Questions orales
Mme la présidente. - L'ordre du jour appelle quatorze questions orales.
Fonds social européen
Mme Dominique Gillot . - L'année 2014 fut une année de transition pour les règles d'éligibilité au fonds social européen. L'accord-cadre signé le 5 août 2014 entre l'Assemblée des départements de France et l'État prévoit que les plans locaux pluriannuels pour l'insertion et l'emploi et les conseils généraux contractualisent pour clarifier les responsabilités respectives des acteurs de l'inclusion et définir la stratégie territoriale d'intervention du Fonds social européen (FSE).
Pour la programmation en 2014, la demande de subvention globale des associations devait être accessible fin septembre sur le site dans la rubrique « Ma démarche FSE ». Or les informations sur le cadre, les critères de sélection, tout comme les axes d'élection ont fluctué pendant plusieurs semaines. Le service FSE indiquait que les ateliers et chantiers d'insertion (ACI) pouvaient se positionner sur plusieurs axes, tout en présentant un dossier pour chaque projet, en s'assurant que le projet est conforme aux objectifs décrits dans l'appel à projet.
Le service en charge de l'insertion par l'activité économique de la Direccte a, ensuite, précisé que l'appel à projet FSE était ouvert aux structures d'insertion par l'activité économique (SIAE) sur l'axe 3 uniquement, alors que le service FSE de la même Direccte évoque l'éligibilité des SIAE aux différents axes, tout en n'apportant pas de certitudes sur le financement de l'axe 3 en 2014.
Enfin, les documents « appel à projet et critères de sélection 2014 » ont été reçus, pour lancement définitif, le 16 octobre, avec une limite de dépôt fixée au 17 novembre 2014.
Entre-temps, les associations valdoisiennes ont été informées par l'unité territoriale régionale, qui instruit sur la forme les documents, que les chantiers d'insertion ne seraient plus éligibles sur l'enveloppe État/région parce qu'ils ne relèveraient pas d'une compétence régionale, mais sans avoir de certitude pour leur basculement sur l'enveloppe État/département, le conseil général se retranchant derrière ses compétences obligatoires.
La situation est particulièrement dramatique. Ces tergiversations empêchent l'utilisation de crédits destinés à l'accompagnement des plus éloignés de l'emploi. Les associations qui devaient bénéficier de ces fonds se retrouvent livrées à elles-mêmes, sans interlocuteur et sans moyen. Pour la plupart, il s'agit, à court terme, d'une fermeture programmée. Pourtant, dans sa conférence de presse du 5 février 2015, le président de la République a rappelé le « formidable travail que font ces femmes, ces hommes » des associations dans le cadre de l'accès aux droits et aux chances de réussite équitable et a précisé que « les crédits des associations seront non seulement préservés, mais augmentés ».
Qu'est-il fait, monsieur le ministre, pour sauver le financement du FSE et enclencher une procédure pour 2015 qui garantisse la précision des règlements et des délais compatibles avec la simple bonne gestion, tant des deniers publics, que de l'énergie de ces partenaires sociaux dévoués ?
M. François Rebsamen, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social . - L'année 2014 était une année de transition, avant la mise en oeuvre de la nouvelle programmation 2014-2020. Les règlements européens publiés le 20 décembre 2013 ont été déclinés par la France, dans l'accord du 8 août 2014.
Concernant le FSE, le programme opérationnel national a été approuvé par la Commission européenne le 10 octobre dernier et sa déclinaison pour l'Ile-de-France le 18 décembre.
Plusieurs mesures ont été prises pour assurer la continuité des financements. Les plans locaux pour l'insertion et l'emploi franciliens ont bénéficié d'une tranche additionnelle de subvention globale - au titre du FSE 2007-2013, qui a permis de cofinancer des chantiers d'insertion.
En outre, cinq appels à projets ont été lancés le 16 octobre pour des projets pluriannuels avec une possible rétroactivité au 1er janvier 2014 Sur les trois axes du programme opérationnel national ont été déposés 18 dossiers. Le préfet d'Ile-de-France a notifié le 17 juillet 2014 les enveloppes plafond pour les départements et les plans locaux pour l'insertion et l'emploi. In fine, 223 millions d'euros de crédits du FSE ont été versés pour financer des politiques d'inclusion.
Mme Dominique Gillot. - Le dossier est technique, mais aussi politique. Le désarroi des associations est fort, elles pensent avoir perdu leur droit à financement pour 2014, car les services de la Direccte se renvoient la balle. J'insiste : certains responsables associatifs ne se paient plus, pour pouvoir continuer à mener leurs actions d'insertion.
Epide de Montry
Mme Nicole Bricq . - Le président de la République s'est rendu à l'Établissement public d'insertion de la défense (Epide) de Montry le 7 février 2014, braquant le projecteur sur ces structures qui aident des jeunes, souvent sans qualification et en situation d'échec, à trouver leur place dans la société, en leur donnant les prérequis nécessaires au travail en équipe. En agissant en direction des jeunes souvent désocialisés, les Epide participent à l'apprentissage du « vivre ensemble » dans nos territoires.
La moitié des jeunes accueillis à l'Epide de Montry trouvent un emploi à l'issue, ce qui est remarquable. Monsieur le ministre, quelle est l'action du gouvernement pour développer ce type de structures, conformément aux objectifs fixés par le président de la République et quelles en seront les conséquences à Montry ?
M. François Rebsamen, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social . - L'Epide, ouvert en 2005, permet à des jeunes de 18 à 25 ans, souvent sans qualification, d'effectuer, en six à douze mois, dans le cadre d'un contrat dit de « volontariat pour l'insertion », un travail en profondeur sur leur savoir-être : éducation civique, intégration des codes sociaux... Pouvant accueillir 2 085 jeunes dans dix-huit centres répartis sur le territoire métropolitain, l'Epide s'est peu à peu acquis une place dans les dispositifs d'insertion professionnelle.
Lors de sa visite à Montry, le président de la République a annoncé que 1 000 jeunes de plus seraient accueillis dès 2015. Le comité interministériel à l'égalité et à la citoyenneté (CIEC) du 6 mars a décidé d'ouvrir en tout 2 650 places. Les capacités d'accueil de quinze centres seront accrues en conséquence. Ainsi, Montry passera de 150 à 180 places d'ici à la fin de l'année. Des travaux seront nécessaires pour réaménager les locaux.
Mme Nicole Bricq. - Merci de cette réponse précise : je ne connaissais pas la répartition des places. Ce dossier est par nature interministériel, et les ministères ont tendance à se renvoyer la balle. Merci d'avoir agi avec célérité ; je reconnais là la marque du Président de la République : quand on veut, on peut.
Emploi des personnes handicapées
Mme Françoise Gatel . - Dix ans après la promulgation de la loi du 11 février 2005, le nombre de chômeurs en situation de handicap continue de s'accroître - ils sont aujourd'hui plus de 423 000 - et leur taux de chômage évolue deux fois plus vite que celui des autres populations. Pourtant, le rôle économique et social joué par le secteur adapté est primordial. Le dynamisme de ce modèle est confirmé : 30 000 emplois dont 24 000 pour des salariés handicapés, un chiffre d'affaires cumulé de plus de 1,05 milliard d'euros, une stabilité pour les salariés, avec 91 % en contrat à durée indéterminée (CDI).
Les entreprises adaptées avaient signé, en décembre 2011, un pacte pour l'emploi. Dans une période économique difficile, le bilan des engagements des acteurs du secteur adapté est très positif : la création nette d'emplois dans les entreprises adaptées a dépassé les 2 000 postes depuis 2012. Le profil des personnes recrutées répond aux engagements du pacte pour l'emploi, c'est-à-dire majoritairement des bénéficiaires de l'allocation aux adultes handicapés, des jeunes, des seniors et des travailleurs handicapés demandeurs d'emplois de longue durée.
La réactualisation d'une étude, menée par le cabinet KPMG en juin 2014, prouvait que, dès que l'État investit un euro dans un emploi dans une entreprise adaptée, il récupère au minimum un euro. Cette même étude montrait également que, globalement, à chaque fois qu'un travailleur handicapé retrouve un emploi dans une entreprise adaptée, il fait économiser près de 10 000 euros à la collectivité.
Dans le cadre de la préparation des arbitrages pour 2015, la Délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle (DGEFP) a recensé auprès de ses services déconcentrés des Direccte des besoins de 1 200 postes supplémentaires, dont 200 postes servant à accompagner 58 projets de nouvelles créations d'entreprises adaptées. Ces besoins ne pourront pas être couverts en 2015 puisque l'abondement de cette enveloppe par la loi de finances ne prévoit que 500 postes supplémentaires.
Le gouvernement envisage-t-il de négocier un nouveau plan de développement du secteur adapté, pour la période 2016-2021, avec les associations ?
M. François Rebsamen, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social . - Les entreprises adaptées constituent un acteur majeur de la politique d'insertion professionnelle des personnes en situation de handicap. Depuis la loi du 11 février 2005, elles ont rejoint le milieu ordinaire de travail, devenant ainsi des acteurs économiques à part entière.
Malgré les contraintes budgétaires, le gouvernement a décidé de financer 2 500 postes de plus en trois ans. Le financement d'État est passé de 269 millions d'euros en 2012 à 310 millions d'euros en 2015, et même 350 millions au total, compte tenu de la subvention pour accompagnement social.
Lors de la conférence nationale du handicap qui s'est tenue le 11 décembre 2014, le président de la République a annoncé la création de 1 000 postes supplémentaires en deux ans ; tous les postes n'avaient pas été pourvus, les 500 postes correspondent aux besoins de cette année.
Le gouvernement est déterminé à consolider le modèle économique que représentent les entreprises adaptées. Nous nous attachons, depuis novembre 2014, avec l'ensemble des associations du secteur, à simplifier les démarches des centres adaptés, à mieux les accompagner et à construire des passerelles avec le secteur ordinaire.
Mme Françoise Gatel. - Merci. Il faut donner de la visibilité, pour l'avenir, à un secteur confronté au vieillissement de ses salariés. Cela suppose un nouveau plan de développement.
Vacataires de l'enseignement supérieur
M. Michel Savin . - Nos universités emploient plus de 100 000 vacataires pour assurer ponctuellement des enseignements. Or, ces derniers éprouvent parfois des difficultés à recouvrer leur rémunération.
Au mois de janvier dernier, les vacataires de l'université Lyon II ont débuté une grève qui s'est poursuivie jusqu'il y a quelques jours, pour obtenir le paiement d'heures de cours dispensés cinq à six mois plus tôt. Le même phénomène s'observe de Strasbourg à Caen. Les revendications des vacataires sont parfaitement légitimes : une signature de leur contrat de travail avant de commencer les cours, l'envoi de la feuille de paie en même temps que le versement des salaires et le paiement dans le mois qui suit la prestation des heures de travail effectuées.
Partout en France, un vacataire attend, en moyenne, entre trois et six mois pour être payé. L'université justifie souvent les retards de versement par des contraintes d'une gestion administrative lourde et de longs délais d'établissement des relevés horaires. Cet état de fait est difficilement supportable pour les vacataires, dans une position que l'on peut qualifier de précaire.
Que compte faire le gouvernement pour mettre fin à cette précarité ?
M. François Rebsamen, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social . - D'abord, je vous prie d'excuser l'absence de Mme Vallaud-Belkacem. Les établissements d'enseignement supérieur peuvent effectivement faire appel à des vacataires, recrutés parmi leurs doctorants, pour une année maximum, leur dossier devant être revu à chaque rentrée. C'est ce qui explique les retards. Il est inacceptable que les vacataires doivent parfois attendre plusieurs mois pour être payés. Mais il paraît indispensable de maintenir ce dispositif qui permet à des étudiants de trouver un revenu salarié au sein même de leur université.
Le problème à Lyon II, lié à des absences temporaires au sein du personnel administratif, a été résolu.
Mme Najat Vallaud-Belkacem est attentive à la situation des vacataires, et a rappelé qu'une fiche de paie, établie mensuellement suite au service fait, devrait systématiquement leur être délivrée.
M. Michel Savin. - En effet, il faut maintenir le système de vacations. Dans les nouveaux domaines comme celui du numérique, il est nécessaire de recourir à des vacataires spécialisés.
Veillons à ce que le versement de la rémunération ne souffre plus de retard. La qualité de l'enseignement et l'avenir de nos étudiants sont en jeu.
Tourisme en Polynésie française
Mme Hélène Conway-Mouret . - Pour accueillir cent millions de touristes - c'est l'objectif fixé par le gouvernement - la France doit améliorer son offre, sur tout son territoire. En Polynésie française, par exemple, le développement économique touristique ne doit pas seulement être stimulé par les dispositifs de défiscalisation. Il serait pertinent d'autoriser l'ouverture des magasins en horaires étendus et le dimanche tout au long de la période touristique. La filière touristique de ces zones devrait être réorientée vers la consommation et la qualité des services de haut de gamme sur un marché local fortement concurrentiel. La délivrance des visas de tourisme pour la clientèle de croisière doit être facilitée, tant dans ses modalités d'obtention que dans ses quotas.
Quelles mesures le gouvernement prend-il pour permettre aux territoires de Polynésie française de se développer à la mesure du potentiel de croissance de la zone, dynamisée notamment par l'économie chinoise ?
Mme George Pau-Langevin, ministre des outre-mer . - En 2014, le tourisme a progressé de 9,9 % en Polynésie par rapport à 2013. Le groupement d'intérêt économique « Tahiti tourisme » est destiné à améliorer l'accueil et à renforcer la compétitivité des hôtels polynésiens. La marque The Island of Tahiti est porteuse de nombreux espoirs.
Le développement touristique de Tahiti passe aussi par la captation de la clientèle des croisières. Les derniers chiffres sont encourageants : une hausse de 51,7 % des croisiéristes. Le marché asiatique augmente de 18,4 %.
L'ouverture d'une ligne aérienne directe avec Pékin, Shanghai et Canton, avec quatorze vols par semaine, permettra de renforcer cette tendance. Parallèlement, l'État a considérablement assoupli les conditions d'obtention des visas pour les touristes chinois, avec une dispense pour les séjours de moins de quinze jours. Un travail interministériel est en cours sur une exemption de visas pour les touristes ne passant pas par une agence agréée.
Quant à l'ouverture des commerces, elle est soumise à la législation sociale locale. Une réunion doit avoir lieu bientôt à ce sujet, que la députée de Polynésie française est chargée de préparer.
D'autres pistes de développement doivent être explorées, comme le tourisme nautique, marché de niche en plein essor et à haute rentabilité. Des mesures sont actuellement à l'étude pour améliorer l'attractivité du territoire.
Enfin, le Conseil de promotion du tourisme tiendra une séance plénière consacrée aux Outre-Mer le 24 juin prochain.
Mme Hélène Conway-Mouret. - Nous avons besoin d'actions concrètes. Le tourisme est créateur d'emplois ; contre le chômage, tout doit être tenté.
Police municipale et procès-verbaux par timbre-amende
M. Vincent Delahaye . - En vertu de l'article L. 2212-1 du code général des collectivités territoriales, le maire doit veiller, à travers ses pouvoirs de police, à assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publique dans sa commune. Il est chargé, sous le contrôle administratif du représentant de l'État dans le département, de la police municipale, de la police rurale et de l'exécution des actes de l'État qui en relèvent. Le maire se trouve souvent confronté à des infractions telles que la consommation d'alcool ou les travaux mécaniques sur la voie publique.
L'article L. 511-1 du code de la sécurité intérieure donne aux agents de police municipale le pouvoir de constater par procès-verbal les infractions aux arrêtés de police du maire. Ce procès-verbal doit être rédigé par le policier municipal, après avoir relevé l'identité du contrevenant. Il est ensuite transmis par l'intermédiaire de l'officier de police judiciaire au procureur de la République qui devra faire entendre le contrevenant, puis, éventuellement, le faire poursuivre devant le tribunal de police. Dans la réalité, le procureur de la République, accaparé par des dossiers plus graves, classe très souvent sans suite ce procès-verbal. Il est préjudiciable que certains citoyens indélicats puissent en ressentir un sentiment d'impunité. Ces infractions sont d'ailleurs punies d'une amende peu dissuasive.
Je propose donc de faire figurer l'article R. 610-5 du code pénal dans l'article R. 48-1 du code de procédure pénale. Celui-ci dresse la liste des infractions pour lesquelles l'action publique est éteinte par le paiement d'une amende forfaitaire. Ainsi, les contraventions des quatre premières classes du code de la route sont verbalisables par timbre-amende. Outre la rapidité de cette procédure, et son efficacité qui n'est plus à démontrer, les montants des amendes peuvent être beaucoup plus élevés et donc bien plus dissuasifs. Le montant de l'amende est de 150 euros au plus pour les contraventions de la deuxième classe, 450 euros au plus pour les contraventions de la troisième classe et 750 euros au plus pour les contraventions de la quatrième classe.
Ensuite, le montant maximal des amendes prévues pour les contraventions de première classe pourrait être relevé de 38 euros à 100 euros.
Enfin, je recommande que les décrets et arrêtés de police du maire soient punis de l'amende prévue pour les contraventions de première ou deuxième classe, portant le montant maximum de 38 euros à 150 euros.
Qu'en pense M. le ministre de l'intérieur ?
Mme George Pau-Langevin, ministre des outre-mer . - Je vous prie d'excuser son absence, due à d'autres obligations. Les policiers municipaux disposent d'une compétence d'attribution pour assurer l'exécution des arrêtés de police du maire et pour rechercher et établir, par procès-verbaux, les contraventions à ces arrêtés ; les infractions limitativement énumérées à l'article R. 15-33-29-3 du code de procédure pénale ; certaines contraventions au code de la route ; l'interdiction de fumer dans les lieux collectifs. Ils ne peuvent dresser de timbre-amende aux arrêtés de police du maire qui ne sont pas pris en application d'une réglementation nationale.
Le gouvernement est favorable à l'extension de ce dispositif, qui facilite le recouvrement. En revanche, faire figurer l'article R. 610-5 du code pénal dans l'article R. 48-1 pose un problème de principe, car le parquet doit être en mesure d'apprécier l'opportunité des poursuites. En revanche, il est possible de créer des contraventions réprimant de façon spécifique la violation de certains types d'arrêtés municipaux ou de règlements de police de portée nationale, et de prévoir leur forfaitisation, au cas par cas. Cela peut se faire par la voie réglementaire.
Ainsi, un prochain décret en Conseil d'État forfaitisera la contravention d'entrave à la libre circulation sur la voie publique, qui peut être constituée lorsque les ordures abandonnées entravent ou diminuent la liberté ou la sûreté de passage. Elle pourra être désormais constatée par les policiers municipaux.
Un groupe de travail sera prochainement constitué entre le ministère de l'intérieur et le ministère de la justice pour élaborer une liste des infractions qui pourraient être forfaitisées de cette manière.
D'autres dispositions relèvent du domaine législatif. Le relèvement du montant maximum de l'amende sanctionnant une contravention de première ou de deuxième classe de 38 euros à 150 euros, que vous proposez, peut être envisagé dans ce cadre.
M. Vincent Delahaye. - Merci d'être sensible à ce dossier. Ce qui est en jeu, c'est l'efficacité de l'action du maire et de la police municipale. Je me tiens à la disposition du groupe de travail pour lui donner mon avis sur la liste des infractions pour lesquelles la réglementation pourrait être modifiée.
Certificat de non-contre-indication à la pratique sportive
Mme Élisabeth Doineau . - Je veux relayer ici l'interpellation d'un citoyen de mon département, organisateur d'activités sportives. Chaque année, un certificat médical de non-contre-indication à la pratique sportive doit être produit pour s'inscrire dans un club sportif, de quelque nature que ce soit. Si un non-licencié souhaite participer à une course de dix kilomètres - ce n'est ni un semi-marathon et encore moins un marathon - il est, là encore, nécessaire de prendre rendez-vous avec son médecin généraliste pour obtenir le fameux sésame. Cette disposition décourage bon nombre de personnes à participer à ces activités, souvent dans un esprit bon enfant, pour manifester de la solidarité. Outre la corvée pour le particulier, cette obligation entraîne un coût inévitable pour les finances de la sécurité sociale. Il convient donc de réformer ce système.
M. le secrétaire d'État Mandon a dit vouloir simplifier les choses et reprendre la circulaire du 27 septembre 2011 relative à la rationalisation des certificats médicaux, pour réformer le certificat obligatoire pour s'inscrire dans un club sportif. Plus précisément, quelles mesures le gouvernement compte-t-il prendre ?
M. Patrick Kanner, ministre de la ville, de la jeunesse et des sports . - Je partage votre analyse. Un amendement gouvernemental a été déposé en commission lors de l'examen à l'Assemblée nationale du projet de loi de santé, complété par un amendement parlementaire en séance. Le certificat médical, systématique, est trop souvent considéré comme une formalité. Nous voulons donc qu'un seul certificat médical soit nécessaire pour plusieurs disciplines. Le renouvellement du certificat ne sera plus nécessaire chaque année, un décret précisera la fréquence. Un questionnaire permettra aux personnes concernées de déceler elles-mêmes d'éventuels problèmes de santé. Pour des sports à risque comme le parachutisme ou la plongée, le certificat restera annuel. J'espère, madame la sénatrice, que vous soutiendrez cette évolution au Sénat.
Mme Élisabeth Doineau. - Je le ferai. En France, on a tendance à mettre ceinture et bretelles, une simplification est nécessaire.
Pénurie de médecins généralistes
M. Antoine Lefèvre . - La pénurie de médecins généralistes s'aggrave dans les campagnes, par exemple dans l'Aisne où il n'y avait plus en 2013 que 212 médecins pour 100 000 habitants. Le gouvernement avait annoncé qu'en 2015, tout le monde serait à moins d'une demi-heure d'un centre d'urgence. 2015, nous y sommes !
Certaines communes ont lourdement investi pour accueillir un nouveau médecin ; celui-ci est souvent originaire d'un pays francophone d'Europe de l'Est. Il n'est pas rare que ces médecins s'en aillent au bout de quelques mois, parfois sans prévenir la commune ni respecter les conventions signées. Les maires se retrouvent désemparés, sans possibilité de recours, alors qu'ils ont engagé des frais importants, et le conseil de l'Ordre sans réelle possibilité d'action car ces médecins n'y sont pas toujours inscrits. Les maisons de santé ne suffisent pas. Qu'entend faire le gouvernement ?
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche . - Je vous prie d'excuser l'absence de Marisol Touraine.
Deux ans après le pacte « Territoire-santé », une nouvelle dynamique est lancée. Plus de 370 contrats de praticiens de médecine générale ont été signés ; le dispositif sera élargi aux spécialistes.
Il faut aussi encourager le travail en équipe. Depuis 2012, le nombre de maisons de santé est passé de 174 à 370 ; elles devraient être 800 en 2015, 1 800 en 2017. Enfin, les objectifs du pacte sont inscrits dans le projet de loi de santé, qui fait de l'accès territorial aux soins un objectif majeur de notre politique de santé.
M. Antoine Lefèvre. - Je n'ai pas eu de réponse concrète sur les demandes des élus. Il faudra leur apporter des garanties.
Autoroutes (I)
M. Daniel Laurent . - Ma question porte sur un sujet très important pour la Vendée : le projet d'autoroute A 831 Fontenay-le-Comte-Rochefort. La plus grande cacophonie règne depuis les déclarations du Premier ministre. Le 1er avril, le quotidien Sud Ouest titrait « François Hollande a tranché : l'A 831 sera ouverte aux seuls véhicules électriques. » C'était une plaisanterie mais il est significatif que ce quotidien ait choisi ce sujet !
Plus sérieusement, ce projet a été déclaré d'utilité publique par décret en Conseil d'État le 12 juillet 2005, pour une durée de dix ans ; au-delà, il faudra en solliciter la prolongation. Les recours intentés devant le Conseil d'État et la Commission européenne ont fait l'objet de rejets en 2007. En septembre 2011, le projet a été inscrit au schéma national des infrastructures de transport. De nombreuses études environnementales ont été réalisées sur ce projet, notamment par la ligue de protection des oiseaux, dans le cadre d'une convention de recherche appliquée. La commission Mobilité 21 a remis un rapport, le 27 juin 2013, reconnaissant l'intérêt socio-économique du projet, l'impact positif sur le désenclavement des territoires, la desserte du littoral et du port de La Rochelle. Dans une situation budgétaire contrainte, ce projet n'est certes pas une priorité pour le gouvernement mais il n'a pas été abandonné pour autant. En juillet dernier, le Premier ministre écrivait aux présidents Retailleau et Bussereau qu'il était disposé à lancer la consultation auprès des concessionnaires.
En effet, en décembre 2013, le gouvernement a demandé que les efforts d'insertion soient accompagnés d'actions complémentaires pour inscrire le projet dans une démarche volontariste de développement durable. Sous réserve de ces modifications, il n'y avait aucune objection à ce que la procédure de consultation soit lancée pour connaître le coût de l'ouvrage. En parallèle, les services de l'État ont chiffré une alternative au contournement de la ville de Marans, qui n'a pas été portée à la connaissance du public. Les enjeux économiques de ce projet, soutenu par la région des Pays-de-la-Loire, les départements de la Charente-Maritime et de la Vendée, sont importants, tant pour les collectivités que les acteurs économiques.
Mme la présidente - Il est temps de conclure.
M. Daniel Laurent. - La suite est importante !
Quel est l'état d'avancement de ce dossier, quelles sont les intentions du gouvernement ? Le président Retailleau n'a pas pu obtenir de réponse de la part de Mme la ministre du développement durable, sinon un non à l'autoroute ! Un comble pour une ancienne présidente de Poitou-Charentes ! Nous avons besoin d'informations précises.
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche . - La commission Mobilité 21 a validé le projet A 831 tout en mentionnant les controverses, en particulier environnementales. En conséquence, elle l'a classé parmi les projets non prioritaires. Fin 2013, l'État a fixé pour conditions à la poursuite du projet, une meilleure insertion dans le développement durable et une non-aggravation des dépenses. En février 2015, le Premier ministre a repris et précisé ces conditions. Le travail interministériel se poursuit.
M. Daniel Laurent. - C'est bien beau mais qui commande ? En tout état de cause, la déclaration d'utilité publique vient à terme et doit être prolongée. Que le Premier ministre continue de tenir tête à Mme Royal !
Autoroutes (II)
M. Michel Raison . - La Haute-Saône est trop enclavée. Le 27 juin 2013, dans le cadre de la « remise à plat » des priorités du schéma national des infrastructures de transport (SNIT), la commission Mobilité 21 a conclu que la priorité doit être donnée à la réalisation, dans les meilleurs délais, des déviations de Langres et de Port-sur-Saône, dans le cadre des programmes de modernisation des itinéraires routiers (PDMI).
Cette décision a confirmé les enjeux de desserte, d'accessibilité et d'équilibre des territoires traversés. Les crédits nécessaires à la réalisation de la déviation de Port-sur-Saône sont inscrits dans le nouveau PDMI franc-comtois, concrétisant ainsi le travail engagé dès 2002.
En outre, l'État s'est également engagé à financer la déviation sud de Langres qui est l'autre infrastructure composant l'apport de l'État dans un projet de tronçon autoroutier Langres-Vesoul, finalement classé par la commission Mobilité 21 parmi les secondes priorités quel que soit le scénario financier envisagé.
Or la déviation sud de Langres n'a pas été inscrite dans le PDMI de la région Champagne-Ardennes et ce projet n'a pas été retenu dans le cadre du plan de relance autoroutier notifié, le 19 mai 2014, par la France à la Commission européenne laquelle a avalisé, le 30 octobre 2014, les avenants aux contrats de concessions autoroutières permettant le financement du plan de relance à hauteur de 3,2 milliards d'euros.
Alors que les relations sont très tendues entre l'État et les sociétés autoroutières, le plan de relance sera-t-il bien engagé ?
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche . - Le financement de la déviation de Port-sur-Saône figure bien au contrat de plan État-région de Franche-Comté. En revanche, le contournement sud de Langres n'a pas été validé par la Commission européenne le 28 octobre dernier, car le trafic prévisionnel est trop faiblement relié à celui de l'A31 pour que l'argument de la continuité soit recevable. Le contournement de Caen a d'ailleurs subi le même sort. Cependant, le projet n'a pas été abandonné. Une enveloppe de 5 millions d'euros a été mise à disposition du préfet de Champagne-Ardenne pour les études préalables à l'enquête publique et les acquisitions foncières. L'État a pour objectifs l'ouverture de l'enquête publique en 2018 et la publication de la déclaration d'utilité publique en 2019. Il aura besoin de la mobilisation des collectivités territoriales pour y parvenir. Quant au plan de relance, une réflexion est en cours et des annonces seront faites dans les prochains jours.
M. Michel Raison. - Si le tronçon n'est pas réalisé, nous perdrons l'usine de pièces détachées de Peugeot-Citroën à Vesoul. Des milliers d'emploi sont en jeu.
La séance, suspendue à 10 h 45, reprend à 10 h 50.
Locataires surendettés
Mme Dominique Estrosi Sassone . - Les bailleurs sociaux sont confrontés à une augmentation de locataires surendettés qui entament une procédure de rétablissement personnel auprès de la Banque de France. Dans ce cas, l'annulation des loyers par la commission de surendettement est quasi systématique alors que de nombreux dossiers pourraient se régler par un réaménagement de la dette.
Cette situation est gravement préjudiciable aux organismes de HLM qui, contrairement aux créanciers privés ou aux organismes de crédit, ne sont pas destinés à faire des bénéfices. Les pertes financières créent une injustice sociale vis-à-vis des locataires qui payent leur loyer à temps. Ce préjudice financier grave amène les bailleurs sociaux à réduire les investissements d'entretien de leur parc immobilier, toujours au détriment de ceux qui payent leur loyer et voient les conditions générales d'habitation se détériorer. Côte d'Azur Habitat a subi un abandon de créances de 1 368 850 euros !
De plus, certains locataires récidivent et n'hésitent pas à entamer une nouvelle procédure auprès de la Banque de France dès que la décision d'expulsion devient imminente. Dans les Alpes-Maritimes, 47 % des locataires bénéficiaires d'une procédure de rétablissement personnel (PRP) étaient de nouveau en impayé entre 2012 et 2013 et 40 % entre 2013 et 2014. La PRP est donc devenue une démarche de facilité pour faire annuler ses dettes.
Que compte faire le gouvernement pour responsabiliser certains locataires peu scrupuleux du parc social qui accumulent des crédits à la consommation ? Pourquoi n'avoir pas créé un registre national des crédits ? Il faudrait pouvoir hiérarchiser les dettes des demandeurs.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget . - Ce problème est connu, documenté : les bailleurs doivent faire face aux décisions des commissions de surendettement d'annuler des dettes. Selon vous, ce cas serait de plus en plus fréquent.
Le registre national des crédits était effectivement prévu dans la loi sur la consommation. Le Conseil constitutionnel l'a censuré au motif que la mesure portait atteinte à la vie privée. Il avait été saisi par 60 sénateurs UMP, auxquels il a donné raison.
Le risque est, en réalité, amorti à 80 % pour les bailleurs sociaux, via les aides personnalisées au logement. Si toutefois un organisme était en difficulté, il pourrait faire appel à la Caisse de garantie du logement locatif social.
Un partenariat a été conclu entre la Banque de France et le ministère du logement pour renforcer l'efficacité de l'action des Capex. La loi Alur permet en outre aux bailleurs sociaux de réagir plus rapidement en cas d'impayés.
Mme Dominique Estrosi Sassone. - La procédure de rétablissement personnel est dévoyée par des locataires de mauvaise foi. Il faut rétablir l'équité et la justice pour les locataires qui s'efforcent de payer en temps et en heure leur loyer, ou de rééchelonner leur dette.
Très haut débit
M. Hervé Maurey . - Reprenant pour l'essentiel les orientations du programme national très haut débit engagé en 2010, le plan France Très haut débit doit permettre d'atteindre les objectifs ambitieux fixés par le président de la République en matière de couverture du territoire par les réseaux à très haut débit d'ici à 2022.
Le plan laisse la part belle aux investisseurs privés, qui sont censés couvrir 57 % de la population en investissements propres ou co-investissements, et laisse le soin aux collectivités locales et à leurs groupements d'assurer une couverture des territoires restant, les plus coûteux à raccorder, avec un concours limité de l'État.
Deux ans après la mise en place de ce plan et sept ans avant son échéance, où en sont le déploiement des opérateurs privés dans leurs zones d'intervention, le taux de raccordement et le rythme attendu des déploiements des opérateurs au regard de leurs engagements ? Les moyens ne suffisent pas ; la péréquation doit s'appliquer.
Dix jours avant les départementales, le gouvernement s'intéresse à la couverture en téléphonie mobile de notre territoire. Il était temps. Les opérateurs n'ont pas tenu les engagements qu'ils ont pris en 2010.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget . - La couverture numérique est un enjeu d'égalité des territoires. Le plan France Très haut débit a marqué le retour de l'État stratège ; il apporte un soutien de 3,3 milliards d'euros avec l'accent mis sur les territoires ruraux.
Quel est le bilan ? Quelque 3,4 millions de prises raccordées fin 2014, soit une hausse de 30 % en un an. À ce stade, les engagements des opérateurs sont globalement tenus. Une quarantaine de conventions ont été conclues avec les collectivités par Orange et SFR, et une trentaine d'autres sont en cours de négociation. Quant aux investissements publics, 73 dossiers de collectivités ont été déposés ; l'investissement public total se montera à 10 milliards d'euros, dont 2,7 de la part de l'État, qui avait déjà dépensé début mars 1,5 milliard d'euros sur les 3,3 prévus jusqu'en 2022. Globalement, chaque prise est financée à 50 % sur fonds publics.
Enfin, monsieur Maurey, vous avez reçu un courrier sur nos efforts pour la couverture mobile en zone rurale : l'objectif est de couvrir toutes les communes en zone blanche en téléphonie mobile à la mi-2017.
M. Hervé Maurey. - L'État stratège ? Je ne vois pas bien en quoi... Vous n'avez fait que reprendre le plan de vos prédécesseurs. Ne nous gargarisons pas de chiffres et de mots : la réalité sur les territoires est le manque d'accès au débit tout court et à la téléphonie mobile. Je vous le dis comme je le pense : cela participe à leur sentiment d'abandon qui s'est traduit dans les urnes.
Vous avez commis la même faute que vos prédécesseurs : vous intéresser moins aux consommateurs qu'aux opérateurs privés, que vous considérez comme des vaches à lait que l'on taxe au lieu de leur imposer des objectifs de couverture.
Dégroupage téléphonique abusif
Mme Catherine Procaccia . - Régulièrement, des citoyens qui ont souscrit à des offres triple-play se retrouvent, du jour au lendemain, sans téléphone, ni internet ou télévision. Personne ne les a prévenus auparavant. Leur ligne a été résiliée à la demande d'un concurrent, sans qu'ils aient souhaité changer d'opérateur ou souscrit à une nouvelle offre. Lorsqu'ils parviennent, finalement, à joindre leur opérateur, ils doivent attendre plusieurs jours - si ce n'est plusieurs semaines - pour que la ligne soit rétablie et de nouveau opérationnelle. Que pense faire le gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget . - Ou bien il s'agit de pratiques commerciales abusives, que les corps d'enquête de l'État répriment, ou bien ce sont des erreurs techniques qui expliquent ces écrasements.
À partir d'octobre 2015, la portabilité sera mieux assurée. La fédération des télécoms s'est engagée à fournir dans ce cas un interlocuteur unique, le rétablissement gratuit de la ligne dans les sept jours et une indemnisation. Si le client n'est pas satisfait, il pourra agir en justice en s'appuyant sur les articles 1382 et 1383 du code civil.
Je peux vous faire tenir tous les détails techniques de la décision de l'Arcep qui entrera en vigueur 1er octobre 2015.
Mme Catherine Procaccia. - Depuis la loi Chatel, la ligne devrait être rétablie dans les sept jours. On voit ce qu'il en est ! Je me réjouis des avancées sur la portabilité : le RIO est bien connu et fonctionne pour la téléphonie mobile. Il faut régler ce problème, car les abonnés se retrouvent fort dépourvus quand le dégroupage est venu.
Industrie papetière
M. Thierry Foucaud . - La papeterie UPM Chapelle Darblay de Grand-Couronne, spécialisée dans la production de papier journal, est l'un des fleurons du savoir-faire français en matière de production de papier, à partir de déchets recyclés. La gamme de ses produits couvre l'ensemble des besoins de la presse quotidienne ou gratuite. Une partie de la production est exportée dans le monde entier.
Soucieuse de la préservation de l'environnement, cette usine - qui emploie 400 salariés - utilise le transport fluvial sur la Seine pour livrer les grandes imprimeries parisiennes. Elle est également l'une des premières entreprises à avoir installé une chaudière fonctionnant à la biomasse.
Au moment où l'économie circulaire est au coeur des réflexions, l'annonce de la volonté de la direction de mettre fin à l'activité de sa machine PM3 qui produit le papier recyclé, est incompréhensible. Outre les 196 emplois directs qui seraient supprimés du fait de cette décision, c'est à court terme l'existence même du site de Grand-Couronne qui est menacée, et, plus largement celle de toute l'industrie papetière française. La filière de recyclage du papier est pourtant un marché porteur et en pleine expansion.
Faute d'une filière de tri suffisamment organisée, il semble impossible de produire en France de la pâte à papier 100 % recyclée destinée au papier de bureau. Avec un minimum de coordination, on pourrait collecter spécifiquement le papier de bureau de sites comme la Défense, de grandes entreprises et de services publics. Les Anglais le font dans le quartier de la City.
Le site de Chapelle Darblay est tout à fait adapté pour accueillir des transformations industrielles comme celle du papier kraft dont on va avoir d'autant plus besoin que la loi sur la transition énergétique interdit, à compter du 1er janvier 2016, l'usage de sacs plastiques. La machine PM3 que s'apprête à fermer le groupe UPM produit, entre autres, ces sacs à moindre coût.
Quelles mesures concrètes le gouvernement entend-il mettre en oeuvre, outre la nomination d'un chargé de mission au niveau national sur la filière cellulose, pour la sauvegarde des 196 emplois menacés à Grand-Couronne et, plus largement, pour l'avenir de l'industrie papetière du pays ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget . - Le développement du numérique impacte la filière papeterie : - 17 % sur le papier ces quatre dernières années. Le défi peut toutefois se transformer en opportunité à condition de miser sur l'innovation. L'État poursuivra ses soutiens au Centre technique du papier, et à l'Institut technologique « papier, cellulose, bois, ameublement ». Nous encourageons aussi la structuration de la filière, via les comités stratégiques de filière « chimie matériaux » et « forêt bois ». Un chargé de mission pour la filière cellulose a été nommé, certaines de ses recommandations ont déjà été insérées dans la loi sur la transition énergétique.
L'entreprise UPM a décidé l'arrêt de quatre de ses dix-huit machines en Europe, dont une au Royaume-Uni et deux en Finlande, tirant les conséquences de la baisse structurelle de la demande de papier et de la surproduction en Europe. Elle a en revanche décidé d'investir 3 à 5 millions d'euros pour moderniser la machine 6 du même site.
En Angleterre et en Finlande, la procédure est close. En France, elle est en cours ; nous devons, comme nous l'avons fait à Strasbourg, trouver un projet porteur d'avenir pour cette usine papetière.
M. Thierry Foucaud. - Vous allez un peu vite en besogne : la machine ne fermera peut-être pas, les salariés sont mobilisés face à un groupe qui réalise des bénéfices. Grand-Couronne est voisine de Petit-Couronne qui a été durement frappée par l'affaire Petroplus. Tout le bassin d'emploi de l'agglomération rouennaise est touché. Pourquoi ne pas organiser une collecte comme à la City ? Il faut une concertation entre salariés, État, élus et représentants de cette entreprise qui, je le rappelle, a bénéficié du CICE.
La séance est suspendue à 11 h 25.