Agriculture et filière agroalimentaire (Deuxième lecture)
Mme la présidente. - L'ordre du jour appelle la deuxième lecture de la proposition de loi, rejetée par l'Assemblée nationale, en faveur de la compétitivité de l'agriculture et de la filière agroalimentaire.
Discussion générale
M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement . - L'agriculture, et particulièrement l'élevage, traverse une crise historique par sa profondeur et sa durée. J'ai réussi à faire prendre conscience à la Commission de Bruxelles et autres États membres qu'il s'agit d'une crise de surproduction, liée à des facteurs conjoncturels - l'embargo russe et une estimation excessive de la demande chinoise. La production européenne continue de croître plus vite que la demande : en deux mois et demi, celle de poudre de lait atteint déjà 50 000 tonnes en 2016, soit plus que les 40 000 tonnes stockées l'an dernier. Si l'on ne s'attaque pas à ce phénomène, le revenu des agriculteurs continuera de chuter.
D'où nos propositions, que nous espérons voir adoptées par l'Europe. Hier, j'ai réuni l'ensemble de la filière française pour faire partager ces objectifs et cette méthode. Des mesures prises à l'échelle française ne serviraient à rien. Avec mon homologue belge, à qui j'ai adressé ma solidarité hier, nous avons saisi le président de la commission de l'agriculture du Parlement européen. Ce qui vaut pour le lait vaut aussi pour le porc, la viande bovine mais aussi les céréales. Quand j'ai pris mes fonctions en 2012, la tonne de céréales au fameux marché de Chicago valait plus de 250 euros ; 140 euros seulement aujourd'hui ! Il nous faut adopter une approche plus contra-cyclique en laissant les agriculteurs gérer les choses quand les prix sont plus attrayants.
Cette proposition de loi porte sur la compétitivité. Avec le pacte de responsabilité et le CICE, l'agriculture bénéficiera au total d'une baisse de charges de 1,8 milliard d'euros en 2016 - une baisse supplémentaire de sept points s'ajoutant à celle de trois points. Les agriculteurs le demandaient, c'était aussi l'une des mesure de ce texte. Cet effort ramène le niveau des charges en France à la moyenne européenne. Si l'on y additionne la baisse des charges dans l'agroalimentaire à hauteur de 1,8 milliard d'euros, on constate que les baisses de charges équivalent au budget du ministère de l'agriculture qui atteindra plus de 4 milliards en 2017. D'une certaine manière, ce débat tombe bien : j'ai signé ce matin-même le décret baissant les charges de sept points. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain ; M. Jacques Mézard applaudit aussi)
Le plan de soutien à l'élevage représente 700 millions sur trois ans, il a été décidé lors du Conseil européen de décembre. Nous avons aussi accordé près de 190 millions sur le plan social, avec le calcul des cotisations sur l'année n-1, la reprise des cotisations MSA, la baisse de l'assiette minimale qui profite aux petites exploitations, le fonds d'allègement des charges avec la déduction des intérêts d'emprunts qui profite à 30 000 agriculteurs pour 110 millions d'euros, 38 millions d'euros d'exonérations fiscales avec déjà 70 000 dossiers et, enfin, le mécanisme de report d'annuités d'emprunt avec 4 500 dossiers traités par les cellules départementales dont 3 000 dossiers d'année blanche. Ces mesures étaient nécessaires quand les prix ont diminué de 25 à 30 % en un an à un an et demi.
Sans revenir sur l'agroécologie et la stratégie d'autonomie fourragère, je veux anticiper certains débats. La loi Sapin prévoira l'interdiction de la cession de contrats laitiers à titre onéreux que cette proposition de loi demandait. Il faudra d'ailleurs intégrer cet élément dans les contrats-cadres des organisations professionnelles laitières ; c'est un enjeu territorial comme l'étaient les quotas laitiers. Autre mesure reprise dans la loi Sapin : le renforcement des sanctions à l'égard des entreprises qui ne présentent pas leurs comptes : 1 500 euros, ce n'est rien pour ces sociétés.
Nous réfléchissons aussi à l'obligation de faire référence au prix payé aux producteurs dans les contrats LME, qui lient les industriels et la grande distribution.
L'effort de l'État pour soutenir la compétitivité agricole au moyen d'allègement de charges sera de 2 milliards d'euros en 2017 ; c'est sans précédent. Le Gouvernement a écouté le Sénat et le monde agricole. Merci au président Lenoir, au rapporteur Gremillet et à tous les sénateurs d'avoir nourri le débat. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)
M. Daniel Gremillet, rapporteur de la commission des affaires économiques . - L'Assemblée nationale a rejeté le texte que nous avions voté en première lecture en utilisant une motion de procédure. Cela a empêché une navette constructive, quel dommage. Notre agriculture et notre filière agroalimentaire méritent pourtant que nous recherchions ensemble les moyens de les sortir de l'ornière et de préparer une nouvelle PAC. Comment espérer convaincre nos partenaires si nous sommes divisés ? J'avais pourtant écouté chacun, et proposé l'incessibilité des contrats laitiers, l'obligation de rendre publique la liste des opérateurs qui ne jouent pas le jeu, l'amélioration des mécanismes pour aléa, l'extension du suramortissement Macron au bénéfice des coopératives et des bâtiments agricoles, l'allègement de la taxe foncière pour les premiers hectares, l'obligation d'assurance contre les risques climatiques pour les nouveaux installés.
Bref, nous nous étions voulus pragmatiques. Cette proposition de loi a montré l'urgence à agir : les cours du porc ont baissé de 7 % par rapport à 2014. Les perspectives ne sont pas bonnes : notre consommation domestique diminue, la demande chinoise faiblit. Même chose pour la viande bovine : les accords avec le Canada et les États-Unis menacent notre production. Et je ne parle pas du marché du foie gras et de celui du sucre qui va vivre la fin des quotas.
Au-delà de la conjoncture, se pose la question de la compétitivité. Sans elle, nous ne pouvons pas espérer renouer avec une agriculture prospère. N'opposons pas la compétitivité prix et la compétitivité hors-prix.
Grâce à cette proposition de loi, nous avons obtenu quelques avancées. Ainsi sur l'interdiction de cession onéreuse des contrats laitiers désormais inscrite dans la loi Sapin II et l'étiquetage de la viande que l'Union européenne accepte dorénavant à titre expérimental.
M. Didier Guillaume. - Grâce au ministre !
M. Daniel Gremillet, rapporteur. - Et au Sénat. (M. le ministre s'amuse)
La loi de finances pour 2015 a assoupli la déduction pour aléas (DPA), même si elle va moins loin que notre proposition de loi. L'extension du suramortissement aux bâtiments d'élevage ayant également été votée en loi de finances, j'ai proposé de supprimer l'article 7 en commission.
Le président de la République a annoncé la baisse des charges de sept points lors du Salon de l'agriculture, nous la demandions depuis longtemps.
Nous attendons d'autres avancées sur la question des normes, la modulation des échéances d'emprunt, les mécanismes de cautionnement mutuel en matière d'emprunt. Je proposerai aussi un amendement pour protéger les agriculteurs contre la défaillance de leurs créanciers.
Je suis fier que le Sénat soit en pointe de la défense de l'agriculture. Ce texte, qui sert d'aiguillon, avait une ambition simple : redonner confiance aux agriculteurs, aux industriels, à tous les acteurs du monde rural. Il y a parfois un écart entre les discours et les réalités. J'ai reçu hier le courrier d'un d'agriculteur de 37 ans avec deux enfants dont la banque refuse le rééchelonnement du prêt... Adoptons des mesures structurelles pour donner aux agriculteurs des perspectives et une place dans la négociation de la future PAC. (Applaudissements au centre et à droite)
M. Joël Labbé . - Le maître-mot de la compétitivité serait le remède à tous nos maux dans cette recherche insensée d'une croissance qui n'arrivera pas. Nous ferions mieux de parler de résilience mais c'est trop tôt. (Marques d'agacement à droite et au centre)
La pensée dominante serait que la compétitivité va avec la concentration, l'agrandissement de la taille des exploitations et leur modernisation payée au prix fort de l'endettement. Pas moins de 15 % des exploitations morbihannaises seraient déjà condamnées, la proportion doit être identique pour toute la France. C'est inacceptable comme il est inacceptable d'entendre des gens dire : soit vous vous adaptez, soit vous disparaissez. Quelle violence envers les agriculteurs qui travaillent dur pour nourrir les autres et ne peuvent plus se nourrir eux-mêmes !
Le Gouvernement s'est démené pour trouver des solutions, stockage ou encore étiquetage, mais cela ne suffit pas. C'est bien le modèle dominant qui doit être revu ; dominant parce qu'il ne laisse pas de place aux autres. Lisez le livre Foutez-nous la paix d'Isabelle Saporta, qui décrit les paysans travaillant en circuits courts, ayant fait le choix de la qualité. Ils sont victimes de tracasseries administratives, d'un empilement de normes...
M. Jacques Mézard. - Je ne vous le fais pas dire !
M. Joël Labbé. - ...conçues par et pour l'agrobusiness. Aujourd'hui, les agriculteurs bio doivent obtenir une certification sur l'usage des pesticides, alors qu'ils n'en utilisent pas, par définition.
Mme Sophie Primas. - Bien sûr que si !
M. Joël Labbé. - Il est possible de produire sans néonicotinoïdes, ni pesticides, ni produits cancérigènes. Par exemple, si l'on mélange les pois à l'orge, on les protège contre les coléoptères. J'ai entendu le témoignage passionnant de Jacques Moriceau du GAEC Ursule (Marques d'ironie à droite et au centre) que le ministre a d'ailleurs visité. C'est cette agriculture qui permet un ancrage territorial de l'alimentation qu'il faut soutenir.
Pour finir, je veux citer la définition que donne l'Union européenne à la compétitivité « La compétitivité est la capacité d'un État à améliorer durablement le niveau de vie de ses habitants et à leur procurer un haut niveau d'emploi et de cohésion sociale dans un environnement de qualité. » Cette proposition de loi ne va pas dans le sens de cette définition humaniste. L'Europe a de bonnes intentions mais peut le pire dans l'application. Les écologistes ne peuvent pas voter cette proposition de loi.
M. Jacques Mézard . - Monsieur Labbé, on ne peut pas multiplier sans cesse les normes environnementales et déplorer leurs conséquences.
Le nombre d'exploitations agricoles ne cesse de baisser : moins 8 % en trois ans, c'est un drame social et territorial. Des hommes et des femmes qui ne ménagent pas leur peine voient le fruit du travail de toute une vie leur échapper. Face à la colère des éleveurs, frappés par la chute des prix, le Gouvernement a pris des mesures d'urgence qui vont dans le bon sens.
La question de la compétitivité est au coeur de cette proposition de loi. Je suis surpris que le dogmatisme l'ait emporté à l'Assemblée nationale, alors que l'avenir des 450 000 exploitations est en jeu. Drôle de manière de nous appeler à l'unité, comme on le fait à propos de la révision constitutionnelle ! (Applaudissements au centre et à droite)
Pourtant cette proposition de loi est à l'origine de la baisse des charges de 7 %, décidée en projet de loi de finances, et de l'extension du suramortissement.
Le Gouvernement n'est pas hostile non plus à l'assouplissement de la déduction pour aléas, à l'incessibilité des contrats laitiers, à l'amélioration du dispositif d'assurance récolte, au renforcement de l'étiquetage. Il a d'ailleurs obtenu des avancées de Bruxelles. Mais, monsieur le ministre, il faut aussi obtenir la levée de l'embargo russe qui pénalise nos exportations en particulier de viandes porcine et bovine. Nous proposerons un amendement pour renforcer l'encadrement de la contractualisation.
Le groupe RDSE votera ce texte, sur lequel nous pourrions tous nous retrouver. Les grandes exploitations doivent coexister avec les petites exploitations travaillant en circuit court. (Applaudissements au centre et sur quelques bancs du groupe Les Républicains)
M. Daniel Dubois . - Le salon de l'agriculture a été l'occasion de dénoncer le poids de la réglementation sur la compétitivité agricole. C'est l'objet même du groupe de travail que j'anime au Sénat. Desserrer le corset réglementaire - dont nous sommes tous responsables - est sans doute moins spectaculaire que d'écrire une nouvelle loi, moins valorisant politiquement mais c'est urgent. J'appelle à un choc de simplification massif, cohérent, mobilisateur, pour redonner confiance : aucune surtransposition de directive, diagnostic du stock, abrogation d'une norme antérieure à chaque nouvelle norme, expérimentation systématique avant généralisation...
Ce choc doit être cohérent : les décrets ne doivent pas être contraires à la volonté du législateur ! Nous avions prévu, dans la loi de transition énergétique, que les cultures intermédiaires puissent être versées aux méthaniseurs. Or on prépare un décret qui prive de l'incitation fiscale le biogaz produit avec plus de 15 % de cultures intermédiaires. Le même ministère en l'espace d'un an prend une décision et fait son contraire !
De nouvelles normes vont être imposées, sans compensation, dans les zones prioritaires de biodiversité avec l'article 34 de la loi de reconquête de la biodiversité. Est-cela simplifier ?
Le groupe UDI-UC soutiendra cette proposition de loi en espérant approfondir le contrôle parlementaire sur les normes. (Applaudissements au centre et à droite)
M. Michel Le Scouarnec . - Nous partageons les constats des auteurs de cette proposition de loi, mais celle-ci maintient l'agriculture française dans une logique d'échec à répétition. La compétitivité n'est pas tout, c'est au rouleau compresseur des marchés qu'il faut s'attaquer.
Ainsi, l'article premier ne traite qu'une partie du problème des relations commerciales. Depuis la loi de modernisation de l'agriculture, les prix d'achat dégringolent ! C'est que l'abrogation de tout encadrement des prix laisse les producteurs démunis face aux industriels et à la grande distribution. L'interdiction de la cession des contrats laitiers va dans le bons sens, contre la marchandisation. Mais pendant des décennies, les cinquante premières tonnes étaient payées à un prix garanti par l'État ! Pourquoi ne pas approfondir cette piste du quantum que la France a utilisée pour le blé en 1945 ?
« La France, riche de son agriculture, ne laisse plus dépérir ses agriculteurs », disait François Mitterrand en 1981. Bel objectif !
L'étiquetage est fondamental : chacun sait que les conditions d'élevage ne sont pas les mêmes aux États-Unis et en France.
Hors l'amélioration de l'article 4, il n'y a pas de changement notable par rapport à la première lecture. Les banques ne devraient pas pouvoir refuser le rééchelonnement des prêts. Elles doivent jouer leur rôle d'outils de développement !
Nous nous opposons à la multiplication des allègements de charges, a fortiori sans consultation préalable.
Le 26 février, monsieur le ministre, vous déclariez à la radio qu'entre la grande distribution et les industriels, tout le monde se renvoie la balle, et que c'est le producteur qui paie... Très juste !
Le groupe CRC s'abstiendra, compte tenu des progrès observés. (On s'en félicite à droite)
M. Henri Cabanel . - (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain) En première lecture, j'ai dit combien j'étais choqué par la manoeuvre politicienne du groupe Les Républicains, à la veille des régionales. Nos agriculteurs méritent mieux !
Ce texte aborde la crise agricole sous un angle essentiellement fiscal, alors que la fiscalité sur l'agriculture n'a jamais été aussi faible. (On approuve sur les bancs du groupe socialiste et républicain) Vos propositions, très interventionnistes, vont à l'encontre de votre idéologie libérale et de celle de vos amis européens.
Mme Sophie Primas. - Nous ne sommes pas sectaires !
M. Henri Cabanel. - Ne prétendez pas régler les problèmes, alors que vous n'avez rien fait quand vous étiez au pouvoir. (Approbations sur les bancs du groupe socialiste et républicain ; exclamations à droite)
Enfin, le commissaire Phil Hogan a reconnu que la crise de l'élevage n'était pas franco-française mais touchait toute l'Europe. Il a accepté de remettre en cause temporairement la libre concurrence pour réduire la production. Mais si la France agit seule, ce sera un coup d'épée dans l'eau !
Le calendrier électoral étant désormais plus serein, j'espère que notre discussion le sera aussi. On peut en douter, vu la manière dont vous avez fait échouer la proposition de loi écologiste sur l'ancrage territorial de l'alimentation... Vous avez refusé les 20 % de bio dans la restauration collective. Tot aco per pas gran causa, dirait-on en occitan.
N'avez-vous pas compris que les consommateurs évoluent, que notre agriculture est d'abord familiale, qu'elle doit s'engager dans la montée en gamme, les circuits courts, les énergies renouvelables et l'agrotourisme ? Merci au président de la République et au ministre pour leur fermeté dans les discussions européennes. (On ironise à droite ; applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)
La loi Le Foll a mis l'accent sur l'agro-écologie, a enfin abordé la question de l'assurance contre les risques climatiques et économiques. Il est crucial d'agir au niveau européen : c'est dès maintenant qu'il faut préparer la PAC d'après 2020.
Si la crise de l'élevage appelle des mesures d'urgence, nos agriculteurs ne s'en sortiront que par des réponses structurelles. Le ministre cite souvent en exemple la restructuration de vignobles languedociens : arrachages, plantation de cépages plus adaptés au goût des consommateurs... Pas de miroirs aux alouettes : la route sera longue. Que les agriculteurs sachent que nous les y accompagneront.
Le groupe socialiste et républicain s'abstiendra. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)
M. Jean-Claude Lenoir . - (Applaudissements au centre et à droite) Voici un sujet qui doit nous rassembler. Face à la crise, cette proposition de loi repose sur trois piliers : rétablir des rotations commerciales équitables, soutenir l'investissement, alléger les charges et les normes. L'Assemblée nationale a voté une question préalable : « Circulez, il n'y a rien à voir ». Les propos agressifs de M. Cabanel, dont les plus durs étaient en occitan, sont en décalage avec ceux du ministre, qui a reconnu à l'Assemblée nationale que nous n'aurions pas de divergences, sinon sur le financement. L'article 40 nous contraint, que le Gouvernement lève donc les gages ! Ne nous appelle-t-on pas au rassemblement ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne. - Unité nationale !
M. Jean-Claude Lenoir. - Nous ne sommes pas là pour faire de la politique politicienne...
M. Jean-Baptiste Lemoyne. - Si peu...
M. Jean-Claude Lenoir. - ...mais pour faire des propositions. Certaines ont été reprises par le Gouvernement, sur la DPA, la notion d'aléa, l'extension du suramortissement, la référence au prix payé au producteur dans les contrats entre industriels et distributeurs, l'incessibilité des contrats laitiers... Nous avons un devoir d'acteur, la question des droits d'auteur est secondaire pour la détresse du monde agricole. (Applaudissements au centre et à droite)
M. Philippe Paul . - Dans mon département aussi, l'agriculture est une composante majeure de la vie économique, et les agriculteurs sont dans la détresse, financière et morale ! Chute des prix, surrèglementation qui traduit la méfiance à leur encontre... Ils ne veulent pas être maintenus sous perfusion, ni être montrés du doigt, mais vivre de leur métier, dans un climat de confiance et dans un cadre stable.
Je suis de ceux qui ont accompagné le président Larcher dans le Finistère, à la rencontre du monde agricole.
Ce texte va dans le bon sens, le rejeter d'un revers de main est un signe de mépris à l'égard des agriculteurs - comme des élus, nombreux, qui nous écoutent et qui attendent de nous de les aider à maintenir l'agriculture vivante.
Quand une personne a travaillé plus de dix heures par jour toute sa vie, peut-on la laisser cesser son activité sans accompagnement ?
Il y a trop de souffrances, de drames économiques et humains, et même de suicides. Une indemnité de départ serait bienvenue.
Il est temps d'ouvrir de nouvelles perspectives d'avenir, de permettre à nos agriculteurs de rebondir, de considérer l'agriculture et l'industrie agroalimentaire comme des secteurs stratégiques pour notre pays. Je vous invite donc à adopter ce texte à l'unanimité ! (Applaudissements au centre et à droite)
M. Jean-Jacques Lasserre . - Je salue à nouveau ce texte : cette initiative est bonne, nécessaire. Le temps presse ; voilà des années que l'on parle de la détresse des agriculteurs. Ne nous dispersons pas : c'est la recherche de prix rémunérateurs et de la baisse des coûts de production qui doit nous animer.
La tonne de lait valait 270 euros en 2009, 364 euros en 2014, 311 euros en 2015, elle devrait valoir entre 280 et 290 euros en 2016... Rendez-vous compte !
L'obligation de l'étiquetage de l'origine des viandes est une très bonne chose. Il faut aller plus loin au niveau européen. Les mesures de soutien à l'investissement ici prévues vont également dans le bon sens.
Enfin, la compétitivité passe par la baisse des charges. Une harmonisation européenne est indispensable.
Bref, cette proposition de loi est un bon début de réponse à la crise agricole. Nous examinerons bientôt une proposition de résolution du groupe socialiste et républicain sur la gestion des risques agricoles, que nous aborderons positivement.
Le groupe UDI-UC proposera pour sa part une loi sur les aléas climatiques, car notre dispositif est trop incomplet et nous avons les moyens de faire mieux.
Construisons ensemble des outils de régulation de la production. Le Sénat est le lieu où peut se préparer une grande politique agricole.
Je souhaite un débat constructif ! (Applaudissements au centre et à droite)
M. Alain Duran . - À l'automne dernier, la majorité sénatoriale a entendu résoudre la crise agricole entre les deux tours des élections régionales, en se contentant de baisser les charges sociales. (Protestations à droite) Il faut plutôt jouer sur la qualité, tirer parti de notre diversité : c'est tout l'enjeu de la loi d'avenir.
M. Jean Bizet. - On voit le résultat !
M. Alain Duran. - Le plan d'urgence du Gouvernement pour l'élevage a trouvé son prolongement européen. Continuons à défendre une agriculture de qualité maîtrisant sa production, les pouvoirs publics n'ont pas la faculté de fixer les prix !
Le président Lenoir fait sa liste de courses et nous laisse le ticket de caisse. (M. Jean-Claude Lenoir, président de la commission, s'exclame, ainsi que plusieurs membres du groupe Les Républicains)... Facile de hurler contre le matraquage fiscal ! Nous pouvons cependant nous retrouver sur certains points.
Les progrès récemment obtenus par le ministre montrent que les procès en inaction sont fallacieux. Mais il n'y a pas de solution miracle. Dans l'Ariège, l'agriculture est surtout familiale. Elle a ses problèmes : isolement, prédateurs... Mais elle convertit ses faiblesses en force en privilégiant les circuits courts. Cessons de nous accrocher au modèle de l'après-guerre !
La majorité sénatoriale aveugle à la diversité de nos agriculteurs, refuse certains des moyens de renforcer la compétitivité de notre agriculture. C'est dommage. (Applaudissements et bravos sur les bancs du groupe socialiste et républicain)
M. Alain Marc . - Cette proposition de loi concrète est pragmatique et l'avenir de nos agriculteurs méritait mieux que l'opposition politicienne de l'Assemblée nationale.
L'agriculture subit la concurrence croissante des pays émergents, et de nos voisins européens. Qu'attend le Gouvernement pour prendre des mesures structurelles, afin de renforcer notre compétitivité ? Aucune des propositions que je formulais naguère avec Germinal Peiro n'a trouvé grâce à ses yeux...
Nous continuons à surtransposer le droit européen (M. le ministre le conteste), par exemple sur les Installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE). Une simplification des normes est indispensable. Hélas, la majorité présidentielle refuse de cheminer avec nous.
Comme l'on dit chez nous, cher Henri Cabanel, « il y a ceux qui parlent, et il y a ceux qui font » ! (Applaudissements au centre et à droite)
M. Stéphane Le Foll, ministre . - Propos équilibrés, comme toujours... (Exclamations à droite) Vous parlez d'obstruction politicienne. Rappelez-vous que la proposition de loi sur l'ancrage territorial de l'alimentation a été adoptée à l'unanimité par l'Assemblée nationale, et que vous n'en avez pas voulu ! (Protestations à droite) Vous vous drapez en prétendant ne vouloir parler que du fond, mais voyez comment, sur la loi de protection de la nation, votre majorité est passée d'une volonté d'atteindre les trois cinquièmes à l'Assemblée nationale, à une opposition au Sénat : assumez donc vos postures ! (Même mouvement)
Votre proposition de loi aurait déterminé tous nos choix ? C'est l'ancienne majorité qui avait fixé les seuils des ICPE, c'est nous qui les avons modifiés, dès 2013 !
M. Didier Guillaume. - C'est vrai !
M. Stéphane Le Foll, ministre. - Nous aurions surtransposé ? Au contraire, j'ai simplifié ! En Allemagne, le coût d'un dossier ICPE est quatre fois plus élevé qu'en France ! Aux Pays-Bas, on crée des quotas sur les potasses et les phosphates, voilà une surtransposition !
Citez-moi une norme à supprimer pour renforcer la compétitivité de notre agriculture, une seule : je suis preneur ! Vous n'en trouverez pas. Réglez la question au sein du groupe UDI, monsieur Lasserre ! Tout en respectant l'environnement, on peut alléger les normes en faisant le choix de l'agroécologie. C'est facile d'appeler à supprimer des normes, encore faut-il prendre en compte les conséquences !
Qui a fait retirer la Bretagne de la liste des zones d'excédent structurel en azote ? C'est moi, grâce aux choix faits dans la loi d'avenir.
Les cotisations sociales ? Elles sont abaissées de deux milliards d'euros, c'est ce Gouvernement qui l'a décidé. Un peu d'honnêteté intellectuelle ! Je suis ouvert au consensus, mais assez de faux procès et de discours politiciens ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)
La discussion générale est close.
Discussion des articles
ARTICLE PREMIER
M. Gérard Bailly . - Je ne nie pas vos efforts, monsieur le ministre. Mais la situation reste grave dans nos campagnes. C'est la raison de la proposition de loi.
Comment se fait-il que les accords entre grandes et moyennes surfaces (GMS) soient tolérés, et que l'on condamne ceux entre producteurs ? Les deux milliards dont vous avez parlé sont allés dans les poches des consommateurs et non des producteurs.
En Allemagne, des travailleurs venus d'ailleurs, payés à vil prix, travaillent dans des conditions qui n'ont rien à voir avec celles que l'on observe ici.
Assez de voeux pieux. Votons cette proposition de loi pour redonner espoir. (Applaudissements au centre et à droite)
Mme Élisabeth Lamure . - La loi de modernisation de l'économie (LME), dont j'étais rapporteure, en 2008, a mis fin aux marges arrières, mais elle n'a guère été appliquée. Il faut l'adapter, les Français soutiennent nos agriculteurs, ils veulent manger mieux, voire français. Cet article vise une juste rémunération, pas une prise en charge des coûts dans la formation des prix : les pratiques actuelles sont irresponsables. Le président de la République a annoncé vouloir réformer la LME, cela prendra du temps, cet article y procède sans attendre. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)
M. Jean Bizet . - Je me réjouis de cet article, qui, avec l'amendement n°7, tient l'équilibre entre les articles 34 et 42 de la PAC sur le prix d'achat des produits agricoles, tant le partage de la valeur ajoutée en trois tiers a fait glisser cette dernière au seul profit du distributeur. Il faut se saisir du fonctionnement des instances nationales. Notre commission des affaires européennes a rappelé la distinction entre la notion de marché pertinent et la réindustrialisation du territoire européen : cela vaut aussi pour l'agriculture, j'espère que son avis politique sera entendu. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)
M. Michel Raison . - Je n'ai pas d'autre conseil à donner au ministre, que le calme et la sérénité dans la réforme. Cet article est très positif pour la contractualisation, au moment où les contrats paraissent de plus en plus unilatéraux : le prix de revient en était absent, c'est une bonne chose que les acheteurs doivent tenir compte de la production ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)
M. Didier Guillaume . - La crise agricole est profonde, ancienne, nous le savons, structurelle. L'élevage de nos exploitations familiales traditionnelles n'est plus adapté à la concurrence internationale : il faut le faire évoluer, sans pour autant adopter des schémas appliqués dans un contexte très différent.
Qu'est ce qui nous sépare ? Le droit européen : certains articles ne sont pas conformes ; la « surtransposition », ensuite : quels sujets, depuis 2012 ? Sur la LME, je suis pour une révision de fond, vous n'y touchez pas. Sur les quotas laitiers, enfin, leur suppression c'est la mort des éleveurs. Enfin, nous soutenons l'effort du ministre, quand vous faites de l'opposition systématique.
Bref, notre groupe est constructif, au service de l'agriculture, que nous défendons tous !
(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)
Mme la présidente. - Amendement n°7, présenté par M. Gremillet, au nom de la commission.
Compléter cet article par les mots :
, ces indicateurs et indices pouvant être régionaux, nationaux et européens,
M. Daniel Gremillet, rapporteur. - Nous précisons les indicateurs pour mieux prendre en compte les réalités du terrain.
M. Stéphane Le Foll, ministre. - Sagesse.
L'amendement n°7 est adopté.
L'article premier, modifié, est adopté.
ARTICLE PREMIER BIS
M. Jean Bizet . - La non-cessibilité des contrats laitiers doit connaître des exceptions très encadrées par les organisations professionnelles. Cependant, nous ne ferons pas l'économie d'une restructuration de notre filière laitière, utilisée trop longtemps comme un outil d'aménagement du territoire.
L'accord européen du 14 mars sur la limitation volontaire de la production ne modérera pas la production et comme en 2009, la France sera la meilleure élève tandis que d'autres augmenteront leur production. Il faut restructurer ou bien nous perdrons nos positions !
(« Très bien ! » et applaudissements à droite)
Mme la présidente. - Amendement n°8, présenté par M. Gremillet, au nom de la commission.
Alinéa 6
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Il peut autoriser les cessions de contrats de vente conclus entre producteurs et acheteurs entre membres d'une même organisation de producteurs ou association d'organisations de producteurs reconnue en application du titre V du livre V du présent code.
M. Daniel Gremillet, rapporteur. - Les quotas laitiers sont supprimés depuis un an, cette proposition de loi innove avec l'incessibilité des contrats laitiers à titre onéreux. Il faut se rassembler, monsieur le ministre, il en va de la vie de nos territoires : nous proposons de la souplesse, à l'intérieur de l'organisation de producteurs.
M. Jean Bizet. - Très bien !
M. Stéphane Le Foll, ministre. - D'accord sur le fond, nous le ferons dans la loi Sapin. Seule divergence, il nous faut la loi, pas le décret.
Des agriculteurs, monsieur le sénateur, sont remontés contre la suppression de la cession à titre onéreux, qu'ils ont organisée eux-mêmes au sein des organisations de producteurs.
Le vrai problème, c'est la surproduction, et la solution ne peut être qu'européenne. 52 000 tonnes de poudre de lait déjà stockées depuis le début de l'année contre 40 000 tonnes l'an passé ; il y a surproduction. Les « montagnes » de stocks se profilent à nouveau à l'horizon. Nous devons avancer avec l'Allemagne.
M. Jean Bizet. - Je suis en phase !
M. Didier Guillaume. - La commission peut-elle rectifier son amendement dans le sens de ce que dit le ministre, pour lever le caractère réglementaire et nous permettre de voter cet article ?
M. Jean-Claude Lenoir, président de la commission des affaires économiques. - Certes, mais il faut encore que l'Assemblée nationale examine ce texte... Monsieur le ministre, nous avons rencontré les mêmes interlocuteurs que vous, c'est bien la raison de cet article : une cession onéreuse, dans l'organisation de producteurs.
L'amendement n°8 est adopté.
L'article premier bis, modifié, est adopté.
Les articles 2, 2 bis et 2 ter sont adoptés.
ARTICLE 3
M. Claude Kern . - Le droit communautaire prohibe tout étiquetage de produits alimentaires qui n'aurait pu être décidé à l'échelon communautaire ; mais depuis le 14 mars dernier, vous avez obtenu d'ouvrir une brèche pour les produits carnés et laitiers, merci monsieur le ministre.
L'étiquetage est d'autant plus nécessaire que les négociations commerciales transatlantiques risquent d'ouvrir sur des importations de viandes de mauvaise qualité, décalées avec les attentes des consommateurs. Ainsi, 95 % des bovins américains sont produits dans des fermes-usines, alors qu'en Europe, nous traçons les élevages.
Les professionnels sont mobilisés ; monsieur le ministre, il faut mettre en place un dispositif permettant l'information du consommateur sur l'origine de ce qu'il consomme !
M. Georges Labazée . - Sans revenir au scandale des lasagnes de cheval, où j'espère que justice sera faite, je dois alerter nos collègues : l'étiquetage, ce n'est pas une norme de plus ! Je crois aussi que nous devons évoquer le Tafta, où la France a une position minoritaire en Europe, alors que bien des pays cèdent aux sirènes du libéralisme anglo-saxon. Il faudra prendre nos responsabilités.
M. Henri Cabanel . - Ce n'est pas le chien qui aboie le plus fort qui est le plus méchant, monsieur Lenoir, et nous travaillons tous au service de notre agriculture. Fort de la victoire de M. le ministre le 14 mars, nous voterons cet article.
Mme la présidente. - Amendement n°2 rectifié, présenté par M. Labbé et les membres du groupe écologiste.
Alinéa 2
Après la deuxième occurrence du mot :
origine
insérer les mots :
, des modes de culture et d'élevage
M. Joël Labbé. - Nous saluons également la victoire du 14 mars, même si elle n'est... qu'expérimentale.
Les consommateurs demandent à être informés, surtout quand des bêtes sont nourries aux OGM importés des États-Unis, avec des effets cumulatifs, y compris cancérigènes.
Les amendements nos2 rectifié, 4 et 3 visent une information complète des consommateurs.
Mme la présidente. - Amendement n°4, présenté par M. Labbé et les membres du groupe écologiste.
Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
« Art. L. 112-... - L'indication du mode d'élevage est rendue obligatoire pour l'ensemble des produits carnés et laitiers destinés à la consommation humaine, à l'état brut ou transformé, sur le modèle de celui existant pour les oeufs, selon les termes 0 = biologique, 1 = en plein air, 2 = extensif en bâtiment, 3 = système intensif.
« La liste des produits concernés, les caractéristiques de l'étiquetage et les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'État. »
M. Joël Labbé. - Il est défendu.
Mme la présidente. - Amendement n°3, présenté par M. Labbé et les membres du groupe écologiste.
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« L'étiquetage des denrées alimentaires issues d'animaux nourris avec des aliments génétiquement modifiés est obligatoire. »
M. Joël Labbé. - Il est défendu.
M. Daniel Gremillet, rapporteur. - Attention à ne pas fragiliser l'accord que le ministre a obtenu le 14 mars, l'étiquetage est expérimental, surtout qu'il n'y a pas de base claire à l'étiquetage...
M. Jean Bizet. - Exactement.
M. Daniel Gremillet, rapporteur. - Il y a aussi des démarches qualité, comme les AOC et les labels.
Retrait, sinon rejet des amendements nos2 rectifié et 4.
Quant à l'amendement n°3, il n'y a aucune preuve scientifique que les animaux nourris avec des OGM nuiraient à la santé de ceux qui les consomment. De plus, des certifications non-OGM vous donnent satisfaction : avis défavorable.
M. Stéphane Le Foll, ministre. - L'expérimentation a permis de déroger à la directive que la Commission européenne ne voulait pas changer car elle anticipait une augmentation des prix en cas de traçabilité obligatoire. Nous devons prouver que les coûts ne vont pas augmenter, c'est l'enjeu de l'expérimentation - six ou sept pays se sont engagés dans la brèche, dont le Royaume-Uni. Retrait.
M. Joël Labbé. - Le glyphosate va être interdit. Il est temps de s'y préparer et de travailler à la production de nos propres protéines. Je maintiens.
Mme Françoise Gatel. - Je salue la victoire du ministre, mais le Règlement européen de 2006 brime des associations qui, comme « Bleu, blanc, coeur » ont une démarche nutritionnelle tout à fait intéressante.
M. Stéphane Le Foll, ministre. - Les démarches qualité actuelles vont se maintenir. L'expérimentation ne porte que sur l'origine des produits et sa traçabilité.
L'amendement n°2 rectifié est retiré, ainsi que l'amendement n°4.
L'amendement n°3 n'est pas adopté.
L'article 3 est adopté.
ARTICLE 4
Mme la présidente. - Amendement n°9, présenté par M. Gremillet, au nom de la commission.
Alinéa 2
Rédiger ainsi cet alinéa :
Tout exploitant agricole qui sollicite un emprunt destiné au financement d'investissement auprès d'un établissement de crédit est informé lors de la proposition de financement des garanties possibles apportées par les dispositifs de caution mutuelle.
M. Daniel Gremillet, rapporteur. - Nous protégeons le patrimoine personnel des agriculteurs.
L'amendement n°9, accepté par le Gouvernement, est adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°10, présenté par M. Gremillet, au nom de la commission.
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - Après le deuxième alinéa du III de l'article L. 622-17 du code de commerce et après le deuxième alinéa du III de l'article L. 641-13 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« 1° bis Les sommes dues en application de contrats d'intégration visés à l'article L. 326-1 du code rural et de la pêche maritime ; ».
M. Daniel Gremillet, rapporteur. - Nous protégeons ici aussi les producteurs « intégrés » en cas de défaillance d'une entreprise.
M. Stéphane Le Foll, ministre. - Cet amendement nous a été transmis ce matin. Il est complexe et sensible, avec des impacts en chaîne - et l'opposition de Bercy : retrait.
M. Daniel Gremillet, rapporteur. - Je comprends, mais nous l'avons travaillé et respectons le Trésor public : il s'agit juste de protéger des agriculteurs. Votons, pour avancer dans la navette, si l'Assemblée nationale veut bien y travailler...
M. Bruno Sido. - Pourquoi l'État, puis la sécurité sociale, puis les salariés seraient-ils prioritaires et pas les producteurs ? Il faudrait que tous les créanciers soient mis à égalité.
L'amendement n°10 est adopté.
L'article 4, modifié, est adopté.
L'article 5 est adopté.
L'article 5 bis est adopté.
ARTICLE 6
M. Michel Raison . - Il faut tenir compte des fluctuations de prix quelles que soient les productions. La vente directe rapporte potentiellement 10 % de la production nationale, le reste est exporté. Elle ne sauvera pas les agriculteurs ! Les agriculteurs ont besoin d'une trésorerie pour se développer ; le compte d'affectation créé par cet article va dans le bon sens. Il faudra aussi adapter notre fiscalité. Rapporteur de la LMA je n'étais pas parvenu à convaincre le ministre d'aller plus loin, mais j'espère avancer !
L'article 6 est adopté.
ARTICLE 6 BIS
Mme la présidente. - Amendement n°1 rectifié, présenté par MM. Collin, Amiel, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Collombat, Esnol, Fortassin, Guérini et Hue, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et MM. Mézard, Requier et Vall.
Rédiger ainsi cet article :
I. - À compter de l'application de la présente loi, l'assurance récolte, mentionnée par le décret n° 2013-1276 du 27 décembre 2013 fixant pour l'année 2013 les modalités d'application de l'article L. 361-4 du code rural et de la pêche maritime en vue de favoriser le développement de l'assurance contre certains risques agricoles est obligatoire et étendue à l'ensemble des productions agricoles dans des conditions fixées par décret.
II. - La perte de recettes résultant pour l'État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
M. Jean-Claude Requier. - L'assurance contre les aléas climatiques en agriculture, aujourd'hui facultative, est utile à tous les agriculteurs, nous en étendons, en conséquence, le champ d'application.
M. Daniel Gremillet, rapporteur. - C'est intéressant, nous avons avancé depuis la première lecture, les professionnels saluent les progrès. Cependant, cette généralisation me paraît relever d'un appel : retrait.
M. Stéphane Le Foll, ministre. - Étendre l'obligation à tous, c'est surtransposer ! Cela ne vaudrait qu'avec un financement public européen venu du premier pilier.
M. Bruno Sido. - Oui, ce serait une norme de plus. On nous oblige à tout, c'est insupportable. En revanche, les assureurs devraient tous proposer une assurance climatique... Je ne voterai pas cet amendement.
M. Didier Guillaume. - Le problème existe bien mais les bons sentiments ne suffisent pas. Inscrire cette obligation dans la loi serait une grossière erreur, au moment où on veut alléger les contrats. Je vis au milieu des arbres fruitiers, je sais ce qu'il en est des aléas climatiques, mais aussi des assurances : payer des années pour rien et si d'aventure on bénéficie une fois d'une indemnisation, le montant de la cotisation est multiplié l'année suivante.
En revanche, nous soutiendrons toute démarche à l'échelon européen, qui passerait d'une bascule du deuxième pilier vers le premier.
M. Jean-Claude Requier. - Une réflexion est engagée, je retire.
L'amendement n°1 rectifié est retiré.
L'article 6 bis est adopté.
L'article 6 ter est adopté.
L'article 7 demeure supprimé.
L'article 8 est adopté.
ARTICLE 8 BIS A
Mme la présidente. - Amendement n°5 rectifié ter, présenté par MM. Chasseing, Chatillon et Luche, Mme Morhet-Richaud, MM. Cardoux, D. Laurent, Laufoaulu, Longeot et Calvet, Mmes Cayeux, Lopez, Troendlé et N. Goulet, MM. Détraigne, Danesi, Bouchet et Grand, Mme Loisier, MM. Raison et Perrin, Mme Férat, MM. B. Fournier, Kennel, Nougein, César et de Legge, Mme Deseyne, M. de Raincourt, Mmes Imbert et Lamure, M. Kern, Mme Gruny, MM. Canevet, Savin, Vasselle, Chaize et G. Bailly, Mmes Duchêne et Canayer, MM. Pinton et Savary, Mme Deromedi, MM. Mayet et Laménie, Mmes Gatel et Deroche, M. Mouiller, Mme Joissains, MM. Bonhomme, Vial, Morisset et Pointereau, Mme Hummel et MM. Cornu, Vaspart et Joyandet.
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Toute norme émanant d'une directive européenne qui concerne le monde agricole est transposée à l'identique sans surtransposition.
M. Daniel Chasseing. - L'agriculture française croule sous une masse de normes administratives et sanitaires. Lors des transpositions des directives européennes, nous en rajoutons toujours une couche, avec un coût supplémentaire pour nos agriculteurs, qui perdent en compétitivité.
Des normes à supprimer ? J'en vois un bon nombre : le stockage du foin en zone de montagne, le nombre de mètres carrés par vache, les conditions de drainage sous l'empire de la loi sur l'eau, l'obligation d'un bétonnage à la sortie des parcelles destinées aux palmipèdes, bientôt les diagnostics énergétiques pour les bâtiments agricoles...
M. Daniel Gremillet, rapporteur. - Intéressant mais difficile à appliquer à la lettre, puisque par nature la transposition apporte des normes... Sagesse.
M. Stéphane Le Foll, ministre. - La transposition d'une directive est obligatoire : c'est au Parlement de « sur » transposer, ou pas mais on ne peut dire que la transposition est obligatoirement à l'identique, c'est contre toute subsidiarité.
Mme Patricia Morhet-Richaud. - Cet amendement est conforme à l'objectif de simplification. En effet, nos agriculteurs croulent sous les normes, loin d'être toujours utiles, les exemples abondent, du compte pénibilité aux zonages liés à la directive Nitrates.
M. Bruno Sido. - Certes, il faut transposer et la subsidiarité est une bonne chose. Mais je serais intéressé par une étude comparative sur la transposition. Les pays anglo-saxons sont très habiles et surtransposent beaucoup moins que nous. En outre, ils évaluent les mesures d'application, là où en France on a des inspecteurs, revolver à la ceinture, qui verbalisent nos agriculteurs. De grâce, n'en rajoutons pas ! Je voterai cet amendement.
M. Alain Vasselle. - J'ai cosigné cet amendement. M. Sido en a parfaitement présenté l'esprit.
Si la commission des affaires économiques en approuve le principe, je l'invite à en améliorer la rédaction pour que son avis de sagesse devienne favorable. En France, le Gouvernement éprouve toujours le besoin de surtransposer, d'empiler des normes environnementales, sans regarder ce qu'elles coûtent. Cessons d'en rajouter !
M. Michel Raison. - Ce qui est en cause, c'est notre culture de la complexité. Il est temps d'arrêter.
Avec la loi sur la biodiversité, on n'a plus le droit de couper un arbre ! Lors d'un précédent texte, j'avais déposé un amendement pour supprimer un article ajouté par le Gouvernement à un texte de transposition. J'ai été battu...
M. Daniel Raoul. - Cet amendement est-il même recevable ? Il dessaisit le Parlement de toute marge de manoeuvre. Il marque un refus du débat, bien surprenant. Toute directive contient une place pour la subsidiarité. Que signifie exactement cette notion de surtransposition ? Je ne comprends pas...
M. Didier Guillaume. - Chacun est conscient du poids des normes. Mais toutes les normes ne sont pas inutiles. Certaines sont protectrices... Soyons prudents. Ne dessaisissons pas le Parlement de son pouvoir. J'ajoute que les mêmes qui déplorent le poids des normes viennent de voter comme un seul homme une obligation nouvelle d'assurance !
M. Daniel Chasseing. - Je n'ai pas dit que toutes les normes étaient inutiles. Je voulais prévenir l'adoption de normes inutiles. Surtransposer, c'est adopter des normes qui n'apportent rien aux agriculteurs ni à l'environnement, et qui pénalisent notre compétitivité en rendant plus compliquée encore la vie de nos agriculteurs : je maintiens.
M. Daniel Gremillet, rapporteur. - Les organisations agricoles soutiennent la position de la commission en matière d'assurance, car nous devons dès maintenant préparer la réforme de la PAC.
Un jeune agriculteur qui profite de la dotation jeune agriculteur doit verser la TVA. Ces jeunes agriculteurs doivent déjà assurer leurs tracteurs, leurs bâtiments. Il serait paradoxal qu'ils ne protègent pas leur récolte contre les aléas climatiques : car plus grand est leur investissement, plus grand est le risque en cas de calamité !
L'amendement n°5 rectifié ter est adopté.
L'article 8 bis A, modifié, est adopté.
L'article 8 bis est adopté, ainsi que les articles 9, 9 bis, 10, 11, 11 bis, 12 et 13.
Interventions sur l'ensemble
M. Daniel Chasseing . - Cette proposition de loi est importante pour l'avenir de l'élevage français. Les prix de vente sont devenus inférieurs aux prix de revient. L'Europe n'est pas la seule responsable : il faut aussi prendre en compte le poids des charges sociales qui alourdit le coût du travail : 12 euros l'heure en Espagne, 15 euros en Allemagne, 22 euros en France ! Vous nous dites que nous faisons la liste des courses en vous laissant le ticket de caisse, mais toutes les mesures que nous préconisons sont indispensables, par exemple en matière de TVA. En vingt-cinq ans, la France a perdu la moitié de ses exploitations. Avec chaque ferme qui disparaît, on perd sept emplois.
M. Alain Vasselle . - Je voterai cette proposition de loi. Toutefois, elle vise avant tout l'élevage. Toutes les filières sont pourtant en difficulté, y compris les céréales, les fruits et légumes. Et je reste dubitatif sur l'obligation de souscrire une assurance récolte. Celle-ci ne fonctionne que si l'agriculteur a perdu 80 % de sa production ! Voilà un coût supplémentaire pour les exploitants.
M. Michel Canevet . - Le groupe UDI-UC votera ce texte. Il est satisfait des avancées en matière d'étiquetage. Il faudra aller plus loin pour faire face à la concurrence internationale. Pour cela il faudra continuer à réduire les charges sociales.
Le Tafta risque d'avoir des conséquences dramatiques pour notre agriculture. Pourquoi ne pas prévoir une exception pour ce secteur ? Il n'est pas question de contraindre les consommateurs à acheter de la viande produite dans les conditions que l'on sait en Amérique.
M. Daniel Dubois . - S'il est difficile d'obtenir un permis de construire à cause d'études d'impact très strictes et du recours d'écologistes locaux, comment fera-t-on pour moderniser les bâtiments d'élevage quand cela devra se faire partout ?
Notre groupe votera ce texte.
M. Jean-Claude Lenoir, président de la commission . - J'espère que la raison l'emportera sur ce texte et que l'Assemblée nationale n'adoptera pas, une nouvelle fois, une motion de procédure. Les débats ont été fermes mais courtois, malgré quelques poussées de fièvre inattendues. Notre rapporteur a fait un travail remarquable. Ses nombreuses auditions en témoignent. Merci à tous les membres de la commission des affaires économiques, et tout particulièrement à Jean Bizet, pour sa contribution importante.
Monsieur le ministre, je prends acte de votre action. Je ne l'ai jamais niée.
M. Didier Guillaume. - Si !
M. Jean-Claude Lenoir, président de la commission. - J'espère, donc, que nous aurons une bonne surprise dans les semaines à venir ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)
La proposition de loi est adoptée.
La séance est suspendue à 20 heures.
présidence de Mme Françoise Cartron, vice-présidente
La séance reprend à 21 h 30.