Débat préalable au Conseil européen des 19 et 20 mars 2015
Mme la présidente. - L'ordre du jour appelle un débat préalable à la réunion du Conseil européen des 19 et 20 mars 2015 à la demande de la commission des affaires européennes.
Orateurs inscrits
M. Harlem Désir, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des affaires européennes . - Je remercie le Sénat et la commission des affaires européennes pour l'organisation de ce débat sur le prochain Conseil européen des 19 et 20 mars. Je tiendrai le plus grand compte de vos observations dans les négociations à venir ; et ce, dès la semaine prochaine lors du Conseil des affaires générales. Ce Conseil européen s'étendra sur deux jours en raison des nombreux sujets à l'ordre du jour, à commencer par l'Union de l'énergie. La France la souhaite, elle représente une nouvelle étape dans la construction européenne.
La première communication de la Commission du 25 février dernier concerne le cadre stratégique, autour de l'efficacité et de la sécurité énergétiques, la décarbonation de l'économie, du marché intérieur et de la politique de recherche et d'innovation. Ces cinq piliers cohérents assurent l'équilibre de l'accord auquel nous sommes parvenus sur le cadre énergie-climat pour 2030 d'octobre 2014.
Pour construire l'Europe de l'énergie il faut avancer sur toutes les dimensions de l'Union de l'énergie, et non pas comme certains le voudraient mettre seulement l'accent sur le marché intérieur ou la sécurité de l'approvisionnement énergétique. Restons vigilants sur le respect de cette approche globale, cohérente et intégrée et sur certains sujets de régulation comme les tarifs réglementés.
La deuxième communication de la Commission porte sur les interconnexions. L'objectif est d'atteindre 10 % d'interconnexions électriques pour les États où le niveau minimum d'intégration n'est pas atteint comme les pays baltes, l'Espagne et le Portugal.
Lors du sommet de Madrid, le président Juncker a montré l'importance qu'il attache à ce sujet et le soutien financier de la Commission, essentiel notamment pour les interconnexions entre l'Espagne et la France. Une nouvelle ligne souterraine a été inaugurée par le Premier ministre français et le président du Conseil espagnol. D'autres lignes passeront par la mer, au fond du golfe de Gascogne, ou franchiront les Pyrénées.
La troisième communication porte sur la COP21. La Commission insiste sur l'ambition sur le fond comme sur la forme.
Sur la diplomatie du climat la Commission souligne le besoin d'une intervention mobilisatrice des 28 États membres en 2015, en direction de tous les acteurs, États parties à la négociation, ONG, entreprises et collectivités.
Je me réjouis de l'accord intervenu au dernier Conseil environnement. L'Europe est exemplaire et en ordre de marche. Nous attendons des grands émetteurs, États-Unis et Chine en particulier, qu'ils s'engagent à leur tour.
L'Europe se mobilisera aux côtés de la France.
Deuxième grand sujet à l'ordre du jour du Conseil européen, le semestre européen et particulièrement la croissance et l'emploi, stimulés par l'investissement. Les États membres devront en tenir compte dans leurs programmes nationaux de réforme.
Le Conseil Ecofin à Bruxelles aujourd'hui a pris une décision sur la trajectoire budgétaire française : les États membres ont approuvé la trajectoire que la France s'était fixée à elle-même. Il s'agit de réduire le déficit sans nuire à la croissance et à l'emploi. C'est la ligne que nous avons constamment défendue.
La politique monétaire apporte sa contribution à la reprise, avec le lancement hier d'un programme de rachat de dettes. Le niveau de l'euro a baissé, comme le Premier ministre l'avait souhaité dans sa déclaration de politique générale c'est bon pour nos exportations.
Le pacte de responsabilité en France est entré en vigueur depuis le 1er janvier. Le CICE monte en puissance. De nouvelles marges sont données aux entreprises pour investir. Les indicateurs de croissance s'améliorent, l'emploi des jeunes aussi.
Deuxième décision de l'Ecofin d'aujourd'hui : il appuie le plan Juncker de 315 milliards d'euros proposés par la Commission européenne avant que s'ouvrent les négociations avec le Parlement européen. J'étais aujourd'hui même à Strasbourg. Nous devrions ainsi tenir l'échéance de juin 2015 pour soutenir des projets dès cet été.
La Banque européenne d'investissement s'est engagée sur ses fonds propres par anticipation. La France elle aussi s'engage pleinement. Une participation de 8 milliards d'euros est prévue via la Caisse des dépôts et consignations et Bpifrance au plan Juncker.
Des sujets internationaux urgents seront abordés, notamment la situation en Libye ainsi que sur les propositions du sommet de Riga concernant le partenariat oriental, et évidemment sur l'Ukraine. La situation dans l'est de ce pays, un peu plus d'un mois après l'accord de Minsk, sera abordée. Le cessez-le-feu tient dans l'ensemble. Le retrait des armes lourdes s'est engagé et des échanges de prisonniers ont eu lieu. Cette amélioration est néanmoins fragile et nous devons faire preuve d'une vigilance extrême. Nous devons renforcer la mobilisation européenne pour nous assurer du plein respect des accords de Minsk, et, par le dialogue politique, pour rétablir des relations normales entre la Russie et l'Ukraine ainsi qu'entre la Russie et l'Union européenne.
La France et l'Allemagne ont reçu le soutien des États membres. Telles sont les principales questions à l'ordre du jour de ce Conseil européen, face aux urgences présentes, tourné vers l'avenir avec cette Union de l'énergie, étape décisive dans l'histoire de la construction européenne. (Applaudissements sur les bancs socialistes et RDSE)
M. Simon Sutour . - Depuis quelques mois, des signaux européens tangibles montrent que l'urgence n'est plus à l'austérité, mais enfin à la croissance et à l'investissement. Malgré ces signaux, la concrétisation des investissements nécessaires risque de se faire attendre. Le renforcement de l'UEM a été reporté à une date ultérieure et le volet social demeure le parent pauvre de cette nouvelle Commission européenne. Terrorisme, Ukraine, Grèce, de nombreux sujets d'actualité se sont invités dans les discussions européennes. Il faut appeler à plus d'audace nos dirigeants européens. La Banque centrale européenne ne s'y est pas trompée sur la Grèce, qui place les dirigeants politiques devant leurs responsabilités. Il faut définir une politique de sortie de crise. La consolidation budgétaire ne peut oublier ses conséquences sociales et économiques. Président du groupe d'amitié avec ce pays, je rappelle que la Grèce n'est pas un pays comme un autre : elle a adhéré à l'Union après la dictature des colonels, mouvement que la France a soutenu ; c'est dans ce pays qu'est née la démocratie. Dêmos : le peuple en grec. Ce pays est le berceau de notre civilisation.
Sur la communauté de l'énergie, nous ne pouvons plus nous permettre le luxe d'attendre. Les socialistes l'appellent de leurs voeux depuis Jacques Delors. Le cadre stratégique de 2009 avait une portée très limitée.
L'Union européenne se doit d'adopter d'ici la COP21 une feuille de route ambitieuse. Agissons sur les économies d'énergie, la fin de la dépendance aux hydrocarbures, une place importante pour le nucléaire, avec les garanties de sûreté nécessaire.
M. Jean Bizet, président de la commission des affaires européennes. - Très bien.
M. Simon Sutour. - Il faut déclarer la guerre à la pauvreté énergétique, soutenir l'investissement dans les secteurs créateurs d'emplois comme les infrastructures et la recherche innovation. Le secteur énergétique souffre d'un sous-investissement chronique. Comment le plan d'investissement européen pourrait-il financer à la fois des projets publics et privés et la recherche et l'innovation pour conforter nos filières d'excellence ? Ne faudrait-il pas envisager un instrument d'investissement spécifique ?
L'Union européenne doit s'exprimer d'une seule voix à l'égard des pays tiers mais les États membres doivent conserver la responsabilité première de la sécurité de leurs approvisionnements.
Mais il faut développer la solidarité entre États membres.
Quant à la politique extérieure, je suis d'accord, monsieur le ministre, avec ce que vous avez déclaré sur la Libye, source importante de déstabilisation.
En Ukraine, la situation est loin d'être stabilisée. Le cessez-le-feu est à mettre au crédit du couple franco-allemand, mais il reste fragile. La situation peut rapidement basculer. Il est nécessaire de réajuster les sanctions. On peut regretter que la réunion de Riga n'ait pas mieux accompagné les efforts de Paris et de Berlin. Rien ne remplacera un dialogue apaisé et constructif avec le grand pays qu'est la Russie.
Monsieur le ministre, nous savons que vous faites au mieux. Nous comptons sur vous pour soutenir le combat de la France en faveur d'une Europe plus politique et, surtout, plus sociale. (Applaudissements sur les bancs socialistes ; Mme la présidente de la commission des finances, M. le président de la commission des affaires européennes et Mme Colette Mélot applaudissent aussi)
M. Michel Billout . - En Ukraine, les populations souffrent, aux portes de l'Union. Les relations avec la Russie ont un impact direct sur l'Union de l'énergie. Yalta a coupé l'Europe en deux, en fonction du rapport de force militaire de l'époque, au mépris de la volonté des peuples. Faut-il dessiner une nouvelle frontière est-ouest en Ukraine aujourd'hui ?
Le cessez-le-feu a bien du mal à être respecté. Si l'action diplomatique mérite d'être saluée, je m'interroge sur certaines conséquences des accords de Minsk, qui obligent l'Ukraine à modifier sa Constitution, intensifient la notion de décentralisation, posent la question de l'autorité politique nationale. Ils incarnent néanmoins une volonté de solution politique, qui a ma préférence par rapport à l'envoi de 3 000 soldats à la frontière russe par les États-Unis avec chars, véhicules de combat et hélicoptères. Et que penser de la volonté de Jean-Claude Juncker de créer une armée européenne ? Elle ne va pas, c'est le moins que l'on puisse dire, dans le sens d'un apaisement.
On est en droit d'attendre un peu plus de sérieux du président de la Commission. Sa déclaration tourne le dos aux coopérations renforcées qui mériteraient plus de volontarisme, face aux problèmes de chaine de commandement et de budget notamment... En outre l'armée incarne une nation et il n'y a pas de nation européenne. Monsieur le ministre, quelle est la position de la France face à ces déclarations de M. Juncker ?
En ce qui concerne la dépendance énergétique de l'Union vis à vis de la Russie, celle-ci est taxée de « fournisseur non fiable », utilisant son gaz comme une arme politique. Or la Russie a changé de politique, elle a renoncé à son projet de gazoduc contournant l'Ukraine et choisit de fournir ses clients aux frontières de l'Union.
Nous nous interrogeons sur les « nouveaux partenariats » que compte développer l'Union européenne. Il est prématuré de compter sur l'Iran, l'Irak, la Turquie, l'Azerbaïdjan ou le Turkménistan. En coopérant avec eux, l'Union européenne donne son feu vert aux violations des droits de l'homme commises dans ces pays et dénoncées par Amnesty International. Ne fermons pas les yeux sur les pratiques de ces pays.
Sur le marché intérieur de l'énergie, l'Union de l'énergie implique que les politiques nationales « non coordonnées » devront être remplacées par une réglementation « ambitieuse », qui remettra en cause le pouvoir des États en matière de tarification. L'accès à l'énergie doit pourtant être garanti à chaque citoyen européen. Tout ne doit pas être livré au marché.
Oui, l'énergie doit contribuer aux objectifs climatiques, elle ne doit en aucun cas être considérée comme une simple marchandise. (Applaudissements sur les bancs CRC ; M. Jean-Yves Leconte applaudit aussi)
M. Jean-Claude Requier . - La semaine dernière, le Sénat a adopté le projet de loi relatif à la transition énergétique et à la croissance verte. L'Union européenne de l'énergie est à l'ordre du jour du prochain Conseil européen. La Communauté européenne a été fondée sur une ambition énergétique, avec la Ceca et l'Euratom.
Les initiatives s'accélèrent depuis quelques années. Bien souvent, il s'est agi de déréguler les marchés. Il s'agit désormais de les faire converger, ce qui est un progrès.
Le RDSE, attaché à l'approfondissement de l'Europe, marque son intérêt pour une politique énergétique commune. Notre dépendance aux exportations de l'Opep et de la Russie constitue une faiblesse, l'Europe doit garantir ses approvisionnements et améliorer ses réseaux interconnectés.
L'Union a souscrit des engagements pour 2020 et 2030, déclinés par la France dans la loi sur la transition énergétique.
La politique énergétique européenne ne doit pas s'en tenir à la réduction des émissions de CO2, qu'elles émanent des vaches ou non... (Sourires) Elle doit se soucier de sécuriser son approvisionnement. La coordination ne va pas de soi vu la diversité des situations : la France dispose du nucléaire, la Pologne est totalement dépendante du gaz russe.
On ne peut que souhaiter le développement des énergies renouvelables. Le potentiel maritime de l'Europe est important. En raison de sa consommation à la hausse, l'Union européenne doit pouvoir compter sur un approvisionnement stable.
Je passe à nos relations avec la Russie, impliquée dans la crise ukrainienne. Je salue à cet égard la démarche franco-allemande qui a abouti à l'accord Minsk II.
Nous devons tout faire pour contenir les tensions avec la Russie, en menant une politique de voisinage raisonnable car elle ne renoncera pas à créer une sorte de cordon sanitaire par rapport à l'Otan, comme nous l'avons vu en Transnistrie et en Crimée. (Applaudissements sur les bancs socialistes et RDSE)
M. Philippe Bonnecarrère . - Merci monsieur le ministre pour votre fidélité à ce débat qui met en perspective les évènements.
La Commission européenne et la BCE font preuve d'un activisme en faveur de la reprise économique. Il faut rendre hommage à la Commission Juncker à cet égard. La France est face à ses contradictions, compte tenu de sa difficulté à réformer. Dans quelles conditions aborde-t-elle ce Conseil ? Pour gagner du temps ou prendre sa part des efforts en faveur de la reprise économique ?
Notre pays fait face à un triple déficit budgétaire, commercial et sur le marché du travail, que l'on raisonne en taux de change ou en nombre d'heures de travail. Plusieurs délais successifs ont été accordés à notre pays.
Il serait opportun de faire preuve de pédagogie envers nos concitoyens sur le déficit structurel. Comment, monsieur le ministre, voyez-vous la correction pluriannuelle qui lui est demandée, de l'ordre de 30 milliards d'euros ? Je suis réservé sur les 50 milliards annoncés, dont 30 milliards sont destinés à financer une diminution des charges sociales...
Je ne reviens pas sur la première génération de réformes structurelles, pour ne pas être discourtois... Je suis attaché en revanche à la seconde génération, c'est-à-dire à la manière de trouver les 50 milliards d'euros d'économies annoncés. Nous avons de grandes interrogations sur la vertu du projet de loi Macron.
Pour être objectif, je vous apporte mon soutien sur la défense européenne. Entendre le président Juncker évoquer une défense européenne ne me choque pas. En revanche, il est peu convenable que la plupart des pays d'Europe vivent sous la protection de l'OTAN d'une part et d'autre part de la Grande-Bretagne et de notre pays. Il ne me choquerait pas que nos dépenses en faveur de notre défense, donc de la défense européenne, soient comptabilisées à part. Faudra-t-il aller vers une loi de finances rectificative ?
J'avais prévu aussi d'évoquer les différences de taux de croissance en Europe. Mon propos n'a d'autre but que de briser nos faux-semblants.
Sur l'Ukraine, notre groupe a un spécialiste, M. Pozzo di Borgo. Lors du prochain débat, il pourrait faire un point sur cette question. (Applaudissements au centre et à droite)
M. Jean Bizet, président de la commission des affaires européennes. - Très bien !
Mme Pascale Gruny . - Le prochain Conseil européen traitera de sujets variés et importants.
L'énergie est l'un des problèmes désormais stratégiques pour lesquels l'intégration européenne apporte une valeur ajoutée, alors que le contexte géopolitique est tendu, avec la Russie et au Moyen-Orient.
L'Europe importe 55 % de sa consommation pour une facture de 400 milliards d'euros. L'électricité et le gaz y sont plus chers qu'aux États-Unis. De très lourds investissements sont nécessaires : on les estime à 2 000 milliards d'euros d'ici 2025 pour moderniser, interconnecter et adapter notre réseau aux énergies renouvelables. Or l'Europe de l'énergie est loin d'être une réalité. Le cadre stratégique marque un pas en avant, mais ce n'est que le début d'un processus long et ardu. Le socle intersectoriel proposé représente une bonne base pour discuter.
Les interconnexions et l'intégration du marché intérieur devront entraîner de réelles économies mais il faudra jouer sur la complémentarité des mix énergétiques nationaux. L'énergie nucléaire est pour l'instant le parent pauvre de cette stratégie. C'est sur les entreprises que reposera l'essentiel de la charge de l'investissement. Leur environnement devra donc être favorable.
Dans le secteur du gaz, il faudra adresser des messages forts et cohérents aux partenaires et aux investisseurs. L'équilibre sera difficile à trouver entre coordination, gouvernance globale et liberté pour les États membres de conduire la politique la mieux adaptée à leurs besoins. Notre pays est bien placé avec ses 37 interconnexions sur six frontières.
Les étapes à franchir sont complexes et nombreuses, pour que l'Europe de l'énergie aboutisse au succès que nous souhaitons.
Les relations avec la Russie et la crise ukrainienne ont bien sûr une résonance énergétique très forte.
Les résultats des dernières élections en Grèce nous ont tous interpellés sur la question de la coordination budgétaire, mais, sur le semestre européen, je souligne que la situation française est inquiétante. La Commission considère que le CICE et le pacte de responsabilité n'auront pas d'effets réels sur la croissance, contrairement à leur objectif proclamé.
À politique inchangée, le déficit public français ne pourra pas passer sous la barre des 3 % en 2017. Or le ministre de l'Économie a annoncé, il y a quelques jours, qu'aucun effort supplémentaire d'économies n'était prévu.
Une liste de réformes macroéconomiques devra être présentée d'ici la fin du mois de mai, faute de quoi la France pourrait être mise en demeure. Les carences économiques de la France sont largement connues : son manque de compétitivité exige d'abaisser le coût du travail et de s'attaquer aux rigidités du marché du travail. Ne rien faire serait laisser aller notre pays à l'échec et, à terme, l'Europe car la France est la deuxième économie du continent. Il y va de notre responsabilité. Vous l'aurez compris monsieur le ministre, nos attentes sont fortes ! (Applaudissements sur les bancs UMP et UDI-UC)
M. Jean Bizet, président de la commission des affaires européennes. - Très bien !
Mme Michèle André, présidente de la commission des finances . - Le Conseil européen des 19 et 20 mars intervient après les accords de Minsk II. À titre personnel, je considère que de la résolution de la crise ukrainienne dépend l'avenir de l'Europe politique.
Présidente de la commission des finances, j'attire l'attention sur les lourdes conséquences de cette crise sur notre économie, en particulier pour nos agriculteurs, et les investissements dans les pays de l'Est.
Cette crise met en lumière la nécessité de construire une Europe de l'énergie interconnectée. Au-delà des principes, il faudra parler des financements : il est question d'investissements de 1 000 milliards sur cinq ans...
Cela m'amène à évoquer le dernier sujet à l'ordre du jour du Conseil européen : le semestre européen. La Grèce, l'Ukraine sont des défis historiques qui nous obligent à présenter une politique résolument tournée vers la croissance. Le 27 février dernier, la Commission européenne a repoussé de deux ans le délai de correction de nos déficits. Nos partenaires allemands considèrent cela justifié ; ce geste, disent-ils, est nécessaire pour rétablir la confiance des investisseurs. De même, dans ses recommandations au titre de la procédure de correction des déséquilibres macroéconomiques, la Commission européenne a fixé l'échéance au mois de mai. Ce mécanisme peut entraîner des sanctions. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous éclairer sur les orientations de la Commission ?
Tout cela est bien complexe. Pour que l'Europe reste une amie, nous avons besoin d'éclaircissements. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. Jean Bizet, président de la commission des affaires européennes . - Le débat préalable au Conseil européen est un rendez-vous auquel les sénateurs sont très attachés. Merci au président du Sénat de l'avoir programmé et au ministre de sa disponibilité pour cette discussion au lendemain de l'adoption du projet de loi pour la transition énergétique.
L'Europe importe 53 % de sa consommation en énergie, la plupart du gaz russe transite par l'Ukraine. C'est dire l'importance de l'Union de l'énergie, après la baisse du prix de l'énergie aux États-Unis qui a fait suite à la révolution du gaz de schiste. La France a une grande expérience en matière de nucléaire, élargissons nos objectifs décarbonés à cette énergie dans la perspective de la COP21.
Je veux insister sur le rôle moteur de la France et de l'Allemagne : ce sont les deux principaux producteurs et consommateurs d'énergies renouvelables, et d'énergie tout court. Leur coopération est primordiale, comme elle l'a été pour aboutir aux accords de Minsk II. Si cet accord demeure fragile, il n'y a pas d'autre solution que politique. Le Sénat qui a une grande expérience de la décentralisation, est prêt à la partager dans le cadre de l'OSCE ; c'est ce que le président du Sénat a rappelé récemment en Russie.
Autre sujet, le partenariat oriental. Soyons pragmatiques et privilégions une approche par projet, dans le cadre de la déclaration de Prague de 2009 et du respect des principes de conditionnalité et de différenciation - la politique de voisinage n'est pas la politique d'élargissement.
Enfin, ce Conseil européen concernera le semestre européen. Notre commission tiendra demain une réunion ouverte à tous avec le vice-président de la Commission Dombrovskis. À la France de respecter ses engagements - la lecture des recommandations de la Commission, que je vous conseille, est édifiante ; à tous de s'imposer une discipline commune, sans quoi la zone euro ne peut pas fonctionner.
Avec l'Allemagne, la France a proposé une solution pragmatique pour la Grèce. Nos contribuables sont concernés au plus près : nous avons contribué à hauteur de 70 milliards d'euros au redressement de ce pays. Solidarité, oui, respect des engagements aussi. (Applaudissements sur les bancs UMP)
M. Harlem Désir, secrétaire d'État . - Merci de vos interventions sur l'Europe de l'énergie. La lutte contre la précarité énergétique, monsieur Sutour, relève bien de la politique de l'énergie, et non seulement de la politique sociale. Les tarifs réglementés participent aussi de la compétitivité de notre économie, M. Bizet l'a rappelé en parlant du nucléaire. La mobilisation du fonds européen d'investissement stratégique sera effectivement un élément déterminant de la réussite de l'Europe de l'énergie. M. Billout a eu raison d'insister sur la gouvernance et l'organisation du marché de l'énergie.
Concernant le semestre européen, la recommandation de la Commission européenne, adoptée aujourd'hui par le Conseil Ecofin, converge avec notre propre stratégie budgétaire. Nous en sommes conscients, notre situation impacte l'ensemble de la zone euro. Cependant, il faut tenir compte de la situation économique : le redémarrage de la croissance, et elle redémarre, contribuera à la consolidation budgétaire. La Commission a elle-même parlé de flexibilité, l'accord est aujourd'hui unanime pour dire qu'une politique de restriction budgétaire trop sévère a un effet de contraction sur l'activité.
La loi de finances pour 2015 repose sur une prévision de croissance de 1 %, qui correspond à celle de la Commission - d'autres organismes étant même plus optimistes -, elle est solide. En 2014, la croissance était de 0,4 %, le redémarrage est donc là. Le dialogue avec la Commission se poursuit : en juin, nous présenterons la manière dont nous atteindrons les 0,5 % d'effort structurel - après l'échéance de la présentation du programme de stabilité et du programme national de réformes en avril. Nous sommes déterminés à engager des réformes de structure : la loi NOTRe, la loi sur la carte des régions, la simplification des normes, le projet de loi sur l'activité et la croissance ; François Rebsamen présentera bientôt une loi sur le dialogue social.
Nous sommes aussi déterminés à réduire les prélèvements obligatoires tout en maintenant un haut niveau de solidarité et de services publics, auquel les Français sont très attachés. Nous pouvons avancer sans casser notre modèle social et républicain. L'Europe était à Paris, dans la rue, le 11 janvier pour dire qu'on ne céderait pas au terrorisme mais aussi pour défendre son modèle de société, le modèle de liberté et de solidarité qui est à l'origine du projet européen.
C'est vrai, le président de la Commission européenne a utilisé une expression audacieuse, celle d'armée européenne. Pour nous, il faut d'abord faire avancer la politique européenne de défense et de sécurité, renforcer nos capacités de défense commune et nos outils collectifs - cela a été évoqué lors du Conseil de décembre dernier. Nous voulons mutualiser davantage les dépenses d'Opex à travers le mécanisme Athena - qui sont supportées aujourd'hui par quelques États membres. Nous souhaitons que chaque pays européen consacre 2 % de son budget à la défense, dont 20 % à la recherche et à l'innovation.
Le sommet de Riga a confirmé la distinction entre politique de voisinage et politique d'élargissement.
S'agissant de l'Ukraine, les sanctions doivent conduire à une solution politique. Les sanctions sectorielles arrivent à échéance le 31 juillet prochain, elles pourront évoluer en fonction du respect des accords de Minsk. Des élections doivent avoir lieu à l'automne dans l'est du pays - c'est la condition d'une stabilité durable une fois que nous aurons obtenu le respect des accords de Minsk II. En parallèle, nous continuons de soutenir l'Ukraine à travers l'Europe et le FMI, pour moderniser son administration et lutter contre la corruption.
Hier, lors de la réunion du Conseil Ecofin, nous avons décidé de continuer à travailler avec le nouveau gouvernement grec sur les réformes envisagées. Les Grecs ont choisi le changement après des années d'austérité à l'effet récessif ; le nouveau Premier ministre respecte son engagement de campagne mais il a aussi la volonté de travailler dans le cadre de la zone euro - il me l'a confirmé. Nous continuons d'assister la Grèce en matière de réforme fiscale, de réforme administrative. C'est un devoir politique pour tous les États membres que d'aider ce pays à vivre son destin dans la communauté politique qu'est l'Europe. C'est la seule option sur laquelle nous travaillons.
Merci encore pour ce débat, pour votre soutien à l'Europe de l'énergie. La France se rendra au Conseil européen des 19 et 20 mars dans un esprit de détermination, de leadership et d'engagement. (Applaudissements)
Débat interactif et spontané
Mme Fabienne Keller . - Il y a quelques jours, la Commission européenne a accordé un nouveau délai, jusqu'en 2017, à la France pour réduire son déficit en dessous des 3 %. Elle a rappelé que 4 milliards d'euros d'économies structurelles supplémentaires seraient nécessaires. Comment ? La loi NOTRe ? On ne voit pas où sont les économies. Quant aux grandes régions, elles entraîneront des charges supplémentaires dans un premier temps, avant d'éventuelles économies, qui ne sont pas avérées. La simplification des normes ? Attendons de voir. Le projet de loi Macron ? Il ne s'appliquera pas en 2015...
Nous devons présenter des réformes d'ici mai. Comment crédibiliser ces engagements, sinon par un projet de loi de finances rectificatif ? Nos partenaires européens attendent que la France prenne enfin des décisions de fond et redonne espoir à l'ensemble de l'Europe.
M. Harlem Désir, secrétaire d'État. - Vous avez raison, la fusion des régions et la clarification des compétences auront des effets à terme.
Mme Fabienne Keller. - On n'en sait rien !
M. Harlem Désir, secrétaire d'État. - Nous souhaitions tous simplifier le millefeuille ; nous, nous l'avons fait. (Rires et marques d'ironie à droite)
M. René-Paul Savary. - Provocateur !
M. Harlem Désir, secrétaire d'État. - Le ministre des Finances travaille à documenter ces 4 milliards d'économies supplémentaires. Vous le savez, nous avons dû renforcer notre corps enseignant, engager un milliard d'euros de plus après les attentats de janvier pour lutter contre le terrorisme - le Premier ministre a demandé que ce soit par redéploiement. Nous tiendrons nos engagements tout en respectant nos priorités et sans affecter la croissance.
Notre lutte impitoyable contre la fraude et l'évasion fiscales, la Commission européenne l'a noté, a porté ses fruits : 2 milliards d'euros supplémentaires au budget de l'État en 2014 ; on prévoit la même somme pour 2015. Les leviers d'action existent.
M. Richard Yung . - La présidence lettonne avance une proposition qui nous cause quelques soucis. À peu de choses près, elle reprend une proposition du commissaire Michel Barnier, elle-même reprise de M. Vickers, qui n'avait pas été plus loin que la fin de la Commission Barroso. Cette proposition revient à classer les banques selon la taille de leur bilan, et non du niveau de leurs risques. Cela vise uniquement la France, puisque les grandes banques allemandes ont migré à Londres et que peu de pays ont des banques universelles comme les nôtres. J'espère que la France défendra ses banques et sa législation bancaire.
M. Harlem Désir, secrétaire d'État. - Ce projet de règlement est seulement en phase de discussion interne. La France continue de défendre son modèle de banque universelle. Avec la loi sur la séparation des activités bancaires, elle a répondu au problème posé. Il n'y a pas de raison d'aller plus loin : toutes les banques françaises ont franchi avec succès le stress test européen, preuve que notre législation assure la stabilité bancaire.
MM. Jacques Chiron et Richard Yung. - Très bien !
Mme Catherine Morin-Desailly . - Ma question porte sur la récente décision de la Cour de justice de l'Union de porter le taux de TVA sur le livre numérique au taux normal et non pas au taux réduit qui s'applique au livre papier et doit, donc, pour la France, s'appliquer à tous les livres, quel que soit leur support.
Certes, ce sujet n'est pas à l'ordre du jour du prochain Conseil européen mais l'enjeu est de taille : le taux de TVA réduit sur le livre numérique est indispensable pour favoriser la diffusion des oeuvres d'expression européenne et développer le marché unique numérique. L'Allemagne défend cette même position.
Je suis consternée par la décision de la Cour de justice européenne, qui va à contre-courant de la politique en faveur du développement du numérique. Il y a la question fiscale mais aussi celles de la régulation concurrentielle, de la protection des données personnelles et de la politique industrielle. Quelle stratégie le gouvernement entend-il suivre ? Il est incroyable que la seule mesure envisagée au niveau européen soit la révision de la directive de 2001 sur les droits d'auteur... Comptez-vous vous mobiliser, monsieur le ministre ? L'enjeu est crucial. (Applaudissements sur les bancs UDI-UC)
M. Harlem Désir, secrétaire d'État. - La Cour de justice de l'Union a en effet jugé que l'application du taux réduit de TVA au livre numérique, que nous avons appliqué par parallélisme des formes, contrevenait à la directive TVA de 2006. Nous défendons le principe de la neutralité technologique pour les produits culturels et allons demander à la Commission de faire des propositions en ce sens. La voie naturelle serait de réviser la directive de 2006 - ce qui impose l'unanimité. Il serait absurde d'agir autrement quand l'Europe a décidé de faire du numérique un de ses grands chantiers d'avenir. Je vous rejoins totalement, nous mènerons ce combat avec l'Allemagne et d'autres pays.
Mme Nicole Duranton . - Le prochain Conseil européen abordera les relations de l'Union européenne avec la Russie et le partenariat oriental.
Tous les responsables européens, tous les parlementaires, les membres de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, dont je suis, sont préoccupés par l'application des accords de Minsk II. Nous nous réjouissons du cessez-le-feu, mais ce qu'on appelle pudiquement le « conflit ukrainien » ne doit pas nous faire oublier la réalité : l'annexion de la Crimée est-elle considérer comme un fait irrévocable ? Les ministres des affaires étrangères de l'Union ont renoncé à la possibilité de nouvelles sanctions contre la Russie...
Nadia Savtchenko, membre comme moi de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, est détenue en Russie depuis juin 2014 et a commencé une grève de la faim. La justice russe ne la considère pas comme un otage et affirme avoir de sérieuses raisons de l'inculper. Qu'en pense le gouvernement ?
Les institutions européennes doivent adopter une politique diplomatique plus claire à l'égard de la Russie en insistant sur le fait que les accords d'association, tel celui signé avec la Moldavie, ne sont pas un préalable à l'adhésion ni ne concurrencent l'union euro-asiatique proposé par le Kremlin. (Mme Colette Mélot applaudit)
M. Harlem Désir, secrétaire d'État. - Nous ne reconnaissons pas l'annexion de la Crimée et défendons la souveraineté de l'Ukraine ; nous demandons la libération de Nadia Savtchenko.
Nous plaidons aussi l'apaisement. Les initiatives du président de la République et de la Chancelière ont été saluées et soutenues par tous les membres du Conseil européen. La seule issue à cette crise passera par la voie politique et diplomatique. Cela passe par la libération des otages, le respect de la frontière, le rétablissement des relations économiques normales, afin notamment - nous sommes intervenus en ce sens - que l'Ukraine ne soit pas privée de gaz.
Telle est notre feuille de route. Tel est le sens des initiatives franco-allemandes, soutenues par l'Union européenne. Il n'y a pas d'issue militaire à ce conflit. À chaque fois qu'il y a eu une escalade militaire, un désordre humanitaire est survenu et la situation a empiré pour l'Ukraine. Nos objectifs sont de ramener les Ukrainiens et les Russes à la table de négociation, de faire cesser le soutien aux séparatistes, de veiller au respect des accords de Minsk.
M. Simon Sutour. - Bis repetita placent.
M. Jean-Yves Leconte . - Sur l'Ukraine j'interroge, une fois n'est pas coutume, le président de la commission des affaires européennes... Je salue l'action franco-allemande pour faire en sorte qu'émerge une solution européenne. Personne n'est dupe de l'engagement russe. La situation à Marioupol sera un test. Cette guerre n'est pas une guerre civile. J'ai aussi une pensée pour Mme Savtchenko.
Ce qui s'est passé l'an dernier en Ukraine, c'est une révolution. Cela ne devrait faire peur ni en France ni en Russie. Des réformes sont en cours en Ukraine, la tâche est énorme ; la coopération interparlementaire est indispensable pour les faire réussir. Monsieur le président, je souhaiterais que nous accompagnions, avec nos collègues européens, nos collègues ukrainiens, pour faire advenir une vraie démocratie.
M. Jean Bizet, président de la commission des affaires européennes . - J'ai été informé par le président Gérard Larcher qui était avec vous et d'autres collègues à Moscou. Cette voie de la coopération interparlementaire est à creuser. La piste de la « décentralisation approfondie » peut être travaillée dans ce cadre, dans le respect évidemment des frontières et de la souveraineté de l'Ukraine et aussi des accords de Minsk. Une certaine autonomie des provinces de l'est pourrait se concevoir. Soyons ouverts, donc, et réalistes.
Mme Colette Mélot . - Je reviens sur l'énergie. Avec un solde exportateur net de 65 TWh en 2014, la France est aux toutes premières places mondiales, elle est le premier exportateur européen. C'est en s'appuyant sur la sécurité de cette production que l'Europe, en particulier l'Allemagne, a pu développer les énergies renouvelables - qui sont extrêmement fluctuantes. La stabilité, le volume et la compétitivité de notre production électrique proviennent en grande partie du nucléaire. Or cette énergie est le parent pauvre de la stratégie présentée le 25 février dernier.
La France, avec d'autres États membres, a envoyé un courrier à la Commission européenne pour souligner le rôle important du nucléaire pour la sécurité d'approvisionnement et la compétitivité de l'économie, ainsi que son faible niveau d'émission ; elle a demandé que les mécanismes de financement de l'Union de l'énergie s'appliquent aux nouveaux projets de la filière nucléaire. Je me réjouis que la France tienne ce langage au niveau européen.
Mais la loi de transition énergétique prévoyait, avant son passage au Sénat, un calendrier de réduction de la part du nucléaire, et le plafonnement du parc nucléaire à son niveau actuel, à rebours de la vision européenne d'un marché européen de l'énergie efficacement interconnecté, respectueux des choix énergétiques de chaque État membre. Grâce au nucléaire, la France joue un rôle stabilisateur pour l'ensemble du marché électrique européen.
Monsieur le ministre, quelle est la stratégie en la matière du gouvernement et de la majorité, au niveau national et européen ?
M. Harlem Désir, secrétaire d'État. - Vous faites référence à une lettre de Ségolène Royal à la Commission européenne, qui a fait valoir notre approche équilibrée et globale de la politique énergétique européenne et souligné l'apport du nucléaire : réduction de la dépendance énergétique et des émissions de gaz à effet de serre, filière d'excellence créatrice d'emplois.
Nous défendons la part du nucléaire nécessaire, que le projet de loi de transition énergétique plafonne au niveau actuel. Le volume ne diminue donc pas. D'anciennes installations comme Fessenheim seront remplacées. Pour le reste, l'objectif est de 50 %, compte tenu de la montée en puissance des énergies renouvelables.
Nous demandons au niveau européen que l'on ne remette pas en cause le libre choix des États. Le Premier ministre aura des discussions demain en Pologne à ce sujet. J'aurai le plaisir de l'y accompagner. Je vous en rendrai compte au retour.
M. Jean Bizet, président de la commission des affaires européennes . - Je vous remercie pour votre disponibilité et pour la clarté de vos réponses, monsieur le ministre.
J'ai deux messages à vous transmettre. Le premier concerne le plan Juncker. Avec la baisse des dotations de l'État aux collectivités locales, tout ce qui concourra à injecter dans les territoires une quote-part des 315 milliards d'euros sera bénéfique ; le Sénat, représentant des collectivités territoriales, y sera très attentif et je souhaite que vous le soyez vous-même. À travers l'ARF et l'AMF, nous devons aider les élus locaux à mobiliser ces fonds. La conjoncture, avec le renouvellement des instances régionales, ne s'y prête guère, mais le Sénat y veillera.
Le deuxième concerne le semestre européen. Je voudrais partager votre optimisme, monsieur le ministre, mais j'avoue être inquiet. La France est placée avec la Croatie, la Hongrie, l'Italie et le Portugal parmi les pays en déficits excessifs. La Commission nous invite à réformer. Un projet de loi est devant nous que nous examinerons ici en avril. Lors d'une table ronde, M. Macron a eu l'honnêteté de reconnaître qu'il ne bouleversera pas l'économie française. Sachez que le Sénat n'adoptera pas une attitude négative sur le sujet mais je ne vois pas en quoi la mise sous tutelle de l'Autorité de la concurrence des professions réglementées apportera plus de compétitivité, non plus que le travail du dimanche. J'aimerais néanmoins partager votre optimisme. Il vous faudra trouver 4 milliards, plus les 3 milliards de la programmation militaire... Rendez-vous le 10 juin.
Le débat est clos.
Prochaine séance demain, mercredi 11 mars 2015, à 14 h 30.
La séance est levée à 23 h 25.
Jean-Luc Dealberto
Directeur des comptes rendus analytiques