Lutte contre le gaspillage alimentaire (Suite)
M. le président. - L'ordre du jour appelle la suite de l'examen de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, relative à la lutte contre le gaspillage alimentaire (demande du groupe socialiste et républicain). Nous avions commencé l'examen de cette proposition de loi lors de la séance du 13 janvier dernier.
Discussion générale (Suite)
Mme Évelyne Didier . - Cette proposition de loi porte sur le gaspillage alimentaire, défini par le pacte national contre le gaspillage alimentaire qui définit comme gaspillée toute nourriture jetée, perdue ou dégradée. Nous avons débattu de l'obligation des dons alimentaires, dans la loi « Macron », nous avons aménagé le don alimentaire en loi de finances - il s'agit ici d'aller plus loin.
Chaque Français jette en moyenne vingt à trente kilos d'aliments chaque année, dont sept kilos encore emballés : l'équivalent de 12 à 20 milliards d'euros sont ainsi jetés. À l'échelle mondiale, on estime que près d'un tiers de la production alimentaire serait jetée, le gaspillage est le troisième émetteur de gaz à effet de serre, alors même que la malnutrition se développe. En France même, 3,5 millions de personnes bénéficient de l'aide alimentaire ; beaucoup plus souffrent de la faim quand 8,5 millions de personnes vivent sous le seuil de pauvreté.
Des associations caritatives, dont je salue l'action, ont mis en place depuis longtemps des circuits de distribution alimentaire. Ils reposent sur les dons volontaires de particuliers, mais également sur des accords avec des distributeurs ou des producteurs.
Il faut les aider, dans le cadre du fonds européen d'aide, ou dans le cadre national.
Cette proposition de loi inscrit, dès l'article premier, le principe d'une convention entre les grandes surfaces et des associations agréées pour éviter le gaspillage. Un crédit d'impôt de 60 % est prévu, dans la limite de 0,5 % du chiffre d'affaires hors taxe, avec la possibilité d'un report sur cinq exercices.
Le transport et le stockage sont également concernés par la défiscalisation. Or, ce système repose sur une approche quantitative. Il importe d'établir un bilan de la qualité des dons, et d'en assurer un suivi régulier, car manque un outil de mesure fiable. Sera-ce la fonction de l'Ademe ?
Les articles premier et 2 permettent le don de produits sous marques de distributeurs et proscrivent la javellisation, sous peine complémentaire d'affichage, plus dissuasive que des sanctions financières limitées : c'est bienvenu. De même nous saluons la sensibilisation à l'école, mais il faut aller plus loin : l'essentiel est de valoriser les productions agricoles et de garantir des prix rémunérateurs aux producteurs, que continuent à réclamer, à juste titre, les agriculteurs.
Cette proposition n'aborde cependant pas la question du glanage. Le rapport Garrot proposait qu'une circulaire pénale recommande la clémence pour des actions illégales liées à la récupération d'aliments qui n'ont pas entraîné de préjudice pour les distributeurs. Le Gouvernement entend-il aller dans cette voie ? Nous voterons ce texte. (Applaudissements à gauche)
Mme Nicole Bonnefoy . - Reprenant plusieurs dispositions de la loi de transition énergétique adoptées à l'unanimité, cette proposition de loi s'inscrit dans le même consensus politique que celui exprimé à l'Assemblée nationale.
Elle est cohérente avec la résolution du 9 juillet 2015 du Parlement européen qui demandait à la Commission des mesures pour diminuer de 30 % le gaspillage alimentaire d'ici à 2025 et encourager des conventions nationales.
Le gaspillage est un scandale éthique, économique et écologique : un tiers de la production mondiale est jeté. Chaque année, en France, cette perte représente de 12 à 20 milliards d'euros, soit cent euros par personne.
Cette lutte contre le gaspillage participe d'une lutte plus globale contre le réchauffement climatique, dans le sillage de la COP21. Ce texte sert de base à notre réflexion en vue de redéfinir nos normes de production. Ne soyons pas naïfs. Nous devrons les changer et les normes sociales et éthiques ne constituent pas en elles-mêmes un frein à la production.
Il convient de modifier nos pratiques. La COP21 a marqué un premier pas. Allons plus loin. Je salue le plan ambitieux de lutte contre le gaspillage alimentaire de la ville de Paris. D'autres collectivités territoriales ont fait de même. Encourageons les mesures volontaristes et les circuits courts.
Je me réjouis que cette proposition de loi instaure, à l'article 3, une sensibilisation au gaspillage alimentaire à l'école, conforme à un amendement que j'avais déjà fait adopter au sein du code de l'éducation.
Le groupe socialiste n'a pas déposé d'amendements et votera ce texte sans réserve. (« Très bien ! » et applaudissements à gauche)
M. Joël Labbé . - Je salue les auteurs de cette proposition de loi consensuelle, signée par 300 parlementaires. Un milliard de personnes souffrent de malnutrition sur la planète quand un tiers de la production est gaspillée. Pourtant le droit à l'alimentation est un droit de l'homme, comme le rappelle le rapporteur de l'ONU. Cela signifie que l'alimentation doit être disponible, accessible, en toute circonstance, et propre à la consommation. Cela vaut aussi pour la France.
Le gaspillage en France représente 20 à 30 kg par an et par personne, dont 7 kg de nourriture emballée.
Cette proposition de loi prévoit que les invendus seront donnés ou retransformés. Elle soutient aussi les initiatives de compostage. Il faut associer résolument les opérateurs de restauration scolaire.
La ville de Mouans-Sartoux a ainsi baissé le coût par repas de 2,02 euros à 1,86 euro en un an, c'est un bon résultat qui démontre que l'on peut agir rapidement.
Je n'hésite pas à ajouter, même en cette crise de l'élevage, qu'il nous faut aussi limiter la consommation de produits carnés : moins de quantité, mais de meilleure qualité !
Les projets alimentaires territoriaux sont un outil clef. Aux élus de soutenir les projets locaux. Je le ferai bientôt dans le Morbihan. Je suis fier d'avoir été désigné rapporteur sur la proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale à l'unanimité, sur l'ancrage territorial de l'alimentation, que nous examinerons prochainement.
En attendant, le groupe écologiste votera ce texte. (Applaudissements sur la plupart des bancs)
Mme Annick Billon . - Cette proposition de loi reprend des mesures figurant initialement dans la loi sur la transition énergétique et la loi Macron, qui avaient été censurées dans la première par le Conseil constitutionnel car il s'agissait de cavaliers législatifs, et retirées par l'Assemblée nationale de la seconde.
Deux textes avaient été déposés, l'un déposé par les députés du groupe Les Républicains Frédéric Lefebvre et Jean-Pierre Decool et l'autre par Guillaume Garot pour le groupe socialiste. Cette proposition de loi, adoptée à l'unanimité à l'Assemblée nationale, résulte de la fusion de ces deux textes, adoptée à l'unanimité le 9 décembre 2015 par l'Assemblée nationale, et s'inspire aussi des mesures proposées par notre collègue Nathalie Goulet, introduites à l'origine dans la loi Macron, puis transformées en proposition de loi, déposée le 17 août 2015. Notre collègue Chantal Jouanno devait en être la rapporteure : elle l'est à présent du texte adopté par l'Assemblée nationale.
Ce texte est complet : méthanisation, facilitation des dons, interdiction de la javellisation, sensibilisation à l'école.
Notre groupe proposera des améliorations de l'alinéa 13 de l'article premier pour assurer l'intégrité et la qualité des invendus alimentaires, autrement ils finiront dans le circuit des déchets à la charge du contribuable local. Leur qualité assurera une meilleure distribution et réduira les déchets.
À l'alinéa 15 du même article, les conventions entre distributeurs et associations devront prévoir une clause de reprise par le commerce de détail alimentaire, là aussi pour éviter de faire supporter un coût supplémentaire au contribuable local. Dans le même objectif, nous proposons ensuite d'ajouter un alinéa pour déterminer les modalités de la valorisation ou de l'élimination de tous les dons alimentaires qui n'ont pas été distribués par l'association.
Nous espérons que ces propositions seront entendues. (Applaudissements au centre et à droite)
M. Daniel Gremillet . - Je salue cette initiative parlementaire. Chacun, comme citoyen, est responsable du gaspillage alimentaire.
Nous n'éduquons plus nos enfants et nos petits-enfants à la lutte contre le gaspillage. Trop souvent les aliments finissent à la poubelle. La standardisation des normes de calibrage créent eux-mêmes du gaspillage dès lors que des produits non conformes sont jetés ; ces normes pourtant ne sont plus obligatoires depuis 2009 ; mais des producteurs continuent de les appliquer, et les consommateurs de choisir les fruits et légumes leur correspondant : nous avons bien des progrès à faire.
Au fil des crises, les normes n'ont cessé d'évoluer.
Toutefois, nous avons pris l'habitude de durcir les directives européennes et les normes, pénalisant nos entreprises. Veillons à ce que cette proposition de loi s'inscrive dans une démarche d'harmonisation européenne.
Cette proposition de loi crée des conventions de dons des invendus. Je m'interroge sur l'article 2, qui transfère la responsabilité des produits défectueux du distributeur au producteur. Attention à l'excès de normes, dont la France est friande, au nom du principe de précaution.
À l'heure où notre gastronomie est reconnue, relevons le défi du gaspillage alimentaire, pour redonner à la table française ses lettres de noblesse. (Applaudissements à droite et au centre)
M. Roland Courteau . - Les générations précédentes avaient le plus grand respect pour la nourriture. Aujourd'hui, le gaspillage est choquant, inacceptable alors que des femmes, des enfants et des hommes meurent de faim : le simple civisme et la solidarité commandent de lutter contre le gaspillage alimentaire.
Une action publique était nécessaire, par respect pour les producteurs et ceux qui souffrent de la faim, d'où cette proposition de loi.
Le gaspillage est le troisième émetteur de gaz à effet de serre après la Chine et les États-Unis.
Songez-y : jeter une baguette c'est vider l'équivalent d'une baignoire d'eau !
La lutte contre le gaspillage est à l'ordre du jour ; la lutte contre l'insécurité alimentaire est un enjeu planétaire crucial.
La loi oblige les distributeurs à signer des conventions pour éviter le gaspillage des invendus. Celles-ci doivent être justes, tenir compte des questions logistiques : tri, transport, etc.
Les consommateurs devront être sensibilisés : ils sont le fait de 60 % du gaspillage. Beaucoup de travail reste à faire !
La sensibilisation dès l'école est une bonne chose, tout à fait nécessaire. Le groupe socialiste votera ce texte précieux. (Applaudissements à gauche)
Mme Agnès Canayer . - Selon l'Ademe, le gaspillage alimentaire a été multiplié par deux depuis 1974, pour un coût de 150 euros par an et par personne dans notre pays.
Les collectivités locales, gestionnaires de la restauration scolaire et gérant les acteurs de solidarité, sont en première ligne.
Depuis 2010, dans le cadre de l'agenda 21, l'agglomération du Havre mène des actions de prévention à l'école, et dans les cantines scolaires, où sont servis chaque jour quelque 8 600 repas : confection sur place, installation d'un recycleur, menus variés et composés des aliments en filières courtes et adaptées. Les restes de stocks sont distribués en fin d'année à la Banque alimentaire. Pour les années à venir, 2017-2020, dans le cadre du programme « Territoire zéro déchet », des axes d'effort supplémentaires seront dégagés afin de poursuivre la dynamique.
Nous sensibilisons les familles avec des livrets de recettes, des ateliers de formation pour accommoder des restes par exemple.
Les associations caritatives ont besoin de collecter davantage de denrées. Encore faut-il s'assurer de la qualité des produits. Il ne faut pas que la responsabilité des produits périmés soit transférée aux associations.
Trop souvent les dates de péremption des produits donnés sont trop proches de la date de consommation optimale. Faute d'ailleurs d'une bonne distinction entre ces deux notions, beaucoup de produits finissent à la poubelle. Ce texte est bienvenu. Nous le voterons. (Applaudissements à droite, au centre, ainsi que sur quelques bancs à gauche)
M. André Vallini, secrétaire d'État auprès de la ministre de la décentralisation et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale . - En adoptant ce texte, vous placerez la France en pointe dans la lutte contre le gaspillage alimentaire. Merci à tous pour votre participation et merci à Mme Jouanno. Je salue aussi Guillaume Garot, rapporteur de l'Assemblée nationale, présent en tribunes. J'excuse la ministre de l'écologie retenue par un engagement antérieur. L'Ademe a publié des guides de sensibilisation et aide financièrement 154 territoires « zéro déchet » couvrant 30 millions d'habitants. Je peux aussi vous rassurer sur le fait que des instructions seront données en matière de glanage, contre une répression trop sévère. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain et du groupe écologiste)
La discussion générale est close.
Discussion des articles
ARTICLE PREMIER
M. Joël Guerriau . - Cette loi facilitera la vie des près de dix millions de Français issus de la classe moyenne invisible, des quatre millions de mal-logés, du million de travailleurs précaires gagnant moins de 800 euros par mois. Elle montre l'exemple en Europe. Chaque jour, chaque supermarché jette en moyenne 50 kilos des invendus qui permettraient de nourrir une centaine de personnes. Je voulais rendre hommage à M. Arash Derambarsh, élu de Courbevoie, présent lui aussi dans nos tribunes, et dont la pétition a recueilli 750 000 signatures et a été soutenue par la Croix Rouge ; il a été l'aiguillon de ce texte et mérite notre salut ! (Applaudissements)
Cette proposition de loi rend obligatoire la signature de conventions entre les surfaces commerciales de plus de 400 mètres carrés et les associations caritatives, sous peine d'une amende de 3 700 euros. La javellisation est interdite. Nous devrons suivre avec attention l'application de la loi.
Alors que notre continent compte 80 millions de démunis, je lance un appel solennel au président de la République, ainsi qu'à M. Jean-Claude Juncker, pour que ce texte soit décliné dans toute l'Europe. La fraternité a du sens dans notre pays. C'est un sourire à partager. (Applaudissements au centre et à droite)
M. le président. - Amendement n°3, présenté par Mme Billon et MM. Longeot, Kern et Détraigne.
Alinéa 13
Compléter cet alinéa par les mots :
ou denrées dont l'intégrité n'est plus assurée
Mme Annick Billon. - Cet amendement répond à des enjeux éthiques et économiques : il garantit l'intégrité des produits donnés. (Applaudissements au centre)
Mme Chantal Jouanno, rapporteure de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. - Retrait ? Cette mesure relève des conventions. Une convention-cadre est en cours de négociations entre tous les acteurs. Où en est-on, monsieur le ministre ?
M. André Vallini, secrétaire d'État. - Retrait. En effet, une convention est en cours d'élaboration. Elle vous donne satisfaction. Par exemple, un magasin ne pourra donner des denrées non susceptibles de supporter le transport.
L'amendement n°3 est retiré.
M. le président. - Amendement n°1, présenté par Mme Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Alinéa 15
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Cette convention assure une garantie de reprise par le commerce de détail alimentaire des denrées alimentaires données aux associations et non distribuées.
Mme Évelyne Didier. - Les associations ne veulent pas devenir les centres de tri des distributeurs, pour faire la part entre données consommables et les autres.
C'est pourquoi notre amendement assure une garantie de reprise par le commerce de détail des denrées données.
M. le président. - Amendement identique n°4, présenté par Mme Billon et MM. Détraigne, Longeot et Kern.
Mme Annick Billon. - Amendement identique. J'ai vu une livraison de denrées aux Restos du Coeur : les salariés et les bénévoles devaient porter des masques et des gants pour se protéger car les produits étaient en train de pourrir...
Mme Chantal Jouanno, rapporteure. - Là encore, cette question sera traitée dans les conventions. Chacun partage l'objectif de cet amendement : il ne faut pas que les distributeurs se déchargent de leurs obligations de tri ou de destruction au détriment du contribuable. Les associations ne doivent pas devenir le déversoir des invendus non consommables.
C'est pourquoi il importe que le Gouvernement définisse des indicateurs. Où en est la convention-cadre ? Pourquoi pas une clause de revoyure ?
M. André Vallini, secrétaire d'État. - La convention-cadre prévoit que les denrées données devront être de bonne qualité ; la date de péremption devra aussi toujours courir pendant plus de 48 heures après le don. Retrait.
Mme Évelyne Didier. - Merci pour ces précisions. Les collectivités territoriales risquent d'avoir à gérer les déchets issus des produits donnés. Les distributeurs bénéficient déjà d'une aide fiscale conséquente. Il ne faut pas qu'ils gagnent sur tous les tableaux. Leur responsabilité doit être posée. Je retire l'amendement.
Mme Annick Billon. - Il faut penser aux produits périssables... Mais je retire l'amendement n°4.
Les amendements identiques nos1 et 4 sont retirés.
M. le président. - Amendement n°2, présenté par Mme Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Après l'alinéa 15
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
« Les denrées alimentaires résiduelles données par les commerces de détail alimentaire et non distribuées par les associations sont traitées conformément au code de l'environnement en respectant la hiérarchie des modes de traitement et conformément à l'article L. 2224-14 du code général des collectivités territoriales.
« Dans le cas où la gestion des denrées alimentaires résiduelles données par les commerces de détail alimentaire et non distribuées par les associations induit l'intervention d'une collectivité territoriale, celle-ci est associée à la convention mentionnée au III de l'article L. 541-15-5 du présent code. »
Mme Évelyne Didier. - Nous rappelons que la hiérarchie des modes de traitement des déchets doit être respectée pour les dons - et nous associons la collectivité territoriale à la convention, ce sera utile.
M. le président. - Amendement n°5, présenté par Mme Billon et MM. Kern, Détraigne et Longeot.
Après l'alinéa 15
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
« Les denrées alimentaires résiduelles données par les commerces de détail alimentaire et non distribuées par les associations sont traitées conformément au code de l'environnement en respectant la hiérarchie des modes de traitement et conformément à l'article L. 2224-14 du code général des collectivités territoriales.
« Dans le cas où la gestion des denrées alimentaires résiduelles données par les commerces de détail alimentaire et non distribuées par les associations induit l'intervention d'une collectivité territoriale, celle-ci est associée à la convention de partenariat mentionnée au III de l'article L. 541-15-5 du présent code.
Mme Annick Billon. - Même objet, la collectivité territoriale ne doit pas supporter un coût qu'elle répercuterait sur le contribuable.
M. le président. - Amendement n°6, présenté par Mme Billon et MM. Longeot, Kern et Détraigne.
Après l'alinéa 15
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« La convention détermine, en relation avec les acteurs concernés, les modalités selon lesquelles les dons alimentaires non distribués par l'association bénéficiaire seront valorisés ou éliminés en conformité avec la règlementation en vigueur en matière de gestion des déchets.
Mme Annick Billon. - Défendu.
Mme Chantal Jouanno, rapporteure. - La présence des collectivités territoriales est déjà possible. Un suivi de la loi serait très utile, avec des indicateurs, dont l'Ademe pourrait se charger. Retrait.
M. André Vallini, secrétaire d'État. - Je retiens cette suggestion d'une mission pour l'Ademe et en ferai part à Mme Royal. Les amendements sont satisfaits, il n'est pas nécessaire d'associer systématiquement la collectivité territoriale à la convention même si cela est possible. Retrait.
Je reçois à l'instant la convention type, je vais vous la faire passer.
L'amendement n°2 est retiré, de même que les amendements nos5 et 6.
L'article premier est adopté.
L'article 2 est adopté.
ARTICLE 3
M. Joël Guerriau . - La lutte contre le gaspillage à l'école est difficile. Ma commune compte 7 groupes scolaires ; nous avons fait un diagnostic : 51 % des denrées y sont gaspillées. Nous avons engagé un plan pluriannuel pour ramener ce chiffre à 20 %. Il faut certes dialoguer avec les enfants, les sensibiliser ; mais ces bonnes intentions ne peuvent suffire, il faut aussi concocter des menus plus équilibrés, plus sains. Une circulaire de 2011 le prévoit, mais la diversification alimentaire crée du gaspillage - l'éducation au goût prend du temps.
Depuis le 1er janvier 2016, une recommandation favorise la mise en place, dans les restaurants, du doggy bag ; elle permet aux restaurateurs de réduire le volume de leurs biodéchets. Les Français n'en sont pas coutumiers... En Rhône-Alpes, un slogan a été lancé - « c'est si bon, je finis à la maison » et le doggy bag s'appelle le « gourmet bag »... Une extension à la restauration scolaire aurait des effets positifs. Éduquer et informer ne suffiront pas. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI-UC)
M. Marc Laménie . - Je m'associe à cet article méritoire, la sensibilisation à l'école est utile, dans le monde rural comme en ville, les enseignants comme les parents ont tout leur rôle à jouer - pour une prise de conscience de toutes et tous.
L'article 3 est adopté.
L'article 4 est adopté.
Interventions sur l'ensemble
Mme Chantal Jouanno, rapporteure . - Nous voici au terme - rapide - de l'examen de cette proposition de loi, dans une belle unanimité. Ce texte ne traite que d'une partie de la lutte contre le gaspillage, nous devons continuer dans la voie d'une consommation réfléchie. Voilà un petit texte dont la portée peut être grande.
M. Joël Labbé . - Comme membre du plus petit groupe de cette assemblée, je suis très heureux de notre consensus : nous avançons ensemble, les populations l'attendent de nous. Le gaspillage, il faut le dire, est l'effet d'un système de grande production et de grande distribution.
Mme Isabelle Debré. - Et d'un manque d'éducation.
M. Joël Labbé. - Il faut favoriser les circuits courts, les petits magasins de proximité ou de producteurs, les marchés... Ce texte en annonce d'autres et redonne confiance en la politique.
M. Alain Fouché . - Je suis très heureux, moi aussi, de ce consensus, qui est aussi celui du Parlement européen. Il est important que la grande distribution, qui n'est pas malheureuse, participe à l'effort de solidarité envers les plus démunis. Il faudra réfléchir aussi à ce qui se passe dans les écoles, les hôpitaux, les réceptions. C'est un premier pas, allons plus loin. Un grand bravo à tous ! (Applaudissements)
M. Louis Nègre . - Belle unanimité, exceptionnelle même ! Le texte obéît à la même logique que le Grenelle et la loi de transition énergétique pour une économie sobre. Le message est clair : on ne peut plus continuer à gaspiller.
La pauvreté progresse, mais chaque Français jette 20 kg de denrées alimentaires par an : il faut agir, éduquer - même si nous le faisons depuis... la directive de 1975. L'unanimité d'aujourd'hui est à l'honneur du Sénat ! (Applaudissements)
Mme Évelyne Didier . - Nous voterons ce texte, les dons alimentaires, vertueux, aident les associations qui font tous les jours un travail extraordinaire - ce sont elles qu'il faut applaudir ! (Applaudissements) Notre société ne tiendrait pas sans elles.
Il ne faudrait pas que nous nous donnions bonne conscience à moindre coût... Le gaspillage est absurde face à la famine et à la pauvreté, on voit là toutes les limites de la société de consommation. Ne considérons pas que nous accomplissons un acte héroïque. (Applaudissements)
Mme Nicole Bonnefoy . - Je suis heureuse et fière de cette loi de bon sens et attendue. Je partage ce plaisir avec Guillaume Garot. J'espère que nous trouverons d'autres accords sur d'autres textes importants ! (Applaudissements)
M. Joël Guerriau . - Alors qu'il existe 80 millions de démunis en Europe, notre acte d'aujourd'hui est historique à défaut d'être héroïque. Il faut que l'Europe agisse aussi, l'enjeu est continental, mondial. Je me réjouis de notre unité, nous devons en être fiers. Mais beaucoup reste à faire. (Applaudissements)
M. François Fortassin . - Je voterai ce texte qui est à l'honneur du Sénat. L'excès de réglementation produit du gaspillage. Voyez les melons : trop petits, ils sont jetés à la décharge... Tandis que des chaines de restaurants qui proposent de la nourriture - passez-moi l'expression - dégueulasse, sont parfaitement en règle : où est la logique ? Il faudrait aussi un peu de souplesse dans les dates de péremption... Peu de gens s'empoisonnent en mangeant un steak de blonde d'Aquitaine, dont la viande est particulièrement goûteuse...
La proposition de loi est adoptée à l'unanimité.
(Applaudissements)
M. Hervé Maurey, président de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable . - Merci de cette belle unanimité pour un vote conforme, et merci aussi à ceux qui ont retiré leurs amendements, par souci de voir le texte entrer rapidement en application. Le gaspillage est insupportable et, si ce texte ne règlera pas tout, c'est un progrès. Nous devons aller plus loin par l'éducation, la formation, la sensibilisation : l'époque du gaspillage est révolue, il faut le dire ! (Applaudissements)
M. André Vallini, secrétaire d'État . - Merci à tous, le Gouvernement se réjouit de l'unanimité sur ce texte petit par la taille mais grand par l'objet, qui fait avancer une très belle cause. Il fera date. (Applaudissements)
Retrait d'une question orale
M. le président. - J'informe le Sénat que la question orale n°1348 de M. Jean-Marie Bockel est retirée du rôle des questions orales, à la demande de son auteur.
La séance, suspendue à 15 h 55, reprend à 16 h 5.