi rédigés :
« À peine de nullité, l'acte doit être préalablement autorisé par ordonnance spécialement motivée au regard des conditions prévues au présent article, prise par le juge des libertés et de la détention saisi, selon les cas, par requête motivée du procureur de la République ou par ordonnance motivée du juge d'instruction.
« Art. 706-186. - Lorsqu'elles ont pour objet de porter atteinte au secret des sources, les perquisitions prévues à l'article 56-2 doivent être préalablement autorisées par une ordonnance du juge des libertés et de la détention motivée par référence aux dispositions de l'article 706-185.
« En cas d'opposition à la saisie conformément au sixième alinéa de l'article 56-2, les attributions confiées au juge des libertés et de la détention en application de ce même alinéa et des septième à dixième alinéas du même article sont exercées par le président de la chambre de l'instruction.
Mme Sylvie Robert. - Cet amendement donne compétence au juge des libertés et de la détention, le JLD, pour autoriser les enquêtes et perquisitions dans le cadre des atteintes au secret des sources. Le juge d'instruction n'intervient plus que dans 10 % des dossiers.
Le projet de loi Justice du XXIe siècle donne au JLD une fonction à part entière et clarifie les conditions de sa nomination.
M. Hugues Portelli, rapporteur pour avis. - Avis défavorable sur tous ces amendements. La notion juridique de « journaliste », telle qu'elle ressort de la loi de 1881 et de la jurisprudence, va au-delà de la notion courante. Elle inclut tous ceux qui participent à la fonction journalistique, y compris les photographes.
En réalité, nous discutons du projet de loi de 2013, qui s'était perdu dans les méandres parlementaires, pour nous revenir sous la forme d'un amendement, le n°78. Avec une définition aussi extensive des journalistes, les services enquêteurs n'auraient plus les moyens de travailler.
La notion d'atteinte indirecte au secret des sources ne figurait pas dans le projet de loi initial, le Conseil d'État n'a donc pas pu se prononcer. Double flou artistique !
Autre remarque : la notion d'enquête renvoie-t-elle à l'enquête journalistique ou à l'enquête pénale ? On l'ignore...
Madame Robert, la commission des lois défend également l'intervention du JLD mais seulement lorsque le parquet est chargé de l'instruction. Pour le reste, renvoyons au juge d'instruction, qui est indépendant, contrairement au JLD, qui est nommé par le président du tribunal de grande instance du ressort. Ses décisions sont susceptibles d'appel devant la chambre de l'instruction.
La CEDH, vous pourrez l'expliquer au garde des sceaux, se compose en première instance d'une chambre de trois juges. La grande chambre intervient en appel, seuls ses arrêts sont définitifs. Or les décisions sur lesquels vous vous fondez sont des décisions de la petite chambre. Il se trouve que la grande chambre a rendu l'arrêt « Bédat contre Suisse » le 29 mars 2016 dans lequel elle fait primer le secret de l'instruction sur la liberté d'information !
Enfin, le secrétariat général du Gouvernement, saisi par le Premier ministre a estimé, le 6 janvier 2014, qu'une liste des motifs d'intérêt général justifiant l'atteinte au secret des sources encourrait la censure du Conseil constitutionnel. Sa décision portait sur le projet de loi de 2013 qui a inspiré cet amendement...
M. David Assouline. - Et la protection des sources législatives ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. - Ce texte ne reprend nullement le projet de loi de 2013. Il s'appuie sur une longue concertation interministérielle et un dialogue avec les professionnels, il a été enrichi par le travail parlementaire et j'espère que le Sénat aura à coeur de l'améliorer encore.
Soyons pragmatiques sur la définition des journalistes : les journalistes ne travaillent pas seuls ! Leurs collaborateurs doivent aussi être protégés. Soyons pragmatiques encore sur les atteintes indirectes au secret des sources, elles existent : des conjoints de journalistes sont écoutés.
Le risque de confusion entre enquête pénale et journalistique est faible. Le rôle accru du juge des libertés et de la détention, enfin, est une garantie supplémentaire.
Si l'amendement n°78 n'était pas adopté, j'invite le Sénat à voter les amendements nos45, 70, 35 rectifié et 48 identiques, 49 et 46. L'avis est défavorable aux amendements nos29 rectifié, 47, 5, 62, 63, 6 et 9.
M. David Assouline. - Le Gouvernement nous présente un amendement global. Décidément, deux visions du secret des sources et de la liberté de la presse s'affrontent. Je pensais que nous aurions avancé depuis l'époque de Rachida Dati, que nous aurions pris du recul...
Sans sources, il n'y pas plus de liberté réelle de l'information. Nous parlons de choses concrètes, avançons !
Mme la présidente. - Votre temps de parole est épuisé.
L'amendement n°78 n'est pas adopté.
L'amendement n°29 rectifié est retiré.
L'amendement n°45 n'est pas adopté, non plus que les amendements nos70, 46, 47, 5, 62, 63, 9, 35 rectifié et 48 identiques, 6 et 49.
Mme la présidente. - Amendement n°10, présenté par M. Abate et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Alinéa 4
Après les mots :
agences de presse
insérer les mots :
ou d'un ou plusieurs éditeurs d'ouvrages
M. Patrick Abate. - Cet amendement vise à protéger plus efficacement les journalistes indépendants. Les livres d'enquête, convenons-en, sont devenus des sources d'information comme les autres.
M. Hugues Portelli, rapporteur pour avis. - Avis défavorable.
Mme Audrey Azoulay, ministre. - N'introduisons pas dans la loi du 29 juillet 1881 une définition du journaliste différente de celle figurant dans le code du travail : avis défavorable.
L'amendement n°10 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°61, présenté par Mme Blandin et les membres du groupe écologiste.
Alinéa 5
1° Après le mot :
compte
insérer les mots :
d'un éditeur d'ouvrage ou
2° Remplacer le mot :
mentionnées
par le mot :
mentionnés
Mme Marie-Christine Blandin. - C'est le même. Il s'agit de protéger les auteurs d'enquêtes publiées. À cause de la concentration des médias et du poids des grands groupes, les journalistes n'ont plus le loisir d'écrire ce qu'ils veulent et beaucoup pratiquent désormais l'investigation par le livre.
M. Hugues Portelli, rapporteur pour avis. - Un ouvrage peut avoir un autre but qu'informer : tenons-nous en au texte de la commission.
Mme Audrey Azoulay, ministre. - Avis défavorable également.
L'amendement n°61 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°7, présenté par M. Abate et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Alinéa 13
Compléter cet alinéa par les mots :
et conformément à l'article L. 821-7 du code de la sécurité intérieure s'agissant des opérations de renseignement
M. Patrick Abate. - Cet amendement renforce la protection des sources en instaurant un avis préalable des opérations de renseignement auprès de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR).
M. Hugues Portelli, rapporteur pour avis. - Rejet : comment une commission, dont les missions sont d'ailleurs autres, pourrait-elle se mêler de donner des avis s'imposant au juge ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. - Les sources ressortissent de l'activité professionnelle des journalistes, pas de leur vie privée. Retrait ?
L'amendement n°7 est retiré, de même que l'amendement n°8.
Mme la présidente. - Amendement n°86, présenté par Mme Morin-Desailly, au nom de la commission de la culture.
Après l'alinéa 28
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
...° Aux 1° et 2° de l'article 226-3, le mot : « second » est remplacé par le mot : « deuxième » ;
L'amendement de coordination n°86, accepté par le Gouvernement, est adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°87, présenté par Mme Morin-Desailly, au nom de la commission de la culture.
Alinéa 45
Supprimer cet alinéa.
L'amendement de coordination n°87, accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article premier ter, modifié, est adopté.
ARTICLE ADDITIONNEL après l'article premier ter (Précédemment réservé)
Mme la présidente. - Amendement n°11 rectifié, présenté par M. Abate et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Après l'article 1er ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la première phrase du premier alinéa de l'article L. 801-1 du code de la sécurité intérieure, les mots : « est garanti » sont remplacés par les mots : « le droit à l'information et le respect du secret des sources sont garantis ».
M. Patrick Abate. - Cet amendement intègre le secret des sources dans le code de la sécurité intérieure.
M. Hugues Portelli, rapporteur pour avis. - Mieux vaut le laisser dans la loi sur la presse.
Mme Audrey Azoulay, ministre. - Même avis.
L'amendement n°11 rectifié n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Nous revenons au cours normal de la discussion des articles.
ARTICLES ADDITIONNELS après l'article 7
Mme la présidente. - Amendement n°67, présenté par Mme Blandin et les membres du groupe écologiste.
Après l'article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article 39 de la même loi, il est inséré un article 39-1 ainsi rédigé :
« Art. 39-1. - Une même personne physique ou morale ne peut être titulaire d'une ou plusieurs autorisations relatives chacune à un service de télévision, si une acquisition ou une prise de contrôle lui permet d'atteindre un plafond de part d'audience réelle de 37,5 % de l'audience totale réelle de l'ensemble des services nationaux de télévision, quel que soit son mode de diffusion ou de distribution. »
Mme Marie-Christine Blandin. - Ce dispositif anti-concentration est issu du rapport Lancelot de 2006. Il s'appuie sur la notion de part d'audience réelle.
Mme la présidente. - Amendement n°21, présenté par M. Abate et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Après l'article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l'opportunité de mettre en place un dispositif visant à limiter la concentration dans les médias et étudie la possibilité d'interdire à une même personne physique ou morale d'être titulaire d'une ou plusieurs autorisations relatives chacune à un service de télévision, si une acquisition ou une prise de contrôle lui permet d'atteindre un plafond de part d'audience réelle de 37,5 % de l'audience totale réelle de l'ensemble des services nationaux de télévision, quel que soit son mode de diffusion ou de distribution.
M. Patrick Abate. - Une personne détient parfois l'essentiel des capitaux d'une entreprise de presse alors que ses activités principales s'éloignent furieusement des objectifs de la presse. Nous sommes loin du patron omniprésent de notre vieille presse...
Dans le classement de RSF, notre pays est classé 45e ! Cela ne veut pas dire charrette, comme on dit chez nous, mais la France perd tout de même sept places !
Bolloré détient désormais un empire : Canal+, Vivendi, Havas et même Dailymotion. Drahi se paie SFR : il a désormais l'information et les tuyaux de l'information. Cela menace la neutralité du net ! C'est comme si les relais H ne vendaient que des publications Hachette ! Ou que les panneaux JC. Decaux ne faisaient de la publicité que pour Decaux !
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteure. - La concentration de nos médias est moins forte qu'en Allemagne ou en Italie. Les groupes de presse ont besoin de capitaux et d'investisseurs pour faire face à la révolution numérique, attention de ne pas favoriser leur rachat par des groupes extra-européens. Nous mettrions notre exception culturelle en péril.
Un rapport du Gouvernement ? La commission de la culture peut très bien mener des travaux sur ce sujet : rejet de l'amendement n°21.
Quant à l'amendement n°65, c'est une bataille d'un autre temps. Le marché de la télévision est désormais caractérisé par une grande dispersion. Sans compter que vous ne visez pas la vidéo à la demande alors qu'un acteur américain détient les deux tiers de notre marché !
Avis défavorable.
Mme Audrey Azoulay, ministre. - Une mesure d'interdiction et un rapport d'évaluation, c'était l'idée de la commission Lancelot. Mais depuis dix ans, le secteur a beaucoup évolué. Avis défavorable.
M. Patrick Abate. - Nous ne faisons pas le procès du Gouvernement, la concentration des médias n'est pas de son fait. Certes, elle a sauvé des titres mais pose d'autres problèmes. L'affaire Drahi représente une grave menace à la neutralité d'internet.
M. David Assouline. - De fait, concentration et liberté des médias sont liées. Il y a quelques années, j'avais déposé une proposition de loi pour encadrer les concentrations, sur la base de seuils d'audience, en limitant la part détenue par un même actionnaire.
L'anomalie en France ne tient pas à l'existence de grands groupes, puisqu'il y a compétition internationale, si n'en n'avions pas, de grands groupes étrangers s'implanteraient dans notre territoire à leur place. Le problème, c'est que ces grands groupes de presse sont dans les mains d'entreprises dont le coeur de métier n'est pas l'information, mais qui vivent principalement de la commande publique. Résultat : les contenus éditoriaux convergent et le pluralisme des titres est un leurre...
L'enjeu ici est d'assurer l'indépendance des journalistes face à l'omniprésence de l'actionnaire.
Mme Marie-Christine Blandin. - Je comprends les troubles posés par le seuil très précis de 37,5 % et les contorsions de M. Assouline, qui a changé d'avis... Je retire l'amendement, mais un rapport serait utile.
L'amendement n°67 est retiré.
L'amendement n°21 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°79, présenté par Mme Morin-Desailly, au nom de la commission de la culture.
Après l'article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le huitième alinéa de l'article 45-2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Cette convention détermine également les modalités de fonctionnement du comité de déontologie créé au sein de chaque société de programme, l'indépendance de ce comité étant, par dérogation à l'article 30-8, assurée par le bureau de l'assemblée à laquelle elle se rattache. »
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteure. - Cet amendement prévoit les dispositions applicables en matière de déontologie à la chaîne parlementaire.
Les deux sociétés de programme - LCP et Public Sénat - auraient également l'obligation de créer des comités de déontologie mais c'est le bureau de chaque assemblée - en lieu et place du CSA - qui aurait la mission de déterminer leurs modalités de fonctionnement et de veiller à l'indépendance de ces comités.
Mme Audrey Azoulay, ministre. - Sagesse.
L'amendement n°79 est adopté et devient article additionnel.
ARTICLE 8
Mme la présidente. - Amendement n°55, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste et républicain.
Alinéa 2
Compléter cet alinéa par les mots :
, des mesures prises par le Conseil supérieur de l'audiovisuel pour mettre fin aux manquements constatés ainsi que des raisons pour lesquelles il n'a, le cas échéant, pas pris de telles mesures.
M. David Assouline. - Cet amendement oblige le CSA à faire figurer, dans son rapport annuel, les détails des mesures prises pour mettre fin aux atteintes au pluralisme et à l'indépendance des médias, par les éditeurs et à se justifier lorsqu'il n'aura pas jugé bon d'en prendre.
Le CSA doit motiver son absence de décisions. C'est important pour la transparence. Autrement nous laisserions la porte ouverte aux lobbies.
Mme la présidente. - Amendement n°31 rectifié, présenté par Mme Jouve, MM. Amiel, Barbier, Collombat et Guérini, Mmes Laborde et Malherbe et M. Vall.
Alinéa 2
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Il rend également compte des mesures prises par le Conseil supérieur de l'audiovisuel pour mettre fin aux manquements constatés ainsi que des raisons pour lesquelles il n'a, le cas échéant pas pris de telles mesures.
Mme Mireille Jouve. - Dans un objectif de transparence, le CSA doit rendre compte de son activité sur le point des actions mises en oeuvre pour faire respecter ces principes d'honnêteté, d'indépendance et de pluralisme.
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteure. - Le président du CSA, auditionné la semaine dernière, nous l'a dit : on ne peut obliger l'autorité indépendante à motiver des décisions qu'il n'a pas prises ! En revanche, notre commission de la culture pourrait auditionner également ses dirigeants.
Mme Audrey Azoulay, ministre. - Par souci de transparence, avis favorable à ces amendements.
L'amendement n°55 n'est pas adopté.
L'amendement n°31 rectifié n'est pas adopté.
L'article 8 est adopté.
ARTICLES ADDITIONNELS
Mme la présidente. - Amendement n°58, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste et républicain.
Après l'article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le premier alinéa du I de l'article 28-1 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les services de télévision numérique de terre, lorsque l'autorisation prévue à l'article 30-1 est délivrée pour une durée supérieure à deux ans et demie, l'autorisation est abrogée par le Conseil supérieur de l'audiovisuel à l'expiration de ce délai si l'opérateur n'a manifestement pas exploité le service conformément aux engagements qu'il a souscrits lors de l'appel à candidatures. »
M. David Assouline. - Cet amendement fait suite à la revente de la chaîne 23 et à la décision du Conseil d'État. Cette pratique de revente des fréquences hertziennes peut devenir une source de spéculation, la revente atteignant 90 millions d'euros, voire plus. Le législateur a déjà introduit une taxe sur ces reventes, initialement de 5 % à mon initiative, portée ensuite à 20 %, et une période probatoire passée de 2 ans et demi à 5 ans.
Cet amendement renforce ses pouvoirs : il pourra s'assurer que les titulaires de l'autorisation TNT avaient tenus leurs engagements.
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteure. - Cet amendement n'aurait pas été applicable dans le cas de la chaîne 23 puisqu'elle existe depuis plus de deux ans et demi. Il serait facteur d'insécurité juridique pour les investisseurs.
Dans la loi du 14 octobre 2015 sur le développement numérique, à son article 7, nous avions déjà autorisé le CSA en cas de doute d'agrément de cession, à vérifier le respect par l'éditeur de ses engagements. Ce n'est pas la voie juridique qui a été choisie dans cette affaire. Avis défavorable mais je partage votre préoccupation.
Mme Audrey Azoulay, ministre. - Notre droit interdit déjà les cessions dans un délai de cinq ans après l'octroi de l'agrément. Il donne la possibilité au CSA de vérifier les engagements des éditeurs numériques. Nous avons aussi accru la fiscalité. Retrait ?
M. David Assouline. - Certes, mais le CSA n'a aucun moyen de retirer la jouissance de la fréquence si un éditeur ne tient pas ses engagements. Je ne vise pas spécifiquement le cas de Numéro 23. J'avais déjà la même position quand il s'agissait de Bolloré. Je veux seulement éviter les contournements de la loi par des grandes concentrations et le détournement des fréquences, qui sont un bien public.
L'amendement n°58 n'est pas adopté.
L'article 9 est adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°82, présenté par Mme Morin-Desailly, au nom de la commission de la culture.
Après l'article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l'article 42-3 est complété par les mots :
« , ou en cas de manquements graves et répétés d'un éditeur de service de communication audiovisuelle titulaire d'une autorisation d'émettre à ses obligations contractuelles à l'égard de la société mentionnée au I de l'article 30-2 chargée de faire assurer les opérations techniques nécessaires à la transmission et à la diffusion auprès du public de ses programmes »
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteure. - Les éditeurs de service de télévision doivent s'associer au sein d'une société collective pour gérer les multiplex de diffusion hertzienne. Certains éditeurs ne s'acquittent pas de leurs obligations contractuelles concernant les frais de diffusion ce qui fragilise les sociétés en question ainsi que les opérateurs techniques de diffusion.
Cet amendement permet au CSA de retirer l'autorisation d'émettre à un éditeur de service qui ne respecterait pas ses obligations contractuelles à l'égard de la société qui gère le multiplex.
Mme Audrey Azoulay, ministre. - Il me semble que cela n'est pas le rôle du régulateur de régler des litiges d'ordre privé et contractuels, qui relèvent du juge judiciaire. Avis défavorable.
L'amendement n°82 est retiré.
L'article 9 bis est adopté.
L'article 10 est adopté.
L'article 10 bis est adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°89, présenté par Mme Morin-Desailly, au nom de la commission de la culture.
Après l'article 10 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - La loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication est ainsi modifiée :
1° La dernière phrase du deuxième alinéa de l'article 3-1 est ainsi rédigée :
« Il veille au respect de la numérotation logique s'agissant de la reprise des services nationaux de télévision en clair diffusés par voie hertzienne terrestre, selon les modalités prévues à l'article 34-4, et au caractère équitable, transparent, homogène et non discriminatoire de la numérotation des autres services de télévision dans les offres de programmes des distributeurs de services. » ;
2° Le premier alinéa de l'article 17-1 est ainsi rédigé :
« Le Conseil supérieur de l'audiovisuel peut être saisi par un éditeur ou par un distributeur de services, par une des personnes mentionnées à l'article 95 ou par un prestataire auquel ces personnes recourent, de tout différend relatif à la distribution d'un service de radio, de télévision ou de médias audiovisuels à la demande, y compris aux conditions techniques et financières de mise à disposition du public de ce service, lorsque ce différend est susceptible de porter atteinte au caractère pluraliste de l'expression des courants de pensée et d'opinion, à la sauvegarde de l'ordre public, aux exigences de service public, aux missions de service public assignées aux sociétés nationales de programme mentionnées à l'article 44 ou à leurs filiales répondant à des obligations de service public, à La Chaîne parlementaire mentionnée à l'article 45-2, à la chaîne Arte et à la chaîne TV5, à la protection du jeune public, à la dignité de la personne humaine et à la qualité et à la diversité des programmes, ou lorsque ce différend porte sur le caractère transparent, objectif, équitable et non discriminatoire des conditions de la mise à disposition du public de l'offre de programmes et de services ou de leur numérotation ou des relations contractuelles entre un éditeur et un distributeur de services. » ;
3° Le cinquième alinéa du I de l'article 34 est ainsi rédigé :
« Le conseil peut, par décision motivée prise dans un délai fixé par voie réglementaire, s'opposer soit à l'exploitation d'une offre de services, soit à une modification de la composition de cette offre, soit à une modification de la numérotation des services de télévision au sein de cette offre, s'il estime qu'elle ne satisfait pas aux conditions et obligations de la présente loi, notamment celles mentionnées aux articles 1er, 3-1, 15, 34-1 à 34-2 et 34-4, ou s'il estime qu'elle porte atteinte aux missions de service public assignées aux sociétés nationales de programme mentionnées à l'article 44 ou à leurs filiales répondant à des obligations de service public, à La Chaîne parlementaire mentionnée à l'article 45-2, à la chaîne Arte et à la chaîne TV5, notamment par la numérotation attribuée au service dans l'offre commerciale. » ;
4° Le second alinéa de l'article 34-4 est ainsi rédigé :
« Sur le territoire métropolitain, les distributeurs de services dont l'offre de programmes comprend des services nationaux de télévision en clair diffusés par voie hertzienne terrestre assurent la reprise de ces services en respectant la numérotation logique définie par le Conseil supérieur de l'audiovisuel. Ils peuvent en outre proposer au téléspectateur la possibilité d'opter, explicitement et de manière à tout instant réversible, pour une numérotation différente qui présente un caractère équitable, transparent, homogène et non discriminatoire et dont les modalités techniques et commerciales de mise à disposition du public présentent ce même caractère. Les conditions de mise à disposition de cette offre sont fixées par le Conseil supérieur de l'audiovisuel. Dans le cas prévu à la deuxième phrase du présent alinéa, ces distributeurs doivent également assurer la reprise des services nationaux de télévision en clair diffusés par voie hertzienne terrestre en respectant l'ordre de la numérotation logique, à partir d'un nombre entier suivant immédiatement un multiple de cent. »
II. - Le présent article s'applique trois mois après la promulgation de la présente loi.
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteure. - Le Sénat avait adopté dans la loi Macron un article clarifiant les dispositions relatives à la numérotation des chaînes afin, d'une part, de prévoir l'obligation de proposer la numérotation logique, mais aussi la possibilité pour le distributeur de proposer une numérotation alternative thématique à condition que celle-ci présente un caractère équitable, transparent, homogène et non discriminatoire.
Cet article qui avait été censuré par le Conseil constitutionnel a été adopté à nouveau par le Sénat à l'initiative de notre collègue Alain Fouché dans le cadre de l'examen du projet de loi pour une République numérique. Toutefois, les circonstances ont changé depuis l'année dernière du fait de certains mouvements de concentration. Certains distributeurs réservent la meilleure exposition à leurs propres chaînes selon le seul critère capitalistique sans aucune prise en compte du respect du critère thématique. Certains distributeurs envisageraient même de proposer des avantages commerciaux à leurs abonnés qui adopteraient leur propre numérotation.
Cet amendement réaffirme que les distributeurs ont bien l'obligation de reprendre la numérotation logique du CSA. Si une numérotation alternative est proposée par le distributeur, elle bénéficiera de la même légitimité et de la même accessibilité. Au téléspectateur de faire son choix.
Mme Audrey Azoulay, ministre. - Il est en effet nécessaire d'assurer le caractère équitable, transparent, homogène et non discriminatoire de la numérotation proposée par les éditeurs et des plans de service. La seule logique qui doit prévaloir est la logique éditoriale. Cet amendement est équilibré. Avis favorable.
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteure. - Cet amendement couronne le travail de longue haleine mené par notre commission.
M. Jean-Pierre Leleux. - Les chaînes se regroupant, les métiers se mêlent, les industriels possèdent des chaînes et cherchent à faire prévaloir leurs intérêts.
La numérotation actuelle dite logique est en réalité héritée de l'histoire. Cet amendement n'est qu'une étape. Inéluctablement, tôt ou tard, c'est le téléspectateur qui choisira la numérotation des chaînes. Il faut nous y préparer dès maintenant.
M. Patrick Abate. - À mon tour, des bancs de la gauche, de soutenir cet amendement. Mme Morin-Desailly, Mme la ministre et M. Leleux ont tout dit. Il n'y a pas de clivage sur cette question.
M. David Assouline. - Si un éditeur est aussi opérateur internet ou télécom, il peut favoriser son propre bouquet de chaînes. Une régulation est nécessaire. À très court terme, le téléspectateur choisira sa numérotation, comme il peut déjà choisir ce qui apparaît sur son smartphone.
L'amendement n°89 est adopté à l'unanimité et devient article additionnel.
ARTICLE 11
Mme la présidente. - Amendement n°25 rectifié ter, présenté par MM. Bonhomme, Pellevat, César, Cigolotti, Chaize, Bouchet, Longeot, Luche, Morisset, Chasseing, Cadic et Delattre, Mmes Garriaud-Maylam, N. Goulet, Gruny, Imbert, Loisier et Micouleau, MM. Cardoux, Laménie, Mandelli et Masclet, Mme Morhet-Richaud, MM. Perrin et Raison, Mme Giudicelli et MM. Guerriau et Houel.
Au début de cet article
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
... - Après le quatrième alinéa de l'article 5 de la loi n° 86-897 du 1er août 1986 portant régime juridique de la presse, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsqu'une ou plusieurs fonctions mentionnées aux trois alinéas précédents sont occupées par le titulaire d'une fonction gouvernementale, d'une fonction exécutive locale ou d'un mandat parlementaire, il en est également fait mention. Il en va de même lorsqu'une personne physique ou le représentant légal d'une personne détenant au moins 10 % du capital d'une entreprise éditrice occupe une fonction gouvernementale, une fonction exécutive locale ou un mandat parlementaire. »
M. François Bonhomme. - Afin de garantir l'indépendance et le pluralisme des médias et renforcer la transparence, cet amendement vise à ce que les lecteurs soient informés dans les mentions légales à chaque numéro du fait que le propriétaire de l'entreprise éditrice, son dirigeant ou l'un de ses principaux actionnaires occupent des fonctions exécutives nationales, locales ou exerce un mandat parlementaire.
La transparence réduira les conflits d'intérêts.
Ainsi, M. Jean-Michel Baylet, nommé ministre après deux défaites électorales, a confié à son épouse la gestion de La Dépêche du Midi. Le lecteur devrait être informé de cette situation baroque ! Ce journal, le 12 février, lors de la nomination de son patron au Gouvernement, vantait un « Gouvernement de combat, du possible, tournant résolument le dos aux incantations et aux beaux parleurs »...
Bien des titres de la presse locale ignorent, vilipendent ou étrillent les personnes qui ne pensent pas comme leur propriétaire...
M. David Assouline. - Vous parlez du Figaro ?
M. François Bonhomme. - Libération est vendu à Corbeil-Essonnes...
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteure. - Sagesse.
Mme Audrey Azoulay, ministre. - Avis défavorable. Le public est déjà informé. Le nom du directeur de la publication figure sur chaque numéro.
M. François Bonhomme. - Madame la ministre, vous prônez la transparence et l'indépendance. Où est-elle si un élu dirige un journal ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. - Les fonctions gouvernementales sont publiques. Le nom du directeur de la publication est déjà connu : la transparence existe !
M. David Assouline. - Heureusement que M. Dassault n'est pas là... Vous n'auriez pas déposé cet amendement !
L'amendement n°25 rectifié ter est adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°22, présenté par M. Abate et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Alinéa 7, première phrase
Supprimer les mots :
, en cas de détention par toute personne physique ou morale d'une fraction supérieure ou égale à 10% de celui-ci,
M. Patrick Abate. - Cette exigence de transparence est déjà prévue par la loi mais non respectée. Qui peut le moins peut le plus ! Autant passer de 5 % à 0 %.
Mme la présidente. - Amendement n°56, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste et républicain.
Alinéa 7, première phrase
Remplacer le taux :
10 %
par le taux :
5 %
M. David Assouline. - Cet amendement rétablit le texte de l'Assemblée nationale, plus exigeant en matière de transparence. Il renforce l'obligation de transparence des éditeurs envers les lecteurs de la presse papier ou en ligne et maintient l'obligation d'information sur les détenteurs de parts de capital de la société, à partir du seuil de 5 %.
Mme la présidente. - Amendement identique n°68, présenté par Mme Blandin et les membres du groupe écologiste.
Mme Marie-Christine Blandin. - Même objet. La proposition de loi dispose que l'entreprise éditrice de presse doit porter à la connaissance des lecteurs ou des internautes de la publication ou du service de presse en ligne toutes les informations relatives à la composition de son capital, en cas de détention par toute personne physique ou morale d'une fraction supérieure ou égale à 10 % de celui-ci. Les auteurs de cet amendement proposent de rétablir le taux de 5 %.
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteure. - Nous sommes très favorables à cette transparence. Doit-elle concerner tous les actionnaires ? À partir de quel seuil ? Restons-en aux actionnaires significatifs, seuls à même d'exercer une pression sur le journal.
La commission a préféré retenir le seuil de 5 %, reconnu par l'AMF. À 10 %, l'actionnaire doit aussi déclarer ses intentions. Avis défavorable.
Mme Audrey Azoulay, ministre. - Cette obligation de transparence est bienvenue. Avis favorable.
L'amendement n°22 est retiré.
M. David Assouline. - Le seuil de 10 % est trop élevé : bien des informations échapperont à la connaissance des actionnaires. On pourrait multiplier des parts de 5 % et par-là acquérir une influence considérable et dissimulée.
Les amendements identiques nos56 et 68 sont adoptés.
L'article 11, modifié, est adopté.
ARTICLE ADDITIONNEL
Mme la présidente. - Amendement n°26, présenté par M. Bonhomme.
Après l'article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La détention d'au moins 10 % du capital d'une entreprise de presse est incompatible avec :
1° Les fonctions de membre du Gouvernement ;
2° Le mandat de député ou de sénateur ;
3° Le mandat de représentant au Parlement européen ;
4° Les fonctions exécutives au sein d'une collectivité territoriale, d'un établissement public de coopération intercommunale ou d'un syndicat mixte.
M. François Bonhomme. - La mission d'informer, consubstantielle à la démocratie, est incompatible par nature avec toute fonction politique.
Un magistrat, un directeur de la sécurité publique ne peuvent se présenter aux élections. Quand on fait profession d'informer, il faudrait aussi choisir. Que des directeurs de groupes de presse exercent des fonctions politiques est anachronique.
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteure. - Retrait ? Les incompatibilités ministérielles relèvent de la Constitution, de son article 23 ; les incompatibilités parlementaires de la loi organique.
Mme Audrey Azoulay, ministre. - La presse n'a pas à être politiquement neutre. Voyez Jaurès et L'Humanité, Clemenceau et La Justice. La réponse à votre préoccupation est la transparence : que le lecteur soit informé de la composition du capital. Avis défavorable.
M. François Bonhomme. - Je le retire. Mais si un habitant de Corbeil-Essonnes a le choix entre Le Figaro, Libération, Médiapart, dans le Sud-Ouest, il y a une situation de monopole de fait dans la presse régionale. Il ne suffit pas d'informer le lecteur de l'actionnariat pour garantir l'indépendance.
L'amendement n°26 est retiré.
ARTICLE 11 BIS (Supprimé)
Mme la présidente. - Amendement n°24, présenté par M. Abate et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Après l'article 15 de la même loi, il est inséré un article 15-1 ainsi rédigé :
« Art. 15-1. - La violation par une entreprise éditrice, au sens de l'article 2, des articles 5 et 6 de la présente loi, ainsi que de l'article 2 bis de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, entraîne la suspension de tout ou partie des aides publiques, directes et indirectes, dont elle bénéficie. »
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. - Cet amendement réintroduit l'article 11 bis qui sanctionne financièrement les entreprises éditrices qui violent les mesures concernant le devoir de transparence vis-à-vis des lecteurs, le droit de retrait des journalistes et les chartes déontologiques.
La transparence est la condition sine qua non de l'indépendance, et le pouvoir de sanction du CSA n'est pas assez dissuasif. La loi de 1986 n'est pas respectée.
Mme la présidente. - Amendement identique n°57, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste et républicain.
M. David Assouline. - Tout manquement aux obligations de transparence dans l'actionnariat des entreprises de presse écrite ou en ligne doit entraîner, en effet, la suppression de toute ou partie des aides directes ou indirectes à la presse.
De tels manquements ne sont actuellement sanctionnés que par une amende de 4 000 euros, est-ce bien dissuasif ? Ceux qui ne veulent pas de la transparence doivent l'assumer. Mais il faut en plus retirer les aides pour que le dispositif soit vraiment dissuasif.
Mme la présidente. - Amendement identique n°69, présenté par Mme Blandin et les membres du groupe écologiste.
Mme Marie-Christine Blandin. - Les aides à la presse sont la contrepartie d'une sorte de contrat moral. Percevoir de l'argent public impose le respect de la loi.
Mme la présidente. - Amendement n°32 rectifié, présenté par Mme Jouve, MM. Barbier, Collombat et Guérini, Mme Laborde et M. Vall.
Mme Mireille Jouve. - Défendu.
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteure. - Il existe déjà une sanction pénale des manquements à l'obligation de transparence. Les aides publiques à la presse sont conditionnées au respect des obligations légales et réglementaires. Restons-en là. Avis défavorable.
Mme Audrey Azoulay, ministre. - Certes, le dispositif est peu dissuasif. Nous mettons en place, à travers une convention-cadre, un dispositif réglementaire en ce qui concerne les aides directes. Retirer les aides indirectes comme la TVA à taux réduit serait en revanche compliqué. Retrait ?
À la demande du groupe Les Républicains, les amendements nos24, 57 et 69 sont mis aux voix par scrutin public.
Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n°234 :
Nombre de votants | 342 |
Nombre de suffrages exprimés | 342 |
Pour l'adoption | 156 |
Contre | 186 |
Le Sénat n'a pas adopté.
L'amendement n°32 rectifié n'est pas adopté.
L'article 11 bis demeure supprimé.
Les articles 11 ter, 11 quater et 11 quinquies sont successivement adoptés.
ARTICLE ADDITIONNEL
Mme la présidente. - Amendement n°28 rectifié bis, présenté par Mme Jouve, MM. Amiel, Arnell, Barbier, Bertrand, Collin, Esnol, Fortassin et Guérini, Mmes Laborde et Malherbe et MM. Mézard, Requier et Vall.
Après l'article 11 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le premier alinéa du 1° de l'article 81 du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Ces dispositions s'appliquent aux journalistes, rédacteurs, photographes, directeurs de journaux et critiques dramatiques et musicaux dont le revenu brut annuel n'excède pas 62 340 €. »
II. - Le I est applicable au 1er janvier 2017 pour l'imposition des revenus de 2016.
Mme Mireille Jouve. - Cet amendement limite l'exonération d'impôt sur le revenu prévue au 1° de l'article 81 du CGI aux journalistes, rédacteurs, photographes, directeurs de journaux et critiques dramatiques et musicaux dont le revenu mensuel est inférieur à 4 000 euros. Nous revenons ainsi à l'esprit de la mesure qui visait les pigistes en manque de stabilité.
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteure. - Avis favorable. Le dispositif a souvent été dénoncé par la commission comme trop généreux.
Mme Audrey Azoulay, ministre. - C'est un cavalier... Avis défavorable.
M. David Assouline. - L'amendement devrait effectivement être retiré. Nous aurons ce débat en loi de finances, ce qui permettra d'aborder l'ensemble de la fiscalité de la presse - ce ne sont pas les journalistes qui coûtent le plus cher. Et si on parle niches fiscales, il n'y a pas de raison de faire un sort particulier aux journalistes...
M. Patrick Abate. - Dans mon rapport budgétaire de l'an dernier, j'ai abordé le sujet ; mais il n'appartient pas à cette loi de le régler. Il faut regarder globalement la fiscalité de la presse. Mieux vaudrait un retrait.
Mme Marie-Christine Blandin. - Un revenu annuel brut de 62 340 euros pour un revenu mensuel net de 4 000 euros ? Cela ne fait pas beaucoup de cotisations patronales et salariales... En outre, il faudrait au moins différer cette suppression d'un an : pensons à ceux qui sont mensualisés... Tout cela appelle à différer l'arbitrage.
À la demande du groupe Les Républicains, l'amendement n°28 rectifié est mis aux voix par scrutin public.
Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n°235 :
Nombre de votants | 342 |
Nombre de suffrages exprimés | 331 |
Pour l'adoption | 203 |
Contre | 128 |
Le Sénat a adopté.
L'article additionnel est inséré.
Les articles 11 sexies et 11 septies sont successivement adoptés.
ARTICLE 11 OCTIES
Mme la présidente. - Amendement n°75, présenté par le Gouvernement.
Alinéa 5, deuxième phrase
Après les mots :
système collectif de distribution,
insérer les mots :
à limiter les coûts de distribution pour les entreprises de presse,
Mme Audrey Azoulay, ministre. - Cet amendement rétablit un membre de phrase supprimé par la commission au motif qu'il était introduit par un « notamment »... Il est en effet primordial de maintenir la nécessité de veiller à limiter les coûts de distribution de la presse dans cet article de la loi Bichet.
L'amendement n°75, accepté par la commission, est adopté.
L'article 11 octies, modifié, est adopté.
ARTICLES ADDITIONNELS
Mme la présidente. - Amendement n°60, présenté par Mme Blandin et les membres du groupe écologiste.
Après l'article 11 octies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article 2 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, il est inséré un article 2 ... ainsi rédigé :
« Art. 2 ... - Toute entité juridique employant des journalistes professionnels au sens de l'article L. 7111-3 du code du travail, produisant ou diffusant de l'information, notamment agence de presse, entreprise de publication de presse, entreprise audiovisuelle, multimédia, électronique, doit :
« 1° Soit se doter d'une équipe rédactionnelle permanente et autonome composée de tous les journalistes professionnels au sens de l'article L. 7111-3 du même code qui y contribuent. Elle participe à l'élaboration d'une charte éditoriale et déontologique et veille au respect des chartes de déontologie de la profession.
« Sans préjudice des dispositions relatives aux représentants du personnel, cette équipe rédactionnelle désigne son ou ses représentants selon les modalités électorales qui régissent les élections professionnelles dans les entreprises.
« Ces représentants ont un rôle de porte-parole et organisent les consultations de l'équipe rédactionnelle.
« Ils bénéficient de la même protection que celle dont bénéficient les délégués du personnel en vertu des articles L. 2411-5 et suivants du même code.
« L'équipe rédactionnelle doit être consultée par sa direction avant tout changement de politique éditoriale ou rédactionnelle. Les projets éditoriaux lui sont soumis annuellement. Elle peut s'y opposer.
« Elle doit également être consultée sur la nomination aux postes de responsable de la rédaction que ce soit directeur de l'information, directeur de la rédaction ou rédacteur en chef. Elle peut s'opposer à ces nominations.
« En cas de changement important dans la composition du capital ou dans l'équipe de direction affectant de manière préoccupante la situation économique de l'entreprise, l'équipe rédactionnelle peut prendre l'initiative d'un scrutin de défiance. Elle a aussi la faculté de saisir le comité d'entreprise pour faire jouer le droit d'alerte ;
« 2° Soit se doter d'une association de journalistes dont les titulaires de la carte de presse sont membres de droit. Les statuts de celle-ci sont conformes aux règles édictées par décret en Conseil d'État.
« S'il y a lieu, la forme associative peut être remplacée par une société des rédacteurs, dont les parts sociales sont détenues par les salariés titulaires de la carte de presse.
« Lorsque l'entreprise édite une publication d'information politique et générale, l'association des journalistes ou la société des rédacteurs désigne un représentant qui siège de droit, avec voix consultative, au conseil d'administration ou de surveillance.
« La désignation du responsable de la rédaction donne lieu à un vote, à bulletin secret, de tous les membres de l'association des journalistes ou de la société des rédacteurs.
« Dans le cas où la désignation est opérée, alors qu'elle a été rejetée à la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés, elle est considérée de droit comme opérant le changement notable prévu au 3° de l'article L. 7112-5 du code du travail.
« L'association des journalistes ou la société des rédacteurs participe avec la société éditrice à l'élaboration d'une charte éditoriale et déontologique, énonçant les engagements souscrits à l'égard des lecteurs par tous ceux qui concourent à la publication. Cette charte est reproduite dans la publication au moins une fois par an. »
Mme Marie-Christine Blandin. - Ces dispositions figuraient dans la proposition de loi de 2010. Il faut cloisonner l'éditorial et l'économie et donner une réalité juridique à l'équipe de journalistes. Un collègue se plaint des rétorsions des syndicats sur la presse ; mais qui refuse de publier ? L'éditorial ou le groupe économique ? Il est important de protéger les journalistes de toute influence extérieure, en donnant une identité juridique à l'ensemble de ceux qui rédigent ; ils sont un pan de notre démocratie.
Mme la présidente. - Amendement n°2 rectifié, présenté par M. Abate et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Après l'article 11 octies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article 6 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, il est inséré un article 6 ... ainsi rédigé :
« Art. 6 ... - Toute entité juridique employant des journalistes professionnels au sens de l'article L. 7111-3 du code du travail, produisant ou diffusant de l'information, notamment agence de presse, publication de presse, entreprise audiovisuelle, multimédia, électronique doit :
« 1° Soit se doter d'une équipe rédactionnelle permanente et autonome composée de tous les journalistes professionnels au sens de l'article L. 7111-3 du même code qui y contribuent. Elle veille au respect des chartes de déontologie de la profession.
« L'équipe rédactionnelle doit être consultée par sa direction avant tout changement de politique éditoriale ou rédactionnelle. Les projets éditoriaux lui sont soumis annuellement. Elle peut s'y opposer.
« Elle doit également être consultée lors de la nomination d'un responsable de la rédaction qu'il soit directeur de l'information, directeur de la rédaction ou rédacteur en chef. Elle peut s'opposer à cette nomination.
« En cas de changements importants dans la composition du capital ou dans l'équipe de direction affectant de manière préoccupante la situation économique de l'entreprise, l'équipe rédactionnelle peut prendre l'initiative d'un scrutin de défiance. Elle a aussi la faculté de saisir le comité d'entreprise pour faire jouer le droit d'alerte ;
« 2° Soit se doter d'une association de journalistes dont les titulaires de la carte de presse sont membres de droit. Les statuts de celle-ci sont conformes aux règles édictées par décret en Conseil d'État.
« Lorsque l'entreprise édite une publication d'information politique et générale, l'association des journalistes ou la société des rédacteurs désigne un représentant qui siège de droit, avec voix consultative, au conseil d'administration ou de surveillance.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. - Il s'agit de reconnaître l'existence de l'équipe rédactionnelle et d'assurer aux journalistes une protection collective. La rédaction est encore considérée comme un conglomérat d'individualités, non comme un collectif... L'amendement prévoit aussi la consultation des journalistes sur toute décision des organes dirigeants qui impliquerait l'équipe rédactionnelle.
L'amendement n°27 n'est pas défendu.
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteure. - L'indépendance des journalistes est une préoccupation partagée. Nous avons déjà acté le droit d'opposition étendu, la généralisation des chartes, les comités de déontologie. Vous allez trop loin en créant de véritables contre-pouvoirs dans les entreprises de presse. Le directeur de la publication porte seul la responsabilité pénale des écrits publiés par la rédaction, il est en première ligne. Ériger la rédaction en entité juridique introduit de la confusion dans la chaîne de responsabilité.
Mme Audrey Azoulay, ministre. - Ces amendements remettent en cause la responsabilité du directeur de publication définie par la loi de 1881. La référence à la charte déontologique offre la possibilité aux journalistes de s'opposer aux pressions. Retrait.
M. David Assouline. - L'amendement reprend l'article premier de la proposition de loi que j'ai déposée en 2010 ; mais je proposais un dispositif complet et cohérent pour répondre au mouvement de concentration de la presse qui menace l'autonomie des rédactions. La multiplicité des titres garantit la diversité des lignes rédactionnelles. Le présent texte est déjà un pas. Nous ne pouvons prendre le risque de l'imprécision juridique. Nous nous abstiendrons.
Mme Marie-Christine Blandin. - J'invite M. Assouline à lire tout l'amendement, nous avons fait un travail de dentelle... La rédaction d'un grand hebdomadaire de gauche a publié une tribune dénonçant le licenciement de la n°2 de la rédaction ; je ne sais pas ce qu'il en est mais la société des rédacteurs dénonce « l'intervention politique d'un actionnaire ». Pour défendre l'autonomie de l'éditorial, nous maintenons l'amendement.
L'amendement n°60 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°2 rectifié.
Mme la présidente. - Amendement n°76, présenté par le Gouvernement.
Après l'article 11 octies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la première phrase du troisième alinéa de l'article L. 132-44 du code de la propriété intellectuelle, les mots : « au dernier alinéa de l'article L. 2232-21 et » et les mots : « dans les conditions prévues à l'article L. 2232-21 du même code, » sont supprimés.
Mme Audrey Azoulay, ministre. - Il s'agit d'un amendement de coordination entre les dispositions du code du travail récemment modifiées en matière de validation d'accords d'entreprises par une commission paritaire de branche et un article du code de la propriété intellectuelle relatif aux droits d'auteurs des journalistes qui faisait référence à ces articles. Le changement intervenu limite désormais l'intervention de la commission à la validation d'accords d'entreprises conclus avec des salariés non mandatés.
L'amendement n°76, accepté par la commission, est adopté et devient article additionnel.
ARTICLE 12
Mme la présidente. - Amendement n°77, présenté par le Gouvernement.
Remplacer les mots :
avant le 1er juillet 2017
par les mots :
dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi pour les services à vocation nationale de radio généraliste ou de télévision ou avant le 1er juillet 2017 pour les autres services
Mme Audrey Azoulay, ministre. - Cet amendement maintient le délai de six mois donné au CSA pour adapter les conventions des services à vocation nationale, dont le nombre est réduit. Je comprends que le Conseil ait besoin de temps, mais le délai adopté par l'Assemblée nationale me semble suffisant.
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteure. - Nous avons auditionné le président du CSA. Plus de 1 000 conventions pour la télévision, 310 pour les radios, sans compter les médias outre-mer... On voit mal comment ce délai pourrait être tenu. Avis défavorable.
M. David Assouline. - Il y a 25 chaînes... Nous parlons des services nationaux... D'où viennent vos chiffres, madame la rapporteure ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. - L'amendement porte bien sur les services à vocation nationale, soit 25 chaînes de télévision et 10 radios. Les services locaux disposeront de plus de temps.
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteure. - Le président du CSA nous a alertés... En attente d'éclaircissement d'ici la CMP, je maintiens mon avis défavorable.
À la demande du groupe Les Républicains, l'amendement n°77 est mis aux voix par scrutin public.
Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n°236 :
Nombre de votants | 342 |
Nombre de suffrages exprimés | 342 |
Pour l'adoption | 156 |
Contre | 186 |
Le Sénat n'a pas adopté.
L'article 12 est adopté.
L'article 13 est adopté.
ARTICLE ADDITIONNEL
Mme la présidente. - Amendement n°71, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste et républicain.
Après l'article 13
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, dix-huit mois après l'entrée en vigueur de la présente loi, un rapport sur le fonctionnement des comités prévus à l'article 30-8 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de la communication et sur la mise en oeuvre des chartes prévues à l'article 2 bis de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse. Ce rapport fait l'objet d'un débat au sein des commissions compétentes du Sénat et de l'Assemblée nationale.
M. David Assouline. - Cet amendement demande un rapport présentant un bilan d'application des comités de déontologie et des chartes déontologiques ; ce bilan fera l'objet d'un débat dans les commissions parlementaires compétentes.
Mme la rapporteure estime que cela porte atteinte à la libre organisation des commissions parlementaires. Mais la loi du 30 septembre 1986 prévoit déjà que leur est transmise la convention d'objectifs et de moyens des sociétés de l'audiovisuel public pour un éventuel débat. Il serait bon de faire le point dans quelques temps.
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteure. - Je comprends la demande et m'engage à lui donner satisfaction. Le projet de loi de finances peut être l'occasion d'une telle discussion sans qu'un amendement soit nécessaire. De plus, obliger les commissions compétentes à organiser un débat va à l'encontre du Règlement des assemblées.
Mme Audrey Azoulay, ministre. - Je suis gênée que l'on demande un tel rapport au Gouvernement. Il serait plus logique qu'il soit confié au CSA. De plus, le délai de dix-huit mois me semble trop court dès lors qu'un an a été donné pour l'installation des comités. Avis défavorable.
M. David Assouline. - Je le retire, non pour des raisons juridiques - il ne s'agit en aucun cas de contraindre les débats de la commission - mais parce que l'argumentation du Gouvernement m'a convaincu. Il convient, en effet, que le CSA publie un rapport spécifique ou intègre le sujet dans son rapport annuel.
L'amendement n°71 est retiré.
ARTICLE 14
Mme la présidente. - Amendement n°81 rectifié, présenté par Mme Morin-Desailly, au nom de la commission de la culture.
Rédiger ainsi cet article :
I. - Les articles 1er, 1er ter à 11, 12 et 13 sont applicables dans les îles Wallis et Futuna, en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie et dans les Terres australes et antarctiques françaises.
II. - Après le mot : « applicable », la fin de l'article 69 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse est ainsi rédigée : « , dans sa rédaction résultant de la loi n° du visant à renforcer la liberté, l'indépendance et le pluralisme des médias, dans les îles Wallis et Futuna, en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie et dans les Terres australes et antarctiques françaises. »
III. - L'article 23 de la loi n° 86-897 du 1er août 1986 portant réforme du régime juridique de la presse est ainsi modifié :
1° Les mots : « dans les territoires de la » sont remplacés par le mot : « en » ;
2° Le mot : « des » est remplacé par les mots : « dans les » ;
3° Les mots : « à Mayotte » sont remplacés par les mots : « dans les Terres australes et antarctiques françaises ».
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteure. - Cet amendement précise l'application outre-mer de la proposition de loi.
Mme la présidente. - Sous-amendement n°90 à l'amendement n° 81 rectifié de Mme Morin-Desailly, au nom de la commission de la culture, présenté par le Gouvernement.
Amendement n° 81, alinéa 2
Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :
I. - Les articles 1er, 1er ter, le 2° du I et les III et IV de l'article 1er quater, les articles 2 à 11 bis, 12 et 13 sont applicables en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, dans les îles Wallis-et-Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises.
Les 2° à 7° du I de l'article 11 ter sont applicables en Polynésie française et dans les îles Wallis-et-Futuna.
Mme Audrey Azoulay, ministre. - Ce sous-amendement complète l'amendement n°81 rectifié en y ajoutant les dispositions de l'article premier quater qui modifient les dispositions qui y sont applicables et en Polynésie française et dans les îles Wallis-et-Futuna, les dispositions de l'article 11 ter qui modifient les dispositions du code de commerce qui y sont applicables et qui relèvent de la compétence de l'État.
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteure. - Favorable à titre personnel, la commission n'ayant pas examiné ce sous-amendement.
Le sous-amendement n°90 est adopté ainsi que l'amendement n°81 rectifié, sous-amendé.
L'article 14 est ainsi rédigé.
Interventions sur l'ensemble
M. David Assouline . - Ce débat, intéressant, s'est déroulé dans des conditions et un calendrier peu satisfaisants. Cependant, je me félicite que cette loi soit votée.
Si nous sommes satisfaits de la protection accordée aux lanceurs d'alerte ou des nouvelles missions confiées au CSA, nous regrettons que le Sénat n'ait pas clarifié les conditions dans lesquelles le CSA peut ne pas reconduire automatiquement une autorisation ; que les obligations de transparence des éditeurs n'aient pas été renforcées. Je suis très réservé sur le droit de regard permanent du CSA sur les comités de déontologie. Surtout, la protection du secret des sources a été mise à l'ordre du jour, mais dépecée par la droite à l'initiative du rapporteur Portelli. Raison pour laquelle, au lieu de nous abstenir, nous voterons contre.
Mme Marie-Christine Blandin . - Le texte initial était très prudent, qui ne traitait ni de la concentration des entreprises de presse, ni des liens éventuels de celles-ci aves la commande publique... La ministre et la rapporteure disent que l'autonomie des rédactions n'est pas la voie qu'elles ont choisie. Soit, encore eût-il fallu que le Sénat ne réduisît pas encore les ambitions de ce texte. Sur les lanceurs d'alerte, ce fut une lapidation... Nous nous abstiendrons.
M. Philippe Bonnecarrère . - Protéger la liberté des journalistes, oui, mais cette proposition de loi multiplie les contraintes. Les enjeux sont avant tout économiques. Heureusement, la commission a éliminé les éléments de confusion, clarifié les rôles des journalistes et des directeurs de publication de façon réaliste. Le texte est équilibré. Malgré quelques imperfections qui subsistent et pourront être corrigées en commission mixte paritaire, nous voterons pour.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin . - La liberté de la presse, l'indépendance des rédactions, le pluralisme des médias sont des impératifs démocratiques. La concentration du secteur encouragée par un modèle économique à bout de souffle, l'uniformisation des contenus qui en découle les menace et précarise les journalistes. La proposition de loi comportait des avancées, et notre débat a permis de faire progresser les esprits - sur les lanceurs d'alerte par exemple.
J'espère qu'un meilleur sort sera réservé à nos propositions à l'occasion d'un autre véhicule... Dommage aussi de n'avoir pas avancé sur le secret des sources. Nos divergences demeurent. Le passage de M. Portelli a été dévastateur... Nous restons aussi dubitatifs sur le rôle dévolu au CSA, sans moyens supplémentaires. (Mme la présidente indique à l'oratrice que son temps de parole est épuisé)
On met en parallèle l'indépendance des médias et la déontologie des journalistes, en faisant peser sur ses derniers la responsabilité de l'indépendance de la ligne éditoriale ; mais ils n'ont pas tous les moyens d'un contre-pouvoir. Nous avons longuement hésité avant de nous décider pour un vote contre.
Mme Françoise Laborde . - Cette proposition de loi, malgré ses insuffisances, comporte des avancées. La procédure accélérée est malvenue, mais nous pourrons aboutir en commission mixte paritaire. Nous nous abstiendrons.
M. Hugues Portelli, rapporteur pour avis . - Le groupe Les Républicains votera ce texte qui, tel qu'il a été modifié, lui convient. Je tiens aussi à préciser que l'avis que j'ai exprimé était celui, unanime, de la commission des lois.
M. David Assouline. - Faux !
M. Hugues Portelli, rapporteur pour avis. - C'est tout à fait vrai, même si certains, comme M. Sueur, ne se sont pas exprimés et n'ont pas pris part au vote...
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteure . - Bien légiférer demande un temps raisonnable. Dans celui, fort bref, qui nous a été imparti, la commission a cherché à améliorer le texte, et je remercie chacun de ce débat.
À la demande de la commission, la proposition de loi, modifiée, est mise aux voix par scrutin public.
Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n°237 :
Nombre de votants | 342 |
Nombre de suffrages exprimés | 315 |
Pour l'adoption | 186 |
Contre | 129 |
Le Sénat a adopté.
Mme Audrey Azoulay, ministre de la culture et de la communication . - Merci à tous pour cette discussion. Le Gouvernement est satisfait de voir l'architecture du texte globalement préservée, et se réjouit de la disposition votée sur les lanceurs d'alerte. En revanche, je regrette fortement le vote du Sénat sur la protection du secret des sources des journalistes. Deux visions s'opposent, j'espère que le débat les rapprochera.
CMP (Demande de constitution)
Mme la présidente. - M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la demande de constitution d'une commission mixte paritaire chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine.
Il sera procédé à la nomination des représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire selon les modalités prévues par l'article 12 du Règlement.
Prochaine séance, mardi 31 mai 2016, à 14 h 30.
La séance est levée à 19 h 30.
Jacques Fradkine
Direction des comptes rendus