QUESTIONS ORALES
M. le président. - L'ordre du jour appelle vingt-quatre questions orales.
Brevets industriels Carbone Savoie
M. Jean-Pierre Vial . - Carbone Savoie, dont l'activité est répartie entre les sites de Vénissieux et de Notre-Dame-de-Briançon, est spécialisée dans la fabrication des cathodes et des matières nécessaires aux fours de production d'aluminium. Aujourd'hui propriété de Rio Tinto Alcan, cette entreprise emploie 450 salariés. Le groupe Rio Tinto Alcan, qui a cédé en 2013 l'usine d'aluminium de Saint-Jean-de-Maurienne à l'entreprise allemande Trimet, vient d'engager une revue stratégique dont l'objet est d'aboutir à la cession des sites de Carbone Savoie.
La spécificité de Carbone Savoie est de créer des produits de très haute qualité ; l'entreprise a bénéficié, ces dernières années, de programmes importants en matière de recherche et de développement, et notamment du crédit impôt recherche, pour mettre au point des produits de nouvelle génération répondant aux normes les plus exigeantes en matière environnementale.
On attend la décision de Rio Tinto Alcan dans les prochaines semaines. Ces savoir-faire intéressent les Russes et les Chinois : s'ils étaient repreneurs, seraient fragilisés les sites français qui dépendent de Carbone Savoie, ceux de Dunkerque et de Saint-Jean-de Maurienne.
Comment le Gouvernement compte-t-il maintenir l'activité de Carbone Savoie en France sachant que cette entreprise a bénéficié du CIR et de l'aide au titre des électro-intensifs ?
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du numérique . - Rio Tinto Alcan, actuel propriétaire de Carbone Savoie, souhaite se recentrer sur la production d'aluminium primaire. Il y a quelques mois, les salariés de Carbone Savoie craignaient la fermeture des deux sites de Rhône-Alpes ; l'entreprise les a rassurés par un courrier adressé au ministre de l'économie.
Nous veillons à ce que le projet du groupe sécurise l'avenir du site. En cas de cession, les questions de propriétés intellectuelles seraient examinées avec attention. Le cas échéant, nous veillerons aussi à ce qu'une cession partielle ne nuise pas à l'activité de Carbone Savoie.
Cette entreprise bénéficiera de la loi de transition énergétique et des mesures prises pour les industries électro-intensives. Elle pourra ainsi améliorer sa compétitivité et entreprendre une diversification de sa production pour fournir des produits graphiques autres que l'aluminium.
M. Jean-Pierre Vial. - Cette aventure a commencé il y a vingt ans avec le déclin de Péchiney. Des quarante sites français de Péchiney, il ne restera bientôt que celui de Dunkerque...
Rio Tinto Alcan semble avoir changé de pied depuis quelques mois. D'autres sites, qui dépendent des cathodes et des méthodes de fabrication des fours de Carbone Savoie, seraient menacés par sa disparition. Il faut l'empêcher.
Retraités d'Areva
M. Jean Bizet . - Le 7 juin 2015, Areva annonçait un plan d'économies d'un milliard d'euros sur trois ans, jugé indispensable. Le groupe, qui emploie 44 000 personnes dont 28 520 en France, compte réduire ses frais de personnel de 15 % en France et de 18 % dans le monde : cela se traduira par la suppression de plus de 3 000 postes en France.
À la suite de ces annonces, le ministère a immédiatement réagi, en affirmant qu'il n'y aurait aucun licenciement sec en France. La direction de l'entreprise a, elle-même, fait savoir qu'elle privilégierait les départs volontaires ou anticipés. Les inquiétudes légitimes des salariés ne portent pas seulement sur ces baisses d'effectifs mais aussi sur les autres conséquences du plan de performance, sur les rémunérations, les conditions et temps de travail, les statuts collectifs et les garanties collectives.
Dans un courrier en date du 18 mai 2015, le directeur des ressources humaines d'Areva indique que le groupe a décidé l'arrêt du financement des frais de santé des retraités des différentes entreprises du groupe. Cette décision, qui risque de mettre à mal le portefeuille des anciens salariés d'Areva, semble méconnaître l'esprit de notre système de répartition qui, depuis 1945, est fondé sur la solidarité inter-générations.
Le Gouvernement peut-il nous en dire plus ?
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du numérique . - La direction du groupe a reçu le 12 juin une délégation des retraités concernés. Compte tenu des efforts demandés aux actifs, il est difficile qu'Areva continue à financer le régime de retraite complémentaire de ses employés, pour un coût de 5 millions d'euros par an, et avec une provision de 250 millions d'euros. Une transition sera ménagée. Les associations de retraités proposent que la direction leur permette d'adhérer à un régime moins coûteux.
Nous veillons à ce que les efforts demandés à tous soient équilibrés, dans le cadre de ce plan de performance indispensable.
M. Jean Bizet. - Ce plan est la conséquence de décisions hasardeuses de la direction. Un régime moins coûteux offre des prestations moins favorables ! Les retraités, qui ne sont pas responsables de la situation actuelle, ne s'en satisferont sans doute pas.
Fermeture de perceptions en Ariège
M. Alain Duran . - Au printemps de 2015, la direction départementale des finances publiques de l'Ariège a annoncé la fermeture en 2016 des trois trésoreries de Castillon, Vicdessos et Luzenac, auxquelles pourraient s'ajouter en 2017 celles de La Bastide-de-Serou, Le Mas-d'Azil et Le Fossat. Ces annonces constituent un très mauvais signal donné à la ruralité. Les habitants des territoires ruraux et de montagne se retrouvent à nouveau les premiers fragilisés par une politique de réduction des services publics de proximité.
Je ne remets pas en question l'objectif de réduction des dépenses publiques et la réorganisation des services administratifs en vue d'une meilleure efficacité, mais j'appelle à des solutions équilibrées : maison des services publics, communes nouvelles...
Pour l'heure, je demande au ministre des finances de suspendre la fermeture des perceptions.
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du numérique . - Je vous prie d'excuser l'absence de MM. Sapin et Eckert, pris par la discussion du budget.
L'administration régalienne du Trésor se doit à la fois d'être présente localement et d'offrir des services de qualité. La contrainte budgétaire amène la DGFip à repenser son organisation sur la base de la concertation au terme desquelles seulement le ministre rend ses décisions.
Si une trésorerie ne répond plus aux attentes des publics, ou si elle est trop petite pour offrir des services de qualité, un regroupement doit être envisagé.
S'agissant de l'Ariège, M. Eckert a été sensible à vos préoccupations et le directeur départemental a proposé des solutions de compromis. Le ministre n'a pas encore arrêté sa décision. En tout état de cause, il a réaffirmé la nécessité d'adapter le réseau en Ariège en fermant l'un des trois postes tout en tenant compte des possibilités offertes en matière de gestion conjointe et d'échelonnement de calendrier pour les deux autres.
M. Alain Duran. - Merci. Il faut maintenir la qualité de service au public dans la ruralité, que nous aimons tous.
Lignes ferroviaires dans l'Aisne
M. Antoine Lefèvre . - Dans l'Aisne, les usagers du ferroviaire sont particulièrement mal lotis avec les retards récurrents sur la ligne Paris-Laon, que ce soit pour travaux, manque de conducteurs, trains bondés, matériel vieillissant, rodage, affaissement de talus. En outre, le rapport Duron préconise de réduire les passages quotidiens des lignes Saint-Quentin - Cambrai et Saint-Quentin - Maubeuge, ainsi que de supprimer la ligne Hirson-Metz. Le sud de mon département va être à quatre heures de route de Lille, sa nouvelle capitale régionale, et on nous ampute de trois lignes ferroviaires ! En outre, on nous pénalise pour l'axe principal qui relie Paris à Laon et, plus loin, à Hirson.
Les retards de trains ont suscité une plateforme d'échanges appelée « Paris-Laon ma deuxième maison », dont la pétition a reçu en quelques jours plus de mille signatures, soutenue par l'association Amélioration du transport ferroviaire. L'UFC-Que choisir estime que les chiffres produits par la SNCF sont peu conformes à la réalité ; elle a mis en place une application pour déclarer tous les incidents. Le report des décisions à mai 2016 laisse chacun dans l'incertitude. Et l'on parle d'un « train d'équilibre du territoire » ! Cherchez l'erreur ! Les collectivités territoriales doivent absolument être consultées d'autant qu'on compte leur demander des financements. Je pense en particulier au bloc communal. L'État entend-il jouer son rôle alors qu'il est compétent sur les trains d'équilibre du territoire ?
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du numérique . - Le Gouvernement partage votre souci d'offrir aux voyageurs des transports collectifs fiables et de qualité. Sur la ligne des TET Saint-Quentin-Paris, dont l'État est l'autorité organisatrice des transports depuis 2010, on constate une baisse de fréquentation de plus de 20 %, qui s'explique en partie par l'essor du covoiturage. C'est pourquoi le Gouvernement travaille à la reconnaissance de ces TET.
Le ministre des transports, retenu ce matin, a confié au député Duron que, si la décision n'est attendue qu'en mai 2016, c'est précisément que nous laissons le temps de la concertation !
Il appartient à la région autorité organisatrice des transports de définir les besoins et de veiller à la qualité du service.
M. Antoine Lefèvre. - J'insiste pour que les communes et intercommunalités soient associées à la concertation.
Fermeture de la base d'Air France à Nice
Mme Dominique Estrosi Sassone . - La direction d'Air France a décidé de fermer ses bases de Nice, Toulouse et Marseille. L'accord signé en juillet n'a pas clos le dossier, puisque les négociations doivent rouvrir dans un an. Si la base niçoise devait fermer, que deviendraient les 200 salariés concernés et leurs familles ?
Ces équipages régionaux permettent d'accélérer la rapidité de rotation des avions. Lorsque ces personnels navigants sont de réserve, ils peuvent répondre à toutes sortes d'imprévus afin de garantir la continuité du service public.
Alors que l'État vient d'augmenter sa participation au capital d'Air France, quelle est la position du Gouvernement sur ce dossier ?
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du numérique . - En 2011, Air France avait décidé d'ouvrir des bases dans plusieurs villes, afin d'améliorer la productivité du secteur court et moyen courrier. Malgré leur succès, ses bases n'ont pas trouvé leur équilibre économique ; c'est pourquoi Air France a déjà progressivement réduit le nombre de vols à leur départ.
Pour les personnels navigants commerciaux, les bases seront maintenues jusqu'en octobre 2016 ; c'est l'objet des propositions de juillet dernier, qui confirment le Gouvernement dans son attachement au dialogue social. Il appelle tous les acteurs à reprendre le chemin des négociations, pour restaurer ensemble la compétitivité de la compagnie.
Mme Dominique Estrosi Sassone. - Ces bases aériennes sont un atout pour les territoires concernés, elles doivent être pérennisées. Le plan social annoncé exclut certes les départs contraints, mais les syndicats l'ayant refusé, des licenciements secs sont à craindre ; 48 emplois sont menacés à Nice.
La Cour des comptes a dessiné d'autres pistes d'économies : je pense, par exemple, aux billets offerts aux salariés.
Nuisances provoquées par l'aéroport de Genève
M. Gilbert Roger . - L'association française des riverains de l'aéroport de Genève (Afrag), composée de plus de 100 membres et soutenue par les communes d'Yvoire, Nernier, Messery et Chens-sur-Léman en Haute-Savoie, milite pour le déplacement des trajectoires aériennes de la rive française vers le milieu du Petit Lac, par le biais d'une approche dite segmentée et la limitation des vols de nuit. Le bruit mesuré à Nernier par l'European Aircraft Noise Service, au passage d'un avion, varie entre 65 et 72 décibels, soit un niveau amplement suffisant pour réveiller un être humain. Le premier vol est à six heures du matin et le dernier à minuit, y compris les samedis et dimanches et bon nombre d'avions sortent leur train d'atterrissage au-dessus de Nernier.
Le tribunal administratif fédéral suisse a débouté l'Afrag, le 17 juin 2015, de sa demande de modification du règlement d'exploitation de l'aéroport de Genève, arguant des conditions de sécurité. Or deux experts indépendants, dont le cabinet néerlandais NLR, ont confirmé le fait qu'une approche segmentée était techniquement réalisable, sans aucun impact sur la sécurité des vols, comme l'attestent les exemples de Nice, Francfort et Zürich !
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du numérique . - Nous sommes en contact avec les autorités suisses, dans le respect de la souveraineté de chaque État.
L'Office fédéral de l'aviation civile avait approuvé en 2001 les règlements d'exploitation de l'aéroport de Genève. Les riverains français ont contesté cette décision, en raison des nuisances occasionnées par les atterrissages sur la piste 23. Un projet d'arrivée par le milieu du lac Léman a été rejeté en 2012, pour des raisons de sécurité car les avions n'auraient plus été dans l'alignement de la piste. Il aurait donc fallu une dérogation aux règles internationales de sécurité. L'Afrag a été déboutée de son recours en juin dernier.
Voilà où nous en sommes. La Direction générale de l'aviation civile poursuivra le dialogue constructif qu'elle entretient avec les autorités suisses. Après l'échec de la procédure contentieuse, c'est d'un climat apaisé que l'on peut attendre une évolution positive. Continuons sur cette piste, si j'ose dire.
M. Gilbert Roger. - Je souhaite être informé des suites de cette affaire. Qui peut le plus peut le moins. Au lieu de déclarer la guerre à la France, que la Suisse garantisse la sécurité de chacun !
Accès au RSA
M. Jean-Léonce Dupont . - Les services départementaux constatent que des personnes détenant des capitaux importants demandent et obtiennent le RSA.
Dans le Calvados, entre 2012 et 2013 le nombre de bénéficiaires du RSA a progressé de 10 %, passant de 13 600 à plus de 15 000 ; sur cette même période, le nombre de personnes qui ont déclaré des placements a augmenté de 24 %. En effet, dans l'évaluation des situations patrimoniales, les textes prévoient que les intérêts des comptes d'épargne ne sont pas pris en compte dans leur valeur réelle mais au taux forfaitaire de 3 %. Certains ont parfaitement compris comment faire, d'autant que l'on trouve des conseils avisés sur certains blogs : « Quand on est au RSA, il faut privilégier ce type d'épargne. L'idéal, c'est de faire diversion : avoir son compte courant dans une banque et ses comptes d'épargne non imposables dans un autre établissement de façon à brouiller les pistes. » Pour échapper à la prise en compte de certains placements, des bénéficiaires déposent plusieurs dizaines de milliers d'euros sur les comptes courants, que la CNAF refuse d'intégrer dans l'évaluation des ressources en estimant que l'argent des comptes courants est destiné aux dépenses quotidiennes du foyer. Grâce à quoi, on peut détenir 180 000 euros de placements et obtenir le RSA avec les droits connexes !
Le président du conseil départemental devrait être en mesure de refuser, dans ce cas, les bénéfices du RSA. Ce serait conforme à la justice sociale. (Applaudissements au centre et à droite)
Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des droits des femmes . - Certains trouvent au contraire la règlementation trop rigoureuse puisque tous les avoirs financiers sont valorisés à 3 % pour le calcul du RSA, même s'ils rapportent moins. Les CAF peuvent évaluer le niveau de vie des demandeurs, pour éviter les cas, rares mais choquants, que vous évoquez. Elles veillent aussi à la prévention des fraudes, qui entretiennent le fantasme de l'assistanat.
M. Jean-Léonce Dupont. - Nous ne vivons pas les mêmes situations... Les départements sont confrontés à ce type de cas. Or certains d'entre eux seront en cessation de paiement à la fin de l'année, et le tiers d'entre eux l'année prochaine ! Si vous ne prenez pas conscience rapidement de ces difficultés, vous risquez d'être rattrapés par la réalité. (Applaudissements au centre et à droite)
M. Christian Cambon. - Très bien !
Application des conventions collectives dans les entreprises d'insertion
M. Martial Bourquin . - Dans le cadre de la loi du 31 juillet 2014 sur l'économie sociale et solidaire, les entreprises d'insertion ont pour objectif de ramener des personnes dans le monde du travail. Or l'application d'une convention collective peut être un frein à l'insertion, puisque certains salariés en insertion hésitent face à une proposition d'une entreprise classique qui propose une convention collective différente ou moins avantageuse, voire sans convention collective. Ne faudrait-il pas adapter l'application des conventions collectives aux salariés en insertion ?
Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des droits des femmes . - Les contrats à durée déterminée de l'insertion par l'activité offrent les mêmes garanties que les CDI. C'est un enjeu de régulation de la concurrence : la même règle pour tous. Au 31 septembre 2012, 710 conventions de branches couvraient trois millions de salariés.
Cette convention élargie est la particularité de la France. Les salariés de l'insertion par l'activité économique doivent en faire partie.
Ce secteur est justement perçu comme un vecteur de cohésion sociale, de développement des territoires et d'amélioration des conditions de vie.
M. Martial Bourquin. - Parfaitement. Cependant, il faut distinguer les deux métiers différents que sont celui d'encadrant et celui de travailleur en insertion. Accompagner ces personnes demande beaucoup de courage et d'engagement, reconnaissons-le.
Coût du traitement social du chômage
M. François Bonhomme . - Le traitement social du chômage, auquel le Gouvernement recourt pour faire face à l'échéance des élections de 2017, coûte très cher.
Fin novembre 2014, 45 000 emplois dits d'avenir avaient déjà été ajoutés dans le budget 2015 ; en mars 2015, 170 millions d'euros ont été débloqués, pour concentrer plus d'emplois aidés sur le premier semestre.
Le nouveau geste est bien plus considérable, puisque son coût est estimé entre 300 millions à 400 millions d'euros en 2015 et 700 millions d'euros en 2016. Cette rallonge vise à porter à 545 000 le nombre total d'entrées en contrats aidés cette année et à maintenir, au second semestre, le même flux que pendant les six premiers mois.
Plus significatif encore : le « stock » de bénéficiaires de contrats aidés avoisinera 460 000 à 480 000 à la fin de 2015, chiffre inégalé depuis le début de la crise. Ces contrats bénéficieront, avant tout, aux jeunes et au secteur non marchand. Si, cette année, la mesure est financée par des redéploiements de crédits à l'automne, en mobilisant la réserve de précaution mise en place en début d'année, les crédits seront intégrés dans le budget de l'emploi pour 2016, ce qui pèsera sur les finances publiques, sans que soit réellement traité le problème du chômage des jeunes.
Comment le Gouvernement entend-il financer cette nouvelle mesure et quels arbitrages sont envisagés pour 2016 ?
Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des droits des femmes . - Le budget 2016 réaffirme la priorité pour l'emploi du Gouvernement. Dans un contexte de redressement sans précédent de nos finances publiques, nous maintenons à un niveau élevé les crédits de la mission budgétaire « Travail et emploi », qui augmentent de 15 %. Le Gouvernement assure sa volonté de remporter la bataille pour l'emploi. Les emplois aidés, les contrats uniques d'insertion et les emplois d'avenir y contribuent de manière déterminante. D'ailleurs, le précédent Gouvernement de droite n'avait pas dédaigné non plus les emplois aidés.
C'est un enjeu économique, car les personnes concernées gagnent en compétences, au plus près des besoins des entreprises, et le Gouvernement est attentif à la qualité des parcours. Fin juin 2015, 85 % des jeunes recrutés en emploi d'avenir bénéficieront d'une formation. L'enjeu est aussi social, car les emplois aidés s'adressent à des personnes éloignées du marché du travail.
L'État prend sa part dans cet effort ; les employeurs en contrepartie s'engagent à accompagner les jeunes et à les former.
Le budget pour les contrats aidés s'élèvera en 2016 à 2,5 milliards d'euros, dont 1,2 milliard pour les emplois d'avenir : un chiffre en ligne avec les perspectives de croissance. C'est une dépense utile, vertueuse pour que les Français les plus en difficulté, les jeunes en particulier, retrouvent le chemin de l'emploi.
M. François Bonhomme. - Certains préfets ont eu des déclarations malheureuses, appelant à consommer à toute force les crédits de l'emploi. Certes, tous les Gouvernements ont recours aux emplois aidés. Ce qui pose problème, c'est lorsqu'ils tiennent lieu de politique de l'emploi. Notre pays a besoin de réformes structurelles.
M. Christian Cambon. - Eh oui !
Avenir des trains de nuit Paris-Briançon
Mme Patricia Morhet-Richaud . - Depuis la disparition des forces armées à Briançon, la ligne ferroviaire des Alpes, jusqu'à son terminus Briançon, fait craindre le pire aux élus, aux usagers mais aussi aux professionnels du tourisme, tant les difficultés de circulation, de réservation et les retards s'amoncèlent.
Le 26 mai 2015, le député Philippe Duron a remis le rapport de la commission sur l'avenir des trains d'équilibre du territoire qu'il introduit par ces mots : « Pour sauver l'offre des trains d'équilibre du territoire, il faut agir vite, il faut regarder loin, il faut des mesures fortes ».
J'ai consulté son rapport avec un vif intérêt et lu avec angoisse ses conclusions. Ma demande d'audience est restée sans suite ; l'avenir du seul train d'équilibre du territoire des Hautes-Alpes, c'est-à-dire du train de nuit « historique » Paris-Briançon est menacé. En France, les trains de nuit sont très consommateurs de fonds publics, puisqu'ils représentent 25 % du déficit, alors qu'ils ne comptent que 3 % des voyageurs.
Sur la ligne de nuit Paris-Briançon, le déficit est de 160 euros par voyageur. Certes, la commission préconise le maintien de ce train de nuit, au motif qu'on ne dispose pas, dans les Hautes-Alpes, d'une offre alternative suffisante, en raison du caractère enclavé de son territoire. Faut-il s'en réjouir pour autant ?
Une seule desserte quotidienne pour le train de nuit est largement insuffisante puisque de nombreuses stations de sports d'hiver sont concernées. II est impératif de garantir la circulation de trains supplémentaires, en adéquation avec le calendrier des vacances scolaires.
La qualité du service, la fréquence, le prix, le temps de parcours doivent être améliorés faute de quoi les usagers pourraient choisir d'autres destinations.
Alors que s'ouvre dans quelques semaines la COP 21, je compte sur la volonté des pouvoirs publics pour mettre en oeuvre des transports publics adaptés, conformes aux objectifs de diminution de gaz à effet de serre et incitatifs.
Le Gouvernement a-t-il rendu des arbitrages sur le rapport Duron, dans les Hautes-Alpes ?
Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des droits des femmes . - Je vous prie d'excuser l'absence d'Alain Vidalies. Depuis 2010, l'État est l'autorité organisatrice des transports des trains d'équilibre du territoire, dont les trains de nuit. La fréquentation de ceux-ci a décliné de 25 % depuis 2011. Le modèle économique actuel du service est à bout de souffle : leur déficit représente 25 % de celui de l'ensemble des TET, vous l'avez rappelé. D'où la volonté du ministre Vidalies d'assurer la renaissance de ces trains et la mission confiée à Philippe Duron.
La commission qu'il a présidée, qui a rendu ses conclusions le 26 mai 2015, recommande que la ligne de nuit Paris-Briançon, essentielle pour l'équilibre du territoire, soit maintenue.
Mon collègue a confié au préfet François Philizot une large concertation avec les régions et les acteurs territoriaux afin d'examiner les éventuelles évolutions d'offre et de gouvernance de ces trains, à partir des conclusions de la commission. Cette mission se poursuivra avec les nouveaux élus régionaux, afin de disposer de conclusions d'ici mai 2016.
Des locomotives thermiques neuves entre Valence et Briançon seront mises en service en 2016 pour fiabiliser la desserte de cette ligne, nécessaire au développement du Val-de-Durance.
Mme Patricia Morhet-Richaud. - Je ne suis que partiellement rassurée par cette réponse. Comptez sur ma vigilance.
Continuité écologique des cours d'eau
Mme Anne-Catherine Loisier . - La continuité écologique est mise en oeuvre sans concertation sur le terrain, dans une situation budgétaire difficile, pour tous les propriétaires d'ouvrages publics et privés, situés sur les cours d'eau classés en liste 2.
Avec les moulins, vieux de plus de deux siècles, qui sont menacés, c'est tout un patrimoine qui risque d'être détruit, sans parler de la perte de potentiel de production hydro-électrique.
On délaisse la fonction de réserve d'eau des biefs pour les usages locaux, sans apporter aucune garantie quant aux risques pour les personnes, les habitations et les écosystèmes en aval.
Alors que l'argent public est rare, ne faut-il pas s'interroger sur le bénéfice environnemental de telles mesures ?
Entre la solution de l'arasement complet de l'ouvrage et l'obligation d'équipement, il existe d'autres options respectueuses de l'intérêt collectif, pour annuler ou réduire au minimum les impacts sur la continuité écologique, tels que l'abaissement de seuil, l'ouverture de vanne...C'est ce que recommandait le conseil général de l'environnement et du développement durable en 2013 : la gestion concertée des vannages et l'élaboration de grilles multicritères pour évaluer l'intérêt des ouvrages.
Le droit de l'eau, lui aussi, attend son choc de simplification. La ministre de la culture a fait des déclarations récemment sur les moulins à eau. Est-ce à dire qu'une concertation s'engage ?
Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des droits des femmes . - Mme Royal vous prie d'excuser son absence.
La préservation et la restauration de la continuité écologique des cours d'eau est un enjeu important pour l'atteinte du bon état des eaux et pour la préservation de la biodiversité.
En application de l'article L. 214-17 du code de l'environnement, les cours d'eau classés en liste 1 sont à protéger de tout aménagement supplémentaire, ceux classés en liste 2 doivent donner lieu à de véritables programmes de restauration de la continuité écologique centrés sur certains secteurs, afin de respecter les objectifs de bon état des eaux de la directive-cadre sur l'eau et les engagements de la France en faveur de la biodiversité.
Parmi les 80 000 obstacles qui ont été recensés sur les cours d'eau, tous ne sont pas des moulins, lesquels font partie, effectivement, de notre patrimoine.
Mme Royal privilégie une démarche participative avec l'élaboration d'une charte nationale. Dans votre département, les bâtiments classés monuments historiques seront évidemment préservés.
Les ouvrages de Rochefort-sur-Brevonet et de Talfumière à Saint-Marc-sur-Seine, font l'objet d'études portées par le syndicat intercommunal des cours d'eau châtillonnais (SICEC).
Sur le premier, l'étude préliminaire concerne trois ouvrages. La commune et le propriétaire des ouvrages participent au comité de pilotage.
Pour le moulin de Talfumière, les études privilégient la gestion des vannes de l'ouvrage permettant l'alimentation en eau du moulin.
Sur les deux autres moulins que vous mentionnez à Saint-Marc-sur-Seine, les procédures contentieuses ne permettent pas d'avancer pour le moment.
Sur l'ouvrage de Bézouotte, le projet initial de rétablissement de la continuité écologique, porté par le syndicat intercommunal du bassin versant de la Bèze et de l'Albane (Siba), privilégiait l'effacement mais pourrait évoluer vers un aménagement en raison des risques causés par l'abaissement du niveau d'eau sur la stabilité des berges. La commune est associée aux démarches engagées.
Quant aux ouvrages d'Is-sur-Tille, les études sont conduites par le syndicat intercommunal d'aménagement de la Tille, de Pignon et de la Venelle (Sitiv) et la commune et les propriétaires des ouvrages participent au comité de pilotage.
Les études se poursuivent, pour limiter les inconvénients d'une mise hors d'eau du bief où est implanté un parcours de pêche destiné aux jeunes.
Mme Anne-Catherine Loisier. - Merci. Le dialogue sur le terrain avance. Reste que les élus locaux sont inquiets car ils ont beaucoup investi dans la restauration de ces ouvrages. Surtout, des risques d'effondrement existent : le Siba a fait état de fissures survenues dans deux habitations à cause de la rétractation des argiles. Ces mouvements de terrains sont augmentés par la sécheresse et par la baisse du niveau des eaux. En cas de sinistre, qui paiera ?
Merci au Gouvernement de se pencher sur ce dossier transversal.
Conservatoires et écoles de musique
Mme Catherine Morin-Desailly . - En mai 2015, le Premier ministre a confessé que la baisse du budget de la culture au début du quinquennat actuel avait été une erreur. Toutefois, le mal est fait, aggravé par la baisse des dotations aux collectivités locales. Avec les pactes pour la culture, le Gouvernement a engagé un nouveau type de partenariat avec les collectivités locales mais il a, dans le même temps, fait disparaître les modestes crédits affectés par le ministère de la culture aux conservatoires et aux écoles de musique.
Quand le Gouvernement affiche l'accès à la culture comme l'une de ses priorités et que la réforme des rythmes scolaires suppose une réelle mobilisation, il se contente d'opérer quelques redéploiements de crédits.
Le Gouvernement entend-il respecter la loi de 2004 ? C'est indispensable pour sauver nos conservatoires.
Mme Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication . - La culture est une compétence partagée, la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales ne dit pas autre chose. Pour autant, les enseignements artistiques spécialisés sont dans une situation de blocage, parce qu'elle n'est pas mise en oeuvre. Il faut que cela change et j'y suis déterminée.
Je veux tout d'abord réaffirmer le rôle d'expertise et d'orientation pédagogique de l'État. À cet effet, ont été inclus dans le projet de loi relatif à la liberté de création, l'architecture et le patrimoine qui vient d'être adopté en première lecture à l'Assemblée nationale, les « schémas nationaux d'orientation pédagogique ».
Il s'agit ensuite de réengager l'État dans le financement des conservatoires avec 8 millions d'euros de mesures nouvelles supplémentaires, pour atteindre 13,6 millions d'euros, plus 2 millions d'euros dans le cadre de l'augmentation des crédits de l'éducation artistique et culturelle, soit au total, plus de 15 millions d'euros en faveur de l'ensemble des conservatoires.
Enfin, nous reprenons le dialogue avec les collectivités territoriales et tous les acteurs concernés. Le chantier de révision des critères d'intervention de l'État en faveur des conservatoires et, parallèlement, de leur classement, sera ainsi mené en concertation avec les collectivités territoriales dans le cadre d'un groupe de travail « conservatoires ». Associations représentatives du secteur, enseignants, parents d'élèves, directeurs de conservatoires et, plus largement, acteurs culturels et éducatifs partenaires des conservatoires seront entendus sur ces sujets d'ici la fin de l'année.
Les conservatoires, premier réseau de proximité dans l'enseignement artistique, doivent être maintenus et renforcés.
Mme Catherine Morin-Desailly. - Enfin, mon discours porte ! Je le tiens depuis trois ans. Il faudra convaincre les régions du bien-fondé de la réforme de 2004. Il faudra aussi, madame la ministre, associer le Parlement. Nous pourrons donc y travailler dans le cadre du projet de loi sur la création.
Menaces sur la médecine scolaire
M. Christian Cambon . - Nous connaissons les déserts médicaux ; la médecine scolaire est menacée. Elle a été créée en 1945. En dix ans, la profession a perdu 50 % de ses effectifs dans le Val-de-Marne. En 2016, toutes les communes de la moitié Est de ce département n'auront plus de médecin scolaire.
Les causes de ce phénomène sont connues : un médecin scolaire peut avoir la charge de 11 000 élèves, répartis sur 45 établissements, et gagne 500 à 1 000 euros de moins par mois que ses confrères des centres de protection maternelle et infantile ou des maisons départementales des personnes handicapées (MPDH) embauchés par les départements. La carrière est insuffisamment attractive.
Or leur rôle est capital pour dépister les troubles du langage, de la vision ou de l'ouïe des enfants. L'éducation et la santé sont intimement liées pour assurer l'égalité des chances. Que compte faire le Gouvernement ?
Mme Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication . - La médecine scolaire est effectivement un gage de réussite éducative. Le Gouvernement, qui en convient, a mis fin à la réduction continue des effectifs entre 2007 et 2012.
Ainsi, depuis 2012, 66 nouveaux postes ont été ouverts par concours. De plus, nous avons pris des mesures de revalorisation indiciaire et de titularisation des agents : une centaine d'agents ont été ainsi recrutés depuis 2012, soit 10 % des effectifs de ce corps.
Cela ne suffit pas. Depuis le printemps 2015, nous avons engagé une discussion pour, entre autres, encourager les étudiants en médecine à venir effectuer des stages dans les établissements scolaires et découvrir cette fonction particulière, dont la revalorisation mobilise l'éducation nationale.
M. Christian Cambon. - Merci mais 66 postes, cela ne suffit pas. On note toujours un décalage entre les discours de ce Gouvernement et les actes. Je vous invite à discuter de ce dossier avec la ministre de l'éducation que l'on voit rarement dans cet hémicycle répondre à nos questions. La médecine scolaire est essentielle pour les enfants modestes ; les parents des autres ont les moyens de les emmener consulter des spécialistes. Il s'agit de mettre en oeuvre concrètement l'égalité des chances tant prônée par votre Gouvernement.
Pollution en Méditerranée
M. Roland Courteau . - La Méditerranée, chère à notre coeur, monsieur le président...
M. le président. - Eh oui !
M. Roland Courteau. - ...victime de l'héritage des pollutions passées et atteinte par les pollutions présentes sera soumise à une pression d'origine anthropique de plus en plus forte, dont les conséquences seront démultipliées par les effets du changement climatique.
Dans le rapport, La pollution de la Méditerranée : état et perspectives à l'horizon 2030, que j'ai rédigé voici quatre ans pour l'office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST), j'ai avancé dix grandes catégories de propositions pour lutter contre la pollution du bassin méditerranéen et réduire l'écart de plus en plus marqué qui se dessine entre les rives Nord et Sud de cet espace commun. Elles demeurent d'actualité.
Il s'agit de protéger des biotopes, souvent rares et fragiles. La mer Méditerranée ne représente que 0,8 % de la surface de la terre et 0,3 % du volume des eaux océaniques mais elle abrite près de 8 % des espèces marines connues.
J'ajoute que 60 % à 70 % de la population du Sud n'est pas couverte par un réseau de traitement des eaux.
La gouvernance est dispersée : convention de Barcelone, Union européenne, Union pour la Méditerranée, qui semble encalminée. Les pays riverains doivent agir pendant qu'il est encore temps.
Mon rapport n'inclinait pas à l'optimisme. Où en est-on aujourd'hui ? Pouvez-vous faire le point sur la mobilisation du Gouvernement pour lutter contre les pollutions ?
Mme Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication . - La France prend une part très active à la lutte contre la pollution en Méditerranée.
Au niveau national, elle mène une action ciblée, en appliquant le plan d'action contre les micropolluants, qui, dans sa nouvelle version intégrera le plan médicament et le plan PCB.
Au niveau européen, la France met en oeuvre les directives 2000 et 2008 sur l'eau et les eaux marines. Afin d'optimiser les actions mises en place dans le cadre européen, le gouvernement français a fait converger les calendriers de mise en oeuvre et articuler les documents de référence des directives sur l'eau et sur la stratégie du milieu marin.
La France respecte les directives « déchets » et le règlement « Reach » sur la gestion des substances chimiques, afin de réduire à la source les pollutions d'origine tellurique. Au niveau international, la France est partie prenante de la convention de Barcelone de 1976, révisée en 1995 et du plan d'action pour la Méditerranée. Elle en est le principal contributeur, avec des crédits à hauteur de 2 millions d'euros et la mise à disposition d'experts du ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, notamment le directeur du Plan bleu.
M. Roland Courteau. - Je salue ces initiatives. Cependant, les pollutions avancent plus vite. Au-delà du cadre national, il faut mobiliser les 21 États riverains. Nous devons créer à cet effet une agence de la protection de l'environnement et de promotion du développement durable pour l'ensemble du bassin méditerranéen, où les décisions seraient prises à la majorité qualifiée et non plus à l'unanimité. Il n'est pas trop tard pour agir. Rien n'est encore irréversible. Mais le temps presse.
Assistants d'éducation dans l'enseignement agricole
Mme Brigitte Gonthier-Maurin . - La rémunération des assistants d'éducation (AE) au sein de l'enseignement technique agricole, pourtant essentiels, diffère de celle des assistants d'éducation de l'éducation nationale !
En 2014, les crédits alloués pour financer 1.165 postes d'assistants d'éducation dans l'enseignement agricole, subissaient un différentiel de près de 5 000 euros par AE, par rapport aux crédits alloués aux postes d'AE à l'éducation nationale.
En 2015, cet écart avait commencé à se réduire. Or, les crédits annoncés pour le budget 2016 seraient en recul de plus de 700 000 euros. Résultat, soit des postes seront supprimés, soit les établissements agricoles devront prendre en charge le différentiel, de près de 4 000 euros par AE, ce qui mettrait en péril leur équilibre financier très fragile.
Le compte n'y est pas. Il importe que le Gouvernement se saisisse à bras-le-corps de ce dossier pour mettre fin à cette inégalité de traitement.
Mme Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication . - Je vous prie d'excuser M. Le Foll parti à Rome, à la FAO, organisation mondiale de l'alimentation, pour préparer la COP 21.
Le budget consacré aux assistants d'éducation de l'enseignement agricole a augmenté de 2,6 millions d'euros en loi de finances initiale pour 2015, pour atteindre 28,6 millions, ce qui correspond à 1 247 postes, contre 1 165 en 2013.
Le différentiel remonte à la mise en place des assistants d'éducation en remplacement des anciens maîtres d'internat - surveillants d'externat. Les ministères chargés de l'éducation nationale et de l'agriculture ont calculé le montant de l'enveloppe budgétaire d'une manière différente à l'époque.
En outre, les revalorisations du point d'indice pratiquées entre 2002 et 2010 par la fonction publique n'ont pas été intégrées dans le calcul des crédits budgétaires du ministère de l'agriculture alloués pour les assistants d'éducation.
Pour 2015, la gestion des dotations des assistants d'éducation a fait l'objet de deux principes : mieux rémunérer les assistants d'éducation en place et augmenter les dotations dans les régions où cela se justifie. Pour 2016, un effort supplémentaire n'a pu être malheureusement fourni.
Une expertise est en cours pour vérifier l'adéquation entre les moyens et les besoins.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. - Le Gouvernement doit mettre fin à cette inégalité injustifiée. Les attentes sont très fortes sur le terrain.
Communes nouvelles et classement touristique
M. Michel Savin . - Le tourisme revêt également une dimension stratégique pour le développement économique des territoires. L'activité touristique est vitale pour nombre de communes. Leurs efforts, qui résultent de choix pensés à long terme, sont récompensés par leur classement en commune touristique. Ces choix entraînent de nombreuses retombées favorables au développement économique des communes concernées : attractivité et aménagement du territoire, dynamisme des activités d'hôtellerie et de restauration, sans oublier le développement de la politique culturelle à travers les musées, les festivals et la valorisation du patrimoine.
Une commune de tourisme classée garde-t-elle son classement quand elle fusionne en une nouvelle entité avec une commune non classée ?
M. André Vallini, secrétaire d'État auprès de la ministre de la décentralisation et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale . - Cher Sénateur de l'Isère, territoire qui nous est cher, le tourisme est indéniablement essentiel à notre pays : 85 millions de visiteurs pour des recettes de 47 milliards d'euros.
La France compte 170 stations classées et 800 communes touristiques - les communes nouvelles ne peuvent pas bénéficier automatiquement du classement. Ce serait juridiquement fragile. Elles doivent donc en faire à nouveau la demande. Cependant, pour ménager une transition, le classement peut leur être maintenu provisoirement. Une circulaire sur ce point à destination des préfets est en cours d'élaboration.
Pour les stations, le classement vaut pour douze ans, même en cas de fusion de communes. De la même façon, nous leur laisserons le temps de se mettre en conformité avec les normes.
Tout est fait pour conforter l'essor des nouvelles communes.
M. Michel Savin. - Le maintien à titre provisoire du classement est une excellente mesure. Merci.
Pacte financier des communes nouvelles
M. Hervé Maurey . - Créée par la loi du 16 décembre 2010 et adaptée par la loi du 16 mars 2015, la « commune nouvelle », forme rénovée de regroupement de communes, correspond à une collectivité territoriale de plein exercice.
Cet outil a connu, au cours de ses quatre premières années d'existence, un succès très limité. Au 1er janvier 2015, seulement 25 communes nouvelles ont été créées, rassemblant 71 communes soit 62 712 habitants.
Des incitations financières ont été mises en place pour les communes nouvelles créées avant le 1er janvier 2016. Elles consistent essentiellement dans une stabilisation de la dotation globale de fonctionnement pendant trois ans pour les communes nouvelles regroupant au plus 10 000 habitants, ainsi qu'en une bonification de 5 %, pour la même période, pour les communes nouvelles dont la population regroupée est comprise entre 1 000 et 10 000 habitants.
Or, dans de nombreux territoires, les élus viennent seulement d'engager les travaux de réflexion et de concertation nécessaire à la création d'une commune nouvelle.
La création d'une commune nouvelle est, de toute évidence, un projet structurant pour un territoire.
Afin de laisser aux élus le temps de s'approprier cet outil et de lever certains obstacles - interprétation des textes relatifs aux effectifs des conseils, sur laquelle j'ai écrit au Gouvernement, sans recevoir de réponse, concomitance de la révision des schémas interdépartementaux de coopération intercommunale, révision obligatoire des documents d'urbanisme -, ne faut-il pas proroger le bénéfice du pacte financier aux communes nouvelles ?
M. André Vallini, secrétaire d'État auprès de la ministre de la décentralisation et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale . - Le régime de la commune nouvelle dû à M. Pélissard mais aussi à Mme Pirès-Beaune, fait l'objet d'un grand intérêt dans nos territoires, je le constate chaque semaine lors de mes déplacements dans les départements ruraux, Cantal, Lozère, Cher, Tarn.... L'aspect financier peut être important, mais l'essentiel est le projet de développement du territoire.
Vous l'avez dit, les communes bénéficient d'une stabilisation, voire d'une bonification de leurs dotations. Cette garantie est financée dans le cadre de l'enveloppe normée de la DGF ; il faut donc prendre en compte son incidence sur les autres communes, dans le contexte de la baisse des dotations.
Le Gouvernement souhaite laisser du temps aux collectivités territoriales pour se prononcer. Plusieurs solutions sont envisageables, par exemple le maintien en 2016 de la garantie des dotations sans bonus ou de tout le dispositif pourvu que les communes aient délibéré avant le 31 décembre 2015. J'ai évoqué le sujet avec le Premier ministre. Le débat est ouvert et trouvera certainement des développements lors de l'examen du projet de loi de finances.
M. Hervé Maurey. - Bien que vous n'ayez pas cité de département normand, vous m'avez fait une réponse de Normand... Optimiste, je conclus de votre réponse que la porte n'est pas fermée. Il ne faut certes pas se marier pour la dot, mais c'est tant mieux s'il y en a une... Le couperet ne doit pas tomber le 1er janvier 2016 alors que de nombreux projets sont bien avancés. Je déposerai en loi de finances un amendement qui reprendra le dispositif de ma proposition de loi du printemps.
Contrôle au faciès
Mme Laurence Cohen . - De jeunes citoyens et citoyennes, des associations dénoncent les contrôles d'identité au faciès. Dans le département du Val de Marne, nous avons tenu une conférence de presse vendredi dernier à l'initiative de la Jeunesse communiste qui a lancé, début juin, une pétition dont je suis signataire avec Christian Favier, sénateur et président du conseil départemental. Le 24 juin 2015, l'État a été condamné, pour la première fois en France, par la Cour d'appel de Paris.
D'après une étude menée en 2009, les contrôles seraient six à huit fois plus nombreux selon la couleur de la peau, l'âge ou la tenue vestimentaire. Ces chiffres témoignent de dérives qui entraînent un sentiment de discrimination, voire d'humiliation pour ceux qui sont contrôlés plusieurs fois par jour sans justification. Ces pratiques contribuent à tendre les rapports entre les forces de l'ordre et les citoyens et fissurent le sentiment d'appartenance à la République.
Le président de la République souhaitait mettre fin à ces abus, avec la création d'un récépissé. Quand sera-t-il mis en oeuvre ? Le Gouvernement entend-il aussi modifier l'article 78-2 du code de procédure pénale ?
M. André Vallini, secrétaire d'État auprès de la ministre de la décentralisation et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale . - Je précise à M. Maurey que je me suis rendu dans l'Orne et le Calvados...
M. le président. - Vous êtes le bienvenu à Marseille !
M. André Vallini, secrétaire d'État. - Les contrôles d'identité sont régis par l'article 78-2 du code de procédure pénale ; les contrôles discriminatoires sont exclus. Les forces de l'ordre sont tenues de respecter de strictes règles déontologiques.
La décision de la Cour d'appel du 24 juin impose une meilleure traçabilité des contrôles d'identité. La délivrance d'un récépissé entraînerait la mise en place d'un système très lourd, et est peu développé à l'étranger. D'autres choix ont été faits. Un nouveau code de déontologie a été publié début 2014 et un numéro d'identification figure sur l'uniforme des policiers, dont la formation a été revue. Les citoyens peuvent aussi saisir directement l'inspection des services. Enfin, une expérimentation de caméras piétons est en cours.
L'ordre républicain doit prévaloir partout dans le strict respect des libertés publiques et de la déontologie.
Mme Laurence Cohen. - Tout va bien alors ? Cette réponse n'est pas convaincante. Mes propos ne mettent pas en cause les forces de l'ordre. Il n'est pas normal qu'un jeune soit contrôlé plusieurs fois par jour uniquement à cause de la couleur de sa peau ou de sa tenue vestimentaire.
Réfléchir aux meilleures solutions est d'autant plus nécessaire que le climat est devenu délétère, comme en témoignent les propos récents de Mme Morano. Les mesures annoncées ne régleront rien. Vous avez balayé le récépissé d'un revers de main. Nous continuerons à nous battre.
Sécurité en milieu rural
M. Joël Guerriau . - En Loire-Atlantique, la gendarmerie de Châteaubriant exerce, avec 135 gendarmes, une activité soutenue sur un vaste territoire au centre de grands axes Rennes, Nantes et Angers.
En mai 2015, contre toute attente, a été annoncée la fermeture de la gendarmerie de Saint-Julien-de-Vouvantes dans le Castelbriantais. Pour ce village de près de 1 000 habitants, la présence des gendarmes et de leurs familles est importante pour la vie municipale et la sécurisation du territoire. La commune a déjà subi la fermeture de la perception ; la désertification est une réalité.
Le bâtiment, financé par la commune, abritait six familles de gendarmes à l'origine ; il est affecté actuellement au logement de trois à quatre auxiliaires. Il devra être rénové et mis aux normes pour éviter un squat. Le regroupement des effectifs à Châteaubriant rend les habitations et les locaux agricoles ou industriels plus vulnérables aux vols et dégradations. Les Français ont le sentiment d'être abandonnés par la République.
Le Gouvernement entend-il revenir sur cette décision, pour garantir l'ordre public sur tout le territoire ?
M. André Vallini, secrétaire d'État auprès de la ministre de la décentralisation et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale . - La gendarmerie s'adapte continûment à ses missions et prend en compte l'évolution des bassins de vie. La mutualisation des charges administratives, avec la création de brigades plus conséquentes, renforce les capacités opérationnelles. Le Gouvernement est attaché au dialogue avec les élus pour construire un dispositif adapté à chaque territoire.
Une étude de ce type est engagée à Saint-Julien-de-Vouvantes. L'État s'engage via le réseau des maisons de service au public et les bureaux de Poste, dans lesquels des permanences de la Gendarmerie pourront être organisées. La gendarmerie propose en outre de nouveaux services numériques, avec notamment la pré-plainte en ligne.
Proximité et adaptation ont présidé à l'élaboration des plans nationaux de lutte contre les cambriolages ou contre les vols dans les exploitations agricoles. Les cambriolages en zone gendarmerie ont diminué de 4,8 % en 2014, encore de 6,5 % sur les sept premiers mois de 2015. Sur l'arrondissement de Châteaubriant, les chiffres sont respectivement de 22,5 % et de 20,4 %. En outre, dans le cadre du plan national, la quasi-totalité des départements a décliné des plans d'actions ciblant les vols dans les exploitations agricoles ; 43 conventions proposant un dispositif d'alerte des agriculteurs par sms ont été signées entre les groupements de gendarmerie et les chambres d'agriculture - c'est le cas en Loire-Atlantique depuis le 09 décembre 2014.
La question de l'égalité devant le service public et notamment celui de la sécurité est fondamentale. Elle guide l'engagement des femmes et des hommes du ministère de l'intérieur, dévoués à cette mission délicate du service de tous nos concitoyens, en tout temps et en tout lieu.
M. Joël Guerriau. - Je n'ai pas les mêmes chiffres : on a recensé 11 000 vols simples dans les exploitations agricoles en 2014, et le nombre des effractions signalées par les agriculteurs a augmenté de 3 % l'an dernier. C'est sans compter le vol de tracteurs, qui relève d'autres statistiques... Je me félicite qu'une étude soit engagée pour la création d'une maison de service public à Saint-Julien. Il faut éviter que toute présence de le République disparaisse des communes rurales.
Urbanisation autour des sites nucléaires
Mme Delphine Bataille . - Depuis la loi de 2006, les élus sont contraints, dans les secteurs autour des installations nucléaires, de consulter l'ASN pour chaque permis de construire. Une procédure de porter à connaissance est prévue auprès des communes voisines de la plupart des sites nucléaires, en application de la circulaire du 17 février 2010 relative à la maîtrise des activités au voisinage des installations nucléaires de base (INB) susceptibles de présenter des dangers à l'extérieur du site.
Cependant, la prise en compte de cette procédure est difficile, en l'absence d'une doctrine nationale claire relative à la maîtrise des activités autour des installations nucléaires. La circulaire du 17 février 2010 prévoyait pourtant l'élaboration d'une telle doctrine, en lien avec l'autorité de sûreté nucléaire (ASN).
Les élus manquent de visibilité. Un projet de guide a été élaboré, qui semble ne pas avoir abouti. Il faut éviter que le respect du principe de précaution bloque tout développement maîtrisé du territoire. Quelles solutions le Gouvernement entend-il mettre en oeuvre ?
M. André Vallini, secrétaire d'État auprès de la ministre de la décentralisation et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale . - L'objectif de cette réglementation est de limiter les conséquences pour les riverains et les biens en cas d'accident.
Un plan particulier d'intervention en cas d'accident a été établi, et l'urbanisation est encadrée dans un périmètre de deux kilomètres autour des installations nucléaires. La circulaire de 2010 demande aux préfets la plus grande vigilance sur le développement de l'urbanisation.
Un groupe de travail a été installé pour élaborer un guide, sur la base des principes suivants : préserver l'opérabilité des plans de secours ; privilégier un développement territorial au-delà de la zone d'aléa à cinétique rapide ; permettre un développement maîtrisé et répondant aux besoins de la population. Ce guide a fait l'objet d'une large consultation publique à la fin de l'année 2011. Des travaux complémentaires ont porté sur les modalités d'institution de servitudes d'utilité publique dans les documents d'urbanisme afin de mieux maîtriser les activités - des évolutions législatives sont possibles. Ce guide devrait être officialisé au début de l'année 2016.
Mme Delphine Bataille. - Merci de ces éclaircissements. À Gravelines, un projet d'urbanisme de 350 logements en périphérie de la zone des deux kilomètres a dû être abandonné.
Les élus demandent un cadre clair et lisible. Le principe de précaution ne doit pas servir d'argument à l'inertie. Je me réjouis de la publication prochaine de ce guide.
Gestion des déchets diffus spécifiques des ménages
Mme Catherine Deroche . - Un différend oppose les collectivités locales à Eco-DDS, éco-organisme opérationnel dédié aux déchets diffus spécifiques (DDS) des ménages. Eco-DDS considère que, dans les DDS qui lui sont confiés, il y aurait trop de déchets qui ne correspondent pas à son périmètre. Ces non-conformités sont liées aux difficultés rencontrées, sur le terrain, par les collectivités locales pour la séparation des flux entrant dans le périmètre de la filière et les flux hors filière et l'application de l'arrêté « produits » du 16 août 2012. Les agents de déchèteries doivent décrypter les étiquettes de chaque produit, pour savoir à laquelle des neuf familles il appartient et doivent ensuite déterminer si ce produit est accepté par l'éco-organisme en fonction de sa contenance. Ainsi, un pot de peinture supérieur à quinze litres n'entre pas dans la filière mais le seuil est à 2,5 litres pour un pot de peinture antisalissure...
Cette situation a tendu les relations entre les collectivités locales et l'éco-organisme, dont les responsabilités respectives ne sont d'ailleurs pas claires.
Le conflit d'intérêt entre la mission de service public de l'éco-organisme et son statut privé est permanent. Plus de onze pénalités ont été infligées à un syndicat de tri des ordures ménagères du département du Maine-et-Loire depuis le début de l'année 2015, avec des frais administratifs forfaitaires d'un montant de 80 euros appliqués à chaque pénalité et avec des variations de prix d'une collectivité à une autre sans justification explicite. De plus, les arrêts de collecte sont illégaux au regard des conventions de droit public liant l'éco-organisme aux collectivités locales.
Qu'entend faire le Gouvernement ?
M. André Vallini, secrétaire d'État auprès de la ministre de la décentralisation et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale . - Eco-DDS doit respecter un cahier des charges élaboré par l'État en concertation avec les collectivités territoriales. Selon l'éco-organisme, 30 % des déchets n'entrent pas dans le champ réglementaire de la filière et sont indûment pris en charge.
Eco-DDS a formé 5 000 gardiens de déchèterie. Ces sessions de formation sont efficaces et vont perdurer. Aujourd'hui, le tri est bien effectué dans 97,5 % des collectivités. L'éco-organisme a mis en place une procédure d'information lorsque les non-conformités sont trop importantes ; si nécessaire, il demande des correctifs - ce qui est généralement prévu explicitement dans les conventions.
Mme la ministre de l'environnement souhaite que soient assurées les conditions d'un dialogue apaisé. Il convient en outre de réfléchir à des évolutions plus structurelles. Eco-DDS expérimente actuellement sur une collectivité un système dans lequel la collectivité reste en charge du tri et de la valorisation de certains déchets, avec un financement par l'éco-organisme, ce qui éviterait le tri en déchèterie.
Les services du ministère de l'écologie travaillent également à des évolutions du champ réglementaire de la filière et ont récemment notifié à la Commission européenne un décret permettant l'apposition d'un pictogramme sur les produits concernés par la filière.
Mme Catherine Deroche. - Tout ce qui va dans le sens d'une simplification et d'une clarification est bienvenu.
Obligations de construction de logements sociaux
M. Jean-Claude Carle . - De nombreuses communes ont des difficultés pour appliquer les dispositions de la loi SRU du 13 décembre 2000 et de la loi du 18 janvier 2013. Parmi elles, certaines ont fait des efforts importants, reconnus par l'État, par exemple en Haute-Savoie.
Mais les règles relatives à la consommation des espaces agricoles restreignent les possibilités de construction. Et dans les communes dont l'habitat est dispersé, le respect du taux de 25 % aboutira à une concentration sur un espace très réduit de l'ensemble des logements sociaux, contraire aux objectifs de la loi SRU. En outre, la base de calcul incluant l'ensemble des résidences d'une commune, chaque nouvelle construction renforce l'obligation légale... Le taux réel tend ainsi vers une proportion de logements sociaux proche de 30 %. Dans les zones de montagne ou à forte activité touristique, les collectivités se trouvent face à l'indisponibilité et au prix extrêmement élevé du foncier.
Enfin, les communes, si elles veulent réellement encourager la production de logements sociaux, sont amenées à garantir les emprunts des bailleurs, ce qui peut parfois accroître leur endettement au-delà de leur budget annuel ; dans ces conditions, il est impossible d'atteindre l'objectif de 25 % - et les pénalités sont appliquées.
Les élus demandent que les résidences sociales soient exclues de la base de calcul de l'obligation légale ; que l'effort de cautionnement des communes soit pris en compte dans l'effort financier en faveur du logement social ; que la déductibilité des dépenses engagées en faveur du logement social dans le calcul du prélèvement annuel soit prolongée d'un an ; voir qu'on exempte de pénalités les communes faisant preuve d'une réelle bonne volonté. Le Gouvernement entend-il accéder à ces demandes ?
Mme Sylvia Pinel, ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité . - En Haute Savoie, la demande de logement social a augmenté de 5 % en 2014, à 18 000 demandes. C'est pourquoi ce département est classé en zone A. Des outils existent : programmes locaux de l'habitat, définition de secteurs de mixité sociale, outils d'aménagement coopérationnels, recours au droit de préemption qui peut être délégué au niveau intercommunal avec le soutien de l'établissement public foncier. Les objectifs de rattrapage peuvent aussi être atteints par la requalification du parc privé. Le dispositif est équilibré.
Au niveau national, les dépenses déduites du prélèvement SRU sont deux fois plus élevé que celui-ci... Les conditions de report de ces dépenses sont en outre largement favorables. Les communes engagées dans une démarche d'offre sociale bénéficient d'une déduction de prélèvement. Si la caution des emprunts n'est pas prise en compte dans le calcul, les communes bénéficieront de places réservées dans le programme.
Enfin, dès lors que les résidences sociales sont une offre de logement pérenne répondant à des besoins propres de la commune, je ne vois aucune raison de ne pas les prendre en compte en tant que résidences principales.
M. Jean-Claude Carle. - Merci pour ces précisions. Il faut aider ces communes à passer un cap difficile. Je souhaite que le problème soit traité dans un prochain texte législatif. Certaines communes sont découragées, il serait dommage qu'elles soient conduites à préférer payer les pénalités plutôt que construire.
Aménagement du parc Georges Valbon
Mme Evelyne Yonnet . - Depuis le comité interministériel du 14 avril 2015, le projet d'aménagement du parc Georges Valbon de la Courneuve, dans le cadre du Grand Paris, est fortement contesté ; une pétition a déjà recueilli 5 186 signatures, et des manifestations citoyennes sont organisées régulièrement par des habitants de la Seine-Saint-Denis. Le président du conseil départemental a organisé la consultation de plusieurs milliers d'habitants.
Ce projet aurait aussi un impact environnemental puisque la plus grande partie du parc, véritable « poumon vert » de la région, est classée Natura 2000. Alors que Paris est candidate aux jeux olympiques de 2024 et à la veille de la COP 21, comment négliger cet enjeu ?
À quelques jours du prochain comité interministériel sur le Grand Paris, l'inquiétude monte. L'aménagement sera-t-il limité aux abords du parc ? Quid d'une opération d'intérêt national ? Une concertation aura-t-elle lieu avec les élus et les populations concernées ?
Mme Sylvia Pinel, ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité . - Les comités interministériels d'octobre 2014 et d'avril 2015 ont précisé l'ambition et les orientations du Grand Paris. Cette ambition a guidé la mise en oeuvre du plan de mobilisation pour l'aménagement et le logement en Ile-de France.
Une concertation a été engagée au printemps 2015. La réflexion sur ce parc de 300 hectares s'inscrit dans ce cadre. Poumon vert de la région, cet espace sera préservé. Des projets d'aménagement sont développés à ses marges. Il s'agit d'améliorer aussi son accessibilité. Le projet d'aménagement des franges sera exigeant sur le plan environnemental et associera les habitants. La concertation nécessaire à la construction d'un projet commun va se poursuivre, notamment sur l'outil opérationnel de réalisation et son mode de gouvernance locale. Les modalités n'en sont pas arrêtées à ce jour.
Le Gouvernement souhaite un accompagnement renforcé de l'État et prône une démarche contractuelle pour un site qui présente un intérêt national. Des propositions en ce sens seront faites lors du comité interministériel du 15 octobre.
Mme Evelyne Yonnet. - Merci pour cette réponse qui apaisera les craintes des habitants. Une très large concertation est nécessaire.
Port de gilets jaunes de haute visibilité par les élèves usagers de transports scolaires
Mme Nicole Bonnefoy . - Le décret du 7 mai 2015 étend aux conducteurs de véhicules motorisés à deux ou trois roues l'obligation de détenir un gilet de haute visibilité, à compter du 1er janvier 2016. Il conviendrait de compléter le dispositif réglementaire pour l'étendre aux élèves empruntant les transports scolaires.
Sans aucun équipement rétro-réfléchissant, un enfant n'est, en moyenne, visible par un automobiliste qu'à partir de trente mètres, alors qu'il l'est en moyenne à plus de cent cinquante mètres lorsqu'il en est équipé. Or il faut, au minimum, vingt-cinq mètres à un véhicule roulant à cinquante kilomètres à l'heure pour s'arrêter, et près de quarante mètres sur une route humide.
Plusieurs départements ont déjà pris des initiatives en ce sens. Cette mesure serait un signal fort adressé à la jeunesse et s'inscrirait en pleine cohérence avec le plan d'action volontariste présenté par le Gouvernement, en janvier 2015, en vue de combattre l'accidentalité routière sous toutes ses formes.
Le Gouvernement entend il généraliser un tel dispositif ?
Mme Sylvia Pinel, ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité . - Merci de cette question grave, qui nous concerne tous. En 2014, 112 enfants de moins de 14 ans sont morts sur les routes, dont 20 à pied - 5 sur le trajet domicile-école.
Le transport scolaire reste le moyen de circulation le plus sûr pour se rendre à l'école. Lors des sorties pédestres, de nombreuses écoles imposent le port d'un gilet, ces initiatives doivent être encouragées. Nous privilégions la sensibilisation. Le plan du 26 janvier sur la sécurité routière en fait une priorité.
Nous avons instauré une demi-journée de sensibilisation au lycée. De même l'examen de sécurité routière au collège a été revu dans le même sens.
Chaque décès est un drame pour les familles. Poursuivons nos efforts pour éduquer les enfants aux bons comportements.
Mme Nicole Bonnefoy. - Tout en ayant noté les encouragements du Gouvernement, je regrette l'absence d'obligations nationales ; on s'en remet à l'initiative des collectivités ou des enseignants...
La séance est suspendue à midi vingt-cinq.
présidence de M. Gérard Larcher
La séance reprend à 14 h 30.