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Table des matières
Inscription dans les universités
M. Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères et du développement international
Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique
Organisme extraparlementaire (Candidatures)
Mises au point au sujet de votes
Nouvelle organisation territoriale de la République (Conclusions de la CMP)
M. René Vandierendonck, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire
M. Philippe Bas, président de la commission des lois
Vote sur le texte élaboré par la CMP
Organisme extraparlementaire (Nominations)
Ordre du jour du vendredi 17 juillet 2015
SÉANCE
du jeudi 16 juillet 2015
8e séance de la session extraordinaire 2014-2015
présidence de M. Gérard Larcher
Secrétaire : M. François Fortassin.
La séance est ouverte à 15 h 10.
Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.
Questions d'actualité
M. le président. - L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement. Je vous rappelle que la séance est retransmise en direct sur France 3 et Public Sénat.
Coût de la pollution de l'air
Mme Leila Aïchi . - Ma question s'adressait à Michel Sapin. Notre commission d'enquête a rendu hier son rapport sur le coût économique de la pollution de l'air, salué unanimement. En qualité de rapporteure, je tiens à remercier le président Jean-François Husson pour son esprit d'ouverture et de rassemblement ainsi que tous les membres de cette commission d'enquête. Par notre vote à l'unanimité, nous avons démontré que les partis étaient capables de se rassembler.
Le coût - sous-évalué - de cette pollution atteint 101,3 milliards d'euros par an, alors que la lutte contre cette pollution rapporterait 11 milliards à l'État, soit l'équivalent de la baisse des dotations aux collectivités territoriales.
Les mesures que nous portons n'ont pas vocation à taxer de manière inconsidérée les entreprises et les Français. Nous proposons le lissage sur cinq ans des 17 centimes d'écart entre le gazole et l'essence. Personnellement, je propose aussi le doublement du bonus écologique pour les voitures électriques et hybrides essence ou encore la création de zones franches écologiques, en Île-de-France par exemple.
Que de souffrances, de malformations, de maladies de Parkinson ou d'Alzheimer pourraient être évitées ! Nous réduirions aussi le chômage en créant des emplois. Le silence et la désinvolture de MM. Sapin et Macron sont insupportables. (Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste et sur quelques bancs au centre et à droite)
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche . - Rapporteur de cette commission d'enquête, vous rappelez à juste titre le coût de la pollution de l'air. La loi sur la transition énergétique justement prévoit des mesures ambitieuses pour renouveler les flottes de voitures de société, soutenir la voiture électrique avec un plan d'installation de bornes électriques ; elle crée également un certificat de la qualité de l'air.
Une taxe additionnelle de deux centimes sur le gazole compense la suppression de l'écotaxe. Une réunion décidera de sa pérennisation le 21 juillet prochain. Un rapport sera remis à la ministre de l'écologie sur la gestion des pics de pollution. Elle fera des annonces la semaine prochaine. Renforcement du principe pollueur-payeur, modifications réglementaires, toutes les pistes seront explorées, sur la base de votre rapport, qui a favorisé une véritable prise de conscience. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)
Inscription dans les universités
Mme Cécile Cukierman . - Alors que le code de l'éducation précise qu'elles doivent accueillir en premier cycle tous les titulaires du baccalauréat, les universités sont de plus en plus nombreuses à se placer dans l'illégalité. Selon l'Unef, 54 universités sur 74 sélectionnent les étudiants à l'entrée de certaines de leurs filières.
Que cette sélection se fonde sur des critères élitistes ou le tirage au sort, elle remet en cause le libre accès à une formation supérieure, lequel est un droit et non un privilège. Des milliers de jeunes sont ainsi privés de formation ou contraints à des choix par défaut.
Ces pratiques sélectives sont liées à la mise en concurrence des universités entre elles dans un contexte d'autonomie budgétaire qui signifie en réalité gestion de la pénurie et affrontement pour l'attribution des moyens. Mises en place par la droite avec la LRU de 2009, ces conditions ont été confirmées par la loi Fioraso de 2013 et aggravées par un budget en berne. Les universités sont ainsi contraintes de réduire leurs frais de fonctionnement, de diminuer le nombre de formations et d'enseignants.
Liée à l'incapacité de l'université de faire réussir tous les étudiants, cette sélection par l'échec montre dans quelle impasse se trouve la démocratisation de l'enseignement supérieur. Le nombre de demandes d'inscription à l'université croît avec celui des bacheliers professionnels. Si les universités n'ont pas les moyens de répondre à l'objectif de massification, elles n'ont pas non plus les moyens d'assurer l'objectif de démocratisation.
À l'heure des négociations budgétaires, allez-vous enfin consacrer les moyens budgétaires nécessaires aux universités pour qu'elles permettent à tous et à toutes de s'inscrire dans la filière de leur choix et d'y réussir. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, républicain et citoyen)
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche . - Cette question est l'occasion de rappeler que l'inscription dans les universités est libre, chacun a le choix de sa filière. Notre objectif est 50 % d'une classe d'âge diplômée d'une licence.
C'est vrai, nous faisons face à une hausse démographique : trente-huit mille étudiants de plus à la rentrée précédente, davantage à la rentrée prochaine. Ce n'est pas un trop plein d'étudiants, la France a besoin de plus de diplômés. C'est pourquoi nous soutenons les universités : une spécialisation reportée à la fin du premier semestre pour permettre une meilleure orientation ; hausse de l'encadrement par mille postes supplémentaires par an.
Cette enquête de l'Unef doit être prise au sérieux : nous ferons des contrôles sur place afin de mettre fin à ces pratiques illégales.
Aux futurs bacheliers inquiets de leur sort, je dis que le logiciel Admission Post Bac (APB) fonctionnera jusqu'au 15 septembre 2015 - j'adresserai une circulaire aux recteurs pour régler les cas individuels pendants à la rentrée. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, républicain et citoyen et du groupe socialiste et républicain)
Crise agricole (I)
Mme Odette Herviaux . - Ce matin, à l'initiative du président Larcher, nous avons abordé l'ensemble des difficultés de la filière de l'élevage français, avec tous les acteurs concernés. Nos travaux ont été de haute tenue. (On renchérit à droite)
La crise ne saurait toutefois excuser les actions inacceptables qu'ont déployées certains. Le désespoir n'excuse pas tout, je le dis et le répéterai. Aucune solution ne naît dans la violence, dans la surenchère politicienne, dans la démagogie et les slogans incantatoires. La situation est en fait bien trop grave pour stigmatiser qui que ce soit.
Nous avons identifié ce matin de nombreuses solutions. J'espère que la présence des caméras cet après-midi ne favorisera pas les jeux de rôle.
M. Ladislas Poniatowski. - C'est plus fort que vous !
Mme Odette Herviaux. - Tous doivent assumer leurs responsabilités, consommateurs, producteurs, distributeurs et élus même.
Monsieur le ministre, selon quel calendrier, national et européen, accélérerez-vous la mise en oeuvre de mesures qu'attendent nos éleveurs ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)
M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement . - La crise de l'élevage, notamment celle du lait, est internationale. Mon homologue mexicain me le confirmait ce midi. La réunion de ce matin a été fructueuse. L'accent doit être mis sur les exploitants. Les cellules départementales sont en place depuis le 18 février.
M. Jean-Claude Lenoir. - Pas partout, je l'ai constaté !
M. Stéphane Le Foll, ministre. - Elles traiteront les difficultés des éleveurs grâce à l'effacement des cotisations de la MSA et au fonds d'allègement des charges.
Sur les prix, nous avons engagé les négociations sur le lait dès le début de l'année afin de ne pas descendre en dessous de 300 euros la tonne, avec pour objectif d'atteindre 340 euros. À nouveau, c'est une question qui dépasse nos frontières, même européennes : la principale coopérative néozélandaise va supprimer entre 15 et 20 000 emplois.
Sur le porc, mon objectif de redressement des prix est de 1,4 euro par kilogramme. Ce matin, le cadran affichait 1,39 euro par kilogramme. On y est presque ! Pour atteindre nos buts, l'implication de tous est indispensable. Depuis la table ronde du 17 juin, chacun a pris ses responsabilités. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)
Crise agricole (II)
Mme Françoise Gatel . - S'installent la désespérance et la révolte de nos agriculteurs asphyxiés par une crise conjoncturelle liée à la contrainte des marchés renforcée par la sécheresse.
Notre agriculture est un secteur d'excellence, envié à l'étranger : les Chinois n'ont-ils pas investi dans une usine de poudre de lait à Carhaix en Bretagne ? Pourtant ce secteur va mal : 400 éleveurs bretons sont au bord de la faillite. En Ille-et-Vilaine, une grande banque a dû dégager 10 millions d'euros d'encours en urgence. La maison brûle, monsieur le ministre. Il faut aider les agriculteurs à renforcer leur trésorerie, aider les jeunes à s'installer, valoriser la viande française, améliorer notre compétitivité, limiter l'incontinence normative. Ces agriculteurs qui ont su faire face après-guerre doivent être aidés. Pouvons-nous continuer à imposer des mesures coercitives aux éleveurs ? L'agriculture est-elle une priorité pour le Gouvernement ? Il y a enfin une forme d'indécence à défendre le bien-être animal alors que les éleveurs n'ont pas toujours de quoi vivre.
M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement . - L'agriculture est-elle une priorité pour la France ? Vous oubliez que, grâce au président de la République, le budget européen de l'agriculture qui devait baisser de 20 %, a été préservé, ainsi que la PAC.
« Incontinence normative » ? Qu'est-ce qui serait aujourd'hui une surtransposition de normes ? Où avez-vous vu des normes supplémentaires ? Au contraire, une procédure d'enregistrement a été mise en place pour les installations. La loi Macron facilite l'installation des jeunes qui n'ont plus à avoir une autorisation préalable. Nous cherchons sans cesse à limiter les normes.
Le bien-être animal ? Les consommateurs y sont attentifs et nous avons toujours défendu l'excellence de nos filières. Nos agriculteurs ont été en pointe sur ce sujet. Pas de faux procès, l'agriculture est une priorité, et le restera ! Passons d'une politique coercitive à une politique incitative. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)
Crise agricole (III)
M. Gérard Bailly . - Les agriculteurs sont inquiets. L'élevage traverse une crise dramatique. Je veux vous interroger sur les accords conclus entre les grandes et moyennes surfaces, d'une part, Auchan et Système U, d'autre part, Casino et Intermarché, auxquels il convient d'ajouter l'alliance annoncée le 5 juin dernier, entre le groupe Leclerc et le géant allemand de la distribution Rewe. Ces accords ne paraissent pas poser problème à l'Autorité de la concurrence, qui inflige 15,2 millions d'euros de sanction à 21 abatteurs de poulets pour entente, mais ne voit rien à dire à ce quasi-monopole des centrales d'achats qui tiennent 90 % du marché. Existerait-il deux poids, deux mesures ?
Voix à droite. - Sans doute !
M. Gérard Bailly. - Depuis dix ans, nous avons perdu 44 000 emplois dans le secteur agroalimentaire. Répondons à la détresse des producteurs ! Comment mettre fin à cette course aux prix toujours plus bas qui fragilise nos producteurs et nos entreprises de transformation et menace à terme notre sécurité alimentaire ? (Applaudissements au centre et à droite)
M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement . - Vous avez oublié de rappeler que des sanctions ont été prises à l'encontre des distributeurs, dont l'une de soixante millions d'euros, frappant l'un des plus grands, qui défraie souvent la chronique.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. - Elles sont toujours plus basses !
M. Stéphane Le Foll, ministre. - La loi de modernisation de l'économie que vous avez votée et qui est une bonne loi, a renforcé la grande distribution. Vous le découvrez aujourd'hui ? La loi Hamon modifie ce rapport de force entre la grande distribution et la transformation. Mettons-nous tous autour de la table pour atteindre nos objectifs de prix. Les prix d'ailleurs ont commencé à augmenter légèrement. Sur ce sujet, on ne s'en sortira que collectivement.
Arrêtons de nous renvoyer réciproquement les responsabilités. La responsabilité, elle est d'abord collective ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)
M. Gérard Bailly. - Soit, mais vous venez de mettre en cause la loi de modernisation de l'agriculture !
Crise agricole (IV)
M. Jacques Mézard . - Nous connaissons tous les difficultés de nos exploitants agricoles. Les crises, cycliques, sont de plus en plus mal vécues par nos agriculteurs. Les coûts de production sont supérieurs aux prix de vente ; personne ne peut s'en satisfaire. (On approuve à droite)
Producteurs, consommateurs, distributeurs ne sont pas placés sur un pied d'égalité. Les plus grandes fortunes sont souvent à rechercher dans la dernière catégorie, ce que nos concitoyens ne sauraient admettre.
Une ferme qui s'éteint dans le Cantal, c'est la vie qui s'en va.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. - Très bien !
M. Jacques Mézard. - Nous avons besoin de réponses d'urgence, de moyen et de long terme. L'étiquetage d'abord, pour mieux préserver notre production de viande. Ensuite, les cellules de crise que nous voyons peu sur le terrain, et dont les réponses sont attendues. Le problème de la contractualisation doit être également traité : il faut impérativement tenir compte des coûts. Enfin, pouvez-vous accélérer les mesures prises dans le cadre de la PAC ? Nous en avons besoin. (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE, au centre et à droite ; M. Simon Sutour applaudit également)
M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement . - J'ai été élu d'une commune de 250 habitants dans le canton de Loué. Elle n'est pas dans le Cantal, certes, mais je connais bien les difficultés du secteur.
On peut continuer à stigmatiser la grande distribution ; on pourrait aussi argumenter sur l'impôt de solidarité sur la fortune. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)
M. Ladislas Poniatowski. - Vous bottez en touche !
M. Stéphane Le Foll, ministre. - Mais je préfère trouver des compromis avec tous les acteurs.
Les cellules de crise sont en place depuis le 18 février (On le conteste à droite) Ne dites pas non, la parole de l'État est engagée ! (Exclamations sarcastiques à droite)
Nous mobilisons 25 millions d'euros, pour l'allègement des cotisations RSA et le fonds d'allègement des charges pour les agriculteurs. Les moyens seront augmentés, notamment pour les jeunes et ceux qui ont investi et risquent de perdre leurs moyens de production.
Il faudra aussi travailler à moyen et long terme sur l'étiquetage par exemple. Le consensus fait pour l'heure défaut en Europe, mais nous agirons pour segmenter notre production et affiner les indications d'origine ; le label « viande de France » va dans ce sens. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)
Accord sur l'Iran
Mme Bariza Khiari . - Pendant douze ans la crise du nucléaire iranien a remis en cause le traité de non-prolifération. Les sanctions ont été inefficaces mais ont pénalisé le peuple iranien. L'accord signé est solide. Je ne partageais initialement pas votre intransigeance, monsieur le ministre, mais cet accord robuste conforte votre stratégie et marque une magnifique victoire diplomatique. Vous avez toujours exigé la transparence, l'embargo sur les armes conventionnelles, la levée progressive des sanctions, qui sera suspendue si les Iraniens ne tiennent pas leurs engagements.
Certains Républicains américains, ou les tenants de la ligne « dure » incarnée par Benyamin Netanyahou restent sceptiques, mais cet accord est porteur d'espoir. Quelles seront ses conséquences sur l'Iran, nos relations bilatérales, l'équilibre international et le Moyen-Orient ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)
M. Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères et du développement international . - Plutôt qu'intransigeance, avec le président de la République, nous avons choisi la voie de la fermeté constructive. Il s'agissait de savoir comment empêcher l'Iran, qui a le droit d'accéder au nucléaire civil, de disposer de l'arme nucléaire. Les questions posées étaient précises, tout autant les réponses que nous avons obtenues : le nombre des centrifugeuses est passé de 20 000 à 5 060, le stock d'uranium de plusieurs tonnes à 300 kg, et le taux d'enrichissement abaissé de 20 % à 3,67 %.
Il fallait veiller à ce que l'usine d'Arak ne se transforme pas en centre de production de plutonium à usage militaire.
Si cet accord n'avait pas été robuste, rien n'aurait empêché d'autres pays environnants, comme l'Arabie saoudite, la Turquie, l'Égypte de réclamer ensuite le droit à disposer de l'arme nucléaire. Notre fermeté était nécessaire.
À court terme, nous nous emploierons à renouer avec l'Iran - je m'y rendrai prochainement. À moyen terme, j'espère que ce pays tiendra ses engagements. Je me garderai bien de faire des pronostics. Nous jugerons sa politique nucléaire sur pièces. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)
Crise agricole (V)
M. Michel Raison . - (Applaudissements sur les bancs de groupe Les Républicains) Ma question est grave. Je vous la pose avec sérénité, j'aimerais une réponse sur le même ton. Vous n'êtes pas la cause de la crise, vous en êtes néanmoins le médecin. Les paysans sont en souffrance, vous le savez. Ils doivent être entendus, dans toutes leurs souffrances et au-delà des difficultés conjoncturelles et répétées. Le moral d'un chef d'entreprise est important, il faut le soutenir.
Les cellules de crise sont une bonne chose. Il y a cependant dû y avoir des problèmes d'internet et de communication car dans mon département, il n'y a pas de cellule. (On renchérit à droite)
Puisque le président de la République a assuré le 14 juillet qu'il était désormais à la tête de l'Europe, (Protestations à gauche) qu'il convainque les pays du Nord de la nécessité de redresser la situation du secteur ! (Applaudissements au centre et à droite)
M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement . - Je vous ferai une réponse sereine, comme vous le souhaitiez, même si votre conclusion était quelque peu ironique.
Député européen, j'ai voté contre la suppression des quotas laitiers en 2008. Cela m'a valu d'ailleurs bien des critiques à l'époque...
M. Jacques Mézard. - Rappel utile !
M. Stéphane Le Foll, ministre. - Depuis 2012, j'ai demandé qu'on inscrive à l'ordre du jour des conseils la gestion post-quotas et la régulation du marché laitier. En vain, Allemagne, Pays-Bas, Irlande, Danemark, chacun espérait vendre du lait en poudre aux Chinois. Sans la coordination que je réclamais, chacun s'est mis à produire. Le résultat ne s'est pas fait attendre, en dépit de mes mises en garde répétées à mes homologues : une offre et une demande saturées. Je propose une hausse des prix d'intervention. C'est ma proposition. Si vous y souscrivez, aidez-moi donc à la défendre en Europe, auprès des parlements nationaux en particulier ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain et sur quelques bancs à droite)
M. Michel Raison. - D'accord.
Crise agricole (VI)
M. Daniel Gremillet . - C'est avec la même solennité que nos collègues que je veux m'adresser au ministre de l'agriculture. Le Sénat des territoires s'est montré constructif.
L'agriculture est un enjeu stratégique pour l'économie locale. Tous les jours, une exploitation porcine ferme ses portes, le plus souvent dans le silence.
J'ai fait partie de ceux qui se sont battus pour la PAC ; vous n'avez fait que poursuivre l'oeuvre des gouvernements précédents, monsieur le ministre et je vous en remercie. Un bon budget d'accord, mais cela ne suffit pas. Il y a les chiffres et il y a la réalité de la vie. Reste que l'embargo russe frappe les seuls éleveurs et producteurs de fruits et de légumes. Les OGM, nous y avons renoncé. La France, qui a la chance d'avoir de l'eau, souffre des ravages de la sécheresse.
Comment est-ce possible ? Comment expliquer que notre puissance agroalimentaire décline en Europe ?
Nous avons longuement parlé des souffrances du peuple grec hier et de l'indispensable solidarité. D'autres souffrances, plus proches, méritent une égale attention. Notre élevage devra-t-il se contenter d'un strapontin dans les instances de négociations européennes ? (Applaudissements au centre et à droite)
M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement . - Non, en aucun cas ! Notre décrochage ne date pas d'aujourd'hui, mais de 2008-2009. (Voix à droite : « Endettement ! »)
Nous avons quelques années de retard à rattraper. Cela prend du temps. Avec la FNSEA et les professionnels, nous avons dégagé 200 millions d'euros pour combler notre manque d'investissement, pour assurer la place de notre agriculture en Europe et dans le monde. Oui, il faut retrouver le chemin de l'investissement !
Quant aux OGM, personne n'a jamais démontré qu'ils étaient source de compétitivité. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain et du groupe écologiste)
Sur la retenue de l'eau, je l'ai dit dix fois aux écologistes : il ne s'agit pas d'irriguer le maïs, mais de maintenir l'élevage et les pâturages en France ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)
Loin de moi l'idée de considérer l'élevage de France comme un strapontin, bien au contraire. Je me suis battu pour le couplage des aides et continuerai à le faire pour défendre notre agriculture de demain ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain et du groupe RDSE ; MM. Michel Le Scouarnec, Yves Détraigne et Jacques Legendre applaudissent aussi)
Loi NOTRe
Mme Stéphanie Riocreux . - Dans quelques instants, le Sénat se prononcera sur la loi NOTRe, étape fondamentale pour notre démocratie locale. La CMP est parvenue à un texte équilibré, qui doit beaucoup à la mobilisation et au rassemblement de tous les élus locaux, ainsi qu'à la légitimité de leurs demandes...
Mme Jacqueline Gourault. - Très bien !
Mme Stéphanie Riocreux. - Ce texte clarifie les responsabilités. Si l'objectif était simple à formuler, sa réalisation était plus complexe. Les intercommunalités, dont le seuil est abaissé à 15 000 habitants, seront renforcées, en lien avec les départements. (M. Pierre-Yves Collombat s'exclame) Les communes, dans une logique de proximité, seront seules titulaires de la clause de compétence générale, tandis que les régions seront confortées dans leur rôle de stratège économique local. Comment le Gouvernement accompagnera-t-il les territoires dans la mise en oeuvre de la réforme ? (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)
Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique . - Permettez-moi de saluer tout d'abord la mémoire de Jean Germain, très attaché à cette réforme, dont vous reprenez le flambeau.
Le rapport de MM. Krattinger et Raffarin (M. Pierre-Yves Collombat s'exclame) avait conclu qu'il valait mieux spécialiser chaque échelon de notre territoire plutôt que procéder à de nouvelles décentralisations de compétences.
L'action publique doit rester unique, qu'elle soit conduite par l'État ou par les collectivités territoriales. Ses organes travaillent ensemble. Ainsi, aujourd'hui, les régions se tiennent aux côtés de l'État pour soutenir les agriculteurs.
Deux options étaient possibles : la fusion région/département, ou la création de grandes régions et la spécialisation des départements sur la solidarité, que nous avons retenue. Le bloc communal sera aussi renforcé. Les petites communes - les 29 000 ayant moins de 1 000 habitants - ont besoin des intercommunalités pour continuer à offrir des services de qualité à leurs habitants.
Comme le président Larcher l'a dit, l'Assemblée nationale et le Sénat sont parvenus à un accord inédit. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)
M. le président. - Je vais suspendre la séance. Elle sera reprise à 16 h 20 pour l'examen des conclusions de la commission mixte paritaire sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République.
La séance est suspendue à 16 h 5.
présidence de Mme Jacqueline Gourault, vice-présidente
La séance reprend à 16 h 20.
Organisme extraparlementaire (Candidatures)
Mme la présidente. - M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation de sénateurs appelés à siéger au sein du Haut Comité de la qualité de service dans les transports.
La commission du développement durable a fait connaître qu'elle propose les candidatures de M. Jean-Jacques Filleul pour siéger comme membre titulaire et M. Jean-Yves Roux pour siéger comme membre suppléant au sein de cet organisme.
Ces candidatures ont été publiées et seront ratifiées, conformément à l'article 9 du Règlement, s'il n'y a pas d'oppositions à l'expiration du délai d'une heure.
Accord en CMP
Mme la présidente. - J'informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi ratifiant l'ordonnance du 26 septembre 2014 relative à la mise en accessibilité des établissements recevant du public, des transports publics, des bâtiments d'habitation et de la voirie pour les personnes handicapées et visant à favoriser l'accès au service civique pour les jeunes en situation de handicap est parvenue à l'adoption d'un texte commun.
Mises au point au sujet de votes
M. Jackie Pierre. - À l'occasion du scrutin sur l'ensemble du texte de transition énergétique, Claude Malhuret a été considéré comme votant pour alors qu'il souhaitait s'abstenir. Hier soir, je voulais également m'abstenir, et non voter pour, lors du scrutin intervenu à l'issue du débat sur l'accord avec la Grèce.
Mme la présidente. - Je vous donne acte de ces mises au point. Elles seront publiées au Journal officiel et figureront dans l'analyse politique du scrutin.
Nouvelle organisation territoriale de la République (Conclusions de la CMP)
Mme la présidente. - L'ordre du jour appelle l'examen des conclusions de la commission mixte paritaire chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République.
Discussion générale
M. René Vandierendonck, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire . - Nous voilà parvenus au terme de l'examen du projet de loi NOTRe, déposé sur le bureau du Sénat le 18 juin 2014. Son principal objet était de clarifier les compétences des collectivités territoriales. Avec Jean-Jacques Hyest, nous avons très vite participé, avec l'ADF, l'AMF et l'ARF, aux réunions organisées sous l'égide du président du Sénat, avec le souci, non de révolutionner la répartition des compétences mais de clarifier, de rationaliser, d'optimiser la mise en oeuvre des politiques publiques. Nous nous y sommes attelés avec constance. Le succès de la CMP doit également beaucoup au Premier ministre et aux membres du Gouvernement ; je ne connais pas beaucoup d'exemples d'un Premier ministre venant devant le Sénat lui demander de se saisir d'un texte... Les échanges entre Olivier Dussopt et Jean-Jacques Hyest ont été fructueux. Gide disait : « Il est bon de suivre sa pente pourvu que ce soit en montant »...
La région devient pleinement stratège en matière économique. Les Schémas régionaux d'aménagement et de développement durable du territoire (SRADDT) et les Stratégies régionales de développement économique, d'innovation et d'internationalisation (SRDEII) n'étaient pas opposables, le Sénat s'est beaucoup battu pour leur conférer cette portée pratique. À quoi s'ajoute la possibilité de contractualiser leur mise en oeuvre avec les EPCI. La question a été réglée de belle manière.
De nombreux rapports, dont celui de Jean-Jack Queyranne, avaient insisté sur la nécessité d'unifier les compétences économiques des régions. Le cap a été tenu d'une rationalisation des aides économiques. Il est heureux qu'une majorité transpartisane se soit dégagée sur ces questions dès l'examen de la loi Maptam.
Une déception personnelle toutefois : ce n'est pas un texte de décentralisation.
Mme Isabelle Debré. - Eh non !
M. Bruno Sido. - Pas du tout !
M. René Vandierendonck, rapporteur. - Sur le Service public de l'emploi, c'était pourtant envisageable ; ce l'était de même sur l'association des régions à la définition de la carte de l'enseignement supérieur. Nous avons toutefois obtenu de haute lutte la mise en place d'un système qui obéit encore à la délégation. Nous tâcherons de faire vivre le dispositif et d'en tirer les leçons.
Les départements ont évité la dévitalisation dont personne ici ne voulait. L'équilibre trouvé n'est pas parfait. Mais sur les transports scolaires et les ports intérieurs, les questions ont été posées à qui de droit... Le Gouvernement a avancé sur les routes et les collèges. On verra que la solidarité territoriale, la période électorale passée, contient en germe davantage de latitude d'action que la fameuse clause de compétence générale...
Je remercie le Gouvernement et le Premier ministre d'avoir partagé nos vues sur les trois chiffons rouges du texte : l'élection au scrutin universel direct des conseillers communautaires, le Haut Conseil des territoires, le retour sur les dispositions de la loi Alur relatives aux PLU.
Je me réjouis du résultat obtenu en CMP, à mettre au crédit des remarquables rapporteurs qu'ont été Olivier Dussopt et Jean-Jacques Hyest. (Applaudissements)
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire . - Initialement, les intentions du Gouvernement étaient évidentes : disparition à terme des départements, montée en puissance des intercommunalités visant à vider de leur substance les communes.
M. Pierre-Yves Collombat. - C'est toujours le cas !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. - Certains, j'en veux pour preuve certaines déclarations récentes, n'ont pas abdiqué...
Le Sénat a pris appui sur les États généraux de la démocratie locale et le rapport Raffarin-Krattinger qu'il avait approuvé unanimement. Sa responsabilité institutionnelle, son devoir a été de clarifier les compétences des différents niveaux de collectivités.
À la région la compétence économique, la formation, l'aménagement du territoire, les transports - nous aurions aimé plus de décentralisation de l'enseignement supérieur et de l'accompagnement vers l'emploi. Au département la proximité et pas seulement les compétences sociales, les routes, les collèges, la solidarité territoriale. Le Sénat a été largement entendu.
Sur le bloc communes-intercommunalités, la position du Sénat est constante : oui à l'intercommunalité volontaire, non à la supra-communalité imposée. La commune reste le socle de notre démocratie. Exit, donc, la folle idée de faire élire au suffrage universel direct les conseillers communautaires. Le Sénat, pas plus que sur les PLUI, n'aurait pu transiger sur ce point.
L'objectif premier du texte était de diviser par deux le nombre d'intercommunalités sans tenir compte de la diversité des territoires ; l'Assemblée nationale s'accrochait au seuil de 20 000 habitants ; pour calmer la colère des élus, des dérogations ont été consenties, que le Sénat avait intégrées à ses réflexions. Le seuil de 15 000 retenu par la CMP est plus acceptable. Cinquante-sept départements sont de fait exclus, et la moitié des communes de montagne plutôt que leur totalité.
À titre personnel, je regrette que le cas des départements comportant une zone rurale étendue et une partie agglomérée concentrée n'ait pas été traité. Il appartiendra désormais à la sagesse des CDCI et des préfets de tenir compte des spécificités locales. Le seuil de 12 000 a été retenu pour les intercommunalités récentes.
Une grande improvisation a régné au cours des lectures successives. Nous souhaitions nous aussi une diminution du nombre de syndicats intercommunaux. Une évolution est nécessaire. L'horizon de 2020 est raisonnable pour rationaliser les choses en ce qui concerne l'eau et l'assainissement pour les communautés de communes et les communautés d'agglomération.
Nous avons pu reprendre certaines des dispositions facilitant le fonctionnement des collectivités et figurant dans la proposition de loi de M. Doligé.
La dernière version des dispositions relatives au Grand Paris reste décevante. La position du Sénat a été balayée pour des raisons qui ne tiennent guère à l'intérêt général... D'autant qu'on trouve dans le texte une modalité inouïe de désignation des représentants de Paris au conseil de la métropole. Je comprends la colère de nos collègues de Paris et de la petite couronne.
Le Sénat a-t-il rempli son rôle constitutionnel ? Oui. Sans un accord en CMP, les dispositions dont nous ne voulions à aucun prix auraient été votées. Nous espérons encore une grande loi de décentralisation...
La sagesse a prévalu grâce au président de la commission des lois et au président du Sénat, qui s'est fortement engagé. Pour notre institution, pour l'avenir de nos collectivités, je vous invite à approuver ce texte, sans enthousiasme, mais en responsabilité. (Applaudissements)
M. Philippe Bas, président de la commission des lois . - Je veux d'abord saluer le travail remarquable de René Vandierendonck et Jean-Jacques Hyest. (Applaudissements) Ils ont travaillé non pour le compromis à tout prix, mais dans la quête incessante du meilleur pour nos concitoyens et nos territoires. C'est cela, l'esprit sénatorial : la transposition au plan national de la démocratie municipale, l'écoute, le respect, la sincérité.
Nous revenons de très loin... Notre souci a été de remettre cette réforme d'aplomb. Souvenons-nous du souhait originel du Premier ministre : supprimer les départements ! Constatant qu'il n'aurait pas de majorité pour réviser la Constitution, il a dû y renoncer - mais le texte soumis au Conseil des ministres le 18 juin 2014 portait encore la trace cette ambition...
Au cours de l'été 2014, nous avons entendu tout et son contraire : création de fédérations d'intercommunalités, maintien des départements ruraux, reprise par les CAF des compétences sociales des départements... Dans ce concours Lépine de la réforme des collectivités territoriales, personne n'y comprenait plus rien... Il est heureux que le président Larcher ait demandé au Premier ministre de venir clarifier sa position devant le Sénat. Ce qui a été fait le 28 octobre. Le débat pouvait alors s'engager, débarrassé des oppositions de principe.
Nous avons cheminé avec nos deux rapporteurs de sensibilités différentes pour approcher un compromis. Nous avons refusé l'évaporation des départements vers le haut, les régions - qui doivent se consacrer à la stratégie - comme leur aspiration vers le bas, les intercommunalités, qui ne peuvent assurer la solidarité territoriale. Chacun ayant renoncé à ce double mouvement, un accord devenait possible.
Le texte de la CMP n'a rien à voir avec celui présenté en Conseil des ministres le 18 juin 2014. Les départements gèreront les politiques de solidarité, mais aussi les routes, les collèges, le tourisme, le numérique, les ports s'ils le souhaitent... En Normandie, l'investissement est à 60 % le fait des départements, à 40 % celui des régions.
Les régions portent encore la marque de la réforme de 1973. Même élargies, elles restent faibles. Faire passer les grandes régions pour une innovation puissante est une supercherie tant qu'il n'y aura pas de vraie décentralisation. Quoi qu'il en soit, le pire a été évité, et beaucoup reste à faire pour bâtir des régions non seulement de taille mais de puissance européenne. À quoi sert une grande région sans moyens ? Les projets du Gouvernement inquiètent, qui consistent pour l'heure à déshabiller Pierre pour habiller Paul... S'il persiste à vouloir attribuer une part importante de la CVAE aux régions, il trouvera le Sénat sur son chemin.
Nous nous réjouissons que le seuil de 20 000 habitants pour les intercommunalités ait été abandonné ainsi que l'élection des conseillers communautaires au suffrage universel direct. Le Haut Conseil des territoires n'avait aucune raison d'être, le Sénat représente les collectivités territoriales... L'établissement des PLUI contre la volonté des communes ne sera pas facilité.
Le cadre du Grand Paris est mal bâti. L'ouvrage devra être mis une troisième fois sur le métier. La disposition anti-NKM n'a pu être écartée ; le Gouvernement se serait honoré à déposer un amendement pour la faire disparaître avant que le Conseil constitutionnel ne s'en occupe... (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Je vous invite à adopter un texte heureusement rattrapé. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)
M. André Vallini, secrétaire d'État auprès de la ministre de la décentralisation et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale . - Vous examinez ce texte après la réforme des régions et la loi Maptam. Ce chantier en trois volets a fait l'objet de nombreuses controverses, dans un pays où l'on est enclin à entraver les réformes qu'on a réclamées... La réalité du travail parlementaire a conduit à scinder la réforme, mais tout était sur la table dès le départ. Aurions-nous fait le choix inverse qu'on nous l'aurait également reproché...
Deux ans pour mener à bien trois réformes : qu'aurait apporté un délai supplémentaire ? Les départementalistes et les régionalistes auraient-ils changé de perspectives ? Les rapports successifs plaidaient tous pour une clarification des compétences et un renforcement des métropoles et des régions : c'est ce que font ces trois textes.
Première exigence : la clarté et la démocratie. C'est le sens de l'article 15 de la Déclaration des droits de l'homme de 1789. Il fallait clarifier des compétences dont la répartition n'était plus lisible par nos concitoyens. Nous supprimons la clause de compétence générale des régions et des départements, constituons trois grands blocs de compétences - la proximité et les services publics de la vie quotidienne au bloc communal, les solidarités au département, le développement économique à la région.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. - C'était déjà le sens de la réforme de 2010 !
M. André Vallini, secrétaire d'État. - Autre exigence : la compétitivité, avec des régions plus fortes, moteurs du développement économique, pour un plus grand dynamisme et une plus grande attractivité de tous les territoires. Les départements sont confirmés dans leur rôle de garant des solidarités sociales, confortés dans celui de garant des solidarités territoriales. Le Premier ministre l'a dit en octobre, quand régions et intercommunalités auront pris une nouvelle dimension, la question se posera d'une évolution des départements, éventuellement différenciée. La France n'a plus besoin d'être administrée d'une façon uniforme.
Reste la question des économies. Elles n'apparaîtront certes pas en six mois, mais elles sont certaines sur le long terme : suppression des doublons, rationalisation de la dépense publique locale, économies d'échelle.
M. Pierre-Yves Collombat. - On se retrouvera dans dix ans !
M. André Vallini, secrétaire d'État. - Nous dénonçons tous le court-termisme de la vie politique... la réforme produira ses effets sur une décennie au moins.
M. Pierre-Yves Collombat. - Nous voici rassurés !
M. André Vallini, secrétaire d'État. - Le Grand Soir territorial n'est pas plus réaliste que le Grand Soir fiscal. Quand on a la volonté et l'audace de réformer, on rencontre toujours des résistances, même au Parlement... Il ne faut pas s'en affliger mais réformer progressivement, avancer avec ténacité dans la bonne direction.
C'est ce que nous faisons collectivement, administrations, Parlement. Le texte a bénéficié d'une contribution essentielle du Sénat, grâce à vos deux rapporteurs, René Vandierendonck et Jean-Jacques Hyest. Votre vote sera une manière de saluer leur travail. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)
Mme Marie-Christine Blandin . - Nous saluons la philosophie et le sang-froid des ministres, l'écoute et la pédagogie du président de la commission des lois.
Nous nous réjouissons qu'un accord ait été trouvé, mais regrettons qu'il affaiblisse un texte déjà en recul en refusant de renforcer le couple région-intercommunalité. La droite sénatoriale n'a pas permis la clarification des compétences. L'occasion de faire progresser la démocratie locale a été manquée, c'est dommage. Certaines de nos propositions n'ont pas prospéré, comme le droit d'expérimentation pour les régions ou l'adaptation législative.
Nous regrettons surtout la suppression de l'élection des conseillers communautaires au suffrage direct, seule solution pour assurer l'égalité entre les citoyens et renforcer le débat démocratique autour des enjeux qui touchent vraiment nos concitoyens.
Nous attendons d'examiner la question des moyens dans le cadre de la prochaine loi de finances.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. - Vous ne serez pas déçus !
Mme Marie-Christine Blandin. - Nous regrettons également l'absence de débat sur les inégalités au sein des grandes régions.
L'opposabilité des schémas régionaux est en revanche une vraie avancée, comme l'intégration aux SRADDT de la biodiversité. Enfin, nous saluons le choix de ne pas ranger les collèges dans la même escarcelle que les lycées.
Le groupe écologiste s'abstiendra. Sa forte ambition décentralisatrice, moyens à l'appui, n'ayant pas trouvé son compte dans ce texte, nous ne pouvons le faire... nôtre. (Sourires)
M. Christian Favier . - À l'issue de la CMP et contre toute attente, la droite sénatoriale, en soutien de la majorité gouvernementale, a remis en cause trente ans de décentralisation. Que sont devenus les discours enflammés sur les communes et les départements ? Quelques heures ont suffi pour aboutir à un accord dans le dos des citoyens.
Le texte de la CMP est un bien mauvais signal pour notre République unitaire et décentralisée. Le regroupement autoritaire des communes, qui est en cours depuis des années, encouragé par les préfets, vide la démocratie territoriale de sa substance. La droite a capitulé en rase campagne sur le seuil de 15 000 habitants - 700 intercommunalités, des milliers de communes vont disparaître. L'objectif est toujours le même : éloigner les citoyens des centres de décision, faire des économies, ouvrir de nouveaux marchés aux grands groupes du CAC 40. Or l'échelon communal est la base irremplaçable de notre démocratie, il sort affaibli de dix ans de réformes chaotiques.
Après vous être attaqués aux communes, vous menacez les départements, comme le souhaitait la commission Balladur. Peu de collectivités territoriales revendiquaient la reprise des compétences sociales des départements, auxquels l'État doit 7 milliards... Même les transports scolaires leur seront retirés au profit des régions : belle pagaille et beau gâchis financier en perspective.
Une fois les conditions de leur affaiblissement réunies dans le périmètre des métropoles, il sera facile de les rayer de la carte - pour complaire à Bruxelles.
Les régions n'échapperont pas à la nouvelle tutelle de l'État avec le contrôle d'opportunité des préfets sur leurs schémas de développement. Ceux-ci, opposables, concrétisent la mise sous tutelle d'une collectivité territoriale par une autre.
Le processus de décentralisation est rompu. Nous ne pouvons l'accepter. Alors que la loi de 2010 sur l'intercommunalité rentre tout juste en vigueur, que l'on a redécoupé les régions en très grands ensembles, que de nouveaux exécutifs vont être élus, le transfert des nouvelles compétences sera source de nombreux dysfonctionnements.
Le groupe CRC votera contre ce texte - changements de pied du Gouvernement et navigation à vue prouvent l'absence de vision cohérente d'une décentralisation ambitieuse, porteuse de projets pour les territoires. Nous le voterons d'autant moins que les dotations aux collectivités territoriales baissent de 28 milliards d'euros et que les régions, avec votre soutien, madame la ministre, revendiquent 50 % de la CVAE. Nous appelons élus locaux et citoyens à la mise en place d'une vraie décentralisation dans le cadre d'une VIe République. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, républicain et citoyen ; M. Pierre-Yves Collombat applaudit également)
M. Jacques Mézard . - Aucun membre du groupe RDSE ne votera ce texte. Non pour nous donner le beau rôle mais tout simplement parce qu'il est mauvais. Nous ne sommes pas contre les réformes : nous en votons souvent et en sollicitons parfois. Ce texte forme un tout avec la loi sur le redécoupage des régions et la loi Maptam.
Je salue le travail de nos rapporteurs qui ont fait preuve d'un état d'esprit constructif pour parvenir à un armistice. Armistice, le terme est approprié car le combat n'est pas terminé : bientôt se reposera la question de la suppression des communes ou des départements.
Le texte du 19 juin 2014 n'était pas conforme aux engagements du président de la République, qui avait souhaité préserver les départements et les ressources des collectivités territoriales, et n'avait jamais évoqué une fusion des régions. D'où des incohérences. Une réforme pour réussir doit être consensuelle et affichée clairement.
Vous prétendiez initialement que la fusion des régions ferait économiser 20 milliards d'euros. Aujourd'hui vous dites qu'on évaluera les choses dans dix ans. Les économies seront réalisées pour l'État, mais pas pour les collectivités.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. - C'est vrai.
M. Jacques Mézard. - Nous avons évité le pire, nous dit-on. Mais le pire en question, ce n'était que des provocations agitées comme des chiffons rouges que sont la création d'un Haut Conseil des territoires, l'élection au suffrage universel direct des conseillers communautaires introduite au dernier moment.
Mme Marylise Lebranchu, ministre. - Cela venait de l'AMF...
M. Jacques Mézard. - On pourrait rappeler vos variations sur le sujet !
Les transports scolaires sont affaire de proximité. Je le sais pour représenter le Cantal ; loin de Lyon...
M. Michel Mercier. - Nous tenterons un rapprochement !
M. Jacques Mézard. - Leur transfert aux régions poursuit une seule fin : justifier le transfert de CVAE aux régions. Il y aura toujours des gens pour vouloir supprimer le Sénat, les départements et communes... De ce grand charivari territorial sortira-t-il du mieux-être pour nos concitoyens ? J'attends toujours qu'on me le démontre. Ces textes, je le crains, contribueront à creuser les inégalités territoriales. (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE)
M. Michel Mercier . - Je remercie nos deux rapporteurs et le rapporteur de l'Assemblée nationale qui ont su guider le bateau...
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. - Un bateau ivre.
M. Michel Mercier. - :...à bon port. Ce texte, modeste, répond d'abord à la question « qui fait quoi ? »
M. Roger Karoutchi. - Et qui ne fait rien. (Sourires)
M. Michel Mercier. - Monsieur Karoutchi, Laissez-moi mon temps de parole ! Vous m'appellerez quand vous aurez réussi à créer la métropole du Grand Paris. (Sourires)
M. Roger Karoutchi. - Ce ne sera pas de sitôt !
M. Michel Mercier. - Cette loi revient à la loi de 2010, sur la clause de compétence générale, la compétence économique, la formation et l'apprentissage aux régions. En matière de transports scolaires, sujet complexe, il fallait faire un choix, entre régions et départements. Que de temps perdu !
Après une invention comme celle du binôme, il fallait bien que le département survive encore un peu !
Le regroupement des communes en intercommunalités était déjà en cours. Avec le fléchage, les délégués communautaires dans les intercommunalités sont déjà élus au suffrage universel direct. Mais nous tenions à ce que cela se fasse dans le cadre de la commune. Quelle cohérence entre la volonté de faire élire ainsi les conseillers communautaires dans les communautés de communes et pas à Paris ? Pourquoi imposer un cadre infra-communal uniquement pour Paris ? Peut-être la raison est-elle ailleurs ? (Sourires entendus)
L'abaissement du seuil de l'intercommunalité et les dérogations prévues donnent l'occasion au préfet et au conseil des territoires d'agir en souplesse.
La CMP a aussi supprimé des scories de la loi Alur, notamment sur les PLUI. L'idée d'un Haut Conseil des territoires, idée qui revient régulièrement.
J'espère que nous laisserons aux territoires et aux citoyens le temps de s'approprier ce texte avant de modifier à nouveau la loi. Le groupe UDI-UC le votera. (Applaudissements au centre)
M. Mathieu Darnaud . - Nous voici enfin parvenus au terme de ce texte, marqué par la contribution du Sénat. Le Gouvernement voulait rayer de la carte les départements au profit des grandes régions. Finalement, la loi NOTRe s'est perdue dans de multiples directions, donnant le tournis aux élus. L'objectif était de réaliser dix milliards d'économies. Qui y croit encore ?
Le Sénat a su écouter les élus locaux, inquiets par ce chamboule-tout territoriale qu'ils interprétaient comme une marque de défiance à leur égard ; eux qui sont souvent bénévoles et dévoués à la cause publique.
Mieux aurait valu une réforme décentralisatrice, qui donne aux maires et aux élus plus de responsabilités, comme le souhaitait Gaston Defferre.
Franchement, nous sommes loin du Grand Soir territorial. Le Sénat a été à la hauteur de son rôle constitutionnel grâce à nos rapporteurs qui ont su défendre nos positions. Sur les points contraires à l'intérêt général et à la décentralisation, le Sénat a tenu bon. Nous avons tordu le cou à l'idée selon laquelle le département serait surnuméraire. Qu'il aura fallu de temps et de débats pour expliquer au Gouvernement que la France n'est pas uniforme et que l'on ne pouvait répartir des bassins de vie avec une calculatrice ou un compas. Non, il n'y a pas de nombre d'or en matière d'intercommunalité ! Les intercommunalités sont avant tout des communautés de projet. Les mariages forcés ne fonctionnent pas.
Nous nous félicitions du report à 2020 du transfert de la compétence sur l'eau ainsi que du maintien des règles de majorité pour le PLUI. Les communes, cellules de base de notre vie publique, doivent rester maîtresses de leur destin : être libres de se regrouper, si elles le souhaitent, grâce à la loi Pélissard.
Les maires incarnent la démocratie locale. Qu'adviendrait-il si les élus des petites communes, apolitiques pour la plupart, étaient remplacés dans les intercommunalités par des élus sur des listes partisanes ?
Le Haut Conseil des territoires a été heureusement supprimé. C'était une mascarade inutile car le Sénat assure son rôle.
Le texte de la CMP reste cependant insatisfaisant. Nous regrettons le caractère prescriptif des schémas régionaux. Nous aurions préféré renforcer la coproduction. De même, les Franciliens méritent mieux que la coquille vide du Grand Paris. Que dire aussi du meccano institutionnel pour écarter une personne précise du conseil de cette métropole ? (Applaudissements à droite) Nous saisirons le Conseil constitutionnel.
Le groupe Les Républicains votera, sans enthousiasme, ce texte dont nous avons amélioré considérablement le contenu. Le Sénat a fait la preuve qu'il défendait les territoires de la République. (Applaudissements à droite)
M. Michel Delebarre . - Ah, nous avions pris l'habitude de passer beaucoup de temps ensemble... Nos retrouvailles seront brèves, non que nous ne prenions pas plaisir à passer du temps ensemble, mais la CMP a abouti. Quelle heureuse surprise ! Je salue le travail de nos rapporteurs et, au sein du groupe socialiste et républicain, l'implication de MM. Kaltenbach et Botrel.
Nos propositions ont été entendues. L'élection des conseillers communautaires au suffrage universel supra-communal et le Haut Conseil des territoires sont supprimés et la minorité de blocage au sein des intercommunalités maintenue. Le groupe socialiste et républicain est satisfait. Le pouvoir économique des régions est clarifié, grâce à deux nouveaux schémas.
Le texte, qui rationalise les compétences, renforce la coopération. Un compromis a eu lieu sur le service public de l'emploi, grâce à plus de coordination. Bref, le projet de loi respecte les objectifs qui sont les nôtres : clarification, coopération, rationalisation.
Le tourisme est une compétence partagée. Les ports restent aux communes et départements. L'accord trouvé à l'initiative du Gouvernement sur le Grand Paris est bon. Le cadre fiscal sera plus juste, pour garantir à tous un même niveau de services. Grâce à la métropole, l'on pourra rééquilibrer l'est et l'ouest de Paris pour mieux répartir logements et bureaux.
Le seuil des intercommunalités a été fixé à 15 000 habitants - nous l'avions proposé dès le début - tout en donnant toute la souplesse nécessaire. Avec ses 36 000 communes, la France fait figure d'exception. Il ne s'agit pas de les dissoudre mais de renforcer les coopérations, de faciliter les mutualisations. Les petites communes pourront ainsi bénéficier de services qu'elles n'auraient pu fournir seules.
En dépit de la technicité de ce texte, nous avons gardé l'objectif : rendre plus facile la vie de nos concitoyens. Peut-être qu'un jour prochain, nous parlerons de décentralisation. Cela est une autre affaire... (Sourires et applaudissements)
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. - Il fallait vous écouter jusqu'au bout !
M. Philippe Bas, président de la commission des lois. - Rendez-vous après 2017.
M. Jean-Pierre Sueur . - Nous sommes parvenus à un accord. Le temps n'est plus aux regrets, aux remords, aux circonvolutions ni aux circonlocutions.
Cet accord est bien accueilli par les territoires.
M. Jean-Pierre Bosino. - Ah bon ?
M. Jean-Pierre Sueur. - Grâce au Sénat, plusieurs points ont été clarifiés. Je rends hommage aux ministres, Mme Lebranchu et M. Vallini ; il fallait de la ténacité pour mener à bien ce long travail. Je remercie aussi nos rapporteurs. Quelque chose tient à la richesse du Sénat : cette capacité à travailler à deux, comme ont su le faire aussi MM. Collomb et Mercier, ou Mme Gourault et moi-même.
S'agissant de l'élection au suffrage universel direct supra-communal des délégués communautaires, il faut tenir compte de la diversité des territoires. Rien n'aurait été pire qu'une déclaration de principe dans la loi qui n'aurait pas été suivie de mesures. La situation ne peut être la même dans une communauté de communes et dans une grande métropole.
Il était cohérent d'articuler des intercommunalités plus fortes et de grandes régions. Les intercommunalités, répétons-le, ne sont pas l'ennemi des communes, mais leurs alliées. La mutualisation, indispensable, rendra les communes plus fortes.
Je me réjouis que l'équilibre de la loi Alur ait été préservé.
Le seuil de 25 % des communes représentant 25 % de la population est pertinent.
Quant au Haut Conseil des territoires, je ne pleurerai pas sur son sort. Il existe déjà assez de conseils ; M. Mézard fait diligence pour les évaluer. Il faut respecter les institutions et le Sénat dans sa spécificité. (« Très bien » à droite) Ce Haut Conseil était inutile.
Je voterai ce texte de compromis, avec le coeur et la raison. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)
La discussion générale est close.
Vote sur le texte élaboré par la CMP
Mme la présidente. - Je rappelle que le Sénat, conformément à l'article 40 de notre Règlement, se prononcera en un seul vote sur ce texte adopté par l'Assemblée nationale.
M. Pierre-Yves Collombat . - Aller moins loin dans la mauvaise direction est-ce aller dans la bonne ? Évidemment non. Que le texte ait été purgé des provocations des députés ne le rend pas acceptable. Redistribuer les compétences entre départements et régions, communes et intercommunalités, ce n'est pas décentraliser. Remplacer la clause de compétence générale des régions et des départements par un Gosplan régional prescriptif assorti de conventions et de délégations n'est ni clarifier ni simplifier.
La question des transports scolaires est réglée seulement sur le papier. Quant à l'équipement des territoires en haut débit, le sfumato domine. Et cette usine bureaucratique est censée doper la compétitivité de notre pays...
Oublier d'équilibrer les budgets sociaux explosifs des départements, c'est leur interdire d'exercer leur mission de solidarité.
Les communes sont transformées en zombies - en « interface » pour reprendre le vocabulaire de M. Vallini. Leur compétence générale sera vidée de sa substance par l'intercommunalité.
Le Gouvernement a reculé sur le PLUI obligatoire et un scrutin spécifique pour les délégués communautaires, ce n'est que partie remise.
La vassalisation des petites communes au nom de l'équité démographique - oubliée d'ailleurs quand il s'agit de DGF ou du Fpic - est en marche.
La tactique électorale est passée avant les grands principes sur le Grand Paris.
Voter ce texte, même pour des motifs respectables, c'est voter l'euthanasie des communes et la désorganisation territoriale. En votant contre, le groupe RDSE ne se donne pas le beau rôle, il prend ses responsabilités.
M. Roger Karoutchi . - Les Républicains de Paris voteront contre ce texte. Franchement, il n'y a plus de limites à la provocation. Les maires découvrent les découpages proposés par les préfets, qui ne les ont pas écoutés : 94 % des élus franciliens avaient adopté une proposition, on ne les a pas suivis.
Vous aurez réussi, madame la ministre, à faire voter de la même manière M. Dallier et moi, qui portons des projets différents. Nous réprouvons votre méthode de passage en force, la suppression des pouvoirs des communes et des départements, sans étude d'impact.
Nous saisirons le Conseil constitutionnel au moins de cet amendement scélérat qui vise une seule personne.
M. René-Paul Savary . - Si je salue le travail remarquable de nos rapporteurs qui ont sauvé l'essentiel, l'existence des départements, je m'abstiendrai. La région conserve ses prérogatives. Je regrette que nous ne soyons pas allés jusqu'au bout en leur transférant le service de l'emploi. Les conventions se multiplieront avec les départements. Ce n'est pas une simplification.
De même, mieux aurait valu laisser la liberté aux communes de se regrouper plutôt que d'utiliser la voie autoritaire.
M. Didier Guillaume . - Jamais un texte réformant les collectivités locales n'est voté dans l'enthousiasme. Songez aux débats très houleux sur la loi Defferre, la loi Sarkozy de 2010 votée grâce au rappel de tous les récalcitrants. Au départ, nous n'étions pas favorables au texte du Gouvernement. Je salue le Premier ministre qui nous a entendus...
Mme Catherine Procaccia. - ... Mais qu'il était sourd !
M. Didier Guillaume. - Le Gouvernement nous a écoutés : Le Sénat a joué son rôle. Les positions restent partagées entre adversaires et partisans.
M. Roger Karoutchi. - Et résignés...
M. Didier Guillaume. - Le groupe socialiste votera ce texte de clarification.
À la demande de la commission des lois, le texte est mis aux voix par scrutin public.
Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n°231 :
Nombre de votants | 339 |
Nombre de suffrages exprimés | 308 |
Pour l'adoption | 259 |
Contre | 49 |
Le Sénat a adopté définitivement le projet de loi NOTRe.
(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)
Organisme extraparlementaire (Nominations)
Mme la présidente. - La commission du développement durable a proposé des candidatures pour le Haut Comité de la qualité de service dans les transports. La présidence n'ayant reçu aucune opposition dans le délai d'une heure prévu par l'article 9 du Règlement, je proclame M. Jean-Jacques Filleul membre titulaire et M. Jean-Yves Roux membre suppléant.
Prochaine séance demain, vendredi 17 juillet 2015, à 9 h 30.
La séance est levée à 18 h 15.
Jacques Fradkine
Direction des comptes rendus analytiques
Ordre du jour du vendredi 17 juillet 2015
Séance publique
À 9 h 30
Présidence : M. Jean-Pierre Caffet, vice-président
Secrétaires : M. Serge Larcher - M. Bruno Gilles
- Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi actualisant la programmation militaire pour les années 2015 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense.
Rapport de M. Jean-Pierre Raffarin, fait au nom de la commission mixte paritaire (n° 635, 2014-2015) ;
Texte de la commission (n° 636, 2014-2015).
Analyse des scrutins publics
Scrutin n°231 sur l'ensemble du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République dans la rédaction du texte proposé par la commission mixte paritaire.
Résultat du scrutin
Nombre de votants :339
Suffrages exprimés :308
Pour :259
Contre :49
Le Sénat a adopté.
Analyse par groupes politiques
Groupe Les Républicains (144)
Pour : 127
Contre : 12 - MM. Christian Cambon, Pierre Charon, Philippe Dallier, Mme Isabelle Debré, MM. Francis Delattre, Philippe Dominati, Jacques Gautier, Benoît Huré, Roger Karoutchi, Ladislas Poniatowski, Hugues Portelli, Mme Catherine Procaccia
Abstentions : 4 - MM. Gérard Dériot, Claude Malhuret, Philippe Nachbar, René-Paul Savary
N'a pas pris part au vote : 1 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat
Groupe socialiste et républicain (110)
Pour : 110
Groupe UDI-UC (41)
Pour : 20
Contre : 13 - MM. Vincent Capo-Canellas, Vincent Delahaye, Daniel Dubois, Mme Nathalie Goulet, M. Loïc Hervé, Mmes Sophie Joissains, Chantal Jouanno, Anne-Catherine Loisier, MM. Jean-François Longeot, Hervé Marseille, Hervé Maurey, Christian Namy, Yves Pozzo di Borgo
Abstentions : 4 - M. Yves Détraigne, Mme Françoise Férat, M. Jean-Claude Luche, Mme Catherine Morin-Desailly
N'ont pas pris part au vote : 4 - Mme Sylvie Goy-Chavent, MM. Nuihau Laurey, Pierre Médevielle, Mme Lana Tetuanui
Groupe communiste républicain et citoyen (19)
Contre : 19
Groupe du RDSE (16)
Contre : 4 - MM. Michel Amiel, Pierre-Yves Collombat, Jean-Noël Guérini, Mme Mireille Jouve
Abstentions : 12 - MM. Guillaume Arnell, Gilbert Barbier, Alain Bertrand, Joseph Castelli, Yvon Collin, Philippe Esnol, François Fortassin, Robert Hue, Mmes Françoise Laborde, Hermeline Malherbe, MM. Jacques Mézard, Jean-Claude Requier
Groupe écologiste (10)
Abstentions : 10
Sénateurs non-inscrits (6)
Pour : 2
Contre : 1 - M. Jean Louis Masson
Abstention : 1 - M. Robert Navarro
N'ont pas pris part au vote : 2 - MM. David Rachline, Stéphane Ravier